CA Aix-en-Provence, ch. 4-6, 5 septembre 2025, n° 21/10804
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 05 SEPTEMBRE 2025
N° 2025/226
N° RG 21/10804
N° Portalis DBVB-V-B7F-BH2NK
S.A.R.L. EUROPE PROTECTION SHOW
C/
[DR] [I]
Copie exécutoire délivrée
le : 05/09/2025
à :
- Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON
- Me Paul GUEDJ, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 23 Juin 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/00557.
APPELANTE
S.A.R.L. EUROPE PROTECTION SHOW, sise [Adresse 1]
représentée par Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur [DR] [I], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
et par Me Cécilia CABRI, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été appelée le 27 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller
Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Septembre 2025
Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
[1] La SARL EUROPE PROTECTION SHOW a embauché M. [DR] [I] suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er mars 2006 en qualité d'agent d'exploitation ' surveillant. Le salarié a été affecté à la surveillance d'un magasin Intermarché exploité par la SAS FAUGER. Le 25 juin 2018 cette dernière société écrivait à l'employeur en ces termes':
«'Suite aux attitudes déplacées de votre employé M. [I] [DR] envers les hôtesses de caisse de notre magasin nous vous demandons de bien vouloir l'exclure des effectifs rattachés à notre Intermarché à compter de ce jour.'»
[2] Le salarié a été mis à pied à titre conservatoire à compter du 26 juin 2018 puis licencié pour faute grave par lettre du 12 juillet 2018 ainsi rédigée':
«'Suite à notre entretien qui s'est tenu le 9 juillet 2018 à 11'heures dans les locaux de l'entreprise, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants': nous avons été destinataires le 25 juin 2018, d'un courrier de la direction de la SAS FAUGER exploitant sous l'enseigne Intermarché à [Localité 3], aux termes duquel il a été porté à notre connaissance que vous aviez des «'attitudes déplacées'» envers les hôtesses de caisse de leur magasin. De ce fait, nous nous sommes déplacés sur place afin d'en savoir plus sur le mécontentement de notre client chez lequel vous intervenez depuis de nombreuses années en qualité d'agent de sécurité. Il a été porté à la connaissance de la direction du magasin par une de leurs salariées que le 25 juin 2018, vous auriez tenté de la «'coincer'» contre un rayon alors même qu'elle venait dire bonjour à une autre salariée afférée à la mise en place de produits. Une fois qu'elle s'est dégagée de votre étreinte vous lui avez donné une tape sur les fesses. Interloqués par ce récit, la direction du magasin nous a invités à prendre connaissance de la vidéosurveillance qui correspondait en tous points au récit précité. Il apparaissait également que ce n'était pas la première fois que vous ne contrôliez pas vos gestes déplacés puisque d'autres salariées (toujours de sexe féminin) ont tenu à nous faire savoir que vous vous étiez habitué à cela. Soulagées par votre mise à l'écart, elles n'entendent pas pour le moment donner leur identité. Ce qui vous est reproché n'est pas digne de votre profession. Votre attitude auprès de notre client est très préjudiciable pour notre entreprise spécialisée dans la sécurité tant des biens que des personnes. Lors de l'entretien préalable du 9 juillet dernier, vous ne nous avez pas donné d'explications n'ayant de cesse que de solliciter avec le conseiller du salarié qui vous assistait que de voir les preuves. Les faits exposés oralement ont été suffisamment clairs pour que vous puissiez nous indiquer quelle était votre position, en vain. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement. Vous avez fait par ailleurs l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée le 26 juin 2018. Dès lors, la période non travaillée du 26 juin 2018 au 13'juillet 2018 ne sera pas rémunérée. À l'expiration de votre contrat de-travail, nous tiendrons à votre disposition votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle Emploi. Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement.'»
[3] Le salarié réclamait des précisions par lettre du 23 juillet 2018 ainsi rédigée':
«'Je fais suite à la lettre de licenciement datée du 12 juillet 2018 pour contester l'intégralité des accusations que vous proférez à mon encontre. Je n'ai jamais commis les faits que vous évoquez dans cette correspondance. Par ailleurs, je constate que cette lettre est totalement imprécise et particulièrement peu motivée. Je vous demande donc de me fournir ainsi que la loi vous y oblige le maximum de précisions concernant les faits reprochés. Il s'agit notamment de l'identité des personnes qui se sont plaintes de mon comportement ainsi que des détails circonstanciés des actes reprochés. Je vous demande également de me communiquer la copie du courrier que vous aurait adressé la SAS FAUGER pour se plaindre de moi ainsi que la copie des bandes de vidéo surveillance dont vous faites état.'»
[4] L'employeur répondait en ces termes le 31 juillet 2018':
«'Je fais suite à votre correspondance du 23 juillet 2018 qui n'a pas manqué de nous surprendre s'agissant de l'imprécision et de l'absence de motivation que contiendrait la lettre de licenciement pour faute grave que nous vous avons fait parvenir. Je vous rappelle que lors de l'entretien préalable du 9 juillet je vous ai fait part, devant le conseiller du salarié, des griefs portés à votre encontre. Dans la lettre de licenciement ces faits caractérisés de fautifs ont été détaillés tant en ce qui concerne leur date que leur lieu. Nous ne pouvons que regretter votre attitude des plus déplacée vis-à-vis du personnel féminin du magasin que vous aviez à surveiller. Nous vous rappelons que lors de l'entretien préalable du 9 juillet dernier, vous ne nous avez pas donné d'explications n'ayant de cesse que de solliciter avec le conseiller du salarié qui vous assistait que de voir les preuves. Les faits exposés oralement ont été suffisamment clairs pour que vous puissiez nous indiquer quelle était votre position, en vain. Nous constatons que vous contestez les faits ce qui est votre droit, néanmoins nous avons en tant qu'employeur des obligations légales qui font que nous sommes responsables si nous laissons perdurer sciemment des faits de harcèlement sexuel, étant rappelé que mettre «'une tape sur les fesses'» d'une salariée, en l'espèce, est un acte qualifiable comme tel. Bien entendu, la première chose que nous avons faite a été de mener une enquête afin de nous assurer que les allégations de la salariée du magasin étaient avérées. Puisque les faits dénoncés étaient réels, et qu'au surplus ce n'était pas la première fois, nous avons été contraints de vous sanctionner en qualité d'auteur du harcèlement. Nous regrettons énormément d'avoir été contraints d'en arriver à un licenciement pour un tel motif, mais nous n'avions aucune autre alternative.'»
[5] Contestant son licenciement, M. [DR] [I] a saisi le 27 juin 2019 le conseil de prud'hommes de Toulon, section activités diverses, lequel, par jugement rendu le 23 juin 2021, a':
dit que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse';
condamné l'employeur à verser au salarié les sommes suivantes':
18'095,00'€ à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse soit 11'mois de salaire';
''5'757,50'€ à titre d'indemnité légale de licenciement';
''3'290,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';
'''''329,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis';
''1'151,50'€ à titre de rappel de salaire sur période de mise à pied conservatoire du 26'juin 2018 au 12 juillet 2018';
'''''115,00'€ à titre de congés payés sur la période de mise à pied conservatoire';
''2'000,00'€ au titre des frais irrépétibles';
ordonné la remise des documents suivants sous astreinte de 50'€ par jour de retard à compter du 15e jour du prononcé de la décision':
attestation Pôle Emploi rectifiée';
certificat de travail rectifié';
bulletin de paye rectifié';
débouté le salarié du surplus de ses demandes';
débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle';
condamné l'employeur aux dépens.
[6] Cette décision a été notifiée le 24 juin 2021 à la SARL EUROPE PROTECTION SHOW qui en a interjeté appel suivant déclaration du 19 juillet 2021. L'instruction a été clôturée par ordonnance du 25 avril 2025.
[7] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 15 octobre 2021 aux termes desquelles la SARL EUROPE PROTECTION SHOW demande à la cour de':
infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';
dire que le licenciement pour faute grave est parfaitement justifié';
débouter le salarié de l'intégralité de ses demandes d'indemnités et salariales';
condamner le salarié au paiement de la somme de 2'500'€ au titre des frais irrépétibles.
[8] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 9 avril 2025 aux termes desquelles M.'[DR] [I] demande à la cour de':
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':
dit que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse';
condamné l'employeur à lui verser les sommes suivantes':
5'757,50'€ à titre d'indemnité légale de licenciement';
3'290,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';
'''329,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payé sur préavis';
1'151,50'€ à titre de rappel de salaire sur période de mise à pied conservatoire du 26'juin 2018 au 12 juillet 2018';
'''115,00'€ à titre de congés payés sur la période de mise à pied conservatoire';
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur à lui verser la somme de 18'095'€ à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 11'mois de salaire et l'a débouté de sa demande au titre du préjudice moral';
condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes':
40'000'€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';
10'000'€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier lié au caractère vexatoire du licenciement pour faute grave';
''4'000'€ au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ ' MONTERO ' DAVAL GUEDJ sur son offre de droit.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la faute grave
[9] Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve des faits énoncés dans la lettre de licenciement ainsi que dans la lettre précisant les motifs de ce dernier afin de justifier une mesure de licenciement pour faute grave.
[10] En l'espèce, l'employeur produit les attestations suivantes':
''Mme [GE] [R], le 26 juin 2018':
«'Je soussigné Mlle [R] [GE] fait partie de votre entreprise depuis septembre 2017. Atteste par la présente vous relater les faits de M. [I] [DR] en mon égard'
- Il a placé sa main vers l'aine, je lui ai dit d'arrêter et de retirer sa main chose qu'il a faite, car j'ai insisté en lui disant que j'allais aller plus loin et le dire à quelqu'un plus au-dessus et il m'a répondu': «'Mais personne peut rien dans moi Intermarché il ne fonctionnerait pas.'» il m'a plaqué contre le rayon gâteaux et quand je pars en [illisible] que le lui met une claque sur la main.
- Un autre jour j'arrive pour lui dire bonjour, il me lèche la joue du coup je lui dis de plus jamais recommence, ça me dégoûte' Alors j'ai pris la décision de plus lui dire bonjour mais pouvais pas continuer, car je travaille avec lui'
- Quand il se met vers les caisses il me regarde se lèche la bouche mais le pire dans tout ça c'est qu'il trouve ça rigolo alors que pas du tout, devant les clients il nous traite de cotorepe (nous parce qu'il le fait pas que à moi). Je n'en parlais pas car c'est ma parole conte la sienne donc je gardais tout pour moi car moi à Intermarché je ne suis pas en CDI mais en contrat saisonnier donc j'avais peur de perdre ma place alors que je suis bien dans cette entreprise.
- De toute façon c'est simple dès qu'une belle fille, femme, venait [DR] était à l'affût il les suivait quand elles passaient en caisse on pouvait être sûr que [DR] était pas très loin. [suivent 8 lignes difficilement lisibles]
- Voilà je pense avoir tout dit, je suis désolée de l'avoir signalé que maintenant mais c'est délicat à dire puis j'avais peur de perdre ma place.'»
''Mme [SV] [IX], le 26 juin 2018':
«'Je soussignée Mme [IX] [SV] avoir été témoin d'une attitude déplacée du surveillant [DR] à l'encontre de la caissière [GE].'»
''M. [BP] [MO]':
«'Suite à la demande de Mme [DL] [PH], responsable de caisse de l'Intermarché de [Localité 3], j'ai été témoin de la scène où M. [I] [DR] a eu un contact déplacé sir Mme [R] [GE] (via la vidéosurveillance). En effet celui-ci l'attrape par le bras et lorsqu'elle est repartie, il lui a mis une tape sur les fesses. De plus, cela faisait plusieurs fois que Mme [R], ainsi que d'autres employées du magasin me rapportaient des faits (gestes déplacés, etc.) mais il n'y avait aucune preuve que l'on puisse utiliser afin d'intervenir.'
''Mme [PH] [XW] épouse [DL]':
«'Je soussignée Mme [DL] [PH] atteste que Mlle [R] [GE] est venue me voir en m'expliquant que l'agent de sécurité, [I] [DR], se permettait des gestes et paroles déplacés à son égard depuis quelque temps. Après cela, j'ai demandé à l'agent de sécurité de service de visionner les caméras de surveillance. Le lundi 25 juin 2018, j'en ai référé à Mme'[K] [PC] [C], la PDG du magasin.'»
«'Je soussignée [DL] [PH] atteste avoir visionné les caméras de surveillance et avoir vu une attitude déplacée du surveillant [I] [DR] envers [R] [GE] une hôtesse de caisse.'»
''[C] [K] [PC]':
«'Le lundi 25 juin 2018, ma cheffe de caisse [PH] [DL] m'a remonté comme information des faits de harcèlement sexuel fait par le surveillant en poste dans notre magasin [DR] [I]. Nous avons pu constater les faits avec les images de la vidéo. Après différentes recherches au sein des employés nous avons constaté qu'il usait de son lien de subordination et d'ancienneté pour faire du chantage après de différentes hôtesses de caisse qu'il harcelait sexuellement par des mots, des gestes et par son comportement.'»
«'Je soussignée [C] [K] [PC], demeurant ['] atteste sur l'honneur que les faits se sont bien passés le samedi 23 juin 2018 et ils m'ont été visionnés et relatés par écrit le lundi 25 juin 2018.'»
[11] Le salarié conteste les faits qui lui sont reprochés et produit des témoignages de bonne moralité de M. [TZ] [I], Mmes [PH] [F], [D] [VI], [IS] [LK], [S] [A], M. [E] [F], Mme [LF] [Y], MM [CU] [P], [W] [A], Mmes [H] [I], [CH] [N], [L] [UE], [GE] [HN], M. [NY] [J], Mme [RL] [YB], MM. [U] [V], [O] [G], [M] [KB], Mmes'[MU] [KB], [WS] [V], [AY] [HI], [Z] [EV], [X] [B] et Monsieur [T] [ZF]. Il ajoute qu'il résulte de son planning qu'il ne travaillait pas le 25 juin 2018.
[12] La cour retient que l'employeur justifie suffisamment par les témoignages concordants et précis qu'il produit que le salarié s'est bien livré le samedi 23 juin 2018 à une agression sexuelle sur la personne de Mme [GE] [R]. L'erreur matérielle de date figurant dans la lettre de licenciement qui fait état du 25 juin 2018 est sans incidence sur la description précise des faits relatés par cette même lettre de licenciement et parfaitement corroborés par les déclarations de la victime autant que par les témoins qui ont visionné l'enregistrement vidéo de la scène. Dès lors, la moralité du salarié apparaît indifférente à la gravité de la faute commise laquelle justifiait la mise à pied conservatoire et s'opposait à la poursuite de la relation contractuelle même durant le préavis. En conséquence, le salarié sera débouté de ses demandes de rappel de salaire sur mise à pied et congés payés y afférents, indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité de licenciement et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
2/ Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
[13] Le salarié sollicite la somme de 10'000'€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire énonçant qu'il a subi une profonde humiliation vis-à-vis de sa famille, de ses collègues, de son entourage et du milieu professionnel dans lequel il évolue, suite aux accusations à connotation sexuelle qui nuisent, encore aujourd'hui, à sa réputation. Mais il n'apparaît pas que l'employeur ait entouré la procédure de licenciement de circonstances vexatoires alors qu'il se trouvait contraint de préserver l'intégrité physique et psychique des collaboratrices de son client. En conséquence, le salarié sera débouté de ce chef de demande.
3/ Sur les autres demandes
[14] Il convient d'allouer à l'employeur la somme de 2'000'€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le salarié supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement est bien fondé sur une faute grave.
Déboute M. [DR] [I] de toutes ses demandes.
Condamne M. [DR] [I] à payer à la SARL EUROPE PROTECTION SHOW la somme de 2'000'€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Condamne M. [DR] [I] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 05 SEPTEMBRE 2025
N° 2025/226
N° RG 21/10804
N° Portalis DBVB-V-B7F-BH2NK
S.A.R.L. EUROPE PROTECTION SHOW
C/
[DR] [I]
Copie exécutoire délivrée
le : 05/09/2025
à :
- Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON
- Me Paul GUEDJ, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 23 Juin 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/00557.
APPELANTE
S.A.R.L. EUROPE PROTECTION SHOW, sise [Adresse 1]
représentée par Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur [DR] [I], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
et par Me Cécilia CABRI, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été appelée le 27 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller
Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Septembre 2025
Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
[1] La SARL EUROPE PROTECTION SHOW a embauché M. [DR] [I] suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er mars 2006 en qualité d'agent d'exploitation ' surveillant. Le salarié a été affecté à la surveillance d'un magasin Intermarché exploité par la SAS FAUGER. Le 25 juin 2018 cette dernière société écrivait à l'employeur en ces termes':
«'Suite aux attitudes déplacées de votre employé M. [I] [DR] envers les hôtesses de caisse de notre magasin nous vous demandons de bien vouloir l'exclure des effectifs rattachés à notre Intermarché à compter de ce jour.'»
[2] Le salarié a été mis à pied à titre conservatoire à compter du 26 juin 2018 puis licencié pour faute grave par lettre du 12 juillet 2018 ainsi rédigée':
«'Suite à notre entretien qui s'est tenu le 9 juillet 2018 à 11'heures dans les locaux de l'entreprise, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants': nous avons été destinataires le 25 juin 2018, d'un courrier de la direction de la SAS FAUGER exploitant sous l'enseigne Intermarché à [Localité 3], aux termes duquel il a été porté à notre connaissance que vous aviez des «'attitudes déplacées'» envers les hôtesses de caisse de leur magasin. De ce fait, nous nous sommes déplacés sur place afin d'en savoir plus sur le mécontentement de notre client chez lequel vous intervenez depuis de nombreuses années en qualité d'agent de sécurité. Il a été porté à la connaissance de la direction du magasin par une de leurs salariées que le 25 juin 2018, vous auriez tenté de la «'coincer'» contre un rayon alors même qu'elle venait dire bonjour à une autre salariée afférée à la mise en place de produits. Une fois qu'elle s'est dégagée de votre étreinte vous lui avez donné une tape sur les fesses. Interloqués par ce récit, la direction du magasin nous a invités à prendre connaissance de la vidéosurveillance qui correspondait en tous points au récit précité. Il apparaissait également que ce n'était pas la première fois que vous ne contrôliez pas vos gestes déplacés puisque d'autres salariées (toujours de sexe féminin) ont tenu à nous faire savoir que vous vous étiez habitué à cela. Soulagées par votre mise à l'écart, elles n'entendent pas pour le moment donner leur identité. Ce qui vous est reproché n'est pas digne de votre profession. Votre attitude auprès de notre client est très préjudiciable pour notre entreprise spécialisée dans la sécurité tant des biens que des personnes. Lors de l'entretien préalable du 9 juillet dernier, vous ne nous avez pas donné d'explications n'ayant de cesse que de solliciter avec le conseiller du salarié qui vous assistait que de voir les preuves. Les faits exposés oralement ont été suffisamment clairs pour que vous puissiez nous indiquer quelle était votre position, en vain. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement. Vous avez fait par ailleurs l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée le 26 juin 2018. Dès lors, la période non travaillée du 26 juin 2018 au 13'juillet 2018 ne sera pas rémunérée. À l'expiration de votre contrat de-travail, nous tiendrons à votre disposition votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle Emploi. Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement.'»
[3] Le salarié réclamait des précisions par lettre du 23 juillet 2018 ainsi rédigée':
«'Je fais suite à la lettre de licenciement datée du 12 juillet 2018 pour contester l'intégralité des accusations que vous proférez à mon encontre. Je n'ai jamais commis les faits que vous évoquez dans cette correspondance. Par ailleurs, je constate que cette lettre est totalement imprécise et particulièrement peu motivée. Je vous demande donc de me fournir ainsi que la loi vous y oblige le maximum de précisions concernant les faits reprochés. Il s'agit notamment de l'identité des personnes qui se sont plaintes de mon comportement ainsi que des détails circonstanciés des actes reprochés. Je vous demande également de me communiquer la copie du courrier que vous aurait adressé la SAS FAUGER pour se plaindre de moi ainsi que la copie des bandes de vidéo surveillance dont vous faites état.'»
[4] L'employeur répondait en ces termes le 31 juillet 2018':
«'Je fais suite à votre correspondance du 23 juillet 2018 qui n'a pas manqué de nous surprendre s'agissant de l'imprécision et de l'absence de motivation que contiendrait la lettre de licenciement pour faute grave que nous vous avons fait parvenir. Je vous rappelle que lors de l'entretien préalable du 9 juillet je vous ai fait part, devant le conseiller du salarié, des griefs portés à votre encontre. Dans la lettre de licenciement ces faits caractérisés de fautifs ont été détaillés tant en ce qui concerne leur date que leur lieu. Nous ne pouvons que regretter votre attitude des plus déplacée vis-à-vis du personnel féminin du magasin que vous aviez à surveiller. Nous vous rappelons que lors de l'entretien préalable du 9 juillet dernier, vous ne nous avez pas donné d'explications n'ayant de cesse que de solliciter avec le conseiller du salarié qui vous assistait que de voir les preuves. Les faits exposés oralement ont été suffisamment clairs pour que vous puissiez nous indiquer quelle était votre position, en vain. Nous constatons que vous contestez les faits ce qui est votre droit, néanmoins nous avons en tant qu'employeur des obligations légales qui font que nous sommes responsables si nous laissons perdurer sciemment des faits de harcèlement sexuel, étant rappelé que mettre «'une tape sur les fesses'» d'une salariée, en l'espèce, est un acte qualifiable comme tel. Bien entendu, la première chose que nous avons faite a été de mener une enquête afin de nous assurer que les allégations de la salariée du magasin étaient avérées. Puisque les faits dénoncés étaient réels, et qu'au surplus ce n'était pas la première fois, nous avons été contraints de vous sanctionner en qualité d'auteur du harcèlement. Nous regrettons énormément d'avoir été contraints d'en arriver à un licenciement pour un tel motif, mais nous n'avions aucune autre alternative.'»
[5] Contestant son licenciement, M. [DR] [I] a saisi le 27 juin 2019 le conseil de prud'hommes de Toulon, section activités diverses, lequel, par jugement rendu le 23 juin 2021, a':
dit que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse';
condamné l'employeur à verser au salarié les sommes suivantes':
18'095,00'€ à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse soit 11'mois de salaire';
''5'757,50'€ à titre d'indemnité légale de licenciement';
''3'290,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';
'''''329,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis';
''1'151,50'€ à titre de rappel de salaire sur période de mise à pied conservatoire du 26'juin 2018 au 12 juillet 2018';
'''''115,00'€ à titre de congés payés sur la période de mise à pied conservatoire';
''2'000,00'€ au titre des frais irrépétibles';
ordonné la remise des documents suivants sous astreinte de 50'€ par jour de retard à compter du 15e jour du prononcé de la décision':
attestation Pôle Emploi rectifiée';
certificat de travail rectifié';
bulletin de paye rectifié';
débouté le salarié du surplus de ses demandes';
débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle';
condamné l'employeur aux dépens.
[6] Cette décision a été notifiée le 24 juin 2021 à la SARL EUROPE PROTECTION SHOW qui en a interjeté appel suivant déclaration du 19 juillet 2021. L'instruction a été clôturée par ordonnance du 25 avril 2025.
[7] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 15 octobre 2021 aux termes desquelles la SARL EUROPE PROTECTION SHOW demande à la cour de':
infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';
dire que le licenciement pour faute grave est parfaitement justifié';
débouter le salarié de l'intégralité de ses demandes d'indemnités et salariales';
condamner le salarié au paiement de la somme de 2'500'€ au titre des frais irrépétibles.
[8] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 9 avril 2025 aux termes desquelles M.'[DR] [I] demande à la cour de':
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':
dit que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse';
condamné l'employeur à lui verser les sommes suivantes':
5'757,50'€ à titre d'indemnité légale de licenciement';
3'290,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';
'''329,00'€ à titre d'indemnité compensatrice de congés payé sur préavis';
1'151,50'€ à titre de rappel de salaire sur période de mise à pied conservatoire du 26'juin 2018 au 12 juillet 2018';
'''115,00'€ à titre de congés payés sur la période de mise à pied conservatoire';
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur à lui verser la somme de 18'095'€ à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 11'mois de salaire et l'a débouté de sa demande au titre du préjudice moral';
condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes':
40'000'€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';
10'000'€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier lié au caractère vexatoire du licenciement pour faute grave';
''4'000'€ au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ ' MONTERO ' DAVAL GUEDJ sur son offre de droit.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la faute grave
[9] Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve des faits énoncés dans la lettre de licenciement ainsi que dans la lettre précisant les motifs de ce dernier afin de justifier une mesure de licenciement pour faute grave.
[10] En l'espèce, l'employeur produit les attestations suivantes':
''Mme [GE] [R], le 26 juin 2018':
«'Je soussigné Mlle [R] [GE] fait partie de votre entreprise depuis septembre 2017. Atteste par la présente vous relater les faits de M. [I] [DR] en mon égard'
- Il a placé sa main vers l'aine, je lui ai dit d'arrêter et de retirer sa main chose qu'il a faite, car j'ai insisté en lui disant que j'allais aller plus loin et le dire à quelqu'un plus au-dessus et il m'a répondu': «'Mais personne peut rien dans moi Intermarché il ne fonctionnerait pas.'» il m'a plaqué contre le rayon gâteaux et quand je pars en [illisible] que le lui met une claque sur la main.
- Un autre jour j'arrive pour lui dire bonjour, il me lèche la joue du coup je lui dis de plus jamais recommence, ça me dégoûte' Alors j'ai pris la décision de plus lui dire bonjour mais pouvais pas continuer, car je travaille avec lui'
- Quand il se met vers les caisses il me regarde se lèche la bouche mais le pire dans tout ça c'est qu'il trouve ça rigolo alors que pas du tout, devant les clients il nous traite de cotorepe (nous parce qu'il le fait pas que à moi). Je n'en parlais pas car c'est ma parole conte la sienne donc je gardais tout pour moi car moi à Intermarché je ne suis pas en CDI mais en contrat saisonnier donc j'avais peur de perdre ma place alors que je suis bien dans cette entreprise.
- De toute façon c'est simple dès qu'une belle fille, femme, venait [DR] était à l'affût il les suivait quand elles passaient en caisse on pouvait être sûr que [DR] était pas très loin. [suivent 8 lignes difficilement lisibles]
- Voilà je pense avoir tout dit, je suis désolée de l'avoir signalé que maintenant mais c'est délicat à dire puis j'avais peur de perdre ma place.'»
''Mme [SV] [IX], le 26 juin 2018':
«'Je soussignée Mme [IX] [SV] avoir été témoin d'une attitude déplacée du surveillant [DR] à l'encontre de la caissière [GE].'»
''M. [BP] [MO]':
«'Suite à la demande de Mme [DL] [PH], responsable de caisse de l'Intermarché de [Localité 3], j'ai été témoin de la scène où M. [I] [DR] a eu un contact déplacé sir Mme [R] [GE] (via la vidéosurveillance). En effet celui-ci l'attrape par le bras et lorsqu'elle est repartie, il lui a mis une tape sur les fesses. De plus, cela faisait plusieurs fois que Mme [R], ainsi que d'autres employées du magasin me rapportaient des faits (gestes déplacés, etc.) mais il n'y avait aucune preuve que l'on puisse utiliser afin d'intervenir.'
''Mme [PH] [XW] épouse [DL]':
«'Je soussignée Mme [DL] [PH] atteste que Mlle [R] [GE] est venue me voir en m'expliquant que l'agent de sécurité, [I] [DR], se permettait des gestes et paroles déplacés à son égard depuis quelque temps. Après cela, j'ai demandé à l'agent de sécurité de service de visionner les caméras de surveillance. Le lundi 25 juin 2018, j'en ai référé à Mme'[K] [PC] [C], la PDG du magasin.'»
«'Je soussignée [DL] [PH] atteste avoir visionné les caméras de surveillance et avoir vu une attitude déplacée du surveillant [I] [DR] envers [R] [GE] une hôtesse de caisse.'»
''[C] [K] [PC]':
«'Le lundi 25 juin 2018, ma cheffe de caisse [PH] [DL] m'a remonté comme information des faits de harcèlement sexuel fait par le surveillant en poste dans notre magasin [DR] [I]. Nous avons pu constater les faits avec les images de la vidéo. Après différentes recherches au sein des employés nous avons constaté qu'il usait de son lien de subordination et d'ancienneté pour faire du chantage après de différentes hôtesses de caisse qu'il harcelait sexuellement par des mots, des gestes et par son comportement.'»
«'Je soussignée [C] [K] [PC], demeurant ['] atteste sur l'honneur que les faits se sont bien passés le samedi 23 juin 2018 et ils m'ont été visionnés et relatés par écrit le lundi 25 juin 2018.'»
[11] Le salarié conteste les faits qui lui sont reprochés et produit des témoignages de bonne moralité de M. [TZ] [I], Mmes [PH] [F], [D] [VI], [IS] [LK], [S] [A], M. [E] [F], Mme [LF] [Y], MM [CU] [P], [W] [A], Mmes [H] [I], [CH] [N], [L] [UE], [GE] [HN], M. [NY] [J], Mme [RL] [YB], MM. [U] [V], [O] [G], [M] [KB], Mmes'[MU] [KB], [WS] [V], [AY] [HI], [Z] [EV], [X] [B] et Monsieur [T] [ZF]. Il ajoute qu'il résulte de son planning qu'il ne travaillait pas le 25 juin 2018.
[12] La cour retient que l'employeur justifie suffisamment par les témoignages concordants et précis qu'il produit que le salarié s'est bien livré le samedi 23 juin 2018 à une agression sexuelle sur la personne de Mme [GE] [R]. L'erreur matérielle de date figurant dans la lettre de licenciement qui fait état du 25 juin 2018 est sans incidence sur la description précise des faits relatés par cette même lettre de licenciement et parfaitement corroborés par les déclarations de la victime autant que par les témoins qui ont visionné l'enregistrement vidéo de la scène. Dès lors, la moralité du salarié apparaît indifférente à la gravité de la faute commise laquelle justifiait la mise à pied conservatoire et s'opposait à la poursuite de la relation contractuelle même durant le préavis. En conséquence, le salarié sera débouté de ses demandes de rappel de salaire sur mise à pied et congés payés y afférents, indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité de licenciement et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
2/ Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
[13] Le salarié sollicite la somme de 10'000'€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire énonçant qu'il a subi une profonde humiliation vis-à-vis de sa famille, de ses collègues, de son entourage et du milieu professionnel dans lequel il évolue, suite aux accusations à connotation sexuelle qui nuisent, encore aujourd'hui, à sa réputation. Mais il n'apparaît pas que l'employeur ait entouré la procédure de licenciement de circonstances vexatoires alors qu'il se trouvait contraint de préserver l'intégrité physique et psychique des collaboratrices de son client. En conséquence, le salarié sera débouté de ce chef de demande.
3/ Sur les autres demandes
[14] Il convient d'allouer à l'employeur la somme de 2'000'€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le salarié supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement est bien fondé sur une faute grave.
Déboute M. [DR] [I] de toutes ses demandes.
Condamne M. [DR] [I] à payer à la SARL EUROPE PROTECTION SHOW la somme de 2'000'€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Condamne M. [DR] [I] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT