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Cass. 2e civ., 11 septembre 2025, n° 22-23.162

COUR DE CASSATION

Autre

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Bayer HealthCare (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Martinel

Rapporteur :

Mme Grandemange

Avocat général :

M. Adida-Canac

Avocats :

SCP Le Guerer, SCP Bouniol-Brochier, SCP Lassalle-Byhet, SCP Gouz-Fitoussi

Cass. 2e civ. n° 22-23.162

10 septembre 2025

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 15 septembre 2022), faisant valoir l'existence de dommages résultant de l'administration du médicament Androcur, l'association d'aide aux victimes des accidents du médicament (Aaavam, ci-après l'association) a assigné les sociétés Bayer Healthcare et Delpharm [Localité 3], ainsi que l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes, et des infections nosocomiales devant un tribunal de grande instance afin d'exercer une action de groupe.

2. Le 1er juin 2021, la société Bayer HealthCare a relevé appel de l'ordonnance, du 29 avril 2021, du juge de la mise en état saisi d'un incident aux fins d'expertise par l'association, uniquement en ce qu'elle l'a condamnée à payer à l'association une provision pour frais d'instance d'un montant de 10 000 euros, et en ce qu'elle a rejeté sa demande tendant à subordonner le versement de cette somme à la constitution d'une garantie et réservé les frais irrépétibles et les dépens.

3. Le 16 février 2022, la société Bayer HealthCare a déféré à la cour d'appel l'ordonnance rendue le 3 février 2022, par le président d'une chambre civile, ayant, notamment, déclaré cet appel irrecevable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

5. La société Bayer HealthCare fait grief à l'arrêt de rejeter sa requête en déféré et ses plus amples prétentions et de la condamner à payer à l'Aaavam la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure de déféré sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°/ que les ordonnances du juge de la mise en état sont susceptibles d'appel immédiat lorsque, dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que tel est le cas de l'ensemble des provisions qui peuvent être octroyées par le juge de la mise en état, qu'il s'agisse d'une provision à valoir sur la créance principale du demandeur ou encore d'une provision ad litem, destinée à couvrir les frais d'instance de la partie qui la sollicite, ces provisions étant nécessairement subordonnées à l'existence d'une obligation au fond qui ne soit pas sérieusement contestable ; qu'en retenant cependant en l'espèce, pour décider que l'article 795 du code de procédure civile n'était pas applicable à une provision ad litem ordonnée par le juge de la mise en état et ne permettait donc pas de faire appel immédiat de l'ordonnance prononçant son octroi, que si l'allocation d'une telle provision suppose que soit démontré qu'il existe à la charge de la partie défenderesse à l'incident une obligation non sérieusement contestable de devoir supporter, au moins en partie, les frais du procès à l'issue de celui-ci, il reste pour autant que l'obligation non sérieusement contestable à laquelle est subordonnée l'allocation de la provision pour le procès sur le fondement de l'article 789, 2° n'est pas l'obligation au fond, mais l'obligation de contribuer aux frais du procès , la cour d'appel a violé les articles 789 et 795 du code de procédure civile ;

2°/ que les ordonnances du juge de la mise en état sont susceptibles d'appel immédiat lorsque, dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que l'article 795 du code de procédure ne distinguant pas selon la nature de l'obligation non sérieusement contestable en cause, l'appel immédiat est ouvert à l'encontre des ordonnances du juge de la mise en état aussi bien lorsqu'une provision est accordée en raison de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable au fond que lorsqu'une provision est allouée pour le procès en raison de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de contribuer aux frais du procès ; qu'en décidant en l'espèce que l'article 795 du code de procédure civile n'était pas applicable à une provision ad litem ordonnée par le juge de la mise en état et ne permettait donc pas de faire appel immédiat de l'ordonnance prononçant son octroi, tout en retenant expressément que l'allocation d'une provision pour le procès suppose que soit démontré qu'il existe à la charge de la partie défenderesse à l'incident une obligation non sérieusement contestable de devoir supporter, au moins en partie, les frais du procès à l'issue de celui-ci, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 795 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 789, 2°, du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour allouer une provision pour le procès.

7. Selon l'article 795, les ordonnances du juge de la mise en état, sont susceptibles d'appel dans les cas et conditions prévus en matière d'expertise ou de sursis à statuer. Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque, notamment, dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

8. Il en découle que si la décision du juge de la mise en état qui a trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier, au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable et que le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, est susceptible d'appel immédiat, il n'en est pas de même de la décision qui alloue une provision pour le procès.

9. Ayant relevé que les chefs de dispositif frappés d'appel ne statuent pas sur une demande d'expertise ou de sursis à statuer, n'ont pas pour effet de mettre fin à l'instance ni d'en constater l'extinction, ne statuent pas sur une exception de procédure ni sur une fin de non-recevoir, ne se rapportent pas à des mesures provisoires ordonnées en matière de divorce ou de séparation de corps, et enfin n'ont pas trait à une demande de provision pouvant être accordée à un créancier lorsque l'obligation de ce dernier n'est pas sérieusement contestable, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que la provision ad litem ordonnée par le juge de la mise en état, tant en son principe qu'en ses modalités d'application, ne relevait pas des articles 789, 2° et 795, 4°, du code de procédure civile et que la requête en déféré devait être rejetée.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bayer HealthCare aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bayer HealthCare à payer à l'association d'aide aux victimes des accidents du médicament la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le onze septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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