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Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 6, 5 septembre 2025, n° 22/09275

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/09275

5 septembre 2025

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRÊT DU 05 SEPTEMBRE 2025

(n° /2025, 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/09275 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZXG

Décision déférée à la Cour : jugement du 28 mars 2022 - tribunal judiciaire d'AUXERRE - RG n° 19/00302

APPELANTE

Société d'assurance mutuelle SMABTP en qualité d'assureur dommages ouvrage et d'assureur responsabilité civile décennale dela société PAVILLON BAIN, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 11]

[Localité 3]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Paul-Henry LE GUE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Madame [N] [O] épouse [U]

[Adresse 15]

[Localité 7]

Représentée par Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0285, substitué à l'audience par Me Frédéric LE GALLIC, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [T] [U]

[Adresse 15]

[Localité 7]

Représenté par Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0285, substitué à l'audience par Me Frédéric LE GALLIC, avocat au barreau de PARIS

S.A. AXA FRANCE IARD en qualité d'assureur de la société ATPA, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée à l'audience par Me Frédéric DOCEUL de la SELAS LHUMEAU GIORGETTI HENNEQUIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0483

S.A. MAAF prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurence IMBERT de la SELARL IMBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MELUN

Société [K] ERIC prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 8]

N'a pas constitué avocat - signification de la déclaration d'appel le 5 août 2022 à personne morale

S.N.C. ATPA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 6]

N'a pas constitué avocat - signification de la déclaration d'appel le 13 juillet 2022 à étude

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 mai 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sylvie DELACOURT, présidente de chambre

Mme Laura TARDY, conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Viviane SZLAMOVICZ dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffère, lors des débats : Mme Manon CARON

ARRÊT :

- par défaut.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Sylvie DELACOURT, présidente de chambre et par Tiffany CASCIOLI, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Selon contrat de construction de maison individuelle en date du 27 septembre 2008, M. et Mme [U] ont confié à la société Pavillon Bain, désormais en liquidation judiciaire, l'édification d'un pavillon d'habitation constituant leur résidence principale à [Localité 16] (89), lieudit " [Localité 13] Mittards ", moyennant un prix de 137 120 euros.

Ce contrat laissait à la charge de M. et Mme [U] divers travaux dont ceux relatifs à l'installation d'assainissement individuel et du réseau d'eaux pluviales, lesquels ont été réalisés par la société ATPA, assurée auprès de la société Axa, selon facture d'un montant total de 4 966,56 euros TTC.

La société Pavillon Bain était par ailleurs titulaire d'un contrat " Multirisques des constructeurs de maisons individuelles " conclu auprès de la SMABTP à compter du 1er janvier 1997 comprenant quatre conventions parmi lesquelles une assurance dommages-ouvrage souscrite au bénéfice du maître de l'ouvrage et une assurance responsabilité civile décennale et contractuelle.

Le 17 décembre 2009, les travaux ont fait l'objet d'une réception sans réserve.

Suivant déclaration de sinistre en date du 15 novembre 2016, M. et Mme [U] ont déploré auprès de la SMABTP, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, la survenance de plusieurs désordres constructifs caractérisés par une fissuration extérieure en façade nord, des fissurations intérieures généralisées et des dysfonctionnements des ouvertures.

Aux termes de son rapport du 7 mars 2017, M. [D], expert mandaté par la SMABTP, a confirmé la réalité des désordres précités.

Par lettre du 16 mars 2017, la SMABTP a opposé aux M. et Mme [U] un refus de garantie au motif que l'origine du dommage se situait dans les ouvrages d'assainissement qu'ils s'étaient réservés.

Selon rapport du 30 mars 2018, le cabinet Global Expertise & Survey, mandaté par M. et Mme [U], a confirmé que les fissures extérieures étaient dues à une perte des caractéristiques mécaniques du sol d'assise à l'approche de la façade nord. Il a en revanche conclu pour sa part qu'il était impossible que l'exfiltration d'eau depuis le collecteur bouché d'eaux usées soit à l'origine des désordres et il a souligné une " non-conformité flagrante " de la réalisation des fondations de la maison.

Suivant lettre recommandée avec demande d'accusé de réception en date du 8 janvier 2019, M. et Mme [U] ont, par le biais de leur conseil, mis en demeure la SMABTP de payer l'ensemble des indemnités afférentes au sinistre comprenant les dommages tant matériels qu'immatériels.

Par acte du 25 janvier 2019, M. et Mme [U] ont assigné la SMABTP devant le tribunal de grande instance d'Auxerre aux fins notamment de voir acquis à leur bénéfice le principe de la garantie dommages-ouvrage pour la totalité des désordres déclarés le 16 novembre 2016.

Par ordonnance du 19 mars 2019, le président du tribunal de grande instance d'Auxerre a ordonné une expertise judiciaire et a commis M. [L] pour y procéder.

Le 17 décembre 2020, l'expert judiciaire a déposé son rapport.

Par acte du 17 décembre 2019, la SMABTP a appelé dans la cause la société Eric [K] Travaux publics, titulaire du lot " terrassement ", et son assureur, la MAAF, la société ATPA et la société Axa aux fins d'appel en garantie.

Par jugement du 28 mars 2022, le tribunal judiciaire d'Auxerre a statué en ces termes :

Dit que les désordres affectant le pavillon d'habitation sis lieudit " [Adresse 14] " à [Localité 16] (89) constituant la résidence principale de M. et Mme [U] revêtent un caractère décennal ;

Déboute la SMABTP de sa demande de mise hors de cause ;

Dit que la SMABTP est tenue de financer, au bénéfice de M. et Mme [U], les réparations au titre des dommages matériels ;

Dit que la SMABTP est tenue au paiement d'intérêts moratoires au double du taux des intérêts légaux sur les sommes exigibles à compter du 8 janvier 2019 ;

Dit que la SMABTP a manqué à son obligation de préfinancement de travaux de nature à mettre fin aux désordres et qu'elle est tenue d'indemniser M. et Mme [U] de leurs préjudices immatériels ;

Dit que la responsabilité de la société Pavillon Bain est engagée au titre des désordres précités et que la garantie de son assureur décennal, la SMABTP, est due ;

En conséquence,

Condamne la SMABTP à payer à M et Mme [U] la somme totale de 279 903 euros en réparation de leur préjudice matériel, avec indexation de cette somme sur l'indice de la Fédération Française du Bâtiment (FFB) à compter du 17 décembre 2020 et jusqu'à complet règlement ;

Dit que les intérêts légaux dus par la SMABTP au titre de la condamnation susvisée seront majorés au double du taux légal à compter du 8 janvier 2019 ;

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U] la somme totale de 11 025 euros en réparation de leur préjudice de jouissance pour la période comprise entre mi-novembre 2016 et juin 2019 inclus ;

Déboute M. et Mme [U] de leur demande au titre de leur préjudice de jouissance pour la période comprise postérieure à juin 2019 ;

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U], pour comptes arrêtés au 31 décembre 2020 :

La somme totale de 10 800 euros au titre des frais de relogement,

La somme totale de 7 649,46 euros au titre des frais de trajets domicile/travail supplémentaires ;

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U], à compter du mois de janvier 2021 inclus et jusqu'à la réception des travaux de reconstruction :

La somme de 600 euros par mois au titre des frais de relogement ;

La somme de 424,97 euros par mois au titre des frais de trajets domicile/travail supplémentaires ;

Déboute M. et Mme [U] de leur prétention au titre des frais de garde-meubles ;

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U] la somme totale de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U] la somme totale de 14 400 euros au titre des honoraires de la société Global Expertise & Survey ;

Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière, conformément à l'article 1343-2 du code civil, au titre de chacune des condamnations précitées ;

Dit que la SMABTP, tant en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage qu'en celle d'assureur de la société Pavillon Bains, ne peut opposer aucune franchise à M. et Mme [U] ;

Déboute M. et Mme [U] de leurs prétentions à l'encontre de la société ATPA et de la société Axa ;

Dit n'y avoir lieu à mettre la société Axa hors de cause ;

Condamne la SMABTP à payer à M. et Mme [U] la somme totale de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SMABTP à payer à la société Axa la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Déboute la SMABTP de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SMABTP aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de Maître Roger Denoulet et Maître Béatrice Carlo-Vigouroux, avocats, pour ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 9 mai 2022, la SMABTP a interjeté appel du jugement intimant devant la cour :

La société ATPA,

La société Axa,

La MAAF Assurances,

M. et Mme [U],

La société Eric [K] Travaux publics.

EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par la voie électronique le 13 mai 2025, la SMABTP demande à la cour de :

Juger que la SMABTP, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage et responsabilité civile décennale, est recevable et bien fondée en ses conclusions ;

I/ sur l'infirmation du jugement litigieux

Infirmer le jugement litigieux en ce qu'il a :

Débouté la SMABTP de sa demande de mise hors de cause ;

Dit que la SMABTP est tenue de financer, au bénéfice de M. et Mme [U], les réparations au titre des dommages matériels ;

Dit que la SMABTP est tenue au paiement des intérêts moratoires au double du taux des intérêts légaux sur les sommes exigibles à compter du 8 janvier 2019 ;

Dit que la société SMABTP a manqué à son obligation de préfinancement de travaux de nature à mettre fin aux désordres et qu'elle est tenue d'indemniser M. et Mme [U] de leurs préjudices immatériels ;

Dit que la responsabilité de la société Pavillon Bain est engagée au titre des désordres précités et que la garantie de son assureur décennale, la SMABTP, est due ;

Statuant à nouveau,

1/

Juger que l'origine des désordres dénoncés est un affaissement de réseaux EP sur la face aval de la maison de M. et Mme [U] ;

Juger que les causes de cet affaissement de réseaux EP sont :

d'une part, l'absence de drainage périphérique ;

d'autre part, l'absence de précautions en disposant des réseaux extérieurs dans un sol pour renforcer les garanties de stabilité ;

Juger que :

les travaux relatifs au drainage ont été confiés à la société EMTP, terrassier,

les travaux relatifs aux réseaux EP ont été confiés à la société APTA, sous-traitante de M. et Mme [U] ;

Juger que les travaux d'assainissement ainsi que des réseaux EP et de drainage, réalisés, sont hors marché et ne rentrent pas, par conséquent, dans l'assiette de prime souscrite auprès de la SMABTP, en sa qualité d'assurance dommages-ouvrage ;

En conséquence,

Débouter M. et Mme [U] et tout autre partie de leurs demandes formées à l'encontre de la concluante : la SMABTP tant en qualité d'assureur de la société Pavillon Bain qu'assureur dommages-ouvrage comme irrecevables et mal fondées ;

Mettre hors de cause la SMABTP tant en qualité d'assureur de la société Pavillon Bain qu'assureur dommages-ouvrage, dans la mesure où l'origine des désordres prend sa source hors sphère d'intervention de la société Pavillon Bain et qu'ils sont hors assiette de prime de la police " dommages ouvrage "

2/

Juger que la déclaration de sinistre de M. et Mme [U] a été reçue le 16 novembre 2016 par la SMABTP ;

Juger que par lettre du 28 novembre 2016, la SMABTP a sollicité auprès de M. et Mme [U] des informations complémentaires ;

Juger que la SMABTP a été destinataire de ces informations complémentaires le 17 janvier 2017 ; date à laquelle la déclaration de sinistre est réputée constituée ;

Juger que la SMABTP a transmis à M. et Mme [U] un refus de garantie par courrier du 16 mars 2017, en même temps que le rapport de M. [D] et en respectant ainsi le délai légal qui lui est imparti de 60 jours, soit 58 jours après réception la déclaration de sinistre en l'espèce ;

Juger que M. et Mme [U] ont pu formuler leurs observations à l'issue de la réception de la position de refus de garantie de la SMABTP ; excluant ainsi tout grief ;

Juger, qu'en tout état de cause, la loi n'a jamais assorti l'obligation de la communication du rapport de l'expert amiable dommages-ouvrage au préalable, sous peine de sanctions contractuelles ;

Juger que le rapport du cabinet Global Expertise & Survey confirme l'analyse technique de M. [D] ;

Juger qu'en vertu du maintien de la réticence de M. et Mme [U] sur cette affaire, la SMABTP a mandaté un second expert amiable dommages ouvrage, M. [P] ;

Juger que M. [P] n'a pas rempli sa mission aux préjudices tant de M. et Mme [U] que de la SMABTP ;

Juger que la SMABTP n'a ni commis d'erreur ni fait preuve de mauvaise foi dans la gestion de la déclaration de sinistre litigieuse ;

Juger que :

les travaux relatifs au drainage ont été confiés à la société EMTP, titulaire du lot " terrassement " ;

les travaux relatifs aux réseaux EP ont été confiés à la société APTA ;

Juger que les travaux d'assainissement ainsi que des réseaux EP et de drainage, réalisés sont hors marché et ne rentrent pas, par conséquent, dans l'assiette de prime souscrite auprès de la SMABTP, en sa qualité d'assurance dommages-ouvrage et responsabilité civile décennale ;

En conséquence,

Débouter M. et Mme [U], ou toutes autres parties, de toute demande d'application de sanction contractuelle comme irrecevable et mal fondée ;

Débouter M. et Mme [U] de leur demande de condamnation avec l'application d'une majoration de l'indemnité due au double du taux de l'intérêt légale ; étant injustifiée dans son principe ;

Mettre hors de cause la SMABTP tant en qualité d'assureur de la société Pavillon Bain qu'assureur dommages-ouvrage.

3/

Juger que l'objet de reprise serait de reconstruire strictement à l'existant à l'identique, impliquant la suppression de certains postes inutiles jugés comme des améliorations non indispensables pour respecter les nouvelles normes ;

Juger qu'en retenant les préjudices liés à la jouissance de leur maison du fait des désordres survenus et des frais de relogement entraine ici encore un enrichissement sans cause ;

En conséquence,

Débouter M. et Mme [U] au titre de leurs demandes aux titres des dommages matériels et des dommages immatériels comme non justifiés ;

Débouter M. et Mme [U] de leurs demandes de requalifier le montant des frais d'expertise exposés en frais irrépétibles ;

Débouter M. et Mme [U] de leur demande de condamnation avec l'application d'une majoration de l'indemnité due au double du taux de l'intérêt légale ; étant injustifiée dans son principe ;

4/

Juger que les travaux relatifs aux réseaux EP ont été confiés à la société APTA, missionnée par M. et Mme [U] ;

Juger que la société APTA est assurée pour la période et le chantier concernés auprès de la société Axa ;

En conséquence,

Condamner in solidum la société APTA et son assureur la société Axa à relever et garantir la SMABTP tant en qualité d'assureur de la société Pavillon Bain qu'assureur dommages-ouvrage de toutes les condamnations mises à sa charge, y compris s'agissant des éventuels dommages et intérêts, et ce en principal, intérêts, frais et accessoires avec capitalisation des intérêts au sens de l'article 1154 du code civil et sur simple justificatif de règlement ;

5/

Faire application des plafonds et franchise contractuelles pour toutes condamnations prononcées contre la SMABTP tant en qualité d'assureur de la société Pavillon Bain qu'assureur dommages-ouvrage ;

II/ sur la confirmation du jugement litigieux

Débouter M. et Mme [U] au titre de leurs demandes de frais de relogement et de garde-meubles ;

En tout état de cause,

Débouter M. et Mme [U] et la société Axa, en sa qualité d'assureur de la société APTA, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, plus amples ou contraires, formulées à l'encontre de la SMABTP, prise en sa qualité d'assureur " dommages-ouvrage " et d'assureur responsabilité civile décennale de la société Pavillon Bain ;

Rejeter toute demande au titre de l'exécution provisoire ;

Condamner tout succombant à payer à la SMABTP une indemnité de 5 500 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, dont le recouvrement sera poursuivi par la société 2H Avocats, en la personne de Maître Audrey Schwab, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par la voie électronique le 28 avril 2025, la société Axa demande à la cour de :

Juger recevable et bien-fondée la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, en ses demandes, fins et conclusions ;

A titre principal :

Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes dirigées contre la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA ;

En conséquence :

Rejeter toute demande de condamnation contre la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, pour absence de mobilisation des garanties souscrites auprès de la concluante au titre du volet décennal et pour absence de souscription de toute garantie pour les dommages immatériels ;

Prononcer en conséquence la mise hors de cause de la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA ;

A titre subsidiaire :

Juger recevable et fondée la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, en ses appels en garantie à l'encontre de la SMABTP, assureur de la société Pavillon Bain, et de la SMABTP, assureur dommages-ouvrage ;

Condamner in solidum et à défaut solidairement la SMABTP, assureur de la société Pavillon Bain, et la SMABTP, assureur dommages-ouvrage, à relever et garantir indemne la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre tant en principal, qu'intérêts, frais et accessoires ;

Laisser à la charge de la SMABTP, assureur dommages-ouvrage, toute condamnation qui serait prononcée à son encontre dans le présent litige ;

Infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fait droit aux demandes de M. et Mme [U] pour frais de déplacements professionnels et pour préjudice moral et ainsi rejeter ces prétentions ;

Infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fait droit à la demande de M. et Mme [U] au titre des frais d'expertise privée exposés et ainsi rejeter cette prétention ;

Limiter toute condamnation à l'encontre de la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, à une quote-part maximum de 5 % ;

Rejeter tout appel en garantie de la SMABTP, assureur dommages-ouvrage, au titre du doublement de l'intérêt légal ;

Faire application, en cas de condamnation à l'encontre de la société Axa, recherchée en qualité d'assureur de la société ATPA, des limites de garanties de la police souscrite à la fois pour les plafonds et à la fois pour les franchises opposables, la franchise sur le volet décennal à la charge de la société ATPA étant d'un montant de 1 558,77 euros réactualisée ;

En toute hypothèse :

Rejeter toute demande de condamnation formée à l'encontre de la société Axa au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens ;

Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la SMABTP à verser à la concluante la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;

Condamner in solidum et à défaut solidairement tout succombant à verser à la société Axa la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Frédéric Doceul, avocat au Barreau de Paris, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par la voie électronique le 28 mars 2025, M. et Mme [U] demandent à la cour de :

Dire M. et Mme [U] recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre principal :

Débouter la SMABTP, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité de la société Pavillon Bain, de l'intégralité des fins de son appel du jugement du tribunal judiciaire d'Auxerre du 28 mars 2022 ;

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire d'Auxerre du 28 mars 2022 ;

Subsidiairement :

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire d'Auxerre du 28 mars 2022 en ce qu'il a :

Débouté M. et Mme [U] de leurs prétentions à l'encontre de la société ATPA et de la société Axa ;

Statuant à nouveau :

Au titre des dommages matériels :

Condamner, in solidum, la SMABTP, la société ATPA et la société Axa à régler à M. et Mme [U] la somme de 279 903 euros T.T.C ;

Dire que cette somme sera indexée sur l'évolution de l'indice FFB à compter du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et jusqu'à complet règlement ;

Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les intérêts légaux dus par la SMABTP au titre des dommages matériels seront majorés au double du taux légal et ce, à compter de la mise en demeure de payer du 8 janvier 2019 et jusqu'à complet règlement, outre capitalisation desdits intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil ;

Dire que les intérêts seront dus par la société ATPA et la société Axa au taux légal et à compter de l'arrêt à intervenir, outre capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code civil ;

Au titre des préjudices subis et frais exposés :

Condamner, pour un compte arrêté au 31 décembre 2020 et sauf à parfaire, in solidum, la SMABTP, la société ATPA et la société Axa à régler à M. et Mme [U] les sommes suivantes :

11 025 euros en réparation du trouble de jouissance subi sur la période courant du 15 novembre 2016 à juin 2019,

10 800 euros au titre des frais de relogement exposés sur la période courant de juillet 2019 au 31 décembre 2020,

7 649,46 euros au titre des frais de déplacements professionnels supplémentaires ;

Condamner, à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à la réception des travaux de reconstruction préconisés par l'expert judiciaire, in solidum, la SMABTP, la société ATPA et la société Axa à régler à M. et Mme [U] les sommes mensuelles suivantes :

600 euros au titre des frais de relogement,

424,97 au titre des frais de déplacements professionnels supplémentaires ;

Condamner, in solidum, la SMABTP, la société ATPA et la société Axa à régler à M. et Mme [U] la somme de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral ;

Condamner, in solidum, la SMABTP, la société ATPA et la société Axa à régler à M. et Mme [U] la somme de 14 400 euros TTC au titre des frais d'expertise privée exposés ;

Dire que l'intégralité de ces sommes portera intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et jusqu'à complet règlement, outre capitalisation desdits intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil ;

En tout état de cause :

Débouter la société Axa de l'intégralité des fins de son appel incident du jugement du tribunal judiciaire d'Auxerre du 28 mars 2022 ;

Condamner, in solidum, la SMABTP et tout autre succombant à régler à M. et Mme [U] à titre principal, la somme de 7 000 euros, subsidiairement, la somme de 21 400 euros, incluant les frais d'expertise privée exposés, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner, in solidum, la SMABTP et tout autre succombant aux entiers dépens, lesquels comprendront, notamment, outre le coût des présentes, les frais et honoraires d'expertise judiciaire, dont distraction au bénéfice de Maître Roger Denoulet, avocat aux offres de droit, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par la voie électronique le 30 août 2022, la société MAAF demande à la cour de :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Auxerre le 28 mars 2022 ;

Condamner la SMABTP à régler à la MAAF, prise en sa qualité d'assureur de l'entreprise Eric [K] Travaux Public, la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamner la SMABTP aux entiers dépens de la présente procédure d'appel.

La société ATPA, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions de la SMABTP ont été signifiées, respectivement par procès-verbal de remise à personne morale le 13 juillet 2022 et par procès-verbal de remise à l'étude le 5 août 2022, n'a pas constitué avocat.

La société Eric [K] Travaux public, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée par procès-verbal de remise à l'étude le 5 août 2022, n'a pas constitué avocat.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 15 mai 2025 et l'affaire a été fixée à l'audience du 22 mai 2025 à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

1°) Sur la garantie de la police dommages-ouvrage au titre des travaux réparatoires

Moyens des parties

La SMABTP soutient que les causes des fissures constatées étant l'instabilité de tranchées de réseaux et l'absence de drainage et les travaux d'assainissement et de drainage ayant été réalisés " hors marché ", ils n'entrent pas dans l'assiette de la prime souscrite auprès de la SMABTP et que par conséquent M. et Mme [U] ne peuvent se prévaloir de la garantie dommages-ouvrage.

Elle fait valoir qu'elle a respecté le délai de 60 jours prévu à l'article L. 242-1 du code des assurance, exposant que ce délai court à compter de la réception de la déclaration de sinistre, qui, en l'espèce, est réputée constituée le 17 janvier 2017, date de réception des informations supplémentaires demandées par courrier de la SMABTP le 28 novembre 2016, permettant à l'assureur d'instruire le sinistre.

Elle soutient qu'aucune sanction n'est applicable contre l'assureur de préfinancement en cas d'envoi simultané du rapport d'expertise préliminaire et de la prise de position.

M. et Mme [U] soutiennent qu'il résulte de l'expertise que les dommages ont été causés par l'inadaptation des remblais périphériques et l'absence de drainage et que ces travaux faisaient partie du marché de la société Pavillon Bain. Ils exposent que l'implication causale des travaux réalisés par la société ATPA, hors marché, n'est que purement hypothétique.

Ils font valoir que leur déclaration de sinistre était complète, que la SMABTP ne justifie pas de l'envoi de sa lettre du 28 novembre 2016 pour demander des renseignements complémentaires et qu'en tout état de cause la déclaration de sinistre doit être regardée comme réceptionnée et valablement constituée dès le 16 novembre 2016 au plus tard, à l'expiration du délai de dix jours prévu par l'annexe II de l'article A 243-1 du code des assurances. Ils en déduisent que le refus de garantie notifié le 16 mars 2017 est tardif.

Ils ajoutent en outre que cette prise de position de l'assureur est irrégulière dès lors que le rapport préliminaire établi par l'expert n'a pas été préalablement communiqué aux assurés.

Réponse de la cour

Selon l'article L. 242-1 du code des assurances, toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Le troisième alinéa de cet article dispose que l'assureur a un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat et le cinquième alinéa que si l'assureur ne respecte pas ce délai, l'assuré peut, après l'avoir notifié à l'assureur, engager les dépenses nécessaires à la réparation des dommages et que l'indemnité versée par l'assureur est alors majorée de plein droit d'un intérêt égal au double du taux de l'intérêt légal.

L'annexe II de l'article A 243-1 contenant les clauses-types applicables aux contrats d'assurance dommages est ainsi rédigée :

" En cas de sinistre susceptible de mettre en jeu les garanties du contrat, l'assuré est tenu d'en faire la déclaration à l'assureur.

La déclaration de sinistre est réputée constituée dès qu'elle comporte au moins les renseignements suivants :

- le numéro du contrat d'assurance et, le cas échéant, celui de l'avenant ;

- le nom du propriétaire de la construction endommagée ;

- l'adresse de la construction endommagée ;

- la date de réception ou, à défaut, la date de la première occupation des locaux ;

- la date d'apparition des dommages ainsi que leur description et localisation.

A compter de la réception de la déclaration de sinistre, l'assureur dispose d'un délai de dix jours pour signifier à l'assuré que la déclaration n'est pas réputée constituée et réclamer les renseignements manquants susvisés. Les délais visés à l'article L. 242-1 du présent code commencent à courir du jour où la déclaration de sinistre réputée constituée est reçue par l'assureur. "

S'il est établi que le silence gardé par l'assureur pendant le délai emporte obtention de la garantie (1ère Civ., 22 mai 1991, pourvoi n° 89-18.604, Bulletin 1991 I N° 161), la sanction ne s'applique que pour l'ouvrage garanti et ne permet pas de couvrir des dommages affectant d'autres ouvrages (1ère Civ., 18 décembre 2002, pourvoi n° 99-16.551, publié).

L'assureur dommages-ouvrage, qui n'a pas respecté les prescriptions légales mises à sa charge, doit garantir les désordres déclarés, dans la limite de l'objet assuré par les stipulations contractuelles (3e Civ., 30 juin 2016, pourvoi n° 14-25.150, publié).

Au cas d'espèce, il résulte du rapport d'expertise et il n'est pas contesté par la SMABTP que les dommages déclarés par M. et Mme [U] ont été causés par une absence de drainage périphérique.

La SMABTP affirme que ces travaux de drainage périphérique ne feraient pas partie du marché de l'ouvrage assuré. Or si M. et Mme [U] se sont réservés les travaux d'assainissement et eaux pluviales dont il n'est pas contesté par les parties qu'ils correspondent à la facture de 4 966,56 euros émise par la société ATPA (pièce 15 de M. et Mme [U]), la SMABTP n'établit pas la preuve que ces travaux auraient dû comprendre la pose de drain périphérique, de tels travaux ayant dû être prévus par la société Pavillon Bain dès lors qu'ils étaient nécessaires à la préservation de la stabilité de la maison au regard de la nature du terrain.

Par conséquent l'allégation de la SMABTP, selon laquelle la société ATPA aurait commis également une faute en ne s'assurant pas de la stabilité du sol sur lequel elle installait les réseaux extérieurs, n'est pas de nature à exonérer la société Pavillon Bain de sa garantie décennale dès lors qu'il existe un lien de causalité entre les dommages et l'ouvrage dont la réalisation avait été confiée à la société Pavillon Bain.

La SMABTP ne contestant pas le caractère décennal des désordres établis par l'expertise, elle sera donc tenue au paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages.

Par ailleurs la SMABTP ne justifie pas davantage en appel qu'en première instance avoir respecté les délais de l'article L. 242-1 du code des assurances.

Elle ne justifie en effet pas avoir signifié aux assurés dans le délai de 10 jours de leur déclaration que cette dernière serait réputée non constituée, de telle sorte qu'à compter de l'expiration de ce délai, à savoir à compter du 26 novembre 2016, la déclaration de M. et Mme [U] est réputée constituée et qu'il incombait à la SMABTP de notifier sa décision relative à la garantie dans un délai de 60 jours à compter de cette date, ce qu'elle n'a pas fait.

Au surplus, le tribunal a, à juste titre, indiqué à titre surabondant que la notification du refus de garantie par lettre du 16 mars 2017 était irrégulière dès lors que le rapport préliminaire d'expertise n'avait pas été communiqué préalablement aux assurés.

Il est, en effet, jugé, qu'en application de l'annexe A. 243-1 du code des assurances et l'annexe II à ce dernier article, dans leur rédaction antérieure à l'arrêté du 9 novembre 2009, applicable en la cause, que l'assureur ne pouvait valablement notifier à son assuré, dans le délai qui lui est imparti, sa décision sur le principe de sa garantie, sans lui avoir préalablement communiqué le rapport préliminaire d'expertise en sa possession (3e Civ., 24 septembre 2013, pourvoi n° 12-25.245).

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que les intérêts légaux dus par la SMABTP au titre de la condamnation en réparation du préjudice matériel seront majorés au double du taux légal.

2°) Sur la responsabilité de la société ATPA

Moyens des parties

La SMABTP soutient que la cause impulsive des dommages résulte d'une erreur de conception et d'exécution concernant la stabilité des réseaux de remblais et que cette faute justifie son recours en garantie à l'encontre de la société ATPA et de la société Axa, son assureur.

La société Axa fait valoir que les travaux de drain périphérique et de remblaiement périphérique, seuls à l'origine des dommages, n'étaient pas à sa charge. Elle soutient que les travaux qu'elle a exécutés ne présentaient aucun désordre et que ce sont les travaux de la société Pavillon Bain qui ont provoqué les désordres et notamment l'altération des réseaux EP. Elle ajoute qu'il ne peut être établi aucun lien entre le fait d'avoir installé les réseaux extérieurs sur un sol instable et les désordres excipés par les maîtres d'ouvrage.

Réponse de la cour

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties en retenant l'absence de faute imputable à la société ATPA et l'absence de lien de causalité entre les ouvrages entrant dans sa sphère d'intervention et les dommages subis par M. et Mme [U].

Il convient en effet de souligner que l'expert n'avait émis qu'une hypothèse concernant l'absence de stabilité des réseaux, indiquant en page 37 de son rapport " il existe un doute sur la stabilité des réseaux dans les remblais ", n'avait établi aucun lien entre " une fissuration du réseau et la cassure de la maison " (page 33 du rapport) et avait conclu en page 31 que le fait que les désordres ne soient apparus que sept ans après la réception tend à établir que ce sont les inondations successives, par la déclivité, du vide sanitaire non drainé, qui seraient à l'origine de l'affaissement des réseaux EP sur la face aval de la maison.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a écarté toute responsabilité de la société ATPA et rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de la société Axa, son assureur.

3°) Sur le montant des travaux réparatoires

Moyens des parties

M. et Mme [U] soutiennent que l'expert a conclu que l'état de la maison ne permettait pas une réparation partielle et que seules la destruction et la reconstruction étaient envisageables.

Ils font valoir que la solution validée par l'expert respecte le principe de réparation intégrale du préjudice qui implique une indemnisation, en valeur à neuf, sans abattement pour vétusté, incluant, le cas échéant un ouvrage non prévu à l'origine et de nature à permettre que l'ouvrage puisse être conforme à sa destination, même s'il en résulte une plus-value pour le maître d'ouvrage.

La SMABTP soutient que les devis Maisons Philipon et Rabourdin TP produits par M. et Mme [U] à l'appui de leurs demandes contiennent des améliorations de l'ouvrage qui seraient constitutives d'un enrichissement sans cause et que si l'ouvrage a été démoli suite à l'arrêté de péril, cela résulte directement du choix de M. et Mme [U] de ne pas mettre en 'uvre une solution de reprise adaptée, à savoir un drainage périphérique accompagné de la reprise du réseau d'eaux pluviales fuyard.

Réponse de la cour

Dès lors qu'il a été établi ci-dessus que la SMABTP était tenue de préfinancer les travaux de reprise, elle ne peut faire grief à M. et Mme [U] de ne pas avoir procédé, eux-mêmes, à ces travaux dès l'apparition des dommages et d'être ainsi à l'origine de l'arrêté de péril.

Elle est donc tenue d'indemniser M. et Mme [U] au titre de la destruction et reconstruction de la maison, n'alléguant devant la cour aucun moyen nouveau de nature à remettre en cause l'exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties faite par le tribunal, qui a constaté que la SMABTP ne justifiait pas que M. et Mme [U] auraient pu obtenir une reconstruction de leur maison à un prix inférieur à celui du devis de la société Maisons Philippon.

Le jugement sera donc confirmé du chef de la condamnation de la SMABTP à payer à M. et Mme [U] la somme de 279 903 euros en réparation de leur préjudice matériel, avec indexation de cette somme sur l'indice de la FFB à compter du 17 décembre 2020 et jusqu'à complet paiement.

4°) Sur les demandes de M. et Mme [U] au titre des préjudices immatériels

Moyens des parties

M.et Mme [U] font valoir que la responsabilité contractuelle de l'assureur dommages-ouvrage est engagée dès lors que ce denier est tenu de procéder à une réparation rapide, complète et efficace des dommages de nature décennale, ce qui s'analyse en une obligation de résultat et que la nature décennale d'un désordre est exclusive de la recherche de ses causes. Ils soulignent que dès le rapport d'expertise dommages-ouvrage la SMABTP était en mesure d'apprécier la nature décennale des désordres.

Ils ajoutent que l'expert a indiqué que la destruction de la maison s'imposait en 2021 alors qu'elle ne s'imposait pas en 2016, ce qui établit l'aggravation des désordres initiaux du fait de l'inaction de la SMABTP.

La SMABTP soutient qu'elle n'a commis aucune faute ni fait preuve de mauvaise foi dans la gestion de la déclaration de sinistre de M. et Mme [U] mais que la situation lui a " tout simplement échappé ". Elle souligne que les causes des désordres sont notamment l'instabilité de tranchée de réseau, qu'elle a désigné deux experts pour étudier la situation et toujours répondu aux observations de M. et Mme [U].

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il est jugé que l'assureur dommages-ouvrage manque à ses obligations contractuelles en ne préfinançant pas une réparation efficace et pérenne de nature à mettre fin aux désordres (3e (Civ., 11 février 2009, pourvoi n° 07-21.761, Bull. 2009, III, n°33 ; 3e Civ., 14 décembre 2022, pourvoi n° 21-19.544).

Au cas d'espèce, le tribunal a justement retenu que la SMABTP avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle de droit commun en relevant notamment que les opérations d'expertise amiable n'avaient pas été menées avec diligence par la SMABTP et notamment qu'alors que les conclusions du rapport du premier expert, M. [D], étaient contredites par le rapport de l'expert mandaté par M. et Mme [U], la SMABTP ne s'était pas assurée que le nouvel expert qu'elle avait saisi, M. [P], avait bien réalisé la mission qui lui avait été confiée.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la SMABTP à indemniser M. et Mme [U] de leurs préjudices immatériels sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun de la SMABTP, qui a manqué à son obligation de préfinancement de travaux de nature à mettre fin aux désordres, étant observé que la SMABTP ne conteste pas les sommes retenues par le tribunal au titre des préjudices immatériels subis par M. et Mme [U].

La SMABTP ne conteste pas davantage le montant des honoraires de l'expert privé auquel ont eu recours M. et Mme [U] pour un montant de 14 400 euros, cette condamnation devant être confirmée.

Elle sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande d'application des plafonds et franchises contractuelles sans se prévaloir d'aucun moyen de droit ou de fait à l'appui de sa demande d'infirmation, de telle sorte qu'il y a lieu de confirmer ce chef de jugement.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, la SMABTP, partie succombante, sera condamnée aux dépens et à payer à M. et Mme [U] la somme de 6 000 euros, à la société Axa la somme de 3 000 euros et à la MAAF la somme de 500 euros, au titre des frais irrépétibles.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne la SMABTP aux dépens d'appel ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SMABTP et la condamne à payer à M. et Mme [U] la somme de 6 000 euros, à la société Axa France IARD la somme de 3 000 euros et à la MAAF la somme de 500 euros.

La greffière, La présidente de chambre,

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