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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 4 septembre 2025, n° 22/02813

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/02813

4 septembre 2025

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2025

(n° 122 /2025, 19 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/02813 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFGER

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 janvier 2022 - Tribunal judiciaire de Melun, Ch1 Cab1 Cont Civil Gal Contentieux - RG n° 19/02757

APPELANTE

La société SARL S.A.G.E. SERVICES ACHATS GESTION ENTREPRISES

Immatriculée au R.C.S. de [Localité 4] sous le n° 433 173 473

Agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Amandine Fernandes, avocat au barreau de Paris, avocat D1358

INTIMÉE

La société S.C.I F.2.M

Immatriculée au R.C.S. de [Localité 4] sous le n° 828 399 170

Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Kenza Hamdache, avocat au barreau de Paris, toque : A0220

Assistée de Me Eric Azoulay, membre de la Selarl Fedarc, avocat au barreau du Val d'Oise

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 février 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Stéphanie Dupont, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Mme Nathalie Renard, présidente de chambre

Mme Stéphanie Dupont, conseillère

Mme Marie Girousse, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Nathalie Renard, présidente de la chambre et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 5 juillet 2011, la société Groupe Graphique Communication Audiovisuelle (ci-après la société 2GCA) a consenti un bail commercial à la société SARL S.A.G.E. Services Achats Gestion Entreprises (ci-après la société S.A.G.E.), portant sur un local commercial dépendant d'un ensemble immobilier en copropriété situé [Adresse 2] à [Localité 6], pour une durée de 9 années entières et consécutives à compter du 1er août 2011, moyennant un loyer annuel de 8.100 euros HT, outre la somme mensuelle de 150 euros HT à titre d'acompte sur les charges.

La société S.A.G.E. a déménagé au sein du même ensemble immobilier et, par acte sous seing privé du 1er mai 2015, la bailleresse a consenti à la locataire un bail commercial portant sur un autre local commercial dépendant de l'ensemble immobilier en copropriété situé [Adresse 2] à [Adresse 5] [Localité 1], pour une durée de 9 années entières et consécutives à compter du 1er mai 2015, moyennant un loyer annuel de 6.900 euros HT, outre la somme mensuelle de 150 euros HT à titre d'acompte sur les charges.

En mars 2017, la société S.C.I F.2.M (ci-après la SCI F2M ) a acquis les locaux loués à la société S.A.G.E.

Par assignation du 7 octobre 2019, la société S.A.G.E. a fait assigner la SCI F2M devant le tribunal judicaire de Melun.

Par jugement du 4 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Melun a :

fixé à la somme demandée de 4 088,21 euros, le montant des provisions pour charges indûment versées par la société S.A.G.E. pour la période du 1er avril 2017 au 31 décembre 2020 et dues à celle-ci par la SCI F2M ;

fixé à la somme de 5 640,64 euros TTC le montant des loyers et charges impayés par la société S.A.G.E et dus par celle-ci à la SCI F2M ;

ordonné la compensation entre les dettes réciproques des parties et, en conséquence :

condamné la société S.A.G.E. à verser à la SCI F2M la somme de 1 552,43 euros ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

dit que chaque partie conservera les frais qu'elle a engagés au titre des dépens.

Par déclaration du 3 février 2022, la société S.A.G.E. a interjeté appel du jugement en critiquant tous les chefs du dispositif à l'exception de celui qui a ordonné l'exécution provisoire.

Par conclusions déposées et notifiées le 25 juillet 2022, la SCI F2M a interjeté appel incident.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 janvier 2025.

PRETENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 6 janvier 2025, la société S.A.G.E. demande à la cour de :

infirmer le jugement rendu le 4 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Melun, en ce qu'il a :

fixé à la somme demandée de 4.088,21 euros, le montant des provisions pour charges indument versées par la société S.A.G.E. pour la période du 1er avril 2017 au 31 décembre 2020 et dues à celle-ci par la SCI F2M ;

fixé à la somme de 5.640,64 euros TTC le montant des loyers et charges impayés par la société S.A.G.E. et dus par celle-ci à la SCI F2M ;

ordonné la compensation entre les dettes réciproques des parties et, en conséquence,

condamné la société S.A.G.E. à verser à la SCI F2M la somme de 1.552,43 euros ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

dit que chaque partie conservera les frais qu'elle a engagés au titre des dépens,

Statuant à nouveau, :

condamner la SCI F2M à prendre en charge les frais d'électricité et de téléphonie/internet, conformément à ses obligations contractuelles ;

ordonner que le règlement des frais d'électricité et des frais de téléphonie/internet dus par la bailleresse et avancés par la locataire s'effectue par compensation avec les sommes dues par la société S.A.G.E. au titre des loyers, sur présentation des factures acquittées par la société S.A.G.E ;

En conséquence, condamner la SCI F2M à rembourser les frais d'ores et déjà exposés par la société S.A.G.E, à savoir :

au titre des frais de téléphonie/internet, la somme de 6.889,19 euros (somme à parfaire arrêtée au mois de décembre 2024) ;

au titre des frais d'électricité, la somme de 3.634,19 euros (somme à parfaire arrêtée au mois de décembre 2024) ;

condamner la SCI F2M à prendre en charge l'intégralité des frais de mise aux normes afférents à la vétusté des installations électriques, le cas échéant, condamner la SCI F2M au remboursement des frais avancés par la société S.A.G.E. à ce titre ;

autoriser la société S.A.G.E à consigner les loyers à échoir jusqu'à parfaite réalisation des travaux ou remboursement des sommes avancées ;

condamner la SCI F2M au remboursement des acomptes sur charges indument versés depuis le mois d'avril 2017, soit 150 euros HT par mois depuis cette date ;

condamner la SCI F2M à verser à la société S.A.G.E. 1.767,84 euros au titre du commandement de payer injustifié en date du 24 août 2018 ;

condamner la SCI F2M à verser à la société S.A.G.E. 552 euros au titre de son préjudice de jouissance ;

condamner la SCI F2M à verser à la société S.A.G.E. 3.000 euros pour résistance abusive ;

condamner la SCI F2M à verser à la société S.A.G.E. 350 euros au titre des frais de constat d'huissier en date du 18 septembre 2018 ;

condamner la SCI F2M à 10.000 euros, soit 5.000 euros pour les frais de première instance et 5.000 euros pour les frais en appel, au titre de l'article 700 du code de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

En tout état de cause,

débouter la SCI F2M de son appel incident et de toutes ses demandes, plus amples et contraires, et notamment des demandes suivantes :

dire qu'il n'existe aucune commune volonté des parties concernant la prise en charge par la société bailleresse des frais d'électricité, de téléphonie et d'internet de la société S.A.G.E.,

dire que la société S.A.G.E. ne respecte pas la destination du bail commercial,

dire que la société S.A.G.E. sous-loue illégalement son local,

ordonner la résolution du bail commercial en date du 1er mai 2015 et l'expulsion de la société S.A.G.E. au besoin par le concours de la force publique,

condamner la société S.A.G.E. à devoir verser à la société F2M la somme de 42.207,37 euros au titre des loyers et charges TTC dont elle demeure redevable,

condamner la société S.A.G.E. à devoir payer à la société F2M la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de la procédure abusive,

condamner la société S.A.G.E. à devoir régler à la société F2M, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société S.A.G.E. aux entiers dépens.

La société S.A.G.E. fait valoir :

Sur la prise en charge par la bailleresse des frais d'électricité et de téléphonie/internet,

- que lors de la conclusion du bail, la société S.A.G.E. et la société 2GCA étaient convenues que les frais d'électricité et de téléphonie/internet seraient inclus dans le loyer, aucun locataire ne disposant de compteur d'électricité individuel et la société 2GCA souscrivant un contrat de téléphonie internet pour l'ensemble de ses locataires auprès de la société In Vactis ;

- que la SCI F2M était parfaitement informée de cette situation au moment de son acquisition des locaux pour avoir été elle-même locataire de la société 2GCA avant l'acquisition ;

- qu'en janvier 2017, la société S.A.G.E. a souscrit son propre abonnement de téléphonie/internet en raison de la mauvaise qualité du service fourni par le prestataire de la société 2GCA et qu'elle a déduit le coût de son abonnement, soit 72 euros par mois, de ses loyers ;

- que l'attestation du gérant de la société 2GCA, M. [D], produite aux débats par la SCI F2M, selon laquelle les frais d'électricité et de téléphonie/internet étaient à la charge des locataires, constitue un faux ;

- qu'à la suite d'une coupure d'électricité du 27 mars 2019 au 15 avril 2019, elle a été contrainte de souscrire un contrat de fourniture d'énergie pour continuer à exploiter les locaux loués ;

- que l'article L. 145-40-2 du code de commerce, dont les dispositions sont d'ordre public, impose l'établissement d'un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail ; que le bail commercial qui lie les parties n'en comporte pas ; qu'en outre, la bailleresse n'effectuait pas les régularisations de charges annuelles ;

- qu'en application de l'article L. 333-1 du code de l'énergie, qui prohibe la rétrocession d'électricité, le bailleur n'a pas le droit de refacturer à son locataire les frais d'électricité qu'il aurait lui-même régléS au titre d'un contrat de fourniture d'énergie ;

- que le bail stipule que le preneur ne peut 'demander aucune indemnisation en cas d'arrêt des fournitures d'eau, de gaz et d'électricité ou pour tout autres fournitures en cas de force majeure', ce qui confirme que ces prestations sont fournies par la bailleresse ;

- que la société 2GCA qui avait souscrit un contrat de services téléphonie-internet-fax pour l'ensemble des locataires ne lui refacturait que l'option fax ce qui démontre que les prestations téléphonie et internet étaient comprises dans le loyer ; que la remise commerciale pour défaut d'internet que lui a consentie la société 2GCA en juillet 2016 et le courriel de la société In Vactis qu'elle produit aux débats le confirme ;

Sur la mise en conformité de l'installation électrique,

- que l'installation électrique est vétuste et n'est plus aux normes ; que la vétusté a été constatée tant par l'huissier de justice qu'elle a mandaté que par celui mandaté par la SCI F2M ; qu'elle a également été constatée par les entreprises mandatées pour la réalisation des devis des travaux de mise aux normes ;

- qu'il est constant que les travaux afférents à la vétusté incombent au bailleur ; qu'il ne s'agit pas de dépenses d'entretien et de réparation ;

- que le changement de compteur EDF, qui se situe à l'extérieur des locaux loués, en 2019 n'est pas la preuve de la conformité de l'installation électrique aux normes en la matière ;

Sur la régularisation des charges,

- que, conformément à l'article R. 145-36 du code de commerce, la SCI F2M doit transmettre un état récapitulatif annuel des charges, ce qu'elle n'a jamais fait depuis le début du bail, malgré les relances de la société S.A.G.E ; que ce n'est qu'après l'assignation du 7 octobre 2019 que la bailleresse a communiqué la régularisation des charges pour les années 2017 et 2018 ;

- que la SCI F2M ne justifie ni de la réalité ni de la répartition des charges ; que les locaux qu'elle loue se situent au rez-de-chaussée du lot n° 2 de la copropriété dont la surface totale est de 368 m² ; que des locaux ont été créés au 1er étage du lot n° 2 sans modification de l'état descriptif de division de sorte que les locaux du 1er étage, qui sont occupés par la SCI F2M elle-même, ne sont pas pris en considération dans la répartition des charges ;

- que les régularisations des charges opérées par la SCI F2M sont donc erronées, voire abusives ; que l'absence de régularisation des charges rend sans cause les appels de provision à valoir sur le paiement des charges, qui doivent donc être remboursés au preneur ;

- que la société S.A.G.E conteste également le bien-fondé des charges retenues, s'en rapportant à ses conclusions de première instance sur ce point ;

Sur l'indemnisation de ses préjudices,

- qu'en raison des manquements de la SCI F2M à ses obligations légales et contractuelles, elle a été privée d'électricité pendant 4 jours en septembre 2018 et pendant 19 jours en mars et avril 2019 ;

- que faute de pouvoir lever le rideau métallique de son local, en l'absence d'électricité, elle a été dans l'impossibilité d'exploiter le local et de poursuivre son activité pendant 23 jours, ce qui lui a occasionné un préjudice de jouissance de 552 euros, correspondant au loyer pendant la période au cours de laquelle elle a été privée de la jouissance de son local ;

- que la bailleresse a en outre troublé sa jouissance paisible des locaux, après la délivrance de l'assignation qui a saisi le premier juge et après le jugement de première instance, en stationnant des véhicules utilitaires devant la seule fenêtre du local ; que la SCI F2M, qui se défend en prétendant, sans preuve, que les véhicules appartiendraient à la société BF Auto, omet d'indiquer que le gérant de la société BF Auto est un des associés de la SCI F2M ;

- que la mauvaise foi et la volonté de nuire de la SCI F2M sont établies par le comportement de cette dernière ci-dessus décrit, les échanges versées aux débats, les incohérences et surfacturations des loyers et charges de sorte qu'elle est bien fondée à solliciter la somme de 3.000 euros pour résistance abusive ;

Sur la demande de la SCI F2M de résolution du bail,

- qu'elle exploite dans les locaux loués un fonds de commerce conforme à son objet social,

- qu'elle ne sous-loue pas son local ; qu'elle a, pour rendre service à une amie, entreposé une caravane de marché ou camion rôtisserie dans son local gratuitement et de façon occasionnelle ;

- que les photos et le tableau (pièce adverse 33) n'ont pas de valeur probante ;

- que la sommation interpellative du 8 juillet 2022 est un faux en ce que l'huissier de justice qui en est l'auteur ne s'est pas déplacé sur les lieux mais a interrogé le gérant de la SCI F2M par téléphone ;

- que le 5 octobre 2022, l'huissier de justice a constaté que le camion rôtisserie n'était plus dans le local ;

Sur la demande de la SCI F2M en paiement de la somme de 42.207,37 euros

- que les décomptes locatifs sont erronés et incompréhensibles ; qu'ils incluent des provisions sur charges dont la restitution a été ordonnée par le tribunal ; que la SCI F2M ne justifie pas du calcul de l'indexation des loyers dont elle se prévaut ;

- que le bail commercial du 1er mai 2015 prévoit la révision annuelle du loyer en fonction de l'indice du coût de la construction (ICC) ; qu'en première instance, elle avait soulevé que cet indice n'était plus applicable depuis le 1er septembre 2014, conformément à l'article L. 145-34 du code de commerce ;

- que même en prenant en considération l'ICC, comme jugé par le tribunal judiciaire de Melun, le calcul de l'indexation des loyers par la bailleresse est faux ;

- que les décomptes, compte-tenu des erreurs qu'ils comportent, ne sauraient justifier une obligation de paiement.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 13 janvier 2025, la SCI F2M, demande à la cour de :

A titre principal,

la recevoir dans l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

A titre principal :

infirmer le jugement rendu le 4 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Melun en ce qu'il a :

fixé à la somme demandée de 4 088,21 euros, le montant des provisions pour charges indûment versées par la société S.A.G.E. pour la période du 1er avril 2017 au 31 décembre 2020 et dues à celle-ci par la SCI F2M ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

dit que chaque partie conservera les frais qu'elle a engagés au titre des dépens ;

Plus précisément, en ce qu'il a :

débouté la SCI F2M de ses demandes plus amples ou contraires dont ses demandes formulées au titre de la sous-location non autorisée et a sollicité la résolution du bail et l'expulsion de la société S.A.G.E.,

débouté la SCI F2M de sa demande tendant à voir condamner la société S.A.G.E. à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de la procédure abusive,

condamné la société S.A.G.E. à verser à la SCI F2M la somme de 1.552,43 euros,

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Melun le 4 janvier 2022 en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. de ses demandes plus amples ou contraires et en particulier, en ce qu'il a :

débouté la société S.A.G.E. de sa demande tendant à voir condamner la SCI F2M à prendre en charge les frais d'électricité et de téléphonie-internet, par compensation sur les sommes qu'elle reste devoir au titre des loyers et de voir condamner la SCI F2M à lui rembourser la somme de 3.600 euros au titre des frais de téléphonie-internet et la somme de 1.152,21 euros d'électricité,

débouté la société S.A.G.E. de sa demande tendant à voir condamner la SCI F2M à prendre en charge l'intégralité des frais inhérents à la mise aux normes du local loué et de l'installation électrique et de la voir condamner au remboursement des frais avancés par elle comme d'être autorisée à consigner les loyers,

débouté la société S.A.G.E. de sa demande tendant à voir condamner la SCI F2M à lui payer la somme de 350 euros au titre du procès-verbal de constat établi,

débouté la société S.A.G.E. de sa demande tendant à voir condamner la SCI F2M à lui payer la somme de 1.767,84 euros au titre du commandement de payer,

débouté la société S.A.G.E de ses demandes tendant à voir condamner la SCI F2M à lui payer la somme de 524,95 euros au titre du préjudice de jouissance allégué au titre des coupures d'électricité,

débouté la société S.A.G.E. de sa demande tendant à voir condamner la SCI F2M à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de la résistance abusive,

Et statuant à nouveau :

débouter la société S.A.G.E. de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

dire qu'il n'existe aucune commune volonté des parties concernant la prise en charge par la société bailleresse des frais d'électricité, de téléphonie et d'internet de la société S.A.G.E,

dire que la société S.A.G.E. ne respecte pas la destination du bail commercial,

dire que la société S.A.G.E. sous-loue illégalement son local,

ordonner la résolution du bail commercial en date du 1er mai 2015 et l'expulsion de la société S.A.G.E. au besoin par le concours de la force publique,

condamner la société S.A.G.E. à devoir verser à la SCI F2M la somme de 42.207,37 euros au titre des loyers et charges TTC dont elle demeure redevable,

condamner la société S.A.G.E. à devoir payer à la SCI F2M la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de la procédure abusive,

En tout état de cause,

ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

condamner la société S.A.G.E. à devoir régler à la SCI F2M, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

condamner la société S.A.G.E. aux entiers dépens.

La SCI F2M fait valoir :

Sur la demande de la locataire de prise en charge par la bailleresse des frais d'électricité et de téléphonie/internet,

- que, contrairement à ce que soutient la société S.A.G.E., le bail comporte un inventaire des charges en son article 3 et que la société S.A.G.E. a été destinataire des régularisations de charges ;

- qu'aucune clause du bail ne prévoit la prise en charge des frais d'électricité et de téléphonie/internet par la bailleresse, de sorte que le prétendu accord conclu entre la société 2GCA et la société S.A.G.E. n'est pas opposable à la SCI F2M ;

- que l'ancien gérant de la société 2GCA a confirmé qu'il ne prenait pas en charge les frais d'électricité, de téléphonie/internet de la société S.A.G.E ;

- que la SCI F2M n'a jamais accepté de prendre en charge ces frais ;

- qu'il résulte de l'article R. 145-35 du code de commerce, que les charges courantes d'électricité, de téléphonie et d'internet ne figurent pas dans les dépenses imputables au bailleur ; que ces frais correspondent aux frais d'exploitation du preneur et lui incombent ;

- que le contrat EDF a été résilié par la société 2GCA en mars 2017 sans fermeture du compteur de sorte que la société S.A.G.E. a été alimentée en électricité gracieusement de mars 2017 à novembre 2019 ;

- que lorsque la SCI F2M était locataire de la société 2GCA, elle réglait les sommes correspondantes à sa consommation d'électricité à la bailleresse qui avait simplement conservé le compteur à son nom, ce qui était également le cas des autres locataires ;

- que la clause du bail selon laquelle 'le preneur ne peut demander aucune indemnisation en cas d'arrêt des fournitures d'eau, de gaz et d'électricité ou pour tout autres fournitures en cas de force majeure' ne démontre pas que la société 2GCA ne refacturait pas à la société S.A.G.E. les frais d'électricité, de téléphonie et d'internet ;

- que la SCI F2M n'a pas refacturé d'électricité à la société S.A.G.E. puisqu'elle n'a pas souscrit de contrat de fourniture d'électricité pour les locaux loués comme le faisait la société 2GCA ;

- que par courriel du 29 mars 2019 de son avocat, la société S.A.G.E a admis qu'elle avait toujours réglé les charges d'électricité directement au propriétaire ;

- que l'attestation de la société In Vactis selon laquelle 'tous les abonnements internet, téléphonie et fax étaient facturés par Open Ip à 2GCA' qui 'refacturait en interne à ses locataires', seule l'option Open fax étant refacturée à la société S.A.G.E., manque de force probante dès lors que la société In Vactis n'explique pas comment elle a connaissance de ce qui était refacturé par la société 2GCA à la société S.A.G.E. ;

- qu'il ne saurait être déduit de la remise de 287,50 euros opérée par la société 2GCA sur le loyer du mois de juillet 2016 pour 'défaut d'internet', que le bailleur prenait en charge les frais de téléphonie et d'internet de la société S.A.G.E. ;

Sur l'installation électrique,

- que le caractère vétuste de l'installation électrique n'est pas démontré ;

- que la demande formulée par la société S.A.G.E. tend à faire supporter au bailleur une amélioration des locaux alors que le bail stipule que le preneur s'engage à prendre les lieux en l'état sans pouvoir exiger à quelque époque et sous quelque prétexte que ce soit aucune réparation ou amélioration ;

- que la mise aux normes de l'installation électrique s'analyse en des travaux de remplacement à la charge du preneur en vertu du bail ;

- que le changement de compteur électrique effectué par la société S.A.G.E. a nécessité un changement d'alimentation ; que ce changement d'alimentation n'aurait pas été réalisé si l'installation électrique n'était pas aux normes ;

Sur la régularisation des charges,

- qu'il est faux de soutenir de la part de la société S.A.G.E. qu'aucune régularisation des charges n'est intervenue depuis la prise d'effet du bail ;

- que la société S.A.G.E. a bien été destinataire des décomptes de régularisation des charges ;

- que l'étage situé au-dessus du local loué par la société S.A.G.E. est fiscalement rattaché au bâtiment 3 depuis 2013 ;

Sur les demandes de dommages et intérêts de la société S.A.G.E.,

- que le préjudice de jouissance allégué par la société S.A.G.E. compte-tenu des coupures d'électricité résulte de la propre faute de la société S.A.G.E. qui a refusé de souscrire un contrat de fourniture d'énergie ; que la prise en charge des frais d'électricité de la locataire par la bailleresse n'était pas prévue dans le bail ;

- que les véhicules qui se sont stationnés devant la fenêtre du local occupé par la société S.A.G.E. appartiennent à la société BF Auto ; que la place de stationnement située devant la fenêtre du local occupé par la société S.A.G.E. existait déjà lorsque celle-ci est entrée dans les lieux ; que la SCI F2M a demandé à son locataire, dans un souci d'apaisement, de déplacer ce camion ;

Sur les manquements de la société S.A.G.E. à ses obligations contractuelles,

- qu'en violation des clauses du bail, la société S.A.G.E. entrepose dans le local loué une caravane de marché qui ne lui appartient pas ;

- que ce faisant, soit elle ne respecte pas la destination du bail, soit elle sous-loue illégalement les locaux ;

- que cette utilisation des locaux n'est pas ponctuelle ;

- que la société S.A.G.E. retient sur le montant des loyers appelés par la bailleresse le montant des frais d'électricité, de téléphonie-internet et qu'elle n'a pas payé les loyers des mois de mars et avril 2020 ;

- que la société S.A.G.E. a continué à sous-louer le local à l'entreprise de rôtisserie après le jugement de première instance.

Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

1- Sur la demande de la locataire tendant à la prise en charge par la bailleresse de ses frais d'électricité, de téléphonie et d'internet

En vertu de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable en l'espèce, le bail étant antérieur au 1er octobre 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l'espèce, la société S.A.G.E. demande à la cour de condamner la SCI F2M à lui verser la somme de 3.634,19 euros au titre des frais d'électricité, en indiquant qu'elle invoque la pièce n° 26 à l'appui de cette prétention.

La pièce n° 26 est constituée de factures EDF au nom de la société S.A.G.E., du 10 décembre 2019 au 18 décembre 2024, d'un montant total de 3792,11 euros.

Il s'en déduit que la société S.A.G.E. demande à la SCI F2M de lui rembourser les frais d'électricité dont elle s'est acquittée depuis qu'elle a souscrit, en 2019, un contrat de fourniture d'énergie auprès d'EDF afférent aux locaux loués.

La société S.A.G.E. demande également à la cour de condamner la SCI F2M à lui rembourser la somme de 6.889,19 euros au titre des frais de téléphonie/internet, en indiquant qu'elle invoque la pièce n° 55 à l'appui de cette prétention.

La pièce n° 55 est constituée d'extraits du grand livre fournisseurs de la société S.A.G.E. concernant la société Orange, des années 2017 à 2024.

Il s'en déduit que la société S.A.G.E. demande à la SCI F2M de lui rembourser l'intégralité de ses frais de téléphonie et d'internet depuis que la société S.A.G.E. a acquis les locaux loués.

Les frais d'électricité, les frais de téléphonie et les frais d'internet, dont la société S.A.G.E. demande le remboursement à la SCI F2M, sont des frais liés à la jouissance des locaux qui incombent au locataire à qui la jouissance des lieux est transférée par l'effet du bail. Il ne s'agit pas de frais liés à la propriété de l'immeuble qui incombent au bailleur et dont celui-ci ne peut transférer la charge au locataire qu'en vertu d'une clause expresse du bail.

Aucune clause du bail commercial du 1er mai 2015, qui lie les parties, ne transfère ces frais à la charge du bailleur. Contrairement à ce que soutient la société S.A.G.E., la clause du bail qui stipule que le preneur s'oblige 'de ne demander aucune indemnisation en cas d'arrêt des fournitures d'eau, de gaz et d'électricité ou tout autres fournitures en cas de force majeure' ni ne transfère la charge des frais de la jouissance des lieux au bailleur ni n'établit la preuve que les parties étaient convenues de mettre à la charge du bailleur ces frais.

Concernant plus particulièrement les frais d'électricité

Le fait que le bailleur initial, la société 2GCA, ait souscrit un contrat de fourniture d'électricité pour ses locataires, étant rappelé que la société S.A.G.E. fait valoir que les locataires de l'ensemble immobilier ne disposaient pas de compteur individuel (page 5 de ses conclusions), et le fait que la société S.A.G.E. n'ait pas payé de frais d'électricité de 2013 jusqu'en 2019, époque à laquelle elle a souscrit un contrat de fourniture d'électricité à son nom, ne sont pas la preuve d'un accord du bailleur pour la prise en charge des frais d'électricité de la société S.A.G.E. et d'une modification du contrat de bail en ce sens.

En effet, le bailleur, dont les locataires ne disposent pas d'un compteur d'électricité individuel, peut souscrire un contrat de fourniture d'électricité pour les locaux reliés à un compteur collectif, sans avoir l'intention d'assumer les frais d'électricité de ses locataires, et refacturer leur consommation à chacun des locataires concernés, cette refacturation s'analysant alors, non pas en une rétrocession d'électricité prohibée, mais en une répartition des charges d'électricité des locaux entre les locataires.

Il convient d'ailleurs d'observer que l'avis d'échéance du loyer de la société Christi international, produit aux débats par la société S.A.G.E., en date du mois d'avril 2019, comporte l'indication 'provisions charges +EDF', démontrant ainsi la volonté du bailleur de refacturer les frais d'électricité à ses locataires.

En outre, la renonciation de la société 2GCA à solliciter de la société S.A.G.E. le paiement de frais d'électricité après 2013, étant rappelé qu'en 2012 la société S.A.G.E. a payé la 'participation EDF' d'un montant de 280 euros HT facturée par la société 2GCA au mois de mars, et qu'en 2013, elle a refusé de payer 'la participation EDF', d'un montant de 600 euros HT, facturée par la société 2GCA au mois de mai, ni ne s'impose à la SCI F2M qui a ultérieurement fait l'acquisition des locaux loués ni ne constitue une modification du contrat de bail qui lui est opposable.

Par ailleurs, il résulte de l'examen des pièces produites aux débats par les parties que la SCI F2M, depuis qu'elle est devenue propriétaire des locaux loués, n'a jamais manifesté son accord pour prendre en charge les frais d'électricité de la société S.A.G.E.. Ainsi, d'une part, la lettre du 5 août 2017, adressée par la SCI F2M à la société S.A.G.E., aux termes de laquelle la SCI F2M écrit : ' à plusieurs reprises nous avons constaté un excès de consommation suite à des oublis de votre part (lumière entrepôt allumée pendant 5 jours)' n'est pas l'aveu par la SCI F2M de la prise en charge des frais d'électricité de sa locataire par ses soins alors que la SCI F2M informe, par cette même lettre et dans le même temps, sa locataire d'une majoration de sa provision sur charges de 90 euros HT et qu'il résulte d'une facture de régularisation du 1er septembre 2017 que cette augmentation était relative aux frais d'électricité, peu important que la SCI F2M ait finalement décidé de pas augmenter la provision sur charges de la société S.A.G.E. et n'ait pas fait payer de provisions sur charges au titre de l'électricité à sa locataire. D'autre part, le mandataire de la SCI F2M a informé la société S.A.G.E., par courriel du 13 septembre 2018, qu'il lui revenait de souscrire un contrat de fourniture d'électricité.

Le moyen tiré de l'absence d'établissement d'un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail, en violation des dispositions de l'article L.145-40-2 du code de commerce, est inopérant en ce que cette absence ne saurait être sanctionnée par le transfert des charges de la jouissances des locaux loués, qui incombent normalement au preneur, au bailleur.

Le moyen tiré de l'absence de régularisations annuelles des charges est également inopérant dès lors qu'il est acquis que la SCI F2M, qui n'a pas souscrit de contrat de fourniture d'électricité à son nom pour les locaux loués par la société S.A.G.E. à la suite de la résiliation du contrat souscrit par le bailleur initial, la société 2GCA, n'a pas fait payer de provisions sur charges à la société S.A.G.E. au titre des frais d'électricité. Elle en a manifesté l'intention dans sa lettre du 5 août 2017 ci-dessus mentionnée mais a ultérieurement opéré une régularisation en annulant les appels de provisions sur charges augmentés de 90€ HT au titre des frais d'électricité.

Le moyen tiré de la prohibition de la rétrocession de l'électricité est lui-aussi inopérant, étant rappelé que la SCI F2M n'a jamais refacturé de frais d'électricité à la société S.A.G.E. et que la refacturation des frais d'électricité par la société 2GCA à ses locataires, dans le contexte de l'absence de compteurs d'électricité individuels, s'analysait en la répartition des charges d'électricité entre les locataires et non en une rétrocession d'électricité.

Concernant plus particulièrement les frais de téléphonie et d'internet

Il est acquis que le bailleur initial, la société 2GCA, avait souscrit un contrat de services internet-téléphone-fax pour l'ensemble de ses locataires et qu'elle a résilié ce contrat à la fin du mois de décembre 2016, informant la société S.A.G.E., par une note manuscrite sur la facture du 4 novembre 2016, qu'elle devait souscrire son propre contrat auprès d'un opérateur de téléphonie-internet.

Toutefois, étant rappelé que le bail ne prévoit ni le transfert des charges de téléphonie et d'internet au bailleur ni que le bailleur s'engage à délivrer au locataire des locaux dotés des services gratuits de téléphonie et d'internet et étant encore rappelé que le bailleur refacturait, au moins certains des services souscrits auprès de l'opérateur de téléphonie-internet-fax à la société S.A.G.E., il n'est pas apporté la preuve que les parties étaient convenues de la prise en charge des frais de téléphonie et d'internet de la société S.A.G.E. par le bailleur, d'autant plus après la résiliation du contrat collectif souscrit initialement par la société 2GCA.

Contrairement à ce que soutient la société S.A.G.E., sans preuve du contenu de la prestation refacturée à la société S.A.G.E. par la société 2GCA , la mention 'abonnement mensuel 3 lignes faxtomail' sur les factures de loyers de la société S.A.G.E., du 1er mai 2015 au 4 novembre 2016 n'apporte pas cette preuve.

La remise commerciale, équivalente à la moitié du loyer mensuel, opérée par la société 2GCA en juillet 2016 au bénéficie de la société S.A.G.E., pour 'défaut internet', n'apporte pas non plus cette preuve. Cette remise apporte la preuve de la fourniture du service internet par le bailleur à sa locataire mais non la preuve de la gratuité de celui-ci.

Il en est de même du courriel de la société In Vactis du 19 septembre 2018, ainsi rédigé : 'J'étais l'installateur de la solution de téléphonie et internet utilisée historiquement par 2GCA. Je vous confirme que tous les abonnements internet, téléphonie et fax, était facturés par Open IP 2 GCA. 2GCA refacturait en interne à ses locataires. Pour ce qui concerne la société SAGE, était uniquement facturé l'option Open Fax, internet et téléphonie étant intégrés dans le loyer.' En effet, l'auteur de courriel, qui est un tiers au contrat de bail qui lie les parties, ne précise pas comment il aurait eu connaissance de la commune intention des parties concernant la prise en charge des frais de téléphonie et d'internet de la société S.A.G.E. par le bailleur alors que le bail est silencieux sur ce point.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement entreprise en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. des demandes suivantes :

- condamner la SCI F2M à prendre en charge les frais d'électricité, de téléphonie et d'internet,

- ordonner que le règlement des frais d'électricité, de téléphonie et d'internet dus par la bailleresse et avancés par la locataire s'effectue par compensation avec les sommes dues par la société S.A.G.E. au titre des loyers,

- condamner la SCI F2M à lui rembourser les frais d'ores et déjà exposés à savoir, 3600 euros au titre des frais de téléphonie/internet et la somme de 1152,21 euros au titre des frais d'électricité.

2- Sur la demande de la locataire tendant à la prise en charge par la bailleresse des frais de mise aux normes des installations électriques

En application de l'article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée, d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

Mais, en application des articles 1720 et 1754 du code civil, le bailleur, à qui incombe la charge des travaux de réparations, autres que celles locatives, peut, par une clause claire et précise dont la portée doit être interprétée restrictivement, en transférer la charge au preneur.

Néanmoins, il est constant que sauf disposition expresse du bail, le locataire ne peut être tenu des réparations qui sont la conséquence de la vétusté.

En l'espèce, il résulte de l'article 3 du bail que ' le preneur fera, à ses frais pendant le cours du bail, tous travaux d'entretien, de réfection et de remplacement de toute nature qui seront nécessaires, y compris carrelages, fermetures, rideaux de fer, bardages, parquets, serrurerie, plomberie, appareils sanitaires, etc. cette liste étant seulement énonciative et nullement limitative'.

Les travaux d'entretien, de réfection et de remplacement rendus nécessaires par la vétusté n'étant pas expressément prévus dans cette clause, ils n'incombent pas à la société S.A.G.E..

Maître [C], huissier de justice mandaté par la société S.A.G.E., constate, le 10 septembre 2018, que le local occupé par la société S.A.G.E. dispose d''une armoire électrique métallique de grande taille présentant un aspect vétuste', sans ouvrir ladite armoire.

Maître [W], huissier de justice mandaté par la SCI F2M, constate le 5 octobre 2022, la présence d''un tableau électrique d'aspect ancien'.

Les constats de ces deux huissiers de justice, dont la profession ne leur confère pas de compétence technique en matière d'électricité, concernant la seule armoire électrique, étant en outre observé que Maître [C] se borne à donner un avis sur l'aspect extérieur de l'armoire électrique, n'établissent ni que l'installation électrique n'est pas conforme aux normes ni que cette non-conformité serait la conséquence de la vétusté.

Quant aux deux devis produits aux débats par la société S.A.G.E., seul celui du 12 juin 2020 fait état de la vétusté du matériel de l'installation électrique existante. La vétusté de l'installation électrique n'est pas mentionnée dans le 2ème devis pourtant plus récent du 1er octobre 2024.

Dans ces conditions, il n'est pas apporté la preuve que les travaux de mise en conformité de l'installation électrique sollicités par la société S.A.G.E. soient la conséquence de la vétusté.

En l'absence de preuve de vétusté, ces travaux, qui s'analysent en des travaux de réfection et de remplacement de l'installation électrique au sens de l'article 3 du bail, incombent au preneur.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. des demandes suivantes :

- condamner la SCI F2M à prendre en charge l'intégralité des frais afférents à la mise aux normes du local et particulièrement des installations électriques ;

- condamner la SCI F2M au remboursement des frais avancés par la société S.A.G.E à ce titre le cas échéant,

- autoriser la société S.A.G.E. à consigner les loyers à échoir jusqu'à parfaite réalisation des travaux.

3- Sur la demande de la locataire tendant au remboursement par la bailleresse des provisions sur charges qu'elle a versées

En vertu de l'article L. 145-40-2 du code de commerce, tout contrat de location comporte un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, comportant l'indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire. Cet inventaire donne lieu à un état récapitulatif annuel adressé par le bailleur au locataire dans un délai fixé par voie réglementaire.

Dans un ensemble immobilier comportant plusieurs locataires, le contrat de location précise la répartition des charges et du coût des travaux entre les différents locataires occupant cet ensemble. Cette répartition est fonction de la surface exploitée. Le montant des impôts, taxes et redevances pouvant être imputés au locataire correspond strictement au local occupé par chaque locataire et à la quote-part des parties communes nécessaires à l'exploitation de la chose louée.

L'article R.145-36 du code de commerce précise que l'état récapitulatif annuel ci-dessus mentionné, qui inclut la liquidation et la régularisation des comptes de charges, est communiqué au locataire, pour les immeubles en copropriété, dans le délai de trois mois à compter de la reddition des charges de copropriété sur l'exercice annuel et que le bailleur communique au locataire, à sa demande, tout document justifiant le montant des charges, impôts, taxes et redevances imputés à celui-ci.

Par ailleurs, il est constant, en application des articles 1134 alinéa 1er et 1376 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que pour conserver les sommes versées par le preneur au titre des provisions , en les affectant à sa créance de remboursement d'un ensemble de dépenses et de taxes en application du contrat de bail commercial, le bailleur doit justifier le montant des dépenses et faute d'y satisfaire, doit restituer au preneur les sommes versées au titre des provisions.

Le paragraphe e) de l'article 3 du bail du 1er mai 2015 stipule que le preneur s'oblige ' de rembourser au bailleur sa quote-part de la totalité des charges, taxes, impôts et prestations de toute nature afférentes aux locaux loués, y compris honoraires du syndic de l'immeuble et de gestion'.

L'article 7 du bail ajoute que le bail est consenti et accepté moyennant 'un acompte mensuel de 150€ HT que le preneur s'oblige à payer au bailleur par mois d'avance, à la demande du bailleur, les termes étant payables les 1er de chaque mois, concernant toutes les taxes impôts, charges et prestations existantes ou qui viendraient à être créées, afférentes aux locaux loués notamment l'impôt foncier dont est redevable le bailleur'.

Le bail ne contient aucune stipulation relative à la répartition des charges entre les locataires, étant rappelé que les locaux loués dépendent d'un ensemble immobilier en copropriété.

Sur le bien fondé des charges dont la SCI F2M demande le remboursement

Il résulte des régularisations de charges pour les années 2017 à 2021 produites aux débats que la SCI F2M demande le remboursement à sa locataire des charges de copropriété et de l'impôt foncier.

La société S.A.G.E., tout en indiquant contester le bien fondé de ces charges, renvoie sur ce point à ses conclusions de première instance.

La cour, qui n'examine, en application de l'article 954 du code de procédure civile, que les moyens invoqués par les parties dans la partie discussion des conclusions déposées devant elle, n'examinera donc pas le bien fondé des charges dont la bailleresse demande le remboursement.

Sur la répartition des charges

En l'absence de stipulation contractuelle sur les modalités de répartition des charges entre les locataires, cette répartition, conformément aux dispositions de l'article L. 145-40-2 du code de commerce ci-dessus rappelées, doit être fonction de la surface exploitée, le montant de la taxe foncière imputée à la société S.A.G.E. devant correspondre strictement au local occupé par cette dernière.

C'est par des motifs pertinents et exacts, que la cour adopte et auxquels elle renvoie, que le tribunal a considéré que la clé de répartition appliquée par la SCI F2M était erronée compte-tenu de la création, dans les locaux constituant le lot n° 2 de la copropriété dont une partie est louée à la société S.A.G.E., d'un étage dont la surface n'est pas prise en compte dans la répartition des charges opérée par la bailleresse.

Il convient simplement d'ajouter que l'existence d'un étage au-dessus des locaux loués par la société S.A.G.E. est établie par le procès-verbal de constat de Maître [W], huissier de justice, en date du 5 octobre 2022. En effet, celui-ci écrit : 'En outre les locaux de la société S.A.G.E. sont surmontés d'un étage.'

La SCI F2M ne développe pas de moyen pertinent pour contredire les premiers juges, se bornant à soutenir que 'l'étage situé au-dessus du local loué par la société S.A.G.E. est fiscalement rattaché avec le bâtiment 3 depuis 2013" alors qu'il lui est reproché de ne pas prendre en considération la surface de cet étage dans la répartition des charges imputées à sa locataire. En outre, elle n'offre pas de preuve de son allégation sur le rattachement fiscal de cet étage.

En appliquant une clé de répartition erronée à la régularisation des charges des années 2017 à 2021 produites aux débats, la SCI F2M ne justifie pas du montant des dépenses imputées à la société S.A.G.E. au titre des charges pour les années 2017 à 2021.

En outre, la SCI F2M ne produit pas la régularisation des charges des années 2022 et 2023 alors que le temps de la procédure le lui permettait et que ces charges sont contestées par la locataire dans le cadre de la présente instance. La SCI F2M ne justifie donc pas des dépenses relatives aux provisions appelées au titre des années 2022 et 2023.

En revanche, étant rappelé que la clôture a été prononcée le 15 janvier 2025, la SCI F2M ne saurait être sanctionnée pour ne pas avoir procédé à la régularisation des charges de l'année 2024.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparait que la SCI F2M doit rembourser à la société S.A.G.E. les paiements que cette dernière a effectués au titre des provisions sur charges pour la période du 1er avril 2017 au 31 décembre 2023, que les provisions sur charges appelées mais non payées par la société S.A.G.E pour la même période doivent être déduites des sommes dues par la locataire et que la société S.A.G.E n'est pas redevable du solde dû au titre des régularisations de charges annuelles pour la même période.

Compte tenu de l'évolution des demandes, l'existence d'un arriéré locatif, la société S.A.G.E. s'étant abstenue de payer son loyer depuis le mois de juillet 2022, la cour ne fixera pas le montant dû par la bailleresse à la locataire au titre des provisions sur charges indûment versées du 1er avril 2017 au 31 décembre 2023 mais, à l'occasion des comptes entre les parties qui seront effectués dans le paragraphe sur la demande de la SCI F2M de condamnation de la société S.A.G.E. au paiement de sa dette de loyer, déduira les paiements effectués par la locataire au titre des provisions sur charges des sommes dues.

4- Sur la demande de la société S.A.G.E. tendant au remboursement par la SCI F2M de la somme de 1.767,84 euros versée en exécution du commandement de payer du 24 août 2018

Par acte du 24 août 2018, la SCI F2M a fait délivrer à la société S.A.G.E. un commandement de payer la somme de 1767,84 euros. Ce commandement est accompagné d'un décompte détaillé de la dette de la société S.A.G.E..

Il résulte de l'examen de ce décompte que la dette de la société S.A.G.E. était pour partie née de la déduction par la locataire, depuis le mois d'avril 2017, de la somme de 72 euros de son loyer au titre de ses frais de téléphonie/internet.

Alors que la cour juge que les frais de téléphonie-internet de la locataire ne sont pas à la charge de la bailleresse et qu'il existe un arrêté locatif, la société S.A.G.E. s'étant abstenue de payer son loyer depuis le mois de juillet 2022, il n'est pas apporté la preuve que le paiement effectué par la société S.A.G.E. en exécution de ce commandement soit indu.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. de sa demande de condamnation de la SCI F2M à lui rembourser la somme de 1.767,84 euros au titre du commandement de payer du 24 août 2028.

5- Sur la demande de la société S.A.G.E. au titre de son préjudice de jouissance

Il est acquis que la société 2GCA avait souscrit un contrat de fourniture d'électricité à son nom concernant les locaux loués à la société S.A.G.E. et qu'elle a résilié ce contrat le 31 mars 2017.

A la suite de cette résiliation, EDF n'a pas immédiatement coupé l'alimentation des locaux en électricité mais, en l'absence de souscription d'un nouveau contrat de fourniture d'électricité, deux coupures sont intervenues, l'une en septembre 2018 et l'autre en mars-avril 2019.

La cour ayant ci-dessus considéré qu'il ne revenait pas à la SCI F2M de prendre en charge les frais d'électricité de la société S.A.G.E. et alors qu'aucune clause du bail ne met à la charge de la bailleresse l'alimentation des locaux en électricité, il appartenait à la société S.A.G.E. de souscrire un contrat de fourniture d'électricité pour les locaux qu'elle louait à la SCI F2M.

Dans ces conditions, il n'est pas apporté la preuve que le préjudice de jouissance allégué par la société S.A.G.E. trouve son origine dans une faute de la SCI F2M et ce d'autant plus que la société S.A.G.E. était informée du désaccord de la SCI F2M pour prendre en charge ses frais d'électricité, avait refusé de payer une augmentation de sa provision sur charges au titre des frais d'électricité en cas de souscription d'un contrat de fourniture d'énergie par la SCI F2M et avait été invitée, à la suite de la première coupure de septembre 2018, par courriel du mandataire de la SCI F2M en date du 13 septembre 2018, à souscrire un contrat de fourniture d'électricité.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. de demande de condamnation de la SCI F2M à lui verser la somme de 542,95 euros au titre de son préjudice de jouissance.

6- Sur la demande de la société S.A.G.E. au titre de la résistance abusive

En application des articles 1719 et 1725 du code civil, le bailleur est tenu de réparer le préjudice subi par son locataire résultant du trouble de jouissance imputable à un autre locataire du bailleur.

La société S.A.G.E. soutient que pendant plusieurs mois, des véhicules utilitaires ont été stationnés devant la fenêtre du local qu'elle occupe, obstruant ainsi le passage de la lumière.

S'il résulte de la lettre officielle de l'avocat de SCI F2M, en date du 6 février 2020, que ces véhicules appartiennent à une autre locataire de la SCI F2M, il n'est pas apporté la preuve que ce stationnement gênant ait duré pendant plusieurs mois comme le soutient la société S.A.G.E. Les pièces produites aux débats apportent seulement la preuve de ce stationnement gênant à deux reprises.

Sans preuve de la persistance de ce stationnement gênant devant la fenêtre du local occupé par la société S.A.G.E., le trouble de jouissance allégué par la société S.A.G.E. n'est pas établi.

Par ailleurs, les échanges versées aux débats par la société S.A.G.E. démontrent les désaccords existant entre les parties sur les litiges soumis à la cour mais ne démontrent ni la mauvaise foi de la SCI F2M ni sa volonté de nuire à la société S.A.G.E.. Il en est de même en ce qui concerne les décomptes produits aux débats que la société S.A.G.E. estime erronés et incohérents.

En outre, la société S.A.G.E. se borne à soutenir qu'elle a subi un préjudice sans l'expliquer ni l'établir.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. de sa demande de condamnation de la SCI F2M pour résistance abusive.

7- Sur la demande de la société S.A.G.E. au titre des frais de constat d'huissier du 18 septembre 2018

La société S.A.G.E. produit aux débats un procès-verbal de constat d'huissier en date du 10 septembre 2018 et non du 18 septembre 2018.

Il résulte de l'examen de cette pièce que la société S.A.G.E. a mandaté un huissier de justice pour établir que le local loué n'était pas alimenté en électricité à la date à laquelle le procès-verbal a été dressé.

La demande de la société S.A.G.E. au titre de son préjudice de jouissance consécutif aux coupures d'électricité ayant été rejetée et le procès-verbal de constat d'huissier ayant été établi pour appuyer cette prétention, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société S.A.G.E. de sa demande de condamnation de la SCI F2M à lui rembourser les frais de constat d'huissier du 18 septembre 2018.

8- Sur la demande de la SCI F2M de résolution du bail

L'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'espèce s'agissant d'un contrat de bail antérieur au 1er octobre 2016, dispose :

' La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelles l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.'

Il en résulte que nonobstant l'existence d'une clause résolutoire dans le contrat, les parties peuvent toujours demander la résolution du contrat au juge qui apprécie alors si l'inexécution du contrat est suffisamment grave pour en prononcer la résolution.

En vertu du i) de l'article 3 du bail du 1er mai 2015, la société S.A.G.E. a l'obligation d'exploiter personnellement dans les lieux loués, de façon continue, un fonds de commerce selon l'objet social de la société.

L'objet social de la société S.A.G.E. est : 'négoce et commerce de gros, produits, matériels d'entretien, quincaillerie, droguerie, mobilier urbain, import, export de marchandises, gestion, formation et services aux entreprises.'

L'article 6 du bail stipule que 'le preneur ne pourra sous-louer tout ou partie des locaux donnés à bail ni les prêter, même à titre gratuit. Il ne pourra donner son fonds en location-gérance, ni se substituer ou y domicilier qui que ce soit sans autorisation du bailleur. Une autorisation est donnée pour la sous location à la société Hapro. Le locataire principal est responsable à l'égard du sous-locataire et se porte garant et solidaire de celui-ci.'

En l'espèce, il est acquis qu'à plusieurs reprises en 2020 et 2022, une caravane de marché abritant une rôtisserie, a été stationnée dans le local loué.

La SCI F2M fonde sa demande de résolution du bail et d'expulsion de la société S.A.G.E. uniquement sur le stationnement de cette caravane dans le local loué. Ainsi, elle écrit en page 29 de ses conclusions : ' L'expulsion de la société S.A.G.E est demandée sur ce fondement (sous location interdite à une société tierce à la société Hapro) indépendamment des arriérés ayant donné lieu au commandement de payer et que la société S.A.G.E n'a toujours pas cru devoir honorer.' Elle écrit également, en page 31 de ses conclusions : 'Compte-tenu de ce qui précède, il est demandé à la cour d'infirmer le jugement rendu le 4 janvier 2022 en ce qu'il a débouté la société F2M des demandes formulées au titre de la sous-location autorisée, de prendre acte de l'existence d'une sous-location illégale imputable à la société S.A.G.E et d'ordonner la résiliation du bail commercial en cours et l'expulsion de la société S.A.G.E et de tout occupant'.

Le gérant de la société S.A.G.E. indique que la caravane de marché appartient à une amie à qui il rend ponctuellement service en la laissant stationner son véhicule dans le local loué, sans contrepartie notamment financière.

Le stationnement de cette caravane dans le local loué, dès lors qu'il n'est pas de nature à empêcher la société S.A.G.E. d'exploiter personnellement le local loué, eu égard à la surface occupée par la caravane et à l'irrégularité du stationnement, ne constitue pas un manquement de la locataire à son obligation d'exploiter personnellement dans les lieux loués, de façon continue, un fonds de commerce selon son objet social.

En outre, sans preuve d'une contrepartie au stationnement de la caravane dans le local loué, l'existence d'une sous-location prohibée n'est pas établie.

Par ailleurs, il n'est ni soutenu ni apporté la preuve de la persistance du stationnement de la caravane de marché dans le local loué après le 5 octobre 2022, date à laquelle l'huissier de justice mandaté par la bailleresse a constaté l'absence de la caravane dans le local loué.

Dans ces conditions, le stationnement irrégulier de la caravane de marché dans le local loué, si tant est qu'il puisse être qualifié de prêt gratuit d'une partie des locaux alors que la SCI F2M n'allègue pas un transfert de la détention et de l'usage d'une partie des locaux, n'est pas suffisamment grave pour entraîner la résolution du bail.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI F2M des demandes suivantes :

- dire que la société S.A.G.E. ne respecte pas la destination du bail commercial,

- dire que la société S.A.G.E. sous-loue illégalement son local,

- ordonner la résolution du bail commercial en date du 1er mai 2015 et ordonner l'expulsion de la société S.A.G.E. au besoin avec le concours de la force publique.

9- Sur la demande de la SCI F2M tendant à la condamnation de la société S.A.G.E. à lui payer la somme de 42.207,37 euros TTC euros au titre des loyers et charges

En vertu de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu de payer le prix du bail aux termes convenus.

L'article 7 du bail commercial du 1er mai 2015 stipule que le bail ' est consenti et accepté moyennant :

1 - un loyer annuel hors taxe de 6.900 euros, que le preneur s'oblige à payer au bailleur par mois d'avance, à la demande du bailleur, les termes étant payables les 1er de chaque mois,

2 - un acompte mensuel de 150 € HT que le preneur s'oblige à payer au bailleur par mois d'avance, à la demande du bailleurs, les termes étant payables les 1er de chaque mois, concernant toutes les taxes, impôts, charges et prestations existantes ou qui viendraient à être créés, afférents aux locaux loués notamment l'impôt foncier dont est redevable le bailleur.'

L'article 9 du bail stipule en outre que 'le loyer ci-dessus fixé à 6900 € HT sera soumis à révision annuelle et sera augmenté ou diminué de plein droit et sans l'accomplissement d'aucune formalité judiciaire ou extrajudiciaire, proportionnellement à la variation de l'indice du coût de la construction publié par l'INSEE. Sera tenu comme indice de référence initial l'indice du 1er trimestre 2015 publié dans le journal officile, soit 1632. L'indice de comparaison servant au calcul de la révision du loyer sera celui du 1er trimestre 2015".

En l'espèce, il est produit aux débats divers avis d'échéance, factures de loyers et décomptes de la dette locative de la société S.A.G.E.. Ces pièces ne sont pas toujours cohérentes entre elles. L'absence de cohérence de ces pièces ne suffit néanmoins pas à exonérer la société S.A.G.E. du paiement de son loyer.

La somme de 42.207,37 euros TTC dont le paiement est sollicité par la SCI F2M devant la cour d'appel correspond au solde dû par la locataire aux termes de tableaux de situation produits en pièce 40 par la SCI F2M.

Il convient donc d'examiner ces tableaux.

En premier lieu, la cour observe que la SCI F2M fait figurer dans la colonne 'loyers TTC' des tableaux le montant total des loyers TTC et des provisions sur charges TTC. La SCI F2M a donc expurgé les tableaux des frais de relance présents dans d'autres décomptes et qui étaient contestés par la société S.A.G.E..

En deuxième lieu, il ressort de ces tableaux que la société S.A.G.E. a réglé à la SCI F2M, du 1er avril 2017 au 30 novembre 2024, la somme totale de 51.834 euros au titre des loyers et charges. Il n'est pas apporté la preuve d'autres paiements ni même allégué d'autres versements par la société S.A.G.E..

Par ailleurs, la cour rappelle que si l'indice du coût de la construction ne peut plus être choisi par les parties comme indice de référence dans le cadre de la révision légale du loyer depuis le 1er septembre 2014, en vertu de la modification de l'article L. 145-38 du code de commerce par la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, il peut toujours être choisi par les parties comme indice de référence pour le jeu de la clause d'échelle mobile à laquelle l'article L. 145-38 du code de commerce ne s'applique pas.

Faute pour la SCI F2M d'expliquer le calcul de l'indexation des loyers auquel elle a procédé, elle ne permet pas à la cour de vérifier la justesse de celui-ci ni même de vérifier que la SCI F2M a bien utilisé l'indice du coût de la construction stipulé dans le bail.

Dans ces conditions, il sera pris en compte les loyers indexés calculés selon la méthode admise par la société S.A.G.E. dans ses conclusions (page 19), le montant des loyers indexés ainsi calculé étant inférieur aux loyers appelés par la SCI F2M. Il est en outre observé que la SCI F2M ne critique pas expressément la méthode de calcul des loyers indexés de la société S.A.G.E. dans ses conclusions, étant précisé que la société S.A.G.E. utilise l'indice du coût de la construction dans son calcul, conformément aux stipulations contractuelles.

Il en résulte que la société S.A.G.E. est redevable envers la SCI F2M au titre des loyers des sommes suivantes :

- 573,97 euros HT au mois d'avril 2017,

- 579,58 euros HT par mois du 1er mai 2017 au 30 avril 2018,

- 587,33 euros HT par mois du 1er mai 2018 au 30 avril 2019,

- 600,02 euros HT par mois du 1er mai 2019 au 30 avril 2020,

- 623,27 euros HT par mois du 1er mai 2020 au 30 avril 2021,

- 632,43 euros HT par mois du 1er mai 2021 au 30 avril 2022,

- 664,49 euros HT par mois du 1er mai 2022 au 30 avril 2023,

- 722,98 euros HT par mois du 1er mai 2023 au 30 avril 2024,

- 761,73 euros HT par mois du 1er mai 2024 au 30 novembre 2024,

soit 62.635,93 euros HT au total ou 75.163,12 euros TTC.

Étant rappelé que la cour a ci-dessus jugé que la société S.A.G.E n'était pas redevable des charges et provisions sur charges du 1er avril 2017 au 31 décembre 2023, il ne sera ajouté aux sommes dues par la société S.A.G.E. que les provisions sur charges des mois de janvier à novembre 2024, soit 1650 euros HT, ou 1980 euros HT.

La société S.A.G.E est donc redevable envers la SCI F2M de la somme de 77.143,12 euros TTC au titre des loyers et charges pour la période du 1er avril 2017 au 30 novembre 2024 inclus.

La société S.A.G.E ayant payé à la SCI F2M la somme totale de 51.834 euros, celle-ci reste débitrice de la somme de 25.309,12 euros TTC envers la SCI F2M au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 30 novembre 2024 inclus.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à la somme de 5640,64 euros TTC le montant des loyers et charges impayés par la société S.A.G.E. et condamné la société S.A.G.E à payer la somme de 1552,43 euros à la SCI F2M et, statuant à nouveau, de condamner la société S.A.G.E. à payer à la SCI F2M la somme de 25.309,12 euros TTC.

10- Sur la demande de la SCI F2M de dommages et intérêts pour procédure abusive

La SCI F2M n'invoque aucun moyen à l'appui de sa demande de condamnation de la société S.A.G.E. à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

La méprise de la société S.A.G.E. sur l'étendue de ses droits ne caractérise pas un abus dans l'exercice de son droit d'agir en justice. En outre, il doit être observé qu'il a été partiellement fait droit aux demandes de la société S.A.G.E..

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI F2M de sa demande de condamnation de la société S.A.G.E. pour procédure abusive.

11- Sur les dépens et les frais irrépétibles

Chaque partie a succombé partiellement en première instance. En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que chaque partie conserverait les frais engagés au titre des dépens et débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A hauteur d'appel, il convient de condamner la société S.A.G.E., qui succombe, aux dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Par ailleurs, l'équité commande de condamner la société S.A.G.E. à payer à la SCI F2M la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés par l'intimée à l'occasion de la procédure d'appel.

12- Sur la demande d'exécution provisoire

La demande de la SCI F2M tendant à ce qu'il soit ordonné l'exécution provisoire est sans objet à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Melun du 4 janvier 2022 (RG n° 19/2757) en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :

- fixé à la somme demandée de 4.088,21 euros, le montant des provisions pour charges indûment versées par la société S.A.G.E. pour la période du 1er avril 2017 au 31 décembre 2020 et dues à celle-ci par la SCI F2M,

- fixé à la somme de 5.640 euros TTC le montant des loyers et charges impayés par la société S.A.G.E. et dus par celle-ci à la SCI F2M,

- condamné à la société S.A.G.E. à verser à la SCI F2M la somme de 1552,43 euros après compensation,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et compte tenu de l'évolution du litige, y ajoutant,

Condamne la société SARL S.A.G.E. Services Achats Gestion Entreprises à payer à la société S.C.I F.2.M la somme de 25.309,12 euros TTC au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 30 novembre 2024 inclus ;

Condamne la société SARL S.A.G.E. Services Achats Gestion Entreprises aux dépens de la procédure d'appel,

Condamne la société SARL S.A.G.E. Services Achats Gestion Entreprises à payer à la société S.C.I F.2.M la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent arrêt.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

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