CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ. tgi, 29 août 2025, n° 24/01674
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
Arrêt
Autre
LA COUR
Par acte authentique du 13 octobre 2005, la Banque de la Réunion (la BR) devenue la SA Caisse d'Épargne CEPAC (la CEPAC) a consenti à M. [J] [K] [V] et son épouse Mme [X] [F] [O] un prêt d'un montant de 210.440 euros remboursable en 234 mensualités incluant les intérêts au taux annuel de 3.80 %.
Se prévalant du non-paiement des échéances, la banque a mis en demeure son débiteur de régulariser sa situation d'endettement puis a prononcé la déchéance du terme suivant mises en demeure en date des 15 juin et 9 août 2017.
Suivant acte de cession daté du 20 décembre 2021, la CEPAC à cédé sa créance à la SAS Fonds Commun de Titrisation (FCT) Foncred V, lequel a désigné, le 17 janvier 2022, la SASU EOS France comme l'entité en charge du recouvrement des créances.
Le 23 février 2024, EOS France a fait signifier à M. [V] un commandement de payer valant saisie pour un montant total de 152.661,97 euros et portant sur le bien situé [Localité 13] (Réunion), lieudit [Adresse 12], parcelle cadastrée section AK n°[Cadastre 9]. Ce commandement a été publié le 15 avril 2024 au service de la publicité foncière de Saint-Denis (Réunion) Volume 2024 S n°40.
Par acte du 3 juin 2024, EOS France a fait assigner M. [V] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion, à l'audience d'orientation du 5 juillet 2024 aux fins de voir ordonner la vente forcée du bien précité.
Le cahier des conditions de vente a été déposé au greffe du tribunal judiciaire le 4 juin 2024.
M. [V] a soulevé la nullité du commandement de payer valant saisie.
C'est dans ces conditions que, par jugement rendu le 29 novembre 2024, le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion a statué en ces termes :
« Déclare la SASU EOS France irrecevable en sa procédure de saisie du bien immobilier saisi sis à [Localité 13] (Réunion), [Adresse 12], parcelle cadastrée AK n° [Cadastre 9] suivant commandement délivré le 23 février 2024 et publié le publié le 15 avril 2024 au service de la publicité foncière de Saint Denis (Réunion) Volume 2024 S n°40 ;
Ordonne la radiation dudit commandement ;
Condamne la SASU EOS France à verser à M. [J] [K] [V] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SASU EOS France aux dépens ; »
Autorisé par ordonnance sur requête en date du 27 décembre 2024, EOS France a fait assigner à jour fixe M. [V] par acte d'huissier délivré le 8 janvier 2025, remis au greffe de la cour le 9 janvier 2025.
L'affaire a été renvoyée à une reprise à la demande des parties jusqu'à examen à l'audience du 20 mai 2025.
***
Dans ses dernières conclusions n°2 transmises, EOS France demande à la cour de :
- Infirmer dans toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il a :
.déclaré EOS France irrecevable en sa procédure de saisie,
.ordonné la radiation du commandement délivré le 23 février 2024,
.condamné EOS France à verser à M. [V] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
.condamner EOS France aux dépens ;
Et statuant à nouveau :
Vu les articles L.214-166-1 et suivants du code monétaire et financier, notamment les articles L.214-169, L.214-181 et L.214-183, ainsi que les articles L.511-33 et D.214- 227 du code monétaire et financier,
Vu notamment les dispositions des articles L.311-2, L.311-4 et L.311-6 et des articles R.322-15 à R.322-29 du code des procédures civiles d'exécution,
Vu les articles L.721-5 et L.722-2 du code de la consommation,
Vu les articles L.218-2 du Code de la consommation, 2224, 2231, 2234, 2244 et 2245 du code civil,
- Déclarer recevable la procédure de saisie immobilière diligentée par le FCT Foncred V, représenté par la société France Titrisation et ayant pour recouvreur EOS France, venant aux droits de la CEPAC, laquelle vient elle-même aux droits de la BR, sur le bien immobilier, appartenant à M. [V], débiteur saisi, cadastré section AK n°[Cadastre 9], sis sur le territoire de la commune [Localité 13] (Réunion) et initiée suivant commandement de payer valant saisie immobilière ;
- Dire et juger que le FCT Foncred V, représenté par la société France Titrisation et ayant pour recouvreur EOS France, venant aux droits de la CEPAC, laquelle vient elle-même aux droits de la BR, est titulaire d'une créance privilégiée, liquide et exigible sur M [V], débiteur saisi, et qu'il agit en vertu d'un titre exécutoire au sens de l'article L.311-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
- Constater que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l'article L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution ;
- En conséquence, la dire recevable et bien fondée en ses poursuites et :
- Mentionner dans l'arrêt à intervenir le montant retenu pour sa créance privilégiée, à savoir, la somme d'un montant total, sauf mémoire, de 152.661,97 euros en principal et intérêts arrêtés au 13 février 2024, à parfaire des sommes dues depuis la date du décompte ;
- Rejeter car non fondée la fin de non-recevoir tirée d'une prétendue prescription extinctive ;
- Rejeter toute demande ou contestation contraire élevée par M. [V], intimé et débiteur saisi, car irrecevable et, à défaut, non fondée ;
- Ordonner la vente forcée aux enchères publiques des biens immobiliers suivants :
Désignation des biens saisis
Sur le territoire de la commune de [Localité 13] (REUNION), lieudit vingt-troisième
kilomètre, la parcelle de terrain cadastrée sous les références suivantes :
Section N° Adresse Contenance
AK [Cadastre 9] [Adresse 12] 00ha 04a 66
Ensemble les constructions y édifiées sans exception ni réserve.
Origine de propriété
La parcelle de terrain cadastrée section AK n°[Cadastre 9], située sur le territoire de la commune de [Localité 13] (REUNION) appartient en toute propriété à Monsieur [J] [K] [V], débiteur saisi, car la nue-propriété a été acquise par lui aux termes d'un acte de donation-partage reçu par Maître [L] [Y], notaire à [Localité 15] (REUNION), le 29 juillet 1982, publié au service chargé de la publicité foncière de SAINT PIERRE (REUNION) [fusionné depuis lors avec le service de la publicité foncière de SAINT DENIS (REUNION)], le 1er juillet 1983, sous les références volume 2319 n°3, et l'usufruit a été acquis par lui aux termes d'un acte de renonciation à usufruit reçu par Maître [S] [N], notaire à [Localité 16] (REUNION), le 13 juin 2001, publié au service chargé de la publicité foncière de SAINT PIERRE (REUNION) [fusionné depuis lors avec le service de la publicité foncière de SAINT DENIS (REUNION)], le 27 juillet 2001, sous les références volume 2001 P n°3514.
'Fixer la date de l'audience de vente conformément aux dispositions de l'article R.322-26 du Code des procédures civiles d'exécution,
'Dire que deux visites des immeubles seront organisées dans les deux semaines qui précéderont la vente aux enchères à intervenir par le commissaire de justice qui a dressé le procès-verbal de description des biens, ou tel autre commissaire qu'il plaira à la présente juridiction de désigner, avec, si besoin est, l'assistance de la Force Publique, d'un serrurier ou sous toutes autres modalités qu'il lui plaira de fixer et ce même en cas de surenchère,
'Fixer la mise à prix du bien saisi à la somme de 30.000,00€ (TRENTE MILLE EUROS) hors frais et débours,
'Dire que ledit commissaire de justice pourra, le cas échéant, se faire assister, lors de l'une des visites, d'un ou plusieurs professionnels agréés chargés d'établir ou de réactualiser les différents diagnostics immobiliers prévus par les réglementations en vigueur,
'Ordonner dans le jugement d'adjudication, l'expulsion du débiteur saisi, et de tout occupant de son chef des biens saisis, la décision à intervenir de ce chef devant profiter à l'adjudicataire définitif dès l'accomplissement des formalités prévues au cahier des conditions de vente, notamment le paiement des frais taxés, du prix de l'adjudication et des émoluments et droits d'enregistrement,
'Ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente,
'Ordonner la radiation de toutes les inscriptions grevant les biens saisis aux frais exclusifs de l'adjudicataire après paiement intégral du prix d'adjudication, des frais taxés, des émoluments et charges dans les conditions arrêtées par le cahier des conditions de vente déposé au Greffe,
'Taxer les frais de poursuite exposés, selon état de frais qui sera transmis par le créancier saisissant,
'Taxer les émoluments proportionnels d'instance conformément aux articles A.444-200 et A.444-194 du Code de commerce, majorés selon les dispositions de l'article A.444-53 du Code de commerce,
'Taxer, pour mémoire, les émoluments proportionnels sur l'adjudication, revenant aux avocats de la cause, qui devront être réglés par l'adjudicataire, en sus du prix de vente et des frais taxés ;
- Condamner M. [V], débiteur saisi, à payer au FCT Foncred V, représenté par la société France Titrisation et ayant pour recouvreur EOS France, venant aux droits de la CEPAC, laquelle vient elle-même aux droits de la BR, une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens non privilégiés de première instance et d'appel.
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Dans ses dernières conclusions n°2, M. [V] demande à la cour, au visa des articles L.722-22, L.722-23 et L.2718-2 du code de la consommation et 1245 et 2230 à 2246 du code civil, de :
- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
- Condamner EOS France au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner le même aux entiers dépens de l'instance.
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Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS
A titre liminaire
La cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
EOS France soutient en substance que le délai de la prescription n'était pas expiré au moment de la signification du commandement de payer valant saisie immobilière et qu'il justifie de plusieurs causes interruptives puis suspensives du délai de prescription de la créance détenue sur le débiteur saisi, à savoir :
- le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 16 mai 2018
- les saisies-attribution des 13 et 16 juin 2018
- le paiement volontaire et partiel de la créance le 24 septembre 2018
- la saisine de la commission de surendettement le 20 mars 2018 et le jugement de recevabilité le 14 novembre 2018
- la suspension de la prescription pendant le plan : le plan d'apurement homologué le 20 novembre 2020, entré en vigueur le 31 décembre 2020 prévoyait des échéances jusqu'en octobre 2023 : durant cette période la prescription était suspendue en vertu de l'article 2234 du code civil, le créancier étant empêché d'agir
- la reprise du délai : la prescription a recommencé au plus tôt en octobre 2023, soit à la date d'échec du plan
M. [V] expose que la déchéance du terme ayant été prononcée le 9 août 2017, le délai de prescription de deux ans de l'action en recouvrement a donc commencé à courir à compter de cette date, expirant le 9 août 2019.
Il fait valoir que plusieurs actes ont modifié la date d'expiration de ce délai :
- Un commandement aux fins de saisie vente en date du 16 mai 2018 ayant abouti à un PV de carence en date du 4 juin 2018, ayant interrompu le délai, lequel expirait alors le 16 mai 2020.
- Des mesures de saisie attribution en date des :
.13 juin 2018 ayant interrompu le délai, lequel expirait alors le 13 juin 2020,
.14 juin 2018 ayant interrompu le délai, lequel expirait alors le 14 juin 2020,
.17 octobre 2018 ayant interrompu le délai, lequel expirait alors le 17 octobre 2020,
- Une décision de recevabilité de la demande de surendettement en date du 14 novembre 2018, ayant alors suspendu le délai ayant déjà couru pour 28 jours, et devant expirer le 17 octobre 2020 jusqu'à la décision d'approbation des mesures,
- Une décision d'approbation des mesures en date du 25 juillet 2019, mettant fin à la suspension de la prescription extinctive, ayant précédemment couru pendant 28 jours.
Il précise que les mesures de saisie attribution en date des 10 et 15 janvier 2019 ne sauraient avoir interrompu le délai de prescription puisque ce dernier était alors suspendu par la décision de recevabilité de la demande de surendettement en date du 14 décembre 2018.
Il plaide que déduction faite de ces 28 jours, il restait alors au créancier 1 an, 11 mois et 3 jours pour intenter son action à compter du 25 juillet 2019, soit jusqu'au 30 juin 2021 et que le créancier poursuivant ne justifiant d'aucun acte interruptif ou suspensif de prescription intervenu entre le 25 juillet 2019, date de fin de la suspension, et le 23 février 2024, date de délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière, la créance est donc prescrite depuis le 30 juin 2021.
Sur ce,
Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile ;
Vu l'article L.218-2 du code de la consommation ;
Vu les articles 2228 et suivants du code civil ;
La prescription se compte par jours, et non par heures. Elle est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli.
La suspension de la prescription en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà couru tandis que l'interruption efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien.
Le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.
La prescription ne court pas :
-à l'égard d'une créance qui dépend d'une condition, jusqu'à ce que la condition arrive ;
-à l'égard d'une action en garantie, jusqu'à ce que l'éviction ait lieu ;
-à l'égard d'une créance à terme, jusqu'à ce que ce terme soit arrivé.
La prescription ne court pas ou est suspendue :
- contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.
- contre les mineurs non émancipés et les majeurs en tutelle, sauf pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, les actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts.
- entre époux, ainsi qu'entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
- contre l'héritier acceptant à concurrence de l'actif net, à l'égard des créances qu'il a contre la succession.
- les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation sous certaines conditions
- lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès
Le délai de prescription est interrompu par :
- la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait
- la demande en justice, même en référé (concerne également le délai de forclusion) ; Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure ; L'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ; Elle est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.
- une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution ou un acte d'exécution forcée (concerne également le délai de forclusion)
Seule une prescription acquise est susceptible de renonciation.
La renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription.
S'agissant de la computation des délais, conformément aux dispositions des articles 640 et suivants du code de procédure civile, lorsqu'un acte ou une formalité doit être accompli avant l'expiration d'un délai, celui-ci a pour origine la date de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir.
Lorsqu'un délai est exprimé en jours, celui de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas.
Lorsqu'un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. A défaut d'un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.
Lorsqu'un délai est exprimé en mois et en jours, les mois sont d'abord décomptés, puis les jours.
Tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures.
Sauf en matière de prescription, le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.
Vu les articles L.722-2 et L.722-3 du code la consommation en vertu desquels la décision déclarant la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur" ('.)Les procédures'sont suspendues ou interdites, selon les cas jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L331-6, jusqu'à la décision imposant les mesures prévues par l'article L 331-7, jusqu'à l'homologation par le juge des mesures recommandées (') ou jusqu'au jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Cette suspension et cette interdiction ne peuvent excéder deux ans.
Enfin, aux termes de l'article L.733-16 du même code :
« Les créanciers auxquels les mesures imposées par la commission en application des articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7 ou celles prises par le juge en application de l'article L. 733-13 sont opposables ne peuvent exercer des procédures d'exécution à l'encontre des biens du débiteur pendant la durée d'exécution de ces mesures. »
Selon une jurisprudence constante, la prescription se trouve suspendue pendant le temps d'exécution du plan de surendettement et le débiteur ne peut donc exciper de la prescription de la créance qu'il a reconnue en sollicitant un plan de surendettement.
En l'espèce, le point de départ du délai de prescription, à savoir le 9 août 2017 (déchéance du terme), de même que la nature du délai, à savoir le délai biennal prévu par le code de la consommation, en sont pas contestés.
Le 20 mars 2018 M. et Mme [V] ont saisi la commission de surendettement des particuliers de la Réunion.
Le 16 mai 2018, la CEPAC a signifié à M. et Mme [V] un commandement aux fins de saisie-vente.
Le délai de deux ans a donc été interrompu.
Le 13 juin 2018, la CEPAC a fait délivré à M. et Mme [V] un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la Bred Banque Populaire.
Le 14 juin 2018, la CEPAC a fait délivrer à M. [V] un procès-verbal de saisie-attribution de loyers.
Le 17 octobre 2018, la CEPAC a fait délivrer à Mme [O] épouse [V] un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la Banque Postale
Le délai de deux ans a donc été interrompu à plusieurs reprises par les saisies-attributions qui se sont échelonnées entre juin 2018 et octobre 2018.
La demande formulée par M. et Mme [V] auprès de la commission de surendettement des particuliers de la Réunion a été déclarée recevable le 14 novembre 2018.
Le 10 janvier 2019, la CEPAC a fait délivrer à Mme [O] épouse [V] un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la Banque Postale.
Le 15 janvier 2019, la CEPAC a fait délivrer à M. et Mme [V] un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la Bred Banque Populaire
Le 25 juillet 2019, les mesures de la commission, parmi lesquelles un plan d'apurement de la dette à l'égard de la CEPAC, ont été approuvées.
Le plan prévoyait, concernant la créance de la CEPAC, d'un montant retenu du 123.438,33 euros et à un taux retenu de 0,87%, un premier palier d'une durée de 3 mois avec des mensualités de 2.000 euros et un second palier d'une durée de 32 mois avec des mensualités de 3.722,37 euros et contenait une clause résolutoire ainsi rédigée « Si elles ne sont pas respectées, les mesures deviendront caduques quinze jours après une mise en demeure, adressée par le créancier par lettre recommandée avec accusé de réception, restée infructueuse d'avoir à exécuter les obligations prévues par les mesures. »
Les mesures imposées ont été homologuées le 20 novembre 2020 et sont entrées en vigueur le 31 décembre 2020.
Suivant lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) datée du 10 juillet 2023, reçu le 17 juillet 2023, EOS France, agissant pour le compte du FCT Foncred V, a adressé à M. [V] une « MISE EN DEMEURE AVANT DENONCIATION DE VOTRE PLAN », laissant à ce dernier un délai de 15 jours pour régulariser sa situation.
La même lettre a été adressée à Mme [V] le 23 août 2023.
Le délai de prescription a donc recommencé à courir à compter de ce courriers, et plus exactement, concernant M. [V], 15 jours à compter de la date de réception du courrier, soit jusqu'au 1er août 2023.
Ainsi, le délai de prescription a été interrompu pour la dernière fois le 17 octobre 2018, mais a été suspendu dès le 14 novembre 2018 jusqu'au 1er août 2023, étant observé qu'il est indifférent qu'une saisie-attribution ait été délivrée à M. [V] pendant la suspension.
Or, dès le 23 février 2024, EOS France a signifié à M. [V] un commandement de payer valant saisie pour un montant total de 152.661,97 euros, avec dénonciation à conjoint du même jour.
Son action n'est donc pas prescrite.
La décision entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions.
Sur la poursuite de la procédure de saisie immobilière
Il résulte de l'article L.311-2 du code des procédures civiles d'exécution que, pour procéder à une saisie immobilière, le créancier doit être muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.
L'article R 322-15 prévoit qu'à l'audience d'orientation, le juge de l'exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L 311-2, L 311-4 et L 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.
Il ressort de la jurisprudence de la Cour de cassation que le juge de l'exécution doit s'assurer de l'existence d'une créance liquide et exigible et en vérifier le montant, même en l'absence de contestation du débiteur, ce qui est le cas en l'espèce.
Selon l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires.
En l'espèce, les conditions de l'article L.311-2 sont réunies, les poursuites étant engagées par EOS France en vertu d'un acte authentique du 13 octobre 2005 revêtu de la formule exécutoire par lequel la BR, devant la CEPAC consenti à M. et Mme [V] un prêt d'un montant de 210.440 euros et en vertu duquel la banque a prononcé la déchéance du terme suivant mises en demeure des 15 juin et 9 août 2017 et il n'est pas contesté que l'immeuble visé au commandement est saisissable.
La créance d'EOS France, qui dispose d'un titre exécutoire résultant du commandement de payer précité, sera mentionnée pour la somme totale de 152.661,97 euros, selon décompte produit au dossier et arrêté au 13 février 2024.
Il convient dès lors d'ordonner la vente forcée du bien, dire que le présent arrêt sera publié à la diligence du créancier poursuivant en marge du commandement en date du 23 février 2024, EOS France et publié le 15 avril 2024 au service de la publicité foncière de Saint-Denis (Réunion) Volume 2024 S n°40 et renvoyer l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion pour fixation des modalités et de la date de la vente forcée ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dépens de première instante et d'appel seront compris dans les frais de vente soumis à taxe.
L'équité commande d'écarter l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à la présente procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Infirme en toute ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu le 29 novembre 2024 par le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion ;
Et statuant à nouveau
Déclare recevable la SASU EOS France, en qualité de recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, venant aux droits de la Caisse d'Épargne CEPAC, venant elle-même aux droits de la Banque de la Réunion en sa procédure de saisie immobilière suivant commandement délivré le 23 février 2024 publié le 15 avril 2024 au service de la publicité foncière de Saint Denis (Réunion) Volume 2024 S n°40 ;
Dit que les conditions des articles L.311-2, L.311-4 et L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies et que le créancier poursuivant a satisfait au respect des dispositions du code des procédures civiles d'exécution relatives à la saisie immobilière ;
Mentionne que la créance de la SASU EOS France, en qualité de recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, venant aux droits de la Caisse d'Épargne CEPAC, venant elle-même aux droits de la Banque de la Réunion est de 152.661,97 euros (principal, frais, intérêts et autres accessoires),
Ordonne la vente forcée des biens saisis, à savoir : une parcelle sise sur la commune [Localité 13] (Réunion), [Adresse 12], cadastrée AK n° [Cadastre 9] ;
Dit que le présent arrêt sera publié à la diligence du créancier poursuivant en marge du commandement en date du 23 février 2024 publié le 15 avril 2024 au service de la publicité foncière de Saint Denis (Réunion) Volume 2024 S n°40 ;
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront compris dans les frais de vente soumis à taxe ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Renvoie l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion pour fixation des modalités et de la date de la vente forcée .
Le présent arrêt a été signé par Madame Pauline FLAUSS, Conseillère, le Président étant empêché et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.