CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 16 septembre 2025, n° 23/14205
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2025
(n° / 2025, 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/14205 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIEU2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 juillet 2023 -Tribunal Judiciaire de MELUN - RG n° 21/00454
APPELANTE
S.A.S. CLINIQUE DE [Localité 9] L'ERMITAGE, société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux domicilisé audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de MELUN sous le numéro 304 100 332,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Dominique NARDEUX de la SELARL LEXIALIS, avocat au barreau de MELUN,
Assistée de Me Mélanie MIGUEL DE SOUSA, avocate au barreau de MONTPELLIER,
INTIMÉE
LE GROUPEMENT DE COOPÉRATION SANITAIRE HAD RÉGION DE [Localité 8],
Situé [Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté et assisté de Me Thomas NOGRIS, avocat au barreau de PARIS, toque P370,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Constance LACHEZE dans le respect des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
La société par actions simplifiée Clinique [Localité 9] l'Ermitage est un établissement de santé privé implanté sur le site du centre hospitalier Marc Jacquet de [Localité 8] devenu le Groupe Hospitalier Sud Île-de-France (le GHSIF).
Le 21 mai 2016, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage, le [Adresse 5] et la clinique Les Trois Soleils se sont regroupés pour créer un groupement de coopération sanitaire de droit privé ayant pour objet une activité de soins d'hospitalisation à domicile, sous la dénomination HAD de la Région [Localité 8] (le Groupement), établissement de soins titulaire d'une autorisation d'activité de soins délivrée par l'Agence Régionale de Santé et régi par les articles L. 6133-7 et suivants et R 6133-1 et suivants du code de la santé publique et par sa convention constitutive.
En 2017-2018, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a fait l'objet d'un redressement judiciaire puis dans le cadre d'un plan de cession, d'une reprise par le groupe Doctegestio devenu le Groupe Avec. Elle a toutefois été maintenue en qualité de membre du Groupement.
Lors de l'assemblée générale ordinaire du 16 décembre 2019, le Groupement qui souhaitait se doter de nouveaux locaux administratifs a fait le choix de participer à un projet de construction du bâtiment Santépôle porté par le GHSIF aux côtés de l'EHPAD, de la crèche et de l'internat du GHSIF, et lors de l'assemblée qui s'est tenue le 12 juin 2020, il a approuvé les modalités de financement de la construction, et ce malgré le vote défavorable de la Clinique qui n'en a pas moins procédé au règlement de la quote-part qui lui était impartie.
Lors de l'assemblée générale du 23 octobre 2020, le centre hospitalier Marc Jacquet et la clinique Les Trois Soleils ont voté l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage du Groupement, reprochant principalement à cette dernière un défaut d'investissement matériel et humain et l'obstruction faite à un projet de construction de nouveaux locaux.
Par courrier du 17 novembre 2020, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a contesté cette décision d'exclusion et a demandé, à défaut de réintégration, la restitution de la somme de 618 876,32 euros, conformément aux stipulations de la convention constitutive du Groupement. La somme de 475 200 euros lui a été restituée le 23 novembre 2020.
Par acte du 13 janvier 2021, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage, considérant le caractère irrégulier et manifestement abusif de la décision d'exclusion adoptée, a fait assigner le Groupement, aux fins de voir prononcer la nullité de la décision adoptée par l'assemblée générale du 23 octobre 2020 relative à son exclusion.
Par jugement contradictoire du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Melun a débouté la Clinique [Localité 9] l'Ermitage de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à verser au GCS HAD Région de [Localité 8] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Les premiers juges ont en effet considéré que l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage était régulière en la forme (le courrier du 17 août 2020 ayant valeur de mise en demeure par interpellation suffisante et l'administrateur du GCS HAD disposant de la faculté de refuser la procédure de conciliation, de surcroît sollicitée tardivement).
Ils ont également dit l'exclusion régulière en son principe en considérant que les manquements reprochés à la Clinique [Localité 9] l'Ermitage étaient de nature à justifier son exclusion (le manquement à son obligation de loyauté pour défaut d'adressage des patients et par manque d'investissement de la Clinique à défaut de fourniture de moyens humains et matériels, le manquement à l'obligation de participer au fonctionnement du Groupement et le retard au financement des nouveaux locaux destinés à abriter le Groupement).
Tirant les conséquences de la régularité de l'exclusion, ils ont débouté la Clinique de sa demande de remboursement complémentaire de son compte courant d'associé, rejeté la demande d'indemnisation de son préjudice économique et rejeté la demande d'indemnisation de son préjudice moral.
Par déclaration du 8 août 2023, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a relevé appel de ce jugement.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14 novembre 2024, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage demande à la cour :
- de dire son appel recevable et bienfondé ;
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- statuant à nouveau, à titre principal, de prononcer la nullité de la décision adoptée par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] du 23 octobre 2020 relative à son exclusion, des délibérations subséquentes adoptées par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] du 23 octobre 2020 relative aux modalités de son exclusion et de l'ensemble des délibérations subséquentes adoptées par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] entre le 23 octobre 2020 et la date du jugement à intervenir ;
- d'ordonner au GCS HAD de prononcer la réintégration de la clinique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification du présent jugement ;
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse extraordinaire où la cour devait, tout en prononçant la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, ne pas ordonner au GCS de prononcer sa réintégration au sein du Groupement, de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser l'ensemble des sommes devant lui être restituées en application de la convention constitutive du GCS Région de [Localité 8], à savoir 618 876 euros, déduction à faire de la somme de 475 200 euros déjà remboursée, soit la somme de 143 676,32 euros ;
- de condamner le GCS à lui verser la somme de 1 223 886 euros en réparation du préjudice économique supporté par elle ;
- de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral supporté par elle ;
- à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour devait ne pas prononcer la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser l'ensemble des sommes devant lui être restituées en application de la convention constitutive du GCS Région de [Localité 8], à savoir 618 876 euros, déduction à faire de la somme de 475 200 euros déjà remboursée, soit la somme de 143 676,32 euros ;
- en tout état de cause, de condamner le GCS HAD Région de [Localité 8] à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner et aux entiers dépens.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 4 octobre 2024, le GCS HAD de la région de [Localité 8] demande à la cour de :
- à titre principal, de prononcer l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage ;
- à titre subsidiaire, de confirmer le jugement déféré ;
- à titre infiniment subsidiaire, de rejeter les demandes présentées par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage ;
- de condamner la Clinique [Localité 9] l'Ermitage à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'instruction a été clôturée le 19 novembre 2024.
SUR CE,
Sur la recevabilité de l'appel
Le Groupement soutient que l'appel est irrecevable car la société appelante ne conteste pas fondamentalement le contenu du jugement de première instance ni ne formule de moyen nouveau en violation de l'article 954 du code de procédure civile.
La Clinique fait valoir que ses conclusions reprennent chacun des motifs du jugement de première instance qui sont tous critiqués, au moyen d'arguments qui ont pour certains déjà été avancés en première instance dès lors qu'ils ont été mal interprétés par les premiers juges, respectant les prescriptions de ce texte.
Aux termes de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
L'article 563 du code de procédure civile dispose que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. Il en résulte notamment que l'appelant n'a pas obligation de faire valoir de moyens nouveaux qu'il n'aurait pas développés en première instance.
En l'espèce, les conclusions de la Clinique comportent un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé littéral dans leur dispositif des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.
Il n'est donc pas démontré de violation des dispositions de l'article 954 précitées contrairement à ce que soutient le Groupement.
L'appel est donc recevable.
Sur la demande d'annulation de la délibération du 23 octobre 2020
La Clinique fait valoir que la décision d'exclusion du 23 octobre 2020 est irrégulière comme étant contraire à la convention constitutive du Groupement en matière d'exclusion faute de mise en demeure régulière et de procédure de conciliation préalable. Elle prétend en second lieu qu'elle est mal fondée en droit et en fait.
- Sur la régularité formelle de la procédure d'exclusion décidée par délibération du 23 octobre 2020
La Clinique soutient :
- tout d'abord que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le courrier du 17 août 2020, malgré son intitulé (« mise en demeure préalable à l'exclusion »), ne constitue pas une mise en demeure en ce qu'il n'avait pas pour objet d'obtenir de sa part une quelconque exécution du contrat mais se bornait à lister les griefs que lui reprochait le Groupement sans lui demander d'y remédier ni lui laisser le temps de régulariser la situation, puis l'informait de son intention de réunir une assemblée générale en vue de son exclusion ;
- que le courrier du 10 septembre 2020, à supposer qu'il contienne une interpellation suffisante, ne permettait pas de remédier aux griefs avant la convocation du 5 octobre actant son exclusion à l'occasion de l'assemblée à venir du 23 octobre ;
- qu'en second lieu, l'irrégularité de la procédure d'exclusion découle du refus du Groupement de mettre en 'uvre la procédure de conciliation préalable prévue par la convention constitutive du Groupement, que la réunion du 23 septembre 2020 qui s'est tenue ne portait que sur la question du projet de construction de nouveaux locaux administratifs et sur son financement et non sur la procédure d'exclusion, qu'il appartenait au Groupement de convoquer une commission de conciliation dans le mois de la mise en demeure qui n'a jamais eu lieu ;
- qu'en définitive, elle n'a été informée d'une potentielle exclusion que par le courrier du 17 août 2020.
Le Groupement rétorque que la procédure d'exclusion du Groupement de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage est régulière ;
- que les conditions procédurales posées par le code de la santé publique et par la convention constitutive subordonnent la régularité d'une procédure d'expulsion au respect de trois exigences, une convocation par lettre recommandée avec accusé de réception, l'audition par l'assemblée générale et la motivation de la décision d'exclusion ; - que la mention d'une mise en demeure par l'article 2.1.2 est seulement relative à la sollicitation d'une conciliation mais ne saurait être interprétée comme une condition générale applicable de plein droit à toute procédure d'exclusion ;
- que subsidiairement, le courrier du 17 août 2020 constituait une interpellation suffisante, permettant à la Clinique d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue des obligations méconnues, qu'il n'existe aucune obligation générale de prévoir un délai pour remédier aux manquement dénoncés, qu'en tout état de cause, la Clinique a disposé de plus de deux mois pour le faire (jusqu'au 23 octobre 2020, date de l'AG litigieuse), qu'elle a répondu aux griefs par deux courriers, qu'elle a sollicité une commission de conciliation qu'elle a délibérément restreinte au sujet immobilier ;
- qu'à titre infiniment subsidiaire, seule une méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense de l'exclu justifie l'annulation de la décision d'exclusion ; que la société appelante a eu l'occasion d'apporter ses justifications sur les griefs qui lui étaient reprochés à plusieurs reprises : dans son courrier adressé le 27 août 2020 à l'administrateur, lors de la commission de conciliation du 23 septembre 2020 organisée à sa demande, par son courrier du 13 octobre 2020 par lequel elle indiquait contester les griefs formulés à son encontre, et puis enfin lors de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 ;
- que la tenue d'une commission de conciliation est facultative aux termes des stipulations de la convention ; qu'une commission de conciliation s'est tenue conformément à la demande de la Clinique ;
- qu'à titre subsidiaire, la demande de conciliation intervenue le 13 octobre 2020 est tardive de sorte que l'administrateur était fondé à la refuser.
Sur ce, la cour,
La procédure d'exclusion d'un membre d'un groupement de coopération sanitaire est encadrée par les dispositions les articles L. 6133-1 et suivants et R 6133-1 et suivants du code de la santé publique, qui prévoient le principe et certaines modalités de l'exclusion d'un membre du groupement.
L'article R. 6133-1 du code de la santé publique prévoit à cet égard que la convention constitutive du groupement de coopération sanitaire comporte notamment ['] 15° Les règles d'adhésion, de retrait et d'exclusion des membres, ainsi que les modalités selon lesquelles est entendu le représentant du membre à l'égard duquel une mesure d'exclusion est envisagée.
L'article R. 6133-7 III. du code de la santé publique dispose que lorsque le groupement comporte au moins trois membres, l'exclusion de l'un d'entre eux peut être prononcée par l'assemblée générale en cas de manquements aux obligations définies par la section 2 du présent chapitre, la convention constitutive ainsi que par les délibérations de l'assemblée générale. L'exclusion peut également être prononcée en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. L'exclusion ne peut être prononcée qu'après audition du représentant du membre concerné selon les modalités fixées par la convention constitutive.
Selon l'article R. 6133-26 du code de la santé publique, l'assemblée générale du groupement de coopération sanitaire est compétente pour régler les affaires intéressant le groupement et elle délibère notamment sur l'exclusion d'un membre sans que puissent participer au vote les représentants du membre dont l'exclusion est demandée, sous réserve que la mesure d'exclusion soit adoptée par un nombre de membres représentant au moins la moitié des droits des membres du groupement.
Au cas présent, la procédure d'exclusion est régie par l'article 2.1.2 dénommé « Exclusion d'un membre » de la convention constitutive du Groupement, qui stipule :
« Dès lors que le Groupement comporte trois membres au moins, la procédure peut être engagée.
L'exclusion peut être prononcée à l'encontre des membres en cas de manquements aux obligations définies par les textes applicables aux groupements de coopération sanitaire, par la présente convention constitutive, le règlement intérieur ainsi que par les délibérations de l'assemblée générale. Elle intervient également en cas de perte de la qualité au titre de laquelle le membre concerné a fait partie du Groupement.
L'exclusion doit être motivée et le membre concerné est entendu au préalable par l'assemblée générale, sur convocation par lettre RAR adressée par l'administrateur.
Le membre défaillant peut mettre en 'uvre la procédure de conciliation prévue à l'article 5.1 de la présente convention dans le mois qui suit la mise en demeure. A défaut de régularisation ou si la conciliation n'aboutit pas, l'exclusion est décidée par l'assemblée générale saisie par l'administrateur ».
Selon l'article 4.1.4, l'assemblée générale statue à la majorité des deux-tiers des droits des membres présents ou représentés en matière d'exclusion.
L'article 5.1 relatif à la conciliation stipule :
« Toute contestation qui pourrait s'élever pendant la durée du groupement ou de sa liquidation notamment entre les membres du Groupement ou entre le Groupement et son administrateur sera portée devant la juridiction compétente du siège social et jugée conformément aux lois et règlements en vigueur.
Toutefois, préalablement à toute action contentieuse, une procédure de conciliation définie par le règlement intérieur sera mise en place entre les parties concernées.
En particulier, l'une quelconque des parties souhaitant saisir le Tribunal d'une demande de dissolution judiciaire, ne pourra le faire qu'après avoir suivi ladite procédure. »
Le règlement intérieur du Groupement ne contient pas de dispositions spécifiques aux cas d'exclusion d'un de ses membres.
Il en résulte que l'exclusion est décidée par l'assemblée générale après une mise en demeure qui fait courir un délai d'un mois permettant la mise en 'uvre d'une conciliation, que la conciliation est laissée à la discrétion du membre défaillant et ne constitue pas un préalable obligatoire à la procédure d'exclusion, le renvoi à l'article 5.1 qui vise les situations de conflit donnant lieu à une action contentieuse étant limité à la « procédure de conciliation », donc à ses modalités de mise en 'uvre, et ne saurait en faire un préalable obligatoire.
Par courrier du 17 août 2020 que la Clinique ne conteste pas avoir reçu, dont l'objet était ainsi libellé : « Objet : mise en demeure préalable à exclusion », l'administrateur du Groupement indiquait à la Clinique qu'il envisageait d'inscrire son exclusion à l'ordre du jour de la prochaine assemblée, lui rappelant la possibilité de faire parvenir des observations écrites et d'être entendue lors de la réunion de l'assemblée. Ce courrier détaillait les griefs reprochés à la Clinique comme étant une absence de collaboration sur le plan médical, une défaillance en termes d'engagements humain et matériels au sein du Groupement et son attitude jugée dilatoire dans la mise en 'uvre du projet de construction de nouveaux locaux.
Dans ces conditions, le tribunal a exactement jugé que le courrier du 17 août constituait une interpellation suffisante pour que le membre concerné soit informé des griefs qui lui étaient reprochés et soit mis en mesure d'y répondre. L'inexécution de la convention constitutive qui était reprochée à la Clinique tenant aux manquements à l'obligation de loyauté et à la perte de confiance induite, elle apparaissait à ce stade définitive, si bien que contrairement à ce que soutient la Clinique, nul texte n'imposait au [6] de la mettre en demeure d'y remédier dans un certain délai, ce qui au demeurant ne la privait pas de la faculté d'agir en ce sens.
A partir de cette date, la Clinique disposait d'un délai d'un mois pour solliciter la mise en 'uvre d'une mesure de conciliation en application l'article 2.1.2 dénommé « Exclusion d'un membre » de la convention constitutive du Groupement.
Par courrier en réponse du 27 août 2020, la Clinique a contesté le caractère de mise en demeure du courrier du 17 août, a réitéré ses demandes d'explication et de communication relatives au projet de construction de nouveaux locaux et sollicité « sur ce point précis la mise en place d'une réunion de conciliation au sens de l'article 5.1 de la convention constitutive ». Le Groupement lui a répondu le 10 septembre en précisant notamment que son courrier du 17 août valait mise en demeure.
Une commission de conciliation s'est tenue le 23 septembre 2020 et n'a pas permis de résoudre le litige.
La mise en demeure du 17 août a ainsi mis la Clinique en mesure de demander l'organisation d'une conciliation, ce qu'elle a fait sur la question de la construction de nouveaux locaux et qui a permis de réunir la commission de conciliation avant l'envoi, le 5 octobre, des convocations à l'assemblée générale du 23 octobre.
L'organisation d'une conciliation à l'initiative du Groupement n'était nullement un préalable obligatoire à l'exclusion envisagée et ce dernier a valablement répondu à la demande de la Clinique en réunissant la commission de consolidation avec un ordre du jour conforme à ce qu'avait demandé cette dernière dans son courrier du 27 août.
Par ailleurs, la lettre de convocation à l'assemblée générale adressée en LRAR par l'administrateur comportait l'ordre du jour et un projet de texte des résolutions dont il ressortait sans ambiguïté que seraient discutées l'exclusion et les modalités de celle-ci. Etait joint à la convocation un rapport de l'administrateur du Groupement détaillant sur trois pages les griefs reprochés, ce à quoi la Clinique a répondu par courrier du 13 octobre 2020.
En outre, il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 que le rapport de l'administrateur a été lu et que la Clinique a été mise en mesure de répondre sur chacun des griefs soulevés.
L'appelante ne peut donc sérieusement prétendre que le principe du contradictoire n'a pas été respecté.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la procédure d'exclusion suivie par le Groupement est régulière.
- Sur le bien-fondé de la décision d'exclusion
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage soutient que son exclusion est abusive en raison du caractère infondé en droit et en fait des motifs sur lesquelles elle repose.
Le Groupement lui reproche en effet, après avoir souligné l'importance du « projet commun » figurant en préambule de la convention constitutive et précisé que les difficultés financières de la Clinique ne constituaient pas un motif d'exclusion retenu par l'assemblée générale :
- d'avoir adopté un comportement en contradiction avec les engagements prévus dans la convention constitutive, notamment l'obligation de loyauté vis-à-vis des autres membres du Groupement en ne lui adressant pas suffisamment de patients (en moyenne 1 ou 2 patients par an contre 20 à 25 par an dans des structures similaires, s'appuyant en cela sur les analyses du cabinet Altense) ;
- d'adopter un positionnement concurrentiel vis-à-vis de l'activité du Groupement, ainsi que l'ont révélé les propos du docteur [B], oncologue de la Clinique, au cours de l'assemblée générale du 16 décembre 2019, non démentis par M. [D] détenteur d'un pouvoir de représentation, et ce en violation de ses obligations de loyauté et de collaboration ;
- de ne pas s'être suffisamment investie humainement et matériellement, ne supportant aucune charge de mise à disposition de personnels sur les années 2018 et 2019 et le premier semestre 2020 ;
- de ne pas s'être engagée dans les instances de réflexion et de décision du Groupement, et ce en violation de l'obligation de participer aux décisions collectives prévue par la convention constitutive, faute d'avoir jamais proposé de candidats au poste d'administrateur et d'avoir été absente à deux comités de pilotage ;
- d'avoir délibérément fait obstruction au projet de construction de nouveaux locaux ;
- que la décision d'exclusion était donc parfaitement fondée.
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage fait valoir en réponse :
- qu'il ne peut lui être reproché l'absence de réponse aux appels de fonds par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage émis par l'administrateur du Groupement en 2017 et 2018, ayant versé la somme de 389 200 euros en juillet 2020 dans le délai qui lui était imparti, que ce grief n'était donc plus caractérisé au jour du vote de son exclusion ;
- que le grief tenant à l'insuffisance d'adressage de patients en introduisant la notion de concurrence à l'égard du Groupement, ce qui caractériserait selon l'intimé un manquement à son obligation de loyauté découlant de la convention constitutive, ne saurait prospérer en raison d'un principe fondamental du libre choix, par le patient, de son établissement de santé ; que le fait d'adresser des patients au Groupement ne constitue pas une obligation découlant de la convention constitutive ;
- qu'elle conteste le fait que son positionnement vis-à-vis de l'activité du Groupement aurait été révélé lors de l'assemblée générale du 16 décembre 2019 par les propos du docteur [B], oncologue en son sein, ce dernier ne disposant pas d'une délégation de pouvoirs ;
- que la convention ne prévoit aucune obligation d'engagement de moyens humains et matériels ;
- que le manque d'investissement allégué n'est pas prouvé et ne peut résulter de l'absence à seulement deux comités de pilotage en 5 ans ;
- qu'elle n'a jamais volontairement fait obstruction à la mise en 'uvre du projet de reconstruction des locaux administratifs du Groupement, qu'elle n'a fait que réclamer l'information préalable relative au projet qui lui était due en vertu de la convention constitutive du Groupement, qu'elle a contesté l'assemblée du 16 décembre 2019 qui a décidé du projet parce que cette assemblée était irrégulière et qu'elle a versé sa quote-part du coût du projet.
Sur ce, la cour,
A titre liminaire, il sera rappelé que l'exclusion de la Clinique n'est pas motivée par l'ouverture d'une procédure collective. Les reproches adressés par le Groupement à la Clinique résultent de manquements allégués aux obligations définies par la convention constitutive et par les délibérations de l'assemblée générale.
La convention liant les parties indique en préambule que ses membres sont regroupés pour et en adéquation avec la volonté des pouvoirs publics de développer des alternatives à l'hospitalisation complète, «mieux répondre aux besoins de la population dans le domaine de l'hospitalisation à domicile permettant des synergies médicales profitant au bassin de santé, générer des économies d'échelle en regroupant les activités afférentes à cette hospitalisation à domicile et créer une structure unique pour porter un projet commun ». Ladite structure avait pour objet d'exercer l'activité d'hospitalisation à domicile telle que définie à l'article R. 6121-4-1 du code de la santé publique, de détenir l'autorisation de soin mentionnée à l'article L. 6122-1 du même code, et « de permettre les interventions communes des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux exerçant dans les établissements membres ».
Ses membres se voient impartir l'obligation de participer aux décisions collectives et, pour toutes les activités contractuellement régies par le Groupement, l'obligation d'« observer scrupuleusement toutes les règles d'honneur et de probité (de loyauté, de non-détournement de patients dans le respect du libre choix de ce dernier, de confidentialité notamment) s'attachant à la déontologie d'une entreprise commune ».
(i) S'agissant de l'adressage de patients au Groupement, bien qu'il ne constitue pas une obligation figurant expressément dans la convention constitutive, il découle de la contribution au projet commun et de la nécessité de développer l'activité d'hospitalisation à domicile et s'inscrit donc dans le cadre de l'obligation de loyauté. Le Groupement fait justement valoir que le principe du libre de choix du patient ne fait pas obstacle à l'organisation entre des établissements de santé de filières de soins pour orienter les patients au mieux.
Quand bien même la Clinique ne l'aurait pas compris, cet impératif lui a été rappelé à plusieurs reprises. En effet, il ressort du procès-verbal de l'assemblée du 17 décembre 2018 que faute d'adressage de patients, le défaut de participation de la Clinique à l'activité d'hospitalisation à domicile lui avait été signalé comme un manquement susceptible de justifier une exclusion qui a finalement fait l'objet d'un vote défavorable. Lors de l'assemblée du 17 mai 2019, l'insuffisance d'adressage de patients avait encore été évoquée au titre des « difficultés que l'HAD rencontre pour créer un partenariat avec la Clinique » et la représentante de la Clinique ne niait pas la difficulté et les liens existants entre la Clinique et d'autres opérateurs de santé, faisant état du souhait de remédier à cet état de fait. Le comité de pilotage du 30 septembre 2019, auquel la Clinique ne s'est pas fait représenter, faisait encore état du défaut de respect de l'engagement de la Clinique à envoyer des patients à l'[7]. A la suite de l'assemblée générale du 16 décembre 2019 durant laquelle le docteur [B], nouvel oncologue de la Clinique, a clairement indiqué que l'[7] était perçue comme un potentiel concurrent sur l'activité de chimiothérapie, la Clinique a indiqué à l'occasion de la réunion de conciliation du 13 mai 2020 que les propos du docteur [B] ne constitueraient qu'une « maladresse » intervenue en dehors de toute directive de la direction et annoncé qu'elle pourra désormais participer à l'activité de l'HAD.
Il apparaît également qu'en toutes ces occasions la Clinique n'a jamais disconvenu de la nécessité d'adresser des patients au Groupement mais que dans les faits, elle ne s'est jamais livrée à de telles démarches.
En définitive, il ressort du dossier qu'aucun patient n'a été adressé en HAD auprès du Groupement en 2017, 2018 et qu'en 2019, un seul a été adressé sur trois patients hospitalisés en HAD en chimiothérapie à la Clinique. Il ressort des écritures de la Clinique qu'aucun patient n'a été adressé en 2020.
Les rapports du cabinet Altense Consulting montrent que bien qu'exerçant une activité de chimiothérapie particulièrement propice à cette modalité d'hospitalisation, la Clinique n'a pas pour politique d'adresser des patients en HAD, alors même que la probabilité que la Clinique n'ait eu aucun patient à adresser au [6] en HAD est de 1 sur 10 milliards.
En tout état de cause, le libre choix des patients ne peut pas à lui seul expliquer de tels chiffres et l'écart relevé avec les statistiques nationales également mentionné par le cabinet Altense.
Dans ces conditions, le manquement tenant à la violation de l'obligation de loyauté par défaut d'adressage de patients est établi ainsi que l'a jugé le tribunal.
(ii) En revanche, les seules déclarations de la représentante de la Clinique le 17 mai 2019 et celles du docteur [B] le 16 décembre 2019 suivant ne suffisent pas à caractériser une volonté avérée de l'appelante de se livrer à une concurrence contraire à ses engagements contractuels. Ces déclarations accréditent seulement la violation de l'obligation de loyauté tenant au défaut d'adressage de patients.
(iii) S'agissant de la mise à disposition de moyens humains et matériels, le Groupement prétend que la convention constitutive impose une participation de ses membres mais n'impose pas pour ce faire de sollicitation de sa part.
Il est constant que la participation de la Clinique en moyens humains s'est avérée inexistante jusqu'au premier semestre 2020 inclus, alors que du 1er janvier 2018 au 30 juin 2020, les autres membres du Groupement ont mis à la disposition de ce dernier une moyenne de 1,47 salariés équivalent temps plein pour la Clinique Les trois soleils et de 1,15 équivalent temps plein pour le Centre hospitalier Marc Jacquet.
Si l'article 3.2.2 de la convention constitutive institue seulement une faculté et non une obligation formelle de mettre à disposition de celui-ci les personnels médicaux et non médicaux correspondant quantitativement et qualitativement aux moyens humains qui sont nécessaires à la réalisation de son objet social et conformément aux budgets prévisionnels, les chiffres précités font ressortir le moindre investissement de la Clinique dans le projet commun par rapport à ses partenaires.
Les difficultés financières de cette dernière n'expliquent pas totalement le manque d'investissement dans le bon fonctionnement du Groupement par l'apport de moyens humains.
Mis en perspective avec le défaut d'adressage de patients, ce manque d'investissement permet de s'interroger sur la volonté de la Clinique de réellement participer au projet commun porté par le Groupement et de coopérer avec ses membres en vue de permettre les interventions communes des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux exerçant dans les établissements membres, étant considéré que la Clinique ne saurait de bonne foi se retrancher derrière le fait allégué que le Groupement ne lui a rien demandé pour valablement expliquer une telle abstention.
Sur point également, elle manque à son obligation de coopérer de manière loyale avec ses partenaires.
(iv) Le Groupement reproche ensuite à la Clinique de ne pas s'être engagée dans ses instances de réflexion et de décision, d'une part en ne se portant pas candidate au poste d'administrateur et d'autre part en étant absente à deux comités de pilotage ou en changeant souvent d'interlocuteur lorsqu'elle était présente.
Il est constant que la Clinique ne s'est pas portée candidate au poste d'administrateur qui est une fonction non rémunérée qui constitue pour son titulaire une charge de travail conséquente eu égard à l'activité croissante du Groupement. Si la Clinique soutient valablement avoir proposé la mise en place d'une administration tournante à l'échelle des trois membres du groupement, force est de constater que cette proposition est intervenue le 9 juillet 2020, alors que la mésentente entre les membres du Groupement concernant la construction de nouveaux locaux était déjà bien ancrée et que l'exclusion de la Clinique avait déjà été évoquée en assemblée générale avant de recevoir un vote défavorable le 17 décembre 2018 comme évoqué précédemment.
D'autre part, si l'absence de la Clinique à deux comités de pilotage est à elle-seule excusable prise isolément, elle doit être appréhendée dans le contexte de l'époque à la lumière des autres manquements ci-dessus relevés.
Ces deux faits conjugués contribuent ainsi à caractériser le manque d'investissement de la Clinique dans le bon fonctionnement du [6] qui est de nature à justifier l'exclusion de ce membre.
(v) Enfin, le Groupement reproche à la Clinique d'avoir délibérément fait obstruction au projet de construction de nouveaux locaux soutenant qu'elle a adopté un comportement obstructif s'agissant du vote du budget de ces travaux tantôt en contestant la validité de la délibération l'arrêtant, tantôt l'acceptant, de sorte qu'il n'a pas pu s'inscrire dans le temps imparti pour ce projet de construction mutualisé avec d'autres établissements et qui aurait été particulièrement intéressant sur le plan financier, que la Clinique a fini par payer sa quote-part sous la menace d'une exclusion, que son attitude a conduit à des reports et remaniements du projet de construction à des conditions moins favorables pour le Groupement et que le prétendu défaut de transmission des informations relatives au projet n'est qu'un prétexte, alors que le projet existait depuis le début de l'année 2018.
En effet, il ressort du dossier que la Clinique a voté contre lors de l'assemblée du 16 décembre 2019, la résolution ayant été adoptée à la majorité des deux tiers sur le vote des deux autres membres. Elle a contesté ladite résolution relative à l'adoption du budget prévisionnel pour 2020 incluant le financement du projet de construction dès le 26 décembre suivant, indiquant que son appartenance au Groupement ne pouvait avoir pour effet de la contraindre à participer au financement du projet de construction de nouveaux locaux jugé trop onéreux et trop imprécis, privilégiant l'alternative de la location pour accueillir les bureaux du Groupement. La Clinique réitérait son refus par courrier du 11 mai 2020 et ce, bien qu'elle n'ait cessé de manifester son intérêt pour une participation au Groupement et à ses projets. Lors de la commission de conciliation du 13 mai 2020, elle estimait que les perspectives financières du projet n'étaient pas suffisantes, exigeait un budget prévisionnel à 5 ans et envisageait de « cadrer cet investissement » seulement après 2020.
Lors de l'AG du 12 juin 2020, elle indiquait que le principe de la libération des fonds était acquis mais pas de la totalité en une seule fois et s'interrogeait sur la pertinence de bloquer la totalité des fonds, malgré le rappel par le GHSIF de la nécessité de sécuriser le projet. Les représentants de la Clinique finissaient par voter contre les modalités de financement du projet en faisant état de l'intention du groupe Doctegestio la détenant d'introduire une plainte pénale. Après réception de l'appel de fonds, elle maintenait sa contestation par courrier du 9 juillet 2020 tout en procédant au règlement des fonds.
Bien que le Groupement ne justifie pas d'un préjudice à ce titre, ces atermoiements dénotent toutefois un comportement d'opposition répété de la part de la Clinique et démontrent par conséquent un manquement complémentaire en termes de coopération ou de collaboration avec les autres membres du Groupement, alors que la Clinique manque à établir ses affirmations selon lesquelles le Groupement l'aurait systématiquement tenue à l'écart des informations pertinentes et de la prise de décisions importantes.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le maintien de la Clinique en tant que membre du [6] n'était plus opportun, jugé que la décision d'exclusion prise en assemblée générale le 23 octobre 2020 était justifiée et bien fondée et rejeté par voie de conséquence la demande de nullité de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 et des décisions subséquentes, ainsi que la demande de réintégration au sein du Groupement.
Dès lors, le jugement sera confirmé sur ce point.
- Sur les conséquences de l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage
A titre infiniment subsidiaire, et dans l'hypothèse où la Cour devait ne pas prononcer la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage demande la restitution de la somme de 143 676,32 euros, soit une somme de 618 876 euros après déduction de celle de 475 200 euros déjà remboursée. Elle estime en effet avoir droit au remboursement de l'intégralité des sommes qu'elle a versées au Groupement, en ce compris les fonds de fonctionnement en application de la version de l'article 3.1 adoptée par l'assemblée générale le 16 décembre 2019, et non uniquement le solde de son compte.
Le Groupement soutient que la nouvelle version n'est entrée en vigueur que le 18 avril 2020, date de naissance de la décision implicite d'approbation de la décision de l'assemblée générale du 16 décembre 2020 par le directeur général de l'[Localité 4], qu'elle ne permet pas le remboursement des fonds de fonctionnement pour les exercices antérieurs à 2019, que seules les participations exceptionnelles sont remboursables et qu'en tout état de cause, la Clinique ne justifie pas des montants réclamés.
Sur ce, la cour,
Il ressort du décompte produit par la Clinique qu'elle réclame le remboursement des versements ordinaires et exceptionnels qu'elle a opérés sur l'ensemble des exercices 2016 à 2020, autrement dit des fonds affectés aux dépenses de fonctionnement et de ceux résultant d'appels de fonds exceptionnels.
Il n'est pas discuté que l'intégralité des sommes relevant des appels de fonds exceptionnels lui a été remboursée.
Il est constant que jusqu'à la révision de la convention constitutive du groupement le 16 décembre 2019, seules les dépenses exceptionnelles étaient remboursables et que depuis lors, la révision intervenue permet aux membres de récupérer en sus les fonds affectés aux dépenses de fonctionnement.
La Clinique ne peut toutefois valablement se prévaloir du caractère rétroactif de l'avenant pour réclamer le remboursement des fonds affectés aux dépenses de fonctionnement au titre des exercices antérieurs à l'exercice 2019, la rétroactivité n'étant pas expressément prévue lors de l'adoption de la décision par l'assemblée générale du 16 décembre 2020 au cours de laquelle il a été précisé oralement que la modification des statuts sera applicable à l'exercice 2019 et ne sera pas rétroactive à la création du Groupement.
Les versements affectés aux dépenses de fonctionnement (et que la Clinique qualifie d'ordinaires) au titre des exercices 2016 à 2018 n'ont donc pas à être remboursés.
C'est donc à juste titre que le tribunal a débouté la Clinique de sa demande et il convient en conséquence de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les demandes indemnitaires
La Clinique demande à la cour qu'elle condamne le [6] à lui verser la somme de 1 223 886 euros en réparation du préjudice économique qu'elle a subi, correspondant à la quote-part des bénéfices prévisionnels du Groupement sur une période de 10 ans dont elle aurait été privée en raison de son exclusion illégitime.
Elle réclame de surcroît de la cour qu'elle condamne le Groupement à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi en raison de l'atteinte à son honneur et à sa réputation causée par son éviction injustifiée.
Son exclusion n'étant pas infondée, il n'est pas établi qu'il existe une faute à l'origine des préjudices allégués. La Clinique ne peut donc qu'être déboutée de ses demandes de ce chef.
Le jugement sera donc confirmé.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance. Elle ne peut de ce fait prétendre à l'octroi d'une somme au titre de l'article 700 de code de procédure civile.
Elle devra en outre supporter les frais irrépétibles engagés par le Groupement à concurrence de hauteur de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne la Clinique [Localité 9] l'Ermitage aux dépens d'appel ;
Condamne la Clinique [Localité 9] l'Ermitage à payer au groupement de coopération sanitaire HAD de la Région [Localité 8] (le GCS HAD) la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la Clinique [Localité 9] l'Ermitage de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2025
(n° / 2025, 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/14205 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIEU2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 juillet 2023 -Tribunal Judiciaire de MELUN - RG n° 21/00454
APPELANTE
S.A.S. CLINIQUE DE [Localité 9] L'ERMITAGE, société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux domicilisé audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de MELUN sous le numéro 304 100 332,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Dominique NARDEUX de la SELARL LEXIALIS, avocat au barreau de MELUN,
Assistée de Me Mélanie MIGUEL DE SOUSA, avocate au barreau de MONTPELLIER,
INTIMÉE
LE GROUPEMENT DE COOPÉRATION SANITAIRE HAD RÉGION DE [Localité 8],
Situé [Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté et assisté de Me Thomas NOGRIS, avocat au barreau de PARIS, toque P370,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Constance LACHEZE dans le respect des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
La société par actions simplifiée Clinique [Localité 9] l'Ermitage est un établissement de santé privé implanté sur le site du centre hospitalier Marc Jacquet de [Localité 8] devenu le Groupe Hospitalier Sud Île-de-France (le GHSIF).
Le 21 mai 2016, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage, le [Adresse 5] et la clinique Les Trois Soleils se sont regroupés pour créer un groupement de coopération sanitaire de droit privé ayant pour objet une activité de soins d'hospitalisation à domicile, sous la dénomination HAD de la Région [Localité 8] (le Groupement), établissement de soins titulaire d'une autorisation d'activité de soins délivrée par l'Agence Régionale de Santé et régi par les articles L. 6133-7 et suivants et R 6133-1 et suivants du code de la santé publique et par sa convention constitutive.
En 2017-2018, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a fait l'objet d'un redressement judiciaire puis dans le cadre d'un plan de cession, d'une reprise par le groupe Doctegestio devenu le Groupe Avec. Elle a toutefois été maintenue en qualité de membre du Groupement.
Lors de l'assemblée générale ordinaire du 16 décembre 2019, le Groupement qui souhaitait se doter de nouveaux locaux administratifs a fait le choix de participer à un projet de construction du bâtiment Santépôle porté par le GHSIF aux côtés de l'EHPAD, de la crèche et de l'internat du GHSIF, et lors de l'assemblée qui s'est tenue le 12 juin 2020, il a approuvé les modalités de financement de la construction, et ce malgré le vote défavorable de la Clinique qui n'en a pas moins procédé au règlement de la quote-part qui lui était impartie.
Lors de l'assemblée générale du 23 octobre 2020, le centre hospitalier Marc Jacquet et la clinique Les Trois Soleils ont voté l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage du Groupement, reprochant principalement à cette dernière un défaut d'investissement matériel et humain et l'obstruction faite à un projet de construction de nouveaux locaux.
Par courrier du 17 novembre 2020, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a contesté cette décision d'exclusion et a demandé, à défaut de réintégration, la restitution de la somme de 618 876,32 euros, conformément aux stipulations de la convention constitutive du Groupement. La somme de 475 200 euros lui a été restituée le 23 novembre 2020.
Par acte du 13 janvier 2021, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage, considérant le caractère irrégulier et manifestement abusif de la décision d'exclusion adoptée, a fait assigner le Groupement, aux fins de voir prononcer la nullité de la décision adoptée par l'assemblée générale du 23 octobre 2020 relative à son exclusion.
Par jugement contradictoire du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Melun a débouté la Clinique [Localité 9] l'Ermitage de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à verser au GCS HAD Région de [Localité 8] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Les premiers juges ont en effet considéré que l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage était régulière en la forme (le courrier du 17 août 2020 ayant valeur de mise en demeure par interpellation suffisante et l'administrateur du GCS HAD disposant de la faculté de refuser la procédure de conciliation, de surcroît sollicitée tardivement).
Ils ont également dit l'exclusion régulière en son principe en considérant que les manquements reprochés à la Clinique [Localité 9] l'Ermitage étaient de nature à justifier son exclusion (le manquement à son obligation de loyauté pour défaut d'adressage des patients et par manque d'investissement de la Clinique à défaut de fourniture de moyens humains et matériels, le manquement à l'obligation de participer au fonctionnement du Groupement et le retard au financement des nouveaux locaux destinés à abriter le Groupement).
Tirant les conséquences de la régularité de l'exclusion, ils ont débouté la Clinique de sa demande de remboursement complémentaire de son compte courant d'associé, rejeté la demande d'indemnisation de son préjudice économique et rejeté la demande d'indemnisation de son préjudice moral.
Par déclaration du 8 août 2023, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage a relevé appel de ce jugement.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14 novembre 2024, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage demande à la cour :
- de dire son appel recevable et bienfondé ;
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- statuant à nouveau, à titre principal, de prononcer la nullité de la décision adoptée par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] du 23 octobre 2020 relative à son exclusion, des délibérations subséquentes adoptées par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] du 23 octobre 2020 relative aux modalités de son exclusion et de l'ensemble des délibérations subséquentes adoptées par l'assemblée générale du GCS HAD Région de [Localité 8] entre le 23 octobre 2020 et la date du jugement à intervenir ;
- d'ordonner au GCS HAD de prononcer la réintégration de la clinique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification du présent jugement ;
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse extraordinaire où la cour devait, tout en prononçant la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, ne pas ordonner au GCS de prononcer sa réintégration au sein du Groupement, de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser l'ensemble des sommes devant lui être restituées en application de la convention constitutive du GCS Région de [Localité 8], à savoir 618 876 euros, déduction à faire de la somme de 475 200 euros déjà remboursée, soit la somme de 143 676,32 euros ;
- de condamner le GCS à lui verser la somme de 1 223 886 euros en réparation du préjudice économique supporté par elle ;
- de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral supporté par elle ;
- à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour devait ne pas prononcer la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, de condamner le GCS Région de [Localité 8] à lui verser l'ensemble des sommes devant lui être restituées en application de la convention constitutive du GCS Région de [Localité 8], à savoir 618 876 euros, déduction à faire de la somme de 475 200 euros déjà remboursée, soit la somme de 143 676,32 euros ;
- en tout état de cause, de condamner le GCS HAD Région de [Localité 8] à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner et aux entiers dépens.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 4 octobre 2024, le GCS HAD de la région de [Localité 8] demande à la cour de :
- à titre principal, de prononcer l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage ;
- à titre subsidiaire, de confirmer le jugement déféré ;
- à titre infiniment subsidiaire, de rejeter les demandes présentées par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage ;
- de condamner la Clinique [Localité 9] l'Ermitage à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'instruction a été clôturée le 19 novembre 2024.
SUR CE,
Sur la recevabilité de l'appel
Le Groupement soutient que l'appel est irrecevable car la société appelante ne conteste pas fondamentalement le contenu du jugement de première instance ni ne formule de moyen nouveau en violation de l'article 954 du code de procédure civile.
La Clinique fait valoir que ses conclusions reprennent chacun des motifs du jugement de première instance qui sont tous critiqués, au moyen d'arguments qui ont pour certains déjà été avancés en première instance dès lors qu'ils ont été mal interprétés par les premiers juges, respectant les prescriptions de ce texte.
Aux termes de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
L'article 563 du code de procédure civile dispose que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. Il en résulte notamment que l'appelant n'a pas obligation de faire valoir de moyens nouveaux qu'il n'aurait pas développés en première instance.
En l'espèce, les conclusions de la Clinique comportent un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé littéral dans leur dispositif des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.
Il n'est donc pas démontré de violation des dispositions de l'article 954 précitées contrairement à ce que soutient le Groupement.
L'appel est donc recevable.
Sur la demande d'annulation de la délibération du 23 octobre 2020
La Clinique fait valoir que la décision d'exclusion du 23 octobre 2020 est irrégulière comme étant contraire à la convention constitutive du Groupement en matière d'exclusion faute de mise en demeure régulière et de procédure de conciliation préalable. Elle prétend en second lieu qu'elle est mal fondée en droit et en fait.
- Sur la régularité formelle de la procédure d'exclusion décidée par délibération du 23 octobre 2020
La Clinique soutient :
- tout d'abord que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le courrier du 17 août 2020, malgré son intitulé (« mise en demeure préalable à l'exclusion »), ne constitue pas une mise en demeure en ce qu'il n'avait pas pour objet d'obtenir de sa part une quelconque exécution du contrat mais se bornait à lister les griefs que lui reprochait le Groupement sans lui demander d'y remédier ni lui laisser le temps de régulariser la situation, puis l'informait de son intention de réunir une assemblée générale en vue de son exclusion ;
- que le courrier du 10 septembre 2020, à supposer qu'il contienne une interpellation suffisante, ne permettait pas de remédier aux griefs avant la convocation du 5 octobre actant son exclusion à l'occasion de l'assemblée à venir du 23 octobre ;
- qu'en second lieu, l'irrégularité de la procédure d'exclusion découle du refus du Groupement de mettre en 'uvre la procédure de conciliation préalable prévue par la convention constitutive du Groupement, que la réunion du 23 septembre 2020 qui s'est tenue ne portait que sur la question du projet de construction de nouveaux locaux administratifs et sur son financement et non sur la procédure d'exclusion, qu'il appartenait au Groupement de convoquer une commission de conciliation dans le mois de la mise en demeure qui n'a jamais eu lieu ;
- qu'en définitive, elle n'a été informée d'une potentielle exclusion que par le courrier du 17 août 2020.
Le Groupement rétorque que la procédure d'exclusion du Groupement de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage est régulière ;
- que les conditions procédurales posées par le code de la santé publique et par la convention constitutive subordonnent la régularité d'une procédure d'expulsion au respect de trois exigences, une convocation par lettre recommandée avec accusé de réception, l'audition par l'assemblée générale et la motivation de la décision d'exclusion ; - que la mention d'une mise en demeure par l'article 2.1.2 est seulement relative à la sollicitation d'une conciliation mais ne saurait être interprétée comme une condition générale applicable de plein droit à toute procédure d'exclusion ;
- que subsidiairement, le courrier du 17 août 2020 constituait une interpellation suffisante, permettant à la Clinique d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue des obligations méconnues, qu'il n'existe aucune obligation générale de prévoir un délai pour remédier aux manquement dénoncés, qu'en tout état de cause, la Clinique a disposé de plus de deux mois pour le faire (jusqu'au 23 octobre 2020, date de l'AG litigieuse), qu'elle a répondu aux griefs par deux courriers, qu'elle a sollicité une commission de conciliation qu'elle a délibérément restreinte au sujet immobilier ;
- qu'à titre infiniment subsidiaire, seule une méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense de l'exclu justifie l'annulation de la décision d'exclusion ; que la société appelante a eu l'occasion d'apporter ses justifications sur les griefs qui lui étaient reprochés à plusieurs reprises : dans son courrier adressé le 27 août 2020 à l'administrateur, lors de la commission de conciliation du 23 septembre 2020 organisée à sa demande, par son courrier du 13 octobre 2020 par lequel elle indiquait contester les griefs formulés à son encontre, et puis enfin lors de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 ;
- que la tenue d'une commission de conciliation est facultative aux termes des stipulations de la convention ; qu'une commission de conciliation s'est tenue conformément à la demande de la Clinique ;
- qu'à titre subsidiaire, la demande de conciliation intervenue le 13 octobre 2020 est tardive de sorte que l'administrateur était fondé à la refuser.
Sur ce, la cour,
La procédure d'exclusion d'un membre d'un groupement de coopération sanitaire est encadrée par les dispositions les articles L. 6133-1 et suivants et R 6133-1 et suivants du code de la santé publique, qui prévoient le principe et certaines modalités de l'exclusion d'un membre du groupement.
L'article R. 6133-1 du code de la santé publique prévoit à cet égard que la convention constitutive du groupement de coopération sanitaire comporte notamment ['] 15° Les règles d'adhésion, de retrait et d'exclusion des membres, ainsi que les modalités selon lesquelles est entendu le représentant du membre à l'égard duquel une mesure d'exclusion est envisagée.
L'article R. 6133-7 III. du code de la santé publique dispose que lorsque le groupement comporte au moins trois membres, l'exclusion de l'un d'entre eux peut être prononcée par l'assemblée générale en cas de manquements aux obligations définies par la section 2 du présent chapitre, la convention constitutive ainsi que par les délibérations de l'assemblée générale. L'exclusion peut également être prononcée en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. L'exclusion ne peut être prononcée qu'après audition du représentant du membre concerné selon les modalités fixées par la convention constitutive.
Selon l'article R. 6133-26 du code de la santé publique, l'assemblée générale du groupement de coopération sanitaire est compétente pour régler les affaires intéressant le groupement et elle délibère notamment sur l'exclusion d'un membre sans que puissent participer au vote les représentants du membre dont l'exclusion est demandée, sous réserve que la mesure d'exclusion soit adoptée par un nombre de membres représentant au moins la moitié des droits des membres du groupement.
Au cas présent, la procédure d'exclusion est régie par l'article 2.1.2 dénommé « Exclusion d'un membre » de la convention constitutive du Groupement, qui stipule :
« Dès lors que le Groupement comporte trois membres au moins, la procédure peut être engagée.
L'exclusion peut être prononcée à l'encontre des membres en cas de manquements aux obligations définies par les textes applicables aux groupements de coopération sanitaire, par la présente convention constitutive, le règlement intérieur ainsi que par les délibérations de l'assemblée générale. Elle intervient également en cas de perte de la qualité au titre de laquelle le membre concerné a fait partie du Groupement.
L'exclusion doit être motivée et le membre concerné est entendu au préalable par l'assemblée générale, sur convocation par lettre RAR adressée par l'administrateur.
Le membre défaillant peut mettre en 'uvre la procédure de conciliation prévue à l'article 5.1 de la présente convention dans le mois qui suit la mise en demeure. A défaut de régularisation ou si la conciliation n'aboutit pas, l'exclusion est décidée par l'assemblée générale saisie par l'administrateur ».
Selon l'article 4.1.4, l'assemblée générale statue à la majorité des deux-tiers des droits des membres présents ou représentés en matière d'exclusion.
L'article 5.1 relatif à la conciliation stipule :
« Toute contestation qui pourrait s'élever pendant la durée du groupement ou de sa liquidation notamment entre les membres du Groupement ou entre le Groupement et son administrateur sera portée devant la juridiction compétente du siège social et jugée conformément aux lois et règlements en vigueur.
Toutefois, préalablement à toute action contentieuse, une procédure de conciliation définie par le règlement intérieur sera mise en place entre les parties concernées.
En particulier, l'une quelconque des parties souhaitant saisir le Tribunal d'une demande de dissolution judiciaire, ne pourra le faire qu'après avoir suivi ladite procédure. »
Le règlement intérieur du Groupement ne contient pas de dispositions spécifiques aux cas d'exclusion d'un de ses membres.
Il en résulte que l'exclusion est décidée par l'assemblée générale après une mise en demeure qui fait courir un délai d'un mois permettant la mise en 'uvre d'une conciliation, que la conciliation est laissée à la discrétion du membre défaillant et ne constitue pas un préalable obligatoire à la procédure d'exclusion, le renvoi à l'article 5.1 qui vise les situations de conflit donnant lieu à une action contentieuse étant limité à la « procédure de conciliation », donc à ses modalités de mise en 'uvre, et ne saurait en faire un préalable obligatoire.
Par courrier du 17 août 2020 que la Clinique ne conteste pas avoir reçu, dont l'objet était ainsi libellé : « Objet : mise en demeure préalable à exclusion », l'administrateur du Groupement indiquait à la Clinique qu'il envisageait d'inscrire son exclusion à l'ordre du jour de la prochaine assemblée, lui rappelant la possibilité de faire parvenir des observations écrites et d'être entendue lors de la réunion de l'assemblée. Ce courrier détaillait les griefs reprochés à la Clinique comme étant une absence de collaboration sur le plan médical, une défaillance en termes d'engagements humain et matériels au sein du Groupement et son attitude jugée dilatoire dans la mise en 'uvre du projet de construction de nouveaux locaux.
Dans ces conditions, le tribunal a exactement jugé que le courrier du 17 août constituait une interpellation suffisante pour que le membre concerné soit informé des griefs qui lui étaient reprochés et soit mis en mesure d'y répondre. L'inexécution de la convention constitutive qui était reprochée à la Clinique tenant aux manquements à l'obligation de loyauté et à la perte de confiance induite, elle apparaissait à ce stade définitive, si bien que contrairement à ce que soutient la Clinique, nul texte n'imposait au [6] de la mettre en demeure d'y remédier dans un certain délai, ce qui au demeurant ne la privait pas de la faculté d'agir en ce sens.
A partir de cette date, la Clinique disposait d'un délai d'un mois pour solliciter la mise en 'uvre d'une mesure de conciliation en application l'article 2.1.2 dénommé « Exclusion d'un membre » de la convention constitutive du Groupement.
Par courrier en réponse du 27 août 2020, la Clinique a contesté le caractère de mise en demeure du courrier du 17 août, a réitéré ses demandes d'explication et de communication relatives au projet de construction de nouveaux locaux et sollicité « sur ce point précis la mise en place d'une réunion de conciliation au sens de l'article 5.1 de la convention constitutive ». Le Groupement lui a répondu le 10 septembre en précisant notamment que son courrier du 17 août valait mise en demeure.
Une commission de conciliation s'est tenue le 23 septembre 2020 et n'a pas permis de résoudre le litige.
La mise en demeure du 17 août a ainsi mis la Clinique en mesure de demander l'organisation d'une conciliation, ce qu'elle a fait sur la question de la construction de nouveaux locaux et qui a permis de réunir la commission de conciliation avant l'envoi, le 5 octobre, des convocations à l'assemblée générale du 23 octobre.
L'organisation d'une conciliation à l'initiative du Groupement n'était nullement un préalable obligatoire à l'exclusion envisagée et ce dernier a valablement répondu à la demande de la Clinique en réunissant la commission de consolidation avec un ordre du jour conforme à ce qu'avait demandé cette dernière dans son courrier du 27 août.
Par ailleurs, la lettre de convocation à l'assemblée générale adressée en LRAR par l'administrateur comportait l'ordre du jour et un projet de texte des résolutions dont il ressortait sans ambiguïté que seraient discutées l'exclusion et les modalités de celle-ci. Etait joint à la convocation un rapport de l'administrateur du Groupement détaillant sur trois pages les griefs reprochés, ce à quoi la Clinique a répondu par courrier du 13 octobre 2020.
En outre, il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 que le rapport de l'administrateur a été lu et que la Clinique a été mise en mesure de répondre sur chacun des griefs soulevés.
L'appelante ne peut donc sérieusement prétendre que le principe du contradictoire n'a pas été respecté.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la procédure d'exclusion suivie par le Groupement est régulière.
- Sur le bien-fondé de la décision d'exclusion
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage soutient que son exclusion est abusive en raison du caractère infondé en droit et en fait des motifs sur lesquelles elle repose.
Le Groupement lui reproche en effet, après avoir souligné l'importance du « projet commun » figurant en préambule de la convention constitutive et précisé que les difficultés financières de la Clinique ne constituaient pas un motif d'exclusion retenu par l'assemblée générale :
- d'avoir adopté un comportement en contradiction avec les engagements prévus dans la convention constitutive, notamment l'obligation de loyauté vis-à-vis des autres membres du Groupement en ne lui adressant pas suffisamment de patients (en moyenne 1 ou 2 patients par an contre 20 à 25 par an dans des structures similaires, s'appuyant en cela sur les analyses du cabinet Altense) ;
- d'adopter un positionnement concurrentiel vis-à-vis de l'activité du Groupement, ainsi que l'ont révélé les propos du docteur [B], oncologue de la Clinique, au cours de l'assemblée générale du 16 décembre 2019, non démentis par M. [D] détenteur d'un pouvoir de représentation, et ce en violation de ses obligations de loyauté et de collaboration ;
- de ne pas s'être suffisamment investie humainement et matériellement, ne supportant aucune charge de mise à disposition de personnels sur les années 2018 et 2019 et le premier semestre 2020 ;
- de ne pas s'être engagée dans les instances de réflexion et de décision du Groupement, et ce en violation de l'obligation de participer aux décisions collectives prévue par la convention constitutive, faute d'avoir jamais proposé de candidats au poste d'administrateur et d'avoir été absente à deux comités de pilotage ;
- d'avoir délibérément fait obstruction au projet de construction de nouveaux locaux ;
- que la décision d'exclusion était donc parfaitement fondée.
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage fait valoir en réponse :
- qu'il ne peut lui être reproché l'absence de réponse aux appels de fonds par la Clinique [Localité 9] l'Ermitage émis par l'administrateur du Groupement en 2017 et 2018, ayant versé la somme de 389 200 euros en juillet 2020 dans le délai qui lui était imparti, que ce grief n'était donc plus caractérisé au jour du vote de son exclusion ;
- que le grief tenant à l'insuffisance d'adressage de patients en introduisant la notion de concurrence à l'égard du Groupement, ce qui caractériserait selon l'intimé un manquement à son obligation de loyauté découlant de la convention constitutive, ne saurait prospérer en raison d'un principe fondamental du libre choix, par le patient, de son établissement de santé ; que le fait d'adresser des patients au Groupement ne constitue pas une obligation découlant de la convention constitutive ;
- qu'elle conteste le fait que son positionnement vis-à-vis de l'activité du Groupement aurait été révélé lors de l'assemblée générale du 16 décembre 2019 par les propos du docteur [B], oncologue en son sein, ce dernier ne disposant pas d'une délégation de pouvoirs ;
- que la convention ne prévoit aucune obligation d'engagement de moyens humains et matériels ;
- que le manque d'investissement allégué n'est pas prouvé et ne peut résulter de l'absence à seulement deux comités de pilotage en 5 ans ;
- qu'elle n'a jamais volontairement fait obstruction à la mise en 'uvre du projet de reconstruction des locaux administratifs du Groupement, qu'elle n'a fait que réclamer l'information préalable relative au projet qui lui était due en vertu de la convention constitutive du Groupement, qu'elle a contesté l'assemblée du 16 décembre 2019 qui a décidé du projet parce que cette assemblée était irrégulière et qu'elle a versé sa quote-part du coût du projet.
Sur ce, la cour,
A titre liminaire, il sera rappelé que l'exclusion de la Clinique n'est pas motivée par l'ouverture d'une procédure collective. Les reproches adressés par le Groupement à la Clinique résultent de manquements allégués aux obligations définies par la convention constitutive et par les délibérations de l'assemblée générale.
La convention liant les parties indique en préambule que ses membres sont regroupés pour et en adéquation avec la volonté des pouvoirs publics de développer des alternatives à l'hospitalisation complète, «mieux répondre aux besoins de la population dans le domaine de l'hospitalisation à domicile permettant des synergies médicales profitant au bassin de santé, générer des économies d'échelle en regroupant les activités afférentes à cette hospitalisation à domicile et créer une structure unique pour porter un projet commun ». Ladite structure avait pour objet d'exercer l'activité d'hospitalisation à domicile telle que définie à l'article R. 6121-4-1 du code de la santé publique, de détenir l'autorisation de soin mentionnée à l'article L. 6122-1 du même code, et « de permettre les interventions communes des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux exerçant dans les établissements membres ».
Ses membres se voient impartir l'obligation de participer aux décisions collectives et, pour toutes les activités contractuellement régies par le Groupement, l'obligation d'« observer scrupuleusement toutes les règles d'honneur et de probité (de loyauté, de non-détournement de patients dans le respect du libre choix de ce dernier, de confidentialité notamment) s'attachant à la déontologie d'une entreprise commune ».
(i) S'agissant de l'adressage de patients au Groupement, bien qu'il ne constitue pas une obligation figurant expressément dans la convention constitutive, il découle de la contribution au projet commun et de la nécessité de développer l'activité d'hospitalisation à domicile et s'inscrit donc dans le cadre de l'obligation de loyauté. Le Groupement fait justement valoir que le principe du libre de choix du patient ne fait pas obstacle à l'organisation entre des établissements de santé de filières de soins pour orienter les patients au mieux.
Quand bien même la Clinique ne l'aurait pas compris, cet impératif lui a été rappelé à plusieurs reprises. En effet, il ressort du procès-verbal de l'assemblée du 17 décembre 2018 que faute d'adressage de patients, le défaut de participation de la Clinique à l'activité d'hospitalisation à domicile lui avait été signalé comme un manquement susceptible de justifier une exclusion qui a finalement fait l'objet d'un vote défavorable. Lors de l'assemblée du 17 mai 2019, l'insuffisance d'adressage de patients avait encore été évoquée au titre des « difficultés que l'HAD rencontre pour créer un partenariat avec la Clinique » et la représentante de la Clinique ne niait pas la difficulté et les liens existants entre la Clinique et d'autres opérateurs de santé, faisant état du souhait de remédier à cet état de fait. Le comité de pilotage du 30 septembre 2019, auquel la Clinique ne s'est pas fait représenter, faisait encore état du défaut de respect de l'engagement de la Clinique à envoyer des patients à l'[7]. A la suite de l'assemblée générale du 16 décembre 2019 durant laquelle le docteur [B], nouvel oncologue de la Clinique, a clairement indiqué que l'[7] était perçue comme un potentiel concurrent sur l'activité de chimiothérapie, la Clinique a indiqué à l'occasion de la réunion de conciliation du 13 mai 2020 que les propos du docteur [B] ne constitueraient qu'une « maladresse » intervenue en dehors de toute directive de la direction et annoncé qu'elle pourra désormais participer à l'activité de l'HAD.
Il apparaît également qu'en toutes ces occasions la Clinique n'a jamais disconvenu de la nécessité d'adresser des patients au Groupement mais que dans les faits, elle ne s'est jamais livrée à de telles démarches.
En définitive, il ressort du dossier qu'aucun patient n'a été adressé en HAD auprès du Groupement en 2017, 2018 et qu'en 2019, un seul a été adressé sur trois patients hospitalisés en HAD en chimiothérapie à la Clinique. Il ressort des écritures de la Clinique qu'aucun patient n'a été adressé en 2020.
Les rapports du cabinet Altense Consulting montrent que bien qu'exerçant une activité de chimiothérapie particulièrement propice à cette modalité d'hospitalisation, la Clinique n'a pas pour politique d'adresser des patients en HAD, alors même que la probabilité que la Clinique n'ait eu aucun patient à adresser au [6] en HAD est de 1 sur 10 milliards.
En tout état de cause, le libre choix des patients ne peut pas à lui seul expliquer de tels chiffres et l'écart relevé avec les statistiques nationales également mentionné par le cabinet Altense.
Dans ces conditions, le manquement tenant à la violation de l'obligation de loyauté par défaut d'adressage de patients est établi ainsi que l'a jugé le tribunal.
(ii) En revanche, les seules déclarations de la représentante de la Clinique le 17 mai 2019 et celles du docteur [B] le 16 décembre 2019 suivant ne suffisent pas à caractériser une volonté avérée de l'appelante de se livrer à une concurrence contraire à ses engagements contractuels. Ces déclarations accréditent seulement la violation de l'obligation de loyauté tenant au défaut d'adressage de patients.
(iii) S'agissant de la mise à disposition de moyens humains et matériels, le Groupement prétend que la convention constitutive impose une participation de ses membres mais n'impose pas pour ce faire de sollicitation de sa part.
Il est constant que la participation de la Clinique en moyens humains s'est avérée inexistante jusqu'au premier semestre 2020 inclus, alors que du 1er janvier 2018 au 30 juin 2020, les autres membres du Groupement ont mis à la disposition de ce dernier une moyenne de 1,47 salariés équivalent temps plein pour la Clinique Les trois soleils et de 1,15 équivalent temps plein pour le Centre hospitalier Marc Jacquet.
Si l'article 3.2.2 de la convention constitutive institue seulement une faculté et non une obligation formelle de mettre à disposition de celui-ci les personnels médicaux et non médicaux correspondant quantitativement et qualitativement aux moyens humains qui sont nécessaires à la réalisation de son objet social et conformément aux budgets prévisionnels, les chiffres précités font ressortir le moindre investissement de la Clinique dans le projet commun par rapport à ses partenaires.
Les difficultés financières de cette dernière n'expliquent pas totalement le manque d'investissement dans le bon fonctionnement du Groupement par l'apport de moyens humains.
Mis en perspective avec le défaut d'adressage de patients, ce manque d'investissement permet de s'interroger sur la volonté de la Clinique de réellement participer au projet commun porté par le Groupement et de coopérer avec ses membres en vue de permettre les interventions communes des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux exerçant dans les établissements membres, étant considéré que la Clinique ne saurait de bonne foi se retrancher derrière le fait allégué que le Groupement ne lui a rien demandé pour valablement expliquer une telle abstention.
Sur point également, elle manque à son obligation de coopérer de manière loyale avec ses partenaires.
(iv) Le Groupement reproche ensuite à la Clinique de ne pas s'être engagée dans ses instances de réflexion et de décision, d'une part en ne se portant pas candidate au poste d'administrateur et d'autre part en étant absente à deux comités de pilotage ou en changeant souvent d'interlocuteur lorsqu'elle était présente.
Il est constant que la Clinique ne s'est pas portée candidate au poste d'administrateur qui est une fonction non rémunérée qui constitue pour son titulaire une charge de travail conséquente eu égard à l'activité croissante du Groupement. Si la Clinique soutient valablement avoir proposé la mise en place d'une administration tournante à l'échelle des trois membres du groupement, force est de constater que cette proposition est intervenue le 9 juillet 2020, alors que la mésentente entre les membres du Groupement concernant la construction de nouveaux locaux était déjà bien ancrée et que l'exclusion de la Clinique avait déjà été évoquée en assemblée générale avant de recevoir un vote défavorable le 17 décembre 2018 comme évoqué précédemment.
D'autre part, si l'absence de la Clinique à deux comités de pilotage est à elle-seule excusable prise isolément, elle doit être appréhendée dans le contexte de l'époque à la lumière des autres manquements ci-dessus relevés.
Ces deux faits conjugués contribuent ainsi à caractériser le manque d'investissement de la Clinique dans le bon fonctionnement du [6] qui est de nature à justifier l'exclusion de ce membre.
(v) Enfin, le Groupement reproche à la Clinique d'avoir délibérément fait obstruction au projet de construction de nouveaux locaux soutenant qu'elle a adopté un comportement obstructif s'agissant du vote du budget de ces travaux tantôt en contestant la validité de la délibération l'arrêtant, tantôt l'acceptant, de sorte qu'il n'a pas pu s'inscrire dans le temps imparti pour ce projet de construction mutualisé avec d'autres établissements et qui aurait été particulièrement intéressant sur le plan financier, que la Clinique a fini par payer sa quote-part sous la menace d'une exclusion, que son attitude a conduit à des reports et remaniements du projet de construction à des conditions moins favorables pour le Groupement et que le prétendu défaut de transmission des informations relatives au projet n'est qu'un prétexte, alors que le projet existait depuis le début de l'année 2018.
En effet, il ressort du dossier que la Clinique a voté contre lors de l'assemblée du 16 décembre 2019, la résolution ayant été adoptée à la majorité des deux tiers sur le vote des deux autres membres. Elle a contesté ladite résolution relative à l'adoption du budget prévisionnel pour 2020 incluant le financement du projet de construction dès le 26 décembre suivant, indiquant que son appartenance au Groupement ne pouvait avoir pour effet de la contraindre à participer au financement du projet de construction de nouveaux locaux jugé trop onéreux et trop imprécis, privilégiant l'alternative de la location pour accueillir les bureaux du Groupement. La Clinique réitérait son refus par courrier du 11 mai 2020 et ce, bien qu'elle n'ait cessé de manifester son intérêt pour une participation au Groupement et à ses projets. Lors de la commission de conciliation du 13 mai 2020, elle estimait que les perspectives financières du projet n'étaient pas suffisantes, exigeait un budget prévisionnel à 5 ans et envisageait de « cadrer cet investissement » seulement après 2020.
Lors de l'AG du 12 juin 2020, elle indiquait que le principe de la libération des fonds était acquis mais pas de la totalité en une seule fois et s'interrogeait sur la pertinence de bloquer la totalité des fonds, malgré le rappel par le GHSIF de la nécessité de sécuriser le projet. Les représentants de la Clinique finissaient par voter contre les modalités de financement du projet en faisant état de l'intention du groupe Doctegestio la détenant d'introduire une plainte pénale. Après réception de l'appel de fonds, elle maintenait sa contestation par courrier du 9 juillet 2020 tout en procédant au règlement des fonds.
Bien que le Groupement ne justifie pas d'un préjudice à ce titre, ces atermoiements dénotent toutefois un comportement d'opposition répété de la part de la Clinique et démontrent par conséquent un manquement complémentaire en termes de coopération ou de collaboration avec les autres membres du Groupement, alors que la Clinique manque à établir ses affirmations selon lesquelles le Groupement l'aurait systématiquement tenue à l'écart des informations pertinentes et de la prise de décisions importantes.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le maintien de la Clinique en tant que membre du [6] n'était plus opportun, jugé que la décision d'exclusion prise en assemblée générale le 23 octobre 2020 était justifiée et bien fondée et rejeté par voie de conséquence la demande de nullité de l'assemblée générale du 23 octobre 2020 et des décisions subséquentes, ainsi que la demande de réintégration au sein du Groupement.
Dès lors, le jugement sera confirmé sur ce point.
- Sur les conséquences de l'exclusion de la Clinique [Localité 9] l'Ermitage
A titre infiniment subsidiaire, et dans l'hypothèse où la Cour devait ne pas prononcer la nullité de son exclusion du 23 octobre 2020, la Clinique [Localité 9] l'Ermitage demande la restitution de la somme de 143 676,32 euros, soit une somme de 618 876 euros après déduction de celle de 475 200 euros déjà remboursée. Elle estime en effet avoir droit au remboursement de l'intégralité des sommes qu'elle a versées au Groupement, en ce compris les fonds de fonctionnement en application de la version de l'article 3.1 adoptée par l'assemblée générale le 16 décembre 2019, et non uniquement le solde de son compte.
Le Groupement soutient que la nouvelle version n'est entrée en vigueur que le 18 avril 2020, date de naissance de la décision implicite d'approbation de la décision de l'assemblée générale du 16 décembre 2020 par le directeur général de l'[Localité 4], qu'elle ne permet pas le remboursement des fonds de fonctionnement pour les exercices antérieurs à 2019, que seules les participations exceptionnelles sont remboursables et qu'en tout état de cause, la Clinique ne justifie pas des montants réclamés.
Sur ce, la cour,
Il ressort du décompte produit par la Clinique qu'elle réclame le remboursement des versements ordinaires et exceptionnels qu'elle a opérés sur l'ensemble des exercices 2016 à 2020, autrement dit des fonds affectés aux dépenses de fonctionnement et de ceux résultant d'appels de fonds exceptionnels.
Il n'est pas discuté que l'intégralité des sommes relevant des appels de fonds exceptionnels lui a été remboursée.
Il est constant que jusqu'à la révision de la convention constitutive du groupement le 16 décembre 2019, seules les dépenses exceptionnelles étaient remboursables et que depuis lors, la révision intervenue permet aux membres de récupérer en sus les fonds affectés aux dépenses de fonctionnement.
La Clinique ne peut toutefois valablement se prévaloir du caractère rétroactif de l'avenant pour réclamer le remboursement des fonds affectés aux dépenses de fonctionnement au titre des exercices antérieurs à l'exercice 2019, la rétroactivité n'étant pas expressément prévue lors de l'adoption de la décision par l'assemblée générale du 16 décembre 2020 au cours de laquelle il a été précisé oralement que la modification des statuts sera applicable à l'exercice 2019 et ne sera pas rétroactive à la création du Groupement.
Les versements affectés aux dépenses de fonctionnement (et que la Clinique qualifie d'ordinaires) au titre des exercices 2016 à 2018 n'ont donc pas à être remboursés.
C'est donc à juste titre que le tribunal a débouté la Clinique de sa demande et il convient en conséquence de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les demandes indemnitaires
La Clinique demande à la cour qu'elle condamne le [6] à lui verser la somme de 1 223 886 euros en réparation du préjudice économique qu'elle a subi, correspondant à la quote-part des bénéfices prévisionnels du Groupement sur une période de 10 ans dont elle aurait été privée en raison de son exclusion illégitime.
Elle réclame de surcroît de la cour qu'elle condamne le Groupement à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi en raison de l'atteinte à son honneur et à sa réputation causée par son éviction injustifiée.
Son exclusion n'étant pas infondée, il n'est pas établi qu'il existe une faute à l'origine des préjudices allégués. La Clinique ne peut donc qu'être déboutée de ses demandes de ce chef.
Le jugement sera donc confirmé.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La Clinique [Localité 9] l'Ermitage, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance. Elle ne peut de ce fait prétendre à l'octroi d'une somme au titre de l'article 700 de code de procédure civile.
Elle devra en outre supporter les frais irrépétibles engagés par le Groupement à concurrence de hauteur de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne la Clinique [Localité 9] l'Ermitage aux dépens d'appel ;
Condamne la Clinique [Localité 9] l'Ermitage à payer au groupement de coopération sanitaire HAD de la Région [Localité 8] (le GCS HAD) la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la Clinique [Localité 9] l'Ermitage de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente