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Décisions

CA Chambéry, 1re ch., 2 septembre 2025, n° 22/01995

CHAMBÉRY

Autre

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

Le Plaisir Du Goût (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hacquard

Conseillers :

Mme Reaidy, M. Sauvage

Avocats :

SCP Chevassus-Collomb, Me Boussaid

TJ [Localité 4], du 8 sept. 2022

8 septembre 2022

Faits et procédure

Par différents échanges de courriers électroniques intervenus en mai 2019, Mme [T] [F] et M. [W] [S] sont entrés en relation précontractuelle avec la société Le Plaisir du goût en vue de l'organisation de leur mariage. La date du mariage initialement prévue le 6 juin 2020 a été décalée au 13 juin.

La société Le Plaisir du goût a adressé le 23 mai 2019, un devis pour la location du [Adresse 7] pour un montant de 6.000 euros et un devis pour les prestations de traiteur (130 personnes au vin d'honneur, 90 personnes au repas et 15 enfants) pour un montant de 8.715 euros auquel s'ajoutaient certaines options (glaces salées, foie gras...).

La société Le Plaisir du goût a adressé une facture d'acompte de 2.000 euros datée du 13 mai 2019. Par échange de courriers électroniques du 6 février 2020, les prestations de traiteur ont été modifiées (160 personnes au vin d'honneur, 90 personnes au repas et 30 enfants ainsi que certaines options) pour un montant de 12.865 euros.

Mme [F] et M. [S] ont réglé le 3 juin 2019 puis le 25 janvier 2020 deux acomptes de 2.000 euros chacun.

Le 3 mars 2020, la société Le Plaisir du goût a adressé une facture pour un 3e acompte d'un montant de 12.000 euros, cette facture étant à régler un mois avant l'événement.

Compte tenu de la crise sanitaire rendant incertaine la tenue du mariage à la date prévue, la société Le Plaisir du goût a précisé à Mme [F] et M. [S] ses disponibilités pour l'année suivante et par courriel du 16 avril 2020, Mme [F] et M. [S] ont retenu la date du 5 juin 2021.

Le 27 janvier 2021, la société Le Plaisir du goût a indiqué par courriel que le mariage, initialement prévu le 13 juin 2020 était reporté au 5 juin 2021 et a demandé à Mme [F] et M. [S] de retourner signés les devis rectifiés, puis a envoyé 2 courriers électroniques de relance les 20 février et 8 mars 2021.

Le 10 mars 2021, Mme [F] et M. [S] ont indiqué qu'ils s'étaient mariés le 13 juin 2020, mais que le prestataire n'avait pas assuré la partie traiteur ce jour-là, et ont réclamé la restitution des acomptes versés.

Le 11 mars 2021, la société Le Plaisir du goût a indiqué qu'en avril 2020, Mme [F] et M. [S] l'avaient contactée pour reporter la date du mariage, et qu'ils avaient choisi la date du 5 juin 2021, que par la suite ils avaient demandé un cocktail pour 15 personnes qu'elle avait refusé d'assurer.

Suivant exploit en date du 17 mars 2022, Mme [F] et M. [S] ont fait assigner la société Le Plaisir du goût devant le tribunal judiciaire d'Albertville afin d'obtenir sa condamnation au remboursement de la somme de 4.000 euros versée à titre d'acompte.

Par jugement du 8 septembre 2022, le tribunal judiciaire d'Alberville, avec

le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- Dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité du contrat ;

- Débouté Mme [F] et M. [S] de leur demande de remboursement de l'acompte versé ;

- Dit que la société Plaisir du goût pourra conserver de ce fait le montant de l'acompte ;

- Débouté Mme [F] et M. [S] de leur demande de dommages et intérêts l'encontre de la société Plaisir du Gout ;

- Condamné Mme [F] et M. [S] payer la société Plaisir du goût la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné Mme [F] et M. [S] aux entiers dépens.

Au visa principalement des motifs suivants :

' Il ne ressort pas des éléments fournis que Mme [F] et M. [S] aient été démarchés ou personnellement sollicités pour co-contracter avec la société Plaisir du Gout, de sorte qu'aucune nullité du contrat liée à l'absence de formulaire de rétractation n'est encourue ;

' Aucune stipulation du contrat ne permettait au professionnel de modifier unilatéralement la nature de la prestation ou le prix de ses prestations, ni de se dédouaner de sa responsabilité en cas d''inexécution de ses obligations, dès lors le contrat ne comporte pas de clause abusive ;

' le fait de faire bloquer par la société Le Plaisir du Gout la date du 5 juin 2021 pour reporter la date de leur mariage, interdit à Mme [F] et M. [S] de se prévaloir du caractère insurmontable que doit revêtir la force majeure ;

' La résiliation du contrat a été effectuée à l'initiative de Mme [F] et M. [S] pour des motifs d'ordre personnel.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel du 30 novembre 2022, Mme [F] et M. [S] ont interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Prétentions et moyens des parties

Aux termes de leurs dernières écritures du 30 janvier 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [F] et M. [S] sollicitent l'infirmation de la décision et demandent à la cour de :

- Déclarer leur action recevable et bien fondée, et en conséquence,

A titre principal,

- Constater la nullité des contrats de location et de prestation de traiteur ou, à tout le moins, des clauses contractuelles portant sur les acomptes et les motifs de leur conservation par la société Le Plaisir du goût ;

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur restituer la somme de 4.000 euros versée à titre d'acompte ;

A titre subsidiaire,

- Constater la survenance de la force majeure ;

- Prononcer la résolution des contrats de location et de prestation de traiteur ;

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur restituer la somme de 4.000 euros versée à titre d'acompte ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Constater la caducité des contrats de location et de prestation de traiteur ;

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur restituer la somme de 4.000 euros versée à titre d'acompte ;

En toutes hypothèses,

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur payer la somme de 2.500 euros en réparation de leurs préjudices générées par sa mauvaise foi contractuelle et sa résistance abusive ;

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur payer la somme de 2.400 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés en première instance ;

Y ajoutant,

- Condamner la société Le Plaisir du goût à leur payer la somme de 2.400 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés en appel ;

- Condamner la société Le Plaisir du goût aux entiers dépens de première instance et d'appel et dire que, en application de l'article 699 du code de procédure civile, Me [X] pourra recouvrer les frais dont elle aura fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Au soutien de leurs prétentions, Mme [F] et M. [S] font notamment valoir que :

' La documentation contractuelle transmise par courriel le 27 janvier 2021 n'était accompagnée d'aucun formulaire type de rétractation, or, l'article L.242-1 du code de la consommation prévoit expressément la nullité du contrat qui ne respecte pas les exigences de l'article L. 221-9, c'est-à-dire le formalisme du contrat, et notamment l'absence d'accompagnement du contrat par le formulaire type de rétractation ;

' Les clauses portant sur le versement des acomptes sont abusives dès lors que le versement de cette somme n'emportait nulle obligation pour la société Le Plaisir du Gout, compte tenu des circonstances sanitaires, d'exécuter ses prestations ;

' La crise sanitaire était un événement imprévisible, irrésistible et évidemment extérieur aux cocontractants, qui relève des dispositions de l'article 1218 du code civil, justifiant la résolution de la convention ;

' La définition de la date du mariage constitue un élément essentiel du contrat, dont la disparition entraîne sa caducité ;

' La résistance abusive du prestataire leur a causé des préjudices dont ils sont fondés à obtenir l'indemnisation.

Par dernières écritures du 25 avril 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Plaisir du Goût demande quant à elle à la cour de :

- Dire et juger recevable mais mal fondé l'appel interjeté par Mme [F] et M. [S] à l'encontre de la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Albertville le 8 septembre 2022 ;

A titre principal,

- Confirmer en toutes ses dispositions la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Albertville le 8 septembre 2022 ;

A titre subsidiaire, et si la juridiction devait réformer la décision entreprise,

- Débouter Mme [F] et M. [S] de l'intégralité des demandes indemnitaires et de restitution des acomptes formulés à son encontre ;

À titre reconventionnel,

- Dire et juger que le contrat conclu le 27 mai 2019 et modifié le 6 février 2020 est résolu aux torts exclusifs de Mme [F] et M. [S] ;

Par voie de conséquence,

- L'autoriser à conserver la somme de 4.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résolution unilatérale du contrat ;

En tout état de cause,

- Condamner Mme [F] et M. [S] à lui payer la somme de 1.800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, la société Plaisir du Goût fait notamment valoir que :

' L'article L221'18 du code de la consommation et L242'1 du même code ne sont pas applicables au cas d'espèce, en l'absence de démarchage, de sorte qu'aucun formulaire de rétractation n'était requis à peine de nullité du contrat ;

' La convention liant les parties ne contient aucune clause abusive ;

' Le contrat s'est valablement formé entre les parties, de manière ferme et définitive, en vue de l'organisation du mariage à la date du 13 juin 2020, reportée ensuite au 5 juin 2021 ;

' Seul le débiteur de l'obligation peut invoquer la force majeure pour justifier son inexécution ;

' Aucun élément essentiel du contrat liant les parties n'a disparu, alors que l'exécution de son obligation était parfaitement réalisable, tant à la date du 13 juin 2020 qu'à celle du 5 juin 2021, malgré la crise sanitaire ;

' Les appelants ont en réalité unilatéralement décidé de ne pas poursuivre l'exécution du contrat, sans l'en avertir.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Une ordonnance du 3 mars 2025 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 27 mai 2025.

Motifs de la décision

I - Sur la nullité du contrat

Aux termes de l'article L. 221-18 du code de la consommation, « le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25 ».

L'article L. 221-9 impose donc qu'un contrat conclu à distance ou hors établissement soit accompagné d'un formulaire type de rétractation.

L'article L. 221-1 du même code précise que « sont considérés comme :
« 1° Contrat à distance : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ;
2° Contrat hors établissement : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur:
a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur;
b) Ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ;
c) Ou pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur.

En l'espèce, comme l'a relevé le premier juge, le contrat conclu entre les parties s'analyse bien comme étant un « contrat à distance » au sens de ces dispositions, dès lors qu'il a été conclu sans rencontre physique entre les parties, uniquement par le biais d'échange de courriels (qui constituent une technique de communication à distance) et dans le cadre d'un « système organisé de vente ou de prestation de services à distance », à savoir le site internet du prestataire, comme il se déduit des pièces qui sont versées aux débats par les appelants.

Aucun élément du dossier qui est soumis à la présente juridiction ne permet de caractériser par contre l'existence d'un contrat conclu « hors établissement » au sens de l'article L. 221-1 du code de la consommation, dès lors que les époux [S] ne démontrent nullement avoir été sollicités personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce son activité.

Or, contrairement aux contrats conclus hors établissement, pour lesquels l'article L. 242-1 du code de la consommation prévoit une nullité de plein droit en cas d'absence de bordereau de rétractation, aucun texte n'édicte une telle sanction dans le cadre d'un contrat conclu à distance.

La demande d'annulation du contrat qui est formée par les appelants ne pourra donc qu'être rejetée.

II - Sur la présence de clauses abusives

L'article R 212-1 du code de la consommation prévoit que « dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de :
3° Réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre ;
5° Contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n'exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou son obligation de fourniture d'un service ».

L'article R 212-2 présume également abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de :

« 3° Imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant manifestement disproportionné ;
7° Stipuler une date indicative d'exécution du contrat, hors les cas où la loi l'autorise ».

En l'espèce, les conditions générales de vente annexées au contrat prévoient que la réservation n'est confirmée qu'après versement d'un acompte de 30 % non remboursable et que « sauf accord préalable et exclusivement par écrit et en cas d'annulation de tout ou partie de la réception pour quel que motif que ce soit, l'acompte et le solde versés resteront acquis de plein droit, au titre d'indemnité forfaitaire compensatrice de préjudice ».

Force est de constater que, contrairement à ce qu'indiquent les appelants, qui ne précisent du reste nullement la stipulation précise qu'ils considèrent comme abusive, les dispositions du contrat permettant au professionnel de conserver l'acompte qui lui a été versé en cas d'annulation de la réception prévue n'entrent dans aucune des quatre catégories de clauses qui ont été précédemment listées.

Il convient en effet d'observer qu'aucune stipulation de la convention ne permettait à la société Le Plaisir du goût de modifier de manière unilatérale les caractéristiques de la prestation convenue, ni de la dispenser de l'exécution de ses obligations alors que ses contractants resteraient tenus du paiement du prix. Par ailleurs, le montant de l'acompte versé, représentant 21,20 % du montant de la prestation, bien inférieur aux 30 % qui étaient prévus au contrat, ne peut de toute évidence être considéré comme étant « manifestement disproportionné ». Aucune stipulation contractuelle ne permettait enfin à l'intimée de prévoir une simple date indicative d'exécution du contrat, étant observé que les époux [S] ne citent aucune clause de la convention qui pourrait avoir un tel effet.

La demande de nullité des clauses contractuelles portant sur les acomptes et les motifs de leur conservation ne pourra donc qu'être également rejetée.

III - Sur la force majeure

Les époux [S] demandent à la présente juridiction de prononcer la résolution du contrat, en excipant de ce que la survenance de la crise sanitaire, constituant un cas de force majeure, aurait fait obstacle à l'organisation de leur mariage, tant le 13 juin 2020 que le 5 juin 2021. Ils font en effet valoir que l'article 3 du décret n°2020-663 du 31 mai 2020 interdisait, à la date du 13 juin 2020, tout rassemblement dans un lieu ouvert au public mettant en présence de manière simultanée plus de dix personnes et qu'à la date du 5 juin 2021, le territoire était soumis à un couvre-feu, qui interdisait tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence entre 21 heures et 6 heures du matin, conformément à l'article 4 du décret n°2021-699 du 1er juin 2021.

Aux termes de l'article 1218 du code civil, « il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.

Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit ».

Force est de constater en l'espèce que, comme le fait observer l'intimée, en admettant que la tenue de la réception ait été rendue impossible en raison de la crise sanitaire, qui présentait de toute évidence les caractères de la force majeure pour les deux parties, les époux [S] n'étaient nullement débiteurs de l'obligation d'honorer les prestations convenues, mais uniquement celle d'en payer le prix. L'exécution de leur obligation n'a ainsi pas été empêchée par la force majeure.

Il est ainsi jugé, de manière constante, que « le créancier qui n'a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure ». (Cass Civ 1ère, 25 novembre 2020, n°19-21.060 P).

Il s'en suit que les époux [S] ne peuvent se prévaloir de la force majeure pour solliciter la résolution du contrat.

Il convient d'observer, au surplus, qu'à la date du 5 juin 2021, qui était celle finalement convenue entre les parties pour organiser l'événement, le couvre feu mis en place sur le territoire n'interdisait nullement, en lui-même, sa tenue, dès lors qu'il était prévu au devis le logement sur place des participants. Et en admettant que l'événement n'ait pu se tenir à cette date en raison des contraintes sanitaires applicables, l'impossibilité d'exécution ne pouvait présenter un caractère définitif, de nature à justifier la résolution du contrat, puisque l'événement pouvait être reporté de nouveau à une date ultérieure.

La demande de résolution du contrat ne pourra ainsi être accueillie.

IV - Sur la caducité du contrat

Aux termes de l'article 1186 du code civil , « un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît ».

Les époux [S] soutiennent que la prestation du traiteur, prévue pour plus d'une centaine de convives, n'était plus possible à la date prévue en raison de la survenance de la crise sanitaire, de sorte que l'un des éléments essentiels du contrat a disparu.

Il convient d'observer tout d'abord que, comme l'a relevé le premier juge, il se déduit sans ambiguïté de l'examen des courriels échangés entre les parties qu'un accord ferme et définitif est bien intervenu entre elles, suite à la survenance de la crise sanitaire, pour reporter la date de l'événement au 5 juin 2021. Cet accord se trouve matérialisé par le courriel qui a été adressé au prestataire par Mme [F], le 16 avril 2020, en ces termes : « Bonjour [E], nous bloquons le 5 juin », mail intervenu après que la société Le Plaisir du goût lui ait proposé plusieurs dates de disponibilités sur l'année 2021.

A cet égard, la circonstance que le nouveau contrat, comportant cette nouvelle date, n'ait pas été signé par les époux [S], ne saurait être de nature à remettre en cause le caractère ferme de leur engagement, puisqu'ils avaient déjà accepté en mai 2019 les conditions contractuelles de l'intimée, et que seule la date de l'événement se trouvait modifiée.

L'appréciation de la disparition d'un élément essentiel du contrat ne peut ainsi être opérée au regard de la date initiale du 13 juin 2020, puisqu'un accord antérieur à cette date était intervenu entre les parties pour reporter l'événement au 5 juin 2021.

Il résulte ensuite des échanges intervenus entre les parties, ainsi que de la chronologie qu'ils retracent dans leurs écritures respectives qu'à une date indéterminée, en avril 2020, les époux [S] ont sollicité le traiteur pour qu'il modifie ses prestations, en vue de célébrer un mariage réduit à une dizaine de personnes, ce que le prestataire a légitimement refusé. Il est constant que les appelants se sont finalement mariés le 13 juin 2020, dans un format ainsi réduit, et n'ont pas souhaité organiser l'événement à la date du 5 juin 2021, qui avait été convenue entre les parties, ni à une autre date, dans le format initial.

Ils ont ainsi informé leur contractante, en mars 2021, de leur volonté de ne pas poursuivre l'exécution du contrat, ce qui doit s'analyser comme étant une résolution unilatérale de leur part.

Il doit nécessairement se déduire de ces constatations qu'à la date du 5 juin 2021, il n'était nullement question pour les appelants, qui s'étaient déjà mariés, d'organiser une nouvelle fête, et que le contrat conclu entre les parties avait déjà été résolu de manière unilatérale par les époux [S]. Ces derniers ne peuvent ainsi utilement arguer, dans ces conditions, et alors qu'ils étaient seuls à l'origine de cette résolution unilatérale, de ce que l'un des éléments essentiels de la convention liant les parties aurait disparu à la date du 5 juin 2021.

La demande de caducité du contrat qu'ils forment ne pourra donc qu'être rejetée, et le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté leur demande de remboursement de l'acompte, qui pouvait être légitimement conservé par la société Le Plaisir du Goût, conformément aux conditions contractuelles.

V - Sur les dommages et intérêts

Dès lors qu'aucune résistance abusive de la société Le Plaisir du Goût ne se trouve caractérisée, puisque son argumentation a été accueillie tant en première instance qu'en appel, la demande indemnitaire qui est formée de ce chef par les appelants sera rejetée.

VI - Sur les demandes accessoires

En tant que parties perdantes, les époux [S] seront condamnés in solidum aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à l'intimée la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en appel.

La demande qui est formée de ce chef par les appelants sera enfin rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi, dans les limites de sa saisine,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 septembre 2022 par le tribunal judiciaire d'Albertville,

Y ajoutant,

Condamne in solidum Mme [T] [F] épouse [S] et M. [W] [S] aux dépens d'appel,

Condamne in solidum Mme [T] [F] épouse [S] et M. [W] [S] à payer à la société Le plaisir du Goût la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en cause d'appel,

Rejette la demande formée à ce titre par Mme [T] [F] épouse [S] et M. [W] [S].

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Nathalie HACQUARD, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

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