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Décisions

CA Chambéry, 2e ch., 4 septembre 2025, n° 23/00530

CHAMBÉRY

Autre

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

JPB Caribbean Yacht (SARL), Y

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fouchard

Conseillers :

M. Therolle, M. Gauvin

Avocats :

Me Caullireau, Me Romeo, Me Ottone, SCP Lagrave Jouteux Madoule, Me Morlon-Ruffini, Me Voisard, SELARL Enotiko Avocats, Me Cuartero

TJ [Localité 7], du 9 mars 2023, n° 18/0…

9 mars 2023

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 23 janvier 2018, Mme [U] [W], épouse [G], a vendu un navire basé à la Martinique, de marque Fountaine Pajot, type Lavezzi 40, millésime 2006 dénommé [Localité 10], à M. [H] [P]. Ce navire avait, préalablement à la vente, fait l'objet d'une expertise d'évaluation le 15 décembre 2017 par M. [A] [O], expert maritime, laquelle n'a mis en évidence aucune anomalie majeure.

Dès le 29 janvier 2018, M. [H] [P] a donné mandat de vendre ce navire à la société JPB Caribbean Yachts. Le 19 mars 2018, M. [B] [Y] et M. [I] [Y] ont signé avec la société JPB Caribbean Yachts une promesse d'achat de ce navire pour le prix de 120 000 euros, sous diverses conditions suspensives habituelles. Une nouvelle expertise du navire sera réalisée à cette occasion par M. [O], à la demande des acquéreurs, le 29 mars 2018. A nouveau, aucun défaut majeur n'a été relevé.

Le 3 avril 2018, le navire a fait l'objet de deux ventes successives : M. [P] l'a d'abord vendu à Mme [C] [T] (sa compagne), laquelle l'a immédiatement revendu aux consorts [Y] (en indivision) pour le prix de 120 000 euros.

L'acte de francisation a été établi le 10 avril 2018, et le navire a été rebaptisé Ohana.

Courant juin 2018, lors d'une sortie en mer, les acquéreurs ont constaté l'existence d'une fissure et un éclatement de section du plancher de la cabine avant tribord, proche de la cloison placée sous la ligne du mât.

Après investigations, ils ont ainsi découvert que le navire avait subi une grave avarie le 25 juillet 2009, à la suite de laquelle des réparations avaient été réalisées, lesquelles étaient masquées par une couche de peinture sous le plancher.

Un nouvel expert maritime était mandaté par les consorts [Y], lequel a établi un rapport le 25 juillet 2018 aux termes duquel M. [D] [V] conclut à l'existence d'un dommage structurel qui n'a pas été réparé dans les règles de l'art et qu'il est vivement déconseillé de ne pas naviguer avec ce navire dans son état actuel, hormis pour des petites navigations côtières au moteur ou par temps calme.

C'est dans ces conditions que, par actes délivrés les 4 octobre, 8 novembre et 6 décembre 2018, M. [B] [Y] et M. [I] [Y] ont fait assigner Mme [C] [T], M. [H] [P], la société JPB Caribbean Yachts et M. [A] [O] devant le tribunal de grande instance d'Annecy aux fins essentiellement de résolution de la vente du navire sur le fondement de la garantie des vices cachés, et paiement de la somme de 120 000 euros en restitution du prix, outre 25 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par acte délivré le 9 décembre 2019, les consorts [Y] ont fait assigner Mme [W] en intervention forcée.

Mme [T] et M. [P] n'ont pas comparu devant le tribunal. Les autres défendeurs ont comparu et ont fait valoir leurs contestations.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 9 mars 2023, le tribunal judiciaire d'Annecy a :

rejeté la demande aux fins de nullité du contrat de vente du navire entre M. [B] [Y] et M. [I] [Y] et M. [H] [P] et Mme [C] [T],

ordonné la résolution de la vente du navire intervenue entre M. [B] [Y] et M. [I] [Y], d'une part, et M. [H] [P] et Mme [C] [T], d'autre part,

déclaré M. [H] [P], Mme [C] [T] et Mme [U] [W] épouse [G] responsables in solidum au titre de la garantie des vices cachés,

condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T] et Mme [U] [W] épouse [G] à la restitution de la somme de 120 000 euros au profit de MM. [I] et [B] [Y],

condamné la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de MM. [I] et [B] [Y] en réparation de leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,

débouté MM. [I] et [B] [Y] du surplus de leur demande au titre de l'indemnisation de leurs préjudices,

débouté MM. [I] et [B] [Y] de toutes les demandes aux fins de condamnation de M. [A] [O],

condamné M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) aux entiers dépens,

condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros à MM. [I] et [B] [Y], pris indivisément, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts), à M. [B] [Y] et M. [I] [Y] au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [A] [O] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties pour le surplus de leurs demandes.

Par déclaration du 28 mars 2023, Mme [U] [W] épouse [G] a interjeté appel de ce jugement, en intimant toutes les autres parties. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00530.

Par déclaration du 14 avril 2023, M. [B] [Y] et M. [I] [Y] ont interjeté appel de ce jugement en intimant M. [A] [O] seul. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00618.

M. [A] [O] a fait délivrer aux autres parties des assignations en appel provoqué de sorte que le deuxième appel concerne en définitive toutes les parties présentes en première instance.

Par ordonnance rendue le 11 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a notamment ordonné la jonction des deux appels.

Par ordonnance rendue le 13 juin 2024, le conseiller de la mise en état, saisi par MM. [Y] aux fins d'expertise du bateau, a rejeté cette demande.

Après jonction des deux appels, seuls MM. [Y] et M. [O] ont notifié des conclusions récapitulatives communes aux deux appels. Les autres parties constituées ont conclu distinctement dans chacun des deux appels.

***

Par conclusions notifiées le 19 septembre 2023 sur son propre appel (RG 23/00530), auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, Mme [U] [W] épouse [G] demande en dernier lieu à la cour de :

Vu l'article 56 du code de procédure civile,

Vu l'article 549 du code de procédure civile,

recevoir Mme [U] [W] épouse [G] en son appel provoqué et incident,

déclarer nulle l'assignation des consorts [Y] et les demandes faites à l'encontre de Mme [U] [G],

infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau,

débouter les consorts [Y] de toutes leurs demandes fins et conclusions à l'encontre de Mme [U] [W] épouse [G],

retenir la responsabilité de l'expert [O],

ordonner ne pas y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile au profit de M. [O] à la charge de Mme [W] épouse [G],

condamner les consorts [Y] et M. [O] in solidum au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distribution de ces derniers sera faite au profit de Me Vianney Lebrun.

Par conclusions notifiées le 3 novembre 2023 sur l'appel des consorts [Y] (RG 23/00618), auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, Mme [U] [W] épouse [G] demande en dernier lieu à la cour de :

Vu l'article 56 du code de procédure civile,

Vu l'article 549 du code de procédure civile,

recevoir Mme [U] [W] épouse [G] en ses demandes incidentes et l'en déclarer bien fondée,

par conséquent,

déclarer nulle l'assignation originelle des consorts [Y] et les demandes faites à l'encontre de Mme [U] [W] épouse [G],

infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau,

débouter les consorts [Y] de toutes leurs demandes fins et conclusions à l'encontre de Mme [U] [W] épouse [G],

débouter M. [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'égard de Mme [W] épouse [G],

constater la recevabilité des déclarations douanières produites par Mme [W] épouse [G],

constater la parfaite navigabilité hauturière du navire au moment de la vente par Mme [W] épouse [G] en 2017,

rejeter l'expertise [V] comme insuffisante à établir l'existence d'un vice caché rendant le navire impropre à sa destination,

juger non rapportée la preuve selon laquelle Mme [W] épouse [G] aurait eu connaissance d'un vice de nature à rendre impropre à sa destination le navire et qu'elle aurait volontairement dissimulé,

retenir la responsabilité de l'expert maritime [O], intervenu à deux reprises par essais en mer et par constatation à sec,

ordonner ne pas y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile au profit de M. [O] à la charge de Mme [W] épouse [G],

condamner les consorts [Y] et M. [O] in solidum au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distribution de ces derniers sera faite au profit de Me Vianney Lebrun.

***

Par conclusions récapitulatives notifiées le 3 janvier 2025 (identiques dans les deux dossiers), auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [B] [Y] et M. [I] [Y] demandent en dernier lieu à la cour de :

1) Sur l'appel principal de Mme [G] et l'appel incident de JPB Caribbean Yachts

1.1 Sur la forme,

Vu les dispositions des articles 56 du code de procédure civile,

dire et juger irrecevable la demande formulée par Mme [G] de nullité de l'assignation à tout le moins l'en débouter,

1.2 Sur le fond

Vu les dispositions des articles 1641 du code civil d'une part et 1231 du code civil d'autre part,

confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré en ce qu'il a :

- ordonné la résolution de la vente du navire et condamné in solidum [H] [P], [C] [T] et [U] [W] épouse [G] à payer aux concluants la somme principale de 120 000 euros,

- condamné in solidum, [H] [P], [C] [T], [U] [G] et la société JPB Caribbean Yachts au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700,

la débouter de toutes ses demandes fins et conclusions,

2) Sur l'appel principal des consorts [Y] (limité aux dispositions du jugement relatives à M. [O])

déclarer les appelants recevable et bien fondé en leur appel incident,

y faisant droit, réformer la décision dès les premières conclusions d'appel en ce qu'elle a débouté les concluants de leur demande de condamnation de M. [O] au visa des dispositions de l'article 1231 du code civil, au paiement de la somme principale de 120 000 euros outre la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts toute cause de préjudice confondus 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

Statuant à nouveau,

Vu les dispositions de l'article 1231 du code civil

condamner M. [O] au paiement de la somme principale de 120 000 euros outre la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts toute cause de préjudice confondus 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers,

3) Sur l'appel incident de M. [O]

Vu l'article 31 du code de procédure civile,

confirmer en toutes la décision des premiers juges qui a rejeté la demande de nullité du contrat de vente entre les consorts [Y] et [C] [T],

déclarer irrecevable pour défaut d'intérêt et de qualité à agir la demande de M. [O] de nullité du contrat de vente entre les consorts [Y] et Mme [T],

le débouter de toutes ses demandes fins et conclusions,

4) Sur l'appel incident de la société La société Caribbean Yachts EURL JPB

confirmer purement et simplement les dispositions du jugement déféré en ce qu'elles ont condamné la Société JPB Caribbean Yachts au paiement aux concluants de la somme de 5 000 euros en réparation due leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,

la débouter de toutes ses demandes fins et conclusions.

***

Par conclusions notifiées le 22 janvier 2024 (après jonction des deux appels), auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [A] [O] demande en dernier lieu à la cour de :

(A) Vu les articles 31 du code de procédure civile, 231,241 du code des douanes, 1599 et 1186, 1178, 1201 du code civil, et la vente opérée entre Mme [T] et les consorts [Y],

débouter les consorts [Y] de leur appel incident,

infirmer la décision dont appel et statuer à nouveau :

prononcer la nullité du contrat de la vente intervenue entre Mme [T] et les consorts [Y], puisque Mme [T] n'était pas propriétaire du navire, de sorte qu'elle ne pouvait le leur revendre,

en conséquence de la nullité de la vente du navire sur laquelle portait l'expertise du concluant, prononcer la nullité du contrat d'expertise et confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a débouté les consorts [Y] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. [O],

(A) Vu l'article 16 du code de procédure civile et la pièce 4 de l'appelante,

infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a considéré l'existence d'un vice caché affectant le navire sur la base d'un rapport d'expertise non contradictoire,

statuer à nouveau et débouter les consorts [Y] de l'ensemble de leurs demandes,

(B) Vu les articles 56 et 768 du code de procédure civile,

débouter Mme [W] [G] de son appel à l'encontre de M. [O],

(C) Au surplus,

Vu l'article 1103 du code civil,

Vu l'article 1162 du code civil,

Vu l'article L132-1 du code de la consommation,

Confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a débouté MM. [Y] de toutes leurs demandes en condamnation dirigées contre M. [O],

(D) A titre subsidiaire,

Vu les articles 1641 et suivants du code civil,

si la cour devait considérer l'existence d'un vice caché affectant le navire, confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré M. [H] [P], Mme [C] [T] et Mme [U] [W] épouse [G] responsables in solidum au titre de la garantie des vices cachés,

Vu l'article 1112-1 du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil, à l'égard de Caribbean Yachts d'une part,

Vu l'article 1240 du code Civil à l'égard de Mme [G] d'autre part,

condamner solidairement Caribbean Yachts et Mme [G] à garantir M. [O] des éventuelles condamnations qui seraient prononcées contre lui et débouter Caribbean Yachts de ses demandes à l'encontre du concluant et plus généralement débouter les autres parties à la procédure de toute demande à l'encontre de M. [O],

(E) En tout état de cause

(E.1) Vu l'article 700 du code de procédure civile,

confirmer la décision dont appel, en qu'elle a solidairement condamné Caribbean Yachts, M. [P], Mme [T] et MM. [Y] et Mme [G] à verser à M. [O] 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et les amplifier d'un même montant en cause d'appel,

(E.2) Vu l'article 696 du code de procédure civile,

condamner aux entiers dépens Caribbean Yachts, M. [P], Mme [T] et MM. [Y].

***

Par deux jeux de conclusions distincts notifiés le 26 décembre 2023, pour l'un dans le dossier RG 23/00530, et pour le second dans le RG 23/00618 (dispositifs identiques), auxquels il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société JPB Caribbean Yachts demande en dernier lieu à la cour de :

réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- condamné société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de M. [B] [Y] et M. [I] [Y] en réparation de leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,

- débouté M. [B] [Y] et M. [I] [Y] du surplus de leur demande au titre de l'indemnisation de leurs préjudices,

- débouté M. [B] [Y] et M. [I] [Y] de toutes les demandes aux fins de condamnation de M. [A] [O],

- condamné M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) aux entiers dépens,

- condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros à M. [B] [Y] et M. [I] [Y], pris indivisément, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts), à M. [B] [Y] et M. [I] [Y] au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [A] [O] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- jugé que la responsabilité contractuelle de M. [O] n'était pas engagée,

- omis de statuer sur la demande subsidiaire de la société JPB (Caribbean Yachts) à l'encontre de M. [H] [P] et de Mme [C] [T],

Et, statuant de nouveau :

A titre principal,

débouter M. [B] [Y] et M. [I] [Y] de toutes leurs demandes à l'encontre de la société JPB (Caribbean Yachts),

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait considérer que la responsabilité contractuelle de la société JPB (Caribbean Yachts) devait être engagée,

condamner M. [H] [P], Mme [C] [T], et M. [A] [O] à la relever et garantir de toute condamnation,

En toutes hypothèses,

condamner MM. [B] et [I] [Y] à payer à la Société JPB (Caribbean Yachts) la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Mme [T] et M. [P] n'ont pas constitué avocat. La déclaration d'appel de Mme [W] leur a été signifiée par actes du 11 mai 2023, transformés en procès-verbaux de recherches infructueuses.

L'assignation en appel provoqué par M. [O] contre Mme [T] et M. [P] leur a été délivrée selon les mêmes modalités par actes du 22 septembre 2023.

Les conclusions de la société JPB Caribbean Yachts leur ont été signifiées selon les mêmes modalités. Les autres parties n'ont pas justifié de la signification de leurs conclusions d'appel à Mme [T] et M. [P].

L'affaire a été clôturée à la date du 17 mars 2025 et renvoyée à l'audience du 13 mai 2025, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 4 septembre 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la validité de l'assignation délivrée à Mme [W] :

En application de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tier, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 du même code dispose que, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Et l'article 566 dispose que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Par ailleurs, l'article 112 du code de procédure civile dispose que la nullité des actes de procédure peut être invoquée au fur et à mesure de leur accomplissement ; mais elle est couverte si celui qui l'invoque a, postérieurement à l'acte critiqué, fait valoir des défenses au fond ou opposé une fin de non-recevoir sans soulever la nullité.

En l'espèce, Mme [W] soulève, pour la première fois en appel, la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée devant le tribunal comme ne respectant pas les dispositions de l'article 56 du code de procédure civile, faute de contenir un exposé des moyens en fait et en droit.

Les consorts [Y] soutiennent que cette demande est irrecevable comme nouvelle en appel.

Il est constant que Mme [W] n'a jamais sollicité la nullité de l'assignation devant le tribunal, alors qu'elle a conclu sur le fond du litige devant lui. La nullité invoquée, qui constitue un vice de forme, devait donc être invoquée dès la première instance.

La demande tendant à la nullité de l'assignation est donc irrecevable et ne peut être examinée.

2. Sur la nullité du contrat de vente entre Mme [T] et les consorts [Y] invoquée par M. [O] :

M. [O] réitère en appel sa demande tendant à ce que le contrat de vente du navire litigieux, intervenu entre Mme [T] et MM. [Y], soit déclaré nul et, en réponse à la fin de non-recevoir soulevée par les consorts [Y], il soutient qu'il a intérêt et qualité à invoquer cette nullité qui aurait pour effet d'entraîner la nullité de la mission qui lui a été confiée dans le cadre de cette vente.

En application de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'article 123 du même code dispose que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause.

Selon l'article 1199 du code civil, le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties. Les tiers ne peuvent ni demander l'exécution du contrat ni se voir contraints de l'exécuter.

Un tiers n'est recevable à invoquer la nullité d'un contrat que si celui-ci est de nature à créer à son égard des droits ou des obligations.

Or en l'espèce, il est constant que le contrat de vente litigieux ne crée ni obligations ni droits à l'égard de M. [O] qui y est tiers. En effet, le contrat de vente (pièce n° 8 de M. [O]) ne fait aucune référence à l'examen qu'il a réalisé sur le navire, et les moyens de nullité qu'il invoque sont sans rapport avec sa propre intervention, puisqu'ils sont fondés sur l'absence de respect de certaines formalités administratives et le prétendu défaut de qualité de propriétaire de Mme [T] au moment de la vente.

Il est donc irrecevable à invoquer la nullité du contrat de vente qui ne sera pas examinée. Le jugement déféré sera réformé sur ce point, le tribunal ayant examiné les moyens de nullité sur le fond.

3. Sur la résolution de la vente pour vice caché :

En application de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1642 du même code dispose que, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Aux termes de l'article 1643, il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Enfin, l'article 1644 du code civil dispose que, dans le ca des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

Il appartient à l'acquéreur qui entend obtenir, de la part de son vendeur, la résolution de la vente sur ce fondement, de rapporter la preuve que le vice dont il se plaint remplit toutes les conditions de ces textes, à savoir:

- un vice existant avant la vente,

- rendant la chose impropre à sa destination,

- dont il n'avait pas connaissance avant la vente.

Le sous-acquéreur, qui démontre que le vice qu'il invoque est antérieur à une vente précédente, est fondé à agir directement contre le premier vendeur pour obtenir la résolution de la vente et la réparation de ses préjudices.

En l'espèce, il est désormais constant que le navire [Localité 10], antérieurement dénommé Noa, a subi un sinistre très important en juillet 2009 à la Martinique avec échouage sur un récif, à la suite duquel il a été mis à sec pour expertise par l'assureur. Cette expertise réalisée par M. [F] le 20 septembre 2009 contient une évaluation des travaux de remise en état pour plus de 144 000 euros, pour un navire d'une valeur d'environ 170 000 euros. Le navire a alors été revendu pour le prix de 30 000 euros à M. [Z] [G], qui n'est pas l'époux de Mme [W], mais l'oncle de son mari (pièce n° 11 des consorts [Y]), ce qu'elle ne conteste pas formellement.

M. [Z] [G] a réalisé des réparations dans des conditions ignorées, aucun élément n'étant produit sur ce point. Il a fait procéder à une expertise avant assurance par M. [R] le 4 mai 2012 (pièce n° 4 de Mme [W]), laquelle déclare le navire assurable et en état pour de la navigation hauturière.

Le navire, rebaptisé [Localité 10], a été revendu en Guadeloupe par M. [Z] [G] à Mme [W] le 31 décembre 2012 pour le prix de 138 000 euros (pièce n° 5 de Mme [W]). Mme [W] a fait remplacer une partie du gréement au cours de l'année 2017, puis a vendu le bateau à M. [P] le 23 janvier 2018 après réalisation d'une expertise et évaluation par M. [O] le 15 décembre 2017, laquelle ne fait aucune mention de l'historique du navire ni des réparations dont il a fait l'objet.

Le navire a été convoyé le 26 janvier 2018 (pièce n° 3 des consorts [Y]) par un skipper professionnel, en compagnie de M. [P]. Dès le 29 janvier 2018, celui-ci a donné mandat à la société JPB Caribbean Yachts de revendre le navire ainsi qu'il est relaté ci-dessus.

Il résulte de cette chronologie, des différents actes de vente et des expertises réalisées qu'à la date de la vente du navire à MM. [Y], aucune mention de l'avarie majeure subie, ni des réparations de structure réalisées n'a été faite.

Il résulte du constat d'état établi par M. [V], expert maritime, le 25 juillet 2018, et des photographies réalisées par les consorts [Y] (pièces n° 10 et 12 des consorts [Y]), que le navire « a été réparé au niveau des fonds de coque, des contre moule longitudinaux et des cloisons structurelles de fonds de coque. Ces observations sont confirmées par la lecture du rapport sinistre de M. [F] (2009). Les observations faites à l'aide de miroirs et/ou en arrachant certains vaigrages dans les zones suspectes mises en évidence par les fissures récentes apparues lors de premières navigations par l'actuel propriétaire, montrent des traces de réparations de mauvaise qualité qui n'ont pas été effectuées dans les règles de l'art. Des observations complémentaires en navigation permettraient de mettre en évidence un manque de rigidité de l'ensemble de la plate forme (détente anormale du hauban sous le vent, mouvements importants au niveau des fissures observées, ...), qui est à l'origine de l'apparition des diverses fissures et dommages constatés [...] Dans son état actuel, il est vivement déconseillé de naviguer avec ce navire, hormis pour des petites navigations côtières au moteur ou par temps calme ou pour d'éventuels essais en mer à but d'observations complémentaires ».

Les défendeurs à l'action des consorts [Y] font valoir que ce rapport n'est pas contradictoire et ne peut valoir comme preuve des vices cachés allégués.

Toutefois, un rapport non contradictoire est un élément de preuve comme un autre qui peut être pris en compte à condition d'avoir été soumis au débat contradictoire, ce qui est bien le cas en l'espèce, et doit être corroboré par d'autres éléments.

Les constatations et analyses de M. [V] sont corroborées par les éléments qui démontrent qu'ensuite du sinistre avec échouage de 2009, le navire avait subi de très importantes avaries, atteignant la structure même de la coque (rapport de M. [F], expert maritime du 20 septembre 2009), mais également par le courrier électronique de M. [K], de la société JPB Caribbean Yachts, en date du 4 janvier 2019 (pièce n° 11 des consorts [Y]), relatant les conditions de découverte des désordres, qui explique avoir visité le bateau après les premières navigations des acquéreurs et avoir « découvert que ce bateau semblait avoir fait l'objet de réparations importantes en fond de coque, réparations que personne n'avait constatées jusqu'alors ».

M. [K] précise avoir ensuite pris contact avec la société MerMer, qui avait en charge l'exploitation du bateau avant 2009, laquelle lui a alors révélé l'existence du sinistre de juillet 2009, ainsi que la revente en épave économique à M. [Z] [G] qui a réalisé des réparations avant de le revendre à l'épouse de son neveu, Mme [W], en 2012.

Les désordres relevés par M. [V] coïncident avec les avaries relatées par M. [F] qui indique dans son rapport du 20 septembre 2009 (pièce n° 13 des consorts [Y]) que (page 5) « la structure des deux coques du catamaran est très fortement endommagée avec de nombreux délaminages, ruptures de tissus, rupture et déformation des contre moules structuraux ».

Le constructeur Fountaine Pajot, ayant pris connaissance des photographies des désordres actuels, indique, dans un courrier du 10 septembre 2024 (pièce n° 16 des consorts [Y]) : « il apparaît que ce bateau a subi de sérieux dommages dans ses deux coques. Sans le passage à bord d'un professionnel du nautisme et des matériaux composites qui confirmerai la gravité des dégâts, je recommande au propriétaire de ne pas naviguer avec son navire. Les désordres qui nous voyons touchent directement la structure du navire et remettent en cause ses aptitudes à la navigation. Une reprise sérieuse de ces désordres nécessitera de lourds travaux ».

Il convient de noter, sur la qualité des travaux réalisés par M. [Z] [G], que ceux-ci ne sont attestés par aucune facture et qu'aucun détail n'en est donné, quand bien même le rapport d'expertise préalable à assurance établi par M. [R] le 4 mai 2012 (pièce n° 4 de Mme [W]) indique (page 5) que :

« Nous avons suivi ce navire qui après un échouement a fait l'objet de réparations dont la qualité est sérieuse. La compétence des propriétaires dans ces travaux est reconnue et le navire est à ce jour au moins aussi solide que lors de son lancement ».

En effet, le contrôle visuel qu'il a réalisé, alors que les réparations étaient récentes, n'était pas de nature à révéler si les réparations avaient été effectivement faites dans les règles de l'art, ce qui est contredit par l'apparition des fissures six ans plus tard.

L'atteinte à la destination est établie en ce que le navire, en l'état dans lequel il a été vendu à MM. [Y], n'est pas en mesure de faire de la navigation hauturière dans des conditions de sécurité, alors qu'il s'agit d'un navire qui est destiné à de telles navigations.

Le fait que Mme [W] ou son époux aient pu naviguer pendant six ans, au demeurant uniquement dans les Caraïbes pour ce qui est justifié, ne suffit pas à établir que le vice n'existerait pas. En effet, les réparations effectuées entre 2009 et 2012 ont parfaitement pu être suffisantes pendant quelques années sans causer de problèmes aux propriétaires, et se révéler insuffisantes dans la durée du fait de leur non conformité aux règles de l'art au fil du temps, les contraintes exercées sur les réparations ne révélant leur fragilité et ne laissant apparaître des fissures que bien plus tard. En effet, les fissures et éclatements relatés par MM. [Y] et constatés par M. [V] sont récents et probablement apparus lors de la navigation effectuée par les acquéreurs en juin 2018.

Il résulte de ce qui précède que le navire litigieux était atteint, tant avant la vente à MM. [Y], qu'avant celles à M. [P] et Mme [T], de vices le rendant impropre à sa destination qui est la navigation hauturière, dont les acquéreurs ne pouvaient se convaincre eux-mêmes puisque masqués par de la peinture, une expertise par un professionnel ayant de surcroît été nécessaire pour en établir la gravité.

Les contrats de vente successifs conclus en janvier et avril 2018, ne contiennent aucune clause d'exonération de la garantie des vices cachés, de sorte que les acquéreurs finaux sont fondés à obtenir la résolution de la vente avec restitutions réciproques, sans qu'il soit nécessaire d'établir la connaissance formelle par Mme [W] des vices affectant le navire.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a condamné in solidum Mme [W], M. [P] et Mme [T] à payer à MM. [Y] la somme de 120 000 euros en restitution du prix de vente.

2. Sur la responsabilité de la société JPB Caribbean Yachts

En application de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Il appartient à celui qui entend rechercher la responsabilité de son cocontractant de rapporter la preuve de la faute commise par celui-ci et du préjudice subi en lien avec cette faute.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que la société JPB Caribbean Yachts s'est vue confier un mandat de vente du navire [Localité 10] par M. [P] le 29 janvier 2018 (pièce n° 1 de la société JPB Caribbean Yachts) aux termes duquel le mandataire avait pour obligations d'entreprendre « de manière générale toutes les démarches utiles pour le bon déroulement de son mandat », sans obligation spécifique quant à la recherche de l'historique du navire.

Le vendeur n'a déclaré aucun « incident, sinistre ou fortune de mer survenus à son bien », étant rappelé que Mme [W] n'a elle-même confié aucun mandat de vente à la société JPB Cribbean Yachts puisque la vente s'est conclue directement entre elle et M. [P], ce contrat n'étant d'ailleurs pas produit aux débats, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il aurait comporté une indication quelconque quant à l'existence d'un sinistre antérieur. Au demeurant, Mme [W] ne prétend pas avoir signalé à son propre acquéreur l'existence de l'échouage de juillet 2009 et ses conséquences, ni que la société JPB Cribbean Yachts aurait pu en être informée par M. [P].

La société JPB Caribbean Yachts justifie toutefois avoir contacté en février 2018 la société MerMer, chargée de la mise en location du navire avant 2009, pour obtenir des informations, lesquelles ont en réalité été erronées puisque portant sur un autre navire également dénommé Noa à l'époque (pièces n° 7 et 8 de la société JPB Caribbean Yachts), et que ce n'est qu'en juillet 2018, après la vente à MM. [Y] et l'apparition des fissures, qu'elle a finalement obtenu le véritable historique du navire. Aucun manquement dans les obligations liées au mandat de vente n'est donc établi à son encontre.

Par ailleurs, si la promesse d'achat et de vente signée le 19 mars 2018 par les consorts [Y] et M. [P] indique que « le vendeur et l'acheteur reconnaissent Caribbean Yachts en tant qu'agence de vente mandatée », il précise également que la vente est assujettie à une « visite-expertise avec inspection de la carène », cas dans lequel « l'acheteur reconnaît et accepte :

(I) Il a sélectionné un expert à son service qui sera entièrement responsable vis à vis de l'acheteur pour toute erreur ou omission nonobstant le fait que le courtier peut assister ou guider l'acheteur pour la sélection du dit expert.

(II) Il donnera instructions à ses agents ou experts afin d'inspecter ou essayer le navire en mer afin d'assurer que le navire possède les spécifications requises par l'acheteur.

(III) Tous les frais afférent à l'inspection seront à charge de l'acheteur, y compris tous les frais associés, tel que sortie et mise à l'eau, frais d'entrepôt à terre et/ou sous-traitance s'il y a lieu.

(IV) Si après expertise le bateau ne présentant aucun dommage grave, l'acheteur refuse l'achat du bateau, l'essai en mer et les coûts associés seront à la charge de l'acheteur. »

Ainsi, l'expertise préalable du navire est bien à la charge de l'acheteur, et non du mandataire, et les conclusions de cette expertise restent de la seule responsabilité de l'expert.

Par ailleurs, il n'est pas démontré par les consorts [Y] que la revente presque immédiate après achat du bateau par M. [P] serait liée aux désordres qu'ils ont eux-mêmes constatés. En effet, l'attestation du skipper qui s'est chargé du convoyage en compagnie de M. [P] (pièce n° 10 de la société JPB Caribbean Yachts) ne fait état d'aucune difficulté particulière à cette occasion, et, en l'absence de comparution de M. [P] et de Mme [T], toute interprétation de ce revirement brutal n'est que conjectures.

La société JPB Caribbean Yachts, qui n'avait pas connaissance de l'avarie subie en 2009, de parfaite bonne foi pour n'en avoir pas été informée par M. [P], ni, a fortiori, par Mme [W] avec laquelle elle n'avait pas conclu de mandat de vente, ni encore par la société MerMer qu'elle avait pourtant interrogée, et confortée dans le bon état du bateau par les deux expertises successives de M. [O], n'a donc commis aucun manquement au devoir de conseil et d'information à l'égard des acquéreurs.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas démontré par les consorts [Y] que la société JPB Caribbean Yachts ait manqué à l'une quelconque de ses obligations en qualité de mandataire qui serait la cause d'un préjudice.

Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société JPB Caribbean Yachts au paiement de dommages et intérêts.

3. Sur la responsabilité de M. [O]

Les consorts [Y] font grief au jugement déféré d'avoir écarté toute responsabilité de M. [O] qui a expertisé le navire deux fois à trois mois d'intervalle sans faire mention des vices dont il était atteint ni relater son historiques et le sinistre subi en 2009.

Toutefois, la mission confiée à M. [O], qui résulte des mentions en page 2 de son rapport (pièce n° 7 de M. [O]), précise que l'expertise « est un examen visuel détaillé, mais non destructif, des parties accessibles du navire. Aucun démontage touchant à la structure, aux équipements et aux aménagements ne sera effectué [...] les recommandations de l'expert étant faites sur la base d'un examen visuel du navire, aucune responsabilité ne pourra lui incomber si des dommages et/ou un quelconque vice caché du navire apparaissent ultérieurement et/ou à l'usage ».

Il n'existe aucun protocole réglementé quant au déroulé et au contenu d'une expertise en matière maritime, de sorte qu'il ne peut être fait reproche, par principe, à M. [O] de ne pas s'être informé de l'historique du bateau. Notamment il n'est pas obligatoire qu'une recherche ou une consultation du journal de bord soit requise, alors même que ce document est obligatoire dans un navire pratiquant de la navigation hauturière ou semi-hauturière.

Il semble en l'espèce que le journal de bord n'ait pas été transmis aux acquéreurs, et il n'est d'ailleurs pas produit, ce qui interdit de vérifier ce qui y est ou non mentionné concernant le sinistre de 2009, lequel s'est produit à proximité immédiate des côtes. Rien ne permet donc d'affirmer que la consultation du journal de bord aurait permis de constater l'existence du sinistre (étant rappelé que les instruments de bord électroniques ont été, pour la plupart, dérobés après l'échouage).

Les consorts [Y] soutiennent que M. [O] aurait nécessairement dû se renseigner sur l'historique du navire. Toutefois, ils n'expliquent pas sur quel fondement, alors que l'examen visuel du navire, tel que convenu, n'avait rien révélé de suspect et qu'il n'est pas établi que les fissures constatées par M. [V] auraient été effectivement visibles lors des deux examens successifs par M. [O], celles-ci ayant pu apparaître à l'occasion de la navigation de juin 2018.

Il n'est pas non plus démontré que celui-ci aurait été informé par Mme [W] du sinistre de 2009, dont elle seule pouvait avoir effectivement connaissance, et sur laquelle pesait un devoir d'information exhaustif sur l'historique du bien vendu.

De la même manière que pour la société JPB Caribbean Yachts, la chronologie des achat et revente du bateau par M. [P] n'est pas en elle-même suspecte faute d'élément permettant de le démontrer.

Le défaut de tension des haubans constaté par M. [O] lors de sa seconde expertise ne suffit pas non plus à démontrer qu'il aurait dû se douter de l'existence d'un problème de structure, et il convient de souligner que M. [I] [Y] indique lui-même (pièce n° 10) que les fissures qu'il a découvert avaient été réparées et masquées par une couche de peinture. L'auteur de ce maquillage n'est pas identifié, et la date à laquelle il aurait été fait ne peut être déterminée, de sorte que rien ne permet d'établir que M. [O] aurait dû s'en convaincre, que ce soit lors des examens visuels ou de l'essai en mer auxquels il a procédé, alors qu'il semble que les fissures soient apparues lors de la navigation réalisée par M. [I] [Y] en juin 2018.

M. [O] fait par ailleurs valoir à juste titre que, disposant d'un justificatif du traitement anti-osmose du bateau en 2014 (avec une erreur sur le navire concerné, du fait de la société MerMer), il était fondé à penser que les fonds de coque avaient alors été examinés par le constructeur six ans auparavant, sans mention particulière.

Il résulte de ce qui précède que MM. [Y] ne rapportent pas la preuve qui leur incombe que M. [O] aurait manqué à ses obligations contractuelles et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à son encontre.

4. Sur les demandes accessoires :

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, Mme [W], M. [P] et Mme [T], qui succombent à titre principal, supporteront in solidum les entiers dépens de première instance et d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

En l'espèce, et compte tenu des circonstances particulières de l'affaire, l'équité commande de condamner, pour les frais exposés tant en première instance qu'en appel :

- Mme [W], M. [P] et Mme [T], in solidum, à payer à MM. [Y] la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- MM. [Y] et Mme [W], in solidum, à payer à la société JPB Caribbean Yachts et à M. [O] la somme de 3 000 euros chacun sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,

Déclare irrecevable la demande de Mme [U] [W], épouse [G] tendant à prononcer la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée,

Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 9 mars 2023, sauf en ce qu'il a :

rejeté la demande aux fins de nullité du contrat de vente du navire entre M. [B] [Y] et M. [I] [Y] et M. [H] [P] et Mme [C] [T],

condamné la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de MM. [I] et [B] [Y] en réparation de leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,

condamné M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) aux entiers dépens,

condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros à MM. [I] et [B] [Y], pris indivisément, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] et la société JPB (Caribbean Yachts), à M. [B] [Y] et M. [I] [Y] au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [A] [O] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Infirmant de ces chefs, et statuant à nouveau,

Déclare M. [A] [O] irrecevable en sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat de vente intervenu entre Mme [C] [T], d'une part, et MM. [B] et [I] [Y], d'aute part,

Déboute M. [B] [Y] et M. [I] [Y] de leurs demandes formées à l'encontre de la société JPB Caribbean Yachts,

Condamne in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] aux entiers dépens, de première instance et d'appel,

Condamne in solidum M. [H] [P], Mme [C] [T], Mme [U] [W] épouse [G] à payer à M. [B] [Y] et M. [I] [Y], indivisément, la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [B] [Y], M. [I] [Y] et Mme [U] [W], épouse [G] à payer :

- à la société JPB Caribbean Yachts la somme de 3 000 euros,

- à M. [A] [O] la somme de 3 000 euros,

sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 04 septembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, en remplacement de la Présidente légalement empêchée et Madame Sylvie DURAND, Greffière pour le prononcé.

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