CA Lyon, 6e ch., 11 septembre 2025, n° 23/01651
LYON
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
X
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Doat
Conseillers :
Mme G, Mme Robin
Avocats :
Me Dusserre-Alluis, Me Boulaire, Me Goncalves
Faits, procédure et demandes des parties
Le 3 juillet 2017, M [C] [I] et Mme [L] [J] épouse [I] ont dans le cadre d'un démarcharge à domicile commandé auprès de la société Enrciel une installation photovoltaïque et la pose de cette dernière pour un montant de 23 900 euros.
Le même jour, il ont souscrit un prêt auprès de la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem, destiné à financer l'intégralité de l'installation.
Par actes d'huissier de justice du 4 octobre 2021, M et Mme [I] ont fait assigner la société Enrciel représentée par maître [K] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire et la société BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villeurbanne aux fins de voir :
- prononcer la nullité du contrat conclu avec la société Enrciel
- et consécutivement la nullité du contrat de crédit affecté conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance
- ordonner que la société BNP Paribas Personal Finance soit privée de sa créance de restitution du capital emprunté
- ordonner le remboursement par la société BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité des sommes qui lui ont été versées au titre de l'exécution normale du prêt litigieux
- condamner la société BNP Personal Finance à leur payer les sommes de :
- 23 900 euros au titre du prix de vente de l'installation
- une somme à parfaire correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés en exécution du prêt souscrit
- 5000 euros au titre du préjudice moral
- 4000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité de ses prétentions
- la condamner aux dépens.
Par jugement du 2 décembre 2022, le juge des contentieux de la protection a :
- déclaré recevable l'action de M et Mme [I]
- débouté M et Mme [I] de l'intégralité de leurs demandes
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties
- condamné in solidum M et Mme [I] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Par déclaration du 27 février 2023, M et Mme [I] ont interjeté appel du jugement.
Par dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 avril 2025, M et Mme [I] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable leur action
- l'infirmer pour le surplus
statuant à nouveau et y ajoutant
- prononcer la nullité du contrat de vente principal
- mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Enrciel l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble à ses frais
- prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté
- priver la société BNP Paribas Personal Finance de sa créance de restitution
- la condamner à leur rembourser l'ensemble des sommes versées par eux
- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à leur verser les sommes de :
- 23 900 euros correspondant à l'intégralité du prix de la vente
- 8075,10 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés en exécution du contrat de prêt
- 5000 euros au titre du préjudice moral
- 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouter la société BNP Paribas Personal Finance et la société Enrciel de l'intégralité de leurs prétentions contraires
- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à supporter les dépens de l'instance.
A l'appui de leurs prétentions, ils font valoir en substance que :
- le contrat est nul sur le fondement du dol et du non respect des dispositions du code la consommation
- le vice du consentement est caractérisé par l'absence d'informations essentielles sur le bon de commande et d'éléments sur la rentabilité de l'installation, et par le caractère définitif du contrat, alors que l'offre de financement est présentée comme sans grande conséquence,
- le bon de commande est affecté de multiples causes de nullité,
- ils n'ont pas confirmé le contrat, la preuve de la connaissance des vices et leur volonté de les réparer faisant défaut
- le contrat de prêt affecté est nul compte tenu de l'interdépendance avec le contrat principal
- la banque ne peut prétendre à la restitution du capital prêté, dans la mesure où elle a commis une faute en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande, et en procédant au déblocage des fonds prématurément. Cette faute est à l'origine de leur préjudice, puisqu'ils ne pourront obtenir la restitution du prix de la part du vendeur placé en liquidation judiciaire
- subsidiairement, la banque doit être privée de son droit aux intérêts contractuels ayant manqué à son obligation d'information et de mise en garde.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 3 août 2023, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
à titre principal,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 2 décembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villeurbanne
- débouter M. [C] [I] et Mme [L] [I] de l'ensemble de leurs demandes
- dire et juger que M. [C] [I] et Mme [L] [I] seront tenus d'exécuter les contrats jusqu'au terme
à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée,
- débouter M. [C] [I] et Mme [L] [I] de l'ensemble de leurs demandes,
- dire et juger que l'absence de faute de l'établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques
- condamner solidairement M. [C] [I] et Mme [L] [I] à lui payer la somme de 23 900 euros (capital déduction à faire des règlements)
à titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute de sa part retenue,
- débouter M. [C] [I] et Mme [L] [I] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
- les condamner solidairement à lui payer la somme de 3 900 euros à titre de dommages et intérêts,
- fixer au passif de la liquidation de la société Enrciel la somme de 23 900 euros à son profit
en tout état de cause,
- condamner M [C] [I] et Mme [L] [I] à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle réplique principalement que :
- la nullité du contrat principal n'est pas encourue. En effet, les caractéristiques essentielles figurent sur le bon de commande, les appelants ayant une conception extensive de cette notion. Le délai de livraison et celui de rétractation sont également conformes aux dispositions du code la consommation et la preuve d'un vice du consentement n'est pas davantage rapportée
- même à retenir une cause de nullité, les époux [I] ont confirmé le contrat
- elle n'a pas commis de faute dans le déblocage des fonds, n'ayant pas à vérifier la régularité formelle du contrat
- subsidiairement, si l'annulation des contrats était prononcée, les restitutions réciproques doivent avoir lieu et elle est fondée à réclamer des dommages et intérêts aux époux [I] et à solliciter l'inscription au passif de la société Enrciel de la somme de 23 900 euros.
La cour se réfère aux conclusions précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
La SELARL [K] [G] n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 mai 2025.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à la SELARL [K] [G], ès qualités de liquidateur de la société Enrciel par actes de commissaire de justice respectivement du 24 avril 2023 et du 7 juin 2023.
Les actes ont été remis à personne.
L'arrêt rendu sera réputé contradictoire en application de l'article 474 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la demande de nullité du contrat principal
M et Mme [I] invoquent deux fondements à leur demande de nullité, d'une part le non respect des dispositions du code de la consommation concernant le bon de commande et d'autre part le dol.
Concernant l'irrégularité du bon de commande, ils soutiennent que les caractéristiques essentielles des biens ne sont pas mentionnées. Ils reprochent ainsi au bon de commande de ne pas comporter le modèle, la référence, la dimension, le poids, l'aspect, les références, la performance de l'onduleur outre la marque des panneaux. Ils ajoutent que les caractéristiques techniques ne sont pas précisées, de même que le détail du prix. Ils font également référence aux mentions erronées concernant le délai de livraison et de rétractation.
La société BNP Paribas Personal rétorque que toutes les caractéristiques essentielles figurent sur le bon de commande, les appelants ayant une interprétation extensive des textes et que le délai de livraison et de rétractation sont conformes.
***
Aux termes de l'article L 221-5 du code de la consommation, applicable au contrat objet du présent litige, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible les informations suivantes et notamment les informations prévues aux articles L 111-1 et L 111-2.
L'article L 111-1 du code de la consommation dispose 'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible les informations suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
2° le prix du bien ou du service en application des articles L 112-1 à L 112-4,
3° en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,
5° s'il y a lieu les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et le cas échéant à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles,
6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par un décret en conseil d'Etat.'
En l'espèce, le bon de commande prévoit 'la fourniture d'une centrale solaire photovoltaïque d'une puissance de 3KWC, 250 watts comprenant 12 capteurs, 12 onduleurs coffret AC DC parafoudre et différentiel, marque des panneaux synexium et marque onduleur enphase.
Installation comprenant pose des capteurs sur toiture, connexions des panneaux à l'onduleur et de l'onduleur à la terre, pose des coffrets mise en service.'
S'agissant des caractéristiques essentielles des biens, si la taille, le poids, l'orientation des panneaux, le prix unitaire des éléments ne constituent pas des caractéristiques essentielles des biens vendus, tel n'est pas le cas de la marque. Cependant la marque Synexium figure bien sur le bon de commande pour les panneaux et celle enphase pour l'onduleur, de sorte que ce moyen ne peut pas prospérer.
En revanche, s'agissant du délai de livraison il est mentionné les informations suivantes :
'visite de notre technicien : au plus tard dans les deux mois à compter de la signature du bon de commande
démarches administratives : le client donne mandat à la société Enrciel pour effectuer pour son compte toutes les démarches administratives nécessaires aux installations objet de la présente commande. Dans le cadre d'une installation de capteurs solaires raccordée au réseau électrique, le client est informé que l'installation est conditionnée à l'accord de la mairie et de Enrciel, il est à préciser qu'ERDF effectue le raccordement.
Délais d'installation et des équipements au plus tard dans les quatre mois après validation de la levée des conditions suspensives mentionnées à l'article 6 des conditions générales de vente au verso
durée des travaux : cinq jours maximum (hors raccordement le cas échéant), les dates indiquées ci dessus sont fixées sous réserve de la non survenance d'un cas fortuit prévu à l'article 8.4 des conditions générales de vente force majeure ou de suspension'.
Le délai est imprécis, le point de départ étant laissé à la discrétion du vendeur.
Le délai d'exécution du contrat est de plus insuffisamment renseigné, alors que cette mention est essentielle compte tenu des obligations successives et complexes de livraison, pose et mise en service à la charge du vendeur.
La nullité est ainsi encourue de ce chef.
S'agissant du délai de rétractation, aux termes de l'article L 221-18 du code de la consommation, le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours à compter de la livraison du bien pour exercer son droit de rétractation.
Or, le bordereau intitulé 'bordereau d'annulation' présent au contrat fait état d'un point de départ du délai de quatorze jours à compter de la date de la commande, ce qui est irrégulier. Au surplus, les articles visés du code de la consommation ne correspondent pas aux articles applicables à la date du contrat, objet du présent litige.
Au regard de ces éléments, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués au soutien de la demande en nullité du contrat principal pour non respect du code de la consommation, le bon de commande est affecté de plusieurs irrégularités sanctionnées par la nullité.
Il n'y a donc pas lieu d'aborder la demande de nullité du contrat au motif du dol.
Pour s'opposer à la nullité du contrat principal, le prêteur indique que cette nullité est relative et qu'elle a été couverte par M et Mme [I], dans la mesure où ils ont signé le bon de commande sur lequel figure les dispositions du code de la consommation rappelant les mentions obligatoires devant figurer sur celui-ci, ordonné à la banque de débloquer les fonds et remboursé régulièrement les mensualités du prêt.
M et Mme [I] répliquent principalement qu'il s'agit d'une nullité absolue et à titre subsidiaire qu'ils n'ont pas eu connaissance des irrégularités ni l'intention de les réparer, soulignant que la reproduction des articles du code de la consommation ne permet pas d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat.
S'il s'agit bien d'une nullité relative et non absolue contrairement à ce que soutiennent M et Mme [I], la confirmation du contrat impose d'une part la connaissance du vice et d'autre part la volonté de le reparer.
Le moyen tiré de la reproduction des articles du code de la consommation sur les mentions obligatoires devant figurer à peine de nullité dans le contrat est inopérant, dans la mesure où la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat en l'absence de circonstances qu'il appartient au juge de constater (Cour de Cassation Civ 1ère 24 janvier 2024 n°22-16.115, la Cour de Cassation opérant un revirement de jurisprudence et précisant qu'il est justifié de juger ainsi dans les contrats souscrits antérieurement comme postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016).
De plus, le fait que M et Mme [I] aient signé une attestation de fin de travaux, ordonné le déblocage des fonds à l'organisme prêteur, remboursé régulièrement les échéances du prêt affecté ne démontre pas qu'ils avaient connaissance des irrégularités du bon de commande et qu'ils ont exprimé la volonté expresse et non équivoque de les couvrir.
Dès lors, les conditions de la confirmation ne sont pas remplies et il convient de prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Enrciel et M et Mme [I].
En conséquence, le jugement est infirmé en ce sens.
- Sur la nullité du contrat de prêt
En application de l'article L 312-55 du code de la consommation, le contrat de prêt est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.
Il est établi que le contrat de prêt souscrit par M et Mme [I] auprès de la société BNP Paribas Personal Finance est un crédit affecté exclusivement au financement du contrat conclu avec la société Enrciel.
Ainsi, infirmant le jugement, la nullité du contrat de crédit doit également être prononcée.
- Sur les conséquences de la nullité du contrat de vente
Le contrat de vente ayant été annulé, les parties doivent être remises en l'état où elles se trouvaient antérieurement à la vente.
La nullité de la vente donne lieu à des restitutions réciproques. Ainsi, le vendeur doit restituer le prix et l'acquéreur le matériel.
La société [K] [G], ès-qualités de liquidateur de la société Enrciel sera condamnée à procéder, à ses frais, à la reprise du matériel vendu au domicile des acquéreurs ainsi qu'à la remise en état nécessaire à la suite de cette reprise dans le délai de trois mois à compter du présent arrêt.
- Sur les conséquences de la nullité du contrat de prêt
M et Mme [I] invoquent une faute du prêteur, lequel n'a pas procédé à la vérification de la régularité formelle du contrat et a dans ce contexte libéré les fonds de manière prématurée, ce qui doit conduire à priver la société BNP Paribas Personal Finance de la restitution du capital.
La société BNP Paribas Personal Finance estime pour sa part ne pas avoir commis de faute considérant qu'il ne lui appartient pas de contrôler la validité formelle du bon de commande, n'ayant pas d'obligation de possession et de vérification du bon de commande et que même à déceler des irrégularités, elle a pu penser que ces dernières étaient couvertes par le comportement des acquéreurs, ayant signé l'attestation de fin de travaux et demandé le paiement du prêt.
Subsidiairement si une faute lui était reprochée, elle considère que les époux [I] ne justifient pas d'un préjudice en lien de causalité avec celle-ci.
***
L'annulation du contrat de prêt emporte remise des parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement à ce contrat.
Ainsi, les emprunteurs ont l'obligation de rembourser le capital emprunté et le prêteur doit leur restituer l' intégralité des sommes versées en exécution du contrat de crédit.
Les emprunteurs ne peuvent être exonérés du remboursement du capital financé que s'ils justifient d'une faute du prêteur, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.
En dépit des affirmations de la banque, cette dernière est tenue en sa qualité de professionnel de procéder à la vérification de la validité formelle du bon de commande.
Elle ne peut légitimement soutenir avoir cru que les irrégularités étaient couvertes, les arguments énoncés ne caractérisant nullement une confirmation, comme cela a été rappelé précédemment. Le prêteur a donc commis une faute en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande.
En principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable.
Cependant, il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire.
En effet, les emprunteurs se trouvent du fait de la nullité du contrat de vente privés de la propriété de l'équipement dont l'acquisition était l'objet du prêt et compte tenu de la procédure de liquidation judiciaire de la venderesse, le remboursement du prix versé ne pourra pas avoir lieu, compte tenu de l'insolvabilité du vendeur.
L'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'un préjudice qui selon le principe de l'équivalence des conditions est une conséquence de la faute de la banque dans la vérification de la validité formelle du bon de commande.
En effet, le préjudice résultant pour l'emprunteur de l'impossibilité d'obtenir auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire la restitution du prix de vente d'un matériel dont il n'est plus propriétaire, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, n'aurait pas été subi sans la faute de la banque, de sorte que cette dernière ne peut prétendre à la restitution du capital, qui est normalement la conséquence de la nullité du contrat de prêt.
Dès lors, la demande de restitution du capital prêté formée par la société BNP Paribas Personal Finance doit être rejetée.
Il convient en outre de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser à M et Mme [I] l'intégralité des sommes versées par eux, en exécution du prêt.
Le jugement est donc infirmé en ce sens.
M et Mme [I] ne peuvent en revanche demander en plus la condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à leur payer l'intégralité du prix de vente de l'installation et la somme de 8075,19 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par eux.
Ils sont donc déboutés de cette demande.
- Sur la demande au titre d'un préjudice moral
La preuve d'un préjudice moral n'est pas rapportée.
Ainsi, M et Mme [I] sont déboutés de cette demande.
- Sur la demande formée par le prêteur de de fixation de la somme de 23 900 euros au passif de la liquidation de la société Enrciel
Cette demande est irrecevable, la société BNP Paribas Personal Finance n'ayant pas justifié de sa déclaration de créance, s'agissant d'une créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, puisqu'en raison de la nullité du contrat de crédit, les parties sont replacées dans la situation dans laquelle elles se trouvaient à la date de la souscription du prêt.
- Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société BNP Paribas Personal Finance
Si la société BNP Paribas Personal Finance sollicite à titre très subsidiaire des dommages et intérêts, elle ne démontre pas que M et Mme [I] ont commis une faute dont elle a été victime.
Cette demande doit donc être rejetée.
- Sur les demandes au titre de l'indemnité de procédure et des dépens
Les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens sont infirmées.
La société BNP Paribas Personal Finance, partie perdante est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
L'équité commande de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M et Mme [I] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par eux en première instance et en cause d'appel
Compte tenu de la solution apportée au litige, la société BNP Paribas Personal Finance est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement, sauf en ce qu'il a déclaré l'action de M et Mme [I] recevable,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant
Prononce la nullité du contrat de vente conclu entre la société Enrciel et M. [I] et Mme [I] le 3 juillet 2017
Constate en conséquence la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP Paribas Personal Finance et M et Mme [I]
En conséquence
Condamne la société [K] [G], ès-qualités,à procéder, à ses frais, à la reprise du matériel vendu au domicile de M et Mme [I] ainsi qu'à la remise en état nécessaire à la suite de cette reprise dans le délai de trois mois à compter du présent arrêt
Déboute la société BNP Paribas Personal France de sa demande de restitution du capital
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M et Mme [I] l'intégralité des sommes versées par eux en exécution du contrat de prêt
Déboute M et Mme [I] de leur demande supplémentaire de condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à leur payer les sommes de 23 900 euros correspondant au prix de vente et de 8075,10 euros
Déboute M et Mme [I] de leur demande au titre du préjudice moral
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de dommages et intérêts
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de fixation d'une créance de 23 900 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société Enrciel
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première instance et d'appel
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [I] et Mme [I] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par eux en première instance et en cause d'appel
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.