Livv
Décisions

CA Poitiers, 4e ch., 11 septembre 2025, n° 24/02034

POITIERS

Arrêt

Autre

CA Poitiers n° 24/02034

11 septembre 2025

ARRET N°

N° RG 24/02034 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HDQM

[L]

C/

[O]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

4ème Chambre Civile

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2025

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/02034 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HDQM

Décision déférée à la Cour : ordonnance sur incident du 05 juillet 2024 rendue par le Juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE.

APPELANTE :

Madame [B] [L]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 7]

[Adresse 4]

[Localité 5]

ayant pour avocat Me Pierre-Yves LE GUILLY, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE

INTIME :

Monsieur [M] [O]

né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 6]

ayant pour avocat Me Cécile GOHIER de la SELARL CABINET D'AVOCATS GENTY, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Mai 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Denys BAILLARD, Président

Madame Marie-Béatrice THIERCELIN, Conseillère

Madame Véronique PETEREAU, Conseillère, qui a présenté son rapport

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mme Manuella HAIE,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

**********************

EXPOSE DU LITIGE

Dans des conditions de régularité, de forme et de délai non discutées, Mme [B] [L] a interjeté appel le 21 août 2024 d'une ordonnance sur incident du 5 juillet 2024 du juge aux affaires familiales des Sables d'Olonne qui a notamment :

- déclaré irrecevables pour défaut d'intérêt à agir, les demandes formulées par Mme [L] tendant à voir ordonner l'ouverture des opérations judiciaires de compte, liquidation et partage de l'indivision ayant existé entre les ex-concubins, et les demandes subséquentes formulées relativement à l'indivision ;

- rappelé que Mme [L] conserve un intérêt à agir devant le Juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire pour ses autres prétentions relatives aux créances entre concubins nées à l'occasion du concubinage en application des dispositions de l'article L.213-3 2° du Code de l'organisation judiciaire ;

- déclaré prescrites les créances réclamées par Mme [L] au titre de :

- la reconnaissance de dette signée le 3 novembre 2017 pour un montant de 19.000 euros ;

- du chèque émis le 30 janvier 2018 pour un montant de 20.000 euros ;

- et du virement effectué le 3 août 2018 pour un montant de 20.000 euros ;

- réservé les autres demandes de Mme [L] en vue de leur examen ultérieur dans le cadre de l'instance au fond ;

et partant,

- renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état électronique du 10 octobre 2024 à 14 heures, pour leurs conclusions sur le fond du litige ;

- débouté les parties de leurs demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

- réservé les dépens de l'instance, lesquels suivront le sort de l'instance au fond ;

- rappelé que, sauf écrit constatant leur acquiescement ou exécution sans réserve, il appartient à la partie la plus diligente de faire procéder à la signification de la présente décision par un commissaire de justice pour en faire courir les délais de recours ;

L'appelante, Mme [L], conclut à l'infirmation de la décision entreprise et demande à la cour, statuant de nouveau, de :

- débouter M. [O] de son incident ;

- déclarer recevables les demandes formulées par elle tendant à voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision [J] ;

- constater que les créances réclamées par elle au titre de la reconnaissance de dette signée le 3 novembre 2017 pour un montant de 19.000 euros ; du chèque émis le 30 janvier 2018 pour un montant de 20.000 euros et du virement effectué le 3 août 2018 pour un montant de 20.000 euros ne sont pas prescrites ;

- condamner en cause d'appel M. [O] à 3.000 euros TTC au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel.

L'intimé, M. [M] [O], conclut à la confirmation de la décision déférée et le débouté de Mme [L] quant à toutes ses demandes, fins et prétentions et sollicite, en outre, de la voir condamner à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance.

Au soutien de ses prétentions, Mme [L] fait valoir que :

- elle est bien fondée à demander l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage car il existait une indivision entre les concubins ; ils formaient une société de fait dotée de l'affectio societatis car elle gérait la boulangerie et était même gérante statutaire de la boulangerie à une certaine époque sans pour autant être actionnaire sur le papier ; c'était une société familiale ; leur fils y a également travaillé ; elle comblait les trous de la trésorerie du commerce familial ;

- subsidiairement, elle a prêté des sommes à M. [O] ; il a une dette à son égard de 69.000 euros ; le point de départ de la prescription quinquennale n'est pas la date de signature ou de versement des sommes litigieuses mais leur terme, le moment où elles auraient dû être remboursées ; le terme était la vente de la boulangerie qui a eu lieu le 31 mars 2022 ; d'ailleurs, la dette ne pouvait pas être exigible avant la vente du fond au vu de l'absence totale de trésorerie de M. [O] ; le terme n'était pas contesté par M. [O] et était reconnu par leur fils qui a travaillé 8 ans dans la boulangerie de ses parents ; de plus, cette prescription quinquennale a été suspendue par la saisie du conciliateur de justice selon l'article 2238 du code civil ; elle l'a saisi le 14 octobre 2022 et il a conclu à un échec de la conciliation le 5 novembre 2022 ;

- selon l'article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait, interrompt le délai de prescription ; le 20 mai 2020, le bilan comptable de la boulangerie comportait bien un poste constatant l'existence d'une créance de 69.000 euros vis-à-vis de Mme [L], non contesté par M. [O] ; l'interruption est née également de la prescription lors du dépôt de demande d'aide juridictionnelle le 11 décembre 2022 ; la prescription repartait alors pour 5 ans ; en tout état de cause, les deux créances de 20.000 euros et 10.000 euros des 3 août 2018 et 17 mai 2019 n'étaient pas prescrites au jour de la délivrance de l'assignation ;

- elle est recevable dans son action car, durant la vie commune, M. [O] a profité du travail de sa compagne et de sa bienveillance à son égard pour se constituer un patrimoine de près d'un million d'euros, sans même consentir à la rembourser des diverses sommes qu'elle lui a avancées durant une vie commune de plusieurs dizaines d'années ; cela aurait été bien différent s'ils avaient été mariés, auquel cas, il y aurait eu partage des biens de communauté et très certainement prestation compensatoire conséquente au vu de la disparité de situation entre les ex-concubins ; M. [O] possède en effet un yacht, une villa en bord de mer et mène 'grand train'.

En réponse, M. [O] soutient que :

- le juge de la mise en état a légitimement retenu qu'il n'existait aucune indivision entre les ex-concubins ; ces derniers ne disposent d'aucun bien commun ; la boulangerie appartenait en propre à M. [O], ce que l'appelante ne conteste pas ; les concubins ne détenaient pas non plus de bien immobilier, ou d'épargne en commun ; il n'y a donc absolument rien à partager entre eux ; l'existence d'une société créée de fait suppose que celui qui l'invoque rapporte la preuve de l'ensemble des éléments constitutifs du contrat de société, au titre de l'article 1832 du Code civil, c'est-à-dire des apports réciproques, une intention de s'associer dans une entreprise commune, et la volonté de partager les bénéfices et les pertes, ce qui n'est pas le cas, en l'espèce, puisqu'il n'y a pas d'intention de mettre en commun tous les produits de l'activité conjointe et d'en partager les bénéfices ou les pertes ; les concubins n'ont jamais eu la volonté de collaborer sur un pied d'égalité à un projet commun ;

- Mme [L] avait une activité de simple vendeuse au sein de la boulangerie, ce qui ressort de son bulletin de paye et de sa démission ; elle doit donc être déboutée de sa demande de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision ;

- sur la prescription des demandes de l'appelante :

- le 9 août 2023, Mme [L] a demandé sa condamnation à lui payer la somme de 69.000 euros correspondant à 19.000 euros au titre de la reconnaissance de dette du 3 novembre 2017, 20.000 euros à la suite d'un chèque qu'elle lui a donné le 30 janvier 2018, un virement effectué le 3 août 2018 pour un montant de 20.000 euros et enfin, un chèque de 10.000 euros le 17 mai 2019 ;

- concernant le montant de 19.000 euros, elle aurait dû l'assigner en remboursement avant le 3 novembre 2022 et aucun acte n'a permis durant cette période de suspendre ou d'interrompre la prescription ; il en est de même pour la somme de 20.000 euros qu'elle lui aurait prêtée le 30 janvier 2018, également prescrite depuis le 30 janvier 2023 et en ce qui concerne l'autre somme de 20.000 euros, un acte aurait dû interrompre la prescription avant le 3 août 2023 ; or l'acte est en date du 9 août soit postérieurement ;

- Mme [L] ne justifie pas que la date du point de départ de la prescription doit être la date de vente de la boulangerie ; elle l'allègue mais ne prouve pas qu'ils s'étaient mis d'accord sur ce terme ; elle ne peut pas décider d'un terme de manière unilatérale ; le délai de prescription n'a pas pu être interrompu sur le fondement de l'article 2238 du Code civil ;

- la reconnaissance de dette qui interrompt la prescription ne peut se situer dans un document qui n'est pas adressé au créancier que s'il est l'aveu non équivoque du débiteur ; la pièce n°6 communiquée par Mme [L] n'est en rien un document constatant l'existence d'une créance, ou une reconnaissance de dette au sens de l'article 2240 du Code civil ; ce document comptable reprend seulement les versements réalisés sur le compte de la boulangerie entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2019 et ne constitue donc en aucun cas un aveu non équivoque du débiteur ; ainsi, comme retenu par le juge de la mise en état «la seule inscription d'une créance au bilan comptable d'une société ne constitue pas une reconnaissance de dette de la part du débiteur» ; le juge de la mise en état a donc légitimement reconnu la prescription des demandes de Mme [L] à hauteur de 59.000 euros ; quant à l'interruption de la prescription de l'action par le dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle le 11 décembre 2022, cet argument n'avait pas été soulevé en première instance ; c'est un moyen nouveau, que l'appelante avait fait le choix de ne pas soulever devant le juge de la mise en état ; Le dépôt de cette demande d'aide juridictionnelle était donc voué à l'échec et purement dilatoire ; de plus, le nouveau délai ne serait sensé courir qu'à compter de l'admission de la demande d'aide juridictionnelle et non à compter de son rejet ;

Vu les dernières conclusions de l'appelante en date du 12 mai 2025 ;

Vu les dernières conclusions de l'intimé en date du 18 octobre 2024 ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 mai 2025.

SUR QUOI

Mme [L] et M. [O] ont vécu en concubinage pendant plusieurs années et ont eu deux enfants, à ce jour, majeurs et indépendants.

Par la suite, le couple s'est séparé.

Par acte d'huissier de justice en date du 9 août 2023, Mme [L] a fait assigner M. [O] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire des Sables d'Olonne, en sollicitant l'ouverture des opérations judiciaires de compte, liquidation et partage de l'indivision [J], outre la condamnation de M. [O] à lui verser la somme de 69.000 euros et la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par conclusions d'incident en date du 22 septembre 2023, M. [O] a contesté la recevabilité de la demande de Mme [L].

* * *

Sur la demande d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision

En vertu de l'article 815 du code civil, 'nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.'

Selon l'article 840 du code civil, 'le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il s'élève des contestations sur la manière d'y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévus aux articles 836 et 837.'

Mme [L] doit donc rapporter la preuve de l'existence d'une indivision entre elle et son concubin.

En l'espèce, elle allègue l'existence d'une société de fait entre eux deux.

La société créée de fait suppose la réunion de tous les éléments du contrat de société, visés par l'article 1832 du code civil, à savoir des apports, une participation aux bénéfices et aux pertes ainsi qu'une volonté de s'associer ; toutefois, la simple vie commune des deux personnes comme des concubins ne suffit pas à caractériser l'affectio societatis nécessaire.

Ces conditions cumulatives doivent être établies séparément et ne sauraient se déduire les unes des autres (Cass. Civ 1ère 20 janvier 2010). La jurisprudence a ainsi décidé que la société de fait entre concubins se distingue de la simple assistance apportée par l'un dans la gestion administrative d'une entreprise artisanale appartenant à l'autre et que si la présence constante du concubin dans le magasin démontre qu'il a fourni une aide efficace à l'exploitation du fonds, ce seul élément ne saurait pour autant établir juridiquement une société créée de fait.

En l'espèce, il est constant que les deux concubins ne détenaient pas ensemble de biens immobiliers ou d'épargne, que M. [O] détenait seul la boulangerie, dans laquelle Mme [L] travaillait, à tout le moins en tant que vendeuse, et que Mme [L] a prêté de l'argent à M. [O].

Par ailleurs, les éléments produits par Mme [L] permettent d'établir que M. [O] a reconnu avoir reçu la somme de 19.000 euros de la part de Mme [L] en novembre 2017, que les dettes sont inscrites au passif de la société dans le bilan 2017-2018, que dans le bilan suivant (2018-2019), il est fait mention de virements provenant de Mme [L] pour 39.000 euros ; par ailleurs, cet argent a servi à régler les factures (salaires, [9], fournisseurs) selon l'attestation du fils commun, M. [H] [O], lequel déclare avoir travaillé 8 ans au sein de la boulangerie avec ses deux parents (pièce 14).

Pour autant, ces éléments démontrent uniquement l'existence d'un apport financier de Mme [L] laquelle a versé à plusieurs reprises des fonds pour permettre à la société de fonctionner convenablement. En revanche, n'est pas établi le fait que Mme [L] a pu participer aux bénéfices et aux économies ni le fait que les deux concubins auraient collaboré sur un pied d'égalité. Elle ne démontre pas notamment qu'elle était la co-gérante de la boulangerie comme elle le soutient alors même que M. [O] établit qu'elle était vendeuse salariée de la boulangerie entre 2010 et 2019, et qu'elle a démissionné. Son soutien financier qui n'est pas contesté peut se justifier naturellement et uniquement par le fait que son concubin était en difficulté économique et qu'elle souhaitait l'aider à ce titre sans pour autant que cela démontre un affectio societatis.

Toutes les conditions de la société créée de fait ne sont donc pas remplies.

Dès lors, il n'existe pas d'indivision entre les deux ex-concubins.

En conséquence, les demandes de Mme [L] formulées relativement à l'indivision, dont celle de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision, sont irrecevables.

La décision critiquée sera donc confirmée de ce chef.

Concernant les créances de Mme [L] à l'égard de M. [O]

M. [O] soutient que l'action en remboursement des différentes sommes que Mme [L] lui aurait versées est prescrite.

C'est à celui-ci, qui se prétend libéré, de justifier de l'extinction de son obligation.

La charge de la preuve du point de départ d'un délai de prescription incombe donc à M. [O].

Selon l'article 2224 du code civil, 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

Par principe, le délai commence à s'écouler lorsque le titulaire du droit a effectivement connu les faits permettant de l'exercer. Mais il peut courir dès avant, s'il est établi que le titulaire aurait dû les connaître. La prescription court donc à compter de la connaissance effective ou de l'ignorance blâmable de ce que l'on pourrait appeler les faits pertinents. Il ne s'agit donc pas d'un point de départ fixe mais évolutif ou 'glissant'.

Le point de départ de la prescription doit s'analyser distinctement pour chaque créance revendiquée.

* Concernant la créance relative à la reconnaissance de dette du 3 novembre 2017

En l'espèce, Mme [L] revendique le remboursement d'une somme au titre d'une reconnaissance de dette sans terme qui, selon cet acte, indique que M. [O] reconnaît avoir reçu une somme de 19.000 euros de la part de Mme [L]. Cette reconnaissance de dette a été enregistrée le 10 novembre 2017 auprès du service départemental de l'enregistrement.

Lorsqu'un prêt a été consenti sans fixer de terme, le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action en remboursement se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, laquelle doit être recherchée, suivant la commune intention des parties et les circonstances de l'engagement.

Mme [L] soutient qu'il avait été convenu entre les ex-concubins un terme tacite à cette reconnaissance de dette, lequel était la vente de la boulangerie, car M. [O] pourrait alors disposer enfin, par cette vente, des fonds nécessaires pour la rembourser.

Mme [L] produit un seul élément pour déterminer le terme qu'aurait été décidé de manière implicite par la commune intention des parties. Il s'agit de l'attestation du fils commun du couple, dans laquelle celui-ci explique qu'il est boulanger-pâtissier, qu'il a travaillé avec ses deux parents durant 8 ans à la boulangerie de son père, et que son père 'a toujours dit et confirmé à sa mère qu'il lui rendrait son argent à la vente de la boulangerie car il ne pouvait faire autrement'. Cet élément est toutefois insuffisant pour fixer le terme à la date de la vente de la boulangerie, soit le 31 mars 2022, ce d'autant que M. [O] dément vivement ce terme et souligne la partialité des propos de son fils.

Pour autant, la cour relève que M. [O] n'apporte aucun élément permettant de fixer le terme de cette reconnaissance de dette.

Le point de départ de la prescription d'une reconnaissance de dette, sans terme, est nécessairement à tout le moins la connaissance par le créancier de l'atteinte à son droit de remboursement.

En l'espèce, informée de la vente de la boulangerie en mars 2022, Mme [L] n'a pas été remboursée par M. [O] et a donc mis en demeure ce dernier de lui rembourser la somme due, notamment au titre de la reconnaissance de dette, en lui accordant un délai de huit jours pour la lui régler.

Cette mise en demeure avec accusé de réception en date du 5 octobre 2022, et restée sans réponse, fixe le point de départ du délai de prescription de la reconnaissance de dette car c'est bien à partir de cette date que Mme [L], créancière, prend connaissance et conscience de la volonté du débiteur de ne pas rembourser le prêt.

Puisque Mme [L] a fait assigner M. [O] par acte de commissaire de justice du 9 août 2023, soit moins d'un an après cette mise en demeure, devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire des Sables d'Olonne, pour obtenir notamment la condamnation de celui-ci à lui rembourser les sommes dues, il convient de relever que l'action a bien été portée dans le délai de 5 ans et qu'elle n'est donc pas prescrite.

En conséquence, l'action relative à cette créance est recevable.

* Concernant la créance au titre d'un chèque de 20.000 euros en date du 30 janvier 2018

Mme [L], qui soutient qu'elle aurait prêté à M. [O] une somme de 20.000 euros le 30 janvier 2018 et que celui-ci se serait engagé à lui rembourser, sans qu'aucune date de remboursement n'ait été précisée, l'a mis en demeure de la rembourser par une lettre recommandée réceptionnée par M. [O] le 5 octobre 2022 et restée sans réponse.

Compte tenu du point de départ du délai de prescription et de la date de l'assignation, l'action de Mme [L] n'est pas prescrite.

* Concernant la créance au titre d'un virement de 20.000 euros effectué le 3 août 2018

Mme [L], qui soutient qu'elle aurait prêté à M. [O] une somme de 20.000 euros le 3 août 2018 et que celui-ci se serait engagé à lui rembourser, sans qu'aucune date de remboursement n'ait été précisée, l'a mis en demeure de la rembourser par une lettre recommandée réceptionnée par M. [O] le 5 octobre 2022 et restée sans réponse.

Compte tenu du point de départ du délai de prescription et de la date de l'assignation, l'action de Mme [L] n'est pas prescrite.

En conséquence, la décision critiquée sera infirmée de ce chef.

Il conviendra d'examiner le bien fondé de ces trois créances dans le cadre de la procédure au fond.

Compte tenu de la solution apportée au litige, il convient de condamner M. [O] à régler les entiers dépens d'appel et de payer à Mme [L] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Au fond,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme la décision déférée en ce qu'elle a déclaré prescrites les créances réclamées par Mme [B] [L] au titre de :

- la reconnaissance de dette signée le 3 novembre 2017 pour un montant de 19.000 euros ;

- du chèque émis le 30 janvier 2018 pour un montant de 20.000 euros ;

- et du virement effectué le 3 août 2018 pour un montant de 20.000 euros ;

Statuant à nouveau,

Déclare non prescrites les créances réclamées par Mme [B] [L] au titre de la reconnaissance de dette signée le 3 novembre 2017 pour un montant de 19.000 euros, du chèque émis le 30 janvier 2018 pour un montant de 20.000 euros et du virement effectué le 3 août 2018 pour un montant de 20.000 euros ;

Confirme la décision déférée pour le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [M] [O] aux dépens de l'appel,

Condamne M. [M] [O] à payer à Mme [B] [L] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Le présent arrêt a été signé par Denys BAILLARD, Président et par Manuella HAIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

M. HAIE D. BAILLARD

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site