Cass. 2e civ., 11 septembre 2025, n° 22-23.042
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Martinel
Rapporteur :
M. Waguette
Avocat général :
M. Adida Canac
Avocats :
SCP Marlange et de La Burgade, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 20 septembre 2022), par un jugement du 18 novembre 2020, un tribunal judiciaire a validé la contrainte émise par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion (la caisse) à l'encontre de M. [Y] et condamné ce dernier à payer à la caisse une certaine somme au titre de cotisations sociales et majorations.
2. M. [Y] a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. M. [Y] fait grief à l'arrêt d'écarter des débats ses conclusions déposées le 21 juin 2022 et de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la contrainte valable et régulière, validé la contrainte délivrée par la caisse pour la somme de 31 330 euros, condamné M. [Y] au paiement de ce montant, dit que la contrainte produirait son entier effet et laissé les frais de signification de la contrainte et les frais nécessaires à son exécution à la charge de M. [Y], alors :
« 1°/ que lorsqu'elle autorise les parties à formuler par écrit leurs prétentions et moyens, la juridiction de sécurité sociale peut fixer en accord avec elles les conditions de communication des écritures et des pièces ; qu'excepté le cas où elle écarte des débats les prétentions, moyens et pièces d'une partie communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense, la juridiction, qui constate que le principe de la contradiction n'a pas été respecté, doit, en application de l'article 16 du code de procédure civile, renvoyer l'affaire à une prochaine audience ; que, pour écarter des débats les écritures déposées le 21 juin 2022 par M. [Y], ainsi que les pièces produites à cette occasion, la cour d'appel se borne à énoncer, au visa de l'article 446-2, alinéa 5 du code de procédure civile, qu'en l'absence de tout événement invoqué par M. [Y] légitimant la tardiveté du dépôt de ses écritures le jour de l'audience et plus de deux mois après la fixation de la procédure pour plaidoiries et alors même qu'il avait conclu le dernier, il était constaté le non-respect du contradictoire et une atteinte aux droits de la défense à l'égard de la caisse, qui n'avait pu prendre connaissance des conclusions de l'appelant en temps utiles ; qu'en statuant ainsi, quand il ne résulte pas des mentions de l'arrêt qu'une date antérieure à celle de l'audience aurait été fixée par le juge, en accord avec les parties, pour les échanges de leurs conclusions et pièces, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 446-2, alinéa 5 du code de procédure civile, ensemble l'article 16 du même code ;
2°/ que lorsqu'elle autorise les parties à formuler par écrit leurs prétentions et moyens, la juridiction de sécurité sociale peut fixer en accord avec elles les conditions de communication des écritures et des pièces ; qu'excepté le cas où elle écarte des débats les prétentions, moyens et pièces d'une partie communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense, la juridiction, qui constate que le principe de la contradiction n'a pas été respecté, doit, en application de l'article 16 du code de procédure civile, renvoyer l'affaire à une prochaine audience ; que, pour écarter des débats les écritures déposées le 21 juin 2022 par M. [Y], ainsi que les pièces produites à cette occasion, la cour d'appel énonce, au visa de l'article 446-2, alinéa 5 du code de procédure civile, qu'en l'absence de tout événement invoqué par M. [Y] légitimant la tardiveté du dépôt de ses écritures le jour de l'audience et plus de deux mois après la fixation de la procédure pour plaidoiries et alors même qu'il avait conclu le dernier, il était constaté le non-respect du contradictoire et une atteinte aux droits de la défense à l'égard de la caisse, qui n'avait pu prendre connaissance des conclusions de l'appelant en temps utiles ; qu'en statuant ainsi, quand, à défaut d'avoir fixé, en accord avec les parties, une date antérieure à l'audience pour les échanges de leurs conclusions et pièces, et dès lors qu'elle constatait que le principe de la contradiction n'avait pas été respecté, elle était tenue de renvoyer l'affaire à une prochaine audience, la cour d'appel a violé les articles 16 et 446-2, alinéa 5 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 446-2 et 16 du code de procédure civile :
4. Selon le premier de ces textes, lorsqu'il renvoie les débats à une audience ultérieure et autorise les parties à formuler par écrit leurs prétentions et moyens, le juge peut fixer en accord avec elles les conditions de communication des écritures et des pièces. Excepté le cas où il écarte des débats les prétentions, moyens et pièces d'une partie communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense, le juge, qui constate que le principe de la contradiction n'a pas été respecté, doit, en application du second de ces textes, renvoyer l'affaire à une prochaine audience.
5. Pour écarter des débats les dernières conclusions de l'appelant, l'arrêt retient, au visa des articles 16 et 446-2, alinéa 5, du code de procédure civile, qu'en l'absence de tout événement invoqué par M. [Y] légitimant la tardiveté du dépôt de ses écritures le jour de l'audience et plus deux mois après la fixation de la procédure pour plaidoiries et alors même qu'il avait conclu le dernier, il est constaté le non respect du principe du contradictoire et une atteinte aux droits de la défense à l'égard de la caisse qui n'a pu prendre connaissance des conclusions de l'appelant en temps utile.
6. En statuant ainsi, alors que n'ayant pas constaté qu'une date avait été fixée pour les échanges des conclusions entre les parties, elle ne pouvait écarter les dernières conclusions mais devait renvoyer l'affaire à une prochaine audience pour faire respecter le principe de la contradiction, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
7. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition de l'ordonnance écartant des débats les dernières conclusions de M. [Y] entraîne la cassation des autres chefs de dispositif qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion autrement composée ;
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion et la condamne à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le onze septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.