Livv
Décisions

CA Montpellier, 2e ch. civ., 11 septembre 2025, n° 24/06096

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 24/06096

11 septembre 2025

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 11 SEPTEMBRE 2025

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 24/06096 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QPBT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 OCTOBRE 2024

JUGE DE L'EXECUTION DE [Localité 7] N° RG 23/01607

(jonction avec le n° RG 24/6320)

APPELANTE :

Madame [D] [T] épouse [I]

née le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 8]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Christelle BOURRET MENDEL, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-009900 du 29/11/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 6])

(appelante dans le dossier RG 24/6320)

INTIMEE :

S.A.R.L. BEAUMENIL

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Morgane CAVALIER de la SELARL BRICCA & CAVALIER, avocat au barreau de NARBONNE

(intimée dans le dossier RG 24/6320)

Ordonnance de clôture du 15 Mai 2025

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 MAI 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :

Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre

Mme Virginie HERMENT, Conseillère

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Laurence SENDRA

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.

FAITS ET PROCÉDURE

Par jugement du 14 octobre 2016, le tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône a déclaré Madame [D] [T] épouse [I] coupable de faits de contrefaçon ou falsification de chèque, vol et usage de chèque contrefait ou falsifié, faits commis du 27 mai 2012 au 27 mai 2015 et l'a condamnée à payer à la société BEAUMENIL & CIE la somme de 104.022, 60 €.

Le 12 juillet 2021, un commandement aux fins de saisie-vente était notifié à Madame [D] [T] épouse [I]. Le 23 juillet 2021, Maître [U], commissaire de justice, dressait un procès-verbal de saisie-vente. Le 28 septembre 2022, Maître [U] saisissait certains meubles de Madame [D] [T] épouse [I]. Le 4 septembre 2023, Madame [D] [T] épouse [I] était avisée de la vente forcée de son mobil-home.

Par acte de commissaire de justice en date du 20 octobre 2023, Madame [D] [T] épouse [I] a fait assigner la société BEAUMENIL & CIE devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Narbonne aux fins de :

- annuler le commandement de payer valant saisie-vente du 12 juillet 2021 et le procès-verbal de saisie vente du 23 juillet 2021,

- annuler l'acte intitulé 'signification de vente' en date du 4 septembre 2023 signifié à Madame [I] et par conséquent la vente aux enchères publiques en résultant,

- dire que le mobil-home est insaisissable,

- condamner la société BEAUMENIL & CIE à verser à Madame [D] [T] épouse [I] la somme de 2.500 € pour procédure abusive,

- condamner la société BEAUMENIL & CIE à payer à Maître FUSTER la somme de 2.500 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

- débouter la société BEAUMENIL & CIE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

La société BEAUMENIL & CIE soulève notamment l'irrecevabilité de l'action de Madame [T] épouse [I] pour non respect du délai de contestation.

Par jugement rendu contradictoirement en date du 3 octobre 2024, le juge de l'exécution a :

- déclaré irrecevable la contestation de la saisie litigieuse ainsi que l'ensemble des demandes qui en sont accessoires,

- débouté Madame [D] [T] épouse [I] de ses demandes d'annulation du commandement de payer valant saisie vente du 12 juillet 2021, du procès-verbal de saisie vente du 23 juillet 2021 et l'avis de vente du 4 septembre 2023,

- débouté la société BEAUMENIL & CIE de sa demande d'astreinte,

- condamné Madame [D] [T] épouse [I] aux dépens de la présente procédure,

- condamné Madame [D] [T] épouse [I] à payer à la société BEAUMENIL & CIE la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles

Le 5 décembre 2024 et du 13 décembre 2024, Madame [D] [T] épouse [I] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable la contestation de la saisie litigieuse ainsi que l'ensemble des demandes qui lui sont accessoires,

- débouté Madame [D] [T] épouse [I] de ses demandes d'annulation du commandement de payer valant saisie vente du 12 juillet 2021, du procès-verbal de saisie vente du 23 juillet 2021 et l'avis de vente du 4 septembre 2023,

- condamné Madame [D] [T] épouse [I] aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Le 13 décembre 2025, un second appel a été formé par Madame [T] à l'encontre du même jugement.

Vu les avis du 12 et 20 décembre 2024 ayant fixé à bref délai l'affaire à l'audience du 22 mai 2025 conformément aux dispositions de l'article 906 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions notifiées le 14 mai 2025 par l'appelant ;

Vu les conclusions notifiées le 11 avril 2025 par l'intimé ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 15 mai 2025 ;

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame [D] [T] épouse [I] conclut à l'infirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a déclaré irrecevable la contestation de la saisie, rejeté les demandes d'annulation des actes précités et l'a condamnée aux dépens et frais irrépétibles, et demande à la Cour, statuant à nouveau de :

In limine litis,

- annuler le commandement de payer valant saisie-vente du 12 juillet 2021 et le procès verbal de saisie vente du 23 juillet 2021,

- annuler l'acte intitulé « signification de vente » en date du 4 septembre 2023 signifié à Madame [D] [T] épouse [I] et par conséquent la vente aux enchères publiques en résultant,

En toutes hypothèses,

- juger que le mobil-home est insaisissable,

- condamner la SARL BEAUMENIL & CIE à verser à Madame [T] la somme de 2 500 € pour procédure abusive,

- condamner la SARL BEAUMENIL & CIE aux entiers dépens de première instance,

- ordonner la jonction des procédures enregistrées sous les numéros RG 24/06096 et 24/06320,

- condamner la SARL BEAUMENIL & CIE à payer à Me Christelle BOURRET MENDEL la somme de 2.500 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle,

- condamner la SARL BEAUMENIL & CIE aux entiers dépens d'appel.

S'agissant du commandement de payer valant saisie-vente du 12 juillet 2021 et du procès-verbal de saisie-vente du 23 juillet 2021, l'appelante reproche au commissaire de justice de ne pas avoir détaillé suffisamment les démarches qu'il a entreprises, ne mentionnant pas qu'elle sorte d'appel il a passé, la mention selon laquelle elle était connue de l'étude étant insuffisante. L'irrégularité de cet acte lui a causé un grief puisqu'elle n'a pu contester dans le délai le commandement qui lui a été délivré.

En ce qui concerne l'acte de signification de vente du 4 septembre 2023, celui-ci est nul comme découlant des deux actes précédents atteints d'irrégularités.

L'appelante en déduit que sa contestation est recevable, les actes précités n'ayant fait courir aucun délai.

Elle demande à la cour, après avoir annulé les actes précités, d'évoquer quant à l'insaisissabilité du mobil-home. Elle expose que le mobil-home a été acquis pour développer une activité de location saisonnière sous le statut d'auto entrepreneur puis sous la forme d'une SAS. Le mobil-home a été cédé à la société pour un euro symbolique et fait désormais partie de son actif immobilisé. En conséquence le mobilehome n'était pas saisissable comme n'appartenant pas à la débitrice.

La société BEAUMENIL & CIE demande à la Cour de :

- ordonner la jonction des procédures enregistrées sous les numéros RG 24/06096 et 24/06320,

- infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société BEAUMENIL & CIE de sa demande d'astreinte,

- confirmer le jugement attaqué pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- condamner Madame [T] épouse [I] à verser une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, et ce, jusqu'au parfait règlement de la somme de 148.154,23 euros,

En tout état de cause,

- débouter Madame [T] épouse [I] de toutes demandes, fins, conclusions plus amples ou contraires,

- condamner Madame [T] épouse [I] à payer à la SARL BEAUMENIL & CIE la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Madame [T] épouse [I] aux entiers dépens d'appel.

L'intimée reprend l'argumentation du premier juge quant à la validité des actes dont la nullité est demandée. Il soulève l'irrecevabilité de la contestation qui concerne l'insaisissabilité du mobil-home, laquelle aurait dû être introduite dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'acte de saisie.

Surabondamment, l'intimée rappelle que Madame [T] a cédé le mobil-home après la signification de l'acte de saisie du 23 juillet 2021 pour la somme d'un euro symbolique, alors que la saisie le rendait indisponible. Elle s'est ainsi rendue coupable d'un agissement réprimé par les dispositions de l'article 314-6 du code pénal.

Malgré une activité de location de mobil-homes, l'appelante n'a jamais réglé spontanément sa dette, de sorte que la procédure de saisie ne peut être qualifiée d'abusive.

Formant appel incident, la société BEAUMENIL & CIE sollicite que soit prononcée une astreinte pour garantir le paiement de la dette de 148'154,23 €en raison de l'organisation par Madame [T] de son insolvabilité depuis des années malgré des revenus conséquents tirés de son activité de location de bungalows.

Par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la Cour entend se référer aux dernières écritures des parties ci dessus visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions qu'elles ont développés.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la jonction :

S'agissant de deux appels formés à l'encontre du même jugement, il convient dans le but d'une bonne administration de la justice de prononcer la jonction des procédures numéro RG 24/6096 et 24/6320 sous le premier numéro.

Sur la validité de la signification du commandement de saisie vente du 12 juillet 2021 :

L'acte de signification du 12 juillet 2021 mentionne :

« Je me suis transporté à l'adresse ci-dessus aux fins de délivrer copie du présent acte

Audit endroit :

' Personne ne répondant à nos appels

Après avoir vérifié la certitude du domicile du destinataire caractérisé par les éléments suivants

' Destinataire de l'acte déjà connu de l'Etude

La signification à personne et à domicile étant impossible, la copie du présent est déposée enmon étude sous enveloppe fermée, ne portant que d'un côté l'indication des nom et adresse du destinataire, et de l'autre le cachet de mon étude apposée sur la fermeture du pli.

Un avis de passage daté de ce jour, mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant et le fait que la copie de l'acte doit être retirée dans les plus brefs délais en mon étude contre récépissé ou émargement, par le destinataire de l'acte ou par toute autre personne spécialement mandatée, a été laissé au domicile du signifié ».

La formule employée, à savoir 'Destinataire de l'acte déjà connu de l'Etude' suppose que le significateur avait fait précédemment effectué les recherches nécessaires pour localiser l'adresse de l'appelante. Or il n'est pas contesté par Madame [T] que l'adresse mentionnée dans l'acte soit correcte. Dès lors, l'appelante ne peut se plaindre d'une insuffisance de diligence.

Il n'appartient pas au commissaire de justice de détailler les moyens employés pour vérifier la présence de la destinataire, laquelle ne prétend pas avoir été sur les lieux au moment de la signification.

Il convient en conséquence de confirmer la décision qui a validé le commandement de saisie vente et les actes de saisie qui en découlent.

Sur la recevabilité de la contestation :

Selon les dispositions de l'article R.221-53 du code des procédures civiles d'exécution, les contestations sur la saisissabilité des biens compris dans la saisie sont portées devant le juge de l'exécution par le débiteur dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'acte de saisie.

En l'espèce, l'acte de saisie vente date du 23 juillet 2023 et l'acte introductif d'instance du 20 octobre 2023, soit plus d'un mois après.

Sa contestation est donc irrecevable, ainsi qu'en a décidé le premier juge qui sera approuvé sur ce point.

Sur l'astreinte :

C'est par des motifs que la Cour adopte que le premier juge n'a pas assorti l'obligation en paiement de Madame [T] d'une astreinte en relevant que la créancière dispose d'un titre exécutoire lui permettant de mettre en oeuvre les mesures d'exécution forcées qui lui permettront de recouvrer sa dette. Il pourra être ajouté que l'organisation de l'insolvabilité de la débitrice ne résulte pas suffisamment des pièces produites.

La décision sera confirmée.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile :

Madame [D] [T], qui succombe au principal en son recours, sera condamnée aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à verser une somme de 2.000 euros à la société BEAUMENIL & Cie sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, compte tenu de l'équité.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Ordonne la jonction des procédures numéro RG 24/6096 et 24/6320 sous le premier numéro,

Confirme la décision en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Madame [D] [T] aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à payer une somme de 2.000 euros à la société BEAUMENIL & Cie au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site