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Décisions

CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 10 septembre 2025, n° 24/00212

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 24/00212

10 septembre 2025

10/09/2025

ARRÊT N° 25/318

N° RG 24/00212

N° Portalis DBVI-V-B7I-P6ND

NA - SC

Décision déférée du 18 Décembre 2023

TJ de TOULOUSE - 23/02759

A.MICHEL

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 10/09/2025

à

Me Jacques MONFERRAN

Me Emmanuel HILAIRE

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

S.A. MIC INSURANCE COMPANY

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Jacques MONFERRAN de la SCP MONFERRAN - ESPAGNO - SALVADOR, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)

Représentée par Me Emmanuel PERREAU de la SELASU PERREAU AVOCATS, avocat au barreau de PARIS (plaidant)

INTIMES

Madame [N] [U] épouse [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Monsieur [R] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentés par Me Emmanuel HILAIRE, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. HRD CONSTRUCTIONS

[Adresse 6]

[Localité 4]

Sans avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 juin 2025 en audience publique, devant la cour composée de :

M. DEFIX, président

S. LECLERCQ, conseillère

N. ASSELAIN, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats C. IZARD

ARRET :

- PAR DEFAUT

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE ET PROCEDURE

M. [R] [Y] et Mme [N] [U] épouse [Y] ont fait construire une maison à usage d'habitation sur une parcelle située [Adresse 5] à [Localité 3] (31), selon permis de construire du 31 mai 2021.

Les travaux de terrassement et gros oeuvre ont été confiés à la société à responsabilité limitée (Sarl) Hrd Constructions, selon devis des 1er et 28 février 2021.

La Sarl Hrd Constructions était assurée, selon contrat garantissant sa responsabilité décennale et sa responsabilité civile, auprès de la société anonyme (Sa) Mic Insurance Company.

La déclaration d'ouverture de chantier a été déposée le 31 août 2021.

En janvier 2022, alors que les travaux étaient en cours, M. et Mme [Y] ont constaté des malfaçons affectant les fondations, l'absence d'arase étanche, l'absence de drain périphérique ainsi qu'un défaut de liaison des poteaux des grandes baies vitrées avec les fondations. Ils ont par ailleurs relevé le non respect du permis de construire, ainsi que la méconnaissance des règles d'urbanisme relatives aux distances minimales par rapport aux limites séparatives.

L'assureur de M. et Mme [Y] a mandaté le cabinet Saretec pour réaliser une expertise amiable. Le rapport d'expertise a été déposé le 6 avril 2022.

Un constat d'huissier a été dressé le 16 juin 2022 à la demande de M. et Mme [Y].

Par ordonnance du 9 septembre 2022, le juge des référés, saisi par M.et Mme [Y] après échec des démarches amiables, a désigné M.[I] [B] pour rechercher la cause des désordres et les moyens d'y remédier. L'expert a confié à M. [X] [T], en qualité de sapiteur, la réalisation de relevés d'implantation des ouvrages par rapport aux limites séparatives.

Le rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 9 mai 2023.

Par actes des 14 et 15 juin 2023, M. et Mme [Y], dûment autorisés par ordonnance du 12 juin 2023, ont fait assigner la Sarl Hrd Constructions et la Sa Mic Insurance Company, à jour fixe, devant le tribunal judiciaire de Toulouse, pour obtenir la résiliation du marché conclu avec la société Hrd Constructions et la réparation de leurs préjudices.

Par jugement du 18 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- 'dit que la Sarl Hrd Constructions engage sa responsabilité sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil précité,

- déclaré la Sarl Hrd Constructions entièrement responsable,

- débouté la Sarl Hrd Constructions de sa demande de déclaration de responsabilité partielle pour sa part à hauteur de 80%,

- prononcé la résolution du contrat de louage d'ouvrage entre M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] d'une part, et la Sarl Hrd Constructions d'autre part,

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] les sommes suivantes :

' la somme de 88.007,89 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des ouvrages de reprises,

' la somme de 22.640 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des loyers versés en raison du retard pris par les travaux,

' la somme de 6.485,78 euros à titre de préjudice matériel correspondant au montant des frais bancaires supplémentaires liés à la nécessité de prolonger le différé de remboursement du crédit,

- débouté M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] de leur demande de condamnation à des dommages et intérêts à titre de préjudice moral,

- condamné la Sarl Hrd Constructions à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] la somme de 26.680,19 euros à titre de trop perçu,

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,

- rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit'.

Par déclaration du 18 janvier 2024, la Sa Mic Insurance Company a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] les sommes suivantes :

' la somme de 88.007,89 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des ouvrages de reprises,

' la somme de 22.640 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des loyers versés en raison du retard pris par les travaux,

' la somme de 6.485,78 euros à titre de préjudice matériel correspondant au montant des frais bancaires supplémentaires liés à la nécessité de prolonger le différé de remboursement du crédit,

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,

- condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie D'assurance Mic Insurance Company à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Selon avis du 2 février 2024, l'affaire a été fixée à bref délai selon les modalités des articles 904-1 et 905 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 avril 2024, la Sa Mic Insurance Company, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1231-1 et 1792 du code civil et des articles L. 112-6, L. 113-5 et L. 121-1 du code des assurances, de:

- infirmer le jugement du 18 décembre 2023 en ce qu'il a :

' condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company à payer à M. [R] [Y] et Mme [N] [Y] les sommes suivantes :

* la somme de 88.007,89 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des ouvrages de reprises,

* la somme de 22.640 euros à titre de préjudice matériel correspondant au coût des loyers versés en raison du retard pris par les travaux,

* la somme de 6.485,78 euros à titre de préjudice matériel correspondant au montant des frais bancaires supplémentaires liés à la nécessité de prolonger le différé de remboursement du crédit,

' condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,

' condamné in solidum la Sarl Hrd Constructions et la compagnie d'assurance Mic Insurance Company à payer à M. et Mme [Y] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,

- confirmer le jugement du 18 décembre 2023 en ce qu'il a débouté les consorts [Y] de leur demande au titre du prétendu préjudice moral,

Et statuant à nouveau,

À titre principal,

- débouter M. et Mme [Y] ainsi que toute partie de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de Mic Insurance Company recherchée en qualité d'assureur de la société Hrd Constructions dans la mesure où les garanties de la concluante ne sont pas mobilisables en l'espèce,

À titre subsidiaire,

- faire application de la franchise de 1.500 euros opposable aux tiers,

En tout état de cause,

- débouter toute partie de toute demande, fin ou prétention en ce qu'elle serait dirigée à l'encontre de Mic Insurance Company,

- condamner M. et Mme [Y] ou toute partie succombante à payer à la compagnie Mic Insurance Company une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les demandeurs aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 mars 2024, signifiées à la société Hrd Constructions par acte du 23 mai 2024, M. [R] [Y] et Mme [N] [Y], intimés et appelants à titre incident, demandent à la cour, au visa des articles 1124 et 1231-1 du code civil, de :

Sur la confirmation du jugement entrepris,

- confirmer le jugement rendu le 18 décembre 2023 par le tribunal judiciaire de Toulouse, et ainsi,

- prononcer la résiliation du marché conclu avec la société Hrd Constructions à ses torts exclusifs, compte tenu des manquements imputables à cette entreprise,

- condamner la société Hrd Constructions et la société 'Millenium' Insurance Company in solidum à payer à M. et Mme [Y] une somme de 88.007,89 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de démolition/ reconstruction devant être entrepris en raison de l'erreur d'implantation relevée par l'expert,

- condamner la société Hrd Constructions et la société 'Millenium' Insurance Company in solidum à payer à M. et Mme [Y] une indemnité de 22.640 euros au titre des loyers exposés en pure perte en raison du retard imputable à la société Hrd Constructions,

- condamner la société Hrd Constructions à rembourser à M. et Mme [Y] une somme de 26.680,19 euros toutes taxes comprises au titre du trop-perçu, compte tenu des travaux réellement exécutés,

- condamner la société Hrd Constructions et la société 'Millenium' Insurance Company in solidum à payer à M. et Mme [Y] la somme de 6.485,78 euros au titre des frais bancaires supplémentaires liés à la nécessité de prolonger le différé de remboursement,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum la société 'Millenium' Insurance Company et la société Hrd Constructions à verser à M. et Mme [Y] la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

Sur la réformation du jugement entrepris,

- condamner la société Hrd Constructions à payer à M. et Mme [Y] une indemnité de 5.000 euros au titre du préjudice moral spécifique subi par ces derniers,

Sur les frais irrépétibles et dépens d'appel,

- condamner la société Hrd Constructions et la société 'Millenium' Insurance Company in solidum à payer à M. et Mme [Y] une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Hrd Constructions et la société 'Millenium' Insurance Company in solidum aux entiers dépens de l'instance.

La Sarl Hrd Constructions, intimée, n'a pas constitué avocat, et a régulièrement reçu signification de la déclaration d'appel le 8 février 2024, selon les modalités prévues par l'article 659 du code de procédure civile .

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 juin 2025. L'affaire a été examinée à l'audience du 23 juin 2025.

MOTIFS

* Sur la saisine de la cour

L'appel ne porte pas sur les dispositions du jugement prononçant la résolution du contrat liant M.et Mme [Y] à la société Hrd Constructions et condamnant cette société à restituer aux maîtres de l'ouvrage la somme de 26.680,19 euros au titre d'un trop perçu.

En l'absence d'appel incident sur ces chefs de jugement, la cour n'en est pas saisie.

* Sur la garantie de la société Mic Insurance Company

Le contrat d'assurance 'Construct'or' souscrit par la société Hrd Constructions auprès de la société Mic Insurance Company comporte notamment les garanties suivantes:

- responsabilité civile avant et après réception-livraison,

- et responsabilité civile décennale.

Il n'est pas contesté que la garantie responsabilité décennale n'est pas applicable en l'espèce, les travaux n'étant pas achevés et n'ayant pas fait l'objet d'une réception, en raison notamment d'une erreur d'implantation du bâtiment induisant la démolition des ouvrages réalisés.

La garantie responsabilité civile couvre selon les conditions particulières souscrites par la société Hrd Constructions le 16 août 2021 'les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l'Assuré pour les dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers et résultant de ses activités professionnelles déclarées, que ce soit en cours ou après exécution des travaux'. Elle comporte les deux volets 'responsabilité civile avant réception-livraison' et 'responsabilité civile après réception- livraison'.

Dans le cadre du volet 'responsabilité civile avant réception-livraison', dont se prévalent M.et Mme [Y], l'article 3.1.1.1 des conditions générales prévoit que:

'Sont garanties les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber à l'Assuré en raison de Dommages corporels, matériels, immatériels consécutifs ou non consécutifs, causés à des Tiers au cours de l'exploitation des Activités assurées mentionnées aux Conditions Particulières, et ce en tant que :

- employeur,

- propriétaire, locataire, exploitant ou dépositaire à quelque titre que ce soit, de tous biens meubles ou immeubles.

Font partie intégrante de Ia garantie :

- les dommages corporels causés aux préposés (...)

- les dommages matériels et immatériels consécutifs subis par les préposés (...)

- les dommages aux Existants

Le présent contrat garantit Ies conséquences pécuniaires de la responsabilité civile incombant à l'Assuré en raison des Dommages matériels et immatériels consécutifs causés aux Existants dans le cadre des activités mentionnées aux Conditions Particulières'.

La société Mic Insurance Company soutient que le risque couvert ne s'est pas réalisé, et que la garantie 'responsabilité civile avant réception-livraison' n'est pas applicable, compte tenu de l'objet de la garantie, puisqu'il s'agit d'une police dite 'responsabilité civile exploitation', qui a pour objet de garantir l'entreprise du risque inhérent à toute activité professionnelle, et n'a pas vocation à couvrir les dommages à l'ouvrage de l'assuré. Elle indique que la société Hrd Constructions est intervenue en qualité de locateur d'ouvrage, et non en qualité d'employeur, propriétaire, exploitant ou dépositaire, comme le prévoit le contrat. Elle en conclut que la garantie 'RC exploitation' est en l'espèce non mobilisable non à raison des exclusions de garantie, mais en vertu de l'objet et du domaine de la garantie.

M.et Mme [Y] soutiennent que la garantie 'responsabilité civile avant réception- livraison', qui garantit notamment les dommages matériels et immatériels consécutifs ou non consécutifs, causés à des tiers au cours de l'exploitation des activités assurées, est applicable. Ils font valoir que dans le doute, les termes du contrat doivent être interprétés en faveur de l'assuré, et notent en particulier l'existence d'une exclusion de garantie visant 'les fissures atteignant lorsqu'elles ne compromettent pas la solidité de la construction ou la sécurité des occupants'.

La cour relève que la clause litigieuse, qui prévoit que 'font partie intégrante de Ia garantie' certains dommages expressément désignés, n'énonce pas une liste limitative des dommages garantis. Il n'est pas contesté d'autre part qu'aucune des exclusions de garantie contractuelles n'est en l'espèce applicable. En particulier, l'exclusion des 'dommages qui, en droit français, engagent la responsabilité des constructeurs en vertu des articles 1792, 1792-2, 1792-3 du code civil ou la responsabilité des fabricants ou assimilés en vertu de l'article 1792-4 du code civil' ne peut trouver application en l'espèce, l'erreur d'implantation de l'ouvrage constatée en cours de chantier ne relevant que de la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur.

Par ailleurs, il est établi que la société Hrd Constructions, assurée auprès de la société Mic Insurance Company, a engagé sa responsabilité civile en raison des dommages matériels et immatériels consécutifs causés à M.et Mme [Y], tiers au contrat d'assurance, 'au cours de l'exploitation des activités assurées', au sens de l'article 3.1.1.1 des conditions générales.

Les termes de cette clause, qui précisent que les conséquences de la responsabilité civile de l'assuré ne sont garanties que si celui-ci agit, dans le cadre des activités déclarées, 'en tant que (...) propriétaire, locataire, exploitant ou dépositaire à quelque titre que ce soit, de tous biens meubles ou immeubles', ne sont ni clairs ni précis, et nécessitent une interprétation.

En application de l'article 1190 du code civil, qui dispose que dans le doute, le contrat d'adhésion s'interprète contre celui qui l'a proposé, les termes du contrat doivent être interprétés en faveur de l'assuré, et des tiers bénéficiaires du contrat d'assurance.

Il peut en l'espèce être considéré que la société Hrd Constructions, dans le cadre de ses travaux de maçonnerie relevant de l'activité professionnelle garantie, agissait 'en tant que (...) propriétaire,(...) exploitant ou dépositaire à quelque titre que ce soit, de tous biens meubles ou immeubles', M.et Mme [Y] rappelant qu'avant réception, les entreprises conservent la garde des ouvrages en cours de réalisation, le transfert des risques étant concomitant aux opérations de réception.

Il n'est pas démontré que les dommages à l'ouvrage de l'assuré échappent au domaine de la garantie 'responsabilité civile avant réception-livraison', alors que l'exclusion visant 'les fissures atteignant lorsqu'elles ne compromettent pas la solidité de la construction ou la sécurité des occupants' (sic, article 3.1.1.1, p 13), qui n'est pas limitée aux fissures affectant les biens existants ou les biens de tiers au contrat de louage d'ouvrage, implique a contrario la garantie des fissures de l'ouvrage qui compromettent la solidité de la construction ou la sécurité des occupants, et alors qu'aucune exclusion expresse, applicable à la garantie 'responsabilité civile avant réception-livraison', ne vise les dommages affectant l'ouvrage de l'assuré, cette exclusion n'étant prévue que dans le cadre de la garantie 'responsabilité civile après réception-livraison'.

La garantie de la société Mic Insurance Company est donc acquise.

La société Mic Insurance Company ne conteste pas l'évaluation des dommages matériels justement retenue par le tribunal, à hauteur de la somme de 88.007,89 euros. Cette indemnité correspond en effet au coût des travaux de démolition et de reconstruction nécessaires pour remédier à l'erreur d'implantation de la construction, tel qu'il a été évalué par l'expert judiciaire.

La société Mic Insurance Company ne conteste pas davantage les préjudices procédant du retard d'exécution des travaux, dont le tribunal a fait une exacte évaluation, en retenant la somme de 22.640 euros au titre des loyers réglés par M.et Mme [Y] pendant 16 mois, et la somme de 6.485,78 euros au titre des frais bancaires supplémentaires liés à la nécessité de prolonger le différé de remboursement de l'emprunt.

En ce qui concerne les dommages immatériels, l'assureur fait valoir que sont exclus de la police 'Les dommages immatériels non consécutifs, sauf s'ils résultent :

- de trouble de voisinage imputables à un fait ou un évènement accidentel,

- de l'absence ou du retard de livraison et/ou d'exécution des produits ou travaux dus à l'absence de l'Assuré ou de ses préposés consécutifs à un dommage corporel d'origine accidentelle,

- d'un dommage matériel accidentel aux biens dont l'assuré est locataire, dépositaire, gardien et plus généralement possesseur à quelque titre que ce soit, s'ils sont en état normal d'entretien, de fonctionnement ou de conditionnement'.

Cependant, c'est à tort que la société Mic Insurance Company soutient que les loyers et frais bancaires réglés par M.et Mme [Y] ne sont pas consécutifs à un préjudice matériel garanti, dès lors qu'il a été retenu que les dommages matériels résultant de l'erreur d'implantation relevaient en l'espèce de la garantie 'responsabilité civile avant réception- livraison'.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Mic Insurance Company, in solidum avec la société Hrd Constructions, au paiement de la somme de 88.007,89 euros au titre des dommages matériels, et des sommes de 22.640 euros et 6.485,78 euros au titre des dommages consécutifs.

La cour précise toutefois que s'agissant d'une garantie facultative, la franchise contractuelle de 1.500 euros est opposable aux tiers.

* Sur l'appel incident de M.et Mme [Y], à l'encontre de la société Hrd Constructions

M.et Mme [Y] demandent l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté leur demande d'indemnisation au titre du préjudice moral, et concluent à la condamnation de la société Hrd Constructions à leur payer la somme de 5.000 euros de ce chef.

Ils font valoir notamment que la société Hrd Constructions n'a pas procédé à l'exécution du jugement mettant à sa charge le remboursement d'un trop-perçu de plus de 26.000 euros, qu'ils ont découvert d'autres désordres sur les ouvrages de la société Hrd Constructions qui entraînent des délais d'exécution plus longs et un surcoût financier, qu'en raison de la précarité de leur situation ils sont dans l'incapacité de demander un complément d'expertise, et qu'en raison du retard accumulé sur ce chantier, ils ignorent s'ils seront longtemps en capacité d'honorer le remboursement des échéances de leur prêt, en complément d'un loyer. La réalité du préjudice psychologique consécutif aux fautes du constructeur n'est pas contestable.

Ces éléments justifient la condamnation de la société Hrd Constructions à payer à M.et Mme [Y] une indemnité complémentaire de 3.000 euros en réparation de leur préjudice moral.

Le jugement est infirmé en ce sens.

* Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance sont confirmées, étant précisé que l'exclusion de garantie contractuelle des 'frais de défense' n'a pas d'incidence sur l'application, à l'encontre de l'assureur, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Mic Insurance Company, qui perd son procès en appel, doit également supporter les dépens d'appel, et régler à M.et Mme [Y] une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par défaut et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement rendu le 18 décembre 2023 par le tribunal judiciaire de Toulouse, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de M.et Mme [Y] tendant à l'indemnisation de leur préjudice moral,

Statuant à nouveau sur ce chef de décision infirmé et y ajoutant,

Dit que la société Mic Insurance Company est en droit d'opposer à tous sa franchise contractuelle, d'un montant de 1.500 euros ;

Condamne la société Hrd Constructions à payer à M.et Mme [Y] une indemnité complémentaire de 3.000 euros en réparation de leur préjudice moral ;

Condamne la société Mic Insurance Company aux dépens d'appel ;

Condamne la société Mic Insurance Company à payer à M.et Mme [Y] la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

La greffière Le président

M. POZZOBON M. DEFIX.

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