CA Aix-en-Provence, ch. 1-7, 11 septembre 2025, n° 22/07040
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 11 SEPTEMBRE 2025
N° 2025/ 305
Rôle N° RG 22/07040 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJM3T
S.D.C. RESIDENCE [Localité 10]
C/
[B] [P]
[O] [P]
[D] [P]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuel VOISIN-MONCHO
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 7] en date du 14 Mars 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 19/03610.
APPELANTE
S.D.C. RESIDENCE [Localité 10] Le SDC RESIDENCE [Localité 10] est représenté par son Syndic en exercice, le Cabinet TRIO - [Adresse 3] à [Localité 1]., demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Marie-Cécile RAGON, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
INTIMES
Monsieur [B] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
né le 16 Août 1961 à [Localité 8], demeurant [Adresse 2]
Madame [O] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
née le 25 Juin 1960 à [Localité 8], demeurant [Adresse 5]
Madame [D] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
née le 23 Juillet 1969 à [Localité 8], demeurant [Adresse 11]
Tous représentés par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistés de Me Alain MORHANGE, avocat au barreau de METZ
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Mai 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Florence PERRAUT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2025,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par assemblée générale spéciale du 21 mai 2019 convoquée, à la demande de la SCI [Localité 10] LES JARDINS, indiquant être copropriétaire du lot n° 4, et de Mme [G] [P], les résolutions n° 5 (demande de démolition du mur d'entrée du lot n° 4), n° 6 (demande d'aménagement paysager avec apport de terre végétale, mise en place de nouvelles haies, création de murets pour retenir les terres, plantation d'arbustes et mise en place de dalles pour la création d'un cheminement) et n° 7 (création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking) ont été refusées.
Par acte d'huissier du 08 juillet 2019, Mme [P], indiquant venir aux droits de la SCI [Localité 10] LES JARDINS et être seule propriétaire du lot n°4, a fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins essentiellement de voir annuler les résolutions de cette assemblée générale refusant les travaux d'aménagement, d'être autorisée à effectuer ces travaux et d'obtenir des dommages et intérêts.
Mme [P] est décédée le 20 juillet 2020.
Par jugement contradictoire du 14 mars 2022, le tribunal judiciaire de Grasse a :
- révoqué l'ordonnance de clôture prononcée le 29 octobre 2021 à effet au 6 décembre 2021,
- prononcé la clôture au 7 janvier 2022,
- rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir opposée par le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à Mme [G] [P],
- rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir opposée par le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à Mme [O] [P], M.[B] [P] et Mme [D] [P],
- accueilli l'intervention volontaire de Mme [O] [P], M.[B] [P] et Mme [D] [P],
- autorisé Mme [O] [P], M. [B] [P] et Mme [D] [P], sur le lot 4 de la copropriété [Adresse 9] à [Localité 6] à :
* démolir partiellement le mur d'entrée pour passage des engins de chantier,
* apporter de la terre végétale pour mise en place de nouvelles haies et création de murets pour
retenir les terres, plantation d'arbustes, mise en place de dalles pour la création d'un cheminement,
* créer un terrain de pétanque, un appentis, et trois places de parking,
- jugé que ces travaux seront réalisés conformément au projet dessiné par architecte paysagiste en janvier 2019 tel que joint à la demande de convocation de l'assemblée générale des copropriétaires,
- jugé que la présente autorisation est accordée sous réserve de l'obtention préalable au démarrage des travaux, par Mme [O] [P], M. [B] [P] et Mme [D] [P], de toutes les autorisations administratives nécessaires, à charge pour eux d'en justifier auprès du syndic,
- jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayant-droits,
- rejeté les demandes d'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- débouté le syndicat des coproprtiétaires RESIDENCE SAINTJEAN de ses demandes,
- condamné le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à payer à Mme [O]
[P], M.[B] [P] et Mme [D] [P] la somme totale de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] aux dépens.
Le premier juge a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par le syndicat des copropriétaires en notant que Mme [G] [P] justifiait de sa qualité de propriétaire du lot 4 ; il a relevé que M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] démontraient venir aux droits de cette dernière.
Il a considéré que le propriétaire du lot 4 disposait du droit d'édifier des constructions sur la parcelle de terrain, à la lecture du cahier des charges et du règlement de copropriété. Il a indiqué que le projet relevait de la majorité de l'article 25 en l'absence de tout acte de disposition sur les parties communes et de toute violation du règlement de copropriété. Il a précisé que le mur, situé entre le lot n° 3 et le lot n° 4 avait été édifié par le premier propriétaire du lot n° 4 et que le syndicat des copropriétaires ne démontrait pas qu'il s'agirait d'une partie commune.
Il a autorisé les travaux projetés, les analysant en travaux d'amélioration, en indiquant :
- que le syndicat des copropriétaires n'établissait pas que le mur situé entre le lot 3 et le lot 4 serait une partie commune,
- que le syndicat des copropriétaires ne démontrait pas que le projet ne serait pas conforme à la destination de l'immeuble, que sa réalisation aurait été entreprise malgré le refus de l'assemblée et qu'il porterait atteinte aux droits des autres copropriétaires.
Il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par les consorts [P], l'estimant injustifiée.
Par déclaration du 13 mai 2022, le syndicat des copropriétaires a relevé appel du jugement déféré en ce qu'il a autorisé les consorts [P] à effectuer des travaux, débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayants-droits, débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes et condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens et à une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] ont constitué avocat.
M.[B] [P] est devenu seul propriétaire du lot n°4.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2025 auxquelles il convient de se référer, le syndicat des copropriétaires demande à la cour :
- de donner acte à Mmes [O] [P] et [D] [P] de ce qu'elles se désistent de leurs demandes,
- de déclarer recevable et bien fondé son appel,
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a autorisé les consorts [P] à effectuer des travaux, débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayants-droits, débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes et condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens et à une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
* statuant à nouveau,
Vu les articles 25, 26, 30 et 42 de la loi du 10 juillet 1965,
- de débouter M. [B] [P] de sa demande d'autorisation judiciaire à effectuer les travaux projetés, et, en tant que de besoin, d'annulation des résolutions 5, 6 et 7 de l'Assemblée Générale du 21 mai 2019,
En tout état de cause et à titre reconventionnel,
Vu l'article 1240 du Code civil,
- de débouter M. [B] [P] de l'intégralité de ses demandes,,
- de condamner M. [B] [P] à payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,
- de condamner M.[B] [P] à payer la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner M. [B] [P] aux entiers dépens.
Il soutient que Mme [G] [P] a commis une fraude en faisant croire que la SCI avec laquelle elle avait conjointement sollicité la convocation de l'assemblée générale du 21 mai 0219, était encore propriétaire du lot n°4. Il considère qu'en raison de cette fraude, l'autorisation judiciaire d'effectuer des travaux ne peut être donnée puisque l'assemblée générale n'a pu valablement se prononcer sur ceux-ci. Il relève n'avoir été avisé que tardivement de la qualité de Mme [G] [P] de seule propriétaire du lot 4, précisant d'ailleurs que le syndic n'a toujours pas été destinataire de l'avis de mutation visé à l'article 6 du décret du 17 mars 1967.
Il s'oppose aux travaux sollicités en notant que l'autorisation judiciaire de travaux ne peut porter que sur des travaux visés à l'article 25b de la loi du 10 juillet 1965 ; il considère que les travaux projetés ne sont pas des travaux d'amélioration, s'agissant de la démolition d'un mur relevant des parties communes et de modifications majeures sur la jouissance, l'usage, l'administration des parties communes et les modalités d'accès à la copropriété ; il évoque une aliénation de partie commune pour l'entrée des véhicules sur les places de parking ; il soutient que le mur litigieux a été construit par la SCI RESIDENCE [Localité 10] ( et non la SCI [Localité 10]), aux droits de laquelle vient le syndicat des copropriétaires ; il relève que le lot 4 est un jardin décoratif, en très bon état, avec une haie de bambous et de lilas qui serait détruite pour créer un accès à de nouvelles places de stationnement, ce qui ne constitue pas des travaux d'amélioration ; il ajoute que l'appentis projeté comporte une cuisine et des sanitaires, alors que rien n'est prévu pour le raccordement au réseau électrique et aux eaux usées. Il relève que les résolutions 5 et 7 relevaient de la majorité de l'article 26, ce que n'avait pas contesté Mme [P].
Il s'oppose également à ces travaux en notant qu'ils violent la destination de l'immeuble et portent atteinte aux droits des autres copropriétaires. Il en veut pour preuve les problèmes d'accès et d'utilisation des parties communes qui seront la conséquence de la création de places de parking. Il évoque des risques de nuisances sonores liées au terrain de pétanque projeté. Il soulève le goudronnage d'un sol naturel.
Il ajoute que le règlement de copropriété, qui prévoit la construction d'un bâtiment sur le lot 4, a strictement délimité son emplacement ; il précise que les travaux projetés ne concernent pas l'édification d'un bâtiment.
Il indique enfin que l'autorisation judiciaire ne peut intervenir qu'en cas de refus définitif des travaux projetés, ce qui n'est pas le cas puisque Mme [P] avait attaqué l'assemblée générale.
Il s'oppose à l'annulation des résolutions 5, 6, 7 relatives aux travaux, contestant tout abus de majorité.
Il conteste tout préjudice aux consorts [P].
Il sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 avril 2024 auxquelles il convient de se référer, M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] demandent à la cour :
- de donner acte à Mmes [O] et [D] [P] et [D] [P] de ce qu'elles se désistent de leurs demandes, M.[B] [P] étant devenu seul propriétaire et venant aux droits de l'indivision.
- de débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes,
- de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté leurs demandes de dommages et intérêts,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] à verser à M. [B] [P] une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts par an à compter du premier janvier 2020, soit pour les années 2020, 2021, 2022 et 2023 la somme de 20.000 euros,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] à payer à M.[B] [P] une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] aux entiers dépens de la procédure d'appel.
M.[P] indique être le seul propriétaire du lot 4.
Il estime recevable sa demande d'autorisation judiciaire pour effectuer les travaux projetés puisqu'il y a eu un refus préalable, définitif et valide de l'assemblée générale.
Il soutient que le mur dont la destruction partielle est envisagée est une partie privative. Il note que les travaux relèvent de l'article 25b car ils affectent l'aspect extérieur de l'immeuble.
Il ajoute que les travaux, qui améliorent la situation actuelle du lot, respectent la destination de l'immeuble et ne portent pas atteinte aux droits des autres propriétaires. Il considère que les préjudices évoqués sont hypothétiques.
Il conteste toute fraude et relève que l'assemblée générale, qui n'a pas été annulée, est définitive.
A titre subsidiaire, il sollicite l'annulation des résolutions 5, 6 et 7 pour abus de majorité. Il considère que les travaux projetés permettent d'éviter la construction d'un bâtiment en vis-à-vis de la copropriété actuelle, ce qui est donc une amélioration faite dans l'intérêt collectif.
Il sollicite une indemnisation, estimant avoir été privé de la jouissance d'un jardin d'agrément qui était projeté alors que sa famille dispose d'appartements à [Localité 6] qui sont des résidences secondaires.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 mai 2025.
MOTIVATION
L'appelant ne discute pas le chef du jugement déféré qui s'est prononcé sur les fins de non-recevoir.
Le syndicat des copropriétaires estime que c'est par fraude que Mme [P] a pu obtenir une convocation à l'assemblée générale qui a rejeté les travaux sollicités.
Mme [P] était copropriétaire des lots 32 et 33.
La SCI [Localité 10] Les Jardins (pièce 22 des intimés) a acquis le lot n° 4 appartenant à la SARL Société Générale du Bâtiment sur adjudication du 16 décembre 1976. Le fait que cette société n'ait jamais été immatriculée au registre du commerce et que les associés, par le biais de cessions s'échelonnant entre le 03 novembre 2012 et le 28 avril 2017, aient cédé leurs parts à Mme [P] ne démontre pas que cette dernière aurait commis une fraude pour obtenir la convocation de l'assemblée générale du 21 mai 2019. Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires ne tire pas les conséquences juridiques de cette affirmation puisqu'il ne sollicite pas la nullité de cette assemblée générale. Enfin, le sens du vote (rejet de la demande des travaux) n'est pas affecté par la fraude alléguée qu'il ne démontre pas.
Sur l'autorisation judiciaire sollicitée par M. [P] pour effectuer des travaux
L'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable, énonce que l'assemblée générale des copropriétaires, statuant à la majorité prévue à l'article 25, peut, à condition qu'elle soit conforme à la destination de l'immeuble, décider toute amélioration, telle que la transformation d'un ou de plusieurs éléments d'équipement existants, l'adjonction d'éléments nouveaux, l'aménagement de locaux affectés à l'usage commun ou la création de tels locaux.
Elle fixe alors, à la même majorité, la répartition du coût des travaux et de la charge des indemnités prévues à l'article 36 ci-après, en proportion des avantages qui résulteront des travaux envisagés pour chacun des copropriétaires, sauf à tenir compte de l'accord de certains d'entre eux pour supporter une part de dépenses plus élevée.
Elle fixe, à la même majorité, la répartition des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés.
Lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu'il est possible d'en réserver l'usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu'en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée.
Selon l'article 25 b de la loi précitée, dans sa version applicable, ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant :(...)
b) L'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ;
Les travaux pouvant faire l'objet d'une autorisation judiciaire englobent tout aussi bien les travaux d'intérêt particulier qui affectent les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, dès l'instant qu'ils apportent une amélioration au regard soit de l'immeuble, soit des parties privatives du demandeur. Dès lors, des travaux peuvent être considérés comme des travaux d'amélioration même s'ils ne présentent aucun intérêt pour la collectivité ou les parties communes et ne concernent que l'amélioration des parties privatives du copropriétaire concerné.
Les travaux envisagés affectent les parties communes. En effet, ils supposent la destruction partielle du mur de soutènement à la limite des lots 3 et 4, établi aux frais exclusifs de la SCI RESIDENCE [Localité 10], SCI qui était propriétaire des lots 1 et 3, constituant le terrain sur lequel allait être édifié un immeuble à usage d'habitation, un parking et un jardin, divisés ensuite en plusieurs lots ; le lot 4, constitué d'une parcelle de terrain, appartenant à la SARL Société du Bâtiment, a ultérieurement vendu à la SCI [Localité 10] LES JARDINS ; Ce n'est pas la SCI [Localité 10] LES JARDINS qui a édifié le mur de soutènement mais la SCI RESIDENCE [Localité 10]. Ce mur, comme l'indique le cahier des charges, est à la limite des lots n° 3 et 4 et ne se trouve donc pas dans le lot n°4. Le cahier des charges, auquel renvoie le règlement de copropriété, mentionne que sont communs les murs de clôture ou leur mitoyenneté. Ainsi, le mur de soutènement est une partie commune. Cette destruction partielle a pour objet de laisser passer les engins de chantier. Le travaux envisagés affectent également l'aspect extérieur de l'immeuble. Ils ont pour objet un aménagement paysager et la création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking. Ces travaux constituent une amélioration du lot de M.[P], qui est un simple terrain aménagé en partie en jardin.
Ces travaux sont conformes à la destination de l'immeuble et à celle du lot de M.[P] et ne portent pas emprise sur les parties communes. La destruction partielle du mur de soutènement, partie commune, ne retire pas à cette partie commune, qui jouxte le chemin vers l'entrée de la résidence, sa destination initiale et n'entrave pas le droit des autres copropriétaires ; Les autres copropriétaires ne sont pas privés de l'usage de la partie commune dont la destination essentielle subsiste.
Ces travaux relèvent en conséquence de l'article 25 b.
La demande de travaux, faite antérieurement à leur réalisation, a été refusée par l'assemblée générale du 21 mai 2019. La demande de M.[P] consiste, à titre principal, à solliciter l'autorisation de ces travaux et non, de façon concomitante, à demander l'annulation des résolutions rejetant les travaux et l'autorisation d'y procéder.
Les travaux envisagés sont toutefois pour partie imprécis ; en effet, il est évoqué une destruction partielle du mur, partie commune, pour laisser passer les engins de chantier, sans indiquer l'étendue de la destruction partielle du mur ni si celui-ci sera reconstruit ; il est évoqué la création de trois places de parking et d'un appentis mais lors des débats à l'assemblée générale, était évoquée la présence d'une kitchenette, sans que le plan ne permette de savoir où cette dernière serait installée et ni comment s'exécuteront les raccordements, ni sur quoi repose l'appentis ni quel serait sa fonction puisqu'étaient évoqués un raccord de l'appentis au réseau, alors qu'un appentis n'est pas censé être un bâtiment pour lequel des raccordements seraient nécessaires.
Dès lors, face à ces imprécisions, il convient de rejeter la demande d'autorisation judiciaire de travaux sollicitée par M.[P]. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Sur la demande subsidiaire en annulation de résolutions
Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Aucune demande d'annulation de résolutions de l'assemblée générale du 21 mai 2019 n'est évoquée dans le dispositif des conclusions des intimés. En conséquence, la cour n'a pas à statuer sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par M.[P]
M.[P] a été débouté de sa demande d'autorisation de travaux. Il ne justifie pas d'un comportement fautif du syndicat des copropriétaires à son encontre et sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts lié à un trouble de jouissance. Le jugement déféré qui avait rejeté la demande de dommages et intérêts sera confirmé.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires pour procédure abusive
La procédure intentée par les consorts [P], même si elle n'a pas abouti, n'a pas dégénéré en abus de droit. En conséquence, le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur les dépens et sur les frais irrépétibles
Les consorts [P] sont essentiellement succombants. Ils seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel et seront déboutés de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'est pas équitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires les frais irrépétibles qu'il a exposés en première instance et en appel. M.[P] sera condamné à lui verser la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par les parties ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT ;
REJETTE la demande d'autorisation judiciaire tendant à la réalisation des travaux suivants (démolition partiellement d'un mur d'entrée; aménagement paysager avec un apport de terre végétale pour la mise en place de nouvelles haies et la création de murets pour retenir les terres, avec la plantation d'arbustes et la mise en place de dalles pour la création d'un cheminement; création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking) formée par M. [B] [P] ;
CONDAMNE M.[B] [P] à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Résidence [Localité 10] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
CONDAMNE M.[B] [P] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 11 SEPTEMBRE 2025
N° 2025/ 305
Rôle N° RG 22/07040 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJM3T
S.D.C. RESIDENCE [Localité 10]
C/
[B] [P]
[O] [P]
[D] [P]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuel VOISIN-MONCHO
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 7] en date du 14 Mars 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 19/03610.
APPELANTE
S.D.C. RESIDENCE [Localité 10] Le SDC RESIDENCE [Localité 10] est représenté par son Syndic en exercice, le Cabinet TRIO - [Adresse 3] à [Localité 1]., demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Marie-Cécile RAGON, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
INTIMES
Monsieur [B] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
né le 16 Août 1961 à [Localité 8], demeurant [Adresse 2]
Madame [O] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
née le 25 Juin 1960 à [Localité 8], demeurant [Adresse 5]
Madame [D] [P] Ayant droit de Mme [G] [P], décédée le 20 Juillet 2020
née le 23 Juillet 1969 à [Localité 8], demeurant [Adresse 11]
Tous représentés par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistés de Me Alain MORHANGE, avocat au barreau de METZ
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Mai 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Florence PERRAUT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2025,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par assemblée générale spéciale du 21 mai 2019 convoquée, à la demande de la SCI [Localité 10] LES JARDINS, indiquant être copropriétaire du lot n° 4, et de Mme [G] [P], les résolutions n° 5 (demande de démolition du mur d'entrée du lot n° 4), n° 6 (demande d'aménagement paysager avec apport de terre végétale, mise en place de nouvelles haies, création de murets pour retenir les terres, plantation d'arbustes et mise en place de dalles pour la création d'un cheminement) et n° 7 (création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking) ont été refusées.
Par acte d'huissier du 08 juillet 2019, Mme [P], indiquant venir aux droits de la SCI [Localité 10] LES JARDINS et être seule propriétaire du lot n°4, a fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins essentiellement de voir annuler les résolutions de cette assemblée générale refusant les travaux d'aménagement, d'être autorisée à effectuer ces travaux et d'obtenir des dommages et intérêts.
Mme [P] est décédée le 20 juillet 2020.
Par jugement contradictoire du 14 mars 2022, le tribunal judiciaire de Grasse a :
- révoqué l'ordonnance de clôture prononcée le 29 octobre 2021 à effet au 6 décembre 2021,
- prononcé la clôture au 7 janvier 2022,
- rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir opposée par le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à Mme [G] [P],
- rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir opposée par le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à Mme [O] [P], M.[B] [P] et Mme [D] [P],
- accueilli l'intervention volontaire de Mme [O] [P], M.[B] [P] et Mme [D] [P],
- autorisé Mme [O] [P], M. [B] [P] et Mme [D] [P], sur le lot 4 de la copropriété [Adresse 9] à [Localité 6] à :
* démolir partiellement le mur d'entrée pour passage des engins de chantier,
* apporter de la terre végétale pour mise en place de nouvelles haies et création de murets pour
retenir les terres, plantation d'arbustes, mise en place de dalles pour la création d'un cheminement,
* créer un terrain de pétanque, un appentis, et trois places de parking,
- jugé que ces travaux seront réalisés conformément au projet dessiné par architecte paysagiste en janvier 2019 tel que joint à la demande de convocation de l'assemblée générale des copropriétaires,
- jugé que la présente autorisation est accordée sous réserve de l'obtention préalable au démarrage des travaux, par Mme [O] [P], M. [B] [P] et Mme [D] [P], de toutes les autorisations administratives nécessaires, à charge pour eux d'en justifier auprès du syndic,
- jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayant-droits,
- rejeté les demandes d'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- débouté le syndicat des coproprtiétaires RESIDENCE SAINTJEAN de ses demandes,
- condamné le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] à payer à Mme [O]
[P], M.[B] [P] et Mme [D] [P] la somme totale de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Localité 10] aux dépens.
Le premier juge a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par le syndicat des copropriétaires en notant que Mme [G] [P] justifiait de sa qualité de propriétaire du lot 4 ; il a relevé que M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] démontraient venir aux droits de cette dernière.
Il a considéré que le propriétaire du lot 4 disposait du droit d'édifier des constructions sur la parcelle de terrain, à la lecture du cahier des charges et du règlement de copropriété. Il a indiqué que le projet relevait de la majorité de l'article 25 en l'absence de tout acte de disposition sur les parties communes et de toute violation du règlement de copropriété. Il a précisé que le mur, situé entre le lot n° 3 et le lot n° 4 avait été édifié par le premier propriétaire du lot n° 4 et que le syndicat des copropriétaires ne démontrait pas qu'il s'agirait d'une partie commune.
Il a autorisé les travaux projetés, les analysant en travaux d'amélioration, en indiquant :
- que le syndicat des copropriétaires n'établissait pas que le mur situé entre le lot 3 et le lot 4 serait une partie commune,
- que le syndicat des copropriétaires ne démontrait pas que le projet ne serait pas conforme à la destination de l'immeuble, que sa réalisation aurait été entreprise malgré le refus de l'assemblée et qu'il porterait atteinte aux droits des autres copropriétaires.
Il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par les consorts [P], l'estimant injustifiée.
Par déclaration du 13 mai 2022, le syndicat des copropriétaires a relevé appel du jugement déféré en ce qu'il a autorisé les consorts [P] à effectuer des travaux, débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayants-droits, débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes et condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens et à une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] ont constitué avocat.
M.[B] [P] est devenu seul propriétaire du lot n°4.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2025 auxquelles il convient de se référer, le syndicat des copropriétaires demande à la cour :
- de donner acte à Mmes [O] [P] et [D] [P] de ce qu'elles se désistent de leurs demandes,
- de déclarer recevable et bien fondé son appel,
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a autorisé les consorts [P] à effectuer des travaux, débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, jugé que l'usage du lot 4 de la copropriété sera réservé à ses propriétaires et à leurs ayants-droits, débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes et condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens et à une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
* statuant à nouveau,
Vu les articles 25, 26, 30 et 42 de la loi du 10 juillet 1965,
- de débouter M. [B] [P] de sa demande d'autorisation judiciaire à effectuer les travaux projetés, et, en tant que de besoin, d'annulation des résolutions 5, 6 et 7 de l'Assemblée Générale du 21 mai 2019,
En tout état de cause et à titre reconventionnel,
Vu l'article 1240 du Code civil,
- de débouter M. [B] [P] de l'intégralité de ses demandes,,
- de condamner M. [B] [P] à payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,
- de condamner M.[B] [P] à payer la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner M. [B] [P] aux entiers dépens.
Il soutient que Mme [G] [P] a commis une fraude en faisant croire que la SCI avec laquelle elle avait conjointement sollicité la convocation de l'assemblée générale du 21 mai 0219, était encore propriétaire du lot n°4. Il considère qu'en raison de cette fraude, l'autorisation judiciaire d'effectuer des travaux ne peut être donnée puisque l'assemblée générale n'a pu valablement se prononcer sur ceux-ci. Il relève n'avoir été avisé que tardivement de la qualité de Mme [G] [P] de seule propriétaire du lot 4, précisant d'ailleurs que le syndic n'a toujours pas été destinataire de l'avis de mutation visé à l'article 6 du décret du 17 mars 1967.
Il s'oppose aux travaux sollicités en notant que l'autorisation judiciaire de travaux ne peut porter que sur des travaux visés à l'article 25b de la loi du 10 juillet 1965 ; il considère que les travaux projetés ne sont pas des travaux d'amélioration, s'agissant de la démolition d'un mur relevant des parties communes et de modifications majeures sur la jouissance, l'usage, l'administration des parties communes et les modalités d'accès à la copropriété ; il évoque une aliénation de partie commune pour l'entrée des véhicules sur les places de parking ; il soutient que le mur litigieux a été construit par la SCI RESIDENCE [Localité 10] ( et non la SCI [Localité 10]), aux droits de laquelle vient le syndicat des copropriétaires ; il relève que le lot 4 est un jardin décoratif, en très bon état, avec une haie de bambous et de lilas qui serait détruite pour créer un accès à de nouvelles places de stationnement, ce qui ne constitue pas des travaux d'amélioration ; il ajoute que l'appentis projeté comporte une cuisine et des sanitaires, alors que rien n'est prévu pour le raccordement au réseau électrique et aux eaux usées. Il relève que les résolutions 5 et 7 relevaient de la majorité de l'article 26, ce que n'avait pas contesté Mme [P].
Il s'oppose également à ces travaux en notant qu'ils violent la destination de l'immeuble et portent atteinte aux droits des autres copropriétaires. Il en veut pour preuve les problèmes d'accès et d'utilisation des parties communes qui seront la conséquence de la création de places de parking. Il évoque des risques de nuisances sonores liées au terrain de pétanque projeté. Il soulève le goudronnage d'un sol naturel.
Il ajoute que le règlement de copropriété, qui prévoit la construction d'un bâtiment sur le lot 4, a strictement délimité son emplacement ; il précise que les travaux projetés ne concernent pas l'édification d'un bâtiment.
Il indique enfin que l'autorisation judiciaire ne peut intervenir qu'en cas de refus définitif des travaux projetés, ce qui n'est pas le cas puisque Mme [P] avait attaqué l'assemblée générale.
Il s'oppose à l'annulation des résolutions 5, 6, 7 relatives aux travaux, contestant tout abus de majorité.
Il conteste tout préjudice aux consorts [P].
Il sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 avril 2024 auxquelles il convient de se référer, M.[B] [P] et Mmes [O] et [D] [P] demandent à la cour :
- de donner acte à Mmes [O] et [D] [P] et [D] [P] de ce qu'elles se désistent de leurs demandes, M.[B] [P] étant devenu seul propriétaire et venant aux droits de l'indivision.
- de débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes,
- de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté leurs demandes de dommages et intérêts,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] à verser à M. [B] [P] une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts par an à compter du premier janvier 2020, soit pour les années 2020, 2021, 2022 et 2023 la somme de 20.000 euros,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] à payer à M.[B] [P] une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble RESIDENCE [Localité 10] aux entiers dépens de la procédure d'appel.
M.[P] indique être le seul propriétaire du lot 4.
Il estime recevable sa demande d'autorisation judiciaire pour effectuer les travaux projetés puisqu'il y a eu un refus préalable, définitif et valide de l'assemblée générale.
Il soutient que le mur dont la destruction partielle est envisagée est une partie privative. Il note que les travaux relèvent de l'article 25b car ils affectent l'aspect extérieur de l'immeuble.
Il ajoute que les travaux, qui améliorent la situation actuelle du lot, respectent la destination de l'immeuble et ne portent pas atteinte aux droits des autres propriétaires. Il considère que les préjudices évoqués sont hypothétiques.
Il conteste toute fraude et relève que l'assemblée générale, qui n'a pas été annulée, est définitive.
A titre subsidiaire, il sollicite l'annulation des résolutions 5, 6 et 7 pour abus de majorité. Il considère que les travaux projetés permettent d'éviter la construction d'un bâtiment en vis-à-vis de la copropriété actuelle, ce qui est donc une amélioration faite dans l'intérêt collectif.
Il sollicite une indemnisation, estimant avoir été privé de la jouissance d'un jardin d'agrément qui était projeté alors que sa famille dispose d'appartements à [Localité 6] qui sont des résidences secondaires.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 mai 2025.
MOTIVATION
L'appelant ne discute pas le chef du jugement déféré qui s'est prononcé sur les fins de non-recevoir.
Le syndicat des copropriétaires estime que c'est par fraude que Mme [P] a pu obtenir une convocation à l'assemblée générale qui a rejeté les travaux sollicités.
Mme [P] était copropriétaire des lots 32 et 33.
La SCI [Localité 10] Les Jardins (pièce 22 des intimés) a acquis le lot n° 4 appartenant à la SARL Société Générale du Bâtiment sur adjudication du 16 décembre 1976. Le fait que cette société n'ait jamais été immatriculée au registre du commerce et que les associés, par le biais de cessions s'échelonnant entre le 03 novembre 2012 et le 28 avril 2017, aient cédé leurs parts à Mme [P] ne démontre pas que cette dernière aurait commis une fraude pour obtenir la convocation de l'assemblée générale du 21 mai 2019. Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires ne tire pas les conséquences juridiques de cette affirmation puisqu'il ne sollicite pas la nullité de cette assemblée générale. Enfin, le sens du vote (rejet de la demande des travaux) n'est pas affecté par la fraude alléguée qu'il ne démontre pas.
Sur l'autorisation judiciaire sollicitée par M. [P] pour effectuer des travaux
L'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable, énonce que l'assemblée générale des copropriétaires, statuant à la majorité prévue à l'article 25, peut, à condition qu'elle soit conforme à la destination de l'immeuble, décider toute amélioration, telle que la transformation d'un ou de plusieurs éléments d'équipement existants, l'adjonction d'éléments nouveaux, l'aménagement de locaux affectés à l'usage commun ou la création de tels locaux.
Elle fixe alors, à la même majorité, la répartition du coût des travaux et de la charge des indemnités prévues à l'article 36 ci-après, en proportion des avantages qui résulteront des travaux envisagés pour chacun des copropriétaires, sauf à tenir compte de l'accord de certains d'entre eux pour supporter une part de dépenses plus élevée.
Elle fixe, à la même majorité, la répartition des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés.
Lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu'il est possible d'en réserver l'usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu'en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée.
Selon l'article 25 b de la loi précitée, dans sa version applicable, ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant :(...)
b) L'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ;
Les travaux pouvant faire l'objet d'une autorisation judiciaire englobent tout aussi bien les travaux d'intérêt particulier qui affectent les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, dès l'instant qu'ils apportent une amélioration au regard soit de l'immeuble, soit des parties privatives du demandeur. Dès lors, des travaux peuvent être considérés comme des travaux d'amélioration même s'ils ne présentent aucun intérêt pour la collectivité ou les parties communes et ne concernent que l'amélioration des parties privatives du copropriétaire concerné.
Les travaux envisagés affectent les parties communes. En effet, ils supposent la destruction partielle du mur de soutènement à la limite des lots 3 et 4, établi aux frais exclusifs de la SCI RESIDENCE [Localité 10], SCI qui était propriétaire des lots 1 et 3, constituant le terrain sur lequel allait être édifié un immeuble à usage d'habitation, un parking et un jardin, divisés ensuite en plusieurs lots ; le lot 4, constitué d'une parcelle de terrain, appartenant à la SARL Société du Bâtiment, a ultérieurement vendu à la SCI [Localité 10] LES JARDINS ; Ce n'est pas la SCI [Localité 10] LES JARDINS qui a édifié le mur de soutènement mais la SCI RESIDENCE [Localité 10]. Ce mur, comme l'indique le cahier des charges, est à la limite des lots n° 3 et 4 et ne se trouve donc pas dans le lot n°4. Le cahier des charges, auquel renvoie le règlement de copropriété, mentionne que sont communs les murs de clôture ou leur mitoyenneté. Ainsi, le mur de soutènement est une partie commune. Cette destruction partielle a pour objet de laisser passer les engins de chantier. Le travaux envisagés affectent également l'aspect extérieur de l'immeuble. Ils ont pour objet un aménagement paysager et la création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking. Ces travaux constituent une amélioration du lot de M.[P], qui est un simple terrain aménagé en partie en jardin.
Ces travaux sont conformes à la destination de l'immeuble et à celle du lot de M.[P] et ne portent pas emprise sur les parties communes. La destruction partielle du mur de soutènement, partie commune, ne retire pas à cette partie commune, qui jouxte le chemin vers l'entrée de la résidence, sa destination initiale et n'entrave pas le droit des autres copropriétaires ; Les autres copropriétaires ne sont pas privés de l'usage de la partie commune dont la destination essentielle subsiste.
Ces travaux relèvent en conséquence de l'article 25 b.
La demande de travaux, faite antérieurement à leur réalisation, a été refusée par l'assemblée générale du 21 mai 2019. La demande de M.[P] consiste, à titre principal, à solliciter l'autorisation de ces travaux et non, de façon concomitante, à demander l'annulation des résolutions rejetant les travaux et l'autorisation d'y procéder.
Les travaux envisagés sont toutefois pour partie imprécis ; en effet, il est évoqué une destruction partielle du mur, partie commune, pour laisser passer les engins de chantier, sans indiquer l'étendue de la destruction partielle du mur ni si celui-ci sera reconstruit ; il est évoqué la création de trois places de parking et d'un appentis mais lors des débats à l'assemblée générale, était évoquée la présence d'une kitchenette, sans que le plan ne permette de savoir où cette dernière serait installée et ni comment s'exécuteront les raccordements, ni sur quoi repose l'appentis ni quel serait sa fonction puisqu'étaient évoqués un raccord de l'appentis au réseau, alors qu'un appentis n'est pas censé être un bâtiment pour lequel des raccordements seraient nécessaires.
Dès lors, face à ces imprécisions, il convient de rejeter la demande d'autorisation judiciaire de travaux sollicitée par M.[P]. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Sur la demande subsidiaire en annulation de résolutions
Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Aucune demande d'annulation de résolutions de l'assemblée générale du 21 mai 2019 n'est évoquée dans le dispositif des conclusions des intimés. En conséquence, la cour n'a pas à statuer sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par M.[P]
M.[P] a été débouté de sa demande d'autorisation de travaux. Il ne justifie pas d'un comportement fautif du syndicat des copropriétaires à son encontre et sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts lié à un trouble de jouissance. Le jugement déféré qui avait rejeté la demande de dommages et intérêts sera confirmé.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires pour procédure abusive
La procédure intentée par les consorts [P], même si elle n'a pas abouti, n'a pas dégénéré en abus de droit. En conséquence, le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur les dépens et sur les frais irrépétibles
Les consorts [P] sont essentiellement succombants. Ils seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel et seront déboutés de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'est pas équitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires les frais irrépétibles qu'il a exposés en première instance et en appel. M.[P] sera condamné à lui verser la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par les parties ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT ;
REJETTE la demande d'autorisation judiciaire tendant à la réalisation des travaux suivants (démolition partiellement d'un mur d'entrée; aménagement paysager avec un apport de terre végétale pour la mise en place de nouvelles haies et la création de murets pour retenir les terres, avec la plantation d'arbustes et la mise en place de dalles pour la création d'un cheminement; création d'un terrain de pétanque, d'un appentis et de trois places de parking) formée par M. [B] [P] ;
CONDAMNE M.[B] [P] à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Résidence [Localité 10] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
CONDAMNE M.[B] [P] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,