CA Montpellier, ch. com., 9 septembre 2025, n° 25/00557
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 09 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 25/00557 - N° Portalis DBVK-V-B7J-QRAZ
Décision déférée à la Cour :
Arrêt du 19 AVRIL 2023
COUR DE CASSATION DE [Localité 15]
N° RG 315 f-d
APPELANT :
Monsieur [H] [W]
né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 16]
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Maître [E] [Z] es-qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [H] [W]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représenté par Me Raymond ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DES PYRENEES ORIENTALES pris en la personne de son Bâtonnier en exercice y domicilié
Palais de Justice
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représentée par Me Eric NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER
MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL
Représenté par Monsieur Damien KINCHER, avocat général
Ordonnance de clôture du 03.06.2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2025, en chambre du conseil, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :
Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre
M. Thibault GRAFFIN, conseiller
M. Fabrice VETU, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Gaëlle DELAGE
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public représenté lors des débats par Damien KINCHER, avocat général.
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Gaëlle DELAGE, greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE
M. [H] [W] est inscrit au tableau de l'ordre des avocats des Pyrénées orientales ; il exerce son activité dans des locaux qui lui sont donnés à bail sis [Adresse 12].
Par décision du 18 octobre 2018, le conseil de l'ordre des avocats a prononcé son omission, à compter du 18 octobre 2018, du tableau de l'ordre, au motif que celui-ci n'avait pas respecté l'échéancier auquel il s'était engagé pour le règlement de sa dette à la Caisse nationale des barreaux français (la CNBF) s'élevant alors à la somme de 22 252,11 euros.
Par arrêt en date du 14 mai2019, la1ère chambre de la cour de céans a confirmé cette décision.
Par exploit du 8 janvier 2019, l'URSSAF du Languedoc-Roussillon a fait assigner M. [W] devant le tribunal de grande instance de Perpignan en redressement judiciaire, en invoquant une créance d'un montant total de 12 673,61 euros, exigible en vertu de sept contraintes vainement émises entre le 21 août 2017 et le 11 juin 2018, et en dépit de deux saisies-attribution opérées les 31 juillet 2017 et le 1er août 2018.
L'URSSAF a attrait en la cause le 16 janvier 2019 l'ordre des avocats du barreau des Pyrénées orientales.
Par jugement du 4 juillet 2019 devenu définitif, le tribunal de grande instance de Perpignan a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. [W], nommé Me [Z] en qualité de mandataire judiciaire, fixé au 8 janvier 2019 la date de cessation des paiements, ouvert une période d'observation en vue de l'élaboration d'un plan de redressement et désigné M. [B], commissaire-priseur, aux fins de réaliser un inventaire et la prisée du patrimoine du débiteur.
L'inventaire des actifs mobiliers de M. [W] été réalisé le 2 septembre 2019 dans ses locaux professionnels en sa présence et celle d'un représentant du bâtonnier de l'ordre des avocats.
Le commissaire-priseur a arrêté la valeur du matériel d'exploitation à la somme de 1565 euros pour une valeur de réalisation de 445 euros.
Le 31 juillet 2019, M. [W], après l'échec d'une première demande, a sollicité sa réinscription au barreau des Pyrénées-orientales.
Par décision du 5 septembre 2019, le conseil de l'ordre des avocats a rejeté cette demande, motif pris de ce que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, interdisant désormais à M. [W] de régler les sommes dues à la CNBF, n'emportait pas pour autant règlement des causes de l'omission du tableau.
Le 13 septembre 2019, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau des Pyrénées orientales a déposé plainte entre les mains du procureur général près la cour d'appel de Montpellier contre M. [W] pour exercice illégal de la profession d'avocat, l'intéressé ayant déposé, pour le compte de clients, malgré son omission, des conclusions via le RPVA devant la cour d'appel.
Le 23 septembre 2019, Me [Z], mandataire judiciaire, a déposé un avis sollicitant la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire en faisant valoir notamment que l'endettement de M. [W] avoisinait les 200 000 euros, endettement bancaire compris, que l'intéressé, omis du tableau, était sans activité professionnelle et que ne détenant pas les relevés de compte de M. [W], le montant de la trésorerie éventuellement disponible était inconnu.
Par jugement du 14 novembre 2019, le tribunal a sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir de la cour sur le recours formé par M. [W] contre la décision du 5 septembre 2019 ayant rejeté sa demande de réinscription au tableau.
Par arrêt du 30 novembre 2020, la 1ère chambre a infirmé la décision du conseil de l'ordre et ordonné la réinscription au tableau de l'ordre de M. [W] à la date de l'arrêt, en retenant qu'eu égard au principe de l'interdiction des paiements posé à l'article L. 622-5 du code de commerce, il ne pouvait être reproché à l'intéressé de ne pas s'être acquitté du reliquat de sa dette auprès de la CNBF de sorte que le motif d'omission du tableau prévu à l'article 105 2° du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ne pouvait pas fonder la décision.
Le 4 janvier 2021, Me [Z], mandataire judiciaire au redressement de M. [W], a déposé un nouveau rapport, sollicitant la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Par jugement du 18 janvier 2021 devenu définitif, le tribunal correctionnel de Montpellier a condamné M. [W] à une peine d'emprisonnement avec sursis pour exercice illégal de la profession d'avocat pour faits commis du 15 mai 2019 au 13 septembre 2019 et pour faux et usage de faux commis courant septembre 2019.
Par arrêt du 26 janvier 2021, la 1ère chambre de la cour de céans a déclaré nulle et non avenue la décision du conseil de l'ordre du barreau des Pyrénées orientales du 23 novembre 2020 ayant prononcé une sanction disciplinaire à l'égard de M [W].
Par jugement contradictoire (le jugement déféré) en date du 11 mars 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :
- prononcé la conversion du redressement en liquidation judiciaire de M. [W],
- nommé Me [Z] en qualité de liquidateur,
- mis fin à la période d'observation
- et fixé à 18 mois à compter du jugement le délai au terme duquel la clôture de la procédure devrait être examinée par le tribunal.
Entre-temps, ce tribunal, saisi d'une requête en omission de statuer de la part de Me [Z] ès qualités, relativement à la désignation du bâtonnier de l'ordre aux fins d'exercer les actes de la profession d'avocat conformément aux dispositions de l'article R. 641-36 du code de commerce, par un jugement du 15 avril 2021, s'est déclaré incompétent pour connaître de cette requête la cour étant saisie.
Statuant sur l'appel formé par M. [U], la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier, par arrêt contradictoire du 1er juillet 2021, a confirmé dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan en date du 11 mars 2021, y ajoutant, désigné le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales ave faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [W], les actes de la profession, et dit que les dépens d'appel doivent être employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Cet arrêt a été cassé et annulé en toutes ses dispositions par un arrêt de la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation du 19 avril 2023, faute d'avis émis par le ministère public.
Désignée comme juridiction de renvoi, la cour de ce siège a été saisie par M. [H] [W], par déclaration du 23 janvier 2025.
Par dernières conclusions du 3 juin 2025, il demande à la cour au visa des articles R. 631-24 du code de commerce, 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,1240 du code civil, et L 111-5 du code de l'organisation judiciaire :
A- in limine litis
de constater sinon prononcer la nullité du jugement du 11 mars 2021 prononçant sa liquidation judiciaire, ès qualités d' avocat, et renvoyer toutes les parties à mieux pourvoir pour défaut de saisine régulière du tribunal de Perpignan ;
de juger que cette nullité de jugement rétroagira sur la période d'observation qui n'a plus lieu d'être et de renvoyer à nouveau toutes les parties à mieux se pourvoir ;
B- au fond et en tout état de cause,
de constater la violation manifeste des dispositions de l'article 6 §1 de la convention européenne des droits de l'homme, à la seule vue de la composition du tribunal en son audience du 11 mars 2021 ;
- d'annuler par conséquent en toutes ses dispositions le jugement du 11 mars 2021 prononçant sa liquidation judiciaire et renvoyer toutes les parties à mieux se pourvoir ;
C- en réparation de ses préjudices,
- de déclarer recevables es prétentions indemnitaires ;
- de condamner Me [Z], ès qualités, ou tout succombant à lui payer les sommes suivantes :
au titre des préjudices directs, 45 000 euros suite à la suite vente irrégulière de l'appartement type studio sis au [Adresse 9], vente effectuée le 8 septembre 2023 et 208 000 euros au titre de la perte de revenus entre 2021-2025 liée à la perte de son activité professionnelle ;
200 000 euros au titre de la perte de chance liée à son préjudice indirect ;
1euro symbolique au titre de son préjudice moral ;
5000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile
de juger que toutes les condamnations seront opposables à titre personnel à Me [Z] et au besoin à son assurance responsabilité professionnelle ;
et en toute hypothèse, de rejeter l'ensemble des demandes adverses.
Par conclusions du 26 mai 2025, Mme [E] [Z], agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. [W], demande à la cour :
de confirmer le jugement du 11 mars 2021 en toutes ses dispositions ;
de juger qu'aucune demande indemnitaire n'est dirigée à son encontre ;
de juger irrecevables l'ensemble des demandes indemnitaires de M. [H] [W] au visa des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;
de débouter M. [H] [W] de l'intégralité de ses demandes ;
de le condamner reconventionnellement à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, avec distraction.
Par conclusions du 27 mai 2025, l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées-Orientales demande à la cour de rejeter la demande de nullité et d'annulation du jugement du 11 mars 2021, de confirmer ledit jugement, de débouter M. [W] de ses demandes indemnitaires, et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Par conclusions communiquées aux autres parties par RPVA le 29 janvier 2025 le ministère public demande à la cour de confirmer le jugement déféré, pour les mêmes motifs.
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est datée du 3 juin 2025.
MOTIFS
Sur le premier moyen de nullité
M. [W] fait valoir en premier lieu que le jugement déféré du 11 mars 2021 fait mention d'un rapport sur la base duquel la liquidation a été prononcée, alors que la mention, évoquant la liquidation, qui en est faite par l'administrateur judiciaire dans son rapport, ne constitue pas une demande de conversion de redressement en liquidation, de sorte que le tribunal qui n'était saisi d'aucune requête, s'est saisi d'office au mépris des dispositions de l'article R. 631-3 du code de commerce, et que sa décision est nulle et non avenue.
L'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales et le liquidateur répondent qu'en application de l'article L631-15 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, soit la version en vigueur du 15 février 2009 au 1er octobre 2021, en période d'observation, le tribunal peut prononcer la liquidation judiciaire à tout moment à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office ; que la demande qui a été formée n'obéit à aucune forme ; qu'elle a été contradictoirement débattue à l'audience à laquelle le débiteur, convoqué, était bien présent.
La cour relève qu'il ressort des rapports successifs de Me [Z] sur le déroulement de la procédure de redressement que ce liquidateur conclut sans équivoque le 24 septembre 2019, (« tenant ce qui précède, l'exposante [le mandataire judiciaire] ne peut s'associer à une demande de prolongation de la période d'observation et sollicite la conversion de ce redressement en liquidation judiciaire ») puis à nouveau le 1er février 2021, au rejet de la demande de prolongation de la période d'observation et à la conversion de la procédure de redressement judiciaire de M. [W] en liquidation judiciaire.
Le jugement de conversion déféré a été rendu sur ce le 11 mars 2021 après convocation de M. [H] [W] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée par Mme [P], greffière du tribunal judiciaire de Perpignan le 8 décembre 2020, convocation sur laquelle figurait clairement le motif de la convocation :
« objet : Statuer sur la demande de conversion de redressement judiciaire en liquidation judiciaire ».
Le premier rapport a été traité comme une requête du mandataire et a donné lieu à ue première puis la seconde convocation explicite supra, de sorte que M. [W] qui était déjà informé de ce que le mandataire demandait la conversion du redressement en liquidation, et des motifs de Me [Z], a sollicité et obtenu qu'il soit sursis sur cette demande dans l'attente des recours qu'il avait formés par ailleurs, de nature selon lui, précisément, à contrecarrer l'argumentaire connu donc de lui.
Aucun manquement au principe du contradictoire et aucun grief n'ont été causés à M. [W] issu de ce que « le rapport » du mandataire, et non sa « requête » a été accueilli par le tribunal.
Le moyen tiré du formalisme de l'article R631-24 du code de commerce invoqué par l'appelant sera écarté.
Il convient d'observer que de surcroît le tribunal judiciaire pouvait en toute hypothèse se saisir d'office, dans la mesure où l'instance en redressement était déjà ouverte, et même une instance en conversion était déjà en cours au moment du jugement de conversion déféré, et dans la mesure où les dispositions de l'article R. 631-3 du code de commerce régissant les modalités de la saisine d'office du tribunal, ne sont applicables qu'en cas de saisine d'office du tribunal en vue de l'ouverture de la liquidation judiciaire, et non pas en cas de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire, d'où il suit de plus fort le rejet de la demande d'annulation de la décision.
Sur le second moyen de nullité
Sur la violation des dispositions de l'article 6 § 1 de la CEDH et de l'article L.111-5 du code de l'organisation judiciaire, M. [W] fait valoir que suite à un jugement du tribunal d'instance de Narbonne, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4], où il a sa résidence principale, via son syndic de copropriété, le cabinet [G], a engagé une action, obtenu un jugement contre lui, et s'est constitué créancier immédiatement auprès de Me [Z] par l'intermédiaire de la SCP [O]-CUSSAC-MADRENAS ; que le syndicat des copropriétaires a ensuite pris une hypothèque judiciaire sur l'appartement de M. [W], comme indiqué sur la décision du juge-commissaire du 19 juin 2024 faisant l'objet d'autres recours devant la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier ; que le conseil du syndic, le cabinet [G], a pour avocat la SCP [O]-CUSSAC-MADRENAS, laquelle avait en son sein en qualité d'avocat associé M. le vice-président [F] [D], longtemps avocat avant d'intégrer le corps de la magistrature, la SCP étant alors dénommée SCP [D]-CUSSAC-MADRENAS, sise à Perpignan ; et que la confusion des genres fait grief au concluant, la cour devant la sanctionner en annulant le jugement rendu par le tribunal judiciaire dans une composition collégiale comprenant M. [D], en application des principes énoncés aux articles supra.
Mais ce faisant, M. [W] s'abstient de fournir une chronologie précise.
Il ne ressort ainsi d'aucun élément qu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective de M. [W], M. [D] eût été encore avocat, et non déjà magistrat de l'ordre judiciaire, et a fortiori avocat associé dans la société civile professionnelle d'avocats [D]-CUSSAC-MADRENAS devenue [O]-CUSSAC-MADRENAS et chargée de la défense des intérêts de son adversaire, le syndic de la copropriété de la résidence [14] peuplier, créancière de M. [W], de sorte que ses allégations ne sont pas étayées et qu'aucun manquement au devoir ou même à l'apparence d'impartialité n'est à déplorer de la part du tribunal judiciaire à l' égard de M. [W].
Ce moyen de nullité du jugement entrepris sera écarté.
Il en va de même que celui tiré de la circonstance que "M. Le batonnier [O] membre de la SCP avocat du syndic de copropriété ait fait une circulaire relevant de ses fonctions dès le prononcé du redressement judiciaire et par jugement, pris des suretés immobilières sur les biens de M. [W] , les notifications le visant lui permettant de faire les recours en la matière comme toutes les parties à la procédure", s'agissant d'un moyen relatif aux voies d'exécution entreprises, inopérant dans le cadre de la présente procédure collective de conversion en liquidation.
Le jugement du tribunal judiciaire n'encourant pas l'annulation, il en résulte le rejet au fond, et non l'irrecevabilité, de toutes les demandes indemnitaires subséquentes présentées par M. [W].
Celui-ci n'ayant présenté au dispositif de ses conclusions aucune demande d'infirmation du jugement déféré, la cour n'est saisie d'aucune demande de réformation et ne peut que confirmer ledit jugement, comme sollicité par les intimés.
* La cour de céans autrement composée, pour confirmer le jugement du tribunal judiciaire déféré avait retenu les motifs suivants, qui méritent néanmoins d'être rappelés in extenso :
« Aux termes de l'article L. 631-1, alinéa 2 du code de commerce : « La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30 ».
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 631-19 I et L. 626-1 du même code qu'un plan de redressement doit être arrêté lorsqu'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être redressée et le plan, ainsi arrêté, qui met fin à la période d'observation, peut comporter, s'il y a lieu, l'arrêt, l'adjonction ou la cession d'une ou de plusieurs activités.
Selon l'article L. 631-15 II, à tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité ou prononcer la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.
Enfin, l'article L. 640-1, alinéa 1 du code de commerce énonce qu'il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
En l'espèce, M. [W] soutient qu'il n'a pu exercer sa profession qu'à la suite de l'arrêt rendu le 30 novembre 2020 par la cour d'appel ayant infirmé la décision du conseil de l'ordre du barreau des Pyrénées orientales du 5 septembre 2019, qui avait refusé sa réinscription tableau,
' de même, par un arrêt du 26 janvier 2021, la décision du même conseil de l'ordre qui lui avait infligé une sanction disciplinaire a été annulée,
' ce n'est donc qu'à partir du mois de décembre 2020 qu'il a été en mesure de Page 6 reprendre son activité,
présente un document intitulé « prévisionnel de trésorerie », établi sur la période de janvier 2021 à décembre 2031, mentionnant un montant mensuel disponible de 2500 euros, soit 30 000 euros par an, affecté à un plan d'apurement, ainsi que la liste des dossiers en cours en 2020 et en 2021, les factures clients éditées sur la période du 1 décembre er 2020 au 8 mars 2021, ainsi que ses déclarations de TVA pour les mois de décembre 2020, janvier 2021 et février 2021.
Il convient, en premier lieu, de rappeler que le passif déclaré dans la cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 4 juillet 2019 s'élève à la somme de 257 830,30 euros, passif admis dans sa quasi-totalité par le juge commissaire et qui, comme l'indique le mandataire judiciaire, Mme [Z], dans son dernier rapport du 4 janvier 2021, se compose principalement du solde de deux emprunts souscrits auprès de la BNP Paribas pour l'acquisition d'un appartement [Adresse 5] résiliés antérieurement à l'ouverture de la procédure collective (112 136,50 euros), à diverses taxes et impositions dues au Trésor public (46 963,45 euros), à des cotisations sociales dues à l'URSSAF (35 658,10 euros) et à un arriéré de cotisations dû à la CNBF (17 435,82 euros).
Le mandataire judiciaire évoque également une créance salariale de 9768,95 euros au total résultant d'un jugement rendu le 4 juillet 2018 par le conseil de prud'hommes de Perpignan, actuellement frappé d'appel, et susceptible, en cas de confirmation du jugement, d'accroître l'endettement de M. [W].
Le mandataire judiciaire fait en outre état, dans son rapport du 4 janvier 2021, de dettes nées au cours de la période d'observation pour un montant total de 12 669,74 euros (TVA d'août et d'octobre 2019, cotisations URSSAF d'août 2019, charges de copropriété de l'appartement du [Adresse 4], loyers du local professionnel situé [Adresse 11], cotisations de l'ordre et de la Carpa).
Si M. [W] a fait l'objet d'une omission au tableau de l'ordre des avocats au barreau de Perpignan, qui a été effective du 16 mai 2019, date à laquelle a été rendu exécutoire l'arrêt de la cour confirmant la décision rendue le 18 octobre 2018 par le conseil de l'ordre, au 30 novembre 2020, date de l'arrêt de la cour infirmant la décision du conseil de l'ordre refusant sa réinscription malgré l'ouverture de la procédure collective interdisant les paiements, durant cette période, son cabinet a été administré par un suppléant désigné par le bâtonnier de l'ordre, ce qui n'a d'ailleurs pas empêché l'intéressé de déposer lui-même des conclusions devant la cour d'appel, notifiées via le RPVA sans l'accord de sa suppléante, Me [A] [C], dont il avait imité la signature, ainsi qu'il ressort des motifs du jugement correctionnel du 18 janvier 2021.
De plus, en 2019, malgré son omission au tableau de l'ordre, M. [W] a réalisé un chiffre d'affaires de 100 155 euros, sensiblement identique à celui qu'il avait dégagé au cours des deux exercices précédents. Les formulaires fiscaux n° 2035 produits, mentionnent, en effet, les résultats suivants :
' en 2017, un total de recettes de 103 200 euros pour un résultat de 52 457 euros,
' en 2018, un total de recettes de 117 307 euros pour un résultat de 65 957 euros,
' en 2019, un total de recettes de 100 155 euros pour un résultat de 31 500 euros.
Quant aux déclarations de TVA pour les mois de décembre 2020, janvier 2021 et février 2021, elles font état, pour ces trois mois d'activité, de chiffres d'affaires réalisés à hauteur des sommes de 8 000 euros, 8 200 euros et 8 900 euros.
Le prévisionnel de trésorerie établi par M. [W] table sur un chiffre d'affaires de 109 000 euros la première année, 124 300 euros la deuxième année, 123 400 euros la troisième année et 127 200 euros la quatrième année pour des résultats, charges professionnelles déduites, de 86 361 euros, 92 429 euros, 91 209 euros et 95 009 euros ; ces prévisions en termes de chiffres d'affaires et de résultats sont cependant optimistes, particulièrement à compter de la deuxième année du plan proposé, si l'on considère que le chiffre d'affaires moyen a été de 110 253 euros en 2017 et 2018 pour un résultat moyen de seulement 59 207 euros au cours des deux exercices considérés, sachant que durant cette période, M. [W] a accumulé des dettes, notamment auprès de l'URSSAF, qu'il a été dans l'incapacité de régler faute de trésorerie suffisante, conduisant ainsi à l'ouverture de son redressement judiciaire.
Ce prévisionnel de trésorerie dégage mensuellement le montant de disponibilités, déduction faite du montant mensuel de 2500 euros affecté au plan d'apurement, et reporte le résultat obtenu le mois suivant qui, ajouté à la recette du mois et déduction faite de la mensualité affectée au plan d'apurement, donne un nouveau montant disponible, qui s'accroît ainsi de mois en mois, mais sans tenir compte des charges de la vie courante, que doit nécessairement assumer M. [W].
Le montant des disponibilités mensuelles est donc fictif et après trois mois d'activité, l'intéressé ne fournit aucun élément sur sa trésorerie actuelle, alors qu'au 31 décembre 2020, le solde de son compte-courant professionnel ouvert au Crédit Agricole n'était créditeur que de 93,95 euros.
M. [W] ne justifie donc pas, en l'état actuel, de sa capacité à procéder au règlement immédiat des dettes nées durant la période d'observation qui s'élèvent à plus de 12 000 euros ; les perspectives de redressement, dont il fait état, sont d'autant plus incertaines qu'outre un prévisionnel de trésorerie peu réaliste, il ne fournit pas la liste des dossiers, qu'il avait en cours au mois de mai 2019, date à laquelle son omission au tableau est devenue effective, afin de la comparer à la liste des dossiers, au nombre de 69, actuellement gérés par son cabinet.
Le mandataire judiciaire, Mme [Z], a déploré, dans ses divers rapports, l'opacité dans laquelle M. [W] évolue sur le plan économique et financier, et relève notamment que les seules sommes, qu'elle a perçues en novembre 2019 et février 2020, bloquées sur le compte de la Caisse des dépôts et consignations et totalisant 2698,40 euros, correspondaient à des aides juridictionnelles en instance de règlement.
Il doit être relevé que M. [W] ait fait l'acquisition, par acte authentique du 12 octobre 2020, alors qu'il était sous le coup d'une procédure de redressement judiciaire et omis au tableau de l'ordre, d'un local commercial sis [Adresse 10], plutôt que d'employer les fonds ainsi investis dont la provenance est ignorée, au règlement du passif né postérieurement à l'ouverture de la procédure collective.
L'appelant invoque également la diminution de ses charges locatives à la suite de l'acquisition d'un local professionnel sis [Adresse 6], dont il produit le plan d'aménagement établi le 28 janvier 2020 par un architecte, ainsi qu'un document, non daté, paraissant être le devis d'un artisan, chiffré à 2500 euros, mais pour des travaux (pose d'un lavabo, d'un bac à douche et d'un meuble évier) apparemment sans rapport avec l'aménagement du local professionnel d'un avocat.
L'origine des fonds utilisés pour financer cette acquisition et ces travaux, qui auraient également pu et dû être employés au règlement des dettes postérieures, est là encore inconnue, étant observé que le loyer réglé pour l'occupation du local professionnel du [Adresse 12] n'était que de 700 euros par mois.
L'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales souligne à cet égard qu'aucun changement de domiciliation professionnelle n'a été soumis par M. [W] au conseil de l'ordre.
Il résulte de ce qui précède qu'aucune possibilité sérieuse de redressement n'est démontrée, de sorte que le premier juge a exactement converti la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de M. [W] en liquidation judiciaire. »
* Par ailleurs aux termes de l'article R. 641-36 du code de commerce, « Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal désigne, lors de l'ouverture de la procédure, le représentant de l'ordre professionnel ou de l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève, aux fins d'exercer les actes de la profession. Ce représentant peut déléguer cette mission à l'un des membres de la profession, en activité ou retraité (...) ».
Le jugement omettant de statuer sur ce point, il convient de lui ajouter la désignation du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales avec faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [W], les actes de la profession.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après débats en chambre du conseil,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan en date du 11 mars 2021 ;
Y ajoutant
Désigne le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales avec faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [H] [W], les actes de la profession ;
Dit que les dépens d'appel seront frais de la liquidation judiciaire de M. [W], et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 09 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 25/00557 - N° Portalis DBVK-V-B7J-QRAZ
Décision déférée à la Cour :
Arrêt du 19 AVRIL 2023
COUR DE CASSATION DE [Localité 15]
N° RG 315 f-d
APPELANT :
Monsieur [H] [W]
né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 16]
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Maître [E] [Z] es-qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [H] [W]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représenté par Me Raymond ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DES PYRENEES ORIENTALES pris en la personne de son Bâtonnier en exercice y domicilié
Palais de Justice
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représentée par Me Eric NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER
MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL
Représenté par Monsieur Damien KINCHER, avocat général
Ordonnance de clôture du 03.06.2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2025, en chambre du conseil, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :
Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre
M. Thibault GRAFFIN, conseiller
M. Fabrice VETU, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Gaëlle DELAGE
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public représenté lors des débats par Damien KINCHER, avocat général.
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Gaëlle DELAGE, greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE
M. [H] [W] est inscrit au tableau de l'ordre des avocats des Pyrénées orientales ; il exerce son activité dans des locaux qui lui sont donnés à bail sis [Adresse 12].
Par décision du 18 octobre 2018, le conseil de l'ordre des avocats a prononcé son omission, à compter du 18 octobre 2018, du tableau de l'ordre, au motif que celui-ci n'avait pas respecté l'échéancier auquel il s'était engagé pour le règlement de sa dette à la Caisse nationale des barreaux français (la CNBF) s'élevant alors à la somme de 22 252,11 euros.
Par arrêt en date du 14 mai2019, la1ère chambre de la cour de céans a confirmé cette décision.
Par exploit du 8 janvier 2019, l'URSSAF du Languedoc-Roussillon a fait assigner M. [W] devant le tribunal de grande instance de Perpignan en redressement judiciaire, en invoquant une créance d'un montant total de 12 673,61 euros, exigible en vertu de sept contraintes vainement émises entre le 21 août 2017 et le 11 juin 2018, et en dépit de deux saisies-attribution opérées les 31 juillet 2017 et le 1er août 2018.
L'URSSAF a attrait en la cause le 16 janvier 2019 l'ordre des avocats du barreau des Pyrénées orientales.
Par jugement du 4 juillet 2019 devenu définitif, le tribunal de grande instance de Perpignan a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. [W], nommé Me [Z] en qualité de mandataire judiciaire, fixé au 8 janvier 2019 la date de cessation des paiements, ouvert une période d'observation en vue de l'élaboration d'un plan de redressement et désigné M. [B], commissaire-priseur, aux fins de réaliser un inventaire et la prisée du patrimoine du débiteur.
L'inventaire des actifs mobiliers de M. [W] été réalisé le 2 septembre 2019 dans ses locaux professionnels en sa présence et celle d'un représentant du bâtonnier de l'ordre des avocats.
Le commissaire-priseur a arrêté la valeur du matériel d'exploitation à la somme de 1565 euros pour une valeur de réalisation de 445 euros.
Le 31 juillet 2019, M. [W], après l'échec d'une première demande, a sollicité sa réinscription au barreau des Pyrénées-orientales.
Par décision du 5 septembre 2019, le conseil de l'ordre des avocats a rejeté cette demande, motif pris de ce que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, interdisant désormais à M. [W] de régler les sommes dues à la CNBF, n'emportait pas pour autant règlement des causes de l'omission du tableau.
Le 13 septembre 2019, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau des Pyrénées orientales a déposé plainte entre les mains du procureur général près la cour d'appel de Montpellier contre M. [W] pour exercice illégal de la profession d'avocat, l'intéressé ayant déposé, pour le compte de clients, malgré son omission, des conclusions via le RPVA devant la cour d'appel.
Le 23 septembre 2019, Me [Z], mandataire judiciaire, a déposé un avis sollicitant la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire en faisant valoir notamment que l'endettement de M. [W] avoisinait les 200 000 euros, endettement bancaire compris, que l'intéressé, omis du tableau, était sans activité professionnelle et que ne détenant pas les relevés de compte de M. [W], le montant de la trésorerie éventuellement disponible était inconnu.
Par jugement du 14 novembre 2019, le tribunal a sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir de la cour sur le recours formé par M. [W] contre la décision du 5 septembre 2019 ayant rejeté sa demande de réinscription au tableau.
Par arrêt du 30 novembre 2020, la 1ère chambre a infirmé la décision du conseil de l'ordre et ordonné la réinscription au tableau de l'ordre de M. [W] à la date de l'arrêt, en retenant qu'eu égard au principe de l'interdiction des paiements posé à l'article L. 622-5 du code de commerce, il ne pouvait être reproché à l'intéressé de ne pas s'être acquitté du reliquat de sa dette auprès de la CNBF de sorte que le motif d'omission du tableau prévu à l'article 105 2° du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ne pouvait pas fonder la décision.
Le 4 janvier 2021, Me [Z], mandataire judiciaire au redressement de M. [W], a déposé un nouveau rapport, sollicitant la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Par jugement du 18 janvier 2021 devenu définitif, le tribunal correctionnel de Montpellier a condamné M. [W] à une peine d'emprisonnement avec sursis pour exercice illégal de la profession d'avocat pour faits commis du 15 mai 2019 au 13 septembre 2019 et pour faux et usage de faux commis courant septembre 2019.
Par arrêt du 26 janvier 2021, la 1ère chambre de la cour de céans a déclaré nulle et non avenue la décision du conseil de l'ordre du barreau des Pyrénées orientales du 23 novembre 2020 ayant prononcé une sanction disciplinaire à l'égard de M [W].
Par jugement contradictoire (le jugement déféré) en date du 11 mars 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :
- prononcé la conversion du redressement en liquidation judiciaire de M. [W],
- nommé Me [Z] en qualité de liquidateur,
- mis fin à la période d'observation
- et fixé à 18 mois à compter du jugement le délai au terme duquel la clôture de la procédure devrait être examinée par le tribunal.
Entre-temps, ce tribunal, saisi d'une requête en omission de statuer de la part de Me [Z] ès qualités, relativement à la désignation du bâtonnier de l'ordre aux fins d'exercer les actes de la profession d'avocat conformément aux dispositions de l'article R. 641-36 du code de commerce, par un jugement du 15 avril 2021, s'est déclaré incompétent pour connaître de cette requête la cour étant saisie.
Statuant sur l'appel formé par M. [U], la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier, par arrêt contradictoire du 1er juillet 2021, a confirmé dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan en date du 11 mars 2021, y ajoutant, désigné le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales ave faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [W], les actes de la profession, et dit que les dépens d'appel doivent être employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Cet arrêt a été cassé et annulé en toutes ses dispositions par un arrêt de la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation du 19 avril 2023, faute d'avis émis par le ministère public.
Désignée comme juridiction de renvoi, la cour de ce siège a été saisie par M. [H] [W], par déclaration du 23 janvier 2025.
Par dernières conclusions du 3 juin 2025, il demande à la cour au visa des articles R. 631-24 du code de commerce, 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,1240 du code civil, et L 111-5 du code de l'organisation judiciaire :
A- in limine litis
de constater sinon prononcer la nullité du jugement du 11 mars 2021 prononçant sa liquidation judiciaire, ès qualités d' avocat, et renvoyer toutes les parties à mieux pourvoir pour défaut de saisine régulière du tribunal de Perpignan ;
de juger que cette nullité de jugement rétroagira sur la période d'observation qui n'a plus lieu d'être et de renvoyer à nouveau toutes les parties à mieux se pourvoir ;
B- au fond et en tout état de cause,
de constater la violation manifeste des dispositions de l'article 6 §1 de la convention européenne des droits de l'homme, à la seule vue de la composition du tribunal en son audience du 11 mars 2021 ;
- d'annuler par conséquent en toutes ses dispositions le jugement du 11 mars 2021 prononçant sa liquidation judiciaire et renvoyer toutes les parties à mieux se pourvoir ;
C- en réparation de ses préjudices,
- de déclarer recevables es prétentions indemnitaires ;
- de condamner Me [Z], ès qualités, ou tout succombant à lui payer les sommes suivantes :
au titre des préjudices directs, 45 000 euros suite à la suite vente irrégulière de l'appartement type studio sis au [Adresse 9], vente effectuée le 8 septembre 2023 et 208 000 euros au titre de la perte de revenus entre 2021-2025 liée à la perte de son activité professionnelle ;
200 000 euros au titre de la perte de chance liée à son préjudice indirect ;
1euro symbolique au titre de son préjudice moral ;
5000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile
de juger que toutes les condamnations seront opposables à titre personnel à Me [Z] et au besoin à son assurance responsabilité professionnelle ;
et en toute hypothèse, de rejeter l'ensemble des demandes adverses.
Par conclusions du 26 mai 2025, Mme [E] [Z], agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. [W], demande à la cour :
de confirmer le jugement du 11 mars 2021 en toutes ses dispositions ;
de juger qu'aucune demande indemnitaire n'est dirigée à son encontre ;
de juger irrecevables l'ensemble des demandes indemnitaires de M. [H] [W] au visa des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;
de débouter M. [H] [W] de l'intégralité de ses demandes ;
de le condamner reconventionnellement à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, avec distraction.
Par conclusions du 27 mai 2025, l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées-Orientales demande à la cour de rejeter la demande de nullité et d'annulation du jugement du 11 mars 2021, de confirmer ledit jugement, de débouter M. [W] de ses demandes indemnitaires, et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Par conclusions communiquées aux autres parties par RPVA le 29 janvier 2025 le ministère public demande à la cour de confirmer le jugement déféré, pour les mêmes motifs.
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est datée du 3 juin 2025.
MOTIFS
Sur le premier moyen de nullité
M. [W] fait valoir en premier lieu que le jugement déféré du 11 mars 2021 fait mention d'un rapport sur la base duquel la liquidation a été prononcée, alors que la mention, évoquant la liquidation, qui en est faite par l'administrateur judiciaire dans son rapport, ne constitue pas une demande de conversion de redressement en liquidation, de sorte que le tribunal qui n'était saisi d'aucune requête, s'est saisi d'office au mépris des dispositions de l'article R. 631-3 du code de commerce, et que sa décision est nulle et non avenue.
L'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales et le liquidateur répondent qu'en application de l'article L631-15 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, soit la version en vigueur du 15 février 2009 au 1er octobre 2021, en période d'observation, le tribunal peut prononcer la liquidation judiciaire à tout moment à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office ; que la demande qui a été formée n'obéit à aucune forme ; qu'elle a été contradictoirement débattue à l'audience à laquelle le débiteur, convoqué, était bien présent.
La cour relève qu'il ressort des rapports successifs de Me [Z] sur le déroulement de la procédure de redressement que ce liquidateur conclut sans équivoque le 24 septembre 2019, (« tenant ce qui précède, l'exposante [le mandataire judiciaire] ne peut s'associer à une demande de prolongation de la période d'observation et sollicite la conversion de ce redressement en liquidation judiciaire ») puis à nouveau le 1er février 2021, au rejet de la demande de prolongation de la période d'observation et à la conversion de la procédure de redressement judiciaire de M. [W] en liquidation judiciaire.
Le jugement de conversion déféré a été rendu sur ce le 11 mars 2021 après convocation de M. [H] [W] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée par Mme [P], greffière du tribunal judiciaire de Perpignan le 8 décembre 2020, convocation sur laquelle figurait clairement le motif de la convocation :
« objet : Statuer sur la demande de conversion de redressement judiciaire en liquidation judiciaire ».
Le premier rapport a été traité comme une requête du mandataire et a donné lieu à ue première puis la seconde convocation explicite supra, de sorte que M. [W] qui était déjà informé de ce que le mandataire demandait la conversion du redressement en liquidation, et des motifs de Me [Z], a sollicité et obtenu qu'il soit sursis sur cette demande dans l'attente des recours qu'il avait formés par ailleurs, de nature selon lui, précisément, à contrecarrer l'argumentaire connu donc de lui.
Aucun manquement au principe du contradictoire et aucun grief n'ont été causés à M. [W] issu de ce que « le rapport » du mandataire, et non sa « requête » a été accueilli par le tribunal.
Le moyen tiré du formalisme de l'article R631-24 du code de commerce invoqué par l'appelant sera écarté.
Il convient d'observer que de surcroît le tribunal judiciaire pouvait en toute hypothèse se saisir d'office, dans la mesure où l'instance en redressement était déjà ouverte, et même une instance en conversion était déjà en cours au moment du jugement de conversion déféré, et dans la mesure où les dispositions de l'article R. 631-3 du code de commerce régissant les modalités de la saisine d'office du tribunal, ne sont applicables qu'en cas de saisine d'office du tribunal en vue de l'ouverture de la liquidation judiciaire, et non pas en cas de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire, d'où il suit de plus fort le rejet de la demande d'annulation de la décision.
Sur le second moyen de nullité
Sur la violation des dispositions de l'article 6 § 1 de la CEDH et de l'article L.111-5 du code de l'organisation judiciaire, M. [W] fait valoir que suite à un jugement du tribunal d'instance de Narbonne, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4], où il a sa résidence principale, via son syndic de copropriété, le cabinet [G], a engagé une action, obtenu un jugement contre lui, et s'est constitué créancier immédiatement auprès de Me [Z] par l'intermédiaire de la SCP [O]-CUSSAC-MADRENAS ; que le syndicat des copropriétaires a ensuite pris une hypothèque judiciaire sur l'appartement de M. [W], comme indiqué sur la décision du juge-commissaire du 19 juin 2024 faisant l'objet d'autres recours devant la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier ; que le conseil du syndic, le cabinet [G], a pour avocat la SCP [O]-CUSSAC-MADRENAS, laquelle avait en son sein en qualité d'avocat associé M. le vice-président [F] [D], longtemps avocat avant d'intégrer le corps de la magistrature, la SCP étant alors dénommée SCP [D]-CUSSAC-MADRENAS, sise à Perpignan ; et que la confusion des genres fait grief au concluant, la cour devant la sanctionner en annulant le jugement rendu par le tribunal judiciaire dans une composition collégiale comprenant M. [D], en application des principes énoncés aux articles supra.
Mais ce faisant, M. [W] s'abstient de fournir une chronologie précise.
Il ne ressort ainsi d'aucun élément qu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective de M. [W], M. [D] eût été encore avocat, et non déjà magistrat de l'ordre judiciaire, et a fortiori avocat associé dans la société civile professionnelle d'avocats [D]-CUSSAC-MADRENAS devenue [O]-CUSSAC-MADRENAS et chargée de la défense des intérêts de son adversaire, le syndic de la copropriété de la résidence [14] peuplier, créancière de M. [W], de sorte que ses allégations ne sont pas étayées et qu'aucun manquement au devoir ou même à l'apparence d'impartialité n'est à déplorer de la part du tribunal judiciaire à l' égard de M. [W].
Ce moyen de nullité du jugement entrepris sera écarté.
Il en va de même que celui tiré de la circonstance que "M. Le batonnier [O] membre de la SCP avocat du syndic de copropriété ait fait une circulaire relevant de ses fonctions dès le prononcé du redressement judiciaire et par jugement, pris des suretés immobilières sur les biens de M. [W] , les notifications le visant lui permettant de faire les recours en la matière comme toutes les parties à la procédure", s'agissant d'un moyen relatif aux voies d'exécution entreprises, inopérant dans le cadre de la présente procédure collective de conversion en liquidation.
Le jugement du tribunal judiciaire n'encourant pas l'annulation, il en résulte le rejet au fond, et non l'irrecevabilité, de toutes les demandes indemnitaires subséquentes présentées par M. [W].
Celui-ci n'ayant présenté au dispositif de ses conclusions aucune demande d'infirmation du jugement déféré, la cour n'est saisie d'aucune demande de réformation et ne peut que confirmer ledit jugement, comme sollicité par les intimés.
* La cour de céans autrement composée, pour confirmer le jugement du tribunal judiciaire déféré avait retenu les motifs suivants, qui méritent néanmoins d'être rappelés in extenso :
« Aux termes de l'article L. 631-1, alinéa 2 du code de commerce : « La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30 ».
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 631-19 I et L. 626-1 du même code qu'un plan de redressement doit être arrêté lorsqu'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être redressée et le plan, ainsi arrêté, qui met fin à la période d'observation, peut comporter, s'il y a lieu, l'arrêt, l'adjonction ou la cession d'une ou de plusieurs activités.
Selon l'article L. 631-15 II, à tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité ou prononcer la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.
Enfin, l'article L. 640-1, alinéa 1 du code de commerce énonce qu'il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
En l'espèce, M. [W] soutient qu'il n'a pu exercer sa profession qu'à la suite de l'arrêt rendu le 30 novembre 2020 par la cour d'appel ayant infirmé la décision du conseil de l'ordre du barreau des Pyrénées orientales du 5 septembre 2019, qui avait refusé sa réinscription tableau,
' de même, par un arrêt du 26 janvier 2021, la décision du même conseil de l'ordre qui lui avait infligé une sanction disciplinaire a été annulée,
' ce n'est donc qu'à partir du mois de décembre 2020 qu'il a été en mesure de Page 6 reprendre son activité,
présente un document intitulé « prévisionnel de trésorerie », établi sur la période de janvier 2021 à décembre 2031, mentionnant un montant mensuel disponible de 2500 euros, soit 30 000 euros par an, affecté à un plan d'apurement, ainsi que la liste des dossiers en cours en 2020 et en 2021, les factures clients éditées sur la période du 1 décembre er 2020 au 8 mars 2021, ainsi que ses déclarations de TVA pour les mois de décembre 2020, janvier 2021 et février 2021.
Il convient, en premier lieu, de rappeler que le passif déclaré dans la cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 4 juillet 2019 s'élève à la somme de 257 830,30 euros, passif admis dans sa quasi-totalité par le juge commissaire et qui, comme l'indique le mandataire judiciaire, Mme [Z], dans son dernier rapport du 4 janvier 2021, se compose principalement du solde de deux emprunts souscrits auprès de la BNP Paribas pour l'acquisition d'un appartement [Adresse 5] résiliés antérieurement à l'ouverture de la procédure collective (112 136,50 euros), à diverses taxes et impositions dues au Trésor public (46 963,45 euros), à des cotisations sociales dues à l'URSSAF (35 658,10 euros) et à un arriéré de cotisations dû à la CNBF (17 435,82 euros).
Le mandataire judiciaire évoque également une créance salariale de 9768,95 euros au total résultant d'un jugement rendu le 4 juillet 2018 par le conseil de prud'hommes de Perpignan, actuellement frappé d'appel, et susceptible, en cas de confirmation du jugement, d'accroître l'endettement de M. [W].
Le mandataire judiciaire fait en outre état, dans son rapport du 4 janvier 2021, de dettes nées au cours de la période d'observation pour un montant total de 12 669,74 euros (TVA d'août et d'octobre 2019, cotisations URSSAF d'août 2019, charges de copropriété de l'appartement du [Adresse 4], loyers du local professionnel situé [Adresse 11], cotisations de l'ordre et de la Carpa).
Si M. [W] a fait l'objet d'une omission au tableau de l'ordre des avocats au barreau de Perpignan, qui a été effective du 16 mai 2019, date à laquelle a été rendu exécutoire l'arrêt de la cour confirmant la décision rendue le 18 octobre 2018 par le conseil de l'ordre, au 30 novembre 2020, date de l'arrêt de la cour infirmant la décision du conseil de l'ordre refusant sa réinscription malgré l'ouverture de la procédure collective interdisant les paiements, durant cette période, son cabinet a été administré par un suppléant désigné par le bâtonnier de l'ordre, ce qui n'a d'ailleurs pas empêché l'intéressé de déposer lui-même des conclusions devant la cour d'appel, notifiées via le RPVA sans l'accord de sa suppléante, Me [A] [C], dont il avait imité la signature, ainsi qu'il ressort des motifs du jugement correctionnel du 18 janvier 2021.
De plus, en 2019, malgré son omission au tableau de l'ordre, M. [W] a réalisé un chiffre d'affaires de 100 155 euros, sensiblement identique à celui qu'il avait dégagé au cours des deux exercices précédents. Les formulaires fiscaux n° 2035 produits, mentionnent, en effet, les résultats suivants :
' en 2017, un total de recettes de 103 200 euros pour un résultat de 52 457 euros,
' en 2018, un total de recettes de 117 307 euros pour un résultat de 65 957 euros,
' en 2019, un total de recettes de 100 155 euros pour un résultat de 31 500 euros.
Quant aux déclarations de TVA pour les mois de décembre 2020, janvier 2021 et février 2021, elles font état, pour ces trois mois d'activité, de chiffres d'affaires réalisés à hauteur des sommes de 8 000 euros, 8 200 euros et 8 900 euros.
Le prévisionnel de trésorerie établi par M. [W] table sur un chiffre d'affaires de 109 000 euros la première année, 124 300 euros la deuxième année, 123 400 euros la troisième année et 127 200 euros la quatrième année pour des résultats, charges professionnelles déduites, de 86 361 euros, 92 429 euros, 91 209 euros et 95 009 euros ; ces prévisions en termes de chiffres d'affaires et de résultats sont cependant optimistes, particulièrement à compter de la deuxième année du plan proposé, si l'on considère que le chiffre d'affaires moyen a été de 110 253 euros en 2017 et 2018 pour un résultat moyen de seulement 59 207 euros au cours des deux exercices considérés, sachant que durant cette période, M. [W] a accumulé des dettes, notamment auprès de l'URSSAF, qu'il a été dans l'incapacité de régler faute de trésorerie suffisante, conduisant ainsi à l'ouverture de son redressement judiciaire.
Ce prévisionnel de trésorerie dégage mensuellement le montant de disponibilités, déduction faite du montant mensuel de 2500 euros affecté au plan d'apurement, et reporte le résultat obtenu le mois suivant qui, ajouté à la recette du mois et déduction faite de la mensualité affectée au plan d'apurement, donne un nouveau montant disponible, qui s'accroît ainsi de mois en mois, mais sans tenir compte des charges de la vie courante, que doit nécessairement assumer M. [W].
Le montant des disponibilités mensuelles est donc fictif et après trois mois d'activité, l'intéressé ne fournit aucun élément sur sa trésorerie actuelle, alors qu'au 31 décembre 2020, le solde de son compte-courant professionnel ouvert au Crédit Agricole n'était créditeur que de 93,95 euros.
M. [W] ne justifie donc pas, en l'état actuel, de sa capacité à procéder au règlement immédiat des dettes nées durant la période d'observation qui s'élèvent à plus de 12 000 euros ; les perspectives de redressement, dont il fait état, sont d'autant plus incertaines qu'outre un prévisionnel de trésorerie peu réaliste, il ne fournit pas la liste des dossiers, qu'il avait en cours au mois de mai 2019, date à laquelle son omission au tableau est devenue effective, afin de la comparer à la liste des dossiers, au nombre de 69, actuellement gérés par son cabinet.
Le mandataire judiciaire, Mme [Z], a déploré, dans ses divers rapports, l'opacité dans laquelle M. [W] évolue sur le plan économique et financier, et relève notamment que les seules sommes, qu'elle a perçues en novembre 2019 et février 2020, bloquées sur le compte de la Caisse des dépôts et consignations et totalisant 2698,40 euros, correspondaient à des aides juridictionnelles en instance de règlement.
Il doit être relevé que M. [W] ait fait l'acquisition, par acte authentique du 12 octobre 2020, alors qu'il était sous le coup d'une procédure de redressement judiciaire et omis au tableau de l'ordre, d'un local commercial sis [Adresse 10], plutôt que d'employer les fonds ainsi investis dont la provenance est ignorée, au règlement du passif né postérieurement à l'ouverture de la procédure collective.
L'appelant invoque également la diminution de ses charges locatives à la suite de l'acquisition d'un local professionnel sis [Adresse 6], dont il produit le plan d'aménagement établi le 28 janvier 2020 par un architecte, ainsi qu'un document, non daté, paraissant être le devis d'un artisan, chiffré à 2500 euros, mais pour des travaux (pose d'un lavabo, d'un bac à douche et d'un meuble évier) apparemment sans rapport avec l'aménagement du local professionnel d'un avocat.
L'origine des fonds utilisés pour financer cette acquisition et ces travaux, qui auraient également pu et dû être employés au règlement des dettes postérieures, est là encore inconnue, étant observé que le loyer réglé pour l'occupation du local professionnel du [Adresse 12] n'était que de 700 euros par mois.
L'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales souligne à cet égard qu'aucun changement de domiciliation professionnelle n'a été soumis par M. [W] au conseil de l'ordre.
Il résulte de ce qui précède qu'aucune possibilité sérieuse de redressement n'est démontrée, de sorte que le premier juge a exactement converti la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de M. [W] en liquidation judiciaire. »
* Par ailleurs aux termes de l'article R. 641-36 du code de commerce, « Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal désigne, lors de l'ouverture de la procédure, le représentant de l'ordre professionnel ou de l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève, aux fins d'exercer les actes de la profession. Ce représentant peut déléguer cette mission à l'un des membres de la profession, en activité ou retraité (...) ».
Le jugement omettant de statuer sur ce point, il convient de lui ajouter la désignation du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales avec faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [W], les actes de la profession.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après débats en chambre du conseil,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan en date du 11 mars 2021 ;
Y ajoutant
Désigne le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau des Pyrénées orientales avec faculté de délégation aux fins d'exercer, en lieu et place de M. [H] [W], les actes de la profession ;
Dit que les dépens d'appel seront frais de la liquidation judiciaire de M. [W], et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente