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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 4 septembre 2025, n° 24/02851

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 24/02851

4 septembre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 24/02851 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JJZ4

NA

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

06 juillet 2021 RG :1120000596

S.A.S.U. INTER PISCINE & ARROSAGE

C/

[R]

[O]

Copie exécutoire délivrée

le

à :

Selarl Rochelemagne

Me Deler

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'avignon en date du 06 Juillet 2021, N°1120000596

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, et M. André LIEGEON, Conseiller, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats et en ont rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre

Virginie HUET, Conseillère

André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Septembre 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

DEMANDEUR AU POURVOI :

S.A.S.U. INTER PISCINE & ARROSAGE Société par actions simplifiée unipersonnelle au capital de 8 000,00 €, immatriculée au RCS d'Avignon sous le n° 440 755 866, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Florence ROCHELEMAGNE de la SELARL ROCHELEMAGNE-GREGORI-HUC.BEAUCHAMPS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

DEFENDEURS AU POURVOI :

Mme [D] [R] épouse [O]

née le 09 Octobre 1986 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marion DELER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

M. [P] [O]

né le 09 Mai 1973 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Marion DELER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Avis de fixation de l'affaire à bref délai suite à renvoi après cassation (art.1037-1 et s. du CPC)

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 04 Septembre 2025, sur renvoi de la Cour de Cassation, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [P] [O] et Mme [D] [O] (les épouxDelsad-Battesti) ont con'é à la société Inter Piscine et Arrosage la réalisation de travaux de rénovation de leur piscine consistant en l'instal1ation d'un PVC armé recouvrant les parois de la piscine. Ces travaux ont donné lieu à 1'émission d'une facture en date du 27 mars 2019.

Par acte d'huissier délivré le 9 juillet 2000, la société Inter Piscine et Arrosage a fait assigner les époux [O] au principal en paiement du solde des travaux.

Le jugement rendu 1e 6 juillet 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon a statué comme il suit :

- rejette les demandes formées par la société Inter Piscine et Arrosage

- condamne la société Inter Piscine et Arrosage à payer aux époux [O] la somme de 9.695,01 € au titre des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, du remboursement du constat d'huissier du 10 juillet 2020 et du coût de 1'expertise amiable,

- condamne la société Inter Piscine et Arrosage à payer aux époux [O] la somme de 1.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le premier juge en application de l'article 9 du code de procédure civile et des articles 1103, 1104 et 1193, 1194, 1217, 1219 et 1353 du code civil considère':

- Sur la demande en paiement du solde des factures et sur la demande en dommages et intérêts subséquents que':

* la SAS Inter Piscine et Arrosage rapporte la preuve, par la production des deux factures du 27 mars 2019, qu'elle a réalisé des travaux de rénovation de la piscine des époux [O] et qu'elle justifie également, par le décompte versé aux débats, de ce que M. et Mme [O] ne se sont acquittés de ces factures qu'à hauteur de 8.500€, ce que ces derniers ne contestent du reste pas,

* il ne peut être déduit des échanges de SMS produits par la SAS Inter Piscine et Arrosage que les travaux étaient parfaitement réalisés, ni qu'ils étaient conformes aux règles de l'art,

* les constatations effectuées dans le cadre d'une expertise amiable quoique tardivement après la 'n des travaux, corroborées par un constat d'huissier de justice doivent amener à conclure que les désordres quant aux plis entre deux skimmers, ne sont pas le résultat d'une mauvaise utilisation de la piscine ou d'une usure normale, mais sont bien d'origine et trouvent leur cause dans les travaux de rénovation litigieux, sans qu'aucune cause de force majeure ne soit identi'ée, ni même alléguée par la SAS, ce qui constitue à l'évidence un manquement dc la SAS Inter Piscine et Arrosage à son obligation de résultat en sa qualité de professionnelle et justifie de rejeter les demandes de paiement du solde de la facture du 27 mars 2019 et de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- Sur la demande reconventionnelle en paiement des époux [O] que':

* ils justifient de travaux pour remédier aux plis entre les skimmers, dont le coût peut être fixé à la somme dc 8.000€ comme réclamée par les défendeurs, lesquels sont par ailleurs bien fondés à réclamer le remboursement du coût de l'expertise et du constat d'huissier de justice, dont 1e montant est justifié dans les pièces produites.

Par déclaration effectuée le 19 juillet 2021, la société Inter Piscine et Arrosage a interjeté appel.

La cour d'appel de Nîmes, par arrêt du 17 novembre 2022, a':

- In'rmé le jugement déféré sauf en ce qu'i1 a débouté M. [P] [O] et Mme [D] [O] de leur demande d'indemnisation au titre du spectre de carreaux,

Statuant des chefs infirmés

- Condamné M. [P] [O] et Mme [D] [O] à payer à la société Inter Piscine et Arrosage la somme de 4.062,74 €, au titre du solde de la facture du 27 mars 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 2020,

- Débouté M. [P] [O] et Mme [D] [O] de leurs demandes de dommages ct intérêts au titre des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, du remboursement du constat d'huissier du 10 juillet 2020 et du coût de l'expertise réalisée par M. [N] selon rapport du 9 décembre 2020,

- Débouté la société Inter Piscine et Arrosage de sa demande de dommages et intéréts,

- Condamné M. [P] [O] et Mme [D] [O] à payer à la société Inter Piscine et Arrosage la somme de 2.500€ au titre des dispositions-de Particle 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [P] [O] et Mme [D] [O] aux dépens de 1'instance (première instance et appel).

M. [P] [O] et Mme [D] [O] ont formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2022 par la cour d'appel de Nîmes.

Par arrêt en date du 4 juillet 2024, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a statué ainsi qu'il suit':

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. et Mme [O] de leurs demandes de dommages et intérêts au titre des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, du remboursement du constat d'huissier du 10 juillet 2020 et du coût de l'expertise réalisée par M. [N] selon rapport du 9 décembre 2020, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes, autrement composée ;

Condamne la société Inter piscine et arrosage aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Inter piscine et arrosage et la condamne à payer à M. et Mme [O] la somme globale de 3000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

aux motifs suivants':

'Sur le moyen, pris en sa première branche

«'Vu l'article 1792 du code civil :

Il résulte de ce texte que la réception de l'ouvrage peut être tacite si la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de l'accepter est établie.

Pour rejeter les demandes des maîtres de l'ouvrage fondées sur le manquement de l'entrepreneur à son obligation de résultat, l'arrêt retient que les désordres étaient non-apparents à la réception, courant mars 2019, et qu'il s'agit de désordres intermédiaires relevant de la responsabilité contractuelle du constructeur pour faute prouvée.

En se déterminant ainsi, alors que l'existence d'une réception était contestée, sans constater l'existence d'une réception expresse et sans caractériser, à défaut, la volonté non équivoque des maîtres de l'ouvrage de recevoir les travaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »

La société Inter Piscine et Arrosage a formalisé le 22 août 2024, une déclaration de saisine devant la cour d'appel de Nîmes, cour de renvoi.

L'affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 17 décembre 2024 en application des dispositions de l'article 1037-1 du code de procédure civile, pour respect du contradictoire elle a été renvoyée à l'audience du 24 juin 2025, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 4 septembre 2025.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 décembre 2024, la société Inter Piscine et Arrosage demande à la cour de :

«'Vu les dispositions susvisées,

' REFORMER le jugement du 6 juillet 2021 rendu par le Tribunal judiciaire d'AVIGNON en ce qu'il a :

- condamné la société Inter Piscine et Arrosage à payer aux époux [O] la somme de 9.695,01 € au titre des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, du remboursement du constat d'huissier du 10 juillet 2020 et du coût de 1'expertise amiable,

- condamné la société Inter Piscine et Arrosage à payer aux époux [O] la somme de 1.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Inter Piscine et Arrosage au paiement des dépens';

Se faisant et statuant à nouveau,

' ORDONNER que la réception de l'ouvrage est intervenue le 26 mars 2019 date de l'achèvement du chantier,

' DÉBOUTER Madame [D] [O] et Monsieur [P] [O] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

' CONDAMNER Madame [D] [O] et Monsieur [P] [O] à payer à la SAS INTER PISCINE ET ARROSAGE la somme de de 10 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.'»

Au soutien de ses prétentions, la société Inter Piscine et Arrosage fait essentiellement valoir :

* Sur l'existence d'une réception tacite':

- que M. et Mme [O] ont procédé au règlement des ¿ des sommes dues, soit 8'500 euros sur 12'562,74 euros, et se sont engagés par message écrit du 28 octobre 2019 à régler le solde de la facture en deux fois, ce qui caractérise leur volonté de s'acquitter de l'intégralité du paiement,

- que les travaux de rénovation de la piscine se sont achevés le 26 mars 2019, la piscine ne présentant alors aucun défaut, M. et Mme [O] ayant même commencé à la remplir,

- qu'il ne peut donc être contesté que M. et Mme [O] ont pris possession de l'ouvrage à cette date sans formuler de réserve ce qui caractérise une réception tacite de l'ouvrage au 26 mars 2019,

- qu'en l'absence de réserve formulée lors de la réception et en l'absence de désordres affectant des éléments d'équipements soumis à la garantie de bon fonctionnement ou compromettant la solidité de l'ouvrage, M. et Mme [O] devront être déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts';

* Sur la responsabilité contractuelle de droit commun':

- que M. et Mme [O] n'ont jamais demandé à la société d'exécuter les obligations soi-disant exécutées de manière incomplète ce qui a pour conséquence l'irrecevabilité de leurs prétentions relatives à la réduction du prix à hauteur de la somme impayée, et de dommages et intérêts complémentaires, car la mise en demeure est au visa des articles 1223 et 1231 du code civil actuels et de la jurisprudence constante,

- que M. et Mme [O] ne peuvent pas soutenir qu'il existe une inexécution de l'obligation qui les exonérerait de la mise en demeure préalable, puisque les travaux sont achevés et qu'à tout le plus ils sont mal exécutés,

- que l'exécution imparfaite de l'obligation de la société n'est fondée par M. et Mme [O], sur lesquels pèse la charge de la preuve que sur deux pièces qui ne permettent pas objectivement de caractériser des erreurs d'exécution à l'origine des désordres,

- que les pièces produites par M. et Mme [O], en l'occurrence un procès-verbal de constat d'huissier en date du 10 juillet 2020 et un document établi en décembre 2020 par un expert supposé de façon non contradictoire, sont tous postérieurs à l'assignation en paiement et ont été rédigés de nombreux mois après la fin des travaux,

- que l'attestation d'un M. [H] produite devant la cour d'appel de renvoi n'a aucune valeur en ce qu'elle est pour l'essentiel étrangère aux faits du litige et est particulièrement imprécise,

- que la société Inter Piscine produit au contraire l'attestation du représentant de la société sous-traitante pour la mise en place de la membrane en PVC armé avec des photographies réalisées au moment de la finition des travaux qui établit que la piscine a bien été mise en eau dès la finition du chantier.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 décembre 2024, M. et Mme [O] demandent à la cour de :

Vu les articles 1231 et suivants Code civil

Il est demandé à la Cour de céans de :

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire d'Avignon le 6 juillet 2021 en ce qu'il a :

- Condamné la Société INTER PISCINE ET ARROSAGE à payer aux Epoux [K] la somme de 9.695,01 € ;

- Condamné la SAS INTER PISCINE ET ARROSAGE à payer à Monsieur [P] [K] et Madame [D] [K] la somme de 1,000€ (mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile et ainsi que le commande l'équité ;

- Condamné la SAS INTER PISCINE ET ARROSAGE au paiement des dépens ;

- Rejeté les demandes pour le surplus.

Y ajouter :

CONDAMNER la Société INTERPISCINE ET ARROSAGE à payer aux Epoux [K] la somme de 762,90 €.

CONDAMNER la Société INTER PISCINE ET ARROSAGE à payer aux époux [K] la somme de 6.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

LA CONDAMNER aux entiers dépens en ce compris la facture du rapport d'expertise de

Monsieur [N] et le constat d'huissier. Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,

Au soutien de leurs prétentions, M. et Mme [O] font essentiellement valoir que

- Sur la réception de l'ouvrage, qu'ils se prévalent d'une absence totale de réception des travaux de la piscine et que la société Inter Piscine n'a jamais demandé la réception judiciaire de l'ouvrage ce qui est un élément essentiel, la réception ne pouvant dès lors être fixée, sauf à statuer ultra-petita,

* en tout état de cause qu'il n'y a pas de réception expresse aucun procès-verbal de réception n'ayant été établi,

* il n'y a pas eu non plus de réception tacite dans la mesure où il y a seulement le règlement des 2/3 du prix,

- Sur l'indifférence de l'absence de mise en demeure préalable, qu'ils ont choisi la voie de la responsabilité contractuelle des articles 1231 et suivants du code civil sollicitant l'allocation de dommages et intérêts et non la réduction du prix, et que cette demande en justice vaut mise en demeure et qu'en tout état de cause une mise en demeure est vaine dans la mesure où à la date où ils forment leur demande de dommages et intérêts ils sont déjà assignés en justice depuis six mois par la société Inter Piscine,

- Sur l'obligation de résultat de la société Inter Piscine, que tant le constat d'huissier que le rapport de l'expert M. [I] permettent de démontrer que l'entreprise a failli à son obligation de résultat l'absence de faute de la société étant indifférente en l'absence de cause étrangère, et qu'en tout état de cause même à supposer la démonstration d'une faute nécessaire, celle-ci ressort des pièces produites au débat': constat d'huissier, expertise, attestations, photographies.

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire sur l'étendue de sa saisine suite à l'arrêt de la Cour de cassation en date du 4 juillet 2024 la cour observe que le rejet de la demande d'indemnisation des époux [O] au titre du spectre de carreaux est définitivement jugé, tout comme la condamnation des époux [O] à payer à la société Inter Piscine et Arrosage la somme de 4.062,74 €, au titre du solde de la facture du 27 mars 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 2020.

Enfin la cour d'appel de renvoi n'est pas non plus saisie de la demande en dommages et intérêts formée par la société Inter Piscine, cette dernière étant déboutée définitivement de cette prétention.

La cour d'appel de renvoi doit donc statuer sur les demandes de dommages et intérêts au titre des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, du remboursement du constat d'huissier du 10 juillet 2020 et du coût de l'expertise réalisée par M. [N] formées par M. et Mme [O] ainsi que sur les frais irrépétibles et les dépens.

Sur la réception de l'ouvrage

La réception est définie à l'article 1792-6 alinéa 1 du code civil comme l'acte par lequel le maître de

l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves, elle peut être expresse, tacite ou prononcée par le juge.

En l'espèce il est constant qu'il n'y a pas eu de réception expresse des travaux les parties s'accordant sur le fait qu'il n'y a pas eu d'acte par lequel les maîtres de l'ouvrage ont déclaré l'accepter avec ou sans réserves.

La réception tacite suppose que soit établie la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de l'accepter laquelle est révélée par la prise de possession de l'ouvrage et le paiement de la quasi-

totalité des travaux.

Au cas présent il ressort des pièces produites au débat notamment de la lecture des attestations versées par M. et Mme [O] que ces derniers ont pris possession de l'ouvrage dès la fin des travaux le 29 mars 2019 M. [H] et Mme [B] attestant s'être rendus chez eux fin mars 2019 et avoir constaté qu'ils procédaient personnellement au remplissage de leur piscine.

Il est ensuite établi que M. et Mme [O] ont procédé au paiement du prix des travaux de façon substantielle puisqu'ils ont payé à la société Inter Piscine une somme de 8 500 euros sur un montant facturé de 12 562,74 euros TTC soit un peu plus des 2/3 du prix total des travaux.

Par ailleurs il résulte de la lecture de plusieurs SMS et de mail échangés entre M. et Mme [O] et des représentants de la société Inter Piscine que les maîtres de l'ouvrage se sont engagés à plusieurs reprises à payer la totalité du prix des travaux selon un échéancier et ce sans contester alors la qualité des travaux et sans émettre de réserves.

Ainsi dans un mail en date du 11 avril 2019 Mme [O] écrit notamment': «'Il semble que notre banque n'ait pas exécuté les ordres de virements pour vous régler en raison du congé de notre conseiller. Je m'en suis occupée personnellement. Vous devriez recevoir un premier règlement sous deux jours ouvrés et un deuxième sous quatre jours ouvrés. Je suis désolée pour ce retard et je vous remercie par avance pour votre compréhension.'»

Le 5 juin 2019 toujours par mail Mme [O] écrit encore': «'Vous trouverez ci-joint justificatif d'un virement de 3 000 euros effectué à votre profit. Je vous informe que j'en fais partir un autre dans 2 jours du même montant puis encore un autre début de semaine prochaine. Je vous pris de m'excuser pour le retard.'».

Dans aucun de ces messages la qualité des travaux n'est contestée et il n'est émis aucune réserve.

Par conséquent les maîtres de l'ouvrage ayant pris possession de celui-ci le 29 mars 2019 , l'ayant accepté sans réserves, ayant payé les 2/3 du prix des travaux et n'ayant pas refusé de payer le solde qu'ils se sont engagés à régler selon un échéancier il ne pourra qu'être constaté que la réception tacite sans réserves des travaux est intervenue le 19 août 2019 date du dernier événement. (date du dernier paiement).

Sur la responsabilité de la société Inter Piscine :

M. et Mme [O] pour rechercher la responsabilité de la société Inter Piscines exposent que les travaux réalisés par cette dernière sont atteints de malfaçons en ce que le revêtement posé présente entre les deux skimmers de graves imperfections, des cloques étant apparues, le revêtement se décollant et laissant apparaître les anciens carreaux. Ils considèrent que pour remédier à ces désordres il convient de changer l'ensemble du revêtement et que le coût de ces travaux de reprise doit être supportée par la société Inter Piscine.

Pour établir la responsabilité de la société Inter Piscine M. et Mme [O] versent au débat':

- un procès-verbal de constat d'huissier en date du 10 juillet 2020 dans lequel l'huissier mentionne': «'Présence d'une piscine à liner. Entre les deux skimmers le liner bulle et se décolle.'», accompagné d'une photocopie noir et blanc de photographie non exploitable,

- un constat intitulé extra-juridictionnel réalisé par M . [N] le 7 décembre 2020 qui constate la présence de plis entre les deux skimmers à 20 cm sous la ligne d'eau, sur une longueur de 2 m, ainsi qu'au-dessus de deux buses de refoulement, accompagné de photocopies noir et blanc de photographies non exploitables.

Il ne ressort pas de ces seuls éléments que ces désordres qui étaient non apparents à la réception et qui n'ont pas fait l'objet de réserves compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, dans la mesure où aucune atteinte à l'étanchéité de la piscine n'est démontrée ni même invoquée, pas plus que le fait qu'elle serait inutilisable.

Ces désordres ne sont donc pas soumis à la garantie décennale.

Ces désordres ne relèvent pas non plus de la garantie de bon fonctionnement dans la mesure où ils n'affectent pas des éléments d'équipement.

Ces désordres ne relèvent pas plus de la garantie de parfait achèvement dans la mesure où il n'est pas démontré qu'ils sont apparus dans l'année suivant la réception de l'ouvrage.

Dans la mesure où une réception tacite est intervenue les désordres dont se plaignent M. et Mme [O] ne peuvent que relever de la notion de dommage intermédiaire.

Il sera rappelé que le dommage intermédiaire, construction jurisprudentielle se définit comme le désordre affectant une construction, survenu postérieurement à la réception de l'ouvrage, mais ne remplissant pas les conditions requises pour la mise en 'uvre de la responsabilité décennale ou de la garantie de bon fonctionnement dont les constructeurs sont débiteurs sur le fondement, respectivement, des articles 1792 et 1792-3 du code civil. Révélé après la réception, le dommage intermédiaire se distingue du désordre décennal par sa moindre gravité puisqu'il ne porte pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, ni ne rend celui-ci impropre à sa destination. Il se distingue également du désordre déclenchant la garantie de bon fonctionnement en ce qu'il affecte un élément inerte, ce qui est le cas pour les désordres concernant un revêtement de piscine de type liner.

Ces désordres relèvent donc de la seule une action en responsabilité de droit commun, visée à l'article 1231 du code civil et M. et Mme [O] sont contraints d'apporter la preuve d'une inexécution ou d'une exécution défectueuse du contrat de louage d'ouvrage imputable à la société Inter Piscine, laquelle si elle est débitrice de l'obligation de livrer un ouvrage exempt de vices intermédiaires n'est tenue que d'une une obligation de moyens et non de résultat comme le soutiennent M. et Mme [O].

Ainsi M. et Mme [O] maîtres de l'ouvrage ne peuvent se contenter d'établir que l'ouvrage est atteint de désordres, ils doivent encore prouver que ceux-ci résultent d'une faute commise par la société Inter Piscine à laquelle ils demandent réparation.

L'expert sollicité par M. et Mme [O] et qui a procédé à ses opérations de façon non contradictoire retient comme cause des plis du revêtement entre les deux skimmers et au-dessus des deux buses, un manque de tension verticale sur la membrane au moment du bridage en affirmant au regard des seules affirmations de Mme [O] que la mise en eau fut tardive et que si la membrane n'est pas tendue lorsqu'elle est bridée elle ne peut se tendre vers le bas, et l'excédent de matière forme alors un pli au niveau de la buse. Il considère aussi que les plis entre les skimmers sont dus à l'absence de pression d'eau sur la membrane au moment du bridage.

Toutefois cette hypothèse d'un défaut de remplissage en eau de la piscine comme étant la cause des désordres lesquels n'ont été relevés pour la première fois par M. et Mme [O] qu'en juillet 2010 soit plus d'un an après la réalisation des travaux, ne repose que sur les affirmations de l'expert intervenu en décembre 2020 de façon non contradictoire et se trouve même contredite par les déclarations de M. [A] [T] gérant de la SARL AJRSARL sous traitant de la société Inter Piscine qui affirme avoir posé le revêtement de la piscine de M. et Mme [O] et avoir réalisé le remplissage, déclarations dont il n'est pas rapporté la preuve de leur caractère mensonger, la plainte avec constitution de partie civile déposée devant le juge d'instruction par M. et Mme [O] ayant été déclarée irrecevable.

L'hypothèse d'un remplissage tardif se trouve aussi contredite par le procès-verbal de constat de commissaire de justice en date du 27 août 2024 dans lequel l'officier ministériel constate sur deux photographies prises le 26 mars 2019 à 18 h 48 au [Adresse 3] à [Localité 2], à l'aide d'un téléphone portable qui lui est remis par M. [U] [G] gérant de la société Inter Piscine, la présence d'une piscine en cours de remplissage, étant précisé que le [Adresse 3] à [Localité 2] est bien l'adresse du lieu où se situe la piscine en litige.

Ainsi l'origine exacte des désordres ne peut être établie, si bien que la commission d'une faute par la société Inter Piscine n'est pas rapportée par M. et Mme [O] à qui incombe la charge de cette preuve et ces derniers ne pourront dès lors qu'être déboutés de leur demande visant à obtenir la condamnation de la société Inter Piscine au coût des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine, infirmant sur ce point le jugement du tribunal judiciaire d'Avignon en date du 6 juillet 2021.

L'absence de responsabilité de la société Inter Piscine rend mal fondée la demande de M. et Mme [O] de condamnation de l'entreprise au remboursement du coût du constat d'huissier du 10 juillet 2020 comme au remboursement du coût de l'expertise amiable de M. [N], infirmant le jugement entrepris.

Sur les demandes accessoires':

La décision déférée à la cour sera également infirmée en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens et M. et Mme [O] seront condamnés à payer à la SASU Inter Piscine et Arrosage la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et de la présente procédure devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe, dans les limites de sa saisine sur renvoi après l'arrêt de cassation partielle rendu le 4 juillet 2024 par la Cour de cassation,

Infirme le jugement rendu le 6 juillet 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute M. [P] [O] et Mme [D] [O] de leur demande de condamnation de la société Inter Piscine et Arrosage au coût des travaux de remplacement du revêtement de leur piscine';

Déboute M. [P] [O] et Mme [D] [O] de leur demande de condamnation de la société Inter Piscine et Arrosage au remboursement du coût du constat d'huissier du 10 juillet 2020 comme au remboursement du coût de l'expertise amiable de M. [N]';

Condamne M. [P] [O] et Mme [D] [O] à payer à la société Inter Piscine et Arrosage la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne M. [P] [O] et Mme [D] [O] aux dépens de la procédurede première instance et de la présente procédure devant la cour d'appel de renvoi.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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