CA Grenoble, ch. civ. B, 9 septembre 2025, n° 21/01968
GRENOBLE
Arrêt
Autre
N° RG 21/01968 - N° Portalis DBVM-V-B7F-K3F4
C1
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à
la SELARL CABINET HADRIEN PRALY
la SELARL SELARL ROBICHON & ASSOCIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU MARDI 09 SEPTEMBRE 2025
Appel d'un jugement (N° R.G 18/05218) rendu par le tribunal judiciaire de Grenoble en date du 08 avril 2021, suivant déclaration d'appel du 28 Avril 2021
APPELANTE :
S.A.S. SOCIETE FRANCAISE DE MAISONS INDIVIDUELLES (venant aux droits de la société AISH), prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Hadrien PRALY de la SELARL CABINET HADRIEN PRALY, avocat au barreau de LA DRÔME
INTIM ÉS :
M. [D] [U]
né le 23 Octobre 1965 à [Localité 7] (69)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Jean ROBICHON de la SELARL ROBICHON & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Romain BLANC, avocat au barreau de GRENOBLE
S.E.L.A.R.L. [G] & ASSOCIES représentée par Maître [H] [G], ès qualité de Liquidateur judiciaire de la SOCIETE FRANÇAISE DE CONSTRUCTION DE MAISONS INDIVIDUELLES SFMI, désignée en cette qualité par jugement du Tribunal de commerce de ROMANS-SUR-ISERE en date du 29 novembre 2022, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Anne-Laure PLISKINE, conseillère faisant fonction de présidente,
Mme Ludivine CHETAIL, conseillère
M Lionel BRUNO, conseiller
DÉBATS :
A l'audience publique du 12 Mai 2025, Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère faisant fonction de Présidente, et Mme Ludivine Chetail, conseillère chargée du rapport d'audience, assistées de Mme Claire Chevallet, greffière, ont entendu seules les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.
Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [D] [U] a conclu le 18 avril 2014 un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans avec la SAS Ambition Isère Savoie (AISH), appartenant au groupe Avenir.
Le contrat prévoit notamment que :
- des travaux à hauteur de 8 520 euros étaient réservés par le maître d'ouvrage, en l'occurrence les travaux de VRD ;
- la durée d'exécution des travaux serait de 13 mois à compter du démarrage effectif des travaux.
La réception de l'ouvrage a eu lieu le 12 février 2018, et a fait l'objet de 22 réserves.
A cette date, l'intégralité du prix de la constructiona a été réglée, 5 % du prix étant par ailleurs versé sur un compte séquestre dans le cadre de la retenue de garantie, soit 6 679,35 euros.
Le 26 octobre 2018, la SAS AISH a fait l'objet d'une fusion-absorption par la SAS société francaise de maisons individuelles (SFMI) avec effet à compter du 1er janvier 2018.
Les parties ne sont pas parvenues à un accord concernant la reprise des réserves.
Par assignation du 11 décembre 2018, M. [U] a saisi le tribunal de grande instance de Grenoble afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la garantie de parfait achèvement.
Par jugement en date du 8 avril 2021, le tribunal judiciaire de Grenoble a :
- constaté que la société SFMI vient aux droits de la société AISH ;
- rejeté la demande de rabat de clôture présentée par M. [U] et déclaré irrecevables les conclusions prises par lui le 9 février 2021 ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [D] [U] les sommes suivantes :
15 268,29 euros au titre des travaux de reprise,
18 159,67 euros au titre des pénalités de retard,
267,98 euros au titre du préjudice de jouissance et des frais résultant de l'absence de raccordement des eaux usées au collecteur,
492,67 euros au titre de l'enlèvement des gravats,
soit un total de 34 188,61 euros ;
- débouté M. [D] [U] de sa demande au titre du préjudice moral enduré pour l'absence de raccordement et des frais de constat d'huissier ;
- ordonné la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6 679,35euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire cles Alpes, au profit de la société SFMI et la compensation entre ce solde (6 679,35 euros) et les sommes dues par la société SFMI à M. [D] [U] (34 188,61 euros) ;
- condamné la société SFMI aux entiers dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de pocédure civile ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [U] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration d'appel en date du 28 avril 2021, la SAS SFMI a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
M. [D] [U] a interjeté appel incident par conclusions notifiées par voie électronique le 21 septembre 2021.
La SAS SFMI a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère le 29 novembre 2022.
M. [D] [U] a déclaré sa créance au liquidateur 19 décembre 2022 et a mis en cause la SELARL [G] & associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS SFMI par assignation du 7 novembre 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 7 décembre 2021, la SAS SFMI demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- condamné la société SFMI à payer à M. [D] [U] les sommes suivantes :
15 268, 29 euros au titre des travaux de reprise,
18 159, 67 euros au titre des pénalités de retard,
267, 98 euros au titre du préjudice de jouissance et des frais résultant de l'absence de raccordement des eaux usées au collecteur,
492, 67 euros au titre de l'enlèvement des gravats ;
- condamné la société SFMI aux entiers dépens ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [U] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la société SFMI de ses demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens ;
Elle demande également à cour de confirmer le jugement entrepris pour le surplus, et statuant à nouveau de :
- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions de comme étant infondées ;
- ordonner en conséquence la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6 679, 35 euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire des Alpes, au profit de la SFMI, venant aux droits de la société AISH ;
- ordonner la compensation entre les créances et dettes réciproques ;
- condamner M. [U] à payer à la SFMI, venant aux droits de la société AISH, une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamner M. [U] aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 avril 2024, l'intimé demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré ;
- juger que les créances sont éteintes du fait de leur paiement effectué par la société SFMI en exécution de la décision de première instance, paiement antérieur à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société SFMI ;
- très subsidiairement, y ajoutant, fixer au passif de la société SFMI les créances dont il est précédemment demandé confirmation ;
- réformer le jugement dont il est fait appel en ce qu'il a ordonné la déconsignation du solde du prix convenu au profit de la société SFMI tout en prononçant la compensation de cette somme avec les sommes auxquelles la société SFMI était condamnée ;
- statuant de nouveau, ordonner la déconsignation du solde du prix convenu entre les mains de M. [U] et prononcer la compensation de cette somme avec le solde contractuel du marché, conformément à ce qui a été réalisé pour l'exécution provisoire de la décision de première instance ;
- fixer au passif de la société SFMI la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- fixer également au passif de cette même société la somme de 238 euros au titre des dépens de l'instance.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la demande d'indemnisation de M. [U] au titre de la garantie de parfait achèvement
A. sur la garantie de parfait achèvement due par la société SFMI
Moyens des parties
M. [U] demande la mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement. Il indique que 22 réserves ont été formulées aux termes du procès-verbal de réception et que le constructeur n'en a contesté qu'une, relative au pare-vapeur, et s'est engagée à reprendre ces réserves dans un délai de 60 jours. Il conteste la réalité de toute intervention de la part de la société SFMI et soutient n'avoir jamais eu de réponse à son courrier de mise en demeure du 28 mai 2018. Il rappelle qu'il appartient au constructeur de prouver qu'il a bien procédé à la levée des réserves et qu'il a lui même fait constater la persistance des désordres par huissier de justice.
La SA SFMI sollicite le rejet de l'ensemble des demandes présentées par M.[U] aux motifs qu'il n'est pas rapporté la preuve de la persistance des réserves et de l'empêchement du constructeur à justifier de leur levée. Elle soutient que bien avant l'introduction de l'instance, elle a rappelé à M. [U] que toutes les réserves fondées avaient été levées et l'a invité à régularisé le constat idoine, sans que M. [U] ne lui réponde. Elle relève que M. [U] ne produit aucun élément de nature à prouver que certaines réserves n'avaient pas été levées dès lors qu'il n'est pas justifié du paiement de factures et que le constat d'huissier n'est pas contradictoire, ne lui serait pas opposable et ne peut pas à lui seul fonder la décision du tribunal. Elle estime que M. [U] l'a purement et simplement empêchée de rapporter la preuve de l'exécution de ses obligations.
Réponse de la cour
L'article 1792-6 du code civil prévoit :
« La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.
La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.
En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.
L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.
La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage.»
En l'absence de notification préalable à l'entrepreneur des désordres révélés postérieurement à la réception, qu'une assignation, même délivrée avant l'expiration du délai d'un an prévu à l'article 1792-6 du code civil, ne peut suppléer, le maître de l'ouvrage ne peut être indemnisé sur le fondement de la garantie de parfait achèvement (3ème Civ., 13 juillet 2023, n° 22-17.010).
En application de l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
La signature du procès-verbal de réception avec réserves par le constructeur le rend débiteur de la garantie de parfait achèvement. Il est alors tenu d'une obligation de résultat de réaliser les travaux de reprise dus au titre de la garantie de parfait achèvement dans le délai imparti. A défaut, il engage sa responsabilité contractuelle.
En l'espèce, il appartient donc à M. [U] de démontrer que la SAS AISH lui doit sa garantie de parfait achèvement et il appartient à la SAS SFMI, venant aux droits de la SAS AISH, de démontrer qu'elle a exécuté cette obligation.
Le 12 février 2018, les deux parties ont signé un procès-verbal aux termes duquel M. [U] a réceptionné l'ouvrage en émettant les réserves suivantes :
« 1. Fourniture et pose d'un moteur de porte sectionnelle yc MES
2. Fourniture et pose trappon métallique 125 KN sur accès VS
3. Nettoyage VS
4. Coffrage et bouchage mousse PU multiples endroits VS (liaison batimt)
5. Reprise fixations réseaux [Localité 8] en VS
6. Nettoyage encombrants garage + sol
7. Reprise du muret d'accès - passage 3,5 ml
8. Nettoyage de noue débris de tuiles + cintre
9. Remplacement porte d'entrée à l'identique
10. Fourniture 5 grilles ø 100 anti insecte
11. Porte intérieure poussant droit à remplacer
12. Manque une tuile à douille
13. Un joint sur porte fenêtre à remplacer
14. Fourniture du rapport test perméabilité
15. Reprise impact derrière porte entrée et finitions enduit sur MAP
16. Deux bouches VMC à déplacer + bouchage MAP/enduit
17. Reprises joint carrelage salle de bains
18. Réglage portes intérieures
19. Reprises socle béton cellier autour des nourrices
20. Absence de pare vapeur sur doublures périphériques et plafond. Cette réserve est contestée dans la mesure où il n'existe pas de non conformité à une règle impérative opposable au constructeur.
21. Le bloc VMC double flux Primocosy HR n'est pas celui prévu au contrat Atlantic Duolix 90 %. De plus, les raccordements et fixations ne sont pas conformes yc condensats. Position VMC dans des combles non aménageables.
22. Reprise fixation trappe d'accès yc placo et joints ».
Les parties ont fixé le délai pour effectuer les travaux de reprise des réserves à 60 jours à compter de la réception.
Dès lors que la société AISH était représentée lors des opérations de réception et que son représentant a signé le procès-verbal de réception, sans émettre de protestations quant aux réserves relevées, à l'exception de celle portant sur le pare-vapeur et dont il ne réclame désormais pas indemnisation, il doit être considéré qu'elle a reconnu l'existence des désordres et défauts de conformité.
Par suite, il est établi que la société AISH doit sa garantie de parfait achèvement à M. [U]. L'ensemble des désordres et défauts de conformité dont M. [U] demande réparation figurent parmi les réserves mentionnées au procès-verbal de réception, sauf la mise en service de la pompe à chaleur et qui n'a pas fait l'objet d'une notification de réserves dans le délai d'un an suivant la réception.
M. [U] peut donc être indemnisé sur le fondement de la garantie de parfait achèvement si les travaux de reprise n'ont pas été réalisés avant la date fixée par les parties, soit le 13 avril 2018, sauf en ce qui concerne la pompe à chaleur.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 mai 2018, l'avocat de M. [U] a mis en demeure le groupe Avenir notamment 'de procéder à la levée des réserves, dans un délai qui, compte tenu du temps déjà écoulé depuis la réception, et de la toute récente proposition d'organiser une réunion sur place le 24 mai prochain, pourrait être fixé au 10 juin 2018'.
Par courrier du 27 avril 2018, la SAS AISH a indiqué à M. [U] que 'la totalité des travaux de reprise des réserves notifiées sur le procès-verbal de réception a été dûment réalisée' et lui a demandé de lui retourner un constat de levée des réserves.
Aux termes d'un procès-verbal du 30 juillet 2018, un huissier de justice a constaté que le tuyau d'évacuation des eaux usées de la maison n'était pas raccordé au tuyau collecteur et qu'en conséquence des excréments se trouvaient sur le sol et le mur du vide sanitaire.
Par courrier en date du 1er août 2018, M. [U] a informé le groupe Avenir de l'absence de raccordement des eaux usées.
Par lettres recommandées en date du 29 octobre 2018, la SAS AISH a mis en demeure M. [U] de lever les réserves.
Par constat du 8 novembre 2019, un huissier de justice a notamment relevé :
- 'à l'extérieur de la maison, les deux tuyaux protégés par une gaine blanche sont raccordés à la centrale extérieure' ;
- 'les cinq tuyaux d'aération ne sont pas munis de grilles anti-insectes ou anti-nuisibles' ;
- 'dans le garage, il n'y a pas de moteur pour la porte coulissante' ;
- 'dans le garage, il n'y a pas de trappe métallique pour fermer le trouve d'accès au vide sanitaire' ;
- 'à l'extérieur du côté est, une petite trace de choc sur le côté droit de la porte d'entrée blanche' ;
- 'du côté est, le joint de la porte vitrée de la cuisine est abîmé en partie haute';
- 'à l'intérieur, derrière la porte d'entrée, la cloison est légèrement enfoncée à la hauteur de la poignée de la porte' ;
- 'à l'intérieur, dans le local technique, la finition n'est pas réalisée à la jonction entre les tuyaux rouges et bleus et le sol surélevé au niveau des plinthes' ;
- 'les tuyaux ne tiennent que faiblement à la VMC et leur fixation ne s'emboîte pas solidement dans le coffret de la VMC' ; ' le moteur de la VMC est maintenu dans sa position par un moyen de fortune constitué de fils de fer attachés aux fermettes de la charpente' ;
- 'à l'extérieur de la maison, du côté nord-ouest, présence de morceaux de tuiles dans la noue de la toiture' ;
- 'dans le vide sanitaire, présence de divers déchets'.
Par courrier du 27 janvier 2020, la SAS SFMI a indiqué ne pas avoir pu être présente lors de constatations d'huissier réalisées le 8 novembre 2019 et a proposé un nouveau constat en février 2020.
Selon l'article 1er de l'ordonnance du 2 juin 2016 relative au statut des commissaires de justice, sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, les constatations matérielles effectuées par commissaire de justice font foi jusqu'à preuve contraire.
Ainsi, d'une part la SAS SFMI ne justifie d'aucune démarche auprès de M. [U] pour la reprise des réserves dans le délai fixé contractuellement, et d'autre part elle ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait réalisé les travaux de reprise, le seul courrier qu'elle a adressé le 27 avril 2018, étant insuffisant puisqu'en contradiction avec les contestations de M. [U] et les constatations de l'huissier postérieurement à ce courrier.
Il n'est pas davantage démontré par la SAS SFMI que M. [U] aurait fait obstacle à la reprise des réserves.
C'est donc à raison que la juridiction de première instance a jugé que la SAS AISH était tenue d'une garantie de parfait achèvement à l'égard de M. [U], a engagé sa responsabilité contractuelle en manquant à ses obligations et devait indemnisation à M. [U] des préjudices subis en conséquence, sauf concernant un défaut de mise en service de la pompe à chaleur.
B. sur les préjudices consécutifs subis par M. [U]
Moyens des parties
La SAS SFMI soutient que M. [U] ne démontre pas d'une part que les devis portent sur des travaux nécessaires à la levée des réserves, ni que leur coût est conforme à la réalité du marché. Elle estime qu'il est exclu de statuer sur la seule base de devis et facture émanant du demandeur, auquel elle conteste toute pertinence, a fortiori en l'absence de tout constat contradictoire de l'existence même des défauts allégués.
Elle indique en particulier que la VMC qui a été installée est tout aussi performante que le modèle visé au contrat, qui n'était plus produit à la date de réalisation des travaux. Elle souligne que le modèle visé par le devis produit par M. [U] est encore différent. Elle estime que le changement de modèle n'est absolument pas de nature à occasrionner un quelconque préjudice à M. [U] et que la demande présentée par M. [U] est disproportionnée.
M. [U] réplique que les devis correspondent parfaitement aux désordres réservés et sont parfaitement adéquats aux réserves. De plus, il fait observer que certaines réserves ont été reprises par lui pour un coût moindre. Selon lui, la société SFMI s'abstient de préciser et de critiquer les devis fournis.
M. [U] évalue la fourniture et la pose de la bonne VMC avec reprise des raccordements et fixations à la somme de 7 968,42 euros selon devis. Il précise qu'en cours de chantier, il s'est rendu compte de cette non-conformité et que le constructeur l'a lui-même admise et s'est engagé à faire poser le modèle prévu au contrat. Il soutient que le modèle par lequel la société SFMI avait prévu de remplacer celui prévu au contrat, dont la commercialisation aurait été arrêtée, ne présente pas les mêmes caractéristiques et est moins cher. Il estime que l'article 1221 du code civil dont se prévaut la SFMI n'est pas applicable en l'espèce et que sa demande n'est pas disproportionnée.
M. [U] demande la fixation du préjudice résultant du défaut de raccordement au réseau des eaux usées à la somme de 195,76 euros sur la base d'une facture. Il explique qu'il a découvert ce désordre pendant l'année de parfait achèvement et que la SFMI a ignoré sa mise en demeure d'intervenir. En tout état de cause, et subsidiairement, il estime que l'absence de raccordement au système d'évacuation des eaux usées relevait d'un désordre de nature décennale qui engage la responsabilité du constructeur dès lors qu'elle rend l'immeuble insalubre. Il estime avoir également subi un préjudice de jouissance qu'il évalue à la somme de 166,60 euros outre des frais de transport pour la somme de 101,38 euros.
M. [U] soutient qu'il a consacré cinq journées à raison de sept heures par jour au nettoyage de la noue, des débris de tuiles et du cintre, à la reprise du joint de carrelage de la salle de bains, au réglage des portes intérieures, à la reprise du socle en béton du cellier autour des nourrices, au déplacement de deux bouches VMC, à la reprise de la fixation de la trappe et du muret extérieur. Sur la base de son salaire mensuel, il a évalué ce poste de préjudice à la somme de 739 euros.
Réponse de la cour
En application de l'article 1149 du code civil, devenu l'article 1231-2, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.
Le principe de réparation intégrale implique que la victime bénéficie de l'indemnisation de son préjudice sans perte ni profit.
La preuve de l'existence d'un préjudice et celle de son évaluation peuvent être rapportées par tout moyen, sans qu'il soit nécessaire de réaliser une expertise ou un constat contradictoire. Elle peut se fonder sur un simple devis, dès lors que celui-ci est susceptible d'être discuté contradictoirement par les parties, et que la juridiction du fond apprécie souverainement le montant de l'indemnisation.
Il convient donc d'examiner réserve par réserve l'existence et l'étendue du préjudice subi par M. [U].
- sur la fourniture d'un moteur de porte de garage (réserve n° 1) :
Le contrat prévoit en page 14 'une porte de garage sectionnelle motorisée'. Une réserve a été émise à ce sujet par le maître de l'ouvrage lors de la réception.
Sur le fondement d'un devis en date du 19 juin 2018, ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 640,14 euros correspondant au prix du marché.
- sur la pose d'une trappe d'accès (réserve n° 2) :
Le contrat prévoit la fourniture et la pose d'une trappe d'accès au vide sanitaire. Une réserve a été émise à ce sujet par le maître de l'ouvrage lors de la réception.
Ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 366 euros selon devis non daté (pièce n° 33 de M. [U]).
- sur les désordres relatifs au vide sanitaire (réserve n° 3) :
Il relève de la responsabilité du constructeur au titre de la garantie de parfait achèvement de remettre au maître de l'ouvrage un ouvrage en état de fonctionnement, et notamment possédant un système d'évacuation des eaux usées efficient.
M. [U] a émis des réserves sur ce point.
Le nettoyage du vide sanitaire peut être évalué à la somme de 696 euros selon devis du 6 juillet 2018. Le coffrage et le bouchage du vide sanitaire et la reprise de fixation PVC de l'évacuation des eaux usées peut également être évalué à la somme de 71,76 euros.
M. [U] a également subi en raison de ce désordre un préjudice de jouissance lié aux odeurs nauséabondes émanant de ses toilettes. Ce préjudice peut être évalué à la somme de 200 euros.
- sur les désordres relatifs aux menuiseries (réserves n° 9, 11 et 13)
Sur la base d'un devis correspondant au remplacement de la porte d'entrée à l'identique et des joints sur la porte fenêtre, ainsi qu'au remplacement d'une porte intérieure poussant droit, outre la location d'un véhicule, correspondant aux réserves émises par M. [U], ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 1 681,27 euros.
- sur la non conformité de la VMC (réserves n° 12 et 21) :
Le contrat prévoit en page 17 une 'VMC double flux statique 90 % Atlantic Duolix en remplacement de la VMC hygro basse conso prévue initialement', de manière dérogatoire à la mention pré-rédigée en page 8 relative à l'installation d'une 'VMC simple flux Atlantic ou similaire de type Hygro B à basse consommation'.
La VMC a fait l'objet de réserves de la part de M. [U] lors de la réception en raison de l'installation d'un modèle 'bloc VMC double flux Primocosy HR'.
M. [U] avait déjà signalé cette non-conformité par courrier du 2 juin 2016 et il lui avait été répondu par courrier du 23 septembre 2016 :
'VMC : le modèle Duocosy HR prévu au contrat sera remplacé à la charge de l'électricien comme prévue sur notre marché et dans l'étude'.
Selon la documentation technique versée aux débats par la SAS SFMI, le modèle installé par la SAS AISH correspond à une VMC double flux statique basse consommation dont l'efficacité de l'échangeur est de 90 %, 86 % en combles. Ce modèle est également de la marque Atlantic.
Selon la documentation versée aux débats par M. [U], un comparatif entre les deux produits montre que le modèle initialement prévu est de meilleure qualité et recommandé pour une maison neuve. Cependant, il apparaît également que le modèle initial n'est plus commercialisé.
Ainsi, il est établi que même s'il est manifeste que la SAS AISH était dans l'incapacité de se procurer le modèle initialement prévu et l'a remplacé par un modèle approchant, elle a choisi un modèle de qualité moindre et ce sans recueillir au préalable l'accord du maître de l'ouvrage. Elle a ainsi manqué à son obligation de parfait achèvement.
La seule solution réparatoire envisageable consiste en la fourniture et la pose d'un modèle similaire à celui prévu initialement au contrat.
Selon un devis du 10 septembre 2018, la fourniture et la pose d'un caisson Duocosy HR double flux haut rendement peut être évaluée à la somme de 7968,42 euros TTC.
Le modèle proposé par ce devis correspond au même niveau de rendement et de qualité que celui initialement prévu au contrat.
Il convient donc de fixer l'indemnisation due à M. [U] à cette somme.
- sur la fourniture de grilles anti-insectes (réserve n° 10)
Ce poste de préjudice, qui n'est pas contesté par la SAS AISH, peut être évalué à la somme de 50,16 euros selon devis du 14 juin 2018.
- sur le nettoyage du garage et du sol (réserve n° 6)
Ce poste de préjudice, qui n'est pas contesté par la SAS AISH, peut être évalué à la somme de 980 euros selon une facture du 19 juin 2018.
- sur les autres désordres (réserves n° 7, 8, 16, 17, 18, 19 et 22)
Le nettoyage de la noue, des débris de tuiles et du cintre, à la reprise du joint de carrelage de la salle de bains, au réglage des portes intérieures, à la reprise du socle en béton du cellier autour des nourrices, au déplacement de deux bouches VMC, à la reprise de la fixation de la trappe et du muret extérieur n'apparaît pas représenter plus de cinq jours de travail à raison de sept heures par jour, soit 35 heures de travail.
Sur la base d'un salaire horaire de l'ordre de 15 euros, ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 525 euros.
Il convient donc d'infirmer le jugement déféré, et de fixer l'indemnisation due par la SAS SFMI à M. [U] à la somme de 13 178,75 euros [640,14 + 366 + 696 + 71,76 + 200 + 1 681,27 + 525 + 50,16 + 980 + 7 968,42 ].
2. Sur la demande d'indemnisation de M. [U] au titre de la responsabilité contractuelle
Moyens des parties
M. [U] demande l'indemnisation de l'évacuation de gravats l'ayant empêché de réaliser les travaux de VRD à sa charge.
La SAS SFMI réplique que les gravats litigieux ont été évacués le 13 juin 2017.
Réponse de la cour
En application de l'article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, en vigueur au jour de la conclusion du contrat, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il ressort des échanges de courriers entre M. [U] et la SAS AISH que le premier s'est plaint d'avoir été contraint de procéder lui-même à l'évacuation de gravats qui empêchaient la réalisation des travaux de VRD à sa charge, alors que cela incombait au constructeur.
Par courrier en date du 25 novembre 2016, la SAS AISH a répondu à M. [U] que le nettoyage du chantier avait été réalisé par ses soins, qu'il lui avait été envoyé un mail comportant une photographie le 13 juin 2016 et que l'arrêt du chantier était maintenu jusqu'à ce qu'il réalise le lot VRD.
Il ressort d'une facture en date du 23 juin 2016 adressée par la SARL SJ Bat à la SAS AISH qu'un nettoyage a été réalisé sur le chantier de M. [U], sans précision quant à la date.
Ainsi, M. [U] ne rapporte pas la preuve de ce que la SAS AISH aurait manqué à ses obligations.
Il convient donc de le débouter de sa demande d'indemnisation à ce titre et d'infirmer en conséquence le jugement déféré de ce chef.
3. Sur la demande en paiement de pénalités de retard
Moyens des parties
M. [U] demande l'indemnisation de 484 jours de retard. Il réplique que le point de départ du délai de réalisation de la construction à la date de l'ouverture du chantier le 15 septembre 2015, avec le terrassement, qui a été précédé de l'implantation. Il soutient qu'à la date du 27 juillet 2017 prévue pour la réception de l'ouvrage il a refusé la réception et la livraison de la maison qui n'était pas habitable en l'état en l'absence de chauffage et d'eau chaude sanitaire, et en l'absence de raccordement au réseau d'assainissement. Il en déduit que les travaux se sont étendus du 15 septembre 2015 au 12 février 2018. Il admet que les délais ont été suspendus pendant une première période du 19 octobre 2016 au 17 décembre 2016 pour qu'il réalise les VRD qu'il avait conservés à sa charge, précisant qu'il a été contraint de procéder au nettoyage du chantier qui ne lui incombait pas, puis du 10 mars 2017 au 27 mars 2017 correspondant à la modification des travaux VRD à sa demande, et une journée d'intempéries le 10 janvier 2017.
Il ne soutient plus en appel que des clauses du contrat relatives aux pénalités de retard devraient être réputées non écrites.
La SAS SFMI conclut au rejet de la demande aux motifs que le tribunal s'est fourvoyé sur le point de départ du délai de réalisation contractuel, a occulté les prorogations de délai dont le contructeur est fondé à se prévaloir et a injustement refusé de tenir compte des multiples refus de réception malicieusement opposés par le maître de l'ouvrage.
Elle estime que le point de départ du délai de réalisation doit être fixé au 12 octobre 2015 correspondant au démarrage effectif du chantier, corroboré par un premier appel de fonds. Elle souligne que la déclaration d'ouverture de chantier et les photographies sur lesquelles s'appuie la juridiction de première instance reposent exclusivement sur des éléments élaborés par le demandeur lui-même et ne peuvent être retenus comme élément de preuve. Elle soutient que M. [U] devait réaliser certains travaux (dont l'accès au chantier) avant son intervention et la déclaration d'ouverture de chantier est donc susceptible de correspondre à cette période.
Elle fait valoir qu'il existe de multiples causes de prorogation de délai en considération desquelles aucun retard imputable au constructeur ne saurait être retenu. Elle estime qu'il est nécessaire de prendre en compte le délai d'exécution des travaux réservés, soit du 19 septembre 2016 au 16 décembre 2016 puis du 9 mars 2017 au 26 mars 2017. Elle précise justifier de l'enlèvement de gravats dès le mois de juin 2016 et dit que M. [U] a dû reprendre les travaux réalisés par ses soins. Elle estime avoir réalisé les travaux lui incombant avant la date butoir du 31 mai 2017 et allègue que si la réception n'a pas pu intervenir avant ce terme, il en va de la seule responsabilité du demandeur puisque les travaux étaient achevés et conformes au plus tard au mois de mars 2017. Elle soutient que les paiements opérés par M. [U] démontrent qu'il a pu valablement constater l'achèvement des travaux.
Réponse de la cour
Le point de départ du délai d'exécution dont le non-respect est sanctionné par des pénalités de retard prévues par l'article L. 231-2, i, du code de la construction et de l'habitation est la date indiquée au contrat pour l'ouverture du chantier (3ème Civ., 12 octobre 2017, n° 16-21.238).
Les pénalités de retard prévues par l'article L. 231-2, i, du code de la construction et de l'habitation ont pour terme la livraison de l'ouvrage et non sa réception (3ème Civ., 12 septembre 2012, n°11-13.309).
En l'espèce, le contrat de construction prévoit en son article 14 sous un titre 'conditions générales' (page 4) :
« Les travaux commenceront dans le délai défini aux conditions particulières, à compter de la réalisation de l'ensemble des conditions suspensives (article 27) et formalités (article 15).
La durée d'exécution des travaux est indiquée aux conditions particulières.
Le délai de construction et la date de fin du délai contractuel de construction seront prorogés de plein droit dans les conditions prévues par les articles L.231-1 et suivants et R.231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation.
Daans le cas où le maître de l'ouvrage se réserve des travaux, le délai contractuel sera interrompu toute la durée de ceux-ci et la responsabilité du constructeur sera dégagée pendant toute cette période. En cas de retard dans l'achèvement de la construction (pour autre raison que celles prévues ci-avant) une pénalité de 1/3 000ème du prix convenu par jour de retard est due par le constructeur ».
L'article 15 prévoit notamment concernant les formalités :
« les travaux ne pourront recevoir aucun début d'exécution avant que le maître de l'ouvrage n'ait exécuté ou fait exécuter les travaux nécessaires à l'ouverture du chantier et dont il n'a pas chargé le constructeur » .
L'article 6 des conditions particulières du contrat prévoit un délai d'exécution de 13 mois 'à compter du démarrage effectif des travaux' (page 3) mais ne mentionne aucune date d'ouverture de chantier. Il est cependant précisé que les travaux commenceront dans un délai de deux mois à compter de la réalisation des conditions suspensives.
Si le permis de construire a été accordé le 25 mars 2015, l'attestation dommage ouvrage a été souscrite par la SAS AISH en mentionnant une date de déclaration d'ouverture de chantier au 15 septembre 2015.
Aux termes du descriptif technique, le maître de l'ouvrage s'est réservé la réalisation de travaux de VRD comprenant la création d'un chemin d'accès au chantier, non compris dans le contrat de construction.
Selon un procès-verbal du 7 septembre 2015 signé par les parties, l'implantation de la maison a été réalisée à cette date.
M. [U] a effectué le 21 septembre 2015 une déclaration d'ouverture de chantier en date du 15 septembre 2015.
Aux termes d'un compte rendu de visite chantier n° 1 en date du 12 octobre 2015, le maître de l'ouvrage et le constructeur ont constaté que les lot 'terrassement-fondations' et 'maçonnerie' étaient achevés.
A la même date a été émise une facture pour un premier appel de fonds faisant suite à l'ouverture du chantier.
Une facture de travaux de terrassement a été adressée à la SAS AISH par la société Réal construction le 16 octobre 2015 pour le chantier de M. [U], sans précision quant à la date de réalisation de ces travaux.
Ainsi, les travaux de VRD que devait réaliser M. [U] préalablement à l'intervention de la SAS AISH recouvraient nécessairement d'une part la création du chemin d'accès, et d'autre part la réalisation des réseaux d'alimentation en eau, d'évacuation des eaux usées, de distribution d'électricité.
Par suite, l'exécution des travaux par la SAS AISH ne pouvait commencer qu'une fois la première phase susmentionnée réalisée par le maître de l'ouvrage soit après le 15 septembre 2015.
Les photographies datées du 21 septembre 2015 montrant des fondations et la pose de rangées de parpaings ne sont corroborées par aucun autre élément du dossier de telle sorte qu'il existe un doute quant à l'authenticité de la date figurant sur ces pièces constituées par le demandeur.
De même, il se déduit du compte-rendu de chantier n° 1 que les travaux ont commencé avant le 12 octobre 2015.
Même si aucune des pièces produites par les parties ne permet de connaître avec certitude la date à laquelle la SAS AISH a commencé d'exécuter le contrat de construction, il convient, eu égard à l'avancée des travaux à la date de la première réunion de chantier et des travaux réservés au maître de l'ouvrage, de fixer le début des travaux au 1er octobre 2015.
Par suite, le chantier aurait dû prendre fin au plus tard le 1er novembre 2016, hors causes de suspension du délai.
Le délai d'exécution du contrat a été suspendu d'une part par la réalisation d'une seconde phase de travaux réservés au maître de l'ouvrage, et d'autre part par des intempéries.
En ce qui concerne les travaux à la charge du maître de l'ouvrage, les parties ont échangé plusieurs courriers :
- par courrier du 19 septembre 2016, la SAS AISH a informé M. [U] qu'il pouvait débuter les travaux de VRD et qu'en conséquence les travaux à sa charge étaient suspendus à compter du 19 septembre 2016 et pour toute la durée de réalisation des travaux réservés, ce qui prorogeait le délai contractuel d'exécution de la même durée ;
- par courrier en date du 25 novembre 2016, la SAS AISH a répondu à des courriers de M. [U] que le nettoyage du chantier avait été réalisé par ses soins, qu'il lui avait été envoyé un mail comportant une photographie le 13 juin 2016 et que l'arrêt du chantier était maintenu jusqu'à ce qu'il réalise le lot VRD ;
- par courrier du 9 mars 2017, la SAS AISH a demandé à M. [U] de modifier les travaux de VRD réservés aux motifs que les PVC des eaux usées n'étaient pas conformes à la réglementation et a précisé que les travaux à sa charge étaient suspendus à compter du 24 décembre 2016 et pour toute la durée de la réalisation des travaux réservés, et le délai contractuel de réalisation de la maison automatiquement prorogé de cette même durée ;
- par courrier du 26 mars 2017, M. [U] a porté à la connaissance de la SAS AISH la modification du PVC des eaux usées en date du 25 mars 2017 ;
- par courrier du 31 mars 2017, la SAS AISH a informé M. [U] de la reprise du chantier en date du 27 mars 2017 et que le délai de réalisation des travaux était prorogé de 17 jours.
Il ressort d'une facture en date du 23 juin 2016 adressée par la SARL SJ Bat à la SAS AISH qu'un nettoyage a été réalisé sur le chantier de M. [U], sans précision quant à la date.
En dépit de ses contestations, dont il ne rapporte pas la preuve qu'elles étaient fondées, il doit être considéré qu'à compter du 19 septembre 2016, M. [U] était en mesure de réaliser les travaux de VRD à sa charge et que cette intervention a pris fin le 16 décembre 2016 comme le reconnaît la SAS AISH. M. [U] est de nouveau intervenu sur le chantier pour reprise de PVC non conformes du 9 mars 2017 au 26 mars 2017, ce qu'il ne conteste pas davantage.
Par suite, le délai d'exécution des travaux doit être prorogé de 110 jours [92 + 18] au titre des travaux réservés au maître de l'ouvrage.
S'agissant des intempéries, elles constituent des causes légales de suspension du contrat dès lors qu'elles empêchent le constructeur de réaliser les travaux à sa charge. Sont considérées comme intempéries, les conditions atmosphériques et les inondations lorsqu'elles rendent dangereux ou impossible l'accomplissement du travail eu égard soit à la santé ou à la sécurité des salariés, soit à la nature ou à la technique du travail à accomplir (travaux difficiles par temps humide tels que les enduits extérieurs, l'étanchéité, les fondations, charpente etc). Il appartient à l'entrepreneur qui s'en prévaut d'en rapporter la preuve.
La SAS AISH a notifié à M. [U] par courrier du 11 janvier 2017 que les travaux étaient interrompus en raison d'un épisode neigeux survenu le 10 janvier 2017 et jusqu'à la fin des intempéries.
Elle produit des bulletins météorologiques pour la région Rhône-Alpes et un relevé du nombre de journées de neige, gel et pluie concernant le lieu du chantier dont l'auteur n'est pas identifié. Selon un bulletin produit par M. [U], l'épisode de neige ne s'est pas poursuivi dans les jours qui ont suivi le 10 janvier 2017.
Par suite, en dehors de la journée du 10 janvier 2017 dont il n'est pas contesté par M. [U] qu'elle a empêché les travaux de se poursuivre, il n'est pas démontré que le chantier aurait été légitimement retardé par d'autres journées d'intempérie.
Il convient donc de proroger le délai contractuel d'exécution des travaux de 111 jours au total.
Par suite, le chantier devait être livré au plus tard le 20 février 2017.
S'agissant du terme du délai d'exécution, par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 mai 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 14 juin 2017, ce qui impliquait qu'elle entendait par la même occasion lui livrer l'ouvrage et lui en remettre les clés.
M. [U] a répondu par courrier du 12 juin 2017 que la réception ne pouvait avoir lieu à la date fixée dès lors qu'il avait reçu le courrier seulement le 6 juin 2017 et qu'il y avait des modifications à apporter aux travaux.
Un premier constat d'huissier a été établi le 21 juillet 2017 et relève les désordres dénoncés ultérieurement dans le procès-verbal de réception.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juillet 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 27 juillet 2017. Par courrier du 17 juillet 2017, la réception a été fixée au 28 juillet 2017.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 28 septembre 2017, précisant que de mineures finitions peuvent être érigées en réserves.
Il est à noter que la consuel a constaté la conformité de l'installation électrique le 28 juin 2016, un rapport d'essai du test d'étanchéité à l'air a été établi le 2 mars 2017, la conformité de l'ouvrage à la RT 2012 a été constatée le 6 mars 2017.
Ainsi, il doit être considéré que malgré les réserves émises par le maître de l'ouvrage le jour de la réception, qui n'empêchaient pas l'occupation du logement, l'ouvrage était en état d'être livré dès le 14 juin 2017, de telle sorte que les pénalités de retard sont dues pour la période du 21 février 2017 au 13 juin 2017.
Le prix de la construction a été fixé à la somme de 133 527 euros et la pénalité encourue en cas de retard est donc de 44,509 euros par jour [133 527/3000].
La SAS AISH devait donc à M. [U] la somme de 4 985 euros [44,509 x 112] au titre des pénalités de retard.
4. Sur l'exécution de la décision
a) sur l'extinction de la créance
Moyens des parties
M. [U] soutient que le paiement volontaire des sommes auxquelles la société SFMI a été condamnée, antérieurement à sa liquidation judiciaire, a pour effet d'éteindre la créance par application de l'article 1342 du code civil. Il en déduit qu'aux termes de la décision à intervenir, exception faite des frais de procédure, il n'y aura pas lieu de fixer une créance au passif de la société SFMI.
La société SFMI ne réplique pas sur ce point.
Réponse de la cour
En application de l'article L. 622-21 I du code du commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Les décisions de la Cour de cassation citées par M. [U] ne concernent pas la même situation.
Quand bien même M. [U] ne demande que la confirmation de la décision déférée, celle-ci ne peut être confirmée en ce qu'elle condamne la SAS SFMI à l'indemniser. L'ouverture d'une procédure collective doit conduire la cour à fixer au passif de la liquidation judiciaire les sommes dues par la société liquidée.
b) sur la demande de libération de la retenue de garantie
Moyens des parties
La SAS SFMI demande le déblocage du solde du prix convenu à son profit. Elle estime que toutes les réserves émises à la réception ont éte levées de sorte que le solde doit lui revenir.
M. [U] réplique que la compensation ne saurait avoir lieu que si la retenue de garantie était libérée entre ses mains, ce qui correspond à ce qui a été fait au titre de l'exécution provisoire.
Réponse de la cour
Selon l'article 1er de la loi du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3° du code civil, les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil peuvent être amputés d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage.
Le maître de l'ouvrage doit consigner entre les mains d'un consignataire, accepté par les deux parties ou à défaut désigné par le président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce, une somme égale à la retenue effectuée.
L'article 2 de cette même loi prévoit qu'à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception, faite avec ou sans réserve, des travaux visés à l'article précédent, la caution est libérée ou les sommes consignées sont versées à l'entrepreneur, même en l'absence de mainlevée, si le maître de l'ouvrage n'a pas notifié à la caution ou au consignataire, par lettre recommandée, son opposition motivée par l'inexécution des obligations de l'entrepreneur. L'opposition abusive entraîne la condamnation de l'opposant à des dommages-intérêts.
En l'espèce, en l'absence de notification du maître de l'ouvrage pour s'opposer au versement des sommes consignées à la SAS SFMI, ces sommes auraient dû lui être versées par le consignataire, même en l'absence de mainlevée.
Il convient donc d'ordonner le versement de la somme consignée à la SAS SFMI.
La compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes selon l'article 1347 du code civil.
Il ne peut y avoir compensation entre la somme consignée restituée à la SAS SFMI et la créance de M. [U] dès lors que la dette de M. [U] a été éteinte par la consignation du solde du prix du marché.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :
Infirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a ordonné la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6679,35 euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire des Alpes, au profit de la société SFMI ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Fixe à la somme de 13 178,75 euros l'indemnisation due par la SAS SFMI à M. [D] [U] au titre des travaux de reprise et de l'indemnisation du préjudice de jouissance dus dans le cadre de la garantie de parfait achèvement ;
Déboute M. [D] [U] de sa demande d'indemnisation pour l'évacuation de gravats ;
Fixe à la somme de 4 985 euros les pénalités de retard dues par la SAS SFMI à M. [D] [U] ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI la créance de M. [D] [U] à la somme totale de 18 163,75 euros à titre d'indemnisation de ses préjudices ;
Déboute les parties de leurs demandes tendant à la compensation de leurs dettes et créances réciproques ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI la créance de M.[D] [U] en application de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 5 000 euros ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI les dépens de la première instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, et les dépens de l'instance d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère de la chambre civile section B faisant fonction de présidente, et par la greffière Mme Claire Chevallet, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
C1
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à
la SELARL CABINET HADRIEN PRALY
la SELARL SELARL ROBICHON & ASSOCIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU MARDI 09 SEPTEMBRE 2025
Appel d'un jugement (N° R.G 18/05218) rendu par le tribunal judiciaire de Grenoble en date du 08 avril 2021, suivant déclaration d'appel du 28 Avril 2021
APPELANTE :
S.A.S. SOCIETE FRANCAISE DE MAISONS INDIVIDUELLES (venant aux droits de la société AISH), prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Hadrien PRALY de la SELARL CABINET HADRIEN PRALY, avocat au barreau de LA DRÔME
INTIM ÉS :
M. [D] [U]
né le 23 Octobre 1965 à [Localité 7] (69)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Jean ROBICHON de la SELARL ROBICHON & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Romain BLANC, avocat au barreau de GRENOBLE
S.E.L.A.R.L. [G] & ASSOCIES représentée par Maître [H] [G], ès qualité de Liquidateur judiciaire de la SOCIETE FRANÇAISE DE CONSTRUCTION DE MAISONS INDIVIDUELLES SFMI, désignée en cette qualité par jugement du Tribunal de commerce de ROMANS-SUR-ISERE en date du 29 novembre 2022, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Anne-Laure PLISKINE, conseillère faisant fonction de présidente,
Mme Ludivine CHETAIL, conseillère
M Lionel BRUNO, conseiller
DÉBATS :
A l'audience publique du 12 Mai 2025, Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère faisant fonction de Présidente, et Mme Ludivine Chetail, conseillère chargée du rapport d'audience, assistées de Mme Claire Chevallet, greffière, ont entendu seules les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.
Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [D] [U] a conclu le 18 avril 2014 un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans avec la SAS Ambition Isère Savoie (AISH), appartenant au groupe Avenir.
Le contrat prévoit notamment que :
- des travaux à hauteur de 8 520 euros étaient réservés par le maître d'ouvrage, en l'occurrence les travaux de VRD ;
- la durée d'exécution des travaux serait de 13 mois à compter du démarrage effectif des travaux.
La réception de l'ouvrage a eu lieu le 12 février 2018, et a fait l'objet de 22 réserves.
A cette date, l'intégralité du prix de la constructiona a été réglée, 5 % du prix étant par ailleurs versé sur un compte séquestre dans le cadre de la retenue de garantie, soit 6 679,35 euros.
Le 26 octobre 2018, la SAS AISH a fait l'objet d'une fusion-absorption par la SAS société francaise de maisons individuelles (SFMI) avec effet à compter du 1er janvier 2018.
Les parties ne sont pas parvenues à un accord concernant la reprise des réserves.
Par assignation du 11 décembre 2018, M. [U] a saisi le tribunal de grande instance de Grenoble afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la garantie de parfait achèvement.
Par jugement en date du 8 avril 2021, le tribunal judiciaire de Grenoble a :
- constaté que la société SFMI vient aux droits de la société AISH ;
- rejeté la demande de rabat de clôture présentée par M. [U] et déclaré irrecevables les conclusions prises par lui le 9 février 2021 ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [D] [U] les sommes suivantes :
15 268,29 euros au titre des travaux de reprise,
18 159,67 euros au titre des pénalités de retard,
267,98 euros au titre du préjudice de jouissance et des frais résultant de l'absence de raccordement des eaux usées au collecteur,
492,67 euros au titre de l'enlèvement des gravats,
soit un total de 34 188,61 euros ;
- débouté M. [D] [U] de sa demande au titre du préjudice moral enduré pour l'absence de raccordement et des frais de constat d'huissier ;
- ordonné la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6 679,35euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire cles Alpes, au profit de la société SFMI et la compensation entre ce solde (6 679,35 euros) et les sommes dues par la société SFMI à M. [D] [U] (34 188,61 euros) ;
- condamné la société SFMI aux entiers dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de pocédure civile ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [U] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration d'appel en date du 28 avril 2021, la SAS SFMI a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
M. [D] [U] a interjeté appel incident par conclusions notifiées par voie électronique le 21 septembre 2021.
La SAS SFMI a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère le 29 novembre 2022.
M. [D] [U] a déclaré sa créance au liquidateur 19 décembre 2022 et a mis en cause la SELARL [G] & associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS SFMI par assignation du 7 novembre 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 7 décembre 2021, la SAS SFMI demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- condamné la société SFMI à payer à M. [D] [U] les sommes suivantes :
15 268, 29 euros au titre des travaux de reprise,
18 159, 67 euros au titre des pénalités de retard,
267, 98 euros au titre du préjudice de jouissance et des frais résultant de l'absence de raccordement des eaux usées au collecteur,
492, 67 euros au titre de l'enlèvement des gravats ;
- condamné la société SFMI aux entiers dépens ;
- condamné la société SFMI à payer à M. [U] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la société SFMI de ses demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens ;
Elle demande également à cour de confirmer le jugement entrepris pour le surplus, et statuant à nouveau de :
- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions de comme étant infondées ;
- ordonner en conséquence la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6 679, 35 euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire des Alpes, au profit de la SFMI, venant aux droits de la société AISH ;
- ordonner la compensation entre les créances et dettes réciproques ;
- condamner M. [U] à payer à la SFMI, venant aux droits de la société AISH, une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamner M. [U] aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 avril 2024, l'intimé demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré ;
- juger que les créances sont éteintes du fait de leur paiement effectué par la société SFMI en exécution de la décision de première instance, paiement antérieur à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société SFMI ;
- très subsidiairement, y ajoutant, fixer au passif de la société SFMI les créances dont il est précédemment demandé confirmation ;
- réformer le jugement dont il est fait appel en ce qu'il a ordonné la déconsignation du solde du prix convenu au profit de la société SFMI tout en prononçant la compensation de cette somme avec les sommes auxquelles la société SFMI était condamnée ;
- statuant de nouveau, ordonner la déconsignation du solde du prix convenu entre les mains de M. [U] et prononcer la compensation de cette somme avec le solde contractuel du marché, conformément à ce qui a été réalisé pour l'exécution provisoire de la décision de première instance ;
- fixer au passif de la société SFMI la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- fixer également au passif de cette même société la somme de 238 euros au titre des dépens de l'instance.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la demande d'indemnisation de M. [U] au titre de la garantie de parfait achèvement
A. sur la garantie de parfait achèvement due par la société SFMI
Moyens des parties
M. [U] demande la mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement. Il indique que 22 réserves ont été formulées aux termes du procès-verbal de réception et que le constructeur n'en a contesté qu'une, relative au pare-vapeur, et s'est engagée à reprendre ces réserves dans un délai de 60 jours. Il conteste la réalité de toute intervention de la part de la société SFMI et soutient n'avoir jamais eu de réponse à son courrier de mise en demeure du 28 mai 2018. Il rappelle qu'il appartient au constructeur de prouver qu'il a bien procédé à la levée des réserves et qu'il a lui même fait constater la persistance des désordres par huissier de justice.
La SA SFMI sollicite le rejet de l'ensemble des demandes présentées par M.[U] aux motifs qu'il n'est pas rapporté la preuve de la persistance des réserves et de l'empêchement du constructeur à justifier de leur levée. Elle soutient que bien avant l'introduction de l'instance, elle a rappelé à M. [U] que toutes les réserves fondées avaient été levées et l'a invité à régularisé le constat idoine, sans que M. [U] ne lui réponde. Elle relève que M. [U] ne produit aucun élément de nature à prouver que certaines réserves n'avaient pas été levées dès lors qu'il n'est pas justifié du paiement de factures et que le constat d'huissier n'est pas contradictoire, ne lui serait pas opposable et ne peut pas à lui seul fonder la décision du tribunal. Elle estime que M. [U] l'a purement et simplement empêchée de rapporter la preuve de l'exécution de ses obligations.
Réponse de la cour
L'article 1792-6 du code civil prévoit :
« La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.
La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.
En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.
L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.
La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage.»
En l'absence de notification préalable à l'entrepreneur des désordres révélés postérieurement à la réception, qu'une assignation, même délivrée avant l'expiration du délai d'un an prévu à l'article 1792-6 du code civil, ne peut suppléer, le maître de l'ouvrage ne peut être indemnisé sur le fondement de la garantie de parfait achèvement (3ème Civ., 13 juillet 2023, n° 22-17.010).
En application de l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
La signature du procès-verbal de réception avec réserves par le constructeur le rend débiteur de la garantie de parfait achèvement. Il est alors tenu d'une obligation de résultat de réaliser les travaux de reprise dus au titre de la garantie de parfait achèvement dans le délai imparti. A défaut, il engage sa responsabilité contractuelle.
En l'espèce, il appartient donc à M. [U] de démontrer que la SAS AISH lui doit sa garantie de parfait achèvement et il appartient à la SAS SFMI, venant aux droits de la SAS AISH, de démontrer qu'elle a exécuté cette obligation.
Le 12 février 2018, les deux parties ont signé un procès-verbal aux termes duquel M. [U] a réceptionné l'ouvrage en émettant les réserves suivantes :
« 1. Fourniture et pose d'un moteur de porte sectionnelle yc MES
2. Fourniture et pose trappon métallique 125 KN sur accès VS
3. Nettoyage VS
4. Coffrage et bouchage mousse PU multiples endroits VS (liaison batimt)
5. Reprise fixations réseaux [Localité 8] en VS
6. Nettoyage encombrants garage + sol
7. Reprise du muret d'accès - passage 3,5 ml
8. Nettoyage de noue débris de tuiles + cintre
9. Remplacement porte d'entrée à l'identique
10. Fourniture 5 grilles ø 100 anti insecte
11. Porte intérieure poussant droit à remplacer
12. Manque une tuile à douille
13. Un joint sur porte fenêtre à remplacer
14. Fourniture du rapport test perméabilité
15. Reprise impact derrière porte entrée et finitions enduit sur MAP
16. Deux bouches VMC à déplacer + bouchage MAP/enduit
17. Reprises joint carrelage salle de bains
18. Réglage portes intérieures
19. Reprises socle béton cellier autour des nourrices
20. Absence de pare vapeur sur doublures périphériques et plafond. Cette réserve est contestée dans la mesure où il n'existe pas de non conformité à une règle impérative opposable au constructeur.
21. Le bloc VMC double flux Primocosy HR n'est pas celui prévu au contrat Atlantic Duolix 90 %. De plus, les raccordements et fixations ne sont pas conformes yc condensats. Position VMC dans des combles non aménageables.
22. Reprise fixation trappe d'accès yc placo et joints ».
Les parties ont fixé le délai pour effectuer les travaux de reprise des réserves à 60 jours à compter de la réception.
Dès lors que la société AISH était représentée lors des opérations de réception et que son représentant a signé le procès-verbal de réception, sans émettre de protestations quant aux réserves relevées, à l'exception de celle portant sur le pare-vapeur et dont il ne réclame désormais pas indemnisation, il doit être considéré qu'elle a reconnu l'existence des désordres et défauts de conformité.
Par suite, il est établi que la société AISH doit sa garantie de parfait achèvement à M. [U]. L'ensemble des désordres et défauts de conformité dont M. [U] demande réparation figurent parmi les réserves mentionnées au procès-verbal de réception, sauf la mise en service de la pompe à chaleur et qui n'a pas fait l'objet d'une notification de réserves dans le délai d'un an suivant la réception.
M. [U] peut donc être indemnisé sur le fondement de la garantie de parfait achèvement si les travaux de reprise n'ont pas été réalisés avant la date fixée par les parties, soit le 13 avril 2018, sauf en ce qui concerne la pompe à chaleur.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 mai 2018, l'avocat de M. [U] a mis en demeure le groupe Avenir notamment 'de procéder à la levée des réserves, dans un délai qui, compte tenu du temps déjà écoulé depuis la réception, et de la toute récente proposition d'organiser une réunion sur place le 24 mai prochain, pourrait être fixé au 10 juin 2018'.
Par courrier du 27 avril 2018, la SAS AISH a indiqué à M. [U] que 'la totalité des travaux de reprise des réserves notifiées sur le procès-verbal de réception a été dûment réalisée' et lui a demandé de lui retourner un constat de levée des réserves.
Aux termes d'un procès-verbal du 30 juillet 2018, un huissier de justice a constaté que le tuyau d'évacuation des eaux usées de la maison n'était pas raccordé au tuyau collecteur et qu'en conséquence des excréments se trouvaient sur le sol et le mur du vide sanitaire.
Par courrier en date du 1er août 2018, M. [U] a informé le groupe Avenir de l'absence de raccordement des eaux usées.
Par lettres recommandées en date du 29 octobre 2018, la SAS AISH a mis en demeure M. [U] de lever les réserves.
Par constat du 8 novembre 2019, un huissier de justice a notamment relevé :
- 'à l'extérieur de la maison, les deux tuyaux protégés par une gaine blanche sont raccordés à la centrale extérieure' ;
- 'les cinq tuyaux d'aération ne sont pas munis de grilles anti-insectes ou anti-nuisibles' ;
- 'dans le garage, il n'y a pas de moteur pour la porte coulissante' ;
- 'dans le garage, il n'y a pas de trappe métallique pour fermer le trouve d'accès au vide sanitaire' ;
- 'à l'extérieur du côté est, une petite trace de choc sur le côté droit de la porte d'entrée blanche' ;
- 'du côté est, le joint de la porte vitrée de la cuisine est abîmé en partie haute';
- 'à l'intérieur, derrière la porte d'entrée, la cloison est légèrement enfoncée à la hauteur de la poignée de la porte' ;
- 'à l'intérieur, dans le local technique, la finition n'est pas réalisée à la jonction entre les tuyaux rouges et bleus et le sol surélevé au niveau des plinthes' ;
- 'les tuyaux ne tiennent que faiblement à la VMC et leur fixation ne s'emboîte pas solidement dans le coffret de la VMC' ; ' le moteur de la VMC est maintenu dans sa position par un moyen de fortune constitué de fils de fer attachés aux fermettes de la charpente' ;
- 'à l'extérieur de la maison, du côté nord-ouest, présence de morceaux de tuiles dans la noue de la toiture' ;
- 'dans le vide sanitaire, présence de divers déchets'.
Par courrier du 27 janvier 2020, la SAS SFMI a indiqué ne pas avoir pu être présente lors de constatations d'huissier réalisées le 8 novembre 2019 et a proposé un nouveau constat en février 2020.
Selon l'article 1er de l'ordonnance du 2 juin 2016 relative au statut des commissaires de justice, sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, les constatations matérielles effectuées par commissaire de justice font foi jusqu'à preuve contraire.
Ainsi, d'une part la SAS SFMI ne justifie d'aucune démarche auprès de M. [U] pour la reprise des réserves dans le délai fixé contractuellement, et d'autre part elle ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait réalisé les travaux de reprise, le seul courrier qu'elle a adressé le 27 avril 2018, étant insuffisant puisqu'en contradiction avec les contestations de M. [U] et les constatations de l'huissier postérieurement à ce courrier.
Il n'est pas davantage démontré par la SAS SFMI que M. [U] aurait fait obstacle à la reprise des réserves.
C'est donc à raison que la juridiction de première instance a jugé que la SAS AISH était tenue d'une garantie de parfait achèvement à l'égard de M. [U], a engagé sa responsabilité contractuelle en manquant à ses obligations et devait indemnisation à M. [U] des préjudices subis en conséquence, sauf concernant un défaut de mise en service de la pompe à chaleur.
B. sur les préjudices consécutifs subis par M. [U]
Moyens des parties
La SAS SFMI soutient que M. [U] ne démontre pas d'une part que les devis portent sur des travaux nécessaires à la levée des réserves, ni que leur coût est conforme à la réalité du marché. Elle estime qu'il est exclu de statuer sur la seule base de devis et facture émanant du demandeur, auquel elle conteste toute pertinence, a fortiori en l'absence de tout constat contradictoire de l'existence même des défauts allégués.
Elle indique en particulier que la VMC qui a été installée est tout aussi performante que le modèle visé au contrat, qui n'était plus produit à la date de réalisation des travaux. Elle souligne que le modèle visé par le devis produit par M. [U] est encore différent. Elle estime que le changement de modèle n'est absolument pas de nature à occasrionner un quelconque préjudice à M. [U] et que la demande présentée par M. [U] est disproportionnée.
M. [U] réplique que les devis correspondent parfaitement aux désordres réservés et sont parfaitement adéquats aux réserves. De plus, il fait observer que certaines réserves ont été reprises par lui pour un coût moindre. Selon lui, la société SFMI s'abstient de préciser et de critiquer les devis fournis.
M. [U] évalue la fourniture et la pose de la bonne VMC avec reprise des raccordements et fixations à la somme de 7 968,42 euros selon devis. Il précise qu'en cours de chantier, il s'est rendu compte de cette non-conformité et que le constructeur l'a lui-même admise et s'est engagé à faire poser le modèle prévu au contrat. Il soutient que le modèle par lequel la société SFMI avait prévu de remplacer celui prévu au contrat, dont la commercialisation aurait été arrêtée, ne présente pas les mêmes caractéristiques et est moins cher. Il estime que l'article 1221 du code civil dont se prévaut la SFMI n'est pas applicable en l'espèce et que sa demande n'est pas disproportionnée.
M. [U] demande la fixation du préjudice résultant du défaut de raccordement au réseau des eaux usées à la somme de 195,76 euros sur la base d'une facture. Il explique qu'il a découvert ce désordre pendant l'année de parfait achèvement et que la SFMI a ignoré sa mise en demeure d'intervenir. En tout état de cause, et subsidiairement, il estime que l'absence de raccordement au système d'évacuation des eaux usées relevait d'un désordre de nature décennale qui engage la responsabilité du constructeur dès lors qu'elle rend l'immeuble insalubre. Il estime avoir également subi un préjudice de jouissance qu'il évalue à la somme de 166,60 euros outre des frais de transport pour la somme de 101,38 euros.
M. [U] soutient qu'il a consacré cinq journées à raison de sept heures par jour au nettoyage de la noue, des débris de tuiles et du cintre, à la reprise du joint de carrelage de la salle de bains, au réglage des portes intérieures, à la reprise du socle en béton du cellier autour des nourrices, au déplacement de deux bouches VMC, à la reprise de la fixation de la trappe et du muret extérieur. Sur la base de son salaire mensuel, il a évalué ce poste de préjudice à la somme de 739 euros.
Réponse de la cour
En application de l'article 1149 du code civil, devenu l'article 1231-2, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.
Le principe de réparation intégrale implique que la victime bénéficie de l'indemnisation de son préjudice sans perte ni profit.
La preuve de l'existence d'un préjudice et celle de son évaluation peuvent être rapportées par tout moyen, sans qu'il soit nécessaire de réaliser une expertise ou un constat contradictoire. Elle peut se fonder sur un simple devis, dès lors que celui-ci est susceptible d'être discuté contradictoirement par les parties, et que la juridiction du fond apprécie souverainement le montant de l'indemnisation.
Il convient donc d'examiner réserve par réserve l'existence et l'étendue du préjudice subi par M. [U].
- sur la fourniture d'un moteur de porte de garage (réserve n° 1) :
Le contrat prévoit en page 14 'une porte de garage sectionnelle motorisée'. Une réserve a été émise à ce sujet par le maître de l'ouvrage lors de la réception.
Sur le fondement d'un devis en date du 19 juin 2018, ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 640,14 euros correspondant au prix du marché.
- sur la pose d'une trappe d'accès (réserve n° 2) :
Le contrat prévoit la fourniture et la pose d'une trappe d'accès au vide sanitaire. Une réserve a été émise à ce sujet par le maître de l'ouvrage lors de la réception.
Ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 366 euros selon devis non daté (pièce n° 33 de M. [U]).
- sur les désordres relatifs au vide sanitaire (réserve n° 3) :
Il relève de la responsabilité du constructeur au titre de la garantie de parfait achèvement de remettre au maître de l'ouvrage un ouvrage en état de fonctionnement, et notamment possédant un système d'évacuation des eaux usées efficient.
M. [U] a émis des réserves sur ce point.
Le nettoyage du vide sanitaire peut être évalué à la somme de 696 euros selon devis du 6 juillet 2018. Le coffrage et le bouchage du vide sanitaire et la reprise de fixation PVC de l'évacuation des eaux usées peut également être évalué à la somme de 71,76 euros.
M. [U] a également subi en raison de ce désordre un préjudice de jouissance lié aux odeurs nauséabondes émanant de ses toilettes. Ce préjudice peut être évalué à la somme de 200 euros.
- sur les désordres relatifs aux menuiseries (réserves n° 9, 11 et 13)
Sur la base d'un devis correspondant au remplacement de la porte d'entrée à l'identique et des joints sur la porte fenêtre, ainsi qu'au remplacement d'une porte intérieure poussant droit, outre la location d'un véhicule, correspondant aux réserves émises par M. [U], ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 1 681,27 euros.
- sur la non conformité de la VMC (réserves n° 12 et 21) :
Le contrat prévoit en page 17 une 'VMC double flux statique 90 % Atlantic Duolix en remplacement de la VMC hygro basse conso prévue initialement', de manière dérogatoire à la mention pré-rédigée en page 8 relative à l'installation d'une 'VMC simple flux Atlantic ou similaire de type Hygro B à basse consommation'.
La VMC a fait l'objet de réserves de la part de M. [U] lors de la réception en raison de l'installation d'un modèle 'bloc VMC double flux Primocosy HR'.
M. [U] avait déjà signalé cette non-conformité par courrier du 2 juin 2016 et il lui avait été répondu par courrier du 23 septembre 2016 :
'VMC : le modèle Duocosy HR prévu au contrat sera remplacé à la charge de l'électricien comme prévue sur notre marché et dans l'étude'.
Selon la documentation technique versée aux débats par la SAS SFMI, le modèle installé par la SAS AISH correspond à une VMC double flux statique basse consommation dont l'efficacité de l'échangeur est de 90 %, 86 % en combles. Ce modèle est également de la marque Atlantic.
Selon la documentation versée aux débats par M. [U], un comparatif entre les deux produits montre que le modèle initialement prévu est de meilleure qualité et recommandé pour une maison neuve. Cependant, il apparaît également que le modèle initial n'est plus commercialisé.
Ainsi, il est établi que même s'il est manifeste que la SAS AISH était dans l'incapacité de se procurer le modèle initialement prévu et l'a remplacé par un modèle approchant, elle a choisi un modèle de qualité moindre et ce sans recueillir au préalable l'accord du maître de l'ouvrage. Elle a ainsi manqué à son obligation de parfait achèvement.
La seule solution réparatoire envisageable consiste en la fourniture et la pose d'un modèle similaire à celui prévu initialement au contrat.
Selon un devis du 10 septembre 2018, la fourniture et la pose d'un caisson Duocosy HR double flux haut rendement peut être évaluée à la somme de 7968,42 euros TTC.
Le modèle proposé par ce devis correspond au même niveau de rendement et de qualité que celui initialement prévu au contrat.
Il convient donc de fixer l'indemnisation due à M. [U] à cette somme.
- sur la fourniture de grilles anti-insectes (réserve n° 10)
Ce poste de préjudice, qui n'est pas contesté par la SAS AISH, peut être évalué à la somme de 50,16 euros selon devis du 14 juin 2018.
- sur le nettoyage du garage et du sol (réserve n° 6)
Ce poste de préjudice, qui n'est pas contesté par la SAS AISH, peut être évalué à la somme de 980 euros selon une facture du 19 juin 2018.
- sur les autres désordres (réserves n° 7, 8, 16, 17, 18, 19 et 22)
Le nettoyage de la noue, des débris de tuiles et du cintre, à la reprise du joint de carrelage de la salle de bains, au réglage des portes intérieures, à la reprise du socle en béton du cellier autour des nourrices, au déplacement de deux bouches VMC, à la reprise de la fixation de la trappe et du muret extérieur n'apparaît pas représenter plus de cinq jours de travail à raison de sept heures par jour, soit 35 heures de travail.
Sur la base d'un salaire horaire de l'ordre de 15 euros, ce poste de préjudice peut être évalué à la somme de 525 euros.
Il convient donc d'infirmer le jugement déféré, et de fixer l'indemnisation due par la SAS SFMI à M. [U] à la somme de 13 178,75 euros [640,14 + 366 + 696 + 71,76 + 200 + 1 681,27 + 525 + 50,16 + 980 + 7 968,42 ].
2. Sur la demande d'indemnisation de M. [U] au titre de la responsabilité contractuelle
Moyens des parties
M. [U] demande l'indemnisation de l'évacuation de gravats l'ayant empêché de réaliser les travaux de VRD à sa charge.
La SAS SFMI réplique que les gravats litigieux ont été évacués le 13 juin 2017.
Réponse de la cour
En application de l'article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, en vigueur au jour de la conclusion du contrat, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il ressort des échanges de courriers entre M. [U] et la SAS AISH que le premier s'est plaint d'avoir été contraint de procéder lui-même à l'évacuation de gravats qui empêchaient la réalisation des travaux de VRD à sa charge, alors que cela incombait au constructeur.
Par courrier en date du 25 novembre 2016, la SAS AISH a répondu à M. [U] que le nettoyage du chantier avait été réalisé par ses soins, qu'il lui avait été envoyé un mail comportant une photographie le 13 juin 2016 et que l'arrêt du chantier était maintenu jusqu'à ce qu'il réalise le lot VRD.
Il ressort d'une facture en date du 23 juin 2016 adressée par la SARL SJ Bat à la SAS AISH qu'un nettoyage a été réalisé sur le chantier de M. [U], sans précision quant à la date.
Ainsi, M. [U] ne rapporte pas la preuve de ce que la SAS AISH aurait manqué à ses obligations.
Il convient donc de le débouter de sa demande d'indemnisation à ce titre et d'infirmer en conséquence le jugement déféré de ce chef.
3. Sur la demande en paiement de pénalités de retard
Moyens des parties
M. [U] demande l'indemnisation de 484 jours de retard. Il réplique que le point de départ du délai de réalisation de la construction à la date de l'ouverture du chantier le 15 septembre 2015, avec le terrassement, qui a été précédé de l'implantation. Il soutient qu'à la date du 27 juillet 2017 prévue pour la réception de l'ouvrage il a refusé la réception et la livraison de la maison qui n'était pas habitable en l'état en l'absence de chauffage et d'eau chaude sanitaire, et en l'absence de raccordement au réseau d'assainissement. Il en déduit que les travaux se sont étendus du 15 septembre 2015 au 12 février 2018. Il admet que les délais ont été suspendus pendant une première période du 19 octobre 2016 au 17 décembre 2016 pour qu'il réalise les VRD qu'il avait conservés à sa charge, précisant qu'il a été contraint de procéder au nettoyage du chantier qui ne lui incombait pas, puis du 10 mars 2017 au 27 mars 2017 correspondant à la modification des travaux VRD à sa demande, et une journée d'intempéries le 10 janvier 2017.
Il ne soutient plus en appel que des clauses du contrat relatives aux pénalités de retard devraient être réputées non écrites.
La SAS SFMI conclut au rejet de la demande aux motifs que le tribunal s'est fourvoyé sur le point de départ du délai de réalisation contractuel, a occulté les prorogations de délai dont le contructeur est fondé à se prévaloir et a injustement refusé de tenir compte des multiples refus de réception malicieusement opposés par le maître de l'ouvrage.
Elle estime que le point de départ du délai de réalisation doit être fixé au 12 octobre 2015 correspondant au démarrage effectif du chantier, corroboré par un premier appel de fonds. Elle souligne que la déclaration d'ouverture de chantier et les photographies sur lesquelles s'appuie la juridiction de première instance reposent exclusivement sur des éléments élaborés par le demandeur lui-même et ne peuvent être retenus comme élément de preuve. Elle soutient que M. [U] devait réaliser certains travaux (dont l'accès au chantier) avant son intervention et la déclaration d'ouverture de chantier est donc susceptible de correspondre à cette période.
Elle fait valoir qu'il existe de multiples causes de prorogation de délai en considération desquelles aucun retard imputable au constructeur ne saurait être retenu. Elle estime qu'il est nécessaire de prendre en compte le délai d'exécution des travaux réservés, soit du 19 septembre 2016 au 16 décembre 2016 puis du 9 mars 2017 au 26 mars 2017. Elle précise justifier de l'enlèvement de gravats dès le mois de juin 2016 et dit que M. [U] a dû reprendre les travaux réalisés par ses soins. Elle estime avoir réalisé les travaux lui incombant avant la date butoir du 31 mai 2017 et allègue que si la réception n'a pas pu intervenir avant ce terme, il en va de la seule responsabilité du demandeur puisque les travaux étaient achevés et conformes au plus tard au mois de mars 2017. Elle soutient que les paiements opérés par M. [U] démontrent qu'il a pu valablement constater l'achèvement des travaux.
Réponse de la cour
Le point de départ du délai d'exécution dont le non-respect est sanctionné par des pénalités de retard prévues par l'article L. 231-2, i, du code de la construction et de l'habitation est la date indiquée au contrat pour l'ouverture du chantier (3ème Civ., 12 octobre 2017, n° 16-21.238).
Les pénalités de retard prévues par l'article L. 231-2, i, du code de la construction et de l'habitation ont pour terme la livraison de l'ouvrage et non sa réception (3ème Civ., 12 septembre 2012, n°11-13.309).
En l'espèce, le contrat de construction prévoit en son article 14 sous un titre 'conditions générales' (page 4) :
« Les travaux commenceront dans le délai défini aux conditions particulières, à compter de la réalisation de l'ensemble des conditions suspensives (article 27) et formalités (article 15).
La durée d'exécution des travaux est indiquée aux conditions particulières.
Le délai de construction et la date de fin du délai contractuel de construction seront prorogés de plein droit dans les conditions prévues par les articles L.231-1 et suivants et R.231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation.
Daans le cas où le maître de l'ouvrage se réserve des travaux, le délai contractuel sera interrompu toute la durée de ceux-ci et la responsabilité du constructeur sera dégagée pendant toute cette période. En cas de retard dans l'achèvement de la construction (pour autre raison que celles prévues ci-avant) une pénalité de 1/3 000ème du prix convenu par jour de retard est due par le constructeur ».
L'article 15 prévoit notamment concernant les formalités :
« les travaux ne pourront recevoir aucun début d'exécution avant que le maître de l'ouvrage n'ait exécuté ou fait exécuter les travaux nécessaires à l'ouverture du chantier et dont il n'a pas chargé le constructeur » .
L'article 6 des conditions particulières du contrat prévoit un délai d'exécution de 13 mois 'à compter du démarrage effectif des travaux' (page 3) mais ne mentionne aucune date d'ouverture de chantier. Il est cependant précisé que les travaux commenceront dans un délai de deux mois à compter de la réalisation des conditions suspensives.
Si le permis de construire a été accordé le 25 mars 2015, l'attestation dommage ouvrage a été souscrite par la SAS AISH en mentionnant une date de déclaration d'ouverture de chantier au 15 septembre 2015.
Aux termes du descriptif technique, le maître de l'ouvrage s'est réservé la réalisation de travaux de VRD comprenant la création d'un chemin d'accès au chantier, non compris dans le contrat de construction.
Selon un procès-verbal du 7 septembre 2015 signé par les parties, l'implantation de la maison a été réalisée à cette date.
M. [U] a effectué le 21 septembre 2015 une déclaration d'ouverture de chantier en date du 15 septembre 2015.
Aux termes d'un compte rendu de visite chantier n° 1 en date du 12 octobre 2015, le maître de l'ouvrage et le constructeur ont constaté que les lot 'terrassement-fondations' et 'maçonnerie' étaient achevés.
A la même date a été émise une facture pour un premier appel de fonds faisant suite à l'ouverture du chantier.
Une facture de travaux de terrassement a été adressée à la SAS AISH par la société Réal construction le 16 octobre 2015 pour le chantier de M. [U], sans précision quant à la date de réalisation de ces travaux.
Ainsi, les travaux de VRD que devait réaliser M. [U] préalablement à l'intervention de la SAS AISH recouvraient nécessairement d'une part la création du chemin d'accès, et d'autre part la réalisation des réseaux d'alimentation en eau, d'évacuation des eaux usées, de distribution d'électricité.
Par suite, l'exécution des travaux par la SAS AISH ne pouvait commencer qu'une fois la première phase susmentionnée réalisée par le maître de l'ouvrage soit après le 15 septembre 2015.
Les photographies datées du 21 septembre 2015 montrant des fondations et la pose de rangées de parpaings ne sont corroborées par aucun autre élément du dossier de telle sorte qu'il existe un doute quant à l'authenticité de la date figurant sur ces pièces constituées par le demandeur.
De même, il se déduit du compte-rendu de chantier n° 1 que les travaux ont commencé avant le 12 octobre 2015.
Même si aucune des pièces produites par les parties ne permet de connaître avec certitude la date à laquelle la SAS AISH a commencé d'exécuter le contrat de construction, il convient, eu égard à l'avancée des travaux à la date de la première réunion de chantier et des travaux réservés au maître de l'ouvrage, de fixer le début des travaux au 1er octobre 2015.
Par suite, le chantier aurait dû prendre fin au plus tard le 1er novembre 2016, hors causes de suspension du délai.
Le délai d'exécution du contrat a été suspendu d'une part par la réalisation d'une seconde phase de travaux réservés au maître de l'ouvrage, et d'autre part par des intempéries.
En ce qui concerne les travaux à la charge du maître de l'ouvrage, les parties ont échangé plusieurs courriers :
- par courrier du 19 septembre 2016, la SAS AISH a informé M. [U] qu'il pouvait débuter les travaux de VRD et qu'en conséquence les travaux à sa charge étaient suspendus à compter du 19 septembre 2016 et pour toute la durée de réalisation des travaux réservés, ce qui prorogeait le délai contractuel d'exécution de la même durée ;
- par courrier en date du 25 novembre 2016, la SAS AISH a répondu à des courriers de M. [U] que le nettoyage du chantier avait été réalisé par ses soins, qu'il lui avait été envoyé un mail comportant une photographie le 13 juin 2016 et que l'arrêt du chantier était maintenu jusqu'à ce qu'il réalise le lot VRD ;
- par courrier du 9 mars 2017, la SAS AISH a demandé à M. [U] de modifier les travaux de VRD réservés aux motifs que les PVC des eaux usées n'étaient pas conformes à la réglementation et a précisé que les travaux à sa charge étaient suspendus à compter du 24 décembre 2016 et pour toute la durée de la réalisation des travaux réservés, et le délai contractuel de réalisation de la maison automatiquement prorogé de cette même durée ;
- par courrier du 26 mars 2017, M. [U] a porté à la connaissance de la SAS AISH la modification du PVC des eaux usées en date du 25 mars 2017 ;
- par courrier du 31 mars 2017, la SAS AISH a informé M. [U] de la reprise du chantier en date du 27 mars 2017 et que le délai de réalisation des travaux était prorogé de 17 jours.
Il ressort d'une facture en date du 23 juin 2016 adressée par la SARL SJ Bat à la SAS AISH qu'un nettoyage a été réalisé sur le chantier de M. [U], sans précision quant à la date.
En dépit de ses contestations, dont il ne rapporte pas la preuve qu'elles étaient fondées, il doit être considéré qu'à compter du 19 septembre 2016, M. [U] était en mesure de réaliser les travaux de VRD à sa charge et que cette intervention a pris fin le 16 décembre 2016 comme le reconnaît la SAS AISH. M. [U] est de nouveau intervenu sur le chantier pour reprise de PVC non conformes du 9 mars 2017 au 26 mars 2017, ce qu'il ne conteste pas davantage.
Par suite, le délai d'exécution des travaux doit être prorogé de 110 jours [92 + 18] au titre des travaux réservés au maître de l'ouvrage.
S'agissant des intempéries, elles constituent des causes légales de suspension du contrat dès lors qu'elles empêchent le constructeur de réaliser les travaux à sa charge. Sont considérées comme intempéries, les conditions atmosphériques et les inondations lorsqu'elles rendent dangereux ou impossible l'accomplissement du travail eu égard soit à la santé ou à la sécurité des salariés, soit à la nature ou à la technique du travail à accomplir (travaux difficiles par temps humide tels que les enduits extérieurs, l'étanchéité, les fondations, charpente etc). Il appartient à l'entrepreneur qui s'en prévaut d'en rapporter la preuve.
La SAS AISH a notifié à M. [U] par courrier du 11 janvier 2017 que les travaux étaient interrompus en raison d'un épisode neigeux survenu le 10 janvier 2017 et jusqu'à la fin des intempéries.
Elle produit des bulletins météorologiques pour la région Rhône-Alpes et un relevé du nombre de journées de neige, gel et pluie concernant le lieu du chantier dont l'auteur n'est pas identifié. Selon un bulletin produit par M. [U], l'épisode de neige ne s'est pas poursuivi dans les jours qui ont suivi le 10 janvier 2017.
Par suite, en dehors de la journée du 10 janvier 2017 dont il n'est pas contesté par M. [U] qu'elle a empêché les travaux de se poursuivre, il n'est pas démontré que le chantier aurait été légitimement retardé par d'autres journées d'intempérie.
Il convient donc de proroger le délai contractuel d'exécution des travaux de 111 jours au total.
Par suite, le chantier devait être livré au plus tard le 20 février 2017.
S'agissant du terme du délai d'exécution, par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 mai 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 14 juin 2017, ce qui impliquait qu'elle entendait par la même occasion lui livrer l'ouvrage et lui en remettre les clés.
M. [U] a répondu par courrier du 12 juin 2017 que la réception ne pouvait avoir lieu à la date fixée dès lors qu'il avait reçu le courrier seulement le 6 juin 2017 et qu'il y avait des modifications à apporter aux travaux.
Un premier constat d'huissier a été établi le 21 juillet 2017 et relève les désordres dénoncés ultérieurement dans le procès-verbal de réception.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juillet 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 27 juillet 2017. Par courrier du 17 juillet 2017, la réception a été fixée au 28 juillet 2017.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2017, la SAS AISH a convoqué M. [U] pour réception de l'ouvrage le 28 septembre 2017, précisant que de mineures finitions peuvent être érigées en réserves.
Il est à noter que la consuel a constaté la conformité de l'installation électrique le 28 juin 2016, un rapport d'essai du test d'étanchéité à l'air a été établi le 2 mars 2017, la conformité de l'ouvrage à la RT 2012 a été constatée le 6 mars 2017.
Ainsi, il doit être considéré que malgré les réserves émises par le maître de l'ouvrage le jour de la réception, qui n'empêchaient pas l'occupation du logement, l'ouvrage était en état d'être livré dès le 14 juin 2017, de telle sorte que les pénalités de retard sont dues pour la période du 21 février 2017 au 13 juin 2017.
Le prix de la construction a été fixé à la somme de 133 527 euros et la pénalité encourue en cas de retard est donc de 44,509 euros par jour [133 527/3000].
La SAS AISH devait donc à M. [U] la somme de 4 985 euros [44,509 x 112] au titre des pénalités de retard.
4. Sur l'exécution de la décision
a) sur l'extinction de la créance
Moyens des parties
M. [U] soutient que le paiement volontaire des sommes auxquelles la société SFMI a été condamnée, antérieurement à sa liquidation judiciaire, a pour effet d'éteindre la créance par application de l'article 1342 du code civil. Il en déduit qu'aux termes de la décision à intervenir, exception faite des frais de procédure, il n'y aura pas lieu de fixer une créance au passif de la société SFMI.
La société SFMI ne réplique pas sur ce point.
Réponse de la cour
En application de l'article L. 622-21 I du code du commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Les décisions de la Cour de cassation citées par M. [U] ne concernent pas la même situation.
Quand bien même M. [U] ne demande que la confirmation de la décision déférée, celle-ci ne peut être confirmée en ce qu'elle condamne la SAS SFMI à l'indemniser. L'ouverture d'une procédure collective doit conduire la cour à fixer au passif de la liquidation judiciaire les sommes dues par la société liquidée.
b) sur la demande de libération de la retenue de garantie
Moyens des parties
La SAS SFMI demande le déblocage du solde du prix convenu à son profit. Elle estime que toutes les réserves émises à la réception ont éte levées de sorte que le solde doit lui revenir.
M. [U] réplique que la compensation ne saurait avoir lieu que si la retenue de garantie était libérée entre ses mains, ce qui correspond à ce qui a été fait au titre de l'exécution provisoire.
Réponse de la cour
Selon l'article 1er de la loi du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3° du code civil, les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil peuvent être amputés d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage.
Le maître de l'ouvrage doit consigner entre les mains d'un consignataire, accepté par les deux parties ou à défaut désigné par le président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce, une somme égale à la retenue effectuée.
L'article 2 de cette même loi prévoit qu'à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception, faite avec ou sans réserve, des travaux visés à l'article précédent, la caution est libérée ou les sommes consignées sont versées à l'entrepreneur, même en l'absence de mainlevée, si le maître de l'ouvrage n'a pas notifié à la caution ou au consignataire, par lettre recommandée, son opposition motivée par l'inexécution des obligations de l'entrepreneur. L'opposition abusive entraîne la condamnation de l'opposant à des dommages-intérêts.
En l'espèce, en l'absence de notification du maître de l'ouvrage pour s'opposer au versement des sommes consignées à la SAS SFMI, ces sommes auraient dû lui être versées par le consignataire, même en l'absence de mainlevée.
Il convient donc d'ordonner le versement de la somme consignée à la SAS SFMI.
La compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes selon l'article 1347 du code civil.
Il ne peut y avoir compensation entre la somme consignée restituée à la SAS SFMI et la créance de M. [U] dès lors que la dette de M. [U] a été éteinte par la consignation du solde du prix du marché.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :
Infirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a ordonné la déconsignation du solde du prix convenu, d'un montant de 6679,35 euros, actuellement consigné auprès de la Banque Populaire des Alpes, au profit de la société SFMI ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Fixe à la somme de 13 178,75 euros l'indemnisation due par la SAS SFMI à M. [D] [U] au titre des travaux de reprise et de l'indemnisation du préjudice de jouissance dus dans le cadre de la garantie de parfait achèvement ;
Déboute M. [D] [U] de sa demande d'indemnisation pour l'évacuation de gravats ;
Fixe à la somme de 4 985 euros les pénalités de retard dues par la SAS SFMI à M. [D] [U] ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI la créance de M. [D] [U] à la somme totale de 18 163,75 euros à titre d'indemnisation de ses préjudices ;
Déboute les parties de leurs demandes tendant à la compensation de leurs dettes et créances réciproques ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI la créance de M.[D] [U] en application de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 5 000 euros ;
Fixe au passif de la procédure collective de la SAS SFMI les dépens de la première instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, et les dépens de l'instance d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère de la chambre civile section B faisant fonction de présidente, et par la greffière Mme Claire Chevallet, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,