CA Versailles, ch.protection soc. 4-7, 11 septembre 2025, n° 24/02984
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
Ch.protection sociale 4-7
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 SEPTEMBRE 2025
N° RG 24/02984 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WZ5J
AFFAIRE :
S.A.R.L. [4]
C/
[8]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Décembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de NANTERRE
N° RG : 16/01310
Copies exécutoires délivrées à :
Me Stéphanie ARENA
[8]
Copies certifiées conformes délivrées à :
S.A.R.L. [4]
[8]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE ONZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.R.L. [4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637
APPELANTE
****************
[8]
Département des contentieux amiables et judiciares
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par M. [Y] [C] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir général
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Julie MOUTY-TARDIEU, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère faisant fonction de présidente,
Madame Julie MOUTY-TARDIEU, Conseillère,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Mélissa ESCARPIT,
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite d'un contrôle réalisé le 13 avril 2015 par l'URSSAF dans les locaux de la société [4], qui exerce une activité de restauration rapide, il a été établi le 9 septembre 2015 un procès-verbal relevant du travail dissimulé.
Le même jour, l'URSSAF a adressé à la société une lettre d'observations aux termes de laquelle il était envisagé de procéder à un redressement pour travail dissimulé pour un montant total de 62 302 euros pour la période du 5 octobre 2012 au 31 décembre 2014.
La société [4] a saisi la commission de recours amiable puis le tribunal judiciaire de Nanterre qui, par un jugement du 4 décembre 2020 a :
Rejeté le recours de la société [4],
Condamné la société [4] à payer à l'URSSAF la somme de 83 489 euros pour la période du 5 octobre 2012 au 31 décembre 2014,
Condamné la société à payer les dépens de l'instance.
La société [4] a fait appel le 15 janvier 2021. Les parties ont été convoquées à l'audience du 16 mars 2022 lors de laquelle l'affaire a été radiée.
La société [4] a fait réinscrire l'affaire au rôle de la cour, les parties ont été convoquées à l'audience du 4 juin 2025.
Par des conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société [4] demande à la cour de :
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
In limine litis, déclarer la lettre de mise en demeure du 26 janvier 2016, et donc les chefs de redressement en résultant, nuls au motif d'une violation du principe du contradictoire,
Déclarer infondé le redressement opéré par l'Urssaf dans son ensemble,
Enjoindre à l'Urssaf de supprimer les cotisations et majorations,
Enjoindre à l'Urssaf de maintenir les réductions « Fillon » pour un montant de 11 004 euros (années 2012 à 2014),
Condamner l'Urssaf à rembourser à la société [4] la somme de 88 472,65 euros,
Condamner l'Urssaf à payer à la société [4] la somme de 6 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l'appel,
Condamner l'Urssaf à payer les dépens.
Par des conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, l'Urssaf demande à la cour de :
Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Rejeter les demandes de la société [4],
Condamner la société [4] à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'application du principe de la contradiction
Le tribunal a estimé que l'Urssaf avait suivi une procédure régulière en transmettant à la société [4] une lettre d'observations. Il a précisé que l'Urssaf n'était pas tenue de lui communiquer le procès-verbal de travail dissimulé. Il a ajouté que la société avait pu exprimer sa contestation de sorte que le principe du contradictoire avait été respecté.
En appel la société [4] reprend son argumentation relative à l'absence de communication par l'Urssaf du procès-verbal de travail dissimulé qui ne lui a été remis que cinq ans plus tard au cours de la procédure de première instance. La société estime qu'elle n'a pas pu se défendre de façon pertinente, que l'Urssaf a méconnu le principe de la contradiction (article 15 du code de procédure civile) et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. La société en déduit que la procédure est nulle.
L'Urssaf répond que le procès-verbal de travail dissimulé est une pièce de la procédure pénale couverte par le secret de l'enquête qui ne doit pas être remis à la personne concernée (articles 11 et 115 du code de procédure pénale) de sorte que la société [4] ne pouvait pas en avoir communication au moment de l'enquête. L'Urssaf ajoute qu'elle a bien respecté le principe de la contradiction en remettant ce procès-verbal à la société [4] au cours de la procédure de première instance. Elle conclut à la régularité de la procédure.
La cour applique l'article 11 du code de procédure pénale (rédaction applicable en 2015) : Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.
Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. (')
Le procès-verbal de travail dissimulé est une pièce de la procédure pénale qui a été transmis au procureur de la République. En application du texte précité elle est couverte par le secret de l'enquête pénale et l'Urssaf ne pouvait pas la communiquer à la société [4] sans commettre une infraction pénale.
Le 23 novembre 2015 l'avocat de la société [4] a demandé la communication de ce document au procureur de la République de [Localité 6] qui a rejeté cette demande le même jour au motif que le dossier était en enquête.
La jurisprudence constante de la cour de cassation est en ce sens (Crim., 12 janvier 2021, pourvoi n° 20-80.647, publié ; Cass. 2e civ., 5 sept. 2024, n° 22-18.226, publié).
Cette protection du secret de l'enquête poursuit un but légitime, protégé par la loi. Il est en outre proportionné dès lors que la société [4] a obtenu la communication de ce document au cours de la procédure de première instance comme elle le reconnait dans ses conclusions. Il n'y a donc pas d'atteinte à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ni au principe de la contradiction.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de la procédure soulevée par la société [4].
Sur le recours à la taxation forfaitaire et le nombre d'heure de travail des salariés
Le tribunal a relevé que, lors du contrôle, les inspecteurs de l'Urssaf ont comparé les heures d'ouverture du commerce de restauration rapide avec l'effectif des salariés. Ils ont interrogé le personnel présent qui a déclaré venir en cas de besoin et recevoir des paiements en espèces en plus du chèque de salaire. Après avoir comparé les heures d'ouverture du commerce, les déclarations des salariés, leur nombre d'heures de travail et les déclarations sociales de la société, le tribunal a souligné que les inspecteurs de l'Urssaf avaient constaté des divergences révélant du travail dissimulé. Le tribunal a précisé que la comptabilité de la société ne permettait pas d'établir le montant exact des rémunérations. Le tribunal a souligné que les dénégations de la société n'étaient fondées sur aucune preuve et qu'elle tentait de remettre en cause les déclarations des salariés présents lors du contrôle, sans produire de preuve contraire. Le tribunal a donc retenu comme exact le recours à la taxation forfaitaire.
En appel la société [4] soutient que l'Urssaf ne pouvait avoir recours à la taxation forfaitaire qu'en cas de comptabilité inexacte ou incomplète et souligne que cette preuve incombe à l'Urssaf. Elle ajoute qu'aucune discordance n'a été constatée entre la comptabilité et les documents sociaux. La société [4] remet en cause les déclarations d'un salarié, M. [R], qui avait l'intention de lui nuire et qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire. La société conteste avoir versé un complément de rémunération en espèces et conteste les heures d'ouverture de commerce indiquées par les salariés interrogés lors du contrôle. Elle déclare employer essentiellement des salariés à temps partiel et souligne le choix du gérant de ne pas être rémunéré lors des premières années d'exercice. Elle indique produire le programme de travail des salariés et en déduit une concordance approximative entre les heures travaillées et les heures déclarées. Elle reconnait une différence portant sur la somme de 660 euros seulement.
L'Urssaf répond que les inspecteurs ont procédé à une taxation forfaitaire au regard de l'incapacité de la société [4] à justifier d'une comptabilité fiable, complète, de déclarations sociales en concordance avec les heures d'ouverture du commerce et le nombre de salariés occupés. L'Urssaf souligne que la charge de la preuve du recours erroné à la taxation forfaitaire incombe à la société [4] et que celle-ci ne produit aucun élément en ce sens. L'Urssaf ajoute qu'elle a évalué les heures de travail au regard des heures d'ouverture du commerce, du nombre de salariés employés selon les déclarations recueillies lors du contrôle ce qui conduit à retenir 790 heures de travail par mois. L'Urssaf souligne que l'investissement important déclaré par le gérant de la société n'est pas crédible dès lors qu'il était également employé à temps plein dans une autre société. Elle conclut à la confirmation du jugement.
La cour fait application des textes suivants :
Articles L 8221-1 du code du travail : Sont interdits :
1° Le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;
2° La publicité, par quelque moyen que ce soit, tendant à favoriser, en toute connaissance de cause, le travail dissimulé ;
3° Le fait de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, aux services de celui qui exerce un travail dissimulé.
Article L 8221-5 du code du travail : Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Article L 8221-2 du même code qui dispose : Sont exclus des interdictions prévues au présent chapitre, les travaux d'urgence dont l'exécution immédiate est nécessaire pour prévenir les accidents imminents ou organiser les mesures de sauvetage.
Article R 242-5 du code de la sécurité sociale (version applicable en 2015) : Lorsque la comptabilité d'un employeur ne permet pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l'organisme chargé du recouvrement. Ce forfait est établi compte tenu des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l'emploi est déterminée d'après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve. Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle engagé en application de l'article L. 243-7 ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l'organisme chargé du recouvrement, dans les conditions prévues au présent article.
En cas de carence de l'organisme créancier, le forfait est établi par le responsable du service mentionné à l'article R. 155-1.
Lorsque l'employeur n'a pas versé dans les délais prescrits par les articles R. 243-6, R. 243-7, R. 243-9 et R. 243-22, les cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, l'organisme créancier peut fixer, à titre provisionnel, le montant desdites cotisations en fonction des versements effectués au titre des mois ou trimestres antérieurs. Cette évaluation doit être notifiée à l'employeur par une mise en demeure adressée par lettre recommandée, avec accusé de réception dans les conditions de l'article L. 244-2.
En l'espèce, la société [4] conteste le recours à la taxation forfaitaire. Il lui appartient de produire les informations comptables démontrant qu'il existe une concordance entre les heures d'ouverture du commerce de restauration rapide, les heures travaillées et les déclarations sociales qu'elle a réalisées.
La cour relève toutefois que la société [4] se contente de produire ses déclarations fiscales au titre de l'impôt sur les sociétés, qui n'est pas un document comptable mais fiscal.
Elle produit les déclarations sociales des années 2012 à 2014 dont la sincérité ne peut pas être vérifiée au regard de l'absence de comptabilité et d'aucune justification relative aux heures d'ouverture du commerce de restauration rapide.
A ce titre, la société [4] conteste les déclarations des salariés lors du contrôle, qui ont indiqué que le commerce était ouvert tous les jours de 12h à 22h en semaine et jusqu'à minuit le samedi et le dimanche, sans toutefois produire la preuve contraire qui lui incombe.
La société [4] soutient qu'il n'y a pas lieu de retenir le témoignage de M. [R] avec lequel elle a eu un contentieux et qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire. Toutefois, cette défense est inopérante dès lors que la convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement est postérieure de plusieurs mois (février 2016) au contrôle réalisé par l'Urssaf. De plus, ces éléments ne remettent pas en cause l'exactitude des propos de M. [R] quant aux modalités de paiement de son salaire (chèque et espèces).
Ainsi, la critique de la société [4] n'est fondée sur aucune preuve pertinente de sorte qu'il convient de confirmer, par adoption de motifs, la légitimité du recours de l'Urssaf à la taxation forfaitaire.
Le calcul des cotisations dues est contesté par la société [4] qui procède à un nouveau calcul dans ses conclusions sans retenir le temps d'ouverture du commerce résultant des investigations précitées. Le calcul de la société se fonde sur un temps d'ouverture qui ne repose sur aucune preuve (en semaine 10h 18 h, le samedi 11h 19h, le dimanche 19h 21h) il est donc écarté par la cour.
L'Urssaf fonde son calcul sur les heures d'ouverture déclarées lors du contrôle, qui n'ont été démenties par aucun élément produit par la société [4]. Il a en outre été contrôlé par le tribunal par des motifs pertinents que la cour adopte.
Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point.
La société [4] conteste la perte du bénéfice des « réductions Fillon » et l'application de majorations.
L'Urssaf répond que dans une situation de travail dissimulé le cotisant perd le bénéfice des réductions et doit payer des majorations.
L'article L 133-4-2 du code de la sécurité sociale dispose (version applicable en 2015) :
Le bénéfice de toute mesure de réduction et d'exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale ou de contributions dues aux organismes de sécurité sociale, appliquée par un employeur ou un travailleur indépendant, est subordonné au respect par l'employeur ou le travailleur indépendant des dispositions des articles L. 8221-1 et L. 8221-2 du code du travail.
Lorsque l'infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du même code est constatée par procès-verbal dans les conditions déterminées aux articles L. 8271-7 à L. 8271-12 du même code, l'organisme de recouvrement procède, dans la limite de la prescription applicable en matière de travail dissimulé, à l'annulation des réductions ou exonérations des cotisations ou contributions mentionnées au premier alinéa du présent article et pratiquées au cours d'un mois civil, lorsque les rémunérations versées ou dues à un ou des salariés dissimulés au cours de ce mois sont au moins égales à la rémunération mensuelle minimale définie à l'article L. 3232-3 du même code. (')
En l'espèce, le travail dissimulé est établi de sorte qu'en application de ce texte la société [4] perd le bénéfice des réductions de cotisations.
Pour le même motif, elle doit payer des pénalités.
En conséquence, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les autres demandes
Le sens du présent arrêt justifie de rejeter les prétentions de la société [4]. Elle est condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par un arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
CONFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Nanterre le 4 décembre 2020,
Y ajoutant,
REJETTE les demandes de la société [4],
CONDAMNE la société [4] à payer à l'Urssaf [5] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société [4] à payer les dépens de l'instance.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Mélissa ESCARPIT, Greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère, faisant fonction de présidente,
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
Ch.protection sociale 4-7
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 SEPTEMBRE 2025
N° RG 24/02984 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WZ5J
AFFAIRE :
S.A.R.L. [4]
C/
[8]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Décembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de NANTERRE
N° RG : 16/01310
Copies exécutoires délivrées à :
Me Stéphanie ARENA
[8]
Copies certifiées conformes délivrées à :
S.A.R.L. [4]
[8]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE ONZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.R.L. [4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637
APPELANTE
****************
[8]
Département des contentieux amiables et judiciares
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par M. [Y] [C] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir général
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Julie MOUTY-TARDIEU, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère faisant fonction de présidente,
Madame Julie MOUTY-TARDIEU, Conseillère,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Mélissa ESCARPIT,
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite d'un contrôle réalisé le 13 avril 2015 par l'URSSAF dans les locaux de la société [4], qui exerce une activité de restauration rapide, il a été établi le 9 septembre 2015 un procès-verbal relevant du travail dissimulé.
Le même jour, l'URSSAF a adressé à la société une lettre d'observations aux termes de laquelle il était envisagé de procéder à un redressement pour travail dissimulé pour un montant total de 62 302 euros pour la période du 5 octobre 2012 au 31 décembre 2014.
La société [4] a saisi la commission de recours amiable puis le tribunal judiciaire de Nanterre qui, par un jugement du 4 décembre 2020 a :
Rejeté le recours de la société [4],
Condamné la société [4] à payer à l'URSSAF la somme de 83 489 euros pour la période du 5 octobre 2012 au 31 décembre 2014,
Condamné la société à payer les dépens de l'instance.
La société [4] a fait appel le 15 janvier 2021. Les parties ont été convoquées à l'audience du 16 mars 2022 lors de laquelle l'affaire a été radiée.
La société [4] a fait réinscrire l'affaire au rôle de la cour, les parties ont été convoquées à l'audience du 4 juin 2025.
Par des conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société [4] demande à la cour de :
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
In limine litis, déclarer la lettre de mise en demeure du 26 janvier 2016, et donc les chefs de redressement en résultant, nuls au motif d'une violation du principe du contradictoire,
Déclarer infondé le redressement opéré par l'Urssaf dans son ensemble,
Enjoindre à l'Urssaf de supprimer les cotisations et majorations,
Enjoindre à l'Urssaf de maintenir les réductions « Fillon » pour un montant de 11 004 euros (années 2012 à 2014),
Condamner l'Urssaf à rembourser à la société [4] la somme de 88 472,65 euros,
Condamner l'Urssaf à payer à la société [4] la somme de 6 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l'appel,
Condamner l'Urssaf à payer les dépens.
Par des conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, l'Urssaf demande à la cour de :
Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Rejeter les demandes de la société [4],
Condamner la société [4] à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'application du principe de la contradiction
Le tribunal a estimé que l'Urssaf avait suivi une procédure régulière en transmettant à la société [4] une lettre d'observations. Il a précisé que l'Urssaf n'était pas tenue de lui communiquer le procès-verbal de travail dissimulé. Il a ajouté que la société avait pu exprimer sa contestation de sorte que le principe du contradictoire avait été respecté.
En appel la société [4] reprend son argumentation relative à l'absence de communication par l'Urssaf du procès-verbal de travail dissimulé qui ne lui a été remis que cinq ans plus tard au cours de la procédure de première instance. La société estime qu'elle n'a pas pu se défendre de façon pertinente, que l'Urssaf a méconnu le principe de la contradiction (article 15 du code de procédure civile) et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. La société en déduit que la procédure est nulle.
L'Urssaf répond que le procès-verbal de travail dissimulé est une pièce de la procédure pénale couverte par le secret de l'enquête qui ne doit pas être remis à la personne concernée (articles 11 et 115 du code de procédure pénale) de sorte que la société [4] ne pouvait pas en avoir communication au moment de l'enquête. L'Urssaf ajoute qu'elle a bien respecté le principe de la contradiction en remettant ce procès-verbal à la société [4] au cours de la procédure de première instance. Elle conclut à la régularité de la procédure.
La cour applique l'article 11 du code de procédure pénale (rédaction applicable en 2015) : Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.
Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. (')
Le procès-verbal de travail dissimulé est une pièce de la procédure pénale qui a été transmis au procureur de la République. En application du texte précité elle est couverte par le secret de l'enquête pénale et l'Urssaf ne pouvait pas la communiquer à la société [4] sans commettre une infraction pénale.
Le 23 novembre 2015 l'avocat de la société [4] a demandé la communication de ce document au procureur de la République de [Localité 6] qui a rejeté cette demande le même jour au motif que le dossier était en enquête.
La jurisprudence constante de la cour de cassation est en ce sens (Crim., 12 janvier 2021, pourvoi n° 20-80.647, publié ; Cass. 2e civ., 5 sept. 2024, n° 22-18.226, publié).
Cette protection du secret de l'enquête poursuit un but légitime, protégé par la loi. Il est en outre proportionné dès lors que la société [4] a obtenu la communication de ce document au cours de la procédure de première instance comme elle le reconnait dans ses conclusions. Il n'y a donc pas d'atteinte à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ni au principe de la contradiction.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de la procédure soulevée par la société [4].
Sur le recours à la taxation forfaitaire et le nombre d'heure de travail des salariés
Le tribunal a relevé que, lors du contrôle, les inspecteurs de l'Urssaf ont comparé les heures d'ouverture du commerce de restauration rapide avec l'effectif des salariés. Ils ont interrogé le personnel présent qui a déclaré venir en cas de besoin et recevoir des paiements en espèces en plus du chèque de salaire. Après avoir comparé les heures d'ouverture du commerce, les déclarations des salariés, leur nombre d'heures de travail et les déclarations sociales de la société, le tribunal a souligné que les inspecteurs de l'Urssaf avaient constaté des divergences révélant du travail dissimulé. Le tribunal a précisé que la comptabilité de la société ne permettait pas d'établir le montant exact des rémunérations. Le tribunal a souligné que les dénégations de la société n'étaient fondées sur aucune preuve et qu'elle tentait de remettre en cause les déclarations des salariés présents lors du contrôle, sans produire de preuve contraire. Le tribunal a donc retenu comme exact le recours à la taxation forfaitaire.
En appel la société [4] soutient que l'Urssaf ne pouvait avoir recours à la taxation forfaitaire qu'en cas de comptabilité inexacte ou incomplète et souligne que cette preuve incombe à l'Urssaf. Elle ajoute qu'aucune discordance n'a été constatée entre la comptabilité et les documents sociaux. La société [4] remet en cause les déclarations d'un salarié, M. [R], qui avait l'intention de lui nuire et qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire. La société conteste avoir versé un complément de rémunération en espèces et conteste les heures d'ouverture de commerce indiquées par les salariés interrogés lors du contrôle. Elle déclare employer essentiellement des salariés à temps partiel et souligne le choix du gérant de ne pas être rémunéré lors des premières années d'exercice. Elle indique produire le programme de travail des salariés et en déduit une concordance approximative entre les heures travaillées et les heures déclarées. Elle reconnait une différence portant sur la somme de 660 euros seulement.
L'Urssaf répond que les inspecteurs ont procédé à une taxation forfaitaire au regard de l'incapacité de la société [4] à justifier d'une comptabilité fiable, complète, de déclarations sociales en concordance avec les heures d'ouverture du commerce et le nombre de salariés occupés. L'Urssaf souligne que la charge de la preuve du recours erroné à la taxation forfaitaire incombe à la société [4] et que celle-ci ne produit aucun élément en ce sens. L'Urssaf ajoute qu'elle a évalué les heures de travail au regard des heures d'ouverture du commerce, du nombre de salariés employés selon les déclarations recueillies lors du contrôle ce qui conduit à retenir 790 heures de travail par mois. L'Urssaf souligne que l'investissement important déclaré par le gérant de la société n'est pas crédible dès lors qu'il était également employé à temps plein dans une autre société. Elle conclut à la confirmation du jugement.
La cour fait application des textes suivants :
Articles L 8221-1 du code du travail : Sont interdits :
1° Le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;
2° La publicité, par quelque moyen que ce soit, tendant à favoriser, en toute connaissance de cause, le travail dissimulé ;
3° Le fait de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, aux services de celui qui exerce un travail dissimulé.
Article L 8221-5 du code du travail : Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Article L 8221-2 du même code qui dispose : Sont exclus des interdictions prévues au présent chapitre, les travaux d'urgence dont l'exécution immédiate est nécessaire pour prévenir les accidents imminents ou organiser les mesures de sauvetage.
Article R 242-5 du code de la sécurité sociale (version applicable en 2015) : Lorsque la comptabilité d'un employeur ne permet pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l'organisme chargé du recouvrement. Ce forfait est établi compte tenu des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l'emploi est déterminée d'après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve. Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle engagé en application de l'article L. 243-7 ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l'organisme chargé du recouvrement, dans les conditions prévues au présent article.
En cas de carence de l'organisme créancier, le forfait est établi par le responsable du service mentionné à l'article R. 155-1.
Lorsque l'employeur n'a pas versé dans les délais prescrits par les articles R. 243-6, R. 243-7, R. 243-9 et R. 243-22, les cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, l'organisme créancier peut fixer, à titre provisionnel, le montant desdites cotisations en fonction des versements effectués au titre des mois ou trimestres antérieurs. Cette évaluation doit être notifiée à l'employeur par une mise en demeure adressée par lettre recommandée, avec accusé de réception dans les conditions de l'article L. 244-2.
En l'espèce, la société [4] conteste le recours à la taxation forfaitaire. Il lui appartient de produire les informations comptables démontrant qu'il existe une concordance entre les heures d'ouverture du commerce de restauration rapide, les heures travaillées et les déclarations sociales qu'elle a réalisées.
La cour relève toutefois que la société [4] se contente de produire ses déclarations fiscales au titre de l'impôt sur les sociétés, qui n'est pas un document comptable mais fiscal.
Elle produit les déclarations sociales des années 2012 à 2014 dont la sincérité ne peut pas être vérifiée au regard de l'absence de comptabilité et d'aucune justification relative aux heures d'ouverture du commerce de restauration rapide.
A ce titre, la société [4] conteste les déclarations des salariés lors du contrôle, qui ont indiqué que le commerce était ouvert tous les jours de 12h à 22h en semaine et jusqu'à minuit le samedi et le dimanche, sans toutefois produire la preuve contraire qui lui incombe.
La société [4] soutient qu'il n'y a pas lieu de retenir le témoignage de M. [R] avec lequel elle a eu un contentieux et qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire. Toutefois, cette défense est inopérante dès lors que la convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement est postérieure de plusieurs mois (février 2016) au contrôle réalisé par l'Urssaf. De plus, ces éléments ne remettent pas en cause l'exactitude des propos de M. [R] quant aux modalités de paiement de son salaire (chèque et espèces).
Ainsi, la critique de la société [4] n'est fondée sur aucune preuve pertinente de sorte qu'il convient de confirmer, par adoption de motifs, la légitimité du recours de l'Urssaf à la taxation forfaitaire.
Le calcul des cotisations dues est contesté par la société [4] qui procède à un nouveau calcul dans ses conclusions sans retenir le temps d'ouverture du commerce résultant des investigations précitées. Le calcul de la société se fonde sur un temps d'ouverture qui ne repose sur aucune preuve (en semaine 10h 18 h, le samedi 11h 19h, le dimanche 19h 21h) il est donc écarté par la cour.
L'Urssaf fonde son calcul sur les heures d'ouverture déclarées lors du contrôle, qui n'ont été démenties par aucun élément produit par la société [4]. Il a en outre été contrôlé par le tribunal par des motifs pertinents que la cour adopte.
Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point.
La société [4] conteste la perte du bénéfice des « réductions Fillon » et l'application de majorations.
L'Urssaf répond que dans une situation de travail dissimulé le cotisant perd le bénéfice des réductions et doit payer des majorations.
L'article L 133-4-2 du code de la sécurité sociale dispose (version applicable en 2015) :
Le bénéfice de toute mesure de réduction et d'exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale ou de contributions dues aux organismes de sécurité sociale, appliquée par un employeur ou un travailleur indépendant, est subordonné au respect par l'employeur ou le travailleur indépendant des dispositions des articles L. 8221-1 et L. 8221-2 du code du travail.
Lorsque l'infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du même code est constatée par procès-verbal dans les conditions déterminées aux articles L. 8271-7 à L. 8271-12 du même code, l'organisme de recouvrement procède, dans la limite de la prescription applicable en matière de travail dissimulé, à l'annulation des réductions ou exonérations des cotisations ou contributions mentionnées au premier alinéa du présent article et pratiquées au cours d'un mois civil, lorsque les rémunérations versées ou dues à un ou des salariés dissimulés au cours de ce mois sont au moins égales à la rémunération mensuelle minimale définie à l'article L. 3232-3 du même code. (')
En l'espèce, le travail dissimulé est établi de sorte qu'en application de ce texte la société [4] perd le bénéfice des réductions de cotisations.
Pour le même motif, elle doit payer des pénalités.
En conséquence, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les autres demandes
Le sens du présent arrêt justifie de rejeter les prétentions de la société [4]. Elle est condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par un arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
CONFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Nanterre le 4 décembre 2020,
Y ajoutant,
REJETTE les demandes de la société [4],
CONDAMNE la société [4] à payer à l'Urssaf [5] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société [4] à payer les dépens de l'instance.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Mélissa ESCARPIT, Greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère, faisant fonction de présidente,