CA Montpellier, 2e ch. civ., 4 septembre 2025, n° 24/05696
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/05696 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QOHG
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 24 OCTOBRE 2024
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 8]
N° RG 23/02280
APPELANTS :
Madame [U] [M] [S] épouse [Y]
née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 7] (IRLANDE)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me RIGAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Monsieur [J] [Y]
né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 13]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me RIGAUD, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant
INTIMEE :
BYBLOS BANK SAL, Société anonyme de droit libanais au capital de 689 113 198 400 livres libanaises, dont le siège social est situé [Adresse 10] (Liban), immatriculée au registre du commerce de Beyrouth sous le numéro 14150 et sur la liste des banques publiée par la Banque du Liban sous le numéro 39, prise en la personne du Président de son Conseil d¿administration domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me SIVIGNON, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 AVRIL 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
Le délibéré intialement prévu le 12 JUIN 2025 a été prorogé au 26 JUIN 2025 puis au 04 Septembre 2025 ; les parties en ayant été préalablement avisées ;
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
M. [J] [Y], de nationalité française et Mme [U] [S] épouse [Y], de nationalité irlandaise ont exercé des fonctions de diplomates pour l'ONUpendant plusieurs années au Liban et ont ouvert plusieurs comptes bancaires dans les livres de la Byblos Bank Sal dont le siège social est situé à Beyrouth.
Résidant en France et ayant sollicité en vain le virement des fonds déposés dans cette banque sur un compte en France, ils ont fait assigner la Byblos Bank Sal de droit libanais devant le tribunal judiciaire de Béziers, par acte en date du 5 septembre 2023, au visa du règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement européen et du Conseil et de l'artilce 307 du code de commerce libanais afin de :
* voir juger que la Bank Byblos Sal a manqué à son obligation de restitution des fonds qu'elle détient pour leur compte
* et en conséquence, la condamner à leur payer par virement bancaire sur leur compte en France qui leur sera transmis en contrevaleur euros les fonds suivants :
- compte 215-5011284-001 : 106 395, 52 dollars (valeur US), soit 96 819, 92 € en contrevaleur euros en août 2023
- compte 215-5012884-004 : 204 429, 86 dollars (valeur US), soit 186031, 17 € en contrevaleur euros
- compte 215- 50128884-006 : 76 209, 05 dollars (valeur US) soit 69 350, 23 €
- compte 215-501883-001 : 30800 dollars (valeur US) soit en contrevaleur euros 28 028 €
- compte 215-501883-002 : 800 dollars soit en contrevaleur euros 728 €
Soit la somme totale de 380 957, 32 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 août 2023 et ce, sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir.
La société Byblos Bank Sal a saisi le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béziers de conclusions d'incident tendant à voir déclarer le tribunal judiciaire de Béziers territorialement incompétent pour statuer sur les demandes des époux [Y] et de
les renvoyer à se pourvoir devant le juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales d'ouverture des comptes bancaires litigieux.
Parrallèlement, les époux [Y] ont saisi le même juge de la mise en état d'une demande de provision à hauteur de 200 000 € et de restitution du solde des fonds sous astreinte.
Par ordonnance du 24 octobre 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béziers a :
- déclaré territorialement incompétent le Tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur les demandes de M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal,
- renvoyé M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions genérales d'ouverture de compte bancaire souscrites,
- dit n'y avoir lieu a application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] aux dépens de l'incident.
Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour le 12 novembre 2024.
Par ordonnance en date du 5 décembre 2024, ils ont été autorisés par la présidente de la présente chambre à faire assigner à jour fixe la SA Byblos Bank Sal pour l'audience du 7 avril 2025. La SA Byblos Bank a été assignée par la voie du Parquet Général de la présente cour le 6 décembre 2024 selon les formalités prévues par la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale. L'assignation a été déposée au greffe de la présente cour par la voie électronique le 27 décembre 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 avril 2025, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, Mme [U] [G] épouse [Y] et M. [J] [Y] demandent à la cour, au visa notamment du Réglement n° 1215/2012 du 12/12/2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement Européen et du Conseil, en ses articles 17.1, 17.2, 18 et 19.1, 19.2, de la Directive 93/13/CEE du 5/04/1993 relatives aux clauses abusives et de l'articcle 307 du Code de Commerce libanais de:
- infirmer l'Ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de Béziers en ce qu'il s'est déclaré incompetent territorialement pour statuer sur le litige opposant les Consorts [Y] a la Bank Byblos Sal et les a renvoyé à se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales d'ouverture de comptes bancaires souscrites,
* et statuant a nouveau :
- Juger le Tribunal judiciaire de Béziers compétent territorialement pour statuer sur le litige opposant les consorts [Y] à la Byblos Bank Sal,
- Juger le Tribunal judiciaire de Béziers compétent rationae materiae et rationae loci pour statuer sur les demandes des époux [Y] a l'encontre de la Société Byblos Bank Sal,
- Juger la clause d'attribution de compétence devant la juridiction libanaise inopposable en l'espéce aux époux [Y],
- Juger abusive la clause invoquée par Byblos Bank Sal relative à l'offre réelle de consignation des fonds des époux [Y] chez un notaire,
- Condamner la Société Byblos Bank Sal à payer à M. [J] [Y] et Mme. [U] [M] [S] épouse [Y] une provision de 200 000 €.
- Juger que cette provision devra étre payée sur un compte CARPA ouvert en cette affaire par le Conseil des époux [Y] et ce, dans le délai de 15 jours à compter de la notification à l'avocat constitué pour le compte de la banque Byblos Bank Sal et, passé ce délai, sous astreinte de 1000 € par jour de retard pendant 3 mois et, passé ce délai, le Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Béziers se réservera le droit de liquider cette astreinte provisoire et d'en fixer une nouvelle.
- Juger qu'il sera fait application de l'article 789 3° en subordonnant l'exécution de l'Ordonnance à intervenir à la constitution de telle garantie qu'appréciera la cour, dans les conditions prévues aux articles 514-5, 517 et 518 a 522 du Code de Procédure Civile.
- Juger non fondée l'argumentation de la société Byblos Bank Sal et la débouter de lintégralité de ses demandes,
- Condamner la société Byblos Bank Sal sous la méme astreinte à réintégrer le solde des fonds appartenant au époux [Y] sur les comptes qu'ils détenaient au sein de Ia Bank Byblos Sal.
- Qu'elle sera également condamnée à payer a M. et Mme [Y] la somme de 8000 euros par application de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Au dispositif de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 13 mars 2025, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la Byblos Bank Sal, société anonyme de droit libanais demande à la cour, au visa notamment des 6, 17, 18 et 19 du Règlement n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, L.212-1, L.231-1 et L.232-1 du Code de la consommation, des articles 294 à 298 et l'article 302 du Code des obligations et des contrats libanais, des articles 821 à 826 du Code de procédure civile libanais et 307 du Code de commerce libanais de :
* In limine litis, sur la compétence du tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur les demandes faites par M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal :
- constater qu'il n'est pas démontré que Byblos Bank Sal ait dirigé ses activités vers la France à la date à laquelle elle est entrée en relation avec M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] ;
- constater l'existence et la validité entre les parties d'une clause attributive de compétence soumettant le présent litige aux tribunaux libanais ;
En conséquence :
- juger que le Tribunal judiciaire de Béziers est territorialement incompétent pour statuer sur les demandes de M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal ;
- renvoyer M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions générales d'ouverture de compte souscrites par M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] ;
- confirmer l'ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Béziers du 24 octobre 2024 dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
* Subsidiairement, si par extraordinaire la Cour devait infirmer l'ordonnance du Juge de la mise en état du 24 octobre 2024 et déclarait le Tribunal judiciaire de Béziers compétent pour statuer sur les demandes des M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal
- Au principal, renvoyer l'affaire devant le Juge de la Mise en Etat de [Localité 8], sans user du pouvoir d'évocation de l'article 88 du CPC.
- Au subsidiaire, débouter M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] de leur demande de provision ainsi que de leur demande de condamnation de Byblos Bank Sal à verser cette provision sous astreinte par le biais d'un virement sur le compte CARPA du Conseil de ces derniers ;
- débouter M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] de leur demande de réintégration du solde des fonds sur les comptes qu'ils avaient ouvert auprès de Byblos Bank Sal ;
* En tout état de cause :
- condamner M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] aux entiers dépens.
- condamner M. [J] [Y] et Madame [U] [M] [S] épouse [Y] au paiement d'une somme de 10.000 euros à Byblos Bank Sal au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS :
Sur l'exception d'incompétence territoriale de la juridiction française et du tribunal judiciaire de Béziers au profit des juridictions libanaises
Les époux [Y] soutiennent être fondés à invoquer la compétence territoriale du tribunal judiciaire de Béziers retenant d'une part l'option de l'article 18-1 du dudit Réglement qui leur permet de saisir de leur action la juridiction du lieu de leur domicile et d'autre part la prohibition des clauses attributives de compétence stipulées antérieurement à la naissance du différend, en défaveur du consommateur les privant de cette option prévue à ses articles 19.1 et 19.2.
Ils font valoir à cet égard qu'ils sont pour l'un de nationalité française et pour l'autre de nationalité irlandaise, dont les pays font partie de l'Union européenne, qu'il résident actuellement à [Localité 16] en France et ce, depuis le 11 mai 2016, que leur statut de diplomates au Liban leur octroyait un droit de résidant au Liban valable à vie mais que leur résidence fiscale était déjà en [12] au jour de l'ouverture des comptes et ce, en vertu d'une convention du 24 juillet 1962 signée entre la France et le Liban ayant pour objet d'éviter une double imposition sur le revenu.
Ils invoquent en conséquence l'application des articles 17.1, 17.2, 18, 19.1 et 19.2 du Règlement n° 1215/2012 du 12/12/2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement européen desquels il résulte que :
- la compétence est déterminée en matière de contrat conclu par une personne consommateur notamment lorsque ce contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans de l'Etat membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui , par tout moyen dirige ces activités vers cet Etat membre ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre, du consommateur
- lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un Etat membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet Etat membre.
Ils font observer qu'en l'espèce, la Banque a offert la gestion de comptes en diverses devises autres que la livre libanaise, la proposition de virements internationaux, la faculté de joindre ses préposés avec des coordonnées téléphoniques contenant un préfixe international auxquels s'ajoutent la rédaction d'un site internet et de documents de gestion de compte en langue anglaise, ces éléments démontrant la vocation internationale de l'activité de la banque, confirmée tant par son site internet qui mentionne un vaste réseau de filiales, bureaux de représentations et succursales à travers le Liban et dans plusieurs pays, dont la France que par son propre rapport annuel de l'année 2017 qui établi que la banque dirigeait avant 2017 ses activités vers nombre d'Etats dans le monde dont la France et par les échanges de mails par lesquels elle a demandé à Mme [Y] de signer à [Localité 14] dans l'une de ses filiales, la société Byblos Bank Europe un document visant une circulaire dit "158" le 29 septembre 2021 et relative à l'une des ouvertures de compte, ce qu'elle a fait.
L'intimée soulève au contraire l'incompétence du tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur le litige en cause tenant à la clause attributive de juridication au profit des juridictions libanaises contenue dans les conditions générales d'ouverture des comptes acceptées par les époux [Y], que les articles 17, 18 et 19 du Règlement Bruxelles 1 bis ne sont donc pas applicables et que pour apprécier la condition tenant à la direction de l'activité du professionnel vers un Etat membre, énoncée au c) de l'article 17, il faut se placer avant la conclusion du contrat faisant l'objet du litige et la jurisprudence a écarté systématiquement les indices jugés impropres à établir la direction de l'activité d'une banque étrangère vers la France, tels la lanque utilisée par le professionnel lorsqu'il s'agit d'une langue communément utilisée comme l'anglais ou le français au Liban, le nom de domaine.com du professionnel, le fait que la banque offre la possibilité d'ouvrir des comptes en devises étrangères ou des services de transfert internationaux et de manière générale si la vocation internationale d'une activité peut constituer un indice de ce qu'un professionnel dirigerait ses activités à l'international, cet élément n'étant pas de nature à démontrer la direction de l'activité d'un professionnel vers le territoire d'un Etat membre donné.
Elle expose ainsi que les consorts [Y] ont ouvert leurs comptes alors qu'ils résidaient au Liban en janvier 2018, au moment de leur acceptation des conditions générales d'ouverture de compte, que la société Byblos n'a jamais dépêché ses employés en France et ne possède ni succursale ni agence en France, la société Byblos Bank Europe, même s'agissant d'une de ses filiales étant une personne morale distincte et autonome et avec laquelle ils n'ont aucun lien contractuel, que la signature de documents à l'agence parisienne de cette filiale date de 2021 soit 3 ans après leur entrée en relation avec Byblos Bank au Liban et n'est intervenue que pour des raisons de confort pour leur éviter de se rendre au Liban.
Il ressort des pièces produites par la Banque et il n'est pas contesté que l'article 9.13 des conditions générales d'ouverture de compte applicables aux comptes ouverts par les époux [Y] dans les livres de la Byblos Bank Sal le 19 janvier 2018 contient une clause attributive de juridiction libellée de la manière suivante : ' Les conditions générales sont gouvernées par la loi libanaise. Tout litige découlant de leur exécution et/ou de leur interprétation sera exclusivement soumis aux tribunaux judiciaires libanais compétents.'
Il n'est pas davantage contesté par les époux [Y] qu'ils ont reçu, lu et accepté ces conditions générales en apposant leurs signatures et la mention manuscrite 'lu et approuvé' comme le relève le premier juge et qu'ils ont donc accepté cette clause attributive de compétence.
La licéité d'une telle clause n'est pas remise en cause dès lors qu'elle s'applique à un litige international caractérisé en l'espèce par de nombreux éléments d'extranéité énumérés de manière complète par le premier juge dont les nationalités française et irlandaise des époux [Y], la signature de comptes au Liban avec une Banque de droit libanais, l'adresse libanaise des époux [Y] au jour de signature de ces comptes, le libellé en devises étrangères de ces comptes, les langues anglaise et arabe de rédaction de la documentation relative à ces comptes et l'application du droit libanais par les conditions générales d'ouverture des comptes.
Pour être valablement applicable, cette clause ne doit pas, par ailleurs, faire échec à la compétence territoriale impérative d'une juridiction française.
S'agissant d'un litige civil concernant l'application de contrats d'ouverture de compte bancaire opposant des ressortissants de deux états membres de l'Union européenne à un autre Etat n'ayant pas son siège sur le territoire d'un Etat membre, il n'est pas contesté par les parties que c'est conformément aux régles édictées par le règlement n° 1215/2012/UE du 12 décembre 2012 dit 'Bruxelles 1bis' concernant notamment la compétence judiciaire en matière civile et commerciale, applicable depuis le 10 janvier 2015 aux membres de l'Union européenne, qu'il y a lieu de déterminer la compétence judiciaire.
Il ressort de l'article 6 paragraphe 1 du Règlement Bruxelles 1 bis que 'Si le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre, la compétence est dans chaque Etat membre réglée par la loi de cet Etat membre, sous réserve de l'application de l'article 18 paragraphe 1 de l'article 21 paragaraphe 2 et des articles 24 et 25 ....'
L'article 17 inclus dans la section 4 du même règlement sur la compétence en matiére de contrats conclus par les consommateurs dispose :
1. En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans prejudice de l'article 6 et de l'article 7, point 5) :
a) lorsqu'il s'agit d'une vente à tempérament d'objets mobiliers corporels ;
b) lorsqu'il s'agit d 'un prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente de tels objets; ou
c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'Etat membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet Etat membre ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.
2. Lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un Etat membre, il est consideré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet Etat membre.
.
Aux termes de l'article 18 dudit règlement :
1. L 'action intentee par un consommateur contre l'autre partie au contrat peut être portée soit devant les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit, quel que soit le domicile de l'autre partie, devant la juridiction du lieu ou le consommateur est domicilié.
2. L 'action intentée contre le consommateur par l 'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les juridictions de l 'Etat membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur
Enfin, en application de l'article 19, il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions :
1) posterieures à la naissance du différend ;
2) qui permettent au consommateur de saisir d'autres juridictions que celles indiquées a la présente section; ou
3) qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur residence habituelle dans un même [11] membre, attribuent compétence aux juridictions de cet Etat membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions.
ll résulte de la combinaisons de ces textes comme l'a retenu à bon droit le premier juge, que lorsque le défendeur n'est pas domicilié dans un Etat membre, ce qui est le cas en l'espèce de la société Byblos Bank Sal ayant son siège social à Beyrouth au Liban, les règles de compétence prescrites par la section IV du Règlement Bruxelles lbis ( articles 18 et 19 dudit Reglement) ne sont applicables que si les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies :
- le contrat a été conclu par le demandeur pour un usage étranger à son activité professionnelle ;
- le consommateur a son domicile dans l'Etat membre devant les juridictions duquel sa demande est portée ;
- son cocontractant dirige ses activités vers l'Etat membre ou le consommateur a son domicile ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre.
En l'espèce, il ressort des documents d'ouverture des comptes que les époux [Y] ont déclaré avoir leur domicile au Liban à l'adresse suivante :[Adresse 15]. Ils ont également signé chacun un fomulaire d'autocertification contenant cette même adresse et aux termes duquel ils ont confirmé être résidents fiscaux au Liban. Il n'est pas constesté, par ailleurs, qu'au moment de l'ouverture de leurs comptes, ils exerçaient l'activité de diplomate au Liban.
Pour justifier qu'ils avaient, en réalité, leur domicile situé en France, ils produisent des justificatifs attestant de l'achat d'une propriété à [Localité 16] en France le 18 février 2016, d'un justificatif d'abonnement d'électricité depuis le 11 mai 2016 concernant ce bien et de deux avis d'imposition sur le revenu sour les revenus 2017 et 2018 libellés à leurs noms à cette adresse. Pour apprécier la notion de domicile, l'article 62 du règlement précité renvoie aux règles nationales, en l'occurence à l'article 102 du code civil qui précise que le domicile de tout français est le lieu où il a son principal établissement. Les documents produits par les consorts [Y] à ce titre sont insuffisamments probants alors que l'achat d'un bien en France et la facture d'abonnement en électricité sont insuffisants à apporter la preuve d'une occupation de ce bien à titre de domicile principal et non pas seulement en qualité de résidence secondaire. Les avis d'imposition produits sont, en outre, des avis simplifiés sans mention du contenu des revenus faisant l'objet de l'imposition. Ces documents n'apportent pas, en conséquence la preuve de ce que les époux [Y] avaient fixé en France leur domicile principal, ce que contredisent leurs déclarations claires et réitérés dans les documents contractuels d'un domicile au Liban, l'ouverture de comptes dans ce pays et leur activité professionnelle exercée dans ce même pays. La convention signée entre la France et le Liban le 24 juillet 1962 invoquée par les appelants ne fait que déterminer les règles d'assujetissement à l'impôt applicables aux résidents de chacun des Etats contractants en fonction du centre de ses intérêts vitaux et permettant d'éviter une double imposition des revenus dans les deux Etats. Elle ne vient ni contredire une domiciliation fiscale des époux [Y] au Liban, ni établir leur domiciliation fiscale en France.
Comme l'a retenu également le premier juge à bon droit, il n'est pas davantage établi que la Byblos Bank Sal ait dirigé son activité vers la France avant son entrée en relation avec les époux [Y]. Ce type d'activité ne saurait résulter comme le prétendent les appelantes de l'offre de gestion des comptes en diverses devises autres que la livre libanaise, de la proposition de virements internationaux, de la faculté de joindre ses préposés avec des coordonnées téléphoniques contenant un préfixe international, de l'utilisation d'un site internet et de la rédaction des documents contractuels et de gestion de compte en langues anglaise et/ arabe et du fait même de dipsoser d'un réseau de succursales ou filiales à l'étranger, dont en France, ces éléments ne faisant que reflèter l'activité internationale de la banque et ne venant pas démontrer une activité de la Banque de démarchage tournée vers la France, même à distance. Le rapport annuel 2017 du Groupe versé aux débats par les appelants ne fait à cet égard qu'établir la présence internationale de la banque mais aucune politique ou action particulière menée en direction des consommateurs français.
Si les époux [Y] versent aux débats un document aux termes duquel la Byblos Bank Sal a demandé à Mme [Y] le 29 septembre 2021 de signer un formulaire d'ouverture de compte dans les locaux de la Byblos Bank Europe à [Localité 14] alors qu'elle se trouvait en France, il convient de relever d'une part que que cette démarche a été effectuée trois ans après l'entrée en relation des époux [Y] avec la Byblos Bank et non antérieurement à celle-ci et d'autre part que la Byblos Bank Europe, dont il n'est pas contesté qu'elle est une filiale de la Byblos Bank Sal dispose d'une personnalité juridique différente de cette dernière, quand bien même détiendrait-elle 99, 95 des actions au sein de cette société et n'est intervenue dans l'opération en cause que pour servir de lieu et d'authentification de signature de celle-ci et que comme un tiers étranger aux relations contractuelles entre les consorts [Y] et la Byblos Bank Sal, comme le confirment les emails versés aux débats entre les consorts [Y] et leur conseiller à la Byblos Bank Sal, la signature en France de ce nouveau contrat d'ouverture de compte n'ayant été motivée que pour leur éviter de se déplacer au Liban. Cette seule circonstance ne suffit donc pas à établir une activité de la Byblos Bank Sal dirigée vers la France.
C'est donc de manière parfaitement pertinente que le premier juge a considéré que les époux [Y] n'étaient pas fondés à invoquer les dispositions de la section IV du Règlement Bruxelles lbis pour contester l'opposabilité de la clause attributive dc competence au profit des juridictions libanaises et pour fonder la compétence territoriale du Tribunal judiciaire de Béziers.
Il convient, en conséquence, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a declaré le Tribunal judiciaire de Béziers incompétent et en ce qu'elle a renvoyé les époux [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises désignées par la clause attributive de juridiction.
Compte tenu de cette incompétence, il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes formées par les époux [Y] aux fins d'obtention d'une provision et de condamnation sous astreinte de la Byblos Bank Sal à réintégrer le solde des fonds leur appartenant sur les comptes qu'ils détenaient au sein de celle-ci.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il est inéquitable de laisser à la charge de la Byblos Bank Sal les sommes non comprises dans les dépens. Les époux [Y] seront condamnés à lui payer la somme de 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par les appelants qui succombent dans le cadre de la présente instance d'appel sera rejetée.
Pour les mêmes motifs, ils supporteront les dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance enteprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] à payer à la Byblos Bank Sal la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] aux dépens de l'instance d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/05696 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QOHG
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 24 OCTOBRE 2024
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 8]
N° RG 23/02280
APPELANTS :
Madame [U] [M] [S] épouse [Y]
née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 7] (IRLANDE)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me RIGAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Monsieur [J] [Y]
né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 13]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me RIGAUD, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant
INTIMEE :
BYBLOS BANK SAL, Société anonyme de droit libanais au capital de 689 113 198 400 livres libanaises, dont le siège social est situé [Adresse 10] (Liban), immatriculée au registre du commerce de Beyrouth sous le numéro 14150 et sur la liste des banques publiée par la Banque du Liban sous le numéro 39, prise en la personne du Président de son Conseil d¿administration domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me SIVIGNON, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 AVRIL 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
Le délibéré intialement prévu le 12 JUIN 2025 a été prorogé au 26 JUIN 2025 puis au 04 Septembre 2025 ; les parties en ayant été préalablement avisées ;
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
M. [J] [Y], de nationalité française et Mme [U] [S] épouse [Y], de nationalité irlandaise ont exercé des fonctions de diplomates pour l'ONUpendant plusieurs années au Liban et ont ouvert plusieurs comptes bancaires dans les livres de la Byblos Bank Sal dont le siège social est situé à Beyrouth.
Résidant en France et ayant sollicité en vain le virement des fonds déposés dans cette banque sur un compte en France, ils ont fait assigner la Byblos Bank Sal de droit libanais devant le tribunal judiciaire de Béziers, par acte en date du 5 septembre 2023, au visa du règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement européen et du Conseil et de l'artilce 307 du code de commerce libanais afin de :
* voir juger que la Bank Byblos Sal a manqué à son obligation de restitution des fonds qu'elle détient pour leur compte
* et en conséquence, la condamner à leur payer par virement bancaire sur leur compte en France qui leur sera transmis en contrevaleur euros les fonds suivants :
- compte 215-5011284-001 : 106 395, 52 dollars (valeur US), soit 96 819, 92 € en contrevaleur euros en août 2023
- compte 215-5012884-004 : 204 429, 86 dollars (valeur US), soit 186031, 17 € en contrevaleur euros
- compte 215- 50128884-006 : 76 209, 05 dollars (valeur US) soit 69 350, 23 €
- compte 215-501883-001 : 30800 dollars (valeur US) soit en contrevaleur euros 28 028 €
- compte 215-501883-002 : 800 dollars soit en contrevaleur euros 728 €
Soit la somme totale de 380 957, 32 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 août 2023 et ce, sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir.
La société Byblos Bank Sal a saisi le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béziers de conclusions d'incident tendant à voir déclarer le tribunal judiciaire de Béziers territorialement incompétent pour statuer sur les demandes des époux [Y] et de
les renvoyer à se pourvoir devant le juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales d'ouverture des comptes bancaires litigieux.
Parrallèlement, les époux [Y] ont saisi le même juge de la mise en état d'une demande de provision à hauteur de 200 000 € et de restitution du solde des fonds sous astreinte.
Par ordonnance du 24 octobre 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béziers a :
- déclaré territorialement incompétent le Tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur les demandes de M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal,
- renvoyé M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions genérales d'ouverture de compte bancaire souscrites,
- dit n'y avoir lieu a application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] aux dépens de l'incident.
Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour le 12 novembre 2024.
Par ordonnance en date du 5 décembre 2024, ils ont été autorisés par la présidente de la présente chambre à faire assigner à jour fixe la SA Byblos Bank Sal pour l'audience du 7 avril 2025. La SA Byblos Bank a été assignée par la voie du Parquet Général de la présente cour le 6 décembre 2024 selon les formalités prévues par la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale. L'assignation a été déposée au greffe de la présente cour par la voie électronique le 27 décembre 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 avril 2025, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, Mme [U] [G] épouse [Y] et M. [J] [Y] demandent à la cour, au visa notamment du Réglement n° 1215/2012 du 12/12/2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement Européen et du Conseil, en ses articles 17.1, 17.2, 18 et 19.1, 19.2, de la Directive 93/13/CEE du 5/04/1993 relatives aux clauses abusives et de l'articcle 307 du Code de Commerce libanais de:
- infirmer l'Ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de Béziers en ce qu'il s'est déclaré incompetent territorialement pour statuer sur le litige opposant les Consorts [Y] a la Bank Byblos Sal et les a renvoyé à se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales d'ouverture de comptes bancaires souscrites,
* et statuant a nouveau :
- Juger le Tribunal judiciaire de Béziers compétent territorialement pour statuer sur le litige opposant les consorts [Y] à la Byblos Bank Sal,
- Juger le Tribunal judiciaire de Béziers compétent rationae materiae et rationae loci pour statuer sur les demandes des époux [Y] a l'encontre de la Société Byblos Bank Sal,
- Juger la clause d'attribution de compétence devant la juridiction libanaise inopposable en l'espéce aux époux [Y],
- Juger abusive la clause invoquée par Byblos Bank Sal relative à l'offre réelle de consignation des fonds des époux [Y] chez un notaire,
- Condamner la Société Byblos Bank Sal à payer à M. [J] [Y] et Mme. [U] [M] [S] épouse [Y] une provision de 200 000 €.
- Juger que cette provision devra étre payée sur un compte CARPA ouvert en cette affaire par le Conseil des époux [Y] et ce, dans le délai de 15 jours à compter de la notification à l'avocat constitué pour le compte de la banque Byblos Bank Sal et, passé ce délai, sous astreinte de 1000 € par jour de retard pendant 3 mois et, passé ce délai, le Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Béziers se réservera le droit de liquider cette astreinte provisoire et d'en fixer une nouvelle.
- Juger qu'il sera fait application de l'article 789 3° en subordonnant l'exécution de l'Ordonnance à intervenir à la constitution de telle garantie qu'appréciera la cour, dans les conditions prévues aux articles 514-5, 517 et 518 a 522 du Code de Procédure Civile.
- Juger non fondée l'argumentation de la société Byblos Bank Sal et la débouter de lintégralité de ses demandes,
- Condamner la société Byblos Bank Sal sous la méme astreinte à réintégrer le solde des fonds appartenant au époux [Y] sur les comptes qu'ils détenaient au sein de Ia Bank Byblos Sal.
- Qu'elle sera également condamnée à payer a M. et Mme [Y] la somme de 8000 euros par application de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Au dispositif de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 13 mars 2025, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la Byblos Bank Sal, société anonyme de droit libanais demande à la cour, au visa notamment des 6, 17, 18 et 19 du Règlement n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, L.212-1, L.231-1 et L.232-1 du Code de la consommation, des articles 294 à 298 et l'article 302 du Code des obligations et des contrats libanais, des articles 821 à 826 du Code de procédure civile libanais et 307 du Code de commerce libanais de :
* In limine litis, sur la compétence du tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur les demandes faites par M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal :
- constater qu'il n'est pas démontré que Byblos Bank Sal ait dirigé ses activités vers la France à la date à laquelle elle est entrée en relation avec M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] ;
- constater l'existence et la validité entre les parties d'une clause attributive de compétence soumettant le présent litige aux tribunaux libanais ;
En conséquence :
- juger que le Tribunal judiciaire de Béziers est territorialement incompétent pour statuer sur les demandes de M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal ;
- renvoyer M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises conformément à la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions générales d'ouverture de compte souscrites par M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] ;
- confirmer l'ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Béziers du 24 octobre 2024 dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
* Subsidiairement, si par extraordinaire la Cour devait infirmer l'ordonnance du Juge de la mise en état du 24 octobre 2024 et déclarait le Tribunal judiciaire de Béziers compétent pour statuer sur les demandes des M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] à l'encontre de Byblos Bank Sal
- Au principal, renvoyer l'affaire devant le Juge de la Mise en Etat de [Localité 8], sans user du pouvoir d'évocation de l'article 88 du CPC.
- Au subsidiaire, débouter M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] de leur demande de provision ainsi que de leur demande de condamnation de Byblos Bank Sal à verser cette provision sous astreinte par le biais d'un virement sur le compte CARPA du Conseil de ces derniers ;
- débouter M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] de leur demande de réintégration du solde des fonds sur les comptes qu'ils avaient ouvert auprès de Byblos Bank Sal ;
* En tout état de cause :
- condamner M. [J] [Y] et Mme [U] [M] [S] épouse [Y] aux entiers dépens.
- condamner M. [J] [Y] et Madame [U] [M] [S] épouse [Y] au paiement d'une somme de 10.000 euros à Byblos Bank Sal au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS :
Sur l'exception d'incompétence territoriale de la juridiction française et du tribunal judiciaire de Béziers au profit des juridictions libanaises
Les époux [Y] soutiennent être fondés à invoquer la compétence territoriale du tribunal judiciaire de Béziers retenant d'une part l'option de l'article 18-1 du dudit Réglement qui leur permet de saisir de leur action la juridiction du lieu de leur domicile et d'autre part la prohibition des clauses attributives de compétence stipulées antérieurement à la naissance du différend, en défaveur du consommateur les privant de cette option prévue à ses articles 19.1 et 19.2.
Ils font valoir à cet égard qu'ils sont pour l'un de nationalité française et pour l'autre de nationalité irlandaise, dont les pays font partie de l'Union européenne, qu'il résident actuellement à [Localité 16] en France et ce, depuis le 11 mai 2016, que leur statut de diplomates au Liban leur octroyait un droit de résidant au Liban valable à vie mais que leur résidence fiscale était déjà en [12] au jour de l'ouverture des comptes et ce, en vertu d'une convention du 24 juillet 1962 signée entre la France et le Liban ayant pour objet d'éviter une double imposition sur le revenu.
Ils invoquent en conséquence l'application des articles 17.1, 17.2, 18, 19.1 et 19.2 du Règlement n° 1215/2012 du 12/12/2012 dit Bruxelles 1 Bis du Parlement européen desquels il résulte que :
- la compétence est déterminée en matière de contrat conclu par une personne consommateur notamment lorsque ce contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans de l'Etat membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui , par tout moyen dirige ces activités vers cet Etat membre ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre, du consommateur
- lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un Etat membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet Etat membre.
Ils font observer qu'en l'espèce, la Banque a offert la gestion de comptes en diverses devises autres que la livre libanaise, la proposition de virements internationaux, la faculté de joindre ses préposés avec des coordonnées téléphoniques contenant un préfixe international auxquels s'ajoutent la rédaction d'un site internet et de documents de gestion de compte en langue anglaise, ces éléments démontrant la vocation internationale de l'activité de la banque, confirmée tant par son site internet qui mentionne un vaste réseau de filiales, bureaux de représentations et succursales à travers le Liban et dans plusieurs pays, dont la France que par son propre rapport annuel de l'année 2017 qui établi que la banque dirigeait avant 2017 ses activités vers nombre d'Etats dans le monde dont la France et par les échanges de mails par lesquels elle a demandé à Mme [Y] de signer à [Localité 14] dans l'une de ses filiales, la société Byblos Bank Europe un document visant une circulaire dit "158" le 29 septembre 2021 et relative à l'une des ouvertures de compte, ce qu'elle a fait.
L'intimée soulève au contraire l'incompétence du tribunal judiciaire de Béziers pour statuer sur le litige en cause tenant à la clause attributive de juridication au profit des juridictions libanaises contenue dans les conditions générales d'ouverture des comptes acceptées par les époux [Y], que les articles 17, 18 et 19 du Règlement Bruxelles 1 bis ne sont donc pas applicables et que pour apprécier la condition tenant à la direction de l'activité du professionnel vers un Etat membre, énoncée au c) de l'article 17, il faut se placer avant la conclusion du contrat faisant l'objet du litige et la jurisprudence a écarté systématiquement les indices jugés impropres à établir la direction de l'activité d'une banque étrangère vers la France, tels la lanque utilisée par le professionnel lorsqu'il s'agit d'une langue communément utilisée comme l'anglais ou le français au Liban, le nom de domaine.com du professionnel, le fait que la banque offre la possibilité d'ouvrir des comptes en devises étrangères ou des services de transfert internationaux et de manière générale si la vocation internationale d'une activité peut constituer un indice de ce qu'un professionnel dirigerait ses activités à l'international, cet élément n'étant pas de nature à démontrer la direction de l'activité d'un professionnel vers le territoire d'un Etat membre donné.
Elle expose ainsi que les consorts [Y] ont ouvert leurs comptes alors qu'ils résidaient au Liban en janvier 2018, au moment de leur acceptation des conditions générales d'ouverture de compte, que la société Byblos n'a jamais dépêché ses employés en France et ne possède ni succursale ni agence en France, la société Byblos Bank Europe, même s'agissant d'une de ses filiales étant une personne morale distincte et autonome et avec laquelle ils n'ont aucun lien contractuel, que la signature de documents à l'agence parisienne de cette filiale date de 2021 soit 3 ans après leur entrée en relation avec Byblos Bank au Liban et n'est intervenue que pour des raisons de confort pour leur éviter de se rendre au Liban.
Il ressort des pièces produites par la Banque et il n'est pas contesté que l'article 9.13 des conditions générales d'ouverture de compte applicables aux comptes ouverts par les époux [Y] dans les livres de la Byblos Bank Sal le 19 janvier 2018 contient une clause attributive de juridiction libellée de la manière suivante : ' Les conditions générales sont gouvernées par la loi libanaise. Tout litige découlant de leur exécution et/ou de leur interprétation sera exclusivement soumis aux tribunaux judiciaires libanais compétents.'
Il n'est pas davantage contesté par les époux [Y] qu'ils ont reçu, lu et accepté ces conditions générales en apposant leurs signatures et la mention manuscrite 'lu et approuvé' comme le relève le premier juge et qu'ils ont donc accepté cette clause attributive de compétence.
La licéité d'une telle clause n'est pas remise en cause dès lors qu'elle s'applique à un litige international caractérisé en l'espèce par de nombreux éléments d'extranéité énumérés de manière complète par le premier juge dont les nationalités française et irlandaise des époux [Y], la signature de comptes au Liban avec une Banque de droit libanais, l'adresse libanaise des époux [Y] au jour de signature de ces comptes, le libellé en devises étrangères de ces comptes, les langues anglaise et arabe de rédaction de la documentation relative à ces comptes et l'application du droit libanais par les conditions générales d'ouverture des comptes.
Pour être valablement applicable, cette clause ne doit pas, par ailleurs, faire échec à la compétence territoriale impérative d'une juridiction française.
S'agissant d'un litige civil concernant l'application de contrats d'ouverture de compte bancaire opposant des ressortissants de deux états membres de l'Union européenne à un autre Etat n'ayant pas son siège sur le territoire d'un Etat membre, il n'est pas contesté par les parties que c'est conformément aux régles édictées par le règlement n° 1215/2012/UE du 12 décembre 2012 dit 'Bruxelles 1bis' concernant notamment la compétence judiciaire en matière civile et commerciale, applicable depuis le 10 janvier 2015 aux membres de l'Union européenne, qu'il y a lieu de déterminer la compétence judiciaire.
Il ressort de l'article 6 paragraphe 1 du Règlement Bruxelles 1 bis que 'Si le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre, la compétence est dans chaque Etat membre réglée par la loi de cet Etat membre, sous réserve de l'application de l'article 18 paragraphe 1 de l'article 21 paragaraphe 2 et des articles 24 et 25 ....'
L'article 17 inclus dans la section 4 du même règlement sur la compétence en matiére de contrats conclus par les consommateurs dispose :
1. En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans prejudice de l'article 6 et de l'article 7, point 5) :
a) lorsqu'il s'agit d'une vente à tempérament d'objets mobiliers corporels ;
b) lorsqu'il s'agit d 'un prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente de tels objets; ou
c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'Etat membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet Etat membre ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.
2. Lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un Etat membre, il est consideré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet Etat membre.
.
Aux termes de l'article 18 dudit règlement :
1. L 'action intentee par un consommateur contre l'autre partie au contrat peut être portée soit devant les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit, quel que soit le domicile de l'autre partie, devant la juridiction du lieu ou le consommateur est domicilié.
2. L 'action intentée contre le consommateur par l 'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les juridictions de l 'Etat membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur
Enfin, en application de l'article 19, il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions :
1) posterieures à la naissance du différend ;
2) qui permettent au consommateur de saisir d'autres juridictions que celles indiquées a la présente section; ou
3) qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur residence habituelle dans un même [11] membre, attribuent compétence aux juridictions de cet Etat membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions.
ll résulte de la combinaisons de ces textes comme l'a retenu à bon droit le premier juge, que lorsque le défendeur n'est pas domicilié dans un Etat membre, ce qui est le cas en l'espèce de la société Byblos Bank Sal ayant son siège social à Beyrouth au Liban, les règles de compétence prescrites par la section IV du Règlement Bruxelles lbis ( articles 18 et 19 dudit Reglement) ne sont applicables que si les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies :
- le contrat a été conclu par le demandeur pour un usage étranger à son activité professionnelle ;
- le consommateur a son domicile dans l'Etat membre devant les juridictions duquel sa demande est portée ;
- son cocontractant dirige ses activités vers l'Etat membre ou le consommateur a son domicile ou vers plusieurs Etats, dont cet Etat membre.
En l'espèce, il ressort des documents d'ouverture des comptes que les époux [Y] ont déclaré avoir leur domicile au Liban à l'adresse suivante :[Adresse 15]. Ils ont également signé chacun un fomulaire d'autocertification contenant cette même adresse et aux termes duquel ils ont confirmé être résidents fiscaux au Liban. Il n'est pas constesté, par ailleurs, qu'au moment de l'ouverture de leurs comptes, ils exerçaient l'activité de diplomate au Liban.
Pour justifier qu'ils avaient, en réalité, leur domicile situé en France, ils produisent des justificatifs attestant de l'achat d'une propriété à [Localité 16] en France le 18 février 2016, d'un justificatif d'abonnement d'électricité depuis le 11 mai 2016 concernant ce bien et de deux avis d'imposition sur le revenu sour les revenus 2017 et 2018 libellés à leurs noms à cette adresse. Pour apprécier la notion de domicile, l'article 62 du règlement précité renvoie aux règles nationales, en l'occurence à l'article 102 du code civil qui précise que le domicile de tout français est le lieu où il a son principal établissement. Les documents produits par les consorts [Y] à ce titre sont insuffisamments probants alors que l'achat d'un bien en France et la facture d'abonnement en électricité sont insuffisants à apporter la preuve d'une occupation de ce bien à titre de domicile principal et non pas seulement en qualité de résidence secondaire. Les avis d'imposition produits sont, en outre, des avis simplifiés sans mention du contenu des revenus faisant l'objet de l'imposition. Ces documents n'apportent pas, en conséquence la preuve de ce que les époux [Y] avaient fixé en France leur domicile principal, ce que contredisent leurs déclarations claires et réitérés dans les documents contractuels d'un domicile au Liban, l'ouverture de comptes dans ce pays et leur activité professionnelle exercée dans ce même pays. La convention signée entre la France et le Liban le 24 juillet 1962 invoquée par les appelants ne fait que déterminer les règles d'assujetissement à l'impôt applicables aux résidents de chacun des Etats contractants en fonction du centre de ses intérêts vitaux et permettant d'éviter une double imposition des revenus dans les deux Etats. Elle ne vient ni contredire une domiciliation fiscale des époux [Y] au Liban, ni établir leur domiciliation fiscale en France.
Comme l'a retenu également le premier juge à bon droit, il n'est pas davantage établi que la Byblos Bank Sal ait dirigé son activité vers la France avant son entrée en relation avec les époux [Y]. Ce type d'activité ne saurait résulter comme le prétendent les appelantes de l'offre de gestion des comptes en diverses devises autres que la livre libanaise, de la proposition de virements internationaux, de la faculté de joindre ses préposés avec des coordonnées téléphoniques contenant un préfixe international, de l'utilisation d'un site internet et de la rédaction des documents contractuels et de gestion de compte en langues anglaise et/ arabe et du fait même de dipsoser d'un réseau de succursales ou filiales à l'étranger, dont en France, ces éléments ne faisant que reflèter l'activité internationale de la banque et ne venant pas démontrer une activité de la Banque de démarchage tournée vers la France, même à distance. Le rapport annuel 2017 du Groupe versé aux débats par les appelants ne fait à cet égard qu'établir la présence internationale de la banque mais aucune politique ou action particulière menée en direction des consommateurs français.
Si les époux [Y] versent aux débats un document aux termes duquel la Byblos Bank Sal a demandé à Mme [Y] le 29 septembre 2021 de signer un formulaire d'ouverture de compte dans les locaux de la Byblos Bank Europe à [Localité 14] alors qu'elle se trouvait en France, il convient de relever d'une part que que cette démarche a été effectuée trois ans après l'entrée en relation des époux [Y] avec la Byblos Bank et non antérieurement à celle-ci et d'autre part que la Byblos Bank Europe, dont il n'est pas contesté qu'elle est une filiale de la Byblos Bank Sal dispose d'une personnalité juridique différente de cette dernière, quand bien même détiendrait-elle 99, 95 des actions au sein de cette société et n'est intervenue dans l'opération en cause que pour servir de lieu et d'authentification de signature de celle-ci et que comme un tiers étranger aux relations contractuelles entre les consorts [Y] et la Byblos Bank Sal, comme le confirment les emails versés aux débats entre les consorts [Y] et leur conseiller à la Byblos Bank Sal, la signature en France de ce nouveau contrat d'ouverture de compte n'ayant été motivée que pour leur éviter de se déplacer au Liban. Cette seule circonstance ne suffit donc pas à établir une activité de la Byblos Bank Sal dirigée vers la France.
C'est donc de manière parfaitement pertinente que le premier juge a considéré que les époux [Y] n'étaient pas fondés à invoquer les dispositions de la section IV du Règlement Bruxelles lbis pour contester l'opposabilité de la clause attributive dc competence au profit des juridictions libanaises et pour fonder la compétence territoriale du Tribunal judiciaire de Béziers.
Il convient, en conséquence, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a declaré le Tribunal judiciaire de Béziers incompétent et en ce qu'elle a renvoyé les époux [Y] à mieux se pourvoir devant les juridictions libanaises désignées par la clause attributive de juridiction.
Compte tenu de cette incompétence, il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes formées par les époux [Y] aux fins d'obtention d'une provision et de condamnation sous astreinte de la Byblos Bank Sal à réintégrer le solde des fonds leur appartenant sur les comptes qu'ils détenaient au sein de celle-ci.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il est inéquitable de laisser à la charge de la Byblos Bank Sal les sommes non comprises dans les dépens. Les époux [Y] seront condamnés à lui payer la somme de 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par les appelants qui succombent dans le cadre de la présente instance d'appel sera rejetée.
Pour les mêmes motifs, ils supporteront les dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance enteprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] à payer à la Byblos Bank Sal la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne Mme [U] [S] épouse [Y] et M. [J] [Y] aux dépens de l'instance d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE