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Décisions

CA Reims, ch. premier président, 10 septembre 2025, n° 25/00010

REIMS

Ordonnance

Autre

CA Reims n° 25/00010

10 septembre 2025

ORDONNANCE N°

DOSSIER N° : N° RG 25/00010 - N° Portalis DBVQ-V-B7J-FUIU-16

S.A.R.L. SCSD - SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY

c/

S.C.I. SCI CENTRE GARE Société au capital social de 12 700 112,00 € prise en la personne de son représentant légal

Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS

Me Jonathan PROTTE

L'AN DEUX MIL VINGT CINQ,

Et le 10 septembre,

A l'audience des référés de la cour d'appel de REIMS, où était présent et siégeait M. Christophe REGNARD, Premier Président, assisté de Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier,

Vu l'assignation délivrée par Maître [M] commissaire de justice à [Localité 6] en date du 18 Avril 2025,

A la requête de :

S.A.R.L. SCSD - SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Martin BOELLE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de REIMS

DEMANDEUR

à

S.C.I. SCI CENTRE GARE Société au capital social de 12 700 112,00 € prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Jonathan PROTTE, avocat au barreau de REIMS

DÉFENDEUR

d'avoir à comparaître le 14 mai 2025, devant le premier président statuant en matière de référé, le dossier ayant été renvoyé au 28 mai, puis au 25 juin, puis au 9 juillet 2025.

A ladite audience, le premier président a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, assisté de Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, puis l'affaire a été mise en délibéré au 10 Septembre 2025,

Et ce jour, 10 Septembre 2025, a été rendue l'ordonnance suivante par mise à disposition au greffe du service des référés, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile :

EXPOSE DES FAITS, DES MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par ordonnance de référé du 22 janvier 2025, le juge des référés du tribunal judiciaire de Reims a :

au principal, renvoyé les parties à mieux se pourvoir mais dès à présent par provision,

constaté par acquisition des effets de la clause résolutoire le 09 septembre 2024, la résiliation du bail commercial conclu le 12 octobre 2020 entre la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY et la SCI CENTRE GARE sur un local commercial (Bâtiment 1) situé [Adresse 1] à [Localité 4],

ordonné l'expulsion de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY et de toutes personnes de son chef des locaux qu'elle occupe Bâtiment 1 au [Adresse 1] à [Localité 4] et ce au besoin avec l'appui de la force publique et d'un serrurier si nécessaire, dès la signification de l'ordonnance à intervenir,

en tant que de besoin, ordonné la séquestration du garnissement dans tous les lieux au choix du bailleur, aux frais, risques et périls du Preneur,

condamné, à titre de provision, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY à payer à la SCI CENTRE GARE la somme de 26 317, 37 euros TTC au titre des loyers et charges et indemnités d'occupation selon décompte arrêté le 08 novembre 2024, avec intérêts aux taux légal et anatocisme dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil à compter de la date de l'assignation du 29 novembre 2024,

constaté par provision, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY à payer à la SCI CENTRE GARE une indemnité d'occupation mensuelle égale à un mois de loyer indexé, soit la somme de 2 456,87 euros (échéances de septembre et octobre 2024 à déduire), calculée prorata temporis jusqu'à la libération effective des lieux,

dit qu'à compter du 09 septembre 2025, l'indemnité d'occupation provisionnelle sera indexée sur l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié par l'INSEE, l'indice de base étant le dernier indice paru à la date d'acquisition de la clause résolutoire,

rejeté les demandes de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY au titre des pénalités, y inclus la demande de la SCI CENTRE GARE tendant à la conservation de l'intégralité du dépôt de garantie à titre de pénalité,

condamné la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY à payer à la SCI CENTRE GARE la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais exposés au titre du commandement de payer,

condamné la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY aux entiers dépens de l'instance,

rappelé que la présente décision est exécutoire par provision.

Par acte de commissaire de justice en date du 18 avril 2025, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY sollicite, sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile, de suspendre l'exécution provisoire dont est revêtue l'ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Reims du 22 janvier 2025. Elle demande également de débouter la SCI CENTRE GARE de sa demande de radiation et de la condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions et à l'audience, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY fait valoir que la signification de l'assignation délivrée au nom de la SCI CENTRE GARE en date du 29 novembre 2024 est nulle dans la mesure où le commissaire de justice n'a pas procédé à toutes les investigations nécessaires pour parvenir à trouver le destinataire de l'acte et qu'aucune investigation complète sur place n'a été effectuée.

Elle soutient que l'adresse exacte de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY aurait aisément pu être confirmée par la consultation du mandant, propriétaire des lieux loués et de la devanture du bâtiment à l'angle de la [Adresse 7] à [Localité 4], soit à quelques mètres de là où le commissaire de justice semble s'être déplacé, qui comporte l'enseigne très apparente « SANTEA ESPACE DENTAIRE ».

Elle expose que si l'acte du 29 novembre 2024 indique « un avis de passage daté de ce jour, mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant a été laissé au domicile du signifié conformément à l'article 656 du code de procédure civile », il s'avère que celui-ci n'a pas fait l'objet d'un dépôt dans la boîte aux lettres de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY puisque celle-ci se situe au [Adresse 2] à [Localité 4].

Elle indique également que les diligences très sommaires du commissaire de justice en charge de la signification de l'assignation devant le juge des référés, malgré l'évidence de la localisation de son destinataire, n'ont pas permis à la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY d'être touchée personnellement et de lui permettre d'être en mesure de se présenter à l'audience de référé du tribunal judiciaire de Reims et de présenter ses moyens de défense face à la demande d'expulsion des lieux loués qui était formulée à son encontre.

La SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY soutient également que le commandement de payer est nul en raison de la mauvaise foi de la SCI CENTRE GARE. Elle expose qu'elle s'était rapprochée du cabinet NEXITU, en sa qualité de gestionnaire du bien de la SCI CENTRE GARE, pour attirer l'attention de ce dernier sur le caractère exorbitant et injustifié des sommes mises à sa charge et qu'aucune réponse concrète n'avait été apportée à ces interrogations puisque le cabinet NEXITY est revenu vers la concluante 04 mois après sa première interrogation soit le 19 juin 2024 en se contentant d'affirmer, concernant les provisions sur charges complémentaires, que cela fait suite à l'augmentation du poste électricité. Or, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY indique que les factures transmises ne correspondaient nullement aux justificatifs de la facturation des charges 2023 alors même que, conformément à l'article 09 du contrat de bail conclu, le délai pour une telle transmission était déjà expiré depuis 03 mois.

Elle fait valoir que c'est de mauvaise foi et consciente du montant exorbitant des sommes appelées et de leurs contestations légitimes par le preneur, que la SCI CENTRE GARE a délivré le commandement de payer litigieux en outrepassant ses obligations quant à une information et justification quant aux montants sollicités.

La SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY expose également que le commandement de payer est nul du fait de l'imprécision et de l'inexigibilité des sommes réclamées par la SCI CENTRE GARE. Elle soutient que des provisions sur charges ont été arbitrairement fixées, sans justifications, à la somme de 1 196 euros alors que celles-ci étaient fixées contractuellement à la somme mensuelle de 657 euros hors taxes. Elle indique que des provisions sur charges complémentaires ont été également arbitrairement fixées à un montant total de 11 744,67 euros TTC tout comme une réédition de charges pour l'année 2023 pour 5 802,38 euros TTC.

Elle expose que le commandement de payer du 09 août 2024 ne contient pas de précisions quant au bien fondé des sommes dont il sollicite le règlement puisqu'il n'est accompagné que d'un décompte très sommaire.

La SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY fait valoir qu'elle a procédé au règlement de la somme de 26 317,37 euros sur le compte CARPA du conseil de la SCI CENTRE GARE mais qu'une suspension rétroactive des effets du commandement litigieux sera sollicitée auprès de la cour d'appel du fait du règlement des causes du commandement.

Elle soutient que l'exécution de l'ordonnance de référé aurait pour conséquence l'expulsion de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY des lieux loués et donc la conséquence manifestement excessive de la perte du fonds de commerce de dentisterie qui y est exploité.

Elle indique qu'une expulsion des lieux loués engendrerait une perte d'emploi pour les 14 salariés qui y sont attachés et entraînerait la rupture brutale du suivi médical de l'ensemble des patients soignés au sein du centre dentaire.

Par conclusions et à l'audience, la SCI CENTRE GARE sollicite de débouter la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY de sa demande de suspension de l'exécution provisoire dont est revêtue l'ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Reims du 22 janvier 2025 et, à titre reconventionnel, de constater l'absence de règlement des condamnations mises à la charge de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY. En conséquence, elle demande de prononcer la radiation de l'affaire au rôle et dire que l'affaire ne pourra être réinscrite qu'après justification de l'exécution de la décision entreprise. Elle sollicite également la condamnation de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La SCI CENTRE GARE fait valoir qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du Premier président saisi d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire d'apprécier le bien-fondé de la décision frappée d'appel et d'aménager l'exécution provisoire sur les chances alléguées d'infirmation.

La SCI CENTRE GARE expose que le commissaire de justice instrumentaire a effectué plusieurs démarches sur place afin de toucher à personne la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY et que les locaux situés au n°8 étant fermés lors de son passage, le commissaire de justice s'est présenté au centre dentaire SANTEA qui lui a indiqué ne pas connaître la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY.

Elle soutient qu'après avoir obtenu la confirmation du siège de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY tant sur le bail que sur les statuts de la société, le commissaire de justice a alors procédé à une signification de l'acte selon les modalités de l'article 656 du code de procédure civile avec notamment le dépôt d'un avis de passage et l'envoi d'une lettre simple.

La SCI CENTRE GARE indique que les difficultés qui sont survenues au cours des diverses significations résultent exclusivement de la dissimulation délibérée d'une sous-location interdite par la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY dès lors qu'elle n'a jamais eu l'autorisation de la bailleresse, la SCI CENTRE GARE.

Concernant la nullité du commandement de payer, la SCI CENTRE GARE fait valoir que la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY ne s'est toujours pas acquittée de l'intégralité des condamnations mises à sa charge puisqu'il demeure un solde de 16 046,82 euros et qu'elle n'est acquittée d'aucune indemnité d'occupation pour les mois de décembre 2024 à mai 2025.

La SCI CENTRE GARE expose que la mauvaise foi de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY est patente dans la mesure où cette dernière a indiqué que l'exécution de l'ordonnance de référé aurait pour conséquence une perte d'emploi de 14 salariés alors qu'elle a indiqué à l'administration qu'elle n'employait aucun salarié.

Elle soutient également qu'il n'appartient pas au Premier président de suspendre des mesures d'expulsion qui sont en cours d'exécution et pour lesquelles le concours de la force publique a déjà été octroyé.

Enfin, la SCI CENTRE GARE sollicite à titre reconventionnel la radiation du rôle de l'appel dans la mesure où la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY ne s'est toujours pas acquittée des condamnations mises à sa charge par l'ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judiciaire de Reims du 22 janvier 2025. Elle expose que la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY n'a réglé aucune indemnité d'occupation suite à l'ordonnance rendue de sorte que la créance en principal s'élève à la somme de 53 181,85 euros avant éventuelle déduction de la somme de 26 317,37 euros correspondant uniquement au montant en principal des loyers arrêtés au 08 novembre 2024 qui ne se trouve pas sur le compte CARPA.

Par conclusions en réponse et soutenues oralement, la SOCIETE DES CENTRE DE SANTE DENTALY fait valoir que le commissaire de justice doit impérativement vérifier que le destinataire demeure à l'adresse indiquée et mentionner sur l'acte qu'il a effectivement, sur place, procédé à cette vérification. Elle expose que l'acte doit justifier d'investigations concrètes.

Elle expose que les pièces adverses 5,6 et 16 attestent que les libellés sont au nom de l'ESPACE DENTAIRE SANTEA et qu'il ne peut donc sérieusement être soutenu, comme le fait la SCI CENTRE GARE, que cette enseigne n'est corroborée par aucun document alors même qu'elle figure dans ses propres pièces sur le fondement desquelles le commandement payer litigieux a été délivré.

Elle soutient que la consultation de la devanture du bâtiment à l'angle de la [Adresse 7], soit à quelques mètres de là où le commissaire de justice semble s'être déplacé, comporte l'enseigne « SANTEA ESPACE DENTAIRE ».

Elle indique également que l'email du 28 novembre 2024 produit aux débats par la SCI CENTRE GARE n'a aucune valeur probante puisque de jurisprudence constante, la preuve de l'impossibilité de signifier l'acte à personne doit résulter de l'acte de signification lui-même et non pas de déclarations postérieures à l'acte.

Elle soutient que l'acte du 29 novembre 2024 n'a pas été expédié à l'adresse postale de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY dans la mesure où la boîte aux lettres de celle-ci se situe au [Adresse 2]. Elle expose qu'il est surprenant que la SCI CENTRE GARE ne cesse dans ses écritures de prétendre à la régularité de la signification de son assignation alors même que la même étude d'huissier a procédé aux diligences suffisantes et qu'elle a pu signifier à l'exacte adresse de son destinataire l'ordonnance dont appel.

Elle expose que l'ensemble des relevés de compte de la SCI CENTRE GARE sont tous libellés au nom de l'ESPACE DENTAIRE SANTEA, que les correspondances intervenues entre le cabinet de Gestion NEXITY et la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY font apparaître comme signataire des correspondances le CENTRE DENTAIRE SANTEA et que l'échange d'email du 16 septembre 2020 entre l'agent immobilier de la SCI CENTRE GARE et l'ancien gérant de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY démontre l'accord dès la prise de possession des lieux par l'ancien associé unique et gérant de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY M. [H].

Elle soutient qu'il est de mauvaise foi et révélateur de l'absence de limites aux agissements du bailleur de feindre ignorer ce mode d'exploitation alors même que le contrat de bail conclu l'est depuis 2020, que les factures sont émises à l'ordre du CENTRE DENTAIRE SANTEA depuis 05 ans et que les échanges intervenus depuis des démontrent la parfaite connaissance par le cabinet NEXITY et le bailleur de cette sous location de son autorisation.

Elle expose que la mandante tout comme son gestionnaire auraient pu donner au commissaire de justice mandaté les coordonnés exactes du destinataire qu'il connaissait bien et non recourir à un mode de délivrance inférieur hiérarchiquement comme il l'a fait.

Elle soutient également avoir réglé la somme de 41 969,05 euros soit une somme supérieure à celle visée au commandement de payer délivré.

Elle indique que l'exécution de l'ordonnance de référé aurait pour conséquence l'expulsion de la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY des lieux loués et donc la conséquence manifestement excessive de la perte du fonds de commerce de dentisterie qui y est exploité alors même que la SOCIETE DES CENTRE DE SANTE DENTALY s'est acquittée.

Par conclusions en réponse et soutenues oralement, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY fait valoir que les correspondances intervenues entre le cabinet de gestion NEXITY et la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY démontrent que le signataire porte le nom « SANTEA CENTRE DENTAIRE ».

Elle soutient également que l'ensemble des factures et relevés de compte établis au nom de la SCI CENTRE GARE sont libellés à l'adresse postale « CENTRE DENTAIRE SANTEA ' au [Adresse 2] ».

Elle expose que le bail conclu ne contient nullement une clause de sous-location interdite mais uniquement une clause supposant l'accord préalable du bailleur, lequel a été donné dès 2020 et résulte de l'ensemble des éléments versés aux débats.

L'affaire a été mise en délibéré au 10 septembre 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, « en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance ».

En l'espèce, la décision déférée à la cour est une ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Reims en date du 22 janvier 2025 rappelant dans son dispositif que l'exécution provisoire est de droit.

Pour le bienfondé de sa demande, la défenderesse doit faire la preuve qu'il existe un risque de conséquences manifestement excessives à exécuter immédiatement la décision déférée et qu'il existe des moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision. Ces deux conditions sont cumulatives.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Sur la nullité de l'assignation

L'article 655 du code de procédure civile dispose que « si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise ».

L'article 648 du code de procédure civile dispose que, 'à peine de nullité, que tout acte d'huissier de justice indique notamment, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs et si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire'.

L'article 114 alinéa 2 du code de procédure civile indique que 'la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public'.

En l'espèce, la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY (SCSD) expose que l'assignation est nulle et que cette nullité est constitutive d'un moyen sérieux d'annulation de l'ordonnance de référé du 22 janvier 2025 dont appel.

Elle soutient que le commissaire de justice n'a pas procédé à toutes les investigations nécessaires pour parvenir à trouver le destinataire de l'acte et qu'aucune investigation complète sur place n'a été effectuée.

La SCSD indique qu'elle exercerait son activité au sein de son centre de santé dentaire exploitant sous l'enseigne « SANTEA » à l'angle de la [Adresse 7] à [Localité 4].

Il y a lieu de constater que, dans la mesure où les locaux au n°8 étaient fermés lors de son passage, le commissaire de justice s'est présenté au centre dentaire SANTEA qui lui a indiqué ne pas connaître la SCSD.

Le commissaire de justice a également indiqué que les salariés du centre SANTEA ont refusé de prendre l'acte dans la mesure où ils ne faisaient pas partie de la SCSD (pièce n°15).

Il ressort de l'acte d'assignation du 09 novembre 2024 que le siège du destinataire était caractérisé par la confirmation de l'adresse du destinataire par le bail et par la confirmation de l'adresse du destinataire par le site « papers.fr ».

Il résulte des constatations et des formalités accomplies par le commissaire de justice qu'il s'est nécessairement présenté à la bonne adresse.

Par la suite, le commissaire de justice a procédé à une signification de l'acte selon les modalités de l'article 656 du code de procédure civile avec notamment le dépôt d'un avis de passage et l'envoi d'une lettre simple au domicile ou à la résidence du destinataire qui, selon le bail commercial, est situé au [Adresse 1] à [Localité 4].

Il y a également lieu de relever qu'au passage du commissaire de justice, ce dernier a doublé son passage de plusieurs avis de passage dans la boîte aux lettres et de l'envoi de plusieurs plis en courriers simples. Les avis de passage n'ont jamais été contestés, les plis en courriers simples à l'attention de la SCSD ne sont jamais revenus avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée ». En raison des mentions figurant sur l'avis de passage, la SCSD ne pouvait pas ignorer qu'un acte d'assignation l'attendait à l'étude du commissaire de justice. Elle ne saurait donc se prévaloir d'un préjudice né du seul fait que l'assignation a été délivrée à la mauvaise adresse en raison des diligences effectuées par le commissaire de justice. Le fait que la lettre ait pu également être adressée à la mauvaise adresse est indifférent dès lors que l'article 658 du code de procédure civile précise qu'il s'agit d'une lettre simple dont, par principe, la distribution n'est jamais garantie.

Ainsi, la SCSD échoue à démontrer une erreur d'adresse dans l'acte du commissaire de justice et que cela lui a causé un préjudice. Sa demande de nullité de l'assignation, et du moyen sérieux d'annulation du jugement, sera donc rejetée.

Sur la nullité du commandement de payer,

La SCSD soutient que le commandement de payer délivré le 09 août 2024 serait nul en raison de la mauvaise foi de la SCI CENTRE GARE et de l'imprécision des sommes réclamées.

Toutefois, il y a lieu de préciser que la juridiction du premier président n'a pas, pour apprécier le caractère sérieux d'un moyen, à se substituer au juge du fond en rentrant dans le détail d'une argumentation, son rôle consistant à vérifier que les moyens soulevés par la requérante apparaissent comme devant, avec une évidence certaine, conduire à la réformation de la décision.

En l'espèce, si la SCSD indique que le commandement de payer délivré par la SCI CENTRE GARE présente un caractère imprécis et injustifié, il ressort de l'ordonnance de référé que le décompte semble être précis puisqu'il détaille toutes les sommes dues imputées à chaque type de créance et sa délivrance, conforme aux dispositions contractuelles qui stipulent classiquement que tout défaut de paiement entraînera la résiliation du contrat.

Il convient également de constater que le décompte établi par le juge des référés ne semble constituer que l'exécution des prévisions du contrat sans pouvoir former un abus de droit du loueur de fonds dans la mesure où le paiement de l'arriéré de 25 950,79 euros établi par le commandement de payer du 09 août 2024 n'a pas été acquitté dans le mois du commandement, de sorte que la mauvaise foi de la SCI CENTRE GARE ne paraît pas caractérisée.

Sur la demande de suspension rétroactive des effets de la clause résolutoire,

L'article L.145-41 du code de commerce dispose que :

« Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résolution de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la résiliation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas contestée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge ».

En l'espèce, la SCSD sollicite la suspension rétroactive des effets du commandement litigieux du fait du règlement des causes du commandement.

Cependant, l'article 514-3 du code de procédure civil ne conférant pas au premier président la compétence pour statuer sur l'appel au fond, il convient de se déclarer incompétent pour statuer sur la demande de suspension du rétroactive des effets de la clause résolutoire formée par la SCSD.

Le critère, exigé par le texte susvisé, à savoir des moyens sérieux d'annulation ou de réformation la décision de première instance, n'est donc aucunement rempli.

Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner l'existence de conséquences manifestement excessives à exécuter la décision de première instance, les deux conditions étant cumulatives, il convient de débouter la société des centres de santé DENTALY TROYES de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé du juge des référés du tribunal judiciaire de Reims en date 22 janvier 2025.

Sur la demande reconventionnelle de la SCI CENTRE GARE aux fins de radiation du rôle de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 24/00494,

Aux termes de l'article 524 1er alinéa du code de procédure civile, « lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision ».

En l'espèce, la SCI CENTRE GARE sollicite la radiation du rôle de l'affaire puisqu'elle expose que la SCSD n'aurait pas réglé l'intégralité de l'indemnité d'occupation suite à l'ordonnance rendue de sorte que la créance en principal de la SCI CENTRE GARE s'élève à la somme restante de 15 641,72 euros.

Elle soutient que la créance totale de la SCI CENTRE GARE s'élèverait au 28 février 2025 à la somme de 41 988,30 euros et qu'elle a perçu les sommes suivantes :

26 317,37 euros le 7 avril 2025,

2 073,06 euros le 17 avril 2025 suite à une saisie-attribution,

13 578,62 euros le 9 mai 2025.

Il convient de relever que le juge des référés du tribunal judiciaire de Reims a condamné la SCSD au paiement des sommes suivantes :

26 317,37 euros TTC au titre des loyers et charges et indemnités d'occupation selon décompte arrêté le 8 novembre 2024,

2 456,87 euros au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle égale à un mois de loyer indexé, (échéance de septembre et octobre 2024 à déduire), calculée prorata temporis jusqu'à la libération effective des lieux,

1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

les entiers dépens de l'instance.

Dès lors, la SCSD n'a pas réglé la totalité de l'indemnité d'occupation suite à l'ordonnance rendue de sorte que la créance en principal de la SCI CENTRE GARE s'élève à la somme restante de 15 641,72 euros (pièce n°20) dans la mesure où la SCSD n'a pas libéré les lieux.

La SCSD soutient que l'expulsion des lieux loués entraînerait la perte du fonds de commerce de dentisterie et une perte d'emploi pour les 14 salariés qui y sont attachés.

Toutefois, il y a lieu de relever que l'expulsion des lieux loués n'empêche pas la SCSD de louer d'autres lieux sans entraîner la perte d'emploi pour les 14 salariés.

Il convient également de constater que la SCSD ne justifie pas de l'état réel de son patrimoine et de ses ressources, ne permettant nullement de démontrer l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives en cas d'exécution de la décision de première instance.

Aucun élément n'est davantage produit par la société SCSD pour justifier que l'exécution de la décision de première instance entraînerait des conséquences manifestement excessives, autre que l'expulsion des lieux loués.

Dès lors, faute de justifier des exceptions permettant d'éviter la radiation de l'appel lorsque celle-ci est sollicitée, il convient de faire droit à la demande de la SCI CENTRE GARE et de décider de la radiation du rôle de l'appel à l'encontre de la décision rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Reims enregistrée sous le numéro RG n°24/00494.

Sur l'article 700 et les dépens,

L'équité commande que la SCSD soit condamnée à payer à la SCI CENTRE GARE, la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCSD est également condamnée aux entiers dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

REJETONS la demande présentée par la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY d'arrêt de l'exécution provisoire attachée à la décision du juge des référés du tribunal judiciaire de Reims en date du 22 janvier 2025,

ORDONNONS la radiation du rôle de la cour d'appel de Reims de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 24/00494 opposant la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY contre la SCI CENTRE GARE suite au prononcé par le tribunal judiciaire de Reims d'une ordonnance de référé du 22 janvier 2025,

RAPPELONS que la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sera autorisée sur justification de l'exécution de la décision attaquée,

DEBOUTONS la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY à verser à la SCI CENTRE GARE la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS la SOCIETE DES CENTRES DE SANTE DENTALY aux entiers dépens de la présente instance.

Le greffier Le premier président

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