CA Rouen, ch. soc., 4 septembre 2025, n° 24/00966
ROUEN
Arrêt
Autre
N° RG 24/00966 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JTKW
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 13 Février 2024
APPELANT :
Monsieur [O] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Marion AUBE de la SELARL EHMA AVOCATS, avocat au barreau de l'EURE
INTIMEE :
Association MOISSONS NOUVELLES
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Matthieu BABIN, avocat au barreau de NANTES
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 28 Mai 2025 sans opposition des parties devant M. LABADIE, Conseiller, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Monsieur LABADIE, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DUBUC, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 28 mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 septembre 2025
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 04 Septembre 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Monsieur LABADIE, Conseiller, pour la Présidente empêchée Madame LEBAS-LIABEUF, et par Madame DUBUC, Greffière.
FAITS ET PROCEDURE
M. [O] [D] a été engagé par l'association Moissons Nouvelles en qualité de directeur de secteur par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 04 septembre 2020 à temps plein.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.
M. [D] a été placé le 3 avril 2023 en arrêt de travail qui a été reconnu comme accident du travail par la sécurité sociale.
M. [D] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 25 août 2023 dans les termes suivants :
« Je reviens cers vous dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée den date du 4 septembre 2020 qui nous lie.
A ce titre et ainsi que vous le savez déjà, mes conditions de travail qui sont difficiles depuis ma prise de poste, se sont fortement dégradées compte tenu :
- de la surcharge de travail que vous m'avez imposée,
- des heures supplémentaires indispensables au bon fonctionnement de l'établissement et à la réalisation des tâches confiées, effectuées mais non réglées,
- de la gestion de missions ne relevant pas de mes prérogatives,
- du harcèlement moral.
Je vous ai alerté à plusieurs reprises de ces difficultés, en vain.
Mon état de santé s'est brutalement dégradé le 3 avril dernier, date à laquelle j'ai été placé en arrêt maladie.
Vous n'êtes pas sans ignorer que le caractère professionnel de l'accident de travail a été reconnu par la sécurité sociale, l'épuisement professionnel étant avéré.
Ces manquements ont, une nouvelle fois, été portés à votre connaissance par le canal de mon conseil suivant courrier en date du 22 mai dernier.
Vous avez feint l'étonnement, excluant ainsi toute possibilité d'issue amiable, ce d'autant que depuis que je suis absent, vous n'hésitez pas à remettre en cause la qualité de mon travail auprès des salariés et à me discréditer auprès des instances partenaires.
Cette situation est intolérable et je ne peux continuer à l'accepter.
Ce sont les raisons pour lesquelles je vous informe par la présente prendre acte de la rupture de mon contrat de travail, laquelle est effective dès l'envoi de ce courrier. »
Par requête du 29 septembre 2023, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Evreux en requalification de la rupture de son contrat de travail ainsi qu'en paiement d'heures supplémentaires.
Par jugement du 13 février 2024, le conseil de prud'hommes :
- dit que la prise d'acte de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire tous les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes,
- se déclare en partage de voix sur la demande reconventionnelle au titre de l'indemnité de préavis,
- dit que l'affaire est renvoyée à l'audience de départage,
- déboute l'association Moissons Nouvelles du surplus de ses demandes reconventionnelles,
- réserve les dépens.
Le 13 mars 2024, M. [D] a interjeté appel de ce jugement limitant son recours aux chefs de jugement suivants :
- dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes.
Le 2 avril 2024, l'association Moissons Nouvelles a constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mai 2025
MOYENS ET PRETENTIONS
Aux termes des dernières conclusions déposées le 25 avril 2025, M. [D] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris du 13 février 2024 en ce qu'il a dit que la prise d'acte devait s'analyser en une démission et l'a débouté du surplus de ses demandes,
- confirmer le jugement du 20 janvier 2025 en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis
Statuant à nouveau,
- débouter l'association Moissons Nouvelles de ses demandes, fins et conclusions,
- faire produire à sa prise d'acte en date du 25 août 2023 les effets d'un licenciement nul, pour être intervenu dans le cadre d'une suspension du contrat de travail pour accident de travail, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner l'association Moissons Nouvelles à lui verser les sommes suivantes :
10 806,14 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
21 612,28 euros au titre de l'indemnité de préavis,
2 161,22 euros au titre des congés payés afférents,
32 418,42 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
23 274,76 euros au titre de l'indemnité de congés payés,
14 457,06 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2020,
1 445,70 euros au titre des congés payés afférents,
43 562,52 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2021,
4 356,25 euros au titre des congés payés afférents,
26 106,25 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos afférente aux heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel sur l'exercice 2021,
36 733,51 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2022,
3 673,35 euros au titre des congés payés afférents,
21 087,50 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos afférente aux heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel sur l'exercice 2022,
8 565,95 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2023,
856,59 euros au titre des congés payés afférents,
32 418,42 euros au titre du travail dissimulé,
30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la remise des documents de fin de contrat et bulletins de paie rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir,
- assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 mai 2025, l'association Moissons Nouvelles demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il a dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par M. [D] s'analyse en une démission et débouté M. [D] de ses demandes,
- infirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,
statuant à nouveau,
- à titre reconventionnel, condamner M. [D] à lui verser :
14 972,25 euros au titre de l'indemnité de préavis,
2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
à titre subsidiaire,
statuant à nouveau,
- fixer dans de justes proportions le montant de toute somme allouée à M. [D],
- débouter M. [D] de toute demande au titre de l'astreinte, à défaut fixer, les condition et modalités de celle-ci dans de justes proportions,
- lui accorder un délai de grâce de deux ans ou sinon fixer à justes proportions, à raison de mensualités d'un montant égal sur la durée ainsi fixée, concernant toute condamnation prononcée, ou à tout le moins à toute condamnation à caractère indemnitaire.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives
MOTIVATION
A titre liminaire sur l'étendue de la saisine de la cour
Aux termes de sa déclaration d'appel dirigé contre le jugement rendu le 13 février 2024, M. [D] a limité son appel aux dispositions suivantes du jugement entrepris :
- dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes.
Aux termes de ses premières écritures, dont le dispositif est similaire à celui de ses dernières écritures, l'association Moissons Nouvelles a formé appel incident en concluant de la façon suivante :
« Infirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il a débouté l'association Moissons nouvelles de ses demandes reconventionnelles,
Et statuant à nouveau,
A titre reconventionnel, condamner M. [O] [D] à verser à l'association Moissons nouvelles la somme de 14 972,25 euros au titre de l'indemnité de préavis,
A titre reconventionnel, condamner M. [O] [D] à verser à l'association Moissons Nouvelles la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. »
Or, il convient de rappeler que la cour est saisie d'un appel dirigé contre le jugement rendu le 13 février 2024 qui s'agissant des deux demandes reconventionnelles formées par l'association Moissons Nouvelles a statué différemment,
S'agissant de la demande reconventionnelle, ainsi qualifiée par l'association défenderesse en première instance, en paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le conseil des prud'hommes, eu égard au dispositif de sa décision, a en ravnche statué sur cette prétention en déboutant « l'association Moissons Nouvelles su surplus de ses demandes reconventionnelles. »
S'agissant de la demande reconventionnelle au titre de l'indemnité de préavis formée par l'association, le conseil de prud'hommes s'est déclaré en partage de voix et renvoyé l'examen de cette prétention devant la formation de départage.
Selon les dernières écritures déposées par l'appelant, le conseil des prud'hommes aurait statué le 20 janvier 2025 sur cette prétention puisqu'aux termes du dispositif il demande à la cour de « confirmer le jugement du 20 janvier 2025 en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis M. [D] ».
Pour avoir été saisie d'un appel interjeté le 6 février 2025 par l'association Moissons Nouvelles (RG 25/00469), la cour constate en effet que le conseil des prud'hommes, en formation de départage, a rendu une seconde décision le 20 janvier 2025 aux termes de laquelle il :
- déboute l'association MOISSONS NOUVELLES de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis formée à l'encontre de M. [O] [D],
- condamne M. [O] [D] aux entiers dépens.
La cour considère dès lors qu'elle n'est saisie ni de la question de l'indemnité compensatrice de préavis réclamée par l'association, ni du sort des dépens de première instance.
1) Sur la demande en paiement au titre du rappel d'heures supplémentaires
S'accordant avec son employeur sur une durée hebdomadaire de travail de référence de 39 heures compensées par 23 jours de RTT, M. [D] réclame le paiement des heures supplémentaires réalisées au-delà des 39 heures, exposant avoir accompli :
en 2020, 423 heures,
en 2021, 1264,25 heures,
en 2022, 1063,50 heures,
en 2023, 240 heures.
En réponse, l'association Moissons Nouvelles soutient que M. [D] était libre de ses horaires, ne devait pas dépasser 39 heures hebdomadaires, n'a jamais évoqué la nécessité d'heures supplémentaires.
Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En l'espèce, à l'appui de sa demande, M. [D] produit un tableau récapitulant les heures supplémentaires réclamées en précisant les heures de début et de fin de travail, et ce, pour chacune des journées travaillées depuis le 4 septembre 2020 jusqu'au 3 avril 2023, ce qui, en soi, constitue un élément suffisamment précis permettant utilement à l'employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d'y répondre utilement.
En outre, au-delà de ce tableau, il produit son agenda électronique sur lequel sont mentionnés les rendez-vous, réunions ou encore formations prévues mais aussi de nombreuses attestations d'anciens collègues décrivant la charge de travail à laquelle il était confronté.
Ainsi Mme [S], ancienne salariée ayant travaillé au sein de la MECSD en tant que cheffe de service d'octobre à décembre 2020, témoigne que M. [D] ne comptait pas ses heures, notamment lors du départ et du retour des enfants.
Mme [J], salariée exerçant les fonctions de Monitrice éducatrice, atteste qu'elle a constaté que M. [D] démarrait ses journées de travail aux alentours de 7h30, 8h et ne comptait pas ses heures, pouvant repartir le soir aux alentours de 23h. Elle ajoute lors de deux week-ends où elle était en poste, M. [D] s'était déplacé pour l'assister aux fins de prendre en charge 2 mineurs en situation de détresse.
Mme [Y], salariée exerçant les fonctions d'éducatrice spécialisée, témoigne que M. [D] travaillait régulièrement entre 12 et 18 heures par jour, le voyant le matin dès 7h, 7h30 ainsi que le soir jusqu'à 23h, voire plus.
Mme [L], salariée exerçant les fonctions de Monitrice éducatrice, atteste que M. [D] faisait des journées de plus de 7h par jour, témoignant l'avoir vu arriver avant 8h et partir à plus de 22h et venir dans l'établissement les week-ends sur sollicitation du personnel d'astreinte.
M. [R], ancien salarié ayant occupé la fonction d'éducateur du 1er septembre 2021 au 28 février 2023, témoigne qu'il lui arrivait de croiser sur le lieu de travail M. [D] très tôt le matin (avant 8h) et très tard le soir, ajoutant que lorsqu'il quittait son service à 23h, M. [D] était encore présent dans son bureau.
Enfin, l'appelant verse aux débats de nombreux mails échangées sur toute la période concernée montrant sa disponibilité tant vis-à-vis de ses équipes que vis-à-vis de sa responsable hiérarchique ; Mme [C], directrice du Pôle Normandie, aussi bien les Week-ends où il n'était pas d'astreinte que durant ses congés ou encore ses RTT.
Face à ces éléments suffisamment précis, l'employeur observe que M. [D] n'a jamais évoqué, tant au gré des échanges que lors de ses deux entretiens annuels, auprès de sa hiérarchie, à savoir Mme [C] ou Mme [A], exerçant les fonctions de directrice générale de l'association, ni le fait de ne pas parvenir à respecter la durée hebdomadaire moyenne de 39 heures, ni le fait de devoir accomplir des heures de dépassement, ce qu'il lui appartenait de faire eu égard à son contrat de travail et à la délégation de pouvoirs dont il bénéficiait.
L'association Moisons Nouvelles observe de surcroit que M. [D] informait sa hiérarchie de ses variables de paie et de celles du personnel de la MECS et qu'à ces occasions, il n'a jamais fait mention le concernant de l'existence d'heures supplémentaires.
L'employeur expose encore que l'agenda produit par M. [D] ne serait pas sincère pour porter mentions de « rendez-vous privé » apposées a posteriori et pour les seuls besoins de la cause.
Il prétend aussi que le tableau récapitulant les heures supplémentaires est mensonger, la fausseté du décompte résultant notamment des affirmations de M. [D], jugées ridicules par l'employeur, aux termes desquelles il ne prenait jamais aucune pause, ne déjeunait jamais le midi et dînait en travaillant.
Elle critique de plus les données reprises dans le tableau produit par le salarié dans la mesure où elle relève des discordances sur certains jours avec les données émanant de l'agenda.
L'association Moissons Nouvelles reproche à M. [D] de ne pas préciser quelle part représente, sur le total des heures de travail prétendument accomplies, le temps de travail personnel qu'il consacrait au suivi de sa formation en Master.
Après avoir rappelé s'agissant des périodes d'astreinte pour les week-ends qu'il y a lieu de distinguer l'astreinte, qui fait l'objet d'une rémunération spécifique et n'est pas comptée comme un temps effectif de travail, de l'intervention, l'employeur prétend que certaines des interventions réalisées par son salarié n'était en rien justifié et l'ont été quoiqu'il en soit à l'insu de sa hiérarchie.
Au regard de ces éléments, outre le fait que nombre des allégations ne sont pas justifiées par l'association Moissons Nouvelles, il ressort que l'employeur ne justifie pas des horaires effectivement réalisés par le salarié, alors qu'il lui incombe d'assurer le contrôle des heures effectuées par ses salariés. L'employeur ne peut légitimement soutenir ne pas avoir donné son accord implicite à la réalisation d'heures supplémentaires en ce qu'il ressort des échanges de mail versés aux débats qu'il était parfaitement informé de l'amplitude de travail de M. [D] pour notamment l'avoir sollicité régulièrement même durant ses congés ou les jours pris de RTT. A cet égard, il est notable de relever que lors des entretiens annuels vantés par l'employeur à aucun moment la responsable hiérarchique n'a estimé devoir interroger M. [D] sur l'adéquation de sa durée hebdomadaire de travail avec la diversité de ses tâches. Pour apprécier l'étendue des heures supplémentaires accomplies, il convient en revanche de tenir compte des critiques fondées émises par l'association Moisson Nouvelles en ce qu'elles reposent soit sur l'existence de discordances entre l'agenda et le tableau récapitulatif produits par son salarié soit sur le constat d'heures déclarées ne répondant pas à une nécessité du service.
Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que le salarié a effectué les heures supplémentaires non rémunérées mais dans des proportions moindres que celle sollicitée.
Ainsi, il convient de retenir que M. [D] a réalisé, au-delà de 39 heures hebdomadaires, 290 heures supplémentaires du 4 septembre au 31 décembre 2020 dont 68 heures majorées à 25% et 222 heures majorées à 50%, 900 heures en 2021 dont 188 heures majorées à 25% et 712 majorées à 50%, 700 en 2022 dont 188 majorées à 25% et 512 majorées à 50%, et 140 du 1er janvier 2023 au 3 avril 2023 dont 52 majorées à 25% et 88 majorées à 50%.
Aussi, pour l'année 2020, sur la base d'un taux horaire de 24,05 euros, soit 30,06 euros majoré à 25% et 36,07 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 10 051,62 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 1 005,16 euros au titre des congés payés afférents.
Pour l'année 2021, sur la base de ce même taux horaire jusqu'en août 2021, puis sur la base d'un taux horaire de 24,18 euros à compter de septembre 2021, soit 30,22 euros majoré à 25% et 36,27 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 31 389,96 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 3 139 euros au titre des congés payés afférents.
Pour l'année 2022, sur la base du taux horaire de septembre 2021 applicable jusqu'en août 2022, puis sur la base d'un taux horaire de 25,68 euros soit 30,85 euros majoré à 25% et 37,02 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 24 418,40 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 2 441,84 euros au titre des congés payés afférents.
Enfin, pour l'année 2023, sur la base d'un taux horaire de 25,39 euros, soit 31,74 euros majoré à 25% et 38,08 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 5 001,52 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 500,15 euros au titre des congés payés afférents.
Infirmant le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande, il convient donc de condamner l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] la somme de 70 861,50 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 7 086,15 euros au titre des congés payés afférents.
2) sur la demande en paiement au titre du repos compensateur
Eu égard aux motifs précédents et compte tenu d'un contingent annuel de 220 heures, M. [D] est fondé à solliciter une indemnité au titre du repos compensateur,
Il sollicite à cet égard une telle indemnité pour les deux exercices complets de 2021 et 2022.
Sur l'année 2021, il a accompli 900 heures supplémentaires de sorte que lui est dû des repos compensateurs à hauteur de 680 heures, soit 453,33 heures sur la base d'un taux de 24,05 et 226,66 heures sur la base d'un taux de 24,18, soit 16 383,23 euros (10 902,59 + 5 480,64).
Sur l'année 2022, il a accompli 700 heures supplémentaires de sorte que lui est dû des repos compensateurs à hauteur de 480 heures, soit 320 heures sur la base d'un taux de 24,18 et 160 heures sur la base d'un taux de 24,68, soit 11 686,40 euros (7 737,60 + 3 948,80).
Ainsi, il y a lieu de lui allouer au titre du repos compensateur la somme totale de 28 069,63 euros, outre 2 806,96 euros au titre des congés payés afférents.
3) Sur la demande en paiement de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé
Il résulte de l'article L.8221-1 du code du travail qu'est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d'emploi salarié.
Aux termes de l'article L. 8221-5 2°du code du travail est caractérisée s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Il revient au salarié de rapporter la preuve de l'élément matériel et intentionnel du travail dissimulé.
Il s'avère que M. [D] a accompli un nombre conséquent d'heures supplémentaires si bien qu'il rapporte la preuve de l'élément matériel.
L'amplitude de ses heures supplémentaires ne pouvait être ignorée par son employeur en considération du fait que sa supérieure hiérarchique, en charge d'opérer le contrôle des heures de travail effectivement réalisées par le salarié, sollicitait régulièrement M. [D], aussi bien les week-ends où il n'était pas d'astreinte que durant ses congés ou ses RTT, et qu'elle était encore rendue destinataire de mails l'informant de la situation de la structure et des absences de cheffes de service en raison desquelles M. [D] se mobilisait pour en assurer le remplacement, en plus de ses propres activités.
Il ressort encore de mails échangés et versés aux débats par l'appelant qu'au cours du premier trimestre 2023, M. [D] a alerté à plusieurs reprises sa hiérarchie de la surcharge d'activité à laquelle lui et ses cheffes de services devaient faire face, prenant soin de détailler les tâches leur revenant et soulignant la nécessité d'un déploiement de moyens humains supplémentaires pour y satisfaire.
Il convient de considérer que l'élément intentionnel de la dissimulation d'emploi est caractérisé.
En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours en violation de l'interdiction de travail dissimulé a droit à une indemnité égale à 6 mois de salaire, indemnité calculée en prenant en compte les heures supplémentaires accomplies dans les six mois précédent la rupture.
Il en résulte, la cour étant limité par la prétention émise par le salarié, qu'il y a lieu, par voie d'infirmation du jugement entrepris, de condamner l'association Moissons Nouvelles à verser à M. [D] la somme sollicitée par celui-ci à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, soit 32 418,42 euros.
4) Sur la demande en paiement au titre de l'indemnité de congés payés
M. [D] expose qu'à la rupture de son contrat, il lui restait 39 jours de congés payés, outre 63 jours de congés travaillés de sorte qu'il est fondé à solliciter la somme de 23.274,76 euros à ce titre.
Au soutien de sa prétention, il produit un tableau récapitulatif établi par ses soins.
En défense, l'association Moissons Nouvelles conclut au rejet de la prétention ainsi émise, s'agissant d'une demande non étayée et reposant exclusivement sur un tableau incompréhensible, conçu par l'appelant lui-même. L'employeur ajoute que M. [D] allègue avoir travaillé durant 63 jours de congés posés sans apporter le moindre élément au soutien de sa prétention.
En l'espèce, il ressorte du dernier bulletin de salaire d'août 2023 que l'association Moissons Nouvelles a versé notamment à M. [D] à son départ :
1 066,38 euros à titre d'indemnité compensatrice RTT correspondant à 6 jours
10 555,75 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés correspondant à 41,24 jours
Le tableau confectionné par l'appelant qui distingue congés payés, RTT et congés trimestriels (1, 2 et 3) est dès lors erroné en ce qu'il mentionne pour 2023 6 jours de RTT acquis et non payés.
La Cour observe que M [D] prétend qu'il lui restait 39, selon ses écritures, et 49 selon son tableau, de jours de congés payés non posés et non rémunérés, erreur à l'origine de l'incompréhension exprimée par l'intimée.
En réalité, présent au sein de la structure du 4 septembre 2020 au 25 août 2023, M. [D] pouvait prétendre à 74 jours de congés payés.
Or, il ressort de l'ensemble de ses bulletins de salaires qu'il en a posé 34 (10 en 2021 et 24 en 2022).
Dans ces conditions, il résulte du bulletin de salaire d'août 2023 qui mentionne le paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés, que M. [D] a été rémunéré pour les jours de congés payés non pris.
Sur la base du tableau fourni, M. [D] soutient encore qu'il a travaillé 63 jours alors qu'il s'agissait de jours posés soit au titre des congés payés (12 en 2021 et 12 en 2022), soit au titre de RTT (2 en 2020 et 4 en 2021) soit au titre des congés trimestriels ( 6 en 2020, 14 en 2021 et 12 en 2022).
Il produit à cet effet un tableau récapitulatif permettant d'identifier les jours de congés durant lesquels il estime avoir travaillé, auquel il associe un grand nombre de mails, également versés aux débats, matérialisant des échanges avec ses collaborateurs, des partenaires extérieurs ou encore avec sa hiérarchie, pour justifier de son activité.
Il s'avère que les jours évoqués par l'appelant sont également intégrés dans sa prétention émise au titre d'un rappel de salaire en raison d'heures supplémentaires, prétention à laquelle a fait droit la cour dans une proportion importante, le nombre d'heures supplémentaires retenu tenant compte de ces jours spécifiques.
Il y a donc lieu de considérer que ces jours de « congés travaillés » ont d'ores et déjà fait l'objet d'une indemnisation.
En raison de l'ensemble de ces éléments, M. [D] doit donc être débouté de sa demande, le jugement étant confirmé de ce chef.
5) Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral
L'article L.1152-1 du code du travail énonce qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l'article L 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En l'espèce, M. [D] justifie de la dégradation de son état de santé par la production de :
Il expose que son état de santé s'est dégradé en raison d'objectifs irréalisables et de la surcharge de travail, invoquant également la brutalité du management de Mme [C] lequel était selon lui caractéristique d'un comportement harceleur sur l'ensemble du personnel.
Il s'appuie sur les témoignages de Mme [K], secrétaire de direction travaillant à ses côtés, et de Mme [I], psychologue anciennement salariée de l'association Moissons Nouvelles
Ces salariés attestent de propos tenus par Mme [C], postérieurement au placement en arrêt de travail de M. [D], mettant en cause des décisions prises par leur directeur et ce en présence de membres du personnel de la MECS.
M. [D] verse également aux débats, les qualifiant de « courriels de disqualification » des mails échangés avec Mme [C] entre le 10 février 2023 et le 3 avril 2023.
Il s'agit principalement pour sa supérieure hiérarchique soit de lui rappeler des directives, soit de le relancer à propos d'éléments attendus par le service des ressources humaines, échanges sur le fond comme sur la forme conformes à des relations que peut entretenir un cadre avec l'un de ses subordonnés.
M. [D] affirme enfin que le 31 mars 2023, Mme [C] lui aurait indiqué qu'il « faudra déménager très loin si vous voulez retrouver du travail [O] », propos qu'elle aurait répétés lorsqu'il a récupéré le 17 avril 2023 ses effets personnels dans son bureau.
Cependant, il s'agit de simples allégations, contestées, et non étayées par l'appelant.
Ainsi M. [D] ne rapporte pas la preuve de faits laissant supposer l'existence d'agissements répétés susceptibles de caractériser un harcèlement, la dégradation de son état de santé ayant pour origine, ainsi qu'il le soutient par ailleurs, la surcharge de son activité du fait d'une amplitude conséquente de son temps de travail.
Il en résulte qu'il y a lieu de débouter M. [D] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.
6) Sur les effets de la prise d'acte de rupture
Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.
Si les faits justifient la prise d'acte par le salarié, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'un licenciement nul si les manquements reprochés à l'employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement.
Si les faits ne justifient pas la prise d'acte, la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission.
Il appartient au salarié d'établir la réalité des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa prise d'acte.
Le juge doit examiner tous les manquements invoqués par le salarié, y compris ceux qui ne figurent pas dans l'écrit de prise d'acte.
En l'espèce, le salarié fait valoir à l'appui de sa demande de requalification de sa prise d'acte des manquements de l'employeur suivants :
- Le non-paiement des heures supplémentaires,
- Un manquement de son obligation de sécurité résultant d'une surcharge de travail, d'objectifs irréalisables, du fait d'un harcèlement moral et en raison d'un accident du travail.
Il est établi que l'association Moissons Nouvelles est redevable d'un nombre conséquent d'heures supplémentaires résultant d'une surcharge de travail.
Il est établi par la production d'éléments médicaux que cette surcharge de travail est à l'origine d'un arrêt de travail prescrit le 3 avril 2023 et ayant été reconnu par la cpam de l'Eure d'origine professionnelle.
Si cette reconnaissance est contestée par l'employeur qui a saisi la commission de recours amiable de la caisse d'assurance maladie, il résulte néanmoins des éléments analysés précédemment que l'employeur a exposé son salarié à une surcharge de travail dépassant largement les 44 heures hebdomadaires sans que M. [D] puisse bénéficier d'un temps de repos compensateur.
L'accumulation d'autant d'heures supplémentaires associée à une mobilisation régulière du salarié pendant ses jours de repos (Congés payés, RTT, Week-ends) a, à tout le moins pour partie, contribué à dégrader sa santé physique et mentale
Compte tenu des échanges de M. [D] avec sa hiérarchie, il est manifeste que l'association Moissons Nouvelles, informée de l'amplitude des heures accomplies, n'a pas pris les mesures nécessaires, tenant notamment à la mise en place d'une organisation et des moyens adaptés pour faire face à l'activité, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de M. [D].
Il s'ensuit que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.
Ces manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et donc justifier la prise d'acte du salarié, notifiée par courrier du 25 août 2023.
En conséquence, la cour, infirmant le jugement déféré, dit que la prise d'acte est justifiée.
L'existence d'un harcèlement moral n'ayant pas été retenue, il convient de juger que cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en vertu desquels M. [D] est fondé à réclamer, dans la limite des prétentions émises par celui-ci :
- 10 806,14 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, correspondant à deux mois de salaire conformément à l'article 10 de l'annexe 6 de la convention collective applicable
- 21 612,28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à quatre mois de salaire, outre 2 161,22 euros au titre des congés payés afférents, conformément à l'article 9 de l'annexe 6 de la convention collective.
Il est encore fondé à solliciter des dommages et intérêts qui, en considération de son ancienneté, 3 ans en tenant compte de la durée du préavis, de l'âge et du salaire perçu et en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, seront évalués à la somme de 16 209,21 euros.
7) Sur la remise de documents
Il convient d'ordonner à l'association Moissons Nouvelles de remettre à M. [D] outre un nouveau certificat de travail, un nouveau bulletin de salaire et une attestation France travail, sauf à préciser que ces documents devront être conformes désormais à la présente décision.
En revanche, il n'apparait pas nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.
8) Sur les frais du procès
La cour n'est pas saisie du sort des dépens de première instance.
S'agissant des frais irrépétibles exposés en première instance, il y a lieu en revanche de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande formée à ce titre.
Eu égard à la solution du litige, il convient de condamner l'association Moissons nouvelles aux dépens d'appel et de ce fait de la débouter de sa demande formée en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche, dans la mesure où il serait inéquitable de laisser à sa charge les fais qu'il a dû exposer, M. [D] se verra allouer une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a débouté :
- M. [D] de sa demande en paiement d'une indemnité de congés payés et de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- L'association Moissons Nouvelles de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] :
- 70 861,50 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 7 086,15 euros au titre des congés payés afférents,
- 28 069,63 euros au titre du repos compensateur, outre 2 806,96 euros au titre des congés payés afférents,
- 32 418,42 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence, condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] :
- 10 806,14 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 21 612,28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 161,22 euros au titre des congés payés afférents,
- 16 209,21 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne à l'association Moissons Nouvelles de remettre à M. [D] outre un nouveau certificat de travail, un nouveau bulletin de salaire et une attestation France travail, sauf à préciser que ces documents devront être conformes désormais à la présente décision,
Dit n'y avoir lieu à astreinte,
Y ajoutant,
Condamne l'association Moissons Nouvelles aux dépens d'appel,
Déboute l'association Moissons Nouvelles de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE CONSEILLER
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2025
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 13 Février 2024
APPELANT :
Monsieur [O] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Marion AUBE de la SELARL EHMA AVOCATS, avocat au barreau de l'EURE
INTIMEE :
Association MOISSONS NOUVELLES
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Matthieu BABIN, avocat au barreau de NANTES
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 28 Mai 2025 sans opposition des parties devant M. LABADIE, Conseiller, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Monsieur LABADIE, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DUBUC, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 28 mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 septembre 2025
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 04 Septembre 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Monsieur LABADIE, Conseiller, pour la Présidente empêchée Madame LEBAS-LIABEUF, et par Madame DUBUC, Greffière.
FAITS ET PROCEDURE
M. [O] [D] a été engagé par l'association Moissons Nouvelles en qualité de directeur de secteur par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 04 septembre 2020 à temps plein.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.
M. [D] a été placé le 3 avril 2023 en arrêt de travail qui a été reconnu comme accident du travail par la sécurité sociale.
M. [D] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 25 août 2023 dans les termes suivants :
« Je reviens cers vous dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée den date du 4 septembre 2020 qui nous lie.
A ce titre et ainsi que vous le savez déjà, mes conditions de travail qui sont difficiles depuis ma prise de poste, se sont fortement dégradées compte tenu :
- de la surcharge de travail que vous m'avez imposée,
- des heures supplémentaires indispensables au bon fonctionnement de l'établissement et à la réalisation des tâches confiées, effectuées mais non réglées,
- de la gestion de missions ne relevant pas de mes prérogatives,
- du harcèlement moral.
Je vous ai alerté à plusieurs reprises de ces difficultés, en vain.
Mon état de santé s'est brutalement dégradé le 3 avril dernier, date à laquelle j'ai été placé en arrêt maladie.
Vous n'êtes pas sans ignorer que le caractère professionnel de l'accident de travail a été reconnu par la sécurité sociale, l'épuisement professionnel étant avéré.
Ces manquements ont, une nouvelle fois, été portés à votre connaissance par le canal de mon conseil suivant courrier en date du 22 mai dernier.
Vous avez feint l'étonnement, excluant ainsi toute possibilité d'issue amiable, ce d'autant que depuis que je suis absent, vous n'hésitez pas à remettre en cause la qualité de mon travail auprès des salariés et à me discréditer auprès des instances partenaires.
Cette situation est intolérable et je ne peux continuer à l'accepter.
Ce sont les raisons pour lesquelles je vous informe par la présente prendre acte de la rupture de mon contrat de travail, laquelle est effective dès l'envoi de ce courrier. »
Par requête du 29 septembre 2023, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Evreux en requalification de la rupture de son contrat de travail ainsi qu'en paiement d'heures supplémentaires.
Par jugement du 13 février 2024, le conseil de prud'hommes :
- dit que la prise d'acte de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire tous les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes,
- se déclare en partage de voix sur la demande reconventionnelle au titre de l'indemnité de préavis,
- dit que l'affaire est renvoyée à l'audience de départage,
- déboute l'association Moissons Nouvelles du surplus de ses demandes reconventionnelles,
- réserve les dépens.
Le 13 mars 2024, M. [D] a interjeté appel de ce jugement limitant son recours aux chefs de jugement suivants :
- dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes.
Le 2 avril 2024, l'association Moissons Nouvelles a constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mai 2025
MOYENS ET PRETENTIONS
Aux termes des dernières conclusions déposées le 25 avril 2025, M. [D] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris du 13 février 2024 en ce qu'il a dit que la prise d'acte devait s'analyser en une démission et l'a débouté du surplus de ses demandes,
- confirmer le jugement du 20 janvier 2025 en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis
Statuant à nouveau,
- débouter l'association Moissons Nouvelles de ses demandes, fins et conclusions,
- faire produire à sa prise d'acte en date du 25 août 2023 les effets d'un licenciement nul, pour être intervenu dans le cadre d'une suspension du contrat de travail pour accident de travail, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner l'association Moissons Nouvelles à lui verser les sommes suivantes :
10 806,14 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
21 612,28 euros au titre de l'indemnité de préavis,
2 161,22 euros au titre des congés payés afférents,
32 418,42 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
23 274,76 euros au titre de l'indemnité de congés payés,
14 457,06 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2020,
1 445,70 euros au titre des congés payés afférents,
43 562,52 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2021,
4 356,25 euros au titre des congés payés afférents,
26 106,25 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos afférente aux heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel sur l'exercice 2021,
36 733,51 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2022,
3 673,35 euros au titre des congés payés afférents,
21 087,50 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos afférente aux heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel sur l'exercice 2022,
8 565,95 euros au titre des heures supplémentaires réalisées en 2023,
856,59 euros au titre des congés payés afférents,
32 418,42 euros au titre du travail dissimulé,
30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la remise des documents de fin de contrat et bulletins de paie rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir,
- assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 mai 2025, l'association Moissons Nouvelles demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il a dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par M. [D] s'analyse en une démission et débouté M. [D] de ses demandes,
- infirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,
statuant à nouveau,
- à titre reconventionnel, condamner M. [D] à lui verser :
14 972,25 euros au titre de l'indemnité de préavis,
2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
à titre subsidiaire,
statuant à nouveau,
- fixer dans de justes proportions le montant de toute somme allouée à M. [D],
- débouter M. [D] de toute demande au titre de l'astreinte, à défaut fixer, les condition et modalités de celle-ci dans de justes proportions,
- lui accorder un délai de grâce de deux ans ou sinon fixer à justes proportions, à raison de mensualités d'un montant égal sur la durée ainsi fixée, concernant toute condamnation prononcée, ou à tout le moins à toute condamnation à caractère indemnitaire.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives
MOTIVATION
A titre liminaire sur l'étendue de la saisine de la cour
Aux termes de sa déclaration d'appel dirigé contre le jugement rendu le 13 février 2024, M. [D] a limité son appel aux dispositions suivantes du jugement entrepris :
- dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [D] doit s'analyser comme une démission et en produire les effets,
- déboute M. [D] du surplus de ses demandes.
Aux termes de ses premières écritures, dont le dispositif est similaire à celui de ses dernières écritures, l'association Moissons Nouvelles a formé appel incident en concluant de la façon suivante :
« Infirmer le jugement du 13 février 2024 en ce qu'il a débouté l'association Moissons nouvelles de ses demandes reconventionnelles,
Et statuant à nouveau,
A titre reconventionnel, condamner M. [O] [D] à verser à l'association Moissons nouvelles la somme de 14 972,25 euros au titre de l'indemnité de préavis,
A titre reconventionnel, condamner M. [O] [D] à verser à l'association Moissons Nouvelles la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. »
Or, il convient de rappeler que la cour est saisie d'un appel dirigé contre le jugement rendu le 13 février 2024 qui s'agissant des deux demandes reconventionnelles formées par l'association Moissons Nouvelles a statué différemment,
S'agissant de la demande reconventionnelle, ainsi qualifiée par l'association défenderesse en première instance, en paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le conseil des prud'hommes, eu égard au dispositif de sa décision, a en ravnche statué sur cette prétention en déboutant « l'association Moissons Nouvelles su surplus de ses demandes reconventionnelles. »
S'agissant de la demande reconventionnelle au titre de l'indemnité de préavis formée par l'association, le conseil de prud'hommes s'est déclaré en partage de voix et renvoyé l'examen de cette prétention devant la formation de départage.
Selon les dernières écritures déposées par l'appelant, le conseil des prud'hommes aurait statué le 20 janvier 2025 sur cette prétention puisqu'aux termes du dispositif il demande à la cour de « confirmer le jugement du 20 janvier 2025 en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis M. [D] ».
Pour avoir été saisie d'un appel interjeté le 6 février 2025 par l'association Moissons Nouvelles (RG 25/00469), la cour constate en effet que le conseil des prud'hommes, en formation de départage, a rendu une seconde décision le 20 janvier 2025 aux termes de laquelle il :
- déboute l'association MOISSONS NOUVELLES de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis formée à l'encontre de M. [O] [D],
- condamne M. [O] [D] aux entiers dépens.
La cour considère dès lors qu'elle n'est saisie ni de la question de l'indemnité compensatrice de préavis réclamée par l'association, ni du sort des dépens de première instance.
1) Sur la demande en paiement au titre du rappel d'heures supplémentaires
S'accordant avec son employeur sur une durée hebdomadaire de travail de référence de 39 heures compensées par 23 jours de RTT, M. [D] réclame le paiement des heures supplémentaires réalisées au-delà des 39 heures, exposant avoir accompli :
en 2020, 423 heures,
en 2021, 1264,25 heures,
en 2022, 1063,50 heures,
en 2023, 240 heures.
En réponse, l'association Moissons Nouvelles soutient que M. [D] était libre de ses horaires, ne devait pas dépasser 39 heures hebdomadaires, n'a jamais évoqué la nécessité d'heures supplémentaires.
Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En l'espèce, à l'appui de sa demande, M. [D] produit un tableau récapitulant les heures supplémentaires réclamées en précisant les heures de début et de fin de travail, et ce, pour chacune des journées travaillées depuis le 4 septembre 2020 jusqu'au 3 avril 2023, ce qui, en soi, constitue un élément suffisamment précis permettant utilement à l'employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d'y répondre utilement.
En outre, au-delà de ce tableau, il produit son agenda électronique sur lequel sont mentionnés les rendez-vous, réunions ou encore formations prévues mais aussi de nombreuses attestations d'anciens collègues décrivant la charge de travail à laquelle il était confronté.
Ainsi Mme [S], ancienne salariée ayant travaillé au sein de la MECSD en tant que cheffe de service d'octobre à décembre 2020, témoigne que M. [D] ne comptait pas ses heures, notamment lors du départ et du retour des enfants.
Mme [J], salariée exerçant les fonctions de Monitrice éducatrice, atteste qu'elle a constaté que M. [D] démarrait ses journées de travail aux alentours de 7h30, 8h et ne comptait pas ses heures, pouvant repartir le soir aux alentours de 23h. Elle ajoute lors de deux week-ends où elle était en poste, M. [D] s'était déplacé pour l'assister aux fins de prendre en charge 2 mineurs en situation de détresse.
Mme [Y], salariée exerçant les fonctions d'éducatrice spécialisée, témoigne que M. [D] travaillait régulièrement entre 12 et 18 heures par jour, le voyant le matin dès 7h, 7h30 ainsi que le soir jusqu'à 23h, voire plus.
Mme [L], salariée exerçant les fonctions de Monitrice éducatrice, atteste que M. [D] faisait des journées de plus de 7h par jour, témoignant l'avoir vu arriver avant 8h et partir à plus de 22h et venir dans l'établissement les week-ends sur sollicitation du personnel d'astreinte.
M. [R], ancien salarié ayant occupé la fonction d'éducateur du 1er septembre 2021 au 28 février 2023, témoigne qu'il lui arrivait de croiser sur le lieu de travail M. [D] très tôt le matin (avant 8h) et très tard le soir, ajoutant que lorsqu'il quittait son service à 23h, M. [D] était encore présent dans son bureau.
Enfin, l'appelant verse aux débats de nombreux mails échangées sur toute la période concernée montrant sa disponibilité tant vis-à-vis de ses équipes que vis-à-vis de sa responsable hiérarchique ; Mme [C], directrice du Pôle Normandie, aussi bien les Week-ends où il n'était pas d'astreinte que durant ses congés ou encore ses RTT.
Face à ces éléments suffisamment précis, l'employeur observe que M. [D] n'a jamais évoqué, tant au gré des échanges que lors de ses deux entretiens annuels, auprès de sa hiérarchie, à savoir Mme [C] ou Mme [A], exerçant les fonctions de directrice générale de l'association, ni le fait de ne pas parvenir à respecter la durée hebdomadaire moyenne de 39 heures, ni le fait de devoir accomplir des heures de dépassement, ce qu'il lui appartenait de faire eu égard à son contrat de travail et à la délégation de pouvoirs dont il bénéficiait.
L'association Moisons Nouvelles observe de surcroit que M. [D] informait sa hiérarchie de ses variables de paie et de celles du personnel de la MECS et qu'à ces occasions, il n'a jamais fait mention le concernant de l'existence d'heures supplémentaires.
L'employeur expose encore que l'agenda produit par M. [D] ne serait pas sincère pour porter mentions de « rendez-vous privé » apposées a posteriori et pour les seuls besoins de la cause.
Il prétend aussi que le tableau récapitulant les heures supplémentaires est mensonger, la fausseté du décompte résultant notamment des affirmations de M. [D], jugées ridicules par l'employeur, aux termes desquelles il ne prenait jamais aucune pause, ne déjeunait jamais le midi et dînait en travaillant.
Elle critique de plus les données reprises dans le tableau produit par le salarié dans la mesure où elle relève des discordances sur certains jours avec les données émanant de l'agenda.
L'association Moissons Nouvelles reproche à M. [D] de ne pas préciser quelle part représente, sur le total des heures de travail prétendument accomplies, le temps de travail personnel qu'il consacrait au suivi de sa formation en Master.
Après avoir rappelé s'agissant des périodes d'astreinte pour les week-ends qu'il y a lieu de distinguer l'astreinte, qui fait l'objet d'une rémunération spécifique et n'est pas comptée comme un temps effectif de travail, de l'intervention, l'employeur prétend que certaines des interventions réalisées par son salarié n'était en rien justifié et l'ont été quoiqu'il en soit à l'insu de sa hiérarchie.
Au regard de ces éléments, outre le fait que nombre des allégations ne sont pas justifiées par l'association Moissons Nouvelles, il ressort que l'employeur ne justifie pas des horaires effectivement réalisés par le salarié, alors qu'il lui incombe d'assurer le contrôle des heures effectuées par ses salariés. L'employeur ne peut légitimement soutenir ne pas avoir donné son accord implicite à la réalisation d'heures supplémentaires en ce qu'il ressort des échanges de mail versés aux débats qu'il était parfaitement informé de l'amplitude de travail de M. [D] pour notamment l'avoir sollicité régulièrement même durant ses congés ou les jours pris de RTT. A cet égard, il est notable de relever que lors des entretiens annuels vantés par l'employeur à aucun moment la responsable hiérarchique n'a estimé devoir interroger M. [D] sur l'adéquation de sa durée hebdomadaire de travail avec la diversité de ses tâches. Pour apprécier l'étendue des heures supplémentaires accomplies, il convient en revanche de tenir compte des critiques fondées émises par l'association Moisson Nouvelles en ce qu'elles reposent soit sur l'existence de discordances entre l'agenda et le tableau récapitulatif produits par son salarié soit sur le constat d'heures déclarées ne répondant pas à une nécessité du service.
Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que le salarié a effectué les heures supplémentaires non rémunérées mais dans des proportions moindres que celle sollicitée.
Ainsi, il convient de retenir que M. [D] a réalisé, au-delà de 39 heures hebdomadaires, 290 heures supplémentaires du 4 septembre au 31 décembre 2020 dont 68 heures majorées à 25% et 222 heures majorées à 50%, 900 heures en 2021 dont 188 heures majorées à 25% et 712 majorées à 50%, 700 en 2022 dont 188 majorées à 25% et 512 majorées à 50%, et 140 du 1er janvier 2023 au 3 avril 2023 dont 52 majorées à 25% et 88 majorées à 50%.
Aussi, pour l'année 2020, sur la base d'un taux horaire de 24,05 euros, soit 30,06 euros majoré à 25% et 36,07 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 10 051,62 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 1 005,16 euros au titre des congés payés afférents.
Pour l'année 2021, sur la base de ce même taux horaire jusqu'en août 2021, puis sur la base d'un taux horaire de 24,18 euros à compter de septembre 2021, soit 30,22 euros majoré à 25% et 36,27 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 31 389,96 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 3 139 euros au titre des congés payés afférents.
Pour l'année 2022, sur la base du taux horaire de septembre 2021 applicable jusqu'en août 2022, puis sur la base d'un taux horaire de 25,68 euros soit 30,85 euros majoré à 25% et 37,02 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 24 418,40 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 2 441,84 euros au titre des congés payés afférents.
Enfin, pour l'année 2023, sur la base d'un taux horaire de 25,39 euros, soit 31,74 euros majoré à 25% et 38,08 euros majoré à 50%, il est dû à M. [D] la somme de 5 001,52 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 500,15 euros au titre des congés payés afférents.
Infirmant le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande, il convient donc de condamner l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] la somme de 70 861,50 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 7 086,15 euros au titre des congés payés afférents.
2) sur la demande en paiement au titre du repos compensateur
Eu égard aux motifs précédents et compte tenu d'un contingent annuel de 220 heures, M. [D] est fondé à solliciter une indemnité au titre du repos compensateur,
Il sollicite à cet égard une telle indemnité pour les deux exercices complets de 2021 et 2022.
Sur l'année 2021, il a accompli 900 heures supplémentaires de sorte que lui est dû des repos compensateurs à hauteur de 680 heures, soit 453,33 heures sur la base d'un taux de 24,05 et 226,66 heures sur la base d'un taux de 24,18, soit 16 383,23 euros (10 902,59 + 5 480,64).
Sur l'année 2022, il a accompli 700 heures supplémentaires de sorte que lui est dû des repos compensateurs à hauteur de 480 heures, soit 320 heures sur la base d'un taux de 24,18 et 160 heures sur la base d'un taux de 24,68, soit 11 686,40 euros (7 737,60 + 3 948,80).
Ainsi, il y a lieu de lui allouer au titre du repos compensateur la somme totale de 28 069,63 euros, outre 2 806,96 euros au titre des congés payés afférents.
3) Sur la demande en paiement de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé
Il résulte de l'article L.8221-1 du code du travail qu'est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d'emploi salarié.
Aux termes de l'article L. 8221-5 2°du code du travail est caractérisée s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Il revient au salarié de rapporter la preuve de l'élément matériel et intentionnel du travail dissimulé.
Il s'avère que M. [D] a accompli un nombre conséquent d'heures supplémentaires si bien qu'il rapporte la preuve de l'élément matériel.
L'amplitude de ses heures supplémentaires ne pouvait être ignorée par son employeur en considération du fait que sa supérieure hiérarchique, en charge d'opérer le contrôle des heures de travail effectivement réalisées par le salarié, sollicitait régulièrement M. [D], aussi bien les week-ends où il n'était pas d'astreinte que durant ses congés ou ses RTT, et qu'elle était encore rendue destinataire de mails l'informant de la situation de la structure et des absences de cheffes de service en raison desquelles M. [D] se mobilisait pour en assurer le remplacement, en plus de ses propres activités.
Il ressort encore de mails échangés et versés aux débats par l'appelant qu'au cours du premier trimestre 2023, M. [D] a alerté à plusieurs reprises sa hiérarchie de la surcharge d'activité à laquelle lui et ses cheffes de services devaient faire face, prenant soin de détailler les tâches leur revenant et soulignant la nécessité d'un déploiement de moyens humains supplémentaires pour y satisfaire.
Il convient de considérer que l'élément intentionnel de la dissimulation d'emploi est caractérisé.
En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours en violation de l'interdiction de travail dissimulé a droit à une indemnité égale à 6 mois de salaire, indemnité calculée en prenant en compte les heures supplémentaires accomplies dans les six mois précédent la rupture.
Il en résulte, la cour étant limité par la prétention émise par le salarié, qu'il y a lieu, par voie d'infirmation du jugement entrepris, de condamner l'association Moissons Nouvelles à verser à M. [D] la somme sollicitée par celui-ci à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, soit 32 418,42 euros.
4) Sur la demande en paiement au titre de l'indemnité de congés payés
M. [D] expose qu'à la rupture de son contrat, il lui restait 39 jours de congés payés, outre 63 jours de congés travaillés de sorte qu'il est fondé à solliciter la somme de 23.274,76 euros à ce titre.
Au soutien de sa prétention, il produit un tableau récapitulatif établi par ses soins.
En défense, l'association Moissons Nouvelles conclut au rejet de la prétention ainsi émise, s'agissant d'une demande non étayée et reposant exclusivement sur un tableau incompréhensible, conçu par l'appelant lui-même. L'employeur ajoute que M. [D] allègue avoir travaillé durant 63 jours de congés posés sans apporter le moindre élément au soutien de sa prétention.
En l'espèce, il ressorte du dernier bulletin de salaire d'août 2023 que l'association Moissons Nouvelles a versé notamment à M. [D] à son départ :
1 066,38 euros à titre d'indemnité compensatrice RTT correspondant à 6 jours
10 555,75 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés correspondant à 41,24 jours
Le tableau confectionné par l'appelant qui distingue congés payés, RTT et congés trimestriels (1, 2 et 3) est dès lors erroné en ce qu'il mentionne pour 2023 6 jours de RTT acquis et non payés.
La Cour observe que M [D] prétend qu'il lui restait 39, selon ses écritures, et 49 selon son tableau, de jours de congés payés non posés et non rémunérés, erreur à l'origine de l'incompréhension exprimée par l'intimée.
En réalité, présent au sein de la structure du 4 septembre 2020 au 25 août 2023, M. [D] pouvait prétendre à 74 jours de congés payés.
Or, il ressort de l'ensemble de ses bulletins de salaires qu'il en a posé 34 (10 en 2021 et 24 en 2022).
Dans ces conditions, il résulte du bulletin de salaire d'août 2023 qui mentionne le paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés, que M. [D] a été rémunéré pour les jours de congés payés non pris.
Sur la base du tableau fourni, M. [D] soutient encore qu'il a travaillé 63 jours alors qu'il s'agissait de jours posés soit au titre des congés payés (12 en 2021 et 12 en 2022), soit au titre de RTT (2 en 2020 et 4 en 2021) soit au titre des congés trimestriels ( 6 en 2020, 14 en 2021 et 12 en 2022).
Il produit à cet effet un tableau récapitulatif permettant d'identifier les jours de congés durant lesquels il estime avoir travaillé, auquel il associe un grand nombre de mails, également versés aux débats, matérialisant des échanges avec ses collaborateurs, des partenaires extérieurs ou encore avec sa hiérarchie, pour justifier de son activité.
Il s'avère que les jours évoqués par l'appelant sont également intégrés dans sa prétention émise au titre d'un rappel de salaire en raison d'heures supplémentaires, prétention à laquelle a fait droit la cour dans une proportion importante, le nombre d'heures supplémentaires retenu tenant compte de ces jours spécifiques.
Il y a donc lieu de considérer que ces jours de « congés travaillés » ont d'ores et déjà fait l'objet d'une indemnisation.
En raison de l'ensemble de ces éléments, M. [D] doit donc être débouté de sa demande, le jugement étant confirmé de ce chef.
5) Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral
L'article L.1152-1 du code du travail énonce qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l'article L 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En l'espèce, M. [D] justifie de la dégradation de son état de santé par la production de :
Il expose que son état de santé s'est dégradé en raison d'objectifs irréalisables et de la surcharge de travail, invoquant également la brutalité du management de Mme [C] lequel était selon lui caractéristique d'un comportement harceleur sur l'ensemble du personnel.
Il s'appuie sur les témoignages de Mme [K], secrétaire de direction travaillant à ses côtés, et de Mme [I], psychologue anciennement salariée de l'association Moissons Nouvelles
Ces salariés attestent de propos tenus par Mme [C], postérieurement au placement en arrêt de travail de M. [D], mettant en cause des décisions prises par leur directeur et ce en présence de membres du personnel de la MECS.
M. [D] verse également aux débats, les qualifiant de « courriels de disqualification » des mails échangés avec Mme [C] entre le 10 février 2023 et le 3 avril 2023.
Il s'agit principalement pour sa supérieure hiérarchique soit de lui rappeler des directives, soit de le relancer à propos d'éléments attendus par le service des ressources humaines, échanges sur le fond comme sur la forme conformes à des relations que peut entretenir un cadre avec l'un de ses subordonnés.
M. [D] affirme enfin que le 31 mars 2023, Mme [C] lui aurait indiqué qu'il « faudra déménager très loin si vous voulez retrouver du travail [O] », propos qu'elle aurait répétés lorsqu'il a récupéré le 17 avril 2023 ses effets personnels dans son bureau.
Cependant, il s'agit de simples allégations, contestées, et non étayées par l'appelant.
Ainsi M. [D] ne rapporte pas la preuve de faits laissant supposer l'existence d'agissements répétés susceptibles de caractériser un harcèlement, la dégradation de son état de santé ayant pour origine, ainsi qu'il le soutient par ailleurs, la surcharge de son activité du fait d'une amplitude conséquente de son temps de travail.
Il en résulte qu'il y a lieu de débouter M. [D] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.
6) Sur les effets de la prise d'acte de rupture
Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.
Si les faits justifient la prise d'acte par le salarié, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'un licenciement nul si les manquements reprochés à l'employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement.
Si les faits ne justifient pas la prise d'acte, la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission.
Il appartient au salarié d'établir la réalité des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa prise d'acte.
Le juge doit examiner tous les manquements invoqués par le salarié, y compris ceux qui ne figurent pas dans l'écrit de prise d'acte.
En l'espèce, le salarié fait valoir à l'appui de sa demande de requalification de sa prise d'acte des manquements de l'employeur suivants :
- Le non-paiement des heures supplémentaires,
- Un manquement de son obligation de sécurité résultant d'une surcharge de travail, d'objectifs irréalisables, du fait d'un harcèlement moral et en raison d'un accident du travail.
Il est établi que l'association Moissons Nouvelles est redevable d'un nombre conséquent d'heures supplémentaires résultant d'une surcharge de travail.
Il est établi par la production d'éléments médicaux que cette surcharge de travail est à l'origine d'un arrêt de travail prescrit le 3 avril 2023 et ayant été reconnu par la cpam de l'Eure d'origine professionnelle.
Si cette reconnaissance est contestée par l'employeur qui a saisi la commission de recours amiable de la caisse d'assurance maladie, il résulte néanmoins des éléments analysés précédemment que l'employeur a exposé son salarié à une surcharge de travail dépassant largement les 44 heures hebdomadaires sans que M. [D] puisse bénéficier d'un temps de repos compensateur.
L'accumulation d'autant d'heures supplémentaires associée à une mobilisation régulière du salarié pendant ses jours de repos (Congés payés, RTT, Week-ends) a, à tout le moins pour partie, contribué à dégrader sa santé physique et mentale
Compte tenu des échanges de M. [D] avec sa hiérarchie, il est manifeste que l'association Moissons Nouvelles, informée de l'amplitude des heures accomplies, n'a pas pris les mesures nécessaires, tenant notamment à la mise en place d'une organisation et des moyens adaptés pour faire face à l'activité, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de M. [D].
Il s'ensuit que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.
Ces manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et donc justifier la prise d'acte du salarié, notifiée par courrier du 25 août 2023.
En conséquence, la cour, infirmant le jugement déféré, dit que la prise d'acte est justifiée.
L'existence d'un harcèlement moral n'ayant pas été retenue, il convient de juger que cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en vertu desquels M. [D] est fondé à réclamer, dans la limite des prétentions émises par celui-ci :
- 10 806,14 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, correspondant à deux mois de salaire conformément à l'article 10 de l'annexe 6 de la convention collective applicable
- 21 612,28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à quatre mois de salaire, outre 2 161,22 euros au titre des congés payés afférents, conformément à l'article 9 de l'annexe 6 de la convention collective.
Il est encore fondé à solliciter des dommages et intérêts qui, en considération de son ancienneté, 3 ans en tenant compte de la durée du préavis, de l'âge et du salaire perçu et en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, seront évalués à la somme de 16 209,21 euros.
7) Sur la remise de documents
Il convient d'ordonner à l'association Moissons Nouvelles de remettre à M. [D] outre un nouveau certificat de travail, un nouveau bulletin de salaire et une attestation France travail, sauf à préciser que ces documents devront être conformes désormais à la présente décision.
En revanche, il n'apparait pas nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.
8) Sur les frais du procès
La cour n'est pas saisie du sort des dépens de première instance.
S'agissant des frais irrépétibles exposés en première instance, il y a lieu en revanche de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté l'association Moissons Nouvelles de sa demande formée à ce titre.
Eu égard à la solution du litige, il convient de condamner l'association Moissons nouvelles aux dépens d'appel et de ce fait de la débouter de sa demande formée en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche, dans la mesure où il serait inéquitable de laisser à sa charge les fais qu'il a dû exposer, M. [D] se verra allouer une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a débouté :
- M. [D] de sa demande en paiement d'une indemnité de congés payés et de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- L'association Moissons Nouvelles de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] :
- 70 861,50 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 7 086,15 euros au titre des congés payés afférents,
- 28 069,63 euros au titre du repos compensateur, outre 2 806,96 euros au titre des congés payés afférents,
- 32 418,42 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence, condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] :
- 10 806,14 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 21 612,28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 161,22 euros au titre des congés payés afférents,
- 16 209,21 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne à l'association Moissons Nouvelles de remettre à M. [D] outre un nouveau certificat de travail, un nouveau bulletin de salaire et une attestation France travail, sauf à préciser que ces documents devront être conformes désormais à la présente décision,
Dit n'y avoir lieu à astreinte,
Y ajoutant,
Condamne l'association Moissons Nouvelles aux dépens d'appel,
Déboute l'association Moissons Nouvelles de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'association Moissons Nouvelles à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE CONSEILLER