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Décisions

CA Orléans, ch. civ., 16 septembre 2025, n° 23/01668

ORLÉANS

Arrêt

Autre

CA Orléans n° 23/01668

16 septembre 2025

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 16/09/2025

Me Delphine COUSSEAU

la SELARL INTER BARREAUX LAVILLAT-BOURGON

ARRÊT du : 16 SEPTEMBRE 2025

N° : - 25

N° RG 23/01668 - N° Portalis DBVN-V-B7H-G2H4

DÉCISION ENTREPRISE : Jugements TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTARGIS en date du 29 août 2022 et du 11 mai 2023

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265298174332813

Madame [C] [B]

née le 23 Mai 1953 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Delphine COUSSEAU, avocat au barreau d'ORLEANS

Monsieur [N] [E]

né le 26 Décembre 1972 à

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Delphine COUSSEAU, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265286335602123

Madame [T] [K]

née le 12 Mars 1986 à [Localité 8]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Cécile BOURGON de la SELARL SELARL INTER BARREAUX LAVILLAT-BOURGON, avocat au barreau de MONTARGIS

Monsieur [V] [X]

né le 21 Avril 1985 à [Localité 10]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représenté par Me Cécile BOURGON de la SELARL SELARL INTER BARREAUX LAVILLAT-BOURGON, avocat au barreau de MONTARGIS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du :30 Juin 2023

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 24 mars 2025

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré :

Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre,

M. Laurent SOUSA, Conseiller, en charge du rapport,

Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffier :

Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 juin 2025.

ARRÊT :

Prononcé le 16 septembre 2025 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte en date du 9 août 2016, Mme [K] et M. [X] ont acquis de Mme [B] et M. [E] un bien immobilier situé [Adresse 7] (45).

Suite à l'apparition de fissures et des traces d'in'ltrations, Mme [K] et M. [X] ont sollicité la désignation d'un expert judiciaire qui a été ordonnée en référé le 16 juin 2021. L'expert, M. [L], a déposé son rapport le 17 mars 2022.

Les 26 et 28 avril 2022, Mme [K] et M. [X] ont fait assigner Mme [B] et M. [E] devant le tribunal judiciaire de Montargis, aux fins d'indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement en date du 29 août 2022, le tribunal judiciaire de Montargis a :

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 39 542,96 euros TTC et 23 090 euros HT au titre des travaux de reprise, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement, et se décomposant comme suit :

. 39 012,98 € TTC au titre des travaux de reprise de l'extension de l'habitation ;

. 23 090 € HT et 529,98 € TTC au titre des travaux concernant le garage ;

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 4 000 euros en réparation de leur trouble de jouissance ;

- débouté M. [E] et Mme [B] de leur demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle expertise judiciaire ;

- ordonné la réouverture des débats ;

- ordonné aux parties de produire de nouveaux devis de reprise de la véranda dans des matériaux conformes à l'accord initial des parties ;

- ordonné à Mme [K] et M. [X] de laisser entrer sur leur propriété les entreprises choisies par M. [E] et Mme [B] pour l'établissement de devis de reprise de la véranda ;

- renvoyé l'affaire à la mise en état ;

- sursis à statuer sur le surplus des demandes.

Par jugement en date du 11 mai 2023, le tribunal judiciaire de Montargis a :

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 380 euros HT au titre des travaux de reprise de la véranda, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement ;

- condamne in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, avec distraction au pro't de Maître Cécile Bourgon.

Par déclaration en date du 30 juin 2023, M. [E] et Mme [B] ont interjeté appel des chefs des deux jugements précités.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2024, M. [E] et Mme [B] demandent à la cour de :

- les déclarant recevables et bien-fondés en leur appel ;

- infirmer le jugement avant dire droit du 29 août 2022 en ce qu'il les a condamnés à la somme de 39 012,98 € TTC au titre des travaux de reprise de l'extension de l'habitation, à la somme de 4 000 € en réparation du trouble de jouissance ;

Statuant à nouveau :

- déclarer Mme [K] et M. [X] irrecevables et mal fondés en leurs demandes matérielles et immatérielles au titre de l'extension de l'habitation, et les en débouter ;

- infirmer le jugement du 11 mai 2023 en ce qu'il les a condamnés aux entiers dépens, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, avec distraction au profit de Maître Cécile Bourgon ;

Statuant à nouveau :

- ordonner le partage par moitié des dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise ;

- condamner Mme [K] et M. [X] à leur verser une somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel ;

- débouter Mme [K] et M. [X] de leur appel incident et de l'ensemble de leurs conclusions.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 16 avril 2024, Mme [K] et M. [X] demandent à la cour de :

- dire et juger Mme [B] et M. [E] non fondés en leur appel et en leurs demandes, et les en débouter ;

- dire et juger l'action sur le fondement de la garantie décennale non prescrite et recevable au titre des travaux d'extension de la maison ;

- confirmer les jugements rendus le 29 août 2022 et le 11 mai 2023 en ce qu'ils ont : condamné in solidum M. [E] et Mme [B] sur le fondement de la garantie décennale à payer à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 39 012,98 euros TTC au titre des travaux de reprise des travaux d'agrandissement, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement ; condamné in solidum M. [E] et Mme [B] sur le fondement de la garantie décennale à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 529,98 euros TTC au titre de la mise en sécurité du garage ; débouté M. [E] et Mme [B] de leur demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle expertise judiciaire ; condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné in solidum M. [E] et Mme [B] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire avec distraction au profit de Maître Cécile Bourgon ; dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire ;

Subsidiairement,

Si la cour devait juger l'action sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil prescrite au titre des travaux d'agrandissement,

- dire et juger que Mme [B] et M. [E] ont commis une faute contractuelle dolosive ;

- condamner in solidum M. [E] et Mme [B] sur le fondement de la responsabilité contractuelle à payer à Mme [K] et M. [X] la même somme de 39 012,98 euros TTC à titre dommages et intérêts en réparation de leur préjudice lié à la perte d'une chance de contracter la vente à des conditions différentes, plus avantageuses et plus protectrices de leurs intérêts ;

- les dire et juger recevables et bien fondés en leur appel incident ;

- réformer les jugements entrepris en ce qu'ils ont : condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 23 090 euros HT au titre des travaux de démolition et reconstruction du garage ; condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à

Mme [K] et M. [X] la somme de 4 000 euros en réparation du trouble de jouissance ; condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à leur payer la somme de 380 euros HT au titre des travaux de reprise de la véranda, avec indexation sur l'indice du coût à la construction jusqu'à complet règlement ;

- condamner in solidum M. [E] et Mme [B] à leur payer la somme de 44 802,83 euros TTC au titre de la démolition et de la reconstruction d'un garage conforme ;

- condamner in solidum M. [E] et Mme [B] à leur payer la somme de 23 313,02 euros TTC au titre des travaux de reprise de la véranda, telle que chiffrés par l'expert judiciaire ;

- condamner in solidum M. [E] et Mme [B] à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance ;

En toutes hypothèses,

- condamner in solidum Mme [B] et M. [E] à leur payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [B] et M. [E] aux entiers dépens d'appel ;

- rejeter toutes demandes contraires.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

I- Sur les travaux de reprise de l'extension de l'habitation

A- Sur la recevabilité de la demande d'indemnité

Moyens des parties

Les appelants soutiennent que pour faire droit à la demande au titre des travaux de reprise de l'extension de l'habitation, le tribunal a écarté la forclusion décennale et a commis une erreur d'appréciation ; que les travaux d'extension de la maison d'habitation ont été réalisés par la société JDL Multiservices, moyennant la somme de 28 500 € TTC suivant facture du 1er août 2008, dont le paiement a emporté la réception tacite des travaux et ainsi fait courir le délai décennal ; que l'acte authentique de vente comporte une erreur matérielle quant à la date d'achèvement des travaux ; que pour preuve que l'extension était en état d'être reçue, ils l'ont déclarée auprès de l'administration fiscale selon formulaire du 18 septembre 2008, reçu par le service des impôts locaux le 22 septembre 2008 ; qu'ils n'auraient pu avoir d'intérêt quelconque à déclarer une extension qui n'existait pas, cette déclaration impliquant une assiette d'imposition complémentaire ; que pour écarter cette déclaration, les premiers juges ont noté qu'elle ne faisait pas mention du numéro de permis de construire mais une telle indication n'avait pas lieu d'être sur un document de cette nature, et il y a une parfaite corrélation entre la demande de permis de construire afférente à l'extension et ladite déclaration au regard du descriptif de la construction complémentaire ; que si une déclaration d'achèvement en date du 29 octobre 2014 a été régularisée avec une date erronée, celle-ci a été rectifiée le 14 octobre 2021 ; que le raisonnement des premiers juges fondé sur la déclaration du 29 octobre 2014 est donc sans emport ; qu'ils produisent des preuves complémentaires permettant de confirmer la date d'achèvement des travaux ; que les premiers juges ont écarté le devis et la facture de la société JDL Multiservice comme n'étant pas suffisamment probants et ont semblé considérer, par référence aux stipulations de l'acte de vente, que les travaux auraient été réalisés par les vendeurs ; qu'en cas d'auto-construction la Cour de cassation retient la date à laquelle l'ouvrage est « utilisable et propre à sa fonction » ; que même si l'on devait prendre pour base l'année 2010 à laquelle le bien a été loué et doit donc être réputé utilisable et propre à sa fonction, la prescription est là encore acquise, étant rappelé que le premier acte interruptif est intervenu le 22 février 2021, soit bien au-delà du délai décennal ; que le jugement du 29 août 2022 ne pourra qu'être réformé en ce qu'il a fait droit à la demande indemnitaire au titre de la garantie décennale.

Les intimés répliquent que l'acte notarié mentionne que les travaux ont été achevés en date du 3 octobre 2014 et comporte en annexe la déclaration attestant l'achèvement de travaux et la conformité de l'agrandissement en date du 29 octobre 2014 avec une date d'achèvement au 3 octobre 2014 ; qu'il est totalement vain pour M. [E] et Mme [B] de tenter de démontrer que la date d'achèvement serait antérieure et daterait du 1er août 2008 ou de courant 2010 ; que les vendeurs ont approuvé l'acte authentique sans jamais remettre en cause cette date d'achèvement des travaux du 3 octobre 2014 ; que leur démarche auprès de la mairie en octobre 2021, soit en cours de procédure d'expertise judiciaire et plus de 5 ans après la vente et 7 ans après la déclaration d'achèvement de travaux, pour faire modifier la date d'achèvement de travaux figurant sur leur déclaration du 29 octobre 2014, ne peut avoir aucune conséquence de quelque que ce soit face aux stipulations d'un acte notarié ; que les appelants produisent une facture d'un électricien M Depan'service en date du 17 mars 2008 et d'une société JLD Services en date du 1er août 2008 d'un montant de 28 500 euros TTC visant des travaux d'agrandissement d'une maison habitation, mais ne justifient pas du règlement de ces factures ; que la facture de M Depan'service est une pièce nouvelle qui n'avait jamais été communiquée jusqu'alors ; que ces deux factures d'entreprises sont surprenantes puisque dans l'acte de vente, les vendeurs ont indiqué ne pas être en mesure de fournir la liste des entreprises étant intervenues ; que l'entreprise M Depann'service a fait l'objet d'une dissolution amiable le 30/09/2008, de sorte qu'il est impossible de vérifier la réalité de son intervention ; que la société JDL Multiservices est quant à elle une entreprise de nettoyage qui a cessé son activité le 1er juin 2007 ; qu'il est donc matériellement impossible qu'elle ait pu réaliser les travaux d'extension litigieux et il est impossible de vérifier la réalité de son intervention ; que les factures produites ne sont pas crédibles ; que le contrat de location qui aurait été consenti sur le bien le 7 février 2010, pièce qui surgit pour la première fois en appel et dont il n'a jamais été question auparavant, n'est pas davantage probant et contient même, par comparaison avec le compromis de vente signé entre les parties le 11 mai 2016 listant les travaux restaient à réaliser, des invraisemblances ; que les appelants à qui la charge de la preuve incombe, ne démontrent pas que la date du 3 octobre 2014 résulterait d'une erreur ; que lors des visites préalables à la vente, les vendeurs leur avaient indiqué que les travaux d'agrandissement avaient été achevés en octobre 2014, ce qui laissait encore un délai de garantie décennale de huit années à courir et a emporté leur décision de se porter acquéreurs ; que la cour confirmera donc le jugement en qu'il a déclaré l'action sur le fondement de la garantie décennale au titre des travaux d'agrandissement non prescrite et recevable.

Réponse de la cour

L'article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Aux termes de l'article 1792-1 2° du code civil, toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire est réputé constructeur de l'ouvrage.

En application de ces dispositions, le vendeur-constructeur est tenu à garantie décennale à compter de l'achèvement qui caractérise l'auto-réception de l'ouvrage.

En l'espèce, l'acte authentique de vente stipule qu'il a été effectué un agrandissement du bien et de ses annexes par le vendeur suivant permis de construire en date du 1er août 2007, lequel a été suivi d'une déclaration attestant l'achèvement de travaux et la conformité desdits travaux en date du 29 octobre 2014 et indiquant que lesdits travaux ont été achevés en date du 3 octobre 2014. La copie de la déclaration attestant l'achèvement de travaux et la conformité desdits travaux en date du 29 octobre 2014 était annexée à l'acte.

S'agissant de l'assurance responsabilité dont l'obligation de souscription pèse sur toutes les entreprises qui ont participé à la construction, le vendeur a déclaré, dans l'acte de vente, « ne pas être en mesure de fournir la liste des entreprises étant intervenues depuis moins de dix ans ».

Les vendeurs soutiennent que les travaux de construction ont été réalisés par « la société JLD Services », en réalité M. [W] [U] entrepreneur individuel exerçant sous la raison sociale JLD Services, suivant devis du 29 janvier 2007 pour des travaux d'agrandissement d'une maison d'habitation, et suivant facture du 1er août 2008 mentionnant le paiement intégral du prix. Il y a lieu de relever que ces documents qui n'ont pas été portés à la connaissance des acquéreurs n'ont pas été signés de l'entrepreneur, et aucun élément ne permet de corroborer le paiement du prix allégué. Surtout, les intimés justifient du fait que M. [U] avait cessé son activité, qui relevait du domaine du nettoyage et non de la construction, le 1er juin 2007, suivant avis de situation du répertoire Sirene. Il s'ensuit que M. [U] n'a pu ni réaliser les travaux allégués, l'ouverture du chantier étant postérieure à sa date de cessation d'activité, ni établir la facture du 1er août 2008 et en recevoir paiement.

En conséquence, Mme [B] et M. [E] n'établissent pas que les travaux de construction de l'extension de la maison d'habitation litigieuse ont été réalisés par un constructeur, corroborant ainsi la déclaration à l'acte de vente sur l'absence de mention des entrepreneurs intervenus sur le chantier. Les vendeurs doivent donc être considérés comme étant les auteurs de la construction de l'extension de la maison d'habitation.

S'agissant de la date d'achèvement des travaux, il convient de constater que les vendeurs ont établi une demande de permis de construire le 1er août 2007 pour l'agrandissement de leur bien immobilier par création de deux chambres et que le permis de construire n° PC4508507 P020 a été accordé le 28 août 2007. Le 10 septembre 2007, Mme [B] et M. [E] ont déclaré l'ouverture du chantier à compter du 6 septembre 2007. Le 29 octobre 2014, M. [E] a déclaré l'achèvement de la totalité des travaux à la date du 3 octobre 2014.

Mme [B] et [E] ne sont pas fondés à soutenir que cette date d'achèvement des travaux qu'ils ont eux même déclaré à la mairie résulterait d'une erreur, alors qu'ils n'ont nullement formulé une nouvelle déclaration d'achèvement des travaux avant la vente, ni même informé les acquéreurs de l'achèvement des travaux au 1er août 2008 de sorte que ces derniers n'ont pas été en mesure de savoir que le délai de garantie décennale résiduel était de moins de deux années.

En outre, les vendeurs sont mal-fondés à soutenir que la date du 3 octobre 2014 serait celle de l'achèvement des travaux du garage, alors que celui-ci avait donné lieu à une demande de permis de construire en date du 17 février 2015 et à un permis de construire délivré le 1er avril 2015.

Les vendeurs contestent désormais la date d'achèvement des travaux déclarée et se prévalent d'une date d'achèvement des travaux au 1er septembre 2008, suivant une nouvelle déclaration d'achèvement des travaux établie le 14 octobre 2021. Cependant, les vendeurs ne peuvent modifier, par l'effet d'une nouvelle déclaration d'achèvement des travaux, le point de départ du délai de forclusion de la garantie décennale, postérieurement à la vente et à l'introduction de l'instance relative à la mise en oeuvre de leur garantie décennale.

Ainsi, les vendeurs ne peuvent pas plus se prévaloir de la déclaration au service des impôts de changements de consistance ou d'affectation des propriétés bâties et des propriétés non bâties en date du 18 septembre 2008, mentionnant une date de réalisation définitive du changement en août 2008, étant d'ailleurs relevé que le changement déclaré consiste en la démolition ou la vente partielle de deux chambres d'une superficie de 30 m². Cette déclaration n'a pas été communiquée, lors de la vente, aux acquéreurs qui n'avaient connaissance que de la date d'achèvement déclarée du 3 octobre 2014 constituant le point de départ des garanties légales du constructeur.

Il importe peu que Mme [B] et M. [X] indiquent avoir loué leur maison d'habitation en 2010, aux termes d'un contrat de bail qui ne mentionne pas l'extension réalisée, alors que les bailleurs ont eux-mêmes déclaré avoir intégralement achevé les travaux le 3 octobre 2014, tel que cela a été affirmé à l'acte de vente.

Il résulte de l'ensemble de ces considérations que l'achèvement des travaux portant sur le bien vendu à Mme [K] et M. [X] est en date du 3 octobre 2014, de sorte que la garantie décennale des vendeurs réputés constructeurs expirait le 3 octobre 2024.

Les demandes de Mme [K] et M. [X] fondées sur la garantie décennale, au titre de l'extension de la maison d'habitation, sont donc recevables pour avoir été formées en justice les 26 et 28 avril 2022. Le jugement qui a omis de statuer sur ce point en son dispositif, sera donc complété en ce sens.

B- Sur la garantie décennale

Moyens des parties

Mme [B] et M. [E] ne formulent aucun moyen au titre du coût des travaux de reprise de l'extension de l'habitation, se limitant à soutenir que cette demande ne pouvait pas prospérer compte-tenu de la forclusion de la demande sur le fondement de la garantie décennale.

Mme [K] et M. [X] demandent de confirmer les jugements rendus le 29 août 2022 et le 11 mai 2023 en ce qu'ils ont condamné in solidum Mme [B] et M. [E] à leur payer la somme totale de 39 012,98 euros TTC au titre des travaux de reprise des travaux d'agrandissement, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

En l'espèce, l'expert judiciaire a constaté que la couverture en tuiles mécaniques, d'une pente de 13° est insuffisante pour l'immeuble qui ne dispose pas d'un pare-pluie de sorte que les plafonds sont à certains endroits bombés et cloqués, et qu'une 'ssure est visible entre l'extension et le bâtiment initial, le constructeur de l'extension n'ayant pas effectué de joint de dilatation pourtant indispensable. La couverture n'assure donc pas l'étanchéité du bien et l'absence de joint de dilatation conduit à des désordres structurels. Il s'ensuit que l'extension réalisée est impropre à sa destination de sorte que la garantie décennale des vendeurs est engagée.

En l'absence de moyen formulé sur le fond par les appelants, il convient de confirmer le jugement du 29 août 2022 en ce qu'il a condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 39 542,96 euros TTC au titre des travaux de reprise, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement.

II- Sur les travaux de reprise du garage

Moyens des parties

Mme [K] et M. [X] soutiennent que la garantie décennale des vendeurs est engagée au titre des désordres affectant le garage ; que le tribunal a cru devoir écarter le chiffrage de l'expert judiciaire au titre de la démolition et la reconstruction du garage d'un montant total de 44 802,83 euros TTC, préférant retenir celui produit par M. [E] et Mme [B] d'un montant de 23 090 euros HT ; que l'expert judiciaire a indiqué la raison pour laquelle il ne prend pas en compte le devis de 23 090 euros HT, la pente de toiture unique ne permettant pas de construire une couverture conforme ; qu'ils sont bien fondés en leur appel incident et sollicitent la condamnation in solidum de M. [E] et de Mme [B] à leur payer la somme de 44 802,83 euros TTC au titre de la démolition et la reconstruction du garage.

Mme [B] et M. [E] répliquent que les intimés se fondent sur un devis qui fait état de la construction d'un garage à 2 pentes, alors même que le garage initial ne comportait qu'une pente ; que le propre de la responsabilité est de replacer le lésé dans la situation antérieure sans perte ni profit, ce qui n'est pas le cas si le devis produit était retenu ; qu'il n'a jamais été proscrit de réaliser un ouvrage avec une toiture à pente unique, et il importe seulement, comme pour toute toiture, que le degré réglementaire de pente soit respecté ; que le devis établi par l'entreprise N.M. Construction est un devis de démolition et de reconstruction totale comme il avait été demandé par l'expert ; que la Cour de cassation impose aux juges de procéder à un contrôle de proportionnalité ; qu'au nom du principe d'économie et de proportionnalité, il y a lieu de retenir le devis le mieux disant, comme l'a fait le tribunal ; que l'appel incident adverse sera rejeté.

Réponse de la cour

La date d'achèvement des travaux du garage réalisés par les vendeurs ne peut être antérieur au permis délivré le 1er avril 2015, de sorte qu'elle ne peut être fixée au 3 octobre 2014. Mme [B] et M. [E] ont déclaré au service des impôts la réalisation de ce garage le 20 juillet 2015, qu'il convient donc de retenir comme date d'achèvement des travaux et point de départ de la garantie décennale.

L'expert judiciaire a constaté les désordres suivants affectant le garage :

« Le double garage se situe à l'entrée de la propriété et il est construit avec des murs de parpaing et une charpente constituée de pannes avec une couverture en tuiles mécaniques. La pente de toiture est de 5° quasiment nulle, et sans pare pluie.

En façade Ouest nous constatons une lézarde verticale d'ouverture plus importante sous le faîtage de la couverture par rapport au sol, ouverture qui nous indique un problème de structure provenant en haut du mur du garage par une absence de chaînage périphérique en partie haute du mur.

Les deux linteaux des ouvertures de portes de garage sont gravement endommagés, nous constatons une flexion de 3 cm sur l'un tandis que l'autre linteau est fissuré et ne repose sur aucun poteau latéral.

[']

Le linteau de la porte basculante est très peu encastré dans le mur de façade avec une absence de chaînage périphérique en haut de l'arase du mur, sous la couverture. L'absence de chaînage occasionne l'ouverture de la façade sous les différents efforts de la charpente et de la couverture dont la pente de 5° n'est pas suffisante pour recevoir des tuiles mécaniques (une pente de >25° mini est nécessaire).

Le garage est très dangereux en l'état, celui-ci peut s'effondrer à tout moment aux vues des lézardes, des fissures et des contraintes constatées. Ce bâtiment doit rester fermé et ne plus être utilisé, des barrières de chantier de 2 mètres de haut posées sur des plots béton doivent être mises en place à 5 mètres des façades autour du garage afin d'en interdire l'accès ».

Au regard de ces désordres structurels rendant le garage dangereux pour les personnes, les dommages compromettent la solidité de l'ouvrage de sorte que la garantie décennale des vendeurs est engagée.

L'expert judiciaire a indiqué que l'ensemble des désordres constatés établit un état de péril grave et imminent vis-à-vis des propriétaires et que le garage doit rester fermé et ne plus être utilisé avec la mise en place d'un périmètre de sécurité à l'extérieur. Il a évalué le coût de la mise en sécurité de l'ouvrage à la somme de 529,98 euros TTC à laquelle Mme [B] et M. [E] ont été condamnés. Cette somme n'est pas contestée et a été incluse par le tribunal dans la somme de 39 542,96 euros précédemment confirmée.

S'agissant des travaux de reprise des désordres, l'expert judiciaire a indiqué que la démolition du garage est nécessaire pour reconstruire un garage conforme aux règles de l'art, précisant que le coût de la reconstruction s'élève à la somme de 44 802,83 euros TTC suivant le devis de l'entreprise Brecie-Lanotte du 3 décembre 2021. Si l'expert ne précise pas les travaux précis à accomplir, il convient de constater que le devis validé par l'expert et dont se prévalent Mme [K] et M. [X] ne concerne pas l'édification d'un bien identique à celui acquis. En effet, le devis prévoit la construction d'une couverture à double pente, alors que le bien acquis était à pente unique, et aucun élément du rapport d'expertise ne permet d'établir que seule une double pente permettrait de réaliser un ouvrage conforme aux règles de l'art et exempt de désordres.

En conséquence, le tribunal a justement retenu le coût de démolition-reconstruction du garage tel que figurant sur le devis de la société NM Construction produit par les appelants, soit la somme de 23 090 euros HT. Toutefois, les premiers juges ont omis d'intégrer le coût de la TVA de 20 % que Mme [K] et M. [X] devront nécessairement acquitter pour faire réaliser les travaux.

Mme [B] et M. [E] seront donc condamnés in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 27 708 euros TTC au titre des travaux de reprise du garage. Le jugement du 29 août 2022 sera donc infirmé en ce qu'il a condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 23 090 euros HT au titre des travaux de reprise de garage.

III- Sur les travaux de reprise de la véranda

Moyens des parties

Mme [K] et M. [X] soutiennent que la garantie décennale des vendeurs est engagée au titre des désordres affectant la véranda ; que le tribunal a cru devoir écarter le chiffrage de l'expert judiciaire au titre du remplacement pur et simple de la véranda qui est irréparable d'un montant de 23 313,02 euros TTC, correspondant au devis de l'entreprise Dupond ; que le tribunal a considéré qu'ils avaient accepté que la véranda soit construite par un non-professionnel avec des matériaux à bas coût, de sorte qu'ils ne pourraient revendiquer une véranda en aluminium « haut de gamme », ce qui constituerait un enrichissement ; que sans son jugement avant-dire droit, il a sollicité des parties qu'elles fournissent de nouveaux devis dans des matériaux conformes à ceux acceptés par les demandeurs dans le cadre du compromis de vente ; qu'ils n'ont pu obtenir les devis demandés par le tribunal puisqu'il leur a été répondu par les professionnels qu'une véranda en ossature bois avec des menuiseries en aluminium est un procédé qui ne se fait plus aujourd'hui, car non pérenne ; que le tribunal a donc retenu le devis de la société AB Serrurerie produit par M. [E] et Mme [B] d'un montant de 380 euros HT prévoyant la pose d'une bavette d'étanchéité, le décapage des rails des baies vitrées, leurs réglages et le remplacement des deux chariots, ce qui est contestable ; qu'au moment de la signature du compromis, il a seulement été question entre les parties de la réalisation d'une véranda d'une vingtaine de m² sans autre précision et en aucun cas d'une véranda à bas coût ou encore d'une simple pergola ; qu'il n'a jamais été convenu d'une véranda en ossature bois avec des panneaux translucides ; que lors du constat le 21 juillet 2016 de bonne réalisation des travaux et de levée des conditions suspensives, ils ont constaté la réalisation de la véranda promise laquelle leur a paru en apparence conforme ; qu'ils ont appris au cours de l'expertise judiciaire que la structure en bois de la véranda ne permet pas une rigidité nécessaire aux menuiseries aluminium posées et que la véranda ne présente aucune étanchéité, ni stabilité ; que l'expert judiciaire a conclu qu'elle était irréparable et qu'il n'y a pas d'autres solutions que son remplacement pour un coût de 23 313,02 euros TTC ; qu'en application du principe de réparation intégrale, ils sont fondés à solliciter la condamnation de M. [E] et Mme [B] à leur payer le coût du remplacement de la véranda par une véranda en structure aluminium, soit la somme de 23 313,02 euros TTC.

Mme [B] et M. [E] répliquent que les acquéreurs prétendent au remplacement total de la véranda, sur la base d'une démolition de l'ouvrage existant et de la reconstruction d'une nouvelle véranda en aluminium ; que les intimés avaient visité le bien avant, pendant et après la construction de la véranda et il avait été convenu que la véranda soit construite en ossature bois, avec des panneaux translucides et des baies vitrées coulissantes ; que les conditions suspensives ayant été réalisées, les parties ont signé un avenant le 21 juillet 2016, cet acte marquant l'accord des acquéreurs quant aux caractéristiques de la véranda, le choix des matériaux employés ; qu'il est inconcevable de remplacer cet ouvrage par une véranda de standing avec des matériaux plus nobles, un procédé de meilleure qualité, ce qui serait constitutif d'un enrichissement sans cause au profit des intimés ; que la motivation adoptée par les premiers juges n'encourt aucune critique ; que l'appel incident sera rejeté.

Réponse de la cour

Aux termes du rapport d'expertise, la véranda présente une structure porteuse constituée de petites pannes en bois de section minimale (5 cm de large par 14 cm de haut) avec une couverture légère constituée de panneau translucide, des murs recouverts d'un bardage en plastique et de plusieurs menuiseries en aluminium dont les ouvertures sortent de leurs logements pour certaines.

L'expert judiciaire a constaté qu'il manque une costière formant bavette d'étanchéité à la jonction de la couverture de la véranda avec la façade de l'habitation, de sorte qu'un jour est visible en faîtage de la véranda qui n'est pas étanche. Il a en outre indiqué que la structure de la véranda très faible ne permet pas une rigidité nécessaire aux menuiseries aluminium posées.

Au regard de ces éléments, les dommages rendent le bien non étanche, impropre à sa destination, de sorte que la garantie décennale de Mme [B] et M. [E] est engagée.

L'expert judiciaire a indiqué que la véranda est irréparable et le coût de la réparation s'élève à la somme de 23 313,02 euros TTC suivant le devis de l'entreprise Dupont du 15 novembre 2021.

Le compromis de vente comportait une condition suspensive tenant à la réalisation d'une véranda sans précision de matériaux, et celle-ci a été réalisée telle que décrite précédemment par l'expert judiciaire.

Le jugement a retenu une indemnité de 380 euros au titre d'un devis portant sur les éléments suivants : forfait réfection d'une véranda (ossature bois et revêtement PVC) ; fourniture et pose d'une bavette d'étanchéité ; décapage des rails de baies vitrées coulissantes ; réglages des menuiseries et remplacement des deux charriots de la baie coulissante.

Toutefois, une telle indemnité ne permet pas de réparer intégralement les dommages subis par Mme [K] et M. [X]. En effet, l'expert judiciaire a clairement indiqué que la faiblesse de la structure de la véranda ne permettait pas d'assurer la rigidité nécessaire aux menuiseries aluminium posées. Il s'ensuit que toute la structure de la véranda doit être refaite afin de pouvoir poser les menuiseries en aluminium qui, en l'état, sortent de leur logement. Les menus réglages et remplacements de pièces retenus par le tribunal ne permet pas de garantir que les menuiseries resteront dans leurs rails et pourront coulisser alors que la structure en bois de dimension réduite ne permet pas d'assurer un cadre rigide nécessaire à menuiseries en aluminium.

En conséquence, Mme [K] et M. [X] sont fondés à solliciter la réfection intégrale de la véranda au coût validé par l'expert judiciaire, soit 23 313,02 euros TTC. La pose d'une structure en aluminium au lieu d'une structure en bois ne saurait constituer un profit pour les acquéreurs, dès lors qu'il est nécessaire de prévoir une structure possédant la solidité et la rigidité nécessaires pour accueillir des menuiseries en aluminium posées par les vendeurs. Ceux-ci ne démontrent pas qu'une structure en bois, même refaite, permettrait d'offrir ce cadre d'accueil des menuiseries en aluminium sans risque de dommage.

Mme [B] et M. [E] seront donc condamnés in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 23 313,02 euros TTC au titre de la réfection de la véranda. Le jugement du 11 mai 2023 sera donc infirmé en ce qu'il a condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 380 euros HT au titre des travaux de reprise de la véranda.

IV- Sur le préjudice de jouissance

Moyens des parties

Les appelants soutiennent que Mme [K] et M. [X] se plaignent des préjudices qu'ils subiraient depuis fin 2019, mais ils n'ont saisi le tribunal qu'en 2021 ; qu'ils n'ont rien fait pour atténuer les infiltrations d'eau et l'humidité, pour sécuriser le garage, et la véranda n'est pas entretenue ; que l'appel incident sera donc rejeté.

Mme [K] et M. [X] font valoir que le tribunal a limité à 4 000 euros le montant des dommages et intérêts pour préjudice de jouissance alors qu'ils sollicitaient à ce titre la somme de 10 000 euros ; que lorsqu'ils ont constaté les infiltrations dans l'agrandissement et les fissures dans le garage, ils ont contacté des professionnels qui leur ont indiqué que de graves vices de construction étaient à l'origine de ces désordres et que seule la responsabilité et la garantie décennale du constructeur était engagée ; que le garage est inutilisable ; que l'extension est systématiquement inondée lorsqu'il pleut et les moisissures se développent ; qu'ils continuent d'y dormir faute d'autres solutions, mais subissent à l'évidence un préjudice de jouissance du fait de l'humidité permanente qui y règne ; que la véranda n'est pas étanche, l'air froid et l'eau pénétrant du fait des baies coulissantes qui ne sont plus d'équerre avec l'ossature en bois et de l'étanchéité défaillante au niveau du toit de la partie habitation ; qu'ils ont cinq enfants, dont le dernier a 4 ans ; que tous les jours, ils passent leur temps à éponger et/ou nettoyer la moisissure dans l'extension, sans compter que les infiltrations dans le toit puis dans le plafond génèrent une humidité permanente dans les toutes les pièces de vie de la maison ; que leur préjudice de jouissance qu'ils continuent de subir doit être justement chiffré à ce jour à la somme de 20 000 euros, qui couvre à la fois le préjudice pendant la durée des travaux qui perturbera nécessairement la famille dans leur vie quotidienne et celui lié à des conditions de vie quasiment insalubres et l'impossibilité de profiter pleinement des pièces d'habitation concernées par les désordres et du garage.

Réponse de la cour

Il est établi que la couverture de l'extension de la maison d'habitation comportant deux chambres n'est pas étanche, et présente de multiples désordres d'infiltrations et d'humidité. La véranda n'est également pas étanche, et les menuiseries sortent des rails. Quant au garage il est inutilisable au regard du risque existant pour la sécurité des personnes.

La victime d'un fait dommageable n'ayant pas l'obligation de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable, il ne peut pas être fait grief à Mme [K] et M. [X] de ne pas avoir assuré les réparations nécessaires pour limiter le préjudice de jouissance résultant de ces désordres, étant rappelé que les appelants se sont opposés à tort au paiement des sommes permettant la réfection du garage et de la véranda.

L'expert a estimé à trois mois et demi la durée des travaux de reprise des désordres, hors préparation du chantier, au cours duquel Mme [K] et M. [X] subiront les gênes multiples à ce chantier faisant intervenir plusieurs entreprises notamment sur la couverture.

Surtout, Mme [K] et M. [X] ont subi des désagréments majeurs depuis les premières constatations des désordres par huissier de justice le 30 octobre 2020. En particulier, les infiltrations d'eau et l'humidité régnant dans les chambres de l'extension ont dégradé l'environnement de vie de Mme [K] et M. [X], outre les travaux nécessaires à réaliser en cas de pluie pour limiter l'impact des infiltrations. Ils ont également été privés partiellement de l'usage normal de la véranda, et ont été privés totalement de l'usage de garage qui présentait un risque pour leur sécurité.

Ce préjudice de jouissance subi suite aux désordres de nature décennale justifie l'allocation d'une somme de 8 000 euros. Mme [B] et M. [E] seront condamnés in solidum à payer cette somme à Mme [K] et M. [X].

Le jugement du 29 août 2022 sera donc infirmé en ce qu'il a condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 4 000 euros en réparation de leur trouble de jouissance.

V- Sur les frais de procédure

Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [B] et M. [E] seront condamnés in solidum aux entiers dépens d'appel, ainsi qu'à payer à Mme [K] et M. [X] une somme complémentaire de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Montargis du 29 août 2022 en ce qu'il a :

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 23 090 euros HT au titre des travaux de reprise de garage ;

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme de 4 000 euros en réparation de leur trouble de jouissance ;

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Montargis du 11 mai 2023, en ce qu'il a :

- condamné in solidum M. [E] et Mme [B] à verser à Mme [K] et M. [X] la somme totale de 380 euros HT au titre des travaux de reprise de la véranda, avec indexation sur l'indice du coût de la construction jusqu'à complet règlement ;

CONFIRME les jugements en leurs autres dispositions ;

STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT :

DÉCLARE RECEVABLES les demandes formées par Mme [K] et M. [X] à l'encontre de Mme [B] et M. [E] au titre de l'extension de la maison d'habitation ;

CONDAMNE Mme [B] et M. [E] in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 27 708 euros TTC au titre des travaux de reprise du garage ;

CONDAMNE Mme [B] et M. [E] in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 23 313,02 euros TTC au titre de la réfection de la véranda ;

CONDAMNE Mme [B] et M. [E] in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme de 8 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;

CONDAMNE Mme [B] et M. [E] in solidum aux entiers dépens d'appel ;

CONDAMNE Mme [B] et M. [E] in solidum à payer à Mme [K] et M. [X] la somme complémentaire de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur Laurent SOUSA, conseiller ayant participé aux débats et au délibéré, et Mme Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

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