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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-2, 3 septembre 2025, n° 21/00135

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/00135

3 septembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 03 SEPTEMBRE 2025

Rôle N° RG 21/00135 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BGXQC

E.U.R.L. COFRATEX

C/

S.C.P. [O]

Organisme URSSAFPROVENCE ALPES COTE D'AZUR

Copie exécutoire délivrée

le : 3 septembre 2025

à :

Me Gilles ALLIGIER

Me Eric AGNETTI

Me Michel PEZET

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge commissaire de [Localité 3] en date du 17 Décembre 2020 enregistrée au répertoire général sous le n° 2020M01399.

APPELANTE

E.U.R.L. COFRATEX

dont le siège social est à [Adresse 5], actuellement en liquidation judiciaire, représentée par son liquidateur en exercice, Maître [T] [O] et en tant que de besoin par Mr [D] [R], associé et gérant, demeurant à [Adresse 4].

représentée par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉES

S.C.P. [O]

Mandataire Judiciaire, dont le siège social est [Adresse 2]

NICE, représentée par Maître [C] [O], prise en sa qualité de Liquidateur Judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL COFRATEX désignée à ses fonctions par Jugement du Tribunal de Commerce de Nice en date du 17 novembre 2017

représentée par Me Eric AGNETTI, avocat au barreau de NICE

L'URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR,

dont le siège social est sis, [Adresse 1], prise en la personne de son Directeur Général, domicilié es qualités audit siège

représentée par Me Michel PEZET, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre

Madame Muriel VASSAIL, Conseillère

Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère

Greffière lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2025

Signé par Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre et Madame Chantal DESSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Sur assignation de l'URSSAF PACA, le tribunal de commerce de Nice a, par jugement en date du 21 avril 2016, ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'EURL Cofratex et désigné Me [O] en qualité de mandataire.

Par déclaration de créance adressée au mandataire judiciaire par courrier en date du 28 avril 2016, l'URSSAF PACA a déclaré une créance d'un montant total de 380'436,41'euros, répartie comme suit':

302'776,77'euros à titre privilégié, dont 159'296,77'euros à titre privilégié définitif et 143'480'euros à titre provisionnel,

77'659,64'euros à titre chirographaire définitif.

Par courrier en date du 14 mars 2017, le mandataire judiciaire a informé l'URSSAF PACA que la part provisionnelle de sa créance était contestée, au motif qu'elle ne respecterait pas les termes d'un précédent courrier de l'organisme.

Par jugement du 17 novembre 2017, le tribunal de commerce de Nice a prononcé la liquidation judiciaire de l'EURL Cofratex et désigné Me [O] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par courrier en date du 7 octobre 2020, Me [O] ès qualités a informé l'URSSAF PACA que sa créance déclarée à titre provisionnel était contestée à hauteur de 113'199,59'euros.

En réponse, l'URSSAF PACA a ramené le montant de sa créance à la somme de 23'613,05'euros et maintenu sa déclaration.

Saisi de la contestation, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Nice, par ordonnance du 16 décembre 2020, a admis la créance de l'URSSAF PACA à hauteur de 169'298,27'euros à titre privilégié et de 73'069,42'euros à titre chirographaire, au passif de l'EURL Cofratex.

Par déclaration du 6 janvier 2021, la SARL Cofratex a interjeté appel de cette décision.

Par des conclusions notifiées par la voie électronique le 29 mars 2021, la SARL Cofratex demande à la cour'de':

- recevoir la concluante en son appel,

- le déclarer recevable et fondé,

- infirmer l'ordonnance rendue le 16 décembre 2020 ayant admis la créance de l'URSSAF,

- rejeter la créance de l'URSSAF tant à titre privilégié que chirographaire,

- condamner l'URSSAF au règlement de la somme de 2.500 euros au titre des dispositions contenues à l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Florence Rollin Garcia, sous sa due affirmation de droit.

Par des conclusions notifiées par la voie électronique le 28 juin 2021, la SCP [O] demande à la cour de':

- prendre acte de ce que l'ensemble des créances déclarées et admises par l'URSSAF PACA au passif de la procédure collective dont s'agit ont fait l'objet de contraintes non contestées par la société Cofratex,

- prendre acte de ce que l'URSSAF PACA a bien pris en compte les paiements effectués par la SARL Cofratex au moyen du moratoire arrêté par la CCSF,

Par conséquent,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par M. le juge commissaire près le tribunal de commerce de Nice, en ce qu'il a admis au passif de la procédure collective de la SARL Cofratex, la somme totale de 242.367,69 euros dont 169.298,27 euros à titre privilégié et 73.069,42 euros à titre chirographaire.

- réserver les entiers dépens.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 28 juin 2021, l'URSSAF PACA demande à la cour de':

- confirmer, en toutes ses dispositions, l'ordonnance en date du 16 décembre 2020 rendue par le juge commissaire près le tribunal de commerce de Nice.

Et, y ajoutant :

- condamner, en cause d'appel, l'EURL Cofratex à payer à l'URSSAF PACA la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens de l'instance.

L'affaire a fait l'objet d'un avis de fixation en date du 20 novembre 2024 pour être examinée à l'audience du 15 mai 2025. La clôture a été rendue le 24 avril 2025.

Il sera renvoyé, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens respectifs.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'admission de la créance définitive de l'Urssaf

Aux termes du quatrième alinéa de l'article L.622-24 du code de commerce : « la déclaration des créances doit être faite alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre. Celles dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées sur la base d'une évaluation. Les créances du Trésor public et des organismes de prévoyance et de sécurité sociale ainsi que les créances recouvrées par les organismes visés aux articles L.5427-1 à L.5427-6 du code du travail, qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration, sont admises à titre provisionnel pour leur montant déclaré. En tout état de cause, les déclarations du Trésor et de la sécurité sociale sont toujours faites sous réserve des impôts et autres créances non établis à la date de la déclaration. Sous réserve des procédures judiciaires ou administratives en cours, leur établissement définitif doit, à peine de forclusion, être effectué dans le délai prévu à l'article L.624-1 (...) ».

En outre, l'article L.244-9 du code de la sécurité sociale dispose que : « la contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L.211-16 du code de l'organisation judiciaire, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Le délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte non contestée et devenue définitive est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d'exécution signifié en application de cette contrainte. »

En l'espèce, la SARL Cofratex soutient que le juge-commissaire a procédé à l'admission de la créance déclarée par l'URSSAF sans prendre en compte ses contestations'; que la vérification de la créance n'a pas été sérieusement faite. Elle fait grief à l'URSSAF de ne pas avoir fourni de décompte détaillé ni justifié de l'imputation des paiements qu'elle estime avoir effectués, notamment dans le cadre du dispositif Cochef ou par l'intermédiaire du Trésor public.

Elle invoque également une erreur dans la date de renvoi, l'ayant empêchée d'être entendue lors de l'audience, sans toutefois en tirer de conséquences juridiques, ni solliciter dans le dispositif de ses conclusions qui seul, lie la cour, l'annulation de l'ordonnance du juge commissaire.

En réponse, la SCP [O] expose que toutes les cotisations sociales déclarées par l'URSSAF et admises au passif de la liquidation ont fait l'objet de mises en demeure restées sans effet, suivies de contraintes émises et non contestées par la société Cofratex. Selon l'intimée, ces créances sont consacrées par un titre exécutoire, leur conférant la force d'une décision de justice.

Elle précise que contrairement aux affirmations de la société Cofratex, l'URSSAF PACA a bien pris en compte, dans sa déclaration de créances, les paiements réalisés par la société Cofratex dans le cadre du moratoire accordé par la CCSF avant l'ouverture de la procédure collective.

L'URSSAF PACA fait valoir la régularité de ses déclarations, la force exécutoire de ses contraintes et la prise en compte des règlements antérieurement effectués par la société Cofratex.

Il résulte d'une jurisprudence constante qu'à défaut de contestation régulièrement formée devant le tribunal judiciaire compétent, la contrainte émise et notifiée par l'URSSAF devient définitive et produit les effets d'un titre exécutoire (Cass. 2e chambre civile,16 juin 2016, n°15-12.505'; Cass. 2e chambre civile, 9 mars 2017, n°16-11.167)

En l'espèce, l'URSSAF produit les contraintes sur lesquelles elle fonde sa demande (pièces 11 à 29) émises entre 2011 et 2026, dont il n'est justifié d'aucune contestation dans les formes requises. Ces contraintes doivent dès lors être tenues pour exécutoires au sens des dispositions susvisées, et leur montant est dû de plein droit sauf à ce que la société Cofratex démontre avoir réglé les sommes dues au titre de ces contraintes.

La société Cofratex verse aux débats'le relevé d'un compte bancaire de M. [D], gérant de la société Cofratex, faisant apparaître le débit d'un chèque d'un montant de 37'872,42 euros le 22 juin 2015 et un bordereau de débit du dit chèque mentionnant comme bénéficiaire l'URSSAF.

Nonobstant ses affirmations, la société Cofratex ne démontre pas que ce chèque de 37'872,42 euros a bien été encaissé par l'URSSAF étant observé que la copie du chèque n'est pas communiquée et que le bordereau produit ne comporte que des mentions manuscrites invérifiables.

La Cofratex produit également un courrier de l'URSSAF en date du 2 mai 2014 confirmant avoir reçu des virements de la DGFIP au titre d'un moratoire CCSF pour la somme totale de 812'732,75 euros et avoir reçu un chèque d'un montant de 45'554,43 euros, soit la somme globale de 858'287,18 euros.

Elle justifie ainsi du paiement à l'URSSAF de la somme globale de 858'287,18 euros, paiement intervenu avant le 2 mai 2014, date du courrier de l'URSSAF, reconnaissant avoir reçu cette somme.

Or, si l'URSSAF affirme en avoir tenu compte, celle-ci ne justifie pas de l'imputation du paiement de ces sommes sur les sommes objets des contraintes antérieures au 2 mai 2014.

Dans ces conditions, l'URSSAF ne démontre pas quelle somme reste à devoir pour la période de cotisation antérieure au 2 mai 2014.

Seront donc écartées de la créance de l'URSSAF les sommes dues pour la période de cotisation antérieure au 2 mai 2014.

Seront uniquement retenues les sommes figurant au bordereau de déclaration de créance définitive du 14 avril 2017 correspondant aux sommes restant dues au titre des contraintes émises au titre des cotisations pour la période postérieure au 2 mai 2014 soit les sommes suivantes':

- juillet 2014': 10'892,77 euros à titre privilégié

- août 2015': 10'042,50 euros à titre privilégié

- septembre 2015': 14'030 euros à titre privilégié

- octobre à janvier 2016': 55'788 euros à titre privilégié

- février à juillet 2016': 32'990,78 euros à titre privilégié

Soit la somme totale de': 123'744,05 euros à titre privilégié.

En conséquence, l'ordonnance querellée sera infirmée en son intégralité et la créance de l'URSSAF fixée à la somme de 123'744,05 euros à titre privilégié.

Sur les demandes accessoires

L'appelante succombe et sera condamnée aux dépens qui seront traités en frais privilégiés de la procédure.

Au vu des circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties. Les demandes sur ce chef seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, après débats publics, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

Infirme l'ordonnance querellée en toute ses dispositions';

Statuant à nouveau,

Fixe la créance de l'URSSAF à la somme de 123'744,05 euros à titre privilégié';

Déboute les parties de leurs demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la SARL Cofratex aux dépens d'appel qui seront traités en frais privilégiés de la procédure collective.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

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