CA Montpellier, 2e ch. civ., 4 septembre 2025, n° 24/06321
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/06321 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QPP7
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 DECEMBRE 2024
Tribunal Judiciaire de MONTPELLIER N° RG 24/30386
APPELANTE :
S.A.R.L. KAPRISS, société en redressement judiciaire, représentée par la SELARL AEGIS prise en la personne de Me [J] [U], mandataire judiciaire
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Thibault GANDILLON de la SCP LES AVOCATS DU THELEME, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.C. GAED prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
assignée à domicile le 27/01/25
Ordonnance de clôture du 13 Mai 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 906-5 et 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mai 2025,en audience publique, devant Mme Virginie HERMENT, Conseillère, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseiller
Mme Virginie HERMENT, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Laurence SENDRA
ARRET :
- Rendu par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte du 20 mars 2024, la société Gaed a fait assigner en référé la société Kapriss devant le président du tribunal judiciaire de Montpellier afin qu'il :
- constate que par l'effet du commandement de payer du 21 février 2024, la clause résolutoire contenue au bail était acquise depuis le 21 mars 2024,
- ordonne en conséquence l'expulsion de la société Kapriss et de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique si besoin était,
- dise et juge que la société Kapriss serait tenue à compter de cette date d'une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 2 634 euros,
- condamne par provision la société Kapriss à lui payer la somme de 13 122 euros, déduction éventuellement faite des provisions versées depuis le commandement de payer et augmentée des termes postérieurs restés également impayés,
- condamne par provision la société Kapriss à lui payer la somme de 2 634 euros à titre de provision sur les indemnités d'occupation échues pour avril 2024,
- condamne la société Kapriss à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Au soutien de ses demandes, elle exposait que par contrat du 6 décembre 2011, elle avait donné à bail à la société Kapriss un local à usage commercial, situé [Adresse 6], que le 21 février 2024, elle avait fait délivrer à la locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme principale de 10 488 euros, que cette dernière n'avait pas réglé les sommes dues dans le mois suivant le commandement et qu'au 1er mars 2024 était due une somme de 13 122 euros.
Aux termes d'une ordonnance rendue le 5 décembre 2024, le président du tribunal judiciaire de Montpellier a :
- déclaré recevable l'action de la société Gaed à l'encontre de la société Kapriss,
- constaté la résiliation de plein droit du bail liant les parties par l'effet du commandement de payer en date du 21 février 2024, et ce à compter du 22 mars 2024,
- ordonné l'expulsion de la société Kapriss qui devrait laisser les lieux loués (Central parc [Adresse 8] extension, [Adresse 4] à [Localité 7]) libres de sa personne, de ses biens, et de tous occupants de son chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance,
- dit qu'à défaut, il pourrait être procédé à son expulsion avec assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin était,
- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,
- condamné la société Kapriss à payer à la société Gaed les sommes provisionnelles suivantes:
* une provision de 24 544,50 euros en deniers et quittances à valoir sur les loyers, charges, et indemnités d'occupation dus pour la période jusqu'au mois d'octobre 2024 inclus, selon décompte actualisé au 16 octobre 2024,
* une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle égale à la somme de 2 634 euros en deniers ou quittances à compter du 1er novembre 2024, date de fin de la période couverte par la provision précitée, jusqu'à libération effective des lieux,
- débouté la société Kapriss de ses demandes, notamment d'octroi de délais de paiement ou de suspension des effets de la clause résolutoire,
- rejeté toute demande autre, plus ample ou contraire,
- condamné la société Kapriss à payer à la société Gaed une somme l 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Kapriss aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 21 février 2024.
Par déclaration en date du 13 décembre 2024, la société Kapriss a relevé appel de cette ordonnance.
Le 16 décembre 2024, le tribunal de commerce a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Kapriss, la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U] étant désignée en qualité de mandataire.
Aux termes de ses dernières conclusions communiquées le 27 janvier 2025, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la société Kapriss, représentée par la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U], mandataire judiciaire, demande à la cour, de :
- infirmer la décision attaquée en ce qu'elle :
* a déclaré recevable l'action de la société Gaed à son encontre,
* a consaté la résiliation de plein droit du bail liant les parties par l'effet du commandement de payer en date du 21 février 2024, et ce à compter du 22 mars 2024,
* a ordonné son expulsion en laissant les lieux loués ([Adresse 5] [Adresse 8] extension, [Adresse 4] à [Localité 7]) libres de sa personne, de ses biens, et de tous occupants de son chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance,
* a dit qu'à défaut, il pourrait être procédé à son expulsion avec assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin était,
* l'a condamnée à payer à la société Gaed les sommes provisionnelles suivantes :
- une provision de 24 544,50 euros en deniers et quittances à valoir sur les loyers, charges, et indemnités d'occupation dus pour la période jusqu'au mois d'octobre 2024 inclus, selon décompte actualisé au 16 octobre 2024,
- une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle égale à la somme de 2 634 euros, en deniers ou quittances à compter du 1er novembre 2024, date de fin de la période couverte par la provision précitée, jusqu'à libération effective des lieux,
* l'a déboutée de ses demandes, notamment d'octroi de délais de paiement ou de suspension des effets de la clause résolutoire,
- l'a condamnée à payer à la société Gaed une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamnée aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 21 février 2024.
Et statuant à nouveau,
- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,
- juger irrecevable le bailleur en sa demande de résiliation du bail, au vu du redressement judiciaire prononcé à son encontre,
- le débouter de toutes ses demandes,
Si mieux n'aime la cour
- suspendre les effets de la clause résolutoire,
- statuer ce que le droit sur les dépens
La société Kapriss expose que postérieurement à l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Montpellier, elle a été placée en redressement judiciaire, la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U] ayant été désignée en qualité de mandataire.
Elle relève que l'ordonnance attaquée n'a pas acquis l'autorité de la chose jugée avant le prononcé du redressement judiciaire et qu'en application de l'article L. 622-21 du code de commerce, le principe de l'arrêt des poursuites individuelles des créanciers s'oppose à la constatation de la résiliation du bail en vertu de la clause résolutoire, puisque le bénéfice de la clause n'avait pas été constaté par une décision passée en force de chose jugée. Elle en déduit que le bailleur est irrecevable en sa demande.
Subsidiairement, elle invoque les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce et précise que sa situation financière justifie la suspension de la clause résolutoire. Elle précise qu'elle connaît d'importantes difficultés financières, lesquelles ne sont pas dues à une baisse d'activité mais au départ d'une associée.
La société Gaed, à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées le 27 janvier 2025 selon les modalités de l'article 655 du code de procédure civile, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes des dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Selon les dispositions de l'article L. 622-21 I du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Il résulte de la combinaison de ces textes que l'action introduite par le bailleur, avant le placement en redressement judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail commercial pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture, ne peut être poursuivie après ce jugement.
En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats qu'aux termes d'un jugement en date du 16 décembre 2024, le tribunal de commerce de Montpellier a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Kapriss et a désigné la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [J] [U] en qualité de mandataire judiciaire.
A la date de ce jugement, l'ordonnance rendue le 5 décembre 2024, dont la société Kapriss a interjeté appel le 13 décembre 2024, n'était pas passée en force de chose jugée.
L'action en résiliation du contrat de bail fondée sur le non paiement des loyers antérieurs au jugement d'ouverture est une action en résolution d'un contrat fondé sur le défaut de paiement d'une somme d'argent au sens de l'article L. 622-21 du code de commerce.
Cette action introduite par le bailleur avant le placement en redressement judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue au bail pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, ne peut, dès lors qu'elle n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée, être poursuivie après ce jugement.
La cour infirmera donc la décision déférée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail et ordonné l'expulsion de la société Kapriss et déclarera les demandes tendant au constat de la résiliation du bail et à l'expulsion irrecevables en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites édictée par le texte susvisé.
Du reste, l'instance en référé tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une provision n'est pas une instance en cours interrompue par l'ouverture de la procédure collective du débiteur, de sorte qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance ayant condamné la société Kapriss au paiement d'une provision et d'une indemnité provisionnelle d'occupation et de déclarer ces demandes en paiement irrecevables en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites édictée par le texte susvisé.
Enfin, la société Gaed qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il convient du reste de laisser à sa charges les frais par elle engagés en marge des dépens. La décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a condamné la société Kapriss à verser à la société Gaed une indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'intimée sera déboutée de cette demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare irrecevables les demandes de condamnation en paiement de l'arriéré locatif et d'une indemnité mensuelle d'occupation,
Déclare irrecevables les demandes tendant au constat de la résiliation du bail et à l'expulsion de la société Kapriss,
Déboute la société Gaed de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Gaed aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier La Présidente
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/06321 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QPP7
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 DECEMBRE 2024
Tribunal Judiciaire de MONTPELLIER N° RG 24/30386
APPELANTE :
S.A.R.L. KAPRISS, société en redressement judiciaire, représentée par la SELARL AEGIS prise en la personne de Me [J] [U], mandataire judiciaire
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Thibault GANDILLON de la SCP LES AVOCATS DU THELEME, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.C. GAED prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
assignée à domicile le 27/01/25
Ordonnance de clôture du 13 Mai 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 906-5 et 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mai 2025,en audience publique, devant Mme Virginie HERMENT, Conseillère, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseiller
Mme Virginie HERMENT, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Laurence SENDRA
ARRET :
- Rendu par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte du 20 mars 2024, la société Gaed a fait assigner en référé la société Kapriss devant le président du tribunal judiciaire de Montpellier afin qu'il :
- constate que par l'effet du commandement de payer du 21 février 2024, la clause résolutoire contenue au bail était acquise depuis le 21 mars 2024,
- ordonne en conséquence l'expulsion de la société Kapriss et de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique si besoin était,
- dise et juge que la société Kapriss serait tenue à compter de cette date d'une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 2 634 euros,
- condamne par provision la société Kapriss à lui payer la somme de 13 122 euros, déduction éventuellement faite des provisions versées depuis le commandement de payer et augmentée des termes postérieurs restés également impayés,
- condamne par provision la société Kapriss à lui payer la somme de 2 634 euros à titre de provision sur les indemnités d'occupation échues pour avril 2024,
- condamne la société Kapriss à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Au soutien de ses demandes, elle exposait que par contrat du 6 décembre 2011, elle avait donné à bail à la société Kapriss un local à usage commercial, situé [Adresse 6], que le 21 février 2024, elle avait fait délivrer à la locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme principale de 10 488 euros, que cette dernière n'avait pas réglé les sommes dues dans le mois suivant le commandement et qu'au 1er mars 2024 était due une somme de 13 122 euros.
Aux termes d'une ordonnance rendue le 5 décembre 2024, le président du tribunal judiciaire de Montpellier a :
- déclaré recevable l'action de la société Gaed à l'encontre de la société Kapriss,
- constaté la résiliation de plein droit du bail liant les parties par l'effet du commandement de payer en date du 21 février 2024, et ce à compter du 22 mars 2024,
- ordonné l'expulsion de la société Kapriss qui devrait laisser les lieux loués (Central parc [Adresse 8] extension, [Adresse 4] à [Localité 7]) libres de sa personne, de ses biens, et de tous occupants de son chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance,
- dit qu'à défaut, il pourrait être procédé à son expulsion avec assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin était,
- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,
- condamné la société Kapriss à payer à la société Gaed les sommes provisionnelles suivantes:
* une provision de 24 544,50 euros en deniers et quittances à valoir sur les loyers, charges, et indemnités d'occupation dus pour la période jusqu'au mois d'octobre 2024 inclus, selon décompte actualisé au 16 octobre 2024,
* une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle égale à la somme de 2 634 euros en deniers ou quittances à compter du 1er novembre 2024, date de fin de la période couverte par la provision précitée, jusqu'à libération effective des lieux,
- débouté la société Kapriss de ses demandes, notamment d'octroi de délais de paiement ou de suspension des effets de la clause résolutoire,
- rejeté toute demande autre, plus ample ou contraire,
- condamné la société Kapriss à payer à la société Gaed une somme l 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Kapriss aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 21 février 2024.
Par déclaration en date du 13 décembre 2024, la société Kapriss a relevé appel de cette ordonnance.
Le 16 décembre 2024, le tribunal de commerce a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Kapriss, la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U] étant désignée en qualité de mandataire.
Aux termes de ses dernières conclusions communiquées le 27 janvier 2025, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la société Kapriss, représentée par la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U], mandataire judiciaire, demande à la cour, de :
- infirmer la décision attaquée en ce qu'elle :
* a déclaré recevable l'action de la société Gaed à son encontre,
* a consaté la résiliation de plein droit du bail liant les parties par l'effet du commandement de payer en date du 21 février 2024, et ce à compter du 22 mars 2024,
* a ordonné son expulsion en laissant les lieux loués ([Adresse 5] [Adresse 8] extension, [Adresse 4] à [Localité 7]) libres de sa personne, de ses biens, et de tous occupants de son chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance,
* a dit qu'à défaut, il pourrait être procédé à son expulsion avec assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin était,
* l'a condamnée à payer à la société Gaed les sommes provisionnelles suivantes :
- une provision de 24 544,50 euros en deniers et quittances à valoir sur les loyers, charges, et indemnités d'occupation dus pour la période jusqu'au mois d'octobre 2024 inclus, selon décompte actualisé au 16 octobre 2024,
- une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle égale à la somme de 2 634 euros, en deniers ou quittances à compter du 1er novembre 2024, date de fin de la période couverte par la provision précitée, jusqu'à libération effective des lieux,
* l'a déboutée de ses demandes, notamment d'octroi de délais de paiement ou de suspension des effets de la clause résolutoire,
- l'a condamnée à payer à la société Gaed une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamnée aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 21 février 2024.
Et statuant à nouveau,
- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,
- juger irrecevable le bailleur en sa demande de résiliation du bail, au vu du redressement judiciaire prononcé à son encontre,
- le débouter de toutes ses demandes,
Si mieux n'aime la cour
- suspendre les effets de la clause résolutoire,
- statuer ce que le droit sur les dépens
La société Kapriss expose que postérieurement à l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Montpellier, elle a été placée en redressement judiciaire, la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [U] ayant été désignée en qualité de mandataire.
Elle relève que l'ordonnance attaquée n'a pas acquis l'autorité de la chose jugée avant le prononcé du redressement judiciaire et qu'en application de l'article L. 622-21 du code de commerce, le principe de l'arrêt des poursuites individuelles des créanciers s'oppose à la constatation de la résiliation du bail en vertu de la clause résolutoire, puisque le bénéfice de la clause n'avait pas été constaté par une décision passée en force de chose jugée. Elle en déduit que le bailleur est irrecevable en sa demande.
Subsidiairement, elle invoque les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce et précise que sa situation financière justifie la suspension de la clause résolutoire. Elle précise qu'elle connaît d'importantes difficultés financières, lesquelles ne sont pas dues à une baisse d'activité mais au départ d'une associée.
La société Gaed, à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées le 27 janvier 2025 selon les modalités de l'article 655 du code de procédure civile, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes des dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Selon les dispositions de l'article L. 622-21 I du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Il résulte de la combinaison de ces textes que l'action introduite par le bailleur, avant le placement en redressement judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail commercial pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture, ne peut être poursuivie après ce jugement.
En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats qu'aux termes d'un jugement en date du 16 décembre 2024, le tribunal de commerce de Montpellier a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Kapriss et a désigné la Selarl AEGIS prise en la personne de maître [J] [U] en qualité de mandataire judiciaire.
A la date de ce jugement, l'ordonnance rendue le 5 décembre 2024, dont la société Kapriss a interjeté appel le 13 décembre 2024, n'était pas passée en force de chose jugée.
L'action en résiliation du contrat de bail fondée sur le non paiement des loyers antérieurs au jugement d'ouverture est une action en résolution d'un contrat fondé sur le défaut de paiement d'une somme d'argent au sens de l'article L. 622-21 du code de commerce.
Cette action introduite par le bailleur avant le placement en redressement judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue au bail pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, ne peut, dès lors qu'elle n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée, être poursuivie après ce jugement.
La cour infirmera donc la décision déférée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail et ordonné l'expulsion de la société Kapriss et déclarera les demandes tendant au constat de la résiliation du bail et à l'expulsion irrecevables en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites édictée par le texte susvisé.
Du reste, l'instance en référé tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une provision n'est pas une instance en cours interrompue par l'ouverture de la procédure collective du débiteur, de sorte qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance ayant condamné la société Kapriss au paiement d'une provision et d'une indemnité provisionnelle d'occupation et de déclarer ces demandes en paiement irrecevables en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites édictée par le texte susvisé.
Enfin, la société Gaed qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il convient du reste de laisser à sa charges les frais par elle engagés en marge des dépens. La décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a condamné la société Kapriss à verser à la société Gaed une indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'intimée sera déboutée de cette demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare irrecevables les demandes de condamnation en paiement de l'arriéré locatif et d'une indemnité mensuelle d'occupation,
Déclare irrecevables les demandes tendant au constat de la résiliation du bail et à l'expulsion de la société Kapriss,
Déboute la société Gaed de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Gaed aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier La Présidente