CA Aix-en-Provence, ch. 4-8b, 12 septembre 2025, n° 23/12001
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8b
ARRÊT AU FOND
DU 12 SEPTEMBRE 2025
N°2025/353
Rôle N° RG 23/12001 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL52G
[18]
S.A.S. [9]
C/
S.A.S. [10]
[18] [Localité 14]
Copie exécutoire délivrée
le 12 septembre 2025:
à :
[18]
Me Jean-jacques TOUATI,
avocat au barreau de PARIS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Pole social du TJ de [Localité 16] en date du 25 Août 2023, enregistré au répertoire général sous le n° 20/01247.
APPELANTES
[18], demeurant [Adresse 6]
représenté par Mme [C] [X] en vertu d'un pouvoir spécial
S.A.S. [10], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Jean-jacques TOUATI, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
S.A.S. [10], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jean-jacques TOUATI, avocat au barreau de PARIS
[18] [Localité 14], demeurant [Adresse 5]
représenté par Mme [C] [X] en vertu d'un pouvoir spécial
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre
Madame Sylvie CACHET, Présidente de chambre
Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Corinne AUGUSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2025
Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Corinne AUGUSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*
EXPOSÉ DU LITIGE
A l'issue d'un contrôle portant sur l'app1ication des législations de sécurité sociale et d'a1locations familiales, d'assurance chômage et garantie des salaires, et la période du 1er janvier 2015 au 31décembre 2017, au sein de la société [10] [la cotisante], [Adresse 4] [l'URSSAF] lui a notifié une lettre d'observations datée du 1er août 2018, comportant 16 chefs de redressement (outre deux avoirs) portant rappel de cotisations et contributions pour un montant total de 85 395 euros ainsi que des majorations de redressement pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 847 euros.
Après échange d'observations, dans le cadre desquelles l'inspecteur de recouvrement a maintenu les chefs de redressement n°6, 7, 8 et 9 et annulé le chef de redressement n°3 (d'un montant de 1 688 euros), l'URSSAF a notifié à la cotisante une mise en demeure datée du 9 novembre 2018 d'un montant de 94 462 euros (dont 83 707 euros de cotisations et contributions, 2 847 euros de majorations de redressement et 7 008 euros majorations de retard).
Par décision du 30 septembre 2020, la commission de recours amiable a annulé le chef de redressement n°6 d'un montant de 12 060 euros et rejeté les contestations de la cotisante afférentes aux chefs de redressement n°5 et 9.
La cotisante a saisi le 10 décembre 2020 le pôle social d'un tribunal judiciaire.
Par jugement en date du 25 août 2023, le tribunal judiciaire de Toulon, pôle social, a:
* 'considéré' comme non contestés les chefs de redressements n°1, 2, 4, 7, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18,
* 'considéré comme annulés' les chefs de redressement n°3 et 6,
* 'considéré' comme fondé le chef de redressement n°5 pour son montant de 28 444 euros outre 2 804 euros de majorations de retard,
* 'considéré' comme non fondé le chef de redressement n°8 pour son entier montant de 5 917 euros,
* 'considéré' comme non fondé le chef de redressement n°9 pour son entier montant de 3 970 euros,
* condamné la cotisante à payer à l'URSSAF la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros de majorations pour absence de mise en conformité outre les majorations de retard à recalculer au titre de la mise en demeure du 9 novembre 2018,
* débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la cotisante aux dépens.
La cotisante en a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées recours par déclarations aux [15] en date des 14 septembre 2023 et 25 septembre 2023 enregistrés sous les références RG 23/12022 et 23/11707.
L'URSSAF en a également relevé appel par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 21 septembre 2023. Cette procédure a été enrôlée sous la référence RG 23/12001.
Par ordonnances de jonction en date des 6 octobre 2023 et 28 mai 2025 ces trois procédures ont été jointes sous la référence RG 13/12001.
Par conclusions remises par voie électronique le 22 juillet 2024, modifiées et soutenues à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la cotisante sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé les chefs de redressement n°8 et 9 et son infirmation en ce qu'il a jugé non contestés les chefs de redressements n°1, 2, 4, 7, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18, jugé fondé le chef de redressement n°5 et l'a condamnée au paiement de la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros de majorations pour absence de mise en conformité outre les majorations de retard à recalculer.
Elle demande à la cour:
* à titre principal, d'annuler la lettre d'observations et la mise en demeure ainsi que le redressement et le recouvrement,
* à titre subsidiaire, de juger le chef de redressement n°5 nul et subsidiairement toute majoration nulle,
* condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 3 000 euros pour la procédure de première instance et celle de 7 000 euros en cause d'appel, le tout sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions n°2 réceptionnées par le greffe le 16 juin 2025, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé fondé le chef de redressement n°5 pour son montant aussi que les majorations pour absence de mise en conformité y afférentes et son infirmation en ce qu'il a jugé non fondés les chefs de redressement n°8 et 9.
Elle demande à la cour de:
* condamner la cotisante au paiement de la somme de 82 404 euros 'au titre de la mise en demeure du 9 novembre 2018",
* condamner la cotisante au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
MOTIFS
1- sur l'annulation de la lettre d'observations et de la mise en demeure:
Exposé des moyens des parties:
La cotisante argue que la lettre d'observations est irrégulière pour avoir été envoyée selon une procédure d'anonymat en l'absence de mention de la qualité de l'agent qui se limite à indiquer son nom, au nom de l'URSSAF, et qu'aucun verso de la mise en demeure n'est produit par l'URSSAF prouvant sa notification. Elle argue en outre que la mise en demeure ne permet pas de connaître son auteur, son destinataire, son montant sa cause, sa nature, le délai de régularisation possible de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale pour soutenir qu'elle doit être annulée.
L'URSSAF réplique que la mise en demeure est régulière pour comporter toutes les mentions obligatoires qui sont la nature de la dette, le montant de celle-ci, son origine et la période à laquelle elle se rapporte, et qu'elle mentionne également les informations relatives au débiteur et au créancier, les nom et prénom de son directeur, ainsi que les voies et délais de recours.
Réponse de la cour:
1.1 - sur la régularité de la lettre d'observations:
Selon l'article R.243-59 III du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2017-1409 du 25/09/2017, à l'issue du contrôle (...) les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L.243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux (...) le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci (...)
Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L.243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.
(...)
En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, la lettre d'observations précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L.243-7-6. Le constat d'absence de mise en conformité est contresigné par le directeur de l'organisme effectuant le recouvrement.
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.
Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.
Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés.
En l'espèce, la lettre d'observations du 1er août 2018 mentionne en dernière page (54/54) qu'elle émane de M. [M] [N], inspecteur du recouvrement, et:
- en première page outre sa date:
* le nom de l'organisme: [Adresse 19],
* les coordonnées de l'inspecteur du recouvrement et de son secrétariat ainsi que l'adresse de correspondance de l'organisme,
* son objet: 'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires [7]',
* l'établissement contrôlé (sis [Adresse 2] à [Localité 11]), ses numéros de compte [17] et Siret, son numéro d'affiliation, la période vérifiée et la date de fin de contrôle,
- en page deux, comporte la liste des documents consultés et détaille par chef de redressement ou points examinés, les éléments de droit et constatations de l'inspecteur du recouvrement et pour chaque chef de redressement les modalités de calcul retenues,
- en dernière page le montant total du rappel de cotisations et contributions sociales, d'assurance chômage et d'AGS ainsi que le montant de la majoration de redressement pour absence de mise en conformité, la faculté pour la cotisante de faire part de ses observations par tout moyen donnant date certaine à leur réception, dans le délai de trente jours à dater de sa réception, ainsi que de la possibilité de se faire assister par un conseil de son choix.
Il s'ensuit que cette lettre d'observations est régulière en la forme et que la cotisante est mal fondée en son moyen d'annulation.
1.2 - sur la régularité de la mise en demeure:
Selon l'article R.244-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2016-941 du 8 juillet 2016, la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent, précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L.243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.
En l'espèce, la mise en demeure datée du 9 novembre 2018, précise au titre du motif du recouvrement "contrôle. Chefs de redressement notifiés par lettre d'observations du 01/08/18, article R.243-59 du code de la sécurité sociale", et mentionne que la nature des cotisations est "régime général".
Elle détaille pour chaque année civile 2016, 2017 et 2018 le montant des cotisations (en précisant "incluses contribution d'assurance chômage, cotisations [7]") ainsi que celui des majorations de redressement pour absence de mise en conformité et des majorations de retard.
Elle porte sur un montant total de 94 462 euros dont 83 707 euros en cotisations, 2 847 euros de majorations de redressement et 7 908 euros de majorations de retard.
Au verso, elle précise le délai d'un mois imparti à la cotisante à compter de sa réception pour s'acquitter du paiement ainsi que le délai de deux mois pour saisir la commission de recours amiable en contestation de cette mise en demeure.
La référence dans cette mise en demeure au contrôle et à la date de la lettre d'observations, laquelle détaille de façon complète et exhaustive, pour chaque chef de redressement à la fois les dispositions applicables, la nature et le montant des cotisations ou contributions concernées, par période annuelle, précise l'établissement concerné, étant observé que pour tous ces chefs de redressement, il est indiqué qu'ils concernent des cotisations et contributions dues au titre du régime général, ce qui constitue une motivation suffisante pour permettre à la cotisante de connaître la cause, la nature, les périodes des sommes réclamées.
Cette mise en demeure mentionne également émaner de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur avec ses coordonnées postales, le nom et l'adresse de la cotisante avec ses référence de compte [17], qu'elle émane du directeur de l'URSSAF comporte son paraphe et mentionne son prénom et son nom.
La cotisante ne peut donc utilement alléguer ne pas avoir été en mesure à réception de la mise en demeure d'avoir connaissance de la cause, de la nature, de la période comme du montant des sommes dont le paiement lui était demandé, ou de ne pas avoir connaissance de l'organisme comme de la qualité de la personne qui l'a émise pour celui-ci.
Elle est mal fondée en son moyen de nullité tiré de l'irrégularité de la mise en demeure.
2- sur le fond:
Par suite des appels croisés de la cotisante et de l'URSSAF, la cour est saisie des contestations afférentes aux chefs de redressement suivants:
- n°5: pourboire M.A.S dans les établissements de jeux, d'un montant total de 28 044 euros (années 2015, 2016 et 2017) ainsi que de la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros,
- n°8: déduction forfaitaire spécifique appliquée à tort, d'un montant total de 5 917 euros (années 2015, 2016, 2017),
- n°9: frais professionnels- déduction forfaitaire spécifique- absence du salarié, d'un montant total de 3 970 euros (années 2015, 20616 et 2017).
La cour rappelle que l'inspecteur du recouvrement a annulé dans sa réponse du 24 septembre 2018 aux observations de la cotisante le chef de redressement n°3 (d'un montant de 1 688 euros) et que postérieurement à la notification de la mise en demeure, la commission de recours amiable a annulé le chef de redressement n°6 d'un montant total de 12 060 euros, ces annulations étant définitivement acquises à la cotisante.
2.1- sur le chef de redressement n°5: pourboire M.A.S dans les établissements de jeux d'un montant total de 28 044 euros et la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros:
Exposé des moyens des parties:
La cotisante argue ne pas avoir connaissance de pourboires remis à ses salariés en salle de machines à sous et ainsi ne pas les centraliser pour soutenir que la jurisprudence invoquée par l'URSSAF n'est pas transposable.
Elle conteste en outre que les dispositions de l'article 18 du décret 59-1489 du 23 décembre 1959 modifié s'applique aux salariés des machines à sous, arguant en premier lieu qu'il ne s'agit pas d'un décret mais d'un arrêté, et en second lieu qu'à sa date les machines à sous n'existaient pas et que cet arrêté renvoie à la gestion des pourboires propres aux tables de jeux.
Elle conteste que la réglementation des jeux impose un mode de centralisation des pourboires aux machines à sous et que le chef caissier, qui selon l'URSSAF, tient un cahier de répartition
des pourboires, puisse être assimilé à un représentant de l'employeur, alors qu'il est un employé.
Elle conteste également la majoration pour absence de mise en conformité à la suite d'un précédent contrôle en arguant que la simple référence à l'article R.243-18 du code de la sécurité sociale est insuffisante et que le cotisant doit être pleinement informé, et non par renvoi, des conséquences financières du contrôle.
Se fondant sur les articles 1er et 2ème de l'arrêté du 28 mars 1956 fixant les modalités d'évaluation des pourboires en vue des cotisations de sécurité sociale ainsi que sur les articles L.242-1 alinéa 1 et R.242-5 devenu R.259-4 du code de la sécurité sociale, L.3244-1 et R.3244-1 du code du travail, et l'article 18 de l'arrêté du 23 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos pris en application du décret n°59-1489 du 22 décembre 1959, l'URSSAF lui oppose que
l'exploitation de la comptabilité et des réponses apportées par les interlocuteurs aux questions de l'inspecteur du recouvrement lui ont permis de constater que les salariés ont perçu des pourboires non soumis à cotisations et que seules les sommes données aux salariés des tables de jeux traditionnels ont été déclarées, rappelant qu'en application de l'article L.243-7 du code de la sécurité sociale les constats établis par l'inspecter font foi jusqu'à preuve contraire.
Elle argue que les pourboires sont centralisés par l'employeur ou ses représentants (chef caissier) et répartis mensuellement entre certains salariés par le chef caissier qui fixe leur montant individuel et que si le cahier de répartition des pourboires n'a pas été communiqué lors du contrôle, l'audition d'un salarié, en présence du chef d'entreprise, pendant la visite de l'établissement a permis de constater que le montant des pourboires net est de 80 euros par mois et concerne 15 salariés.
Elle argue également que la lecture des procès-verbaux des réunions des délégués du personnel par l'inspecteur du recouvrement lors du contrôle confirme ce système de répartition de pourboires non déclarés pour soutenir qu'en l'absence de production du registre de répartition ou de tout autre élément probant permettant l'évaluation des pourboires versés au personnel des machines à sous et des services périphériques, la fixation forfaitaire de l'assiette des cotisations et contributions sociales est justifiée.
Réponse de la cour:
Par application des dispositions de l'article L.242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à cotisations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entreprise d'un tiers à titre de pourboire.
Selon l'article L.3244-1 du code du travail, dans tous les établissements commerciaux où existe la pratique du pourboire, toutes les perceptions faites "pour le service" par l'employeur sous forme de pourcentage obligatoirement ajouté aux notes des clients ou autrement, ainsi que toutes sommes remises volontairement par les clients pour le service entre les mains de l'employeur, ou centralisées par lui, sont intégralement versées au personnel en contact avec la clientèle et à qui celle-ci avait coutume de les remettre directement.
L'article R.3244-1 du code du travail fait obligation à l'employeur de justifier de l'encaissement et de la remise aux salariés des pourboires.
Selon l'article 18 de l'arrêté du 23 décembre 1959 (modifié par l'arrêté du 29 octobre 2010), les employés des salles de jeux ne sont autorisés à accepter les pourboires qui peuvent leur être offerts par les joueurs qu'en vertu d'une simple tolérance, toujours révocable en cas d'abus. Les pourboires doivent être immédiatement versés dans une tirelire par celui qui les reçoit: aucun employé ne peut en détenir par devers lui tout ou partie. Ils sont comptabilisés chaque jour dans un registre modèle 6.
Les modalités de répartition des pourboires sont déterminées librement entre employeurs et employés en dehors de toute intervention de l'administration. Pourvu qu'il y ait accord préalable entre les parties, que cet accord soit constaté d'une manière explicite dans le contrat d'engagement *]contrat de travail[* et que les droits et obligations de chacun y soient clairement spécifiés, toutes les combinaisons sont admises, à la seule exception de celles qui tendraient à détourner une partie des pourboires au profit, soit de l'établissement lui-même, soit du directeur ou d'un membre du comité de direction soit d'une personne qui ne serait pas liée à l'établissement par un contrat d'engagement régulier et constaté par écrit.
Les contestations entre employeurs et employés auxquelles pourrait donner lieu l'attribution des pourboires sont du ressort exclusif de la juridiction de droit commun.
Un compte "pourboires" est ouvert au grand livre pour la constatation chaque jour du montant intégral des pourboires reçus et du total des sommes versées aux employés à ce titre. Il fonctionne dans les conditions fixées par l'arrêté interministériel du 27 février 1984 relatif à la comptabilité générale des casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques.
S'il résulte de ces dispositions, que la réglementation du secteur des machines à sous ne prévoit pas pour les salariés affectés aux salles de jeux dans lesquelles ces machines sont installées la tenue de registre spécifique pour les pourboires, pour autant le code du travail fait obligation à l'employeur d'une part de justifier de l'encaissement des pourboires et de la remise aux salariés, ce qui implique que les pourboires doivent être recensés et centralisés par l'employeur et d'autre part qu'ils doivent être répartis entre les différents salariés en contact avec la clientèle.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a considéré que l'exploitation de la comptabilité et les réponses apportées par ses interlocuteurs lors du contrôle permettent d'établir que les salariés de la société ont reçu des pourboires qui n'ont pas été soumis aux cotisations de sécurité sociale durant les années 2015 à 2017 inclus et que seules les sommes données aux salariés des tables de jeux traditionnels font l'objet d'une réintégration dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.
Il a constaté que:
- les pourboires donnés par les clients des machines à sous ne font pas l'objet d'une déclaration, bien que centralisés par le chef caissier, répartis mensuellement entre certains salariés désignés par le responsable qui fixe leur montant individuel,
- le cahier de répartition des pourboires tenu par le chef caisse ne lui a pas été communiqué,
- l'audition d'un salarié, en présence du chef d'entreprise, pendant le contrôle, lui a permis de 'constater' que le montant des pourboires nets est de 80 euros par mois et concerne 15 salariés,
- l'examen des procès-verbaux des délégués du personnel indique que ce système de répartition des pourboires non déclarés existe.
En l'absence de communication des informations permettant l'établissement exact de la correction de l'assiette des cotisations sur les pourboires centralisés par l'employeur et reversés aux salariés mais non déclarés, l'inspecteur du recouvrement a procédé à une taxation forfaitaire au visa de l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale en retenant une base annuelle de 80 euros nets par mois multiplié par 15 salariés, recalculée en brut.
La cotisante ne s'explique pas sur son refus de communication du cahier de répartition des pourboires et ne contredit pas davantage les éléments tirés par l'inspecteur du recouvrement des déclarations d'un salarié en présence de l'employeur confirmant la pratique de pourboires d'un montant de 80 euros mensuel distribués à 15 salariés affectés en salle des machines à sous.
Il résulte de la lettre d'observations datée du 4 mars 2014, portant sur le contrôle de la cotisante et sur la période du 01/01/2011 au 31/12/2012, qu'elle a déjà fait objet d'un chef de redressement au même titre (numéro 4, au titre des années 2011 et 2012) dans le cadre duquel il a été souligné que lors du contrôle antérieur elle avait fait l'objet d'une observation pour l'avenir.
Selon l'article L.243-7-6 alinéa 1 du code de la sécurité sociale, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l'issue d'un contrôle réalisé en application de l'article L.243-7 est majoré de 10 % en cas de constat d'absence de mise en conformité. Un tel constat est dressé lorsque l'employeur n'a pas pris en compte les observations notifiées lors d'un précédent contrôle, que ces observations aient donné lieu à redressement ou non.
Il est établi que la cotisante n'a tenu compte ni de l'observation pour l'avenir antérieure, ni ensuite du redressement notifié lors du contrôle suivant réalisé en 2014.
Il s'ensuit d'une part que le chef de redressement n°5 doit être validé pour son entier montant et d'autre part que la majoration pour absence de mise en conformité est également justifiée.
Ce chef de redressement est justifié pour son montant ainsi que la majoration pour absence de mise en conformité.
2.2- sur le chef de redressement n°8: déduction forfaitaire spécifique appliquée à tort d'un montant total de 5 917 euros:
Exposé des moyens des parties:
L'URSSAF conteste l'annulation de ce chef de redressement par les premiers juges qui ont retenu que la catégorie de personnel définie par l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts s'attache à la profession et non au niveau hiérarchique.
Elle argue que s'agissant des personnels des casinos de jeux, la déduction forfaitaire spécifique
est applicable exclusivement aux personnels affectés aux salles de jeux ainsi qu'aux services annexes réservés aux joueurs (bar, restauration...) qui justifient qu'ils supportent effectivement des frais de représentation et de veillée ou des frais de double résidence ou ces deux catégories de frais à la fois, et que dans ses arrêts 110329 du 21 décembre 1994, 21311 et 214848 du 21 mars 2001, le Conseil d'Etat a jugé que doivent être regardées comme affectés aux activités de casino les personnes exerçant effectivement leur activité dans les locaux spéciaux, distincts et séparés où sont autorisés les jeux mentionnés par décret, que leurs fonctions soient liées directement aux jeux ou qu'elles se rattachent aux services annexes proposés aux joueurs, pour soutenir que seuls les personnels affectés aux salles de jeux ou aux services annexes réservés aux joueurs ouvrent droit à la déduction forfaitaire spécifique.
Elle souligne que l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (19 mai 2017 n°15-28.777) et la 2ème chambre civile (12 octobre 2017, n°15-26.903) ont également jugé que les personnels des casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs et affectés exclusivement dans les salles de casino dédiées aux jeux de hasard.
Elle argue que les salariés occupant des postes de responsable technicien et d'adjoint technicien [12] ne supportent pas de frais de représentation et/ou de veillée et que le personnel d'encadrement n'assure pas la maintenance et n'est pas conduit à engager des frais supplémentaires à ce titre pour soutenir que ce chef de redressement est justifié.
La cotisante réplique que la lettre collective de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale n°2011-0111 du 7 juin 2011 renvoie à des catégories de poste et à des libellés de poste pour soutenir que les postes de responsable technique ou d'adjoint au responsable technique entrent dans la catégorie des techniciens et mécaniciens et figurent sur la liste de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts.
Réponse de la cour:
Selon l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005, les professions, prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif prévu aux articles précédents peuvent bénéficier d'une déduction forfaitaire spécifique. Cette déduction est, dans la limite de 7 600 euros par année civile, calculée selon les taux prévus à l'article 5 de l'annexe IV du code précité.
Sont au nombre des professions listées par l'ancien article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, pour lesquels est fixée la déduction supplémentaire pour frais professionnels, dans les conditions suivantes:
'[8]:
Personnel supportant des frais de représentation et de veillée: 8 %.
Personnel supportant des frais de double résidence: 12 %.
Personnel supportant à la fois des frais de représentation et de veillée et des frais de double résidence: 20 %.'
Au visa des articles L.242-1 du code de la sécurité sociale et 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'arrêté du 25 juillet 2005, de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, ensemble les articles 14 du décret n°59-1489 du 22 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, et 1 et 21 de l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (19 mai 2017, n°15-28.777) a jugé que:
* 'en application de l'alinéa 3 de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 renvoie, pour la détermination des professions pouvant bénéficier, pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, d'une déduction forfaitaire spécifique, à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, lequel fixe une liste de professions, dont les casinos et cercles, ayant droit à une déduction supplémentaire pour frais professionnels et le taux applicable',
* 'l'article 1er de l'arrêté du 14 mai 2007 définit le casino comme un établissement comportant trois activités distinctes, l'animation, la restauration et le jeu, réunies sous une direction unique',
* 'selon les articles 14 du décret du 22 décembre 1959 et 21 de l'arrêté du 14 mai 2007, toute personne, pour accéder aux salles de jeux de hasard où tous les jeux autorisés peuvent être exploités, doit justifier de son identité à leur entrée, l'accès du public aux autres salles de l'établissement étant libre',
* 'il se déduit de la combinaison de ces textes que les personnels de casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs, et affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard'.
Cette jurisprudence a été reprise par la deuxième chambre civile dans son arrêt du 12 octobre 2017 (2e Civ., n°15-26.903) en considérant que les personnels de casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs, et affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté, lors du contrôle des déclarations annuelles de données sociales, que l'employeur a fait bénéficier la déduction forfaitaire spécifique à deux salariés:
- responsable techn. contrôle [13],
- adjoint responsable technicien [13].
Tout en indiquant que la lettre collective de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale n°2011-0111 du 7 juin 2011 considère que pour 5 catégories de poste (contrôleurs aux entrées, techniciens de maintenance et mécaniciens des machines à sous, caissiers et/ou coffriers, valet de pied et hôtesses, membres du comité de direction) il pourra être admis à titre de tolérance l'application de la déduction forfaitaire spécifique, il a considéré que ces emplois:
- ne figurent pas sur la liste de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000,
- n'ont pas fait l'objet d'une décision spéciale expresse de la direction de la législation fiscale ou de la direction de la sécurité sociale avant le 1er janvier 2001,
- ne font pas partie des 5 catégories de poste sur lesquels il pourra être admis à titre de tolérance l'application de la déduction forfaitaire spécifique,
en retenant que:
- ces postes couvrent celui du cadre responsable ainsi que celui d'un adjoint,
- ces emplois ne peuvent être confondus avec ceux de technicien de maintenance et mécanicien de [13] au sens de l'article 67-27 de l'arrêté du 14 mai 2007,
et a réintégré dans l'assiette des cotisations le montant de la déduction forfaitaire spécifique
à 8% appliquée à tort.
La cour rappelle qu'une lettre circulaire comme une tolérance administrative sont dépourvues de caractère normatif. Les instructions administratives sont en effet dépourvues de force obligatoire et ne peuvent restreindre les droits que les organismes tiennent de la loi.
Faute pour la cotisante d'établir que les attributions de ces deux salariés les conduisent à supporter des frais de représentation et de veillée ou de double résidence (condition posée l'ancien article 5 de l'annexe IV du code général des impôts) et que pour l'exercice de leur activité professionnelle, ils sont affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard, il est exact que ces deux salariés ne remplissaient pas les conditions permettant de leur appliquer la déduction forfaitaire spécifique, ce qui rend le redressement justifié.
La cour valide en conséquence ce chef de redressement pour son entier montant soit 5 917 euros.
2.3- sur le chef de redressement n°9: déduction forfaitaire spécifique - absence du salarié d'un montant total de 3 970 euros:
Exposé des moyens des parties:
L'URSSAF conteste l'annulation de ce chef de redressement par les premiers juges qui ont retenu que la déduction forfaitaire spécifique s'apprécie en rapport avec la profession exercée par les salariés sur une base forfaitaire à partir d'une option annuelle définie pour chacun des salariés et que le redressement ne porte pas sur des salariés autres que ceux affectés aux salles de jeux et aux services annexes.
Elle argue que les frais de représentation correspondent aux frais liés au port d'une tenue vestimentaire imposée par l'employer et à son entretien, que les frais de veillée correspondent aux frais découlant des horaires tardifs du salarié pour soutenir que le salarié ne les supporte pas lorsqu'il est absent tout le mois et n'expose aucun frais supplémentaire au titre de son activité, et que la déduction forfaitaire spécifique ne doit pas être appliquée ce qui justifie ce chef de redressement.
La cotisante argue que lors des précédents contrôles l'URSSAF n'avait pas notifié cette règle pour soutenir que le redressement doit être annulé. Elle ajoute que la déduction forfaitaire spécifique appliquée aux frais de représentation et de veillée est forfaitaire et concerne tous types de frais potentiellement réalisés en lien avec la présence de la clientèle notamment, impliquant pour les frais de représentation le maintien de l'entretien et pour les frais de veillée, la nécessité de posséder un véhicule personnel.
Réponse de la cour:
Selon les alinéas 4 et 5 de l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, modifié, l'assiette des cotisations est constituée par le montant global des rémunérations, indemnités, primes, gratifications ou autres acquises aux intéressés, y compris, le cas échéant, les indemnités versées au travailleur salarié ou assimilé à titre de remboursement des frais professionnels, à l'exception de celles versées, d'une part, à certaines professions bénéficiant d'une déduction forfaitaire spécifique dont le montant est notoirement inférieur à la réalité des frais professionnels exposés par le travailleur salarié ou assimilé et, d'autre part, de celles versées au titre d'avantages venant en contrepartie de contraintes professionnelles particulièrement lourdes. La liste limitative de ces exceptions est jointe en annexe du présent arrêté.
L'application de ces dispositions s'entend sans préjudice des dispositions du sixième alinéa de l'article R. 242-1 du code de la sécurité sociale.
S'il est tout à fait exact que la déduction forfaitaire spécifique a un caractère forfaitaire, pour autant elle a pour objet de compenser des frais que les contraintes spécifiques liées aux emplois de certains salariés génèrent et dont le montant est considéré notoirement supérieur aux frais professionnels pris en considérations par les autres dispositions de l'arrêté du 20 décembre 2002.
Par ailleurs les frais professionnels sont intrinsèquement liés à l'exercice effectif de l'activité professionnelle du salarié.
Il s'ensuit que le bénéfice de la déduction pour frais professionnels, à l'instar des autres frais professionnels, est lié non à l'activité de l'employeur mais à celle exercée par chaque salarié qui le contraint à exposer de tels frais, alors qu'en cas d'absence pendant tout le mois, il ne peut être considéré que le salarié a pu être amener à exposer des frais forfaitairement pris en compte, en franchise de cotisations sociales, pour l'exercice de son emploi.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté que la déduction forfaitaire spécifique a été maintenue pour des salariés absents tout le mois.
Il a considéré qu'ils n'étaient plus en mesure d'engager des frais supplémentaires au titre de leurs activités pendant ce mois et que la déduction forfaitaire spécifique ne pouvait pas être appliquée.
Il a réintégré dans l'assiette des cotisations le montant de la déduction forfaitaire spécifique
appliquée à tort.
Ce chef de redressement est justifié et la circonstance que lors du précédent contrôle, il n'y a eu ni observation pour l'avenir, ni redressement pour ce motif est inopérante à rendre le redressement infondé.
La cour valide en conséquence ce chef de redressement pour son entier montant soit 3 970 euros.
Compte tenu de l'annulation par la commission de recours amiable du chef de redressement n°6 après l'émission de la mise en demeure, et précédemment de l'annulation du chef de reversement n°3 par l'inspecteur du recouvrement dans sa réponse datée du 24/09/2018 aux observations de la cotisante, et des chefs de redressement que la cour vient de valider, la cotisante est redevable en cotisations et contributions résultant du contrôle de la somme totale de 71 809 euros, ainsi détaillée:
* chef de redressement n°1: 365 euros,
* avoir point 2: - 11 euros,
* chef de redressement n°4: 12 654 euros,
* chef de redressement n°5: 28 044 euros,
* chef de redressement n°7: 156 euros,
* chef de redressement n°8: 5 917 euros,
* chef de redressement n°9: 3 970 euros,
* chef de redressement n°10: 1 325 euros,
* chef de redressement n°11: 5 103 euros,
* chef de redressement n°12: 221 euros,
* chef de redressement n°13: 3 530 euros,
* chef de redressement n°14: 3 959 euros,
* chef de redressement n°15: 2 967 euros,
* chef de redressement n°16: 3 403 euros,
* chef de redressement n°17: 206 euros.
La cour la condamne au paiement de cette somme, sur laquelle l'URSSAF devra procéder à un nouveau calcul des majorations de retard et à celle de 2 847 euros au titre des majorations pour absence de mise en conformité.
Succombant principalement en son appel, la cotisante doit être condamnée aux dépens y afférents et ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF les frais exposés pour sa défense en cause d'appel.
La cotisante doit en conséquence être condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
- Réforme le jugement en ce qu'il a annulé les chef de redressements n°8 et 9, et a condamné la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros pour absence de mise en conformité,
- Le confirme pour le surplus
Statuant à nouveau des chefs réformés et y ajoutant,
- Déboute la société [10] de l'ensemble de ses prétentions et demandes,
- Valide le chef de redressement n°5 (pourboire M.A.S dans les établissements de jeux) pour son entier montant de 28 044 euros et la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros,
- Condamne la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 71 809 euros au titre ces cotisations et contributions redressées et celle de 2 847 euros au titre des majorations pour absence de mise en conformité,
- Dit que l'URSSAF doit procéder à un nouveau calcul des majorations de retard,
- Déboute la société [10] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société [10] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
Chambre 4-8b
ARRÊT AU FOND
DU 12 SEPTEMBRE 2025
N°2025/353
Rôle N° RG 23/12001 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL52G
[18]
S.A.S. [9]
C/
S.A.S. [10]
[18] [Localité 14]
Copie exécutoire délivrée
le 12 septembre 2025:
à :
[18]
Me Jean-jacques TOUATI,
avocat au barreau de PARIS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Pole social du TJ de [Localité 16] en date du 25 Août 2023, enregistré au répertoire général sous le n° 20/01247.
APPELANTES
[18], demeurant [Adresse 6]
représenté par Mme [C] [X] en vertu d'un pouvoir spécial
S.A.S. [10], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Jean-jacques TOUATI, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
S.A.S. [10], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jean-jacques TOUATI, avocat au barreau de PARIS
[18] [Localité 14], demeurant [Adresse 5]
représenté par Mme [C] [X] en vertu d'un pouvoir spécial
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre
Madame Sylvie CACHET, Présidente de chambre
Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Corinne AUGUSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2025
Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Corinne AUGUSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*
EXPOSÉ DU LITIGE
A l'issue d'un contrôle portant sur l'app1ication des législations de sécurité sociale et d'a1locations familiales, d'assurance chômage et garantie des salaires, et la période du 1er janvier 2015 au 31décembre 2017, au sein de la société [10] [la cotisante], [Adresse 4] [l'URSSAF] lui a notifié une lettre d'observations datée du 1er août 2018, comportant 16 chefs de redressement (outre deux avoirs) portant rappel de cotisations et contributions pour un montant total de 85 395 euros ainsi que des majorations de redressement pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 847 euros.
Après échange d'observations, dans le cadre desquelles l'inspecteur de recouvrement a maintenu les chefs de redressement n°6, 7, 8 et 9 et annulé le chef de redressement n°3 (d'un montant de 1 688 euros), l'URSSAF a notifié à la cotisante une mise en demeure datée du 9 novembre 2018 d'un montant de 94 462 euros (dont 83 707 euros de cotisations et contributions, 2 847 euros de majorations de redressement et 7 008 euros majorations de retard).
Par décision du 30 septembre 2020, la commission de recours amiable a annulé le chef de redressement n°6 d'un montant de 12 060 euros et rejeté les contestations de la cotisante afférentes aux chefs de redressement n°5 et 9.
La cotisante a saisi le 10 décembre 2020 le pôle social d'un tribunal judiciaire.
Par jugement en date du 25 août 2023, le tribunal judiciaire de Toulon, pôle social, a:
* 'considéré' comme non contestés les chefs de redressements n°1, 2, 4, 7, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18,
* 'considéré comme annulés' les chefs de redressement n°3 et 6,
* 'considéré' comme fondé le chef de redressement n°5 pour son montant de 28 444 euros outre 2 804 euros de majorations de retard,
* 'considéré' comme non fondé le chef de redressement n°8 pour son entier montant de 5 917 euros,
* 'considéré' comme non fondé le chef de redressement n°9 pour son entier montant de 3 970 euros,
* condamné la cotisante à payer à l'URSSAF la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros de majorations pour absence de mise en conformité outre les majorations de retard à recalculer au titre de la mise en demeure du 9 novembre 2018,
* débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la cotisante aux dépens.
La cotisante en a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées recours par déclarations aux [15] en date des 14 septembre 2023 et 25 septembre 2023 enregistrés sous les références RG 23/12022 et 23/11707.
L'URSSAF en a également relevé appel par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 21 septembre 2023. Cette procédure a été enrôlée sous la référence RG 23/12001.
Par ordonnances de jonction en date des 6 octobre 2023 et 28 mai 2025 ces trois procédures ont été jointes sous la référence RG 13/12001.
Par conclusions remises par voie électronique le 22 juillet 2024, modifiées et soutenues à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la cotisante sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé les chefs de redressement n°8 et 9 et son infirmation en ce qu'il a jugé non contestés les chefs de redressements n°1, 2, 4, 7, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18, jugé fondé le chef de redressement n°5 et l'a condamnée au paiement de la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros de majorations pour absence de mise en conformité outre les majorations de retard à recalculer.
Elle demande à la cour:
* à titre principal, d'annuler la lettre d'observations et la mise en demeure ainsi que le redressement et le recouvrement,
* à titre subsidiaire, de juger le chef de redressement n°5 nul et subsidiairement toute majoration nulle,
* condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 3 000 euros pour la procédure de première instance et celle de 7 000 euros en cause d'appel, le tout sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions n°2 réceptionnées par le greffe le 16 juin 2025, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé fondé le chef de redressement n°5 pour son montant aussi que les majorations pour absence de mise en conformité y afférentes et son infirmation en ce qu'il a jugé non fondés les chefs de redressement n°8 et 9.
Elle demande à la cour de:
* condamner la cotisante au paiement de la somme de 82 404 euros 'au titre de la mise en demeure du 9 novembre 2018",
* condamner la cotisante au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
MOTIFS
1- sur l'annulation de la lettre d'observations et de la mise en demeure:
Exposé des moyens des parties:
La cotisante argue que la lettre d'observations est irrégulière pour avoir été envoyée selon une procédure d'anonymat en l'absence de mention de la qualité de l'agent qui se limite à indiquer son nom, au nom de l'URSSAF, et qu'aucun verso de la mise en demeure n'est produit par l'URSSAF prouvant sa notification. Elle argue en outre que la mise en demeure ne permet pas de connaître son auteur, son destinataire, son montant sa cause, sa nature, le délai de régularisation possible de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale pour soutenir qu'elle doit être annulée.
L'URSSAF réplique que la mise en demeure est régulière pour comporter toutes les mentions obligatoires qui sont la nature de la dette, le montant de celle-ci, son origine et la période à laquelle elle se rapporte, et qu'elle mentionne également les informations relatives au débiteur et au créancier, les nom et prénom de son directeur, ainsi que les voies et délais de recours.
Réponse de la cour:
1.1 - sur la régularité de la lettre d'observations:
Selon l'article R.243-59 III du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2017-1409 du 25/09/2017, à l'issue du contrôle (...) les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L.243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux (...) le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci (...)
Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L.243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.
(...)
En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, la lettre d'observations précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L.243-7-6. Le constat d'absence de mise en conformité est contresigné par le directeur de l'organisme effectuant le recouvrement.
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.
Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.
Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés.
En l'espèce, la lettre d'observations du 1er août 2018 mentionne en dernière page (54/54) qu'elle émane de M. [M] [N], inspecteur du recouvrement, et:
- en première page outre sa date:
* le nom de l'organisme: [Adresse 19],
* les coordonnées de l'inspecteur du recouvrement et de son secrétariat ainsi que l'adresse de correspondance de l'organisme,
* son objet: 'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires [7]',
* l'établissement contrôlé (sis [Adresse 2] à [Localité 11]), ses numéros de compte [17] et Siret, son numéro d'affiliation, la période vérifiée et la date de fin de contrôle,
- en page deux, comporte la liste des documents consultés et détaille par chef de redressement ou points examinés, les éléments de droit et constatations de l'inspecteur du recouvrement et pour chaque chef de redressement les modalités de calcul retenues,
- en dernière page le montant total du rappel de cotisations et contributions sociales, d'assurance chômage et d'AGS ainsi que le montant de la majoration de redressement pour absence de mise en conformité, la faculté pour la cotisante de faire part de ses observations par tout moyen donnant date certaine à leur réception, dans le délai de trente jours à dater de sa réception, ainsi que de la possibilité de se faire assister par un conseil de son choix.
Il s'ensuit que cette lettre d'observations est régulière en la forme et que la cotisante est mal fondée en son moyen d'annulation.
1.2 - sur la régularité de la mise en demeure:
Selon l'article R.244-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2016-941 du 8 juillet 2016, la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent, précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L.243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.
En l'espèce, la mise en demeure datée du 9 novembre 2018, précise au titre du motif du recouvrement "contrôle. Chefs de redressement notifiés par lettre d'observations du 01/08/18, article R.243-59 du code de la sécurité sociale", et mentionne que la nature des cotisations est "régime général".
Elle détaille pour chaque année civile 2016, 2017 et 2018 le montant des cotisations (en précisant "incluses contribution d'assurance chômage, cotisations [7]") ainsi que celui des majorations de redressement pour absence de mise en conformité et des majorations de retard.
Elle porte sur un montant total de 94 462 euros dont 83 707 euros en cotisations, 2 847 euros de majorations de redressement et 7 908 euros de majorations de retard.
Au verso, elle précise le délai d'un mois imparti à la cotisante à compter de sa réception pour s'acquitter du paiement ainsi que le délai de deux mois pour saisir la commission de recours amiable en contestation de cette mise en demeure.
La référence dans cette mise en demeure au contrôle et à la date de la lettre d'observations, laquelle détaille de façon complète et exhaustive, pour chaque chef de redressement à la fois les dispositions applicables, la nature et le montant des cotisations ou contributions concernées, par période annuelle, précise l'établissement concerné, étant observé que pour tous ces chefs de redressement, il est indiqué qu'ils concernent des cotisations et contributions dues au titre du régime général, ce qui constitue une motivation suffisante pour permettre à la cotisante de connaître la cause, la nature, les périodes des sommes réclamées.
Cette mise en demeure mentionne également émaner de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur avec ses coordonnées postales, le nom et l'adresse de la cotisante avec ses référence de compte [17], qu'elle émane du directeur de l'URSSAF comporte son paraphe et mentionne son prénom et son nom.
La cotisante ne peut donc utilement alléguer ne pas avoir été en mesure à réception de la mise en demeure d'avoir connaissance de la cause, de la nature, de la période comme du montant des sommes dont le paiement lui était demandé, ou de ne pas avoir connaissance de l'organisme comme de la qualité de la personne qui l'a émise pour celui-ci.
Elle est mal fondée en son moyen de nullité tiré de l'irrégularité de la mise en demeure.
2- sur le fond:
Par suite des appels croisés de la cotisante et de l'URSSAF, la cour est saisie des contestations afférentes aux chefs de redressement suivants:
- n°5: pourboire M.A.S dans les établissements de jeux, d'un montant total de 28 044 euros (années 2015, 2016 et 2017) ainsi que de la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros,
- n°8: déduction forfaitaire spécifique appliquée à tort, d'un montant total de 5 917 euros (années 2015, 2016, 2017),
- n°9: frais professionnels- déduction forfaitaire spécifique- absence du salarié, d'un montant total de 3 970 euros (années 2015, 20616 et 2017).
La cour rappelle que l'inspecteur du recouvrement a annulé dans sa réponse du 24 septembre 2018 aux observations de la cotisante le chef de redressement n°3 (d'un montant de 1 688 euros) et que postérieurement à la notification de la mise en demeure, la commission de recours amiable a annulé le chef de redressement n°6 d'un montant total de 12 060 euros, ces annulations étant définitivement acquises à la cotisante.
2.1- sur le chef de redressement n°5: pourboire M.A.S dans les établissements de jeux d'un montant total de 28 044 euros et la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros:
Exposé des moyens des parties:
La cotisante argue ne pas avoir connaissance de pourboires remis à ses salariés en salle de machines à sous et ainsi ne pas les centraliser pour soutenir que la jurisprudence invoquée par l'URSSAF n'est pas transposable.
Elle conteste en outre que les dispositions de l'article 18 du décret 59-1489 du 23 décembre 1959 modifié s'applique aux salariés des machines à sous, arguant en premier lieu qu'il ne s'agit pas d'un décret mais d'un arrêté, et en second lieu qu'à sa date les machines à sous n'existaient pas et que cet arrêté renvoie à la gestion des pourboires propres aux tables de jeux.
Elle conteste que la réglementation des jeux impose un mode de centralisation des pourboires aux machines à sous et que le chef caissier, qui selon l'URSSAF, tient un cahier de répartition
des pourboires, puisse être assimilé à un représentant de l'employeur, alors qu'il est un employé.
Elle conteste également la majoration pour absence de mise en conformité à la suite d'un précédent contrôle en arguant que la simple référence à l'article R.243-18 du code de la sécurité sociale est insuffisante et que le cotisant doit être pleinement informé, et non par renvoi, des conséquences financières du contrôle.
Se fondant sur les articles 1er et 2ème de l'arrêté du 28 mars 1956 fixant les modalités d'évaluation des pourboires en vue des cotisations de sécurité sociale ainsi que sur les articles L.242-1 alinéa 1 et R.242-5 devenu R.259-4 du code de la sécurité sociale, L.3244-1 et R.3244-1 du code du travail, et l'article 18 de l'arrêté du 23 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos pris en application du décret n°59-1489 du 22 décembre 1959, l'URSSAF lui oppose que
l'exploitation de la comptabilité et des réponses apportées par les interlocuteurs aux questions de l'inspecteur du recouvrement lui ont permis de constater que les salariés ont perçu des pourboires non soumis à cotisations et que seules les sommes données aux salariés des tables de jeux traditionnels ont été déclarées, rappelant qu'en application de l'article L.243-7 du code de la sécurité sociale les constats établis par l'inspecter font foi jusqu'à preuve contraire.
Elle argue que les pourboires sont centralisés par l'employeur ou ses représentants (chef caissier) et répartis mensuellement entre certains salariés par le chef caissier qui fixe leur montant individuel et que si le cahier de répartition des pourboires n'a pas été communiqué lors du contrôle, l'audition d'un salarié, en présence du chef d'entreprise, pendant la visite de l'établissement a permis de constater que le montant des pourboires net est de 80 euros par mois et concerne 15 salariés.
Elle argue également que la lecture des procès-verbaux des réunions des délégués du personnel par l'inspecteur du recouvrement lors du contrôle confirme ce système de répartition de pourboires non déclarés pour soutenir qu'en l'absence de production du registre de répartition ou de tout autre élément probant permettant l'évaluation des pourboires versés au personnel des machines à sous et des services périphériques, la fixation forfaitaire de l'assiette des cotisations et contributions sociales est justifiée.
Réponse de la cour:
Par application des dispositions de l'article L.242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à cotisations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entreprise d'un tiers à titre de pourboire.
Selon l'article L.3244-1 du code du travail, dans tous les établissements commerciaux où existe la pratique du pourboire, toutes les perceptions faites "pour le service" par l'employeur sous forme de pourcentage obligatoirement ajouté aux notes des clients ou autrement, ainsi que toutes sommes remises volontairement par les clients pour le service entre les mains de l'employeur, ou centralisées par lui, sont intégralement versées au personnel en contact avec la clientèle et à qui celle-ci avait coutume de les remettre directement.
L'article R.3244-1 du code du travail fait obligation à l'employeur de justifier de l'encaissement et de la remise aux salariés des pourboires.
Selon l'article 18 de l'arrêté du 23 décembre 1959 (modifié par l'arrêté du 29 octobre 2010), les employés des salles de jeux ne sont autorisés à accepter les pourboires qui peuvent leur être offerts par les joueurs qu'en vertu d'une simple tolérance, toujours révocable en cas d'abus. Les pourboires doivent être immédiatement versés dans une tirelire par celui qui les reçoit: aucun employé ne peut en détenir par devers lui tout ou partie. Ils sont comptabilisés chaque jour dans un registre modèle 6.
Les modalités de répartition des pourboires sont déterminées librement entre employeurs et employés en dehors de toute intervention de l'administration. Pourvu qu'il y ait accord préalable entre les parties, que cet accord soit constaté d'une manière explicite dans le contrat d'engagement *]contrat de travail[* et que les droits et obligations de chacun y soient clairement spécifiés, toutes les combinaisons sont admises, à la seule exception de celles qui tendraient à détourner une partie des pourboires au profit, soit de l'établissement lui-même, soit du directeur ou d'un membre du comité de direction soit d'une personne qui ne serait pas liée à l'établissement par un contrat d'engagement régulier et constaté par écrit.
Les contestations entre employeurs et employés auxquelles pourrait donner lieu l'attribution des pourboires sont du ressort exclusif de la juridiction de droit commun.
Un compte "pourboires" est ouvert au grand livre pour la constatation chaque jour du montant intégral des pourboires reçus et du total des sommes versées aux employés à ce titre. Il fonctionne dans les conditions fixées par l'arrêté interministériel du 27 février 1984 relatif à la comptabilité générale des casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques.
S'il résulte de ces dispositions, que la réglementation du secteur des machines à sous ne prévoit pas pour les salariés affectés aux salles de jeux dans lesquelles ces machines sont installées la tenue de registre spécifique pour les pourboires, pour autant le code du travail fait obligation à l'employeur d'une part de justifier de l'encaissement des pourboires et de la remise aux salariés, ce qui implique que les pourboires doivent être recensés et centralisés par l'employeur et d'autre part qu'ils doivent être répartis entre les différents salariés en contact avec la clientèle.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a considéré que l'exploitation de la comptabilité et les réponses apportées par ses interlocuteurs lors du contrôle permettent d'établir que les salariés de la société ont reçu des pourboires qui n'ont pas été soumis aux cotisations de sécurité sociale durant les années 2015 à 2017 inclus et que seules les sommes données aux salariés des tables de jeux traditionnels font l'objet d'une réintégration dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.
Il a constaté que:
- les pourboires donnés par les clients des machines à sous ne font pas l'objet d'une déclaration, bien que centralisés par le chef caissier, répartis mensuellement entre certains salariés désignés par le responsable qui fixe leur montant individuel,
- le cahier de répartition des pourboires tenu par le chef caisse ne lui a pas été communiqué,
- l'audition d'un salarié, en présence du chef d'entreprise, pendant le contrôle, lui a permis de 'constater' que le montant des pourboires nets est de 80 euros par mois et concerne 15 salariés,
- l'examen des procès-verbaux des délégués du personnel indique que ce système de répartition des pourboires non déclarés existe.
En l'absence de communication des informations permettant l'établissement exact de la correction de l'assiette des cotisations sur les pourboires centralisés par l'employeur et reversés aux salariés mais non déclarés, l'inspecteur du recouvrement a procédé à une taxation forfaitaire au visa de l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale en retenant une base annuelle de 80 euros nets par mois multiplié par 15 salariés, recalculée en brut.
La cotisante ne s'explique pas sur son refus de communication du cahier de répartition des pourboires et ne contredit pas davantage les éléments tirés par l'inspecteur du recouvrement des déclarations d'un salarié en présence de l'employeur confirmant la pratique de pourboires d'un montant de 80 euros mensuel distribués à 15 salariés affectés en salle des machines à sous.
Il résulte de la lettre d'observations datée du 4 mars 2014, portant sur le contrôle de la cotisante et sur la période du 01/01/2011 au 31/12/2012, qu'elle a déjà fait objet d'un chef de redressement au même titre (numéro 4, au titre des années 2011 et 2012) dans le cadre duquel il a été souligné que lors du contrôle antérieur elle avait fait l'objet d'une observation pour l'avenir.
Selon l'article L.243-7-6 alinéa 1 du code de la sécurité sociale, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l'issue d'un contrôle réalisé en application de l'article L.243-7 est majoré de 10 % en cas de constat d'absence de mise en conformité. Un tel constat est dressé lorsque l'employeur n'a pas pris en compte les observations notifiées lors d'un précédent contrôle, que ces observations aient donné lieu à redressement ou non.
Il est établi que la cotisante n'a tenu compte ni de l'observation pour l'avenir antérieure, ni ensuite du redressement notifié lors du contrôle suivant réalisé en 2014.
Il s'ensuit d'une part que le chef de redressement n°5 doit être validé pour son entier montant et d'autre part que la majoration pour absence de mise en conformité est également justifiée.
Ce chef de redressement est justifié pour son montant ainsi que la majoration pour absence de mise en conformité.
2.2- sur le chef de redressement n°8: déduction forfaitaire spécifique appliquée à tort d'un montant total de 5 917 euros:
Exposé des moyens des parties:
L'URSSAF conteste l'annulation de ce chef de redressement par les premiers juges qui ont retenu que la catégorie de personnel définie par l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts s'attache à la profession et non au niveau hiérarchique.
Elle argue que s'agissant des personnels des casinos de jeux, la déduction forfaitaire spécifique
est applicable exclusivement aux personnels affectés aux salles de jeux ainsi qu'aux services annexes réservés aux joueurs (bar, restauration...) qui justifient qu'ils supportent effectivement des frais de représentation et de veillée ou des frais de double résidence ou ces deux catégories de frais à la fois, et que dans ses arrêts 110329 du 21 décembre 1994, 21311 et 214848 du 21 mars 2001, le Conseil d'Etat a jugé que doivent être regardées comme affectés aux activités de casino les personnes exerçant effectivement leur activité dans les locaux spéciaux, distincts et séparés où sont autorisés les jeux mentionnés par décret, que leurs fonctions soient liées directement aux jeux ou qu'elles se rattachent aux services annexes proposés aux joueurs, pour soutenir que seuls les personnels affectés aux salles de jeux ou aux services annexes réservés aux joueurs ouvrent droit à la déduction forfaitaire spécifique.
Elle souligne que l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (19 mai 2017 n°15-28.777) et la 2ème chambre civile (12 octobre 2017, n°15-26.903) ont également jugé que les personnels des casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs et affectés exclusivement dans les salles de casino dédiées aux jeux de hasard.
Elle argue que les salariés occupant des postes de responsable technicien et d'adjoint technicien [12] ne supportent pas de frais de représentation et/ou de veillée et que le personnel d'encadrement n'assure pas la maintenance et n'est pas conduit à engager des frais supplémentaires à ce titre pour soutenir que ce chef de redressement est justifié.
La cotisante réplique que la lettre collective de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale n°2011-0111 du 7 juin 2011 renvoie à des catégories de poste et à des libellés de poste pour soutenir que les postes de responsable technique ou d'adjoint au responsable technique entrent dans la catégorie des techniciens et mécaniciens et figurent sur la liste de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts.
Réponse de la cour:
Selon l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005, les professions, prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif prévu aux articles précédents peuvent bénéficier d'une déduction forfaitaire spécifique. Cette déduction est, dans la limite de 7 600 euros par année civile, calculée selon les taux prévus à l'article 5 de l'annexe IV du code précité.
Sont au nombre des professions listées par l'ancien article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, pour lesquels est fixée la déduction supplémentaire pour frais professionnels, dans les conditions suivantes:
'[8]:
Personnel supportant des frais de représentation et de veillée: 8 %.
Personnel supportant des frais de double résidence: 12 %.
Personnel supportant à la fois des frais de représentation et de veillée et des frais de double résidence: 20 %.'
Au visa des articles L.242-1 du code de la sécurité sociale et 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'arrêté du 25 juillet 2005, de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, ensemble les articles 14 du décret n°59-1489 du 22 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, et 1 et 21 de l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (19 mai 2017, n°15-28.777) a jugé que:
* 'en application de l'alinéa 3 de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 renvoie, pour la détermination des professions pouvant bénéficier, pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, d'une déduction forfaitaire spécifique, à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, lequel fixe une liste de professions, dont les casinos et cercles, ayant droit à une déduction supplémentaire pour frais professionnels et le taux applicable',
* 'l'article 1er de l'arrêté du 14 mai 2007 définit le casino comme un établissement comportant trois activités distinctes, l'animation, la restauration et le jeu, réunies sous une direction unique',
* 'selon les articles 14 du décret du 22 décembre 1959 et 21 de l'arrêté du 14 mai 2007, toute personne, pour accéder aux salles de jeux de hasard où tous les jeux autorisés peuvent être exploités, doit justifier de son identité à leur entrée, l'accès du public aux autres salles de l'établissement étant libre',
* 'il se déduit de la combinaison de ces textes que les personnels de casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs, et affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard'.
Cette jurisprudence a été reprise par la deuxième chambre civile dans son arrêt du 12 octobre 2017 (2e Civ., n°15-26.903) en considérant que les personnels de casinos pour lesquels est autorisée une déduction forfaitaire spécifique sont ceux supportant des frais de représentation et de veillée ou de double résidence, exerçant une activité professionnelle consacrée à l'activité de jeu et aux services annexes destinés aux joueurs, et affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté, lors du contrôle des déclarations annuelles de données sociales, que l'employeur a fait bénéficier la déduction forfaitaire spécifique à deux salariés:
- responsable techn. contrôle [13],
- adjoint responsable technicien [13].
Tout en indiquant que la lettre collective de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale n°2011-0111 du 7 juin 2011 considère que pour 5 catégories de poste (contrôleurs aux entrées, techniciens de maintenance et mécaniciens des machines à sous, caissiers et/ou coffriers, valet de pied et hôtesses, membres du comité de direction) il pourra être admis à titre de tolérance l'application de la déduction forfaitaire spécifique, il a considéré que ces emplois:
- ne figurent pas sur la liste de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000,
- n'ont pas fait l'objet d'une décision spéciale expresse de la direction de la législation fiscale ou de la direction de la sécurité sociale avant le 1er janvier 2001,
- ne font pas partie des 5 catégories de poste sur lesquels il pourra être admis à titre de tolérance l'application de la déduction forfaitaire spécifique,
en retenant que:
- ces postes couvrent celui du cadre responsable ainsi que celui d'un adjoint,
- ces emplois ne peuvent être confondus avec ceux de technicien de maintenance et mécanicien de [13] au sens de l'article 67-27 de l'arrêté du 14 mai 2007,
et a réintégré dans l'assiette des cotisations le montant de la déduction forfaitaire spécifique
à 8% appliquée à tort.
La cour rappelle qu'une lettre circulaire comme une tolérance administrative sont dépourvues de caractère normatif. Les instructions administratives sont en effet dépourvues de force obligatoire et ne peuvent restreindre les droits que les organismes tiennent de la loi.
Faute pour la cotisante d'établir que les attributions de ces deux salariés les conduisent à supporter des frais de représentation et de veillée ou de double résidence (condition posée l'ancien article 5 de l'annexe IV du code général des impôts) et que pour l'exercice de leur activité professionnelle, ils sont affectés exclusivement dans les salles du casino dédiées aux jeux de hasard, il est exact que ces deux salariés ne remplissaient pas les conditions permettant de leur appliquer la déduction forfaitaire spécifique, ce qui rend le redressement justifié.
La cour valide en conséquence ce chef de redressement pour son entier montant soit 5 917 euros.
2.3- sur le chef de redressement n°9: déduction forfaitaire spécifique - absence du salarié d'un montant total de 3 970 euros:
Exposé des moyens des parties:
L'URSSAF conteste l'annulation de ce chef de redressement par les premiers juges qui ont retenu que la déduction forfaitaire spécifique s'apprécie en rapport avec la profession exercée par les salariés sur une base forfaitaire à partir d'une option annuelle définie pour chacun des salariés et que le redressement ne porte pas sur des salariés autres que ceux affectés aux salles de jeux et aux services annexes.
Elle argue que les frais de représentation correspondent aux frais liés au port d'une tenue vestimentaire imposée par l'employer et à son entretien, que les frais de veillée correspondent aux frais découlant des horaires tardifs du salarié pour soutenir que le salarié ne les supporte pas lorsqu'il est absent tout le mois et n'expose aucun frais supplémentaire au titre de son activité, et que la déduction forfaitaire spécifique ne doit pas être appliquée ce qui justifie ce chef de redressement.
La cotisante argue que lors des précédents contrôles l'URSSAF n'avait pas notifié cette règle pour soutenir que le redressement doit être annulé. Elle ajoute que la déduction forfaitaire spécifique appliquée aux frais de représentation et de veillée est forfaitaire et concerne tous types de frais potentiellement réalisés en lien avec la présence de la clientèle notamment, impliquant pour les frais de représentation le maintien de l'entretien et pour les frais de veillée, la nécessité de posséder un véhicule personnel.
Réponse de la cour:
Selon les alinéas 4 et 5 de l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, modifié, l'assiette des cotisations est constituée par le montant global des rémunérations, indemnités, primes, gratifications ou autres acquises aux intéressés, y compris, le cas échéant, les indemnités versées au travailleur salarié ou assimilé à titre de remboursement des frais professionnels, à l'exception de celles versées, d'une part, à certaines professions bénéficiant d'une déduction forfaitaire spécifique dont le montant est notoirement inférieur à la réalité des frais professionnels exposés par le travailleur salarié ou assimilé et, d'autre part, de celles versées au titre d'avantages venant en contrepartie de contraintes professionnelles particulièrement lourdes. La liste limitative de ces exceptions est jointe en annexe du présent arrêté.
L'application de ces dispositions s'entend sans préjudice des dispositions du sixième alinéa de l'article R. 242-1 du code de la sécurité sociale.
S'il est tout à fait exact que la déduction forfaitaire spécifique a un caractère forfaitaire, pour autant elle a pour objet de compenser des frais que les contraintes spécifiques liées aux emplois de certains salariés génèrent et dont le montant est considéré notoirement supérieur aux frais professionnels pris en considérations par les autres dispositions de l'arrêté du 20 décembre 2002.
Par ailleurs les frais professionnels sont intrinsèquement liés à l'exercice effectif de l'activité professionnelle du salarié.
Il s'ensuit que le bénéfice de la déduction pour frais professionnels, à l'instar des autres frais professionnels, est lié non à l'activité de l'employeur mais à celle exercée par chaque salarié qui le contraint à exposer de tels frais, alors qu'en cas d'absence pendant tout le mois, il ne peut être considéré que le salarié a pu être amener à exposer des frais forfaitairement pris en compte, en franchise de cotisations sociales, pour l'exercice de son emploi.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté que la déduction forfaitaire spécifique a été maintenue pour des salariés absents tout le mois.
Il a considéré qu'ils n'étaient plus en mesure d'engager des frais supplémentaires au titre de leurs activités pendant ce mois et que la déduction forfaitaire spécifique ne pouvait pas être appliquée.
Il a réintégré dans l'assiette des cotisations le montant de la déduction forfaitaire spécifique
appliquée à tort.
Ce chef de redressement est justifié et la circonstance que lors du précédent contrôle, il n'y a eu ni observation pour l'avenir, ni redressement pour ce motif est inopérante à rendre le redressement infondé.
La cour valide en conséquence ce chef de redressement pour son entier montant soit 3 970 euros.
Compte tenu de l'annulation par la commission de recours amiable du chef de redressement n°6 après l'émission de la mise en demeure, et précédemment de l'annulation du chef de reversement n°3 par l'inspecteur du recouvrement dans sa réponse datée du 24/09/2018 aux observations de la cotisante, et des chefs de redressement que la cour vient de valider, la cotisante est redevable en cotisations et contributions résultant du contrôle de la somme totale de 71 809 euros, ainsi détaillée:
* chef de redressement n°1: 365 euros,
* avoir point 2: - 11 euros,
* chef de redressement n°4: 12 654 euros,
* chef de redressement n°5: 28 044 euros,
* chef de redressement n°7: 156 euros,
* chef de redressement n°8: 5 917 euros,
* chef de redressement n°9: 3 970 euros,
* chef de redressement n°10: 1 325 euros,
* chef de redressement n°11: 5 103 euros,
* chef de redressement n°12: 221 euros,
* chef de redressement n°13: 3 530 euros,
* chef de redressement n°14: 3 959 euros,
* chef de redressement n°15: 2 967 euros,
* chef de redressement n°16: 3 403 euros,
* chef de redressement n°17: 206 euros.
La cour la condamne au paiement de cette somme, sur laquelle l'URSSAF devra procéder à un nouveau calcul des majorations de retard et à celle de 2 847 euros au titre des majorations pour absence de mise en conformité.
Succombant principalement en son appel, la cotisante doit être condamnée aux dépens y afférents et ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF les frais exposés pour sa défense en cause d'appel.
La cotisante doit en conséquence être condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
- Réforme le jugement en ce qu'il a annulé les chef de redressements n°8 et 9, et a condamné la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 61 757 euros de cotisations outre 2 847 euros pour absence de mise en conformité,
- Le confirme pour le surplus
Statuant à nouveau des chefs réformés et y ajoutant,
- Déboute la société [10] de l'ensemble de ses prétentions et demandes,
- Valide le chef de redressement n°5 (pourboire M.A.S dans les établissements de jeux) pour son entier montant de 28 044 euros et la majoration pour absence de mise en conformité d'un montant de 2 804 euros,
- Condamne la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 71 809 euros au titre ces cotisations et contributions redressées et celle de 2 847 euros au titre des majorations pour absence de mise en conformité,
- Dit que l'URSSAF doit procéder à un nouveau calcul des majorations de retard,
- Déboute la société [10] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société [10] à payer à l'[Adresse 19] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société [10] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE