CA Rouen, ch. de la proximite, 11 septembre 2025, n° 24/03870
ROUEN
Arrêt
Autre
N° RG 24/03870 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JZXH
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 11 SEPTEMBRE 2025
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-22-1289
Jugement du Juge des contentieux de la protection de [Localité 11] du 14 novembre 2023
APPELANTE :
Madame [V] [S] veuve [G]
née le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée et assistée par Me Virginie CAREL, avocat au barreau de ROUEN postulante de Me Ornella SCOTTO di LIGUORI avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES :
Monsieur [J] [T] es qualité de Mandataire liquidateur de la «Société E.C.LOG, SASU immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le numéro 532 616 869
[Adresse 7]
[Localité 6]
n'ayant pas constitué avocat, bien qu'assigné par acte d'un commissaire de justice en date du 24/12/2024.
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE GNE CETELEM
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Pascale BADINA de la SELARL CABINET BADINA ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Quentin DELABRE, avocat au barreau de ROUEN, postulant de Me Arnaud DUBOIS de la SCP RAMAHANDRIARIVELO DUBOIS - RED, avocat au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame ALVARADE, Présidente
Monsieur TAMION, Président
Madame TILLIEZ, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame DUPONT, greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 23 juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 septembre 2025
En présence de Monsieur [O], auditeur de justice
ARRET :
Défaut
Prononcé publiquement le 11 Septembre 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Madame DUPONT, greffière présent à cette audience.
FAITS ET PROCEDURE
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, Mme [V] [G] a signé le 2 août 2017 avec l'entreprise E.C. Log., exerçant sous le nom commercial AIR Eco logis, un bon de commande d'installation d'une centrale solaire photovoltaïque, moyennant un prix total de 22.900 euros toutes taxes comprises.
Pour financer cette installation, Mme [G] a signé le même jour une offre de prêt de ce montant, remboursable en 120 mensualités, au taux effectif global de 4,80 %, consentie par la SA BNP Paribas personal Finance sous la dénomination commerciale Cetelem.
Les panneaux photovoltaïques ont été installés et les fonds débloqués entre les mains du vendeur le 14 septembre 2017 sur la base d'une attestation de fin de travaux signée par Mme [G] le 6 septembre 2017.
L'installation a été raccordée au réseau électrique et produit de l'énergie revendue à la société EDF.
Par jugement du 24 juin 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société E.C. Log et désigné Maître [T], en qualité de mandataire liquidateur.
Considérant que l'installation ne présentait pas la rentabilité attendue, par actes de commissaire de justice des 25 et 22 juillet 2022, Mme [G] a assigné la banque et la société E.C. Log représentée par son liquidateur, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rouen aux fins notamment d'annuler le contrat principal et le contrat de crédit accessoire, d'obtenir la privation de la banque de son droit à restitution du capital prêté outre l'indemnisation de ses préjudices.
Par jugement contradictoire du 14 novembre 2023, le tribunal a :
- prononcé l'annulation du contrat de vente conclu le 2 août 2017 entre Mme [V] [G] et la SAS E.C. Log;
- prononcé l'annulation du contrat de prêt affecté au paiement de la vente annulée conclu le 2 août 2017 entre Mme [V] [G] et la SA BNP Paribas personal finance;
- dit que Mme [V] [G] devra laisser l'installation à la disposition de la liquidation de la SAS E.C. Log pendant un délai de six mois suivant la signification du présent jugement afin qu'elle puisse procéder aux travaux de démontage et de remise en état ;
- dit qu'à défaut de reprise du matériel dans ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 3179,56 euros correspondant aux échéances du prêt déjà versées en remboursement du contrat de prêt dont il a été déduit le montant du capital emprunté ;
- débouté Mme [G] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise en garde ;
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de déchéance du droit aux intérêts ;
- débouté Mme [V] [G] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à payer à Mme [V] [G] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la SA BNP Paribas personal finance de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance aux dépens ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit."
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que les dispositions du code de la consommation n'ont pas été respectées, relevant diverses irrégularités affectant le bon de commande, de sorte que le contrat encourait l'annulation.
Il a par voie de conséquence constaté que la demande de nullité formulée sur le fondement de l'erreur quant à la rentabilité de l'opération était sans objet, observant à toutes fins qu'il n'était pas démontré que la rentabilité de l'opération était entrée dans le champ contractuel et a dit que la nullité du contrat de crédit affecté, accessoire à la vente, était également encourue en application de l'article L 312-55 du code de la consommation.
Il a estimé que Mme [G], consommatrice profane, ne pouvait connaître l'existence des vices en présence d'un contrat incomplet, comportant des informations erronées de nature à tromper l'acheteur sur la validité du bon de commande et que la nullité du contrat ne saurait être couverte par sa signature d'une attestation de livraison et d'une demande consécutive de financement auprès de la banque.
Le premier juge a par ailleurs estimé que le prêteur qui n'a pas procédé à la vérification de l'opération qu'elle finançait au regard des dispositions du code de la consommation et qui a délivré les fonds au vu de la seule attestation de fin de travaux, laquelle ne lui permettait pas de se convaincre de l'exécution du contrat principal, a commis une faute, mais il a retenu que l'emprunteuse demeurait tenue de restituer le capital, dès lors qu'elle ne démontrait pas avoir subi un préjudice du fait des manquements de la banque, alors qu'elle bénéficiait d'une installation fonctionnelle pouvant être génératrice de gains, de sorte que la banque ne devait restituer que les sommes correspondant aux frais et intérêts perçus et auxquels elle ne pouvait plus prétendre, le contrat de prêt n'étant censé n'avoir jamais été conclu.
Il a en outre rejeté la demande de dommages-intérêts pour violation du devoir de mise en garde, en l'absence de caractérisation d'un risque d'endettement excessif de l'emprunteuse au regard de ses revenus et de ses charges déclarés, au titre du préjudice moral, au motif qu'aucun lien avec la procédure n'était établi et indiqué n'y avoir lieu à statuer sur la demande au titre du manquement à l'obligation d'information et de conseil, dès lors que le défaut de respect de cette obligation est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts et que le contrat de prêt était d'ores et déjà annulé.
Suivant déclaration du 8 novembre 2024, Mme [G] a interjeté appel de cette décision dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2025 et l'affaire appelée à l'audience du 23 juin 2025 pour être mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 11 septembre 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 décembre 2024, Mme [G] demande à la cour de :
Au visa des articles L. 111-1, L. 111-2, R. 111-2, L. 221-5, L. 221-9, L. 242-1 du code des procédures civiles d'exécution, L 311-31, L. 312-55 et L. 314-26, L. 341-2 et L. 312-14 du code de la consommation, 1130 à 1132, 1178 et 1231-1 du code civil, 514, 514-1 et 700 du code de procédure civile, de la jurisprudence et des pièces,
voir infirmer, réformer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rouen le 14 novembre 2023 ce qu'il a :
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à lui restituer la somme de 3179,56 euros correspondant aux échéances déjà versées en remboursement du contrat de prêt dont il a été déduit le montant du capital emprunté ;
- rejeté sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise en garde ;
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de déchéance du droit aux intérêts ;
- rejeté sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
et statuant à nouveau :
- juger qu'elle est recevable et bien fondée en ses demandes,
A titre principal :
- juger que le bon de commande signé le 2 août 2017 ne satisfait pas les mentions obligatoires prévues en matière de démarchage à domicile,
- juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération,
En conséquence,
- prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 2 août 2017 avec la société E.C. Log.,
- juger qu'elle n'était pas informée des vices, et n'a jamais eu l'intention de les réparer ni eu la volonté de confirmer l'acte nul,
Et par conséquent juger que la nullité du bon de commande du 2 août 2017 n'a fait l'objet d'aucune confirmation,
- juger qu'elle tient le matériel à disposition de la société E.C. Log, représentée par son mandataire liquidateur, Maître [T] [J],
- juger qu'à défaut de reprise du matériel dans le délai de six mois à compter de la décision à intervenir, la société E.C. Log est réputée y avoir renoncé,
Et prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 2 août 2017 avec l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance a commis une faute lors du déblocage des fonds au bénéfice de la société E.C. Log,
- juger qu'elle justifie d'un préjudice en lien avec cette faute,
En conséquence,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance est privé de son droit à réclamer restitution du capital prêté,
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à restituer l'intégralité des sommes versées au titre du capital, intérêts et frais accessoires en vertu du contrat de crédit affecté du 2 août 2017, soit la somme de 26.079,56 euros,
A titre subsidiaire :
- juger que la SA BNP Paribas personal finance a manqué à son devoir de mise en garde et de prudence,
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire le prêt excessif,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance a manqué à son obligation d'information et de conseil,
- prononcer la déchéance de l'intégralité du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 2 août 2017 et condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui rembourser l'intégralité des intérêts, frais et accessoires déjà versés,
En tout état de cause :
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 5000 euros au titre de son préjudice moral, débouter l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance de l'intégralité de ses demandes,
- condamner la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens".
Mme [G] fait valoir que la nullité du contrat de vente est encourue pour méconnaissance des dispositions du code de la consommation, le bon de commande étant affecté de nombreux vices relativement aux mentions obligatoires devant y figurer en application des dispositions d'ordre public dudit code,
qu'ainsi, il n'est pas précisé la marque du kit photovoltaïque, le poids, la superficie, les indications techniques concernant la pose des modules, les caractéristiques des panneaux et le rendement,
qu'en ce qui concerne le délai et les modalités de livraison des biens, il ne répond pas aux exigences de l'article L 111-1 3° du code de la consommation, en ce qu'il ne renseigne pas suffisamment le consommateur sur le délai de livraison et d'exécution de travaux, alors que le vendeur prend en outre en charge les démarches administratives auprès d'ERDF et le raccordement au réseau électrique,
qu'il n'est pas non plus mentionné le prix de chaque élément ni celui de la pose du matériel,
que la mention de la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation et ses coordonnées n'y figurent pas, ni le numéro d'identification d'assujettissement à la TVA du vendeur,
que le bon de commande fait référence aux articles L 121 ' 17 et suivants du code de la consommation relatifs au droit de rétractation ainsi qu'aux mentions obligatoires dans le cadre des contrats conclus par démarchage, dispositions pourtant abrogées par l'ordonnance n° 2016 ' 301 du 14 mars 2016 et contient également une mention erronée quant au point de départ de la faculté de se rétracter, le bordereau de rétractation prévoyant que le délai de 14 jours court à compter de la commande au lieu de la réception des biens.
Elle indique que si la cour devait infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a prononcé la nullité du bon de commande en violation des dispositions du code de la consommation, il conviendra de retenir que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération.
Elle soutient que la rentabilité constitue un élément essentiel du contrat et déterminant de son consentement, la société venderesse ayant présenté l'opération comme autofinancée par le rendement du matériel livré, qu'elle n'aurait assurément pas acquis à un prix aussi élevé sans la promesse d'une rentabilité économique, laquelle n'a pas été tenue ainsi que cela résulte du rapport d'expertise sur investissement établi le 31 janvier 2022 par M. [W] [C], expert mathématique et financier.
Elle ajoute que n'ayant pas eu connaissance des vices affectant l'acte elle n'a pu avoir eu l'intention de les réparer, ni la volonté de confirmer l'acte,
que partant, l'absence d'exercice du droit de rétractation, la signature de l'attestation de livraison autorisant le déblocage des fonds ainsi que l'utilisation du matériel et le paiement du crédit ne sauraient valoir confirmation du bon de commande litigieux et couvrir la nullité de l'acte.
Elle fait valoir qu'en application des dispositions combinées des articles 1178, 1186 du code civil et L. 312-55 du code de la consommation, en conséquence de l'annulation du contrat de vente du 2 août 2017, le contrat de crédit affecté à cette vente devra être également annulé, qu'aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la banque doit être déchue de sa créance de restitution du capital emprunté, dès lors qu'elle a procédé au déblocage des fonds, sans s'assurer de la régularité formelle du bon de commande et de l'exécution du contrat, alors qu'elle a eu à déplorer une erreur dans le raccordement mis en place le 20 mars 2018, qu'elle n'a pas reçu l'attestation de fin de travaux et n'a donc pu conclure un contrat de rachat d'électricité avec EDF conformément au bon de commande qui prévoyait la revente du surplus d'électricité.
Elle fait grief au premier juge, tout en retenant l'existence d'une faute à l'endroit de la banque, d'avoir considéré qu'elle ne justifiait pas d'un préjudice en lien avec cette faute et d'avoir par conséquent estimé que la banque était fondée à solliciter la restitution du capital emprunté, et d'avoir ainsi limité les effets de l'annulation du contrat principal sur le contrat de crédit affecté aux seuls frais et intérêts perçus sur le capital emprunté.
Elle invoque une récente jurisprudence qui considère que le préjudice est caractérisé en cas de liquidation judiciaire du vendeur, dès lors que le consommateur ne peut se retourner contre ce dernier pour obtenir la restitution du prix de vente et cite un arrêt de la [9] de cassation rendu le 10 juillet 2024 (Cour de cassation, chambre civile 1, 10 juillet 2024, 23-16.303) qui a, dans cette hypothèse, décidé que le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifiait d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de services annulé en lien de causalité avec la faute de la banque.
Elle explique qu'en raison de l'annulation du contrat et de la liquidation judiciaire du vendeur, elle ne peut espérer une remise en état initial de son bien immobilier ni une restitution du prix, et est soumise au choix du liquidateur qui décidera ou non de la restitution du matériel,
que les fautes de la banque ont ainsi eu pour conséquence directe le financement d'un contrat qui sera annulé et d'un matériel qui ne pourra être utilisé, sans possibilité de restitution du prix de vente, ni de remise en état du bien,
que son préjudice est notamment caractérisé du fait des dysfonctionnements de l'installation, la prestation réalisée par le vendeur étant affectée de plusieurs malfaçons, alors qu'elle ne tire par ailleurs aucun bénéfice de la revente du surplus de production.
Elle s'estime fondée à solliciter le remboursement de la somme totale de 26.079,56 euros correspondant aux mensualités du prêt à hauteur de 5321,56 euros et au remboursement anticipé à hauteur de 20.758 euros.
À titre subsidiaire, elle fait valoir que la banque a manqué à son devoir de mise en garde et à son obligation d'information et de conseil envers un emprunteur non averti, que son manquement entraîne l'engagement de sa responsabilité contractuelle et la réparation de son préjudice correspondant à la perte de chance de ne pas souscrire un prêt excessif à hauteur de 20.000 euros, qu'elle ne justifie pas en outre avoir consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, de sorte que la déchéance du droit aux intérêts devra être prononcée et qu'en tout état de cause, elle subit un préjudice moral qu'elle évalue à la somme de 5000 euros, du fait du comportement particulièrement fautif de la banque, s'étant endettée sur dix années pour financer une installation qui s'est avérée peu rentable et qui présente de nombreux dysfonctionnements.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 mars 2025, la SA BNP Paribas personal finance demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
débouter Mme [V] [G] de l'intégralité de ses moyens et demandes,
- la condamner à lui payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
La banque conteste avoir commis une faute, faisant valoir que le prêteur n'a pas vocation à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal et qu'il n'est pas comptable de toutes les irrégularités affectant le bon de commande,
que s'agissant de la régularité formelle du bon de commande, en ce que les caractéristiques essentielles seraient imprécises pour ne comporter aucun prix, son exemplaire comporte bien le prix de l'installation,
que si la Cour de cassation estime désormais que figurent au rang des caractéristiques essentielles devant être indiquées de manière lisible et compréhensible, les informations relatives à la production d'électricité de l'installation et au résultat attendu de l'utilisation de l'équipement en terme de productivité ou de rendement (20/12/2023 - civ.1ere, 22-14.020, P+B), l'application de cette dernière jurisprudence à un contrat signé antérieurement devra être écartée au nom des principes de prévisibilité et de sécurité juridique,
que s'agissant des délais de livraison et d'exécution, le bon de commande comporte bien un délai de 120 jours, qui est complété par une stipulation des conditions générales de vente et l'analyse de son caractère suffisamment précis excède le cadre du devoir de contrôle formel du prêteur,
que de la même manière, l'appréciation du point de départ réel du délai de rétractation en fonction de la qualification du contrat, implique une analyse à laquelle le prêteur n'a pas à procéder,
que concernant l'indication du médiateur de la consommation, cette obligation résulte des dispositions des articles L. 616-1 alinéa 1 du code de la consommation selon lequel tout professionnel communique au consommateur, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève, qu'or, la société E.C. Log ne relève ou ne relevait à la date du contrat d'aucun médiateur,
que s'il s'agit bien d'une irrégularité, elle ne se situe pas dans le périmètre du devoir du contrôle formel du prêteur, qui n'a pas à rechercher de quel organisme relève le cas échéant le prestataire, ni à s'enquérir personnellement sur le point de savoir si cette information a été mise à disposition du consommateur,
que quand bien même, elle ne partage pas l'appréciation du premier juge qui a retenu qu'elle était fautive, elle sollicite néanmoins la confirmation du jugement en ce que le prêteur ne peut être débouté de sa demande de restitution du capital,
que s'agissant du contrôle de l'exécution avant déblocage des fonds, elle observe que la société E.C. Log a exécuté sa prestation, que l'installation ne présente techniquement aucun défaut ni dans sa consistance, ni dans ses qualités, alors que l'absence de rentabilité n'est pas opposable au prêteur, aucun engagement n'ayant en outre été souscrit par le prestataire en ce sens,
que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation et en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci,
qu'en l'espèce, les obligations de l'emprunteuse ont bien pris effet au plus tard à compter du 20 mars 2018, date de la mise en service, date à laquelle toutes les prestations financées par la banque étaient exécutées, de sorte que le déblocage des fonds ne présente aucun caractère fautif, pas même du fait d'un retard dans la mise en service entre septembre 2017, date de la fin des travaux et mars 2018, alors que le prêt comporte un décalage d'amortissement et que les échéances ne sont appelées qu'à compter de mars 2018,
que le préjudice allégué n'est donc ni qualifié, ni quantifié et apparaît encore une fois théorique alors que l'emprunteuse a procédé au remboursement anticipé total du crédit dès le 31 octobre 2019,
que Mme [G] ne peut justifier d'aucun défaut de fonctionnement de l'installation, les photographies versées aux débats pour justifier de fuites en toiture étant dépourvues de valeur probante, ni d'une augmentation de ses factures d'électricité, les habitudes de consommation du foyer n'étant pas connues, aucun élément n'étant en outre produit quant à la revente du surplus, le seul grief dont elle se peut se prévaloir tenant à l'absence de perception des aides étatiques qu'elle était toutefois dans l'impossibilité de déceler au vu des pièces qui lui ont été remises.
Sur les arrêts rendus par la Cour de cassation le 10 juillet 2024, elle observe que la question du lien causal entre la faute de la banque et le préjudice de l'emprunteur résultant de l'impossibilité d'exercer son recours contre le vendeur en liquidation judiciaire et l'obligation de restituer l'installation a été explicitement tranchée en faveur du principe de l'équivalence des conditions, la Cour en déduisant que le préjudice de l'emprunteur est équivalent au montant du crédit souscrit, que la motivation de la Cour de cassation induit une automaticité de la privation du droit à restitution du capital qu'elle admet, mais estime que ce principe ne saurait priver le juge du fond de son pouvoir souverain d'appréciation du quantum du préjudice réellement subi.
Elle indique s'agissant des manquements précontractuels du prêteur tenant à la mise en garde et à la vérification de la solvabilité de l'emprunteuse, que ce débat est sans apport comme souligné par le premier juge, la sanction encourue consistant en la déchéance du droit aux intérêts conventionnels qui ne peut être prononcée du fait de la nullité du contrat et que sur le terrain de la responsabilité, il appartient au demandeur qui invoque une faute du prêteur pour octroi inapproprié d'un financement de justifier qu'il se trouvait précisément dans une situation d'endettement excessif lors de la conclusion du contrat.
Elle fait valoir qu'en tout état de cause, elle justifie avoir recueilli des informations sur la situation professionnelle et financière de l'emprunteuse, qu'aucune faute ne peut lui être reprochée de ce chef, d'autant que le crédit a fait l'objet d'un remboursement anticipé total.
Quant au préjudice résultant de la perte de chance de ne pas souscrire le contrat de crédit, elle soutient qu'il appartient à la cour de déterminer dans quelle mesure, ou avec quelle certitude, l'emprunteuse ne se serait pas engagée si elle avait eu connaissance de ces éléments, que son argumentation repose cependant non pas sur les caractéristiques techniques des biens ou les délais d'exécution, mais sur l'insuffisance de production, qui ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation que dès lors que les parties l'ont fait entrer dans le champ contractuel selon l'état de la jurisprudence en vigueur à l'époque du contrat,
que l'emprunteur est également astreint à faire la démonstration d'un lien de causalité direct et certain entre le préjudice qu'il allègue et la faute qu'il impute au prêteur.
La déclaration d'appel et les conclusions d'appelante ont été signifiées à la société E.C. LOG représentée par Maître [T], ès qualités de mandataire liquidateur, intimée défaillante le 24 décembre 2024 et les dernières conclusions de la SA BNP Paribas personal finance, le 26 mars 2025 à SAS E.C. LOG mandataire liquidateur [T].
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il sera rappelé que le premier juge a prononcé la nullité du contrat de vente sur le fondement de la violation des dispositions du code de la consommation retenant principalement que les caractéristiques essentielles des biens ou services faisaient défaut et en particulier qu'il ne contenait qu'une indication d'un prix global, sans distinction du prix du matériel et de la main-d''uvre, seule la case financement étant renseignée pour le montant de 22 900 euros, qu'il ne portait pas la mention du délai de livraison, de l'identification du médiateur de la consommation, ni même la faculté d'y recourir, ou encore du numéro individuel d'identification d'assujettissement à la TVA du vendeur, que le bon de commande faisait par ailleurs référence à des dispositions abrogées relativement au droit de rétractation et que l'information donnée quant au délai de rétractation était erronée.
Mme [G] sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour, notamment, de "A titre principal :
juger que le bon de commande signé le 2 août 2017 ne satisfait pas les mentions obligatoires prévues en matière de démarchage à domicile,
juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération,
En conséquence,
prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 2 août 2017 avec la société E.C.LOG.,
juger qu'elle n'était pas informée des vices, et n'a jamais eu l'intention de les réparer ni eu la volonté de confirmer l'acte nul,
Et par conséquent juger que la nullité du bon de commande du 2 août 2017 n'a fait l'objet d'aucune confirmation,
(...)
prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 2 août 2017 avec l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance,
(...)".
Force est toutefois de constater que la banque sollicite la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions, de sorte qu'il n'y a pas lieu de revenir sur les dispositions du jugement relatives à la nullité du contrat de fourniture de biens et de prestation de services, ainsi que sur la nullité subséquente du contrat de crédit affecté résultant de l'application des dispositions de l'article L. 312-55 du code de la consommation, points non contestés à hauteur d'appel, le litige étant circonscrit aux seules conséquences des nullités encourues dans les relations entre les parties.
Le jugement sera confirmé en tant que de besoin en ce qu'il a dit sans objet la demande de nullité formulée sur le fondement de l'erreur quant à la rentabilité de l'opération et que les irrégularités du bon de commande constatées n'ont pu être couvertes, l'emprunteur n'ayant pu avoir connaissance des vices l'affectant.
1 - Sur les conséquences de la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté
L'article 1178 du code civil dispose qu'un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord.
Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent ainsi lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
L'annulation d'un contrat entraîne normalement la remise des parties en l'état antérieur à sa conclusion.
Le premier juge, appliquant les règles ci-avant exposées, a pu justement décider que la liquidation judiciaire de la SAS E.C. Log, représentée par Maître [T], en sa qualité de mandataire liquidateur pourra déposer l'intégralité de l'installation aérovoltaïque à ses frais et remettre les lieux et indiquer qu'à défaut de reprise du matériel dans ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré en l`état , sauf à impartir au mandataire liquidateur un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt aux fins de procéder aux travaux de démontage et de remise en état,.
Par ailleurs, aux termes de l'article L312-55 du code de la consommation, en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Les dispositions du premier alinéa ne sont applicables que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur.
Il est constant que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle d'un contrat de vente, emporte pour l'emprunteur l'obligation de rembourser à la banque le capital emprunté, sauf en cas d'absence de livraison du bien vendu ou de faute de la banque dans la remise des fonds prêtés présentant un lien causal avec le préjudice subi par l'emprunteur. Toutefois, l'emprunteur demeure tenu de restituer ce capital, dès lors qu'il n'a subi aucun préjudice causé par la faute de la banque (Civ 1ère, 11 mars 2020,18-26.189 ; Cass. Civ. 1ère, 2 février 2022, n° 20-17.066).
Il est en outre admis que le banquier commet une faute en versant les fonds objet du crédit affecté sans s'être assuré de la régularité formelle du contrat principal au regard des dispositions protectrices du consentement du consommateur ou de sa complète exécution ( Cass. Civ. 1ère, 10 décembre 2014, n° 13-26.585, 14-12.290 ; Cass. Civ. 1ère, 26 septembre 2018, n° 17-14.951), et qu'une telle faute est de nature à le priver en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec. cette faute (Cass. Civ. 1ère, 7 décembre 2022, n° 21-21.389), étant ajouté que, si la banque n'est pas tenue de se livrer à un examen approfondi du bon de commande au regard de la réglementation applicable en matière de démarchage à domicile ou de la jurisprudence, il lui incombe de s'assurer, avant de débloquer les fonds, que le bon de commande n'est pas entaché d'une irrégularité manifeste.
S'agissant des conséquences qu'il convient de tirer de la faute commise par la banque, la Cour de cassation juge désormais que si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable, il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire. Considérant que des suites de l'annulation du contrat de vente, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit pouvoir être restituée au vendeur ou retirée pour éviter des frais d'entretien ou de réparation et que l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal, la Cour de cassation pose pour principe que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal et ce, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation (Cass. Civ. 1ère, 10 juillet 2024, n°22-24.754).
En l'espèce, le premier juge a prononcé la nullité du contrat principal en raison des irrégularités formelles affectant le bon de commande, et retenu une faute de la banque, qui n'a pas vérifié que l'opération qu'elle finançait était conforme aux dispositions légales sur le démarchage à domicile et ne s`est pas non plus assurée de la parfaite exécution du contrat. La banque conteste pour sa part tout manquement de ces chefs.
S'il est acquis que le prix global de l'opération est suffisant et que le contrat n'a pas à entrer dans le détail du prix unitaire des biens ou à faire la distinction entre le coût de la main d'ouvre et le coût des biens objets du contrat et si l'erreur qui affecte le délai de rétractation n'est pas sanctionnée par la nullité du contrat, ledit délai s'en trouvant prorogé, le premier juge a justement relevé l'absence de précision quant au délai de livraison et d'exécution des travaux fixés à 120 jours à compter de la signature du bon de commande et l'existence d'une contradiction entre le bon de commande et les conditions générales de vente (article 2) qui évoquent une date fixée d'un commun accord entre le client et le vendeur dans la limite de 60 jours à compter de la signature du bon de commande de sorte que l'acheteuse n'a pu être informée précisément et sans ambiguïté du délai de livraison, même s'il s'agit d'un délai maximal, ainsi que requis par les dispositions de l'article L 111-1 3° du code de la consommation dans sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 12 février 2020.
Il a également à juste titre relevé l'absence de mention au bon de commande de la possibilité de saisir le médiateur à la consommation, sans que la banque ne puisse opposer l'argument selon lequel la société venderesse ne relève ou ne relevait à la date du contrat d'aucun médiateur, cette mention devant obligatoirement figurer au contrat de vente sous peine de nullité, conformément aux dispositions de l'article L 111-1 6° du code précité, l'article 612 ' 1 du même code, prévoyant du reste que "tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l'oppose à un professionnel (...) que le professionnel garantit au consommateur le recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation, qu'il peut mettre en place son propre dispositif de médiation de la consommation ou proposer au consommateur le recours à tout autre médiateur de la consommation répondant aux exigences du présent titre. (...)".
Il en résulte qu'en sa qualité de professionnelle du crédit à la consommation, que la banque aurait pu déceler la nullité manifeste du bon de commande, avant d'accorder le prêt, puis de libérer les fonds, si elle avait procédé; comme elle le devait, à la vérification de la validité du contrat principal au regard des dispositions impératives du code de la consommation.
Par ailleurs, la banque a commis un second manquement en libérant les fonds de l'offre de crédit sur la base d'une attestation de travaux insuffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et du fonctionnement de l'installation vendue, en l'absence en outre de description des prestations réalisées, ce qui ne lui permettait pas ainsi que l'a relevé le premier juge, de s'assurer de l'exécution effective des prestations de mise en service de l'installation auxquelles le vendeur s'était également engagé, le bon de commande prévoyant la prise en charge à 100% des démarches administratives auprès d'ERDF et du raccordement au réseau électrique. Or, il apparaît que si l'installation a été réceptionnée en septembre 2017, et que les fonds ont été débloqués à la suite le 14 septembre 2016, la mise en service auprès d'ERDF ne s'est opérée que le 20 mars 2018.
Dès lors, le défaut de vérification par le prêteur de la formation et de l'exécution du contrat de vente avant de le financer a participé à la nullité de ce contrat entaché d'irrégularités manifestes et est de nature à priver la société BNP Paribas personal Finance de sa créance de restitution, sous réserve de la démonstration par Mme [G] d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute de la banque et ce préjudice.
Mme [G] indique avoir eu à déplorer certains dysfonctionnements au niveau de l'emphase des panneaux, de l'onduleur en mars 2018, du thermostat, des bouches d'insufflation d'air et des gaines isolantes en 2019, elle reconnaît toutefois que la société est intervenue à chaque reprise peu de temps après et si elle indique avoir constaté des fuites en toiture des suites des réparations effectuées, versant aux débats des photographies des lieux, ces éléments sont insuffisants à démontrer l'origine des infiltrations et la responsabilité du vendeur et ne permettent pas en tout état de cause d'établir un lien avec les fautes commises par la banque, un tel préjudice découlant en effet d'une mauvaise installation.
En revanche, il résulte de la récente jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1ère, 10 juillet 2024, n°22-24.754) que si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, lorsque le vendeur est insolvable, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit être restituée au vendeur à charge pour ce dernier de récupérer le matériel et de procéder à sa désinstallation à ses frais, ce, indépendamment de l'aspect fonctionnel ou non du matériel. En application du principe d'équivalence des conditions, l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix constitue une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.
Il en résulte qu'en cas d'annulation du contrat principal, lorsque la restitution du prix s'avère impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire de services, le consommateur privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestations de services annulé en lien de causalité avec la faute de la banque.
En l'espèce, il n'est pas discutable que la société E.C. Log a été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Bobigny le 24 juin 2020, que Mme [G] a subi un préjudice, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel dont elle n'est plus propriétaire, et qu'elle est tenue de restituer, alors qu'elle n'est plus en mesure de déclarer sa créance, préjudice qui n'aurait pas été subi sans la faute de la banque qui a financé auprès du fournisseur un contrat manifestement nul.
Naque ne justifie pas d'une cloture possible pour insuffisance d'actif rendant
La société BNP Paribas personal Finance sera en conséquence condamnée à restituer à titre de réparation à Mme [G] l'ensemble des sommes versées en exécution du crédit affecté conclu le 2 août 2017 soit la somme de 26.079,56 euros représentant la somme de 5321,56 euros au titre des mensualités du prêt frais et intérêts et celle de 20 758 euros au titre du remboursement anticipé, par infirmation du jugement déféré.
Il n'y a pas lieu de se prononcer sur la demande dommages-intérêts formulée à titre subsidiaire pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde et de prudence et à son obligation d'information et de conseil.
Il n'y a pas non plus lieu de statuer sur la déchéance du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 2 août 2017 pour défaut de justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers en l'état de la nullité du contrat en cause.
2 - Sur la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral
Mme [G] prétend avoir subi un préjudice moral invoquant le comportement fautif de la banque, indiquant qu'elle s'est endettée sur dix ans pour financer une installation peu rentable, qui présente encore à ce jour des dysfonctionnements générant des frais, ayant été contrainte de contracter une extension de garantie et de souscrire un contrat d'entretien. Elle évalue son préjudice à la somme de 5000 euros.
En application de l'article 1147 du code civil applicable au litige devenu l'article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Au cas d'espèce, il n'est pas établi que la question de la rentabilité faisait partie du champ contractuel, de sorte que Mme [G] ne peut prétendre avoir subi un préjudice de ce chef. En l'absence de préjudice autrement caractérisé, sa demande indemnitaire sera rejetée, étant en outre observé que l'endettement invoqué a pris fin lors du remboursement anticipé du crédit affecté souscrit auprès de la SA BNP Paribas personal Finance. Le jugement entrepris sera confirmé en ce sens.
3 - Sur les frais du procès
Le sort des dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.
Il convient de confirmer la décision entreprise de ces chefs.
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la SA BNP Paribas personal finance sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2000 euros, la SA BNP Paribas personal finance étant déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a condamné la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 3179,56 euros en remboursement du contrat de prêt et à préciser qu'il sera imparti au mandataire liquidateur un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt aux fins de procéder aux travaux de démontage et de remise en état,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Prononce la privation de la SA BNP Paribas personal finance de son droit au remboursement du capital emprunté,
Condamne la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 26.079,56 euros correspondant au montant des mensualités de crédit versées et au remboursement anticipé du capital,
Dit que Mme [V] [G] devra laisser l'installation à la disposition de la liquidation de la SAS E.C. Log pendant un délai de six mois suivant la signification de la présente décision afin qu'elle puisse procéder aux travaux de démontage et de remise en état et qu'à l'expiration de ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré ;
Y ajoutant,
Condamne la SA BNP Paribas personal finance aux dépens d'appel ;
Condamne la SA BNP Paribas personal finance à payer à Mme [V] [G] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SA BNP Paribas personal finance de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
*
* *
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 11 SEPTEMBRE 2025
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-22-1289
Jugement du Juge des contentieux de la protection de [Localité 11] du 14 novembre 2023
APPELANTE :
Madame [V] [S] veuve [G]
née le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée et assistée par Me Virginie CAREL, avocat au barreau de ROUEN postulante de Me Ornella SCOTTO di LIGUORI avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES :
Monsieur [J] [T] es qualité de Mandataire liquidateur de la «Société E.C.LOG, SASU immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le numéro 532 616 869
[Adresse 7]
[Localité 6]
n'ayant pas constitué avocat, bien qu'assigné par acte d'un commissaire de justice en date du 24/12/2024.
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE GNE CETELEM
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Pascale BADINA de la SELARL CABINET BADINA ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Quentin DELABRE, avocat au barreau de ROUEN, postulant de Me Arnaud DUBOIS de la SCP RAMAHANDRIARIVELO DUBOIS - RED, avocat au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame ALVARADE, Présidente
Monsieur TAMION, Président
Madame TILLIEZ, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame DUPONT, greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 23 juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 septembre 2025
En présence de Monsieur [O], auditeur de justice
ARRET :
Défaut
Prononcé publiquement le 11 Septembre 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Madame DUPONT, greffière présent à cette audience.
FAITS ET PROCEDURE
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, Mme [V] [G] a signé le 2 août 2017 avec l'entreprise E.C. Log., exerçant sous le nom commercial AIR Eco logis, un bon de commande d'installation d'une centrale solaire photovoltaïque, moyennant un prix total de 22.900 euros toutes taxes comprises.
Pour financer cette installation, Mme [G] a signé le même jour une offre de prêt de ce montant, remboursable en 120 mensualités, au taux effectif global de 4,80 %, consentie par la SA BNP Paribas personal Finance sous la dénomination commerciale Cetelem.
Les panneaux photovoltaïques ont été installés et les fonds débloqués entre les mains du vendeur le 14 septembre 2017 sur la base d'une attestation de fin de travaux signée par Mme [G] le 6 septembre 2017.
L'installation a été raccordée au réseau électrique et produit de l'énergie revendue à la société EDF.
Par jugement du 24 juin 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société E.C. Log et désigné Maître [T], en qualité de mandataire liquidateur.
Considérant que l'installation ne présentait pas la rentabilité attendue, par actes de commissaire de justice des 25 et 22 juillet 2022, Mme [G] a assigné la banque et la société E.C. Log représentée par son liquidateur, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rouen aux fins notamment d'annuler le contrat principal et le contrat de crédit accessoire, d'obtenir la privation de la banque de son droit à restitution du capital prêté outre l'indemnisation de ses préjudices.
Par jugement contradictoire du 14 novembre 2023, le tribunal a :
- prononcé l'annulation du contrat de vente conclu le 2 août 2017 entre Mme [V] [G] et la SAS E.C. Log;
- prononcé l'annulation du contrat de prêt affecté au paiement de la vente annulée conclu le 2 août 2017 entre Mme [V] [G] et la SA BNP Paribas personal finance;
- dit que Mme [V] [G] devra laisser l'installation à la disposition de la liquidation de la SAS E.C. Log pendant un délai de six mois suivant la signification du présent jugement afin qu'elle puisse procéder aux travaux de démontage et de remise en état ;
- dit qu'à défaut de reprise du matériel dans ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 3179,56 euros correspondant aux échéances du prêt déjà versées en remboursement du contrat de prêt dont il a été déduit le montant du capital emprunté ;
- débouté Mme [G] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise en garde ;
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de déchéance du droit aux intérêts ;
- débouté Mme [V] [G] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à payer à Mme [V] [G] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la SA BNP Paribas personal finance de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SA BNP Paribas personal finance aux dépens ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit."
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que les dispositions du code de la consommation n'ont pas été respectées, relevant diverses irrégularités affectant le bon de commande, de sorte que le contrat encourait l'annulation.
Il a par voie de conséquence constaté que la demande de nullité formulée sur le fondement de l'erreur quant à la rentabilité de l'opération était sans objet, observant à toutes fins qu'il n'était pas démontré que la rentabilité de l'opération était entrée dans le champ contractuel et a dit que la nullité du contrat de crédit affecté, accessoire à la vente, était également encourue en application de l'article L 312-55 du code de la consommation.
Il a estimé que Mme [G], consommatrice profane, ne pouvait connaître l'existence des vices en présence d'un contrat incomplet, comportant des informations erronées de nature à tromper l'acheteur sur la validité du bon de commande et que la nullité du contrat ne saurait être couverte par sa signature d'une attestation de livraison et d'une demande consécutive de financement auprès de la banque.
Le premier juge a par ailleurs estimé que le prêteur qui n'a pas procédé à la vérification de l'opération qu'elle finançait au regard des dispositions du code de la consommation et qui a délivré les fonds au vu de la seule attestation de fin de travaux, laquelle ne lui permettait pas de se convaincre de l'exécution du contrat principal, a commis une faute, mais il a retenu que l'emprunteuse demeurait tenue de restituer le capital, dès lors qu'elle ne démontrait pas avoir subi un préjudice du fait des manquements de la banque, alors qu'elle bénéficiait d'une installation fonctionnelle pouvant être génératrice de gains, de sorte que la banque ne devait restituer que les sommes correspondant aux frais et intérêts perçus et auxquels elle ne pouvait plus prétendre, le contrat de prêt n'étant censé n'avoir jamais été conclu.
Il a en outre rejeté la demande de dommages-intérêts pour violation du devoir de mise en garde, en l'absence de caractérisation d'un risque d'endettement excessif de l'emprunteuse au regard de ses revenus et de ses charges déclarés, au titre du préjudice moral, au motif qu'aucun lien avec la procédure n'était établi et indiqué n'y avoir lieu à statuer sur la demande au titre du manquement à l'obligation d'information et de conseil, dès lors que le défaut de respect de cette obligation est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts et que le contrat de prêt était d'ores et déjà annulé.
Suivant déclaration du 8 novembre 2024, Mme [G] a interjeté appel de cette décision dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2025 et l'affaire appelée à l'audience du 23 juin 2025 pour être mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 11 septembre 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 décembre 2024, Mme [G] demande à la cour de :
Au visa des articles L. 111-1, L. 111-2, R. 111-2, L. 221-5, L. 221-9, L. 242-1 du code des procédures civiles d'exécution, L 311-31, L. 312-55 et L. 314-26, L. 341-2 et L. 312-14 du code de la consommation, 1130 à 1132, 1178 et 1231-1 du code civil, 514, 514-1 et 700 du code de procédure civile, de la jurisprudence et des pièces,
voir infirmer, réformer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rouen le 14 novembre 2023 ce qu'il a :
- condamné la SA BNP Paribas personal finance à lui restituer la somme de 3179,56 euros correspondant aux échéances déjà versées en remboursement du contrat de prêt dont il a été déduit le montant du capital emprunté ;
- rejeté sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise en garde ;
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de déchéance du droit aux intérêts ;
- rejeté sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
et statuant à nouveau :
- juger qu'elle est recevable et bien fondée en ses demandes,
A titre principal :
- juger que le bon de commande signé le 2 août 2017 ne satisfait pas les mentions obligatoires prévues en matière de démarchage à domicile,
- juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération,
En conséquence,
- prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 2 août 2017 avec la société E.C. Log.,
- juger qu'elle n'était pas informée des vices, et n'a jamais eu l'intention de les réparer ni eu la volonté de confirmer l'acte nul,
Et par conséquent juger que la nullité du bon de commande du 2 août 2017 n'a fait l'objet d'aucune confirmation,
- juger qu'elle tient le matériel à disposition de la société E.C. Log, représentée par son mandataire liquidateur, Maître [T] [J],
- juger qu'à défaut de reprise du matériel dans le délai de six mois à compter de la décision à intervenir, la société E.C. Log est réputée y avoir renoncé,
Et prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 2 août 2017 avec l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance a commis une faute lors du déblocage des fonds au bénéfice de la société E.C. Log,
- juger qu'elle justifie d'un préjudice en lien avec cette faute,
En conséquence,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance est privé de son droit à réclamer restitution du capital prêté,
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à restituer l'intégralité des sommes versées au titre du capital, intérêts et frais accessoires en vertu du contrat de crédit affecté du 2 août 2017, soit la somme de 26.079,56 euros,
A titre subsidiaire :
- juger que la SA BNP Paribas personal finance a manqué à son devoir de mise en garde et de prudence,
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire le prêt excessif,
- juger que l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance a manqué à son obligation d'information et de conseil,
- prononcer la déchéance de l'intégralité du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 2 août 2017 et condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui rembourser l'intégralité des intérêts, frais et accessoires déjà versés,
En tout état de cause :
- condamner l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 5000 euros au titre de son préjudice moral, débouter l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance de l'intégralité de ses demandes,
- condamner la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens".
Mme [G] fait valoir que la nullité du contrat de vente est encourue pour méconnaissance des dispositions du code de la consommation, le bon de commande étant affecté de nombreux vices relativement aux mentions obligatoires devant y figurer en application des dispositions d'ordre public dudit code,
qu'ainsi, il n'est pas précisé la marque du kit photovoltaïque, le poids, la superficie, les indications techniques concernant la pose des modules, les caractéristiques des panneaux et le rendement,
qu'en ce qui concerne le délai et les modalités de livraison des biens, il ne répond pas aux exigences de l'article L 111-1 3° du code de la consommation, en ce qu'il ne renseigne pas suffisamment le consommateur sur le délai de livraison et d'exécution de travaux, alors que le vendeur prend en outre en charge les démarches administratives auprès d'ERDF et le raccordement au réseau électrique,
qu'il n'est pas non plus mentionné le prix de chaque élément ni celui de la pose du matériel,
que la mention de la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation et ses coordonnées n'y figurent pas, ni le numéro d'identification d'assujettissement à la TVA du vendeur,
que le bon de commande fait référence aux articles L 121 ' 17 et suivants du code de la consommation relatifs au droit de rétractation ainsi qu'aux mentions obligatoires dans le cadre des contrats conclus par démarchage, dispositions pourtant abrogées par l'ordonnance n° 2016 ' 301 du 14 mars 2016 et contient également une mention erronée quant au point de départ de la faculté de se rétracter, le bordereau de rétractation prévoyant que le délai de 14 jours court à compter de la commande au lieu de la réception des biens.
Elle indique que si la cour devait infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a prononcé la nullité du bon de commande en violation des dispositions du code de la consommation, il conviendra de retenir que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération.
Elle soutient que la rentabilité constitue un élément essentiel du contrat et déterminant de son consentement, la société venderesse ayant présenté l'opération comme autofinancée par le rendement du matériel livré, qu'elle n'aurait assurément pas acquis à un prix aussi élevé sans la promesse d'une rentabilité économique, laquelle n'a pas été tenue ainsi que cela résulte du rapport d'expertise sur investissement établi le 31 janvier 2022 par M. [W] [C], expert mathématique et financier.
Elle ajoute que n'ayant pas eu connaissance des vices affectant l'acte elle n'a pu avoir eu l'intention de les réparer, ni la volonté de confirmer l'acte,
que partant, l'absence d'exercice du droit de rétractation, la signature de l'attestation de livraison autorisant le déblocage des fonds ainsi que l'utilisation du matériel et le paiement du crédit ne sauraient valoir confirmation du bon de commande litigieux et couvrir la nullité de l'acte.
Elle fait valoir qu'en application des dispositions combinées des articles 1178, 1186 du code civil et L. 312-55 du code de la consommation, en conséquence de l'annulation du contrat de vente du 2 août 2017, le contrat de crédit affecté à cette vente devra être également annulé, qu'aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la banque doit être déchue de sa créance de restitution du capital emprunté, dès lors qu'elle a procédé au déblocage des fonds, sans s'assurer de la régularité formelle du bon de commande et de l'exécution du contrat, alors qu'elle a eu à déplorer une erreur dans le raccordement mis en place le 20 mars 2018, qu'elle n'a pas reçu l'attestation de fin de travaux et n'a donc pu conclure un contrat de rachat d'électricité avec EDF conformément au bon de commande qui prévoyait la revente du surplus d'électricité.
Elle fait grief au premier juge, tout en retenant l'existence d'une faute à l'endroit de la banque, d'avoir considéré qu'elle ne justifiait pas d'un préjudice en lien avec cette faute et d'avoir par conséquent estimé que la banque était fondée à solliciter la restitution du capital emprunté, et d'avoir ainsi limité les effets de l'annulation du contrat principal sur le contrat de crédit affecté aux seuls frais et intérêts perçus sur le capital emprunté.
Elle invoque une récente jurisprudence qui considère que le préjudice est caractérisé en cas de liquidation judiciaire du vendeur, dès lors que le consommateur ne peut se retourner contre ce dernier pour obtenir la restitution du prix de vente et cite un arrêt de la [9] de cassation rendu le 10 juillet 2024 (Cour de cassation, chambre civile 1, 10 juillet 2024, 23-16.303) qui a, dans cette hypothèse, décidé que le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifiait d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de services annulé en lien de causalité avec la faute de la banque.
Elle explique qu'en raison de l'annulation du contrat et de la liquidation judiciaire du vendeur, elle ne peut espérer une remise en état initial de son bien immobilier ni une restitution du prix, et est soumise au choix du liquidateur qui décidera ou non de la restitution du matériel,
que les fautes de la banque ont ainsi eu pour conséquence directe le financement d'un contrat qui sera annulé et d'un matériel qui ne pourra être utilisé, sans possibilité de restitution du prix de vente, ni de remise en état du bien,
que son préjudice est notamment caractérisé du fait des dysfonctionnements de l'installation, la prestation réalisée par le vendeur étant affectée de plusieurs malfaçons, alors qu'elle ne tire par ailleurs aucun bénéfice de la revente du surplus de production.
Elle s'estime fondée à solliciter le remboursement de la somme totale de 26.079,56 euros correspondant aux mensualités du prêt à hauteur de 5321,56 euros et au remboursement anticipé à hauteur de 20.758 euros.
À titre subsidiaire, elle fait valoir que la banque a manqué à son devoir de mise en garde et à son obligation d'information et de conseil envers un emprunteur non averti, que son manquement entraîne l'engagement de sa responsabilité contractuelle et la réparation de son préjudice correspondant à la perte de chance de ne pas souscrire un prêt excessif à hauteur de 20.000 euros, qu'elle ne justifie pas en outre avoir consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, de sorte que la déchéance du droit aux intérêts devra être prononcée et qu'en tout état de cause, elle subit un préjudice moral qu'elle évalue à la somme de 5000 euros, du fait du comportement particulièrement fautif de la banque, s'étant endettée sur dix années pour financer une installation qui s'est avérée peu rentable et qui présente de nombreux dysfonctionnements.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 mars 2025, la SA BNP Paribas personal finance demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
débouter Mme [V] [G] de l'intégralité de ses moyens et demandes,
- la condamner à lui payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
La banque conteste avoir commis une faute, faisant valoir que le prêteur n'a pas vocation à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal et qu'il n'est pas comptable de toutes les irrégularités affectant le bon de commande,
que s'agissant de la régularité formelle du bon de commande, en ce que les caractéristiques essentielles seraient imprécises pour ne comporter aucun prix, son exemplaire comporte bien le prix de l'installation,
que si la Cour de cassation estime désormais que figurent au rang des caractéristiques essentielles devant être indiquées de manière lisible et compréhensible, les informations relatives à la production d'électricité de l'installation et au résultat attendu de l'utilisation de l'équipement en terme de productivité ou de rendement (20/12/2023 - civ.1ere, 22-14.020, P+B), l'application de cette dernière jurisprudence à un contrat signé antérieurement devra être écartée au nom des principes de prévisibilité et de sécurité juridique,
que s'agissant des délais de livraison et d'exécution, le bon de commande comporte bien un délai de 120 jours, qui est complété par une stipulation des conditions générales de vente et l'analyse de son caractère suffisamment précis excède le cadre du devoir de contrôle formel du prêteur,
que de la même manière, l'appréciation du point de départ réel du délai de rétractation en fonction de la qualification du contrat, implique une analyse à laquelle le prêteur n'a pas à procéder,
que concernant l'indication du médiateur de la consommation, cette obligation résulte des dispositions des articles L. 616-1 alinéa 1 du code de la consommation selon lequel tout professionnel communique au consommateur, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève, qu'or, la société E.C. Log ne relève ou ne relevait à la date du contrat d'aucun médiateur,
que s'il s'agit bien d'une irrégularité, elle ne se situe pas dans le périmètre du devoir du contrôle formel du prêteur, qui n'a pas à rechercher de quel organisme relève le cas échéant le prestataire, ni à s'enquérir personnellement sur le point de savoir si cette information a été mise à disposition du consommateur,
que quand bien même, elle ne partage pas l'appréciation du premier juge qui a retenu qu'elle était fautive, elle sollicite néanmoins la confirmation du jugement en ce que le prêteur ne peut être débouté de sa demande de restitution du capital,
que s'agissant du contrôle de l'exécution avant déblocage des fonds, elle observe que la société E.C. Log a exécuté sa prestation, que l'installation ne présente techniquement aucun défaut ni dans sa consistance, ni dans ses qualités, alors que l'absence de rentabilité n'est pas opposable au prêteur, aucun engagement n'ayant en outre été souscrit par le prestataire en ce sens,
que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation et en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci,
qu'en l'espèce, les obligations de l'emprunteuse ont bien pris effet au plus tard à compter du 20 mars 2018, date de la mise en service, date à laquelle toutes les prestations financées par la banque étaient exécutées, de sorte que le déblocage des fonds ne présente aucun caractère fautif, pas même du fait d'un retard dans la mise en service entre septembre 2017, date de la fin des travaux et mars 2018, alors que le prêt comporte un décalage d'amortissement et que les échéances ne sont appelées qu'à compter de mars 2018,
que le préjudice allégué n'est donc ni qualifié, ni quantifié et apparaît encore une fois théorique alors que l'emprunteuse a procédé au remboursement anticipé total du crédit dès le 31 octobre 2019,
que Mme [G] ne peut justifier d'aucun défaut de fonctionnement de l'installation, les photographies versées aux débats pour justifier de fuites en toiture étant dépourvues de valeur probante, ni d'une augmentation de ses factures d'électricité, les habitudes de consommation du foyer n'étant pas connues, aucun élément n'étant en outre produit quant à la revente du surplus, le seul grief dont elle se peut se prévaloir tenant à l'absence de perception des aides étatiques qu'elle était toutefois dans l'impossibilité de déceler au vu des pièces qui lui ont été remises.
Sur les arrêts rendus par la Cour de cassation le 10 juillet 2024, elle observe que la question du lien causal entre la faute de la banque et le préjudice de l'emprunteur résultant de l'impossibilité d'exercer son recours contre le vendeur en liquidation judiciaire et l'obligation de restituer l'installation a été explicitement tranchée en faveur du principe de l'équivalence des conditions, la Cour en déduisant que le préjudice de l'emprunteur est équivalent au montant du crédit souscrit, que la motivation de la Cour de cassation induit une automaticité de la privation du droit à restitution du capital qu'elle admet, mais estime que ce principe ne saurait priver le juge du fond de son pouvoir souverain d'appréciation du quantum du préjudice réellement subi.
Elle indique s'agissant des manquements précontractuels du prêteur tenant à la mise en garde et à la vérification de la solvabilité de l'emprunteuse, que ce débat est sans apport comme souligné par le premier juge, la sanction encourue consistant en la déchéance du droit aux intérêts conventionnels qui ne peut être prononcée du fait de la nullité du contrat et que sur le terrain de la responsabilité, il appartient au demandeur qui invoque une faute du prêteur pour octroi inapproprié d'un financement de justifier qu'il se trouvait précisément dans une situation d'endettement excessif lors de la conclusion du contrat.
Elle fait valoir qu'en tout état de cause, elle justifie avoir recueilli des informations sur la situation professionnelle et financière de l'emprunteuse, qu'aucune faute ne peut lui être reprochée de ce chef, d'autant que le crédit a fait l'objet d'un remboursement anticipé total.
Quant au préjudice résultant de la perte de chance de ne pas souscrire le contrat de crédit, elle soutient qu'il appartient à la cour de déterminer dans quelle mesure, ou avec quelle certitude, l'emprunteuse ne se serait pas engagée si elle avait eu connaissance de ces éléments, que son argumentation repose cependant non pas sur les caractéristiques techniques des biens ou les délais d'exécution, mais sur l'insuffisance de production, qui ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation que dès lors que les parties l'ont fait entrer dans le champ contractuel selon l'état de la jurisprudence en vigueur à l'époque du contrat,
que l'emprunteur est également astreint à faire la démonstration d'un lien de causalité direct et certain entre le préjudice qu'il allègue et la faute qu'il impute au prêteur.
La déclaration d'appel et les conclusions d'appelante ont été signifiées à la société E.C. LOG représentée par Maître [T], ès qualités de mandataire liquidateur, intimée défaillante le 24 décembre 2024 et les dernières conclusions de la SA BNP Paribas personal finance, le 26 mars 2025 à SAS E.C. LOG mandataire liquidateur [T].
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il sera rappelé que le premier juge a prononcé la nullité du contrat de vente sur le fondement de la violation des dispositions du code de la consommation retenant principalement que les caractéristiques essentielles des biens ou services faisaient défaut et en particulier qu'il ne contenait qu'une indication d'un prix global, sans distinction du prix du matériel et de la main-d''uvre, seule la case financement étant renseignée pour le montant de 22 900 euros, qu'il ne portait pas la mention du délai de livraison, de l'identification du médiateur de la consommation, ni même la faculté d'y recourir, ou encore du numéro individuel d'identification d'assujettissement à la TVA du vendeur, que le bon de commande faisait par ailleurs référence à des dispositions abrogées relativement au droit de rétractation et que l'information donnée quant au délai de rétractation était erronée.
Mme [G] sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour, notamment, de "A titre principal :
juger que le bon de commande signé le 2 août 2017 ne satisfait pas les mentions obligatoires prévues en matière de démarchage à domicile,
juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération,
En conséquence,
prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 2 août 2017 avec la société E.C.LOG.,
juger qu'elle n'était pas informée des vices, et n'a jamais eu l'intention de les réparer ni eu la volonté de confirmer l'acte nul,
Et par conséquent juger que la nullité du bon de commande du 2 août 2017 n'a fait l'objet d'aucune confirmation,
(...)
prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 2 août 2017 avec l'établissement bancaire BNP Paribas personal finance,
(...)".
Force est toutefois de constater que la banque sollicite la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions, de sorte qu'il n'y a pas lieu de revenir sur les dispositions du jugement relatives à la nullité du contrat de fourniture de biens et de prestation de services, ainsi que sur la nullité subséquente du contrat de crédit affecté résultant de l'application des dispositions de l'article L. 312-55 du code de la consommation, points non contestés à hauteur d'appel, le litige étant circonscrit aux seules conséquences des nullités encourues dans les relations entre les parties.
Le jugement sera confirmé en tant que de besoin en ce qu'il a dit sans objet la demande de nullité formulée sur le fondement de l'erreur quant à la rentabilité de l'opération et que les irrégularités du bon de commande constatées n'ont pu être couvertes, l'emprunteur n'ayant pu avoir connaissance des vices l'affectant.
1 - Sur les conséquences de la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté
L'article 1178 du code civil dispose qu'un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord.
Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent ainsi lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
L'annulation d'un contrat entraîne normalement la remise des parties en l'état antérieur à sa conclusion.
Le premier juge, appliquant les règles ci-avant exposées, a pu justement décider que la liquidation judiciaire de la SAS E.C. Log, représentée par Maître [T], en sa qualité de mandataire liquidateur pourra déposer l'intégralité de l'installation aérovoltaïque à ses frais et remettre les lieux et indiquer qu'à défaut de reprise du matériel dans ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré en l`état , sauf à impartir au mandataire liquidateur un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt aux fins de procéder aux travaux de démontage et de remise en état,.
Par ailleurs, aux termes de l'article L312-55 du code de la consommation, en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Les dispositions du premier alinéa ne sont applicables que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur.
Il est constant que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle d'un contrat de vente, emporte pour l'emprunteur l'obligation de rembourser à la banque le capital emprunté, sauf en cas d'absence de livraison du bien vendu ou de faute de la banque dans la remise des fonds prêtés présentant un lien causal avec le préjudice subi par l'emprunteur. Toutefois, l'emprunteur demeure tenu de restituer ce capital, dès lors qu'il n'a subi aucun préjudice causé par la faute de la banque (Civ 1ère, 11 mars 2020,18-26.189 ; Cass. Civ. 1ère, 2 février 2022, n° 20-17.066).
Il est en outre admis que le banquier commet une faute en versant les fonds objet du crédit affecté sans s'être assuré de la régularité formelle du contrat principal au regard des dispositions protectrices du consentement du consommateur ou de sa complète exécution ( Cass. Civ. 1ère, 10 décembre 2014, n° 13-26.585, 14-12.290 ; Cass. Civ. 1ère, 26 septembre 2018, n° 17-14.951), et qu'une telle faute est de nature à le priver en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec. cette faute (Cass. Civ. 1ère, 7 décembre 2022, n° 21-21.389), étant ajouté que, si la banque n'est pas tenue de se livrer à un examen approfondi du bon de commande au regard de la réglementation applicable en matière de démarchage à domicile ou de la jurisprudence, il lui incombe de s'assurer, avant de débloquer les fonds, que le bon de commande n'est pas entaché d'une irrégularité manifeste.
S'agissant des conséquences qu'il convient de tirer de la faute commise par la banque, la Cour de cassation juge désormais que si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable, il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire. Considérant que des suites de l'annulation du contrat de vente, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit pouvoir être restituée au vendeur ou retirée pour éviter des frais d'entretien ou de réparation et que l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal, la Cour de cassation pose pour principe que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal et ce, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation (Cass. Civ. 1ère, 10 juillet 2024, n°22-24.754).
En l'espèce, le premier juge a prononcé la nullité du contrat principal en raison des irrégularités formelles affectant le bon de commande, et retenu une faute de la banque, qui n'a pas vérifié que l'opération qu'elle finançait était conforme aux dispositions légales sur le démarchage à domicile et ne s`est pas non plus assurée de la parfaite exécution du contrat. La banque conteste pour sa part tout manquement de ces chefs.
S'il est acquis que le prix global de l'opération est suffisant et que le contrat n'a pas à entrer dans le détail du prix unitaire des biens ou à faire la distinction entre le coût de la main d'ouvre et le coût des biens objets du contrat et si l'erreur qui affecte le délai de rétractation n'est pas sanctionnée par la nullité du contrat, ledit délai s'en trouvant prorogé, le premier juge a justement relevé l'absence de précision quant au délai de livraison et d'exécution des travaux fixés à 120 jours à compter de la signature du bon de commande et l'existence d'une contradiction entre le bon de commande et les conditions générales de vente (article 2) qui évoquent une date fixée d'un commun accord entre le client et le vendeur dans la limite de 60 jours à compter de la signature du bon de commande de sorte que l'acheteuse n'a pu être informée précisément et sans ambiguïté du délai de livraison, même s'il s'agit d'un délai maximal, ainsi que requis par les dispositions de l'article L 111-1 3° du code de la consommation dans sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 12 février 2020.
Il a également à juste titre relevé l'absence de mention au bon de commande de la possibilité de saisir le médiateur à la consommation, sans que la banque ne puisse opposer l'argument selon lequel la société venderesse ne relève ou ne relevait à la date du contrat d'aucun médiateur, cette mention devant obligatoirement figurer au contrat de vente sous peine de nullité, conformément aux dispositions de l'article L 111-1 6° du code précité, l'article 612 ' 1 du même code, prévoyant du reste que "tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l'oppose à un professionnel (...) que le professionnel garantit au consommateur le recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation, qu'il peut mettre en place son propre dispositif de médiation de la consommation ou proposer au consommateur le recours à tout autre médiateur de la consommation répondant aux exigences du présent titre. (...)".
Il en résulte qu'en sa qualité de professionnelle du crédit à la consommation, que la banque aurait pu déceler la nullité manifeste du bon de commande, avant d'accorder le prêt, puis de libérer les fonds, si elle avait procédé; comme elle le devait, à la vérification de la validité du contrat principal au regard des dispositions impératives du code de la consommation.
Par ailleurs, la banque a commis un second manquement en libérant les fonds de l'offre de crédit sur la base d'une attestation de travaux insuffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et du fonctionnement de l'installation vendue, en l'absence en outre de description des prestations réalisées, ce qui ne lui permettait pas ainsi que l'a relevé le premier juge, de s'assurer de l'exécution effective des prestations de mise en service de l'installation auxquelles le vendeur s'était également engagé, le bon de commande prévoyant la prise en charge à 100% des démarches administratives auprès d'ERDF et du raccordement au réseau électrique. Or, il apparaît que si l'installation a été réceptionnée en septembre 2017, et que les fonds ont été débloqués à la suite le 14 septembre 2016, la mise en service auprès d'ERDF ne s'est opérée que le 20 mars 2018.
Dès lors, le défaut de vérification par le prêteur de la formation et de l'exécution du contrat de vente avant de le financer a participé à la nullité de ce contrat entaché d'irrégularités manifestes et est de nature à priver la société BNP Paribas personal Finance de sa créance de restitution, sous réserve de la démonstration par Mme [G] d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute de la banque et ce préjudice.
Mme [G] indique avoir eu à déplorer certains dysfonctionnements au niveau de l'emphase des panneaux, de l'onduleur en mars 2018, du thermostat, des bouches d'insufflation d'air et des gaines isolantes en 2019, elle reconnaît toutefois que la société est intervenue à chaque reprise peu de temps après et si elle indique avoir constaté des fuites en toiture des suites des réparations effectuées, versant aux débats des photographies des lieux, ces éléments sont insuffisants à démontrer l'origine des infiltrations et la responsabilité du vendeur et ne permettent pas en tout état de cause d'établir un lien avec les fautes commises par la banque, un tel préjudice découlant en effet d'une mauvaise installation.
En revanche, il résulte de la récente jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1ère, 10 juillet 2024, n°22-24.754) que si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, lorsque le vendeur est insolvable, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit être restituée au vendeur à charge pour ce dernier de récupérer le matériel et de procéder à sa désinstallation à ses frais, ce, indépendamment de l'aspect fonctionnel ou non du matériel. En application du principe d'équivalence des conditions, l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix constitue une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.
Il en résulte qu'en cas d'annulation du contrat principal, lorsque la restitution du prix s'avère impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire de services, le consommateur privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestations de services annulé en lien de causalité avec la faute de la banque.
En l'espèce, il n'est pas discutable que la société E.C. Log a été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Bobigny le 24 juin 2020, que Mme [G] a subi un préjudice, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel dont elle n'est plus propriétaire, et qu'elle est tenue de restituer, alors qu'elle n'est plus en mesure de déclarer sa créance, préjudice qui n'aurait pas été subi sans la faute de la banque qui a financé auprès du fournisseur un contrat manifestement nul.
Naque ne justifie pas d'une cloture possible pour insuffisance d'actif rendant
La société BNP Paribas personal Finance sera en conséquence condamnée à restituer à titre de réparation à Mme [G] l'ensemble des sommes versées en exécution du crédit affecté conclu le 2 août 2017 soit la somme de 26.079,56 euros représentant la somme de 5321,56 euros au titre des mensualités du prêt frais et intérêts et celle de 20 758 euros au titre du remboursement anticipé, par infirmation du jugement déféré.
Il n'y a pas lieu de se prononcer sur la demande dommages-intérêts formulée à titre subsidiaire pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde et de prudence et à son obligation d'information et de conseil.
Il n'y a pas non plus lieu de statuer sur la déchéance du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 2 août 2017 pour défaut de justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers en l'état de la nullité du contrat en cause.
2 - Sur la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral
Mme [G] prétend avoir subi un préjudice moral invoquant le comportement fautif de la banque, indiquant qu'elle s'est endettée sur dix ans pour financer une installation peu rentable, qui présente encore à ce jour des dysfonctionnements générant des frais, ayant été contrainte de contracter une extension de garantie et de souscrire un contrat d'entretien. Elle évalue son préjudice à la somme de 5000 euros.
En application de l'article 1147 du code civil applicable au litige devenu l'article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Au cas d'espèce, il n'est pas établi que la question de la rentabilité faisait partie du champ contractuel, de sorte que Mme [G] ne peut prétendre avoir subi un préjudice de ce chef. En l'absence de préjudice autrement caractérisé, sa demande indemnitaire sera rejetée, étant en outre observé que l'endettement invoqué a pris fin lors du remboursement anticipé du crédit affecté souscrit auprès de la SA BNP Paribas personal Finance. Le jugement entrepris sera confirmé en ce sens.
3 - Sur les frais du procès
Le sort des dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.
Il convient de confirmer la décision entreprise de ces chefs.
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la SA BNP Paribas personal finance sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2000 euros, la SA BNP Paribas personal finance étant déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a condamné la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 3179,56 euros en remboursement du contrat de prêt et à préciser qu'il sera imparti au mandataire liquidateur un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt aux fins de procéder aux travaux de démontage et de remise en état,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Prononce la privation de la SA BNP Paribas personal finance de son droit au remboursement du capital emprunté,
Condamne la SA BNP Paribas personal finance à restituer à Mme [V] [G] la somme de 26.079,56 euros correspondant au montant des mensualités de crédit versées et au remboursement anticipé du capital,
Dit que Mme [V] [G] devra laisser l'installation à la disposition de la liquidation de la SAS E.C. Log pendant un délai de six mois suivant la signification de la présente décision afin qu'elle puisse procéder aux travaux de démontage et de remise en état et qu'à l'expiration de ce délai, Mme [V] [G] pourra en disposer à son gré ;
Y ajoutant,
Condamne la SA BNP Paribas personal finance aux dépens d'appel ;
Condamne la SA BNP Paribas personal finance à payer à Mme [V] [G] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SA BNP Paribas personal finance de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
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