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Décisions

CA Bastia, ch. civ. sect. 2, 3 septembre 2025, n° 23/00067

BASTIA

Arrêt

Autre

CA Bastia n° 23/00067

3 septembre 2025

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du

3 SEPTEMBRE 2025

N° RG 23/67

N° Portalis DBVE-V-B7H-CFU4 JJG-C

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Bastia, décision attaquée du 3 janvier 2023, enregistrée sous le n° 20/1041

S.C.I. CPPX

[RX]

C/

[EF] S.A.R.L. ROSA VERDE

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS

CONSORTS

[I]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

TROIS SEPTEMBRE DEUX-MILLE-VINGT-CINQ

APPELANTES et INTIMÉES :

S.C.I. CPPX

prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 24]

[Adresse 24]

[Localité 8]

Représentée par Me Pascale MELONI, avocate au barreau de BASTIA et Me Dominique ALLEGRINI de l'AARPI ALLEGRINI-SPITERI, avocat au barreau de MARSEILLE

Mme [AM] [RX]

née le [Date naissance 6] 1972 à [Localité 21] (Corse)

[Adresse 23]

[Adresse 23]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean-Pierre RIBAUT-PASQUALINI de la SCP RIBAUT-PASQUALINI, avocat au barreau de BASTIA et Me Laura FRICAUD, avocate au barreau de PARIS

INTIMÉS :

M. [E], [T] [EF]

né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 20] (Bouches-du-Rhône)

[Adresse 22]

[Adresse 22]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean Benoit FILIPPINI, avocat au barreau de BASTIA

S.A.R.L. ROSA VERDE

prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 24]

[Adresse 24]

[Localité 8]

Représentée par Me Pascale MELONI, avocate au barreau de BASTIA et Me Dominique ALLEGRINI de l'AARPI ALLEGRINI-SPITERI, avocat au barreau de MARSEILLE

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS

en qualité d'assureur de Mme [AM] [RX], immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 784 647 349, prise en la personne de son directeur en exercice, domicilié ès qualités audit siège.

[Adresse 5]

[Localité 18]

Représentée par Me Marie Laure BATTESTI de l'AARPI ARNA, avocate au barreau d'AJACCIO

M. [NT], [L] [I]

né le [Date naissance 12] 1965 à [Localité 21] (Corse)

[Adresse 26]

[Adresse 26]

[Localité 7]

Représenté par Me Pierre-Antoine PERES de la S.E.L.A.R.L. D'AVOCAT PIERRE ANTOINE PERES, avocat au barreau de BASTIA

Mme [W], [S], [A] [I], épouse [C]

née le [Date naissance 9] 1966 à [Localité 21] (Corse)

[Adresse 16]

[Localité 17]

Représentée par Me Pierre-Antoine PERES de la S.E.L.A.R.L. D'AVOCAT PIERRE ANTOINE PERES, avocat au barreau de BASTIA

Mme [J], [H] [I], épouse [WZ]

née le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 21] (Corse)

[Adresse 19]

[Localité 17]

Représentée par Me Pierre-Antoine PERES de la S.E.L.A.R.L. D'AVOCAT PIERRE ANTOINE PERES, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 5 juin 2025, devant la cour composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Guillaume DESGENS, conseiller

François DELEGOVE, vice-président placé

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Vykhanda CHENG

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 3 septembre 2025

ARRÊT :

Contradictoire.

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et Mathieu ASSIOMA, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Par actes des 9 et 12 octobre 2020, M. [E] [EF] a assigné Mme [AM] [RX], son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français et la S.C.I. Cppx

par-devant le tribunal judiciaire de Bastia aux fins de :

- Condamner in solidum Madame [RX] et la SCI CPPX à lui verser les sommes susvisées,

Subsidiairement

- Ordonner une expertise destinée à déterminer la valeur de l'appartement et dans un tel cas, de lui allouer une provision de 27 000 € ;

- Garantie des condamnations prononcées contre Madame [RX] par la compagnie MAF

Condamner les requis à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement 3 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Bastia a :

Rejeté la demande de rabat de l'ordonnance de clôture.

Condamné in solidum Madame [JH] et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 17 132,03 avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement.

Précisé cependant qua la plafond de garantie de la MAF de 1 750 000 € s'appliquera à 1'ensemble des sinistres consécutifs à l'éboulement du 19 octobre 2015 at qu'elle pourra faire application de sa franchise.

Condamne in solidum Madame [RX], la compagnie MAF, la S.A.R.L. ROSA VERDE at la S.C.I. CPPX à payer à Madame [X] la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Madame [RX] et la S.C.I. CPPX aux dépens.

Sur les appels en garantie

Rejeté les demandes présentées contre Madame [I].

Dit que dans leurs rapports entre elles Madame [RX] et la S.C.I. CPPX supporteront respectivement 80 % et 20 % de responsabilité.

Dit que Mme [RX] ne pourra agir contre la S.C.I. CPPX alors que celle-ci pourra agir contre elle.

Rejette toutes les autres demandes.

Par déclaration du 2 février 2023, procédure enregistrée sous le numéro 23-67, la S.C.I. Cppx a interjeté appel du jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Bastia en ce qu'il a :

Condamné in solidum Madame [RX] la Cie MAF, la S.A.R.L. ROSA VERDE et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 17 132.03 euros avec intérêts aux taux légal à compter du présent jugement,

Condamné in solidum Madame [RX] et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du cpc ainsi qu'aux dépens,

Dit que dans les rapports entres elles Madame [RX] et la S.C.I. CPPX supporteront respectivement 80 % et 20 % de responsabilité dit que Madame [RX] ne pourra pas agir

contre la S.C.I. CPPX alors que celle-ci pourra agir contre elle,

Rejeté les demandes de la S.C.I. CPPX qui tendent notamment à dire et juger que la S.C.I. CPPX n'est pas responsable des dommages causés à Monsieur [EF], débouter Monsieur [EF] de toutes ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre de la S.C.I. CPPX, à titre subsidiaire, condamner in solidum Madame [RX] et Madame [I] à relever à garantir la S.C.I. CPPX de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, ramener à de bien plus juste proportions le quantum des indemnités compensatrices des préjudice de Monsieur [EF], en tout état de cause, donner acte à la S.C.I. CPPX de ce qu'elle s'en rapporte à justice quant à la désignation d'un expert aux frais avancés de Monsieur [EF], débouter Monsieur [EF] de sa demande d'article 700 et dépens,

Par déclaration du 7 février 2023, procédure enregistrée sous le numéro 23-90, Mme [AM] [RX] a interjeté appel du jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Bastia en ce qu'il a :

Condamné in solidum Madame [RX] et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 17 132,03 € avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

Condamné in solidum Madame [RX] et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné in solidum Madame [RX] et la S.C.I. CPPX aux dépens ;

Rejeté les demandes présentées contre Madame [I] ; Dit que dans leurs rapports entre elles les responsabilités seront réparties entre Madame [RX] et la S.C.I. CPPX à concurrence de 80 % et 20 % de responsabilité ;

Dit que Madame [RX] ne pourra agir contre la S.C.I. CPPX alors que celle-ci pourra agir contre elle ;

Rejeté toutes autres demandes.

Par conclusions déposées au greffe le 13 juillet 2023, la société d'assurances Mutuelle des architectes français a demandé à la cour de :

« Vu les articles 789-3 et 789-5, 145 et 146 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1353, 1240, I241, 1231-1, 1242 du Code civil,

Vu les conditions particulières et générales de la police MAF

Réformer le jugement en ce qu'il :

- a condamné in solidum Madame [RX] avec la SCI CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 17 132,03 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement.

- dit que la MAF devra garantir les condamnations prononcées à l'encontre de son assurée,

- a rejeté toutes autres demandes.

- a condamné in solidum Madame [RX] avec la SCI CPPX aux dépens,

- Rejeté les demandes présentées contre Madame [I].

- Dit que dans leurs rapports entre elles, les responsabilités seront réparties entre Madame [RX] et la SCI CPPX à concurrence de 80 % et 20 %.

- Dit que Madame [RX] ne pourra agir contre la SCI CPPX alors que celle-ci pourra agir contre elle.

Subsidiairement,

Le confirmer en ce qu'il a jugé que le plafond de garantie de la MAF de l.750.000 euros

s'appliquera à l'ensemble des sinistres consécutifs à l'éboulement du 19 octobre 2015 et qu'elle pourra faire application de sa franchise à l'égard de son assurée.

Statuant à nouveau sur les chefs de jugement critiqués

Juger que le fondement de l'action de la demanderesse est nécessairement contractuel.

Juger que le sinistre est sans lien avec l'opération de construction.

Juger que la réalisation d'un mur en crête de falaise par la SCI CPPX est le fait générateur exclusif du dommage.

En conséquence

Rejeter toutes demandes formées à l'encontre des constructeurs de la Résidence ROSA VERDE et particulièrement à l'égard de Madame [RX] et de la MAF et débouter Monsieur [EF] de ses demandes.

Juger que Madame [RX] n'a commis aucun manquement à son obligation de conseil.

Débouter Monsieur [EF] de ses demandes à son encontre et à l'encontre de la MAF et rejeter tous appels en garantie formes à son encontre.

Subsidiairement

Juger Madame [RX] et la MAF fondées à revendiquer le bénéfice de la clause exclusive de solidarité.

Rejeter en conséquence toute condamnation solidaire ou in solidum formée à son encontre et à l'encontre de la MAF.

Plus subsidiairement,

Juger la MAF fondée à obtenir la garantie intégrale de la SCI CPPX, de la S.A.R.L. ROSA VERDE et de Monsieur [NT] [I], Madame [W] [I] et Madame [J] [I] venant aux droits de Madame [M] [I].

Les condamner in solidum à la relever et garantir intégralement.

Rejeter les préjudices sollicités comme étant non fondés et non justifiés ou les réduire à de plus justes proportions.

Condamner tous succombants à payer à la MAF la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner les mêmes, ou tout succombant, aux dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES ».

Par déclarations du 24 juillet 2023, procédures enregistrées sous les numéros 23-508 et 513, M. [NT] [I], Mme [W] [I] et Mme [J] [I], sont intervenus volontairement dans le procédure à la suite du décès d'[M] [WR] le [Date décès 4] 2022.

Par conclusions déposées au greffe le 2 février 2025, M. [NT] [I], Mme [J] [I] et Mme [W] [I] ont demandé à la cour de :

« In limine litis

Dire irrecevables les appels en garantie et l'action formulée à' l'encontre de l'exploitante comme étant mal dirigée ;

AU FOND

Après avoir

Constaté qu'aucune faute ne peut être reprochée à Madame [M] [I] à la date de survenance du dommage.

Constaté qu'il n'existe aucun lien de causalité entre l'exploitation de la carrière et le dommage allégué.

Et au besoin en procédant par substitution de motif

Confirmer la décision du Tribunal Judicaire et ainsi,

Débouter la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE de l'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre de Monsieur [NT] [I], Madame [W] [I] et Madame [J] [I], en leur qualité d'héritiers de l'exploitante.

Débouter l'ensemble des parties à l'instance de toutes demandes fins et conclusions formulées à l'encontre des héritiers de l'exploitante Madame [M] [I].

Condamner la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE à supporter les frais et dépens de la présente instance.

Condamner la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE à payer la somme de 3 000 € aux trois héritiers de l'exploitante Madame [M] [I] au titre de l'art.700 du CPC.

Rejeter l'ensemble des demandes à titre principal ou accessoires y compris les demandes en garantie formulées à l'encontre des héritiers de Madame [M] [I].

Rejeter toutes autres demandes tendant à obtenir la condamnation des héritiers de Madame [M] [I].

Écarter l'exécution provisoire en raison des conséquences manifestement excessives sur le patrimoine des héritiers de Madame [M] [I] ».

Par décision du 4 octobre 2023, les procédures enregistrées sous les numéros 23-67 et

23-508, 23-90 et 23-513 ont été jointes sous les numéros 23-67 et 23-90.

Par ordonnance du 15 décembre 2023, le conseiller de la mise en état a :

- ordonné la jonction des procédure n°23-90 et 23-67sous le n°23-67

- ordonné le renvoi de l'affaire au 3 avril 2024 pour régularisation des écritures et clôture,

- dit que les dépens de l'incident suivront ceux du fond

Par conclusions déposées au greffe le 4 décembre 2024 M. [E] [EF] a demandé à la cour de :

« Confirmer le jugement déféré sur le problème de la responsabilité de Madame [AM] [RX] et de la Société CPPX dans le sinistre survenu le 19 octobre 2013 A [Localité 21].

En conséquence :

Les condamner in solidum A réparer les préjudices subis par Monsieur [E] [EF].

Sur le montant des préjudices faire droit à l'appel incident de Monsieur [E] [EF]

Et statuant A nouveau,

Condamner Madame [AM] [RX] et la Société CPPX A payer A Monsieur [E] [EF] les sommes suivantes :

- 15.000 € au titre de la perte de jouissance sur la période du 1 novembre 2015 au 1 Juin 2021

- 6 873,55 € au titre des avances de fonds du Syndicat des copropriétaires, pour les charges

de copropriété, les frais de procédure notamment d'expertise judiciaire, les frais de

location d'un système vidéo.

- 15 000 € au titre du préjudice moral sur 6 ans.

Dire que la Compagnie MAF garantira les condamnations prononcées A l'encontre de son

assuré.

Condamner les requis aux entiers dépens de1'Instance ainsi qu'A la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du CPC.

SOUS TOUTES RÉSERVES ».

Par ordonnance du 18 décembre 2024, le conseiller de la mise en état a :

DÉBOUTÉ Madame [AM] [RX] et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS de leur demande d'expertise,

DÉBOUTÉ les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

RENVOYÉ l'affaire à l'audience de mise en état du 5 février 2025 pour actualisation éventuelle des écritures et clôture (fixation envisagée à l'audience collégiale du 3 avril 2025),

DIT que les dépens de l'incident suivront ceux du fond.

Par conclusions déposées au greffe le 2 février 2025, M. [NT] [I], Mme [W] [I] et Mme [J] [I] ont demandé à la cour de :

In limine litis

Dire irrecevable l'action formulée à l'encontre de l'exploitante comme étant mal dirigée ;

Au fond

Après avoir constaté qu'aucune faute ne peut être reprochée à Madame [M] [I] à la date de survenance du dommage.

Constaté qu'il n'existe aucun lien de causalité entre l'exploitation de la carrière et le dommage allégué.

Et au besoin en procédant par substitution de motif

Confirmer la décision du Tribunal Judicaire et ainsi,

Débouter la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE de l'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre de Monsieur [NT] [I], Madame [W] [I] et Madame [J] [I], en leur qualité d'héritiers de l'exploitante.

Débouter l'ensemble des parties à l'instance de toutes demandes fins et conclusions formulées à l'encontre des héritiers de l'exploitante Madame [M] [I].

Condamner la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE à supporter les frais et dépens de la présente instance.

Condamner la S.C.I. CCPX, Madame [RX] et la S.A.R.L. ROSA VERDE à payer la somme de 3 000 € aux trois héritiers de l'exploitante Madame [M] [I] au titre de l'art.700 du CPC.

Rejeter l'ensemble des demandes à titre principal ou accessoires y compris les demandes en garantie formulées à l'encontre des héritiers de Madame [M] [I].

Rejeter toutes autres demandes tendant à obtenir la condamnation des héritiers de Madame [M] [I].

Écarter l'exécution provisoire en raison des conséquences manifestement excessives sur le patrimoine des héritiers de Madame [M] [I].

Par conclusions déposées au greffe le 4 février 2025, la S.C.I. Cppx a demandé à la cour de :

« Vu le jugement dont appel,

Vu le rapport de Monsieur l'Expert [V],

Vu les pièces versées aux débats,

Vu les dispositions de l'article 1242 du Code Civil,

Vu la jurisprudence citée,

À titre principal et avant dire droit :

' DÉSIGNER tel collège d'experts qu'il plaira à la Cour avec pour mission de déterminer, notamment, les causes et origines de l'effondrement de la falaise au droit de la résidence ROSA VERDE, le 19 octobre 2015,

En tout état de cause,

' DIRE ET JUGER que la S.C.I. CPPX n'est pas responsable des dommages causés aux demandeurs ;

' RÉFORMER le jugement dont appel en ce qu'il a retenu la responsabilité de la S.C.I. CPPX ;

' DÉBOUTER le demandeur de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la S.C.I. CPPX ;

' METTRE HORS DE CAUSE la S.C.I. CPPX ;

À titre infiniment subsidiaire,

' RÉFORMER le jugement en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de Madame [I] ;

' RÉFORMER le jugement en ce qu'il a retenu que la S.C.I. CPPX devait contribuer à hauteur de 20 % à la dette ;

' CONDAMNER in solidum Madame [RX] et Madame [I] à relever et garantir la S.C.I. CPPX de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

En tout état de cause,

' RAMENER à de bien plus juste proportions le quantum des indemnités compensatrices des préjudices sollicités par le demandeur ;

' CONDAMNER tout succombant in solidum à régler à la S.C.I. CPPX la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

' STATUER ce que de droit au titre des dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES ».

Par conclusions déposées au greffe le 28 février 2025, Mme [AM] [RX] a demandé à la cour de :

« Vu les articles 1103, 1104, 1231-1, 1240, 1241, 1242, 1792 et suivants du code civil,

Vu l'arrêté préfectoral n°D1/B2/LC en date du 8 janvier 1975,

Vu l'arrêté préfectoral n°83/390 en date du 14 mars 1983,

Vu le décret n°71-792 du 20 septembre 1971,

Vu le décret n°79-1108 du 20 décembre 1979,

INFIRMER le jugement 20/00948 rendu le 3 janvier 2023 par le Tribunal judiciaire de Bastia en ce qu'il a condamné in solidum Madame [RX], la MAF, la société ROSA VERDE et la S.C.I. CPPX à payer à Monsieur [EF] la somme de 17 132,03 euros au titre de divers préjudice, outre la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du CPC, et réparti les responsabilités à hauteur de 80 % à l'égard de Madame [RX] et de 20 % à l'égard de la société CPPX tout en précisant que cette dernière ne pourrait faire l'objet d'aucun recours ;

DÉCLARER l'appel principal interjeté par la S.C.I. CPPX mal fondé ;

DÉCLARER l'appel incident interjeté par Monsieur [EF] irrecevable et subsidiairement mal fondé ;

En conséquence,

Les DÉBOUTER de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Et la Cour, statuant à nouveau :

À TITRE PRINCIPAL

DÉBOUTER toute partie de toute demande formée tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que sur celui de la responsabilité délictuelle dès lors la cause exclusive du sinistre réside dans l'édification du mur érigé par la S.C.I. CPPX en crête de falaise et que Madame [RX] n'a pas manqué à son obligation de conseil, compte tenu de la qualité de co-maître d''uvre du maître d'ouvrage et, subsidiairement, que la faute de la maîtrise d'ouvrage est une cause étrangère exonératoire de responsabilité de l'architecte ;

En conséquence,

METTRE Madame [RX] HORS DE CAUSE ;

À TITRE SUBSIDIAIRE

DÉBOUTER toute partie de toute demande de condamnation solidaire ou in solidum formée à l'encontre de Madame [RX] dès lors que la clause d'exclusion de solidarité et d'in solidum s'applique ;

LIMITER toute condamnation de Madame [RX] à l'aune de sa faute propre, les parts de responsabilité de ROSA VERDE, la SCI CPPX, des consorts [I] venant aux droits de Madame [M] [I], LES FRÈRES PIACENTINI, CORSE GEOSCIENCES, SONDATECH, E.R.G. et l'APAVE SUDEUROPE SAS devant venir en déduction peu important qu'ils soient ou non dans la cause ;

RÉDUIRE à de plus juste proportion le pourcentage de de responsabilité retenu à son égard ;

À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE

CONDAMNER la S.C.I. CPPX et les consorts [I] venant aux droits de Madame [M] [F] à garantir intégralement Madame [RX] du paiement de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE

DÉBOUTER Monsieur [EF] de ses demandes tendant à l'indemnisation d'un prétendu préjudice de jouissance ;

RÉDUIRE le montant du préjudice moral à de plus justes proportions ;

DÉBOUTER toute partie de toute demande dirigée contre Madame [RX] ;

CONDAMNER in solidum la SCI CPPX, les consorts [I] venant aux droits de Madame [M] [F] et tout autre succombant à verser la somme de 5 000 € à Madame [RX] en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES ».

Par ordonnance du 5 mars 2025, la clôture a été fixée au 16 mai 2025 et l'affaire fixée à plaider au 5 juin 2025.

Le 5 juin 2025, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 3 septembre 2025.

Bien qu'ayant constitué avocat la S.A.R.L. Rosa verde n'a pas déposé d'écritures ; en application de l'article 474 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l'article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.

SUR CE

Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont considéré que la responsabilité contractuelle de l'architecte devait être ainsi que celle sur le fondement de l'article 1242 du code civil de la S.C.I. Cppx propriétaire de la falaise qui s'est effondrée, faisant droit ainsi aux demandes financières présentées et aux différents appels en garantie à l'exception de celui présentée à l encontre des ayants droit d'[M] [WR].

* Sur l'origine du désordre

Le rapport d'expertise initial a été déposé le 25 octobre 2016, pour une mission résultant d'une ordonnance de référé du 12 novembre 2015, complétée par ordonnance du 19 novembre 2015.

La mission global de l'expert judiciaire était la suivante :

- Se rendre [Adresse 25] à [Localité 27],

- Visiter les lieux, entendre les parties, se faire remettre tous documents utiles à la bonne

exécution de sa mission,

- Décrire les dommages occasionnés par l'effondrement de la falaise, définir et chiffrer le coût de la remise en état des ouvrages : immeubles et parking,

- Examiner l'immeuble et au moyen d'études, déterminer si la structure du bâtiment a été

affectée par le choc des rochers contre sa façade arrière,

- Procéder par tous moyens at l'examen de l'ensemble de la falaise surplombant le bâtiment afin de déterminer son état, prescrire les travaux de purge, de stabilisation et confortement devant permettre la mise en sécurité de l'immeuble, ainsi que les travaux de déblaiement,

- Déterminer et chiffrer le coût des travaux, en consultant au besoin plusieurs entreprises

qualifiées, en déterminer la durée,

- Rechercher les causes et origines de l'effondrement de la falaise et en cas de causes multiples évaluer les proportions relevant de chacune,

- Déterminer plus précisément s'il existe un lien de causalité entre l'opération de construction et l'éboulement litigieux,

- d'une manière générale, faire toutes observations et mesures nécessaires à la solution du

litige et plus particulièrement fournir tous les éléments techniques et de fait de nature à

permettre à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues,

- Se faire assister au besoin par tout sapiteur qui lui semblerait utile de voir intervenir.

- L'expert devra remettre une note technique présentant le programme des opérations à engager par la commune de [Localité 27] pour mettre un terme au péril grave et

imminent en termes d'études et conception, auquel est exposée la Résidence Rosa Verde.

Il ressort de l'expertise qu'une étude géotechnique a été réalisée dont il résulte que la construction a été édifiée sur une ancienne carrière non purgée et pas du tout sécurisée à l'issue de son exploitation -pages n°37 et 39 du rapport-, trois éboulements ayant eu lieu entre 1997 et 2015, l'expert judiciaire précisant que la résidence Rosa verde a été implantée au pied de l'ancien front de taille, les nombreux trous de mine le long des parois en témoignant et l'expert de noter -page n°42- « Il existe bien une nappe aquifère de fissures (aquifère discontinue) dans ce contexte métamorphique. De plus, on constate de nombreux suintements, écoulements au niveau d'un grand nombre de fissures le long de la falaise ».

Sur place, il est relevé qu'un dièdre numéroté 4 est détaché du front de taille, qu'il a entraîné un autre bloc en le cisaillant avec une menace de rupture d'une grosse masse rocheuse, de 75 m² en plus de ce qui s'est déjà effondré, l'expert notant -page n°47- « Qu'il existait de nombreux écoulement d'eau au niveau de diverses fissures aussi bien dans la partie Ouest de la falaise, que dans le partie Est où s'est déroulée l'éboulement » et

- page n°49- « La présence de plusieurs fentes alpine (cavités d'extension tapissées de cristaux : quartz, chlorites, calcite, entre autres formés par la circulation de fluides hydrothermaux) très altérés par des circulations d'eau. Ces zones sont 'pourries ' et partent en poussières ».

Il est aussi relevé qu'un dièdre numéroté 13, situé en partie droite de la falaise, est encore plus dangereux que le numéro 4 -pages n°54 et 55-, situé en partie gauche, que l'état de la falaise faisait « que le moindre coup de vent, le moindre passage d'un lézard, pouvait faire tomber des pierres à n'importe quel moment », l'expert judiciaire remarquant de nombreux petits cailloux de taille centimétriques sur le parking du bâtiment A de la copropriété sinistrée. Il note aussi au sujet de l'architecte, Mme [AM] [RX], que

celle-ci interrogée par ses soins, après qu'il lui a fait remarquer qu'« En tant que professionnel, il suffit de jeter un coup d''il à la falaise pour voir que c'était évident qu'il y avait des risques », reconnaît qu'il lui avait été conseillé de surveiller la falaise et de réaliser une étude géotechnique G5 par les sociétés Sondatech et Corse géosciences

- entreprises de géotechnique- ; l'expert notant « Malheureusement, ces recommandations, pourtant importantes, n'ont pas été suivies d'effet ».

L'expert, dans le cadre d'une note envoyée au partie en cours de mission -page n°60- précisait qu'il avait réalisé un examen beaucoup plus détaillé de la falaise, non pas d'une partie comme cela avait fait précédemment, derrière la résidence, compte tenu du caractère pointue de la mission confiée, ce qui lui avait permis de mieux appréhender les mécanismes de rupture des masses rocheuses par l'analyse des différentes familles de miroirs de failles, de fissures, de pendages et de direction des plans de rupture, tout en précisant que l'eau joue un rôle très important dans la rupture des masses rocheuses.

Dans son analyse, l'expert judiciaire rappelle que l'immeuble objet de la procédure a été construit sur le site d'une carrière abandonnée en 1983, que les mises en sécurité de la falaise, à savoir purges et aménagement de la carrière n'ont pas été réalisées tant en 1975 qu'en 1983, celle-ci restant dans un état inachevé sans mise en sécurité, les dièdres 4 et 13 restant en équilibre instable n'étant maintenus que grâce à des ondulations, des discontinuités et des bosses au sein de la roche elle-même.

Il précise qu'il n'y a pas de lien de causalité entre l'effondrement et la construction rapportant que tous les sondages et travaux effectués préalablement à l'acte de construire lui-même ont commencé le 19 mai 2011 pour s'achever en septembre 2011, par les travaux de fondation, sans que cela n'entraîne de vibrations ou d'ondes affectant la falaise et pouvant la déstabiliser -pages 79 et 80-, rappelant toutefois que dès l'origine la falaise nécessitait une étude spécifique afin de la conforter mentionnant que l'agent déclencheur de l'effondrement « a été le contexte d'événements météorologiques intenses.... qui perduraient depuis des jours, voire depuis plusieurs mois...L'eau est toujours un facteur déclenchant car il y a mise en charge des fractures, fissures. Étant donné le contexte géologique imperméable, mais possédant une porosité de fissures, l'eau se concentre dans celles-ci. Lorsque les fissures sont saturées, la pression interstitielle est telle qu'il y a une mise en charge et c'est ce qui a joué le rôle déclenchant dans la rupture des blocs ».

Selon l'expert judiciaire les blocs de roche ont glissé en suivant les plans de fissuration existants à la suite de pluies importantes et il retient les responsabilités du propriétaire initial du fonds sur lequel a été construit l'immeuble impacté, en ce que ce dernier étant une ancienne carrière celle-ci aurait du être mise en sécurité, ce qui n'a pas été réalisé, de l'État français qui n'a pas effectué et réclamé les rapports annuels obligatoires relatifs à la carrière et se devait de vérifier sa sécurisation et de l'architecte Mme [AM] [RX] qui, alors qu'elle avait tous les éléments pour être en alerte, n'a pas tenu compte des risques liés à la falaise rocheuse alors que, par sa mission, elle aurait dû préconiser à la cliente de réaliser une étude géotechnique pour conforter l'ancien front de taille, l'expert judiciaire qualifiant même son attitude d'irresponsable. -page n°88-. Tout en concluant que la résidence Rosa verde n'aurait jamais dû voir le jour dans le contexte dans lequel sa construction a été réalisée.

Il est ainsi certain, sans nécessité d'un complément d'expertise ou d'une contre-expertise comme le sollicite la S.C.I. Cppx, que l'origine du désordre est liée à un effondrement de la falaise surplombant la construction réalisée, sans aucun lien avec le nature du sol sur lequel le dit bâtiment a été édifié ; cela ressort très clairement des conclusions du rapport d'expertise judiciaire qui ne sont pas valablement contestés.

Ainsi, contrairement à ce que Mme [AM] [RX] a voulu faire retenir, le mur édifié par la S.C.I. Cppx en lige de crête, n'est en rien responsable dans le survenance dudit désordre.

Quant à la problématique de la mise en sécurité du site de l'ancienne par son ancienne propriétaire, [M] [WR], l'expertise judiciaire démontre que l'effondrement de la falaise ne provient pas de l'acte de construire lui-même mais d'un défaut d'entretien.

Les consorts [I] démontrent aussi qu'ils ont tous les justificatifs d'une cessation d'activité imposée et faite dans les normes, avec une carrière réhabilitée -pièce n°5 de leur bordereau, arrêté du 31 mars 1995-, obligation dont leur autrice n'était d'ailleurs plus redevable lors de la survenance du désordre et si, par la suite, la propriété de la falaise a été transférée à la S.C.I. Cppx, l'entretien de celle-ci aussi avec l'obligation de sécurité pesant sur la propriétaire du fonds en application de l'article 1242 du code civil en sa qualité de gardienne et sur le fondement de la responsabilité du fait des choses.

Cependant les consorts [I] faisant état d'une complément d'expertise organisé dans le cadre d'autres procédures relatives elles aussi à la résidence Rosa verde et aux désordres qu'elle a subis, il convient d'analyser ce document produit au débat.

La mission de l'expert était la suivante :

« - ordonnons un complément d'expertise,

- désignons pour y procéder M. [IR] [N], expert inscrit sur la liste de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence,

Laboratoire Géoazur CNRS UNS OCA

[Adresse 13]

[Localité 1], avec pour mission de :

- se rendre sur la falaise située sur les parcelles se rendre sur la falaise située sur les parcelles D [Cadastre 10], D [Cadastre 14], D [Cadastre 15] et D [Cadastre 11] et surplombant la résidence Rosa Verde, sise [Adresse 25] à [Localité 27]

- visiter les lieux, entendre les parties, se faire remettre tout document utile à la bonne exécution de sa mission,

- constater l'existence et examiner le mur érigé en 2013 sur la falaise propriété de CPPX,

- déterminer les conditions dans lesquelles cet ouvrage a pu contribuer à l'effondrement de la falaise le 19 octobre 2015 et, le cas échéant, en évaluer la proportion,

- fournir tous les éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues,

- fixons à l'expert un délai de huit mois à compter de sa saisine, c'est-à-dire à compter de l'avis de consignation délivré par le greffe pour déposer son rapport accompagné de toutes les pièces complémentaires sauf prorogation accordée,

- disons que la consignation de 5 000 euros à la charge de Mme [AM] [RX] devra être versée dans le mois de la notification de la présente décision, sauf à justifier du bénéfice de l'aide juridictionnelle, à peine de caducité de la présente désignation conformément à l'article 271 du code de procédure civile,

- disons que l'expert devra procéder dans le respect absolu du principe du contradictoire, établir un inventaire des pièces remises entre ses mains ainsi que des documents utilisés dans le cadre de sa mission et répondre aux dires des parties en cours d'expertise ou avant le dépôt du rapport final dans un pré-rapport établi éventuellement forme de synthèse pour éviter un surcoût, en rappelant aux parties qu'elles sont irrecevables à faire valoir des observations au delà du délai fixé,

- disons que l'expert devra, dès sa saisine, préciser sans délai aux parties le calendrier de ses opérations, le coût prévisible de sa mission sous réserve de l'évolution de celle-ci et de la décision finale du juge taxateur,

- rappelons en application des dispositions de l'article 276 du code de procédure civile, que lorsque l'expert a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations, il n'est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, à moins qu'il n'existe une cause grave et dûment justifiée, auquel cas, il en fait rapport au juge ;

lorsqu'elles sont écrites, les dernières observations ou réclamations des parties doivent rappeler de façon sommaire le contenu de celles présentées antérieurement ; à défaut, elles sont réputées abandonnées par les parties ; l'expert doit faire mention, dans son avis, de la suite donnée aux observations ou réclamations présentées,

- disons que l'expert devra vérifier le contenu de sa mission et la qualité des parties et des intervenants aux opérations ainsi que la nécessité de provoquer éventuellement la mise en cause d'autres acteurs, à la diligence des parties, sous le contrôle, le cas échéant, du magistrat chargé de la surveillance des expertises,

- désignons en cette qualité, le conseiller chargé des experts à la Cour d'appel de Bastia,

- disons que ce magistrat sera informé de toutes difficultés affectant le bon déroulement de la mesure, qu'il accordera, à titre exceptionnel, toute prorogation du délai imparti sur demande motivée de l'expert et fixera, s'il y a lieu, toute provision complémentaire, il pourra décider, saisi sur incident après note spéciale de l'expert, de l'exécution de travaux urgents, au besoin pour le compte de qui il appartiendra,

- autorisons l'expert en vertu de l'article 278 du code de procédure civile à s'adjoindre tout technicien ou homme de l'art étranger à sa spécialité,

- ordonnons le renvoi de l'affaire au disons que l'affaire sera renvoyée au 6 septembre 2023 pour vérification du paiement de la provision et, à défaut de demande de retrait de rôle formulée par les parties, radiation de l'affaire du rôle dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,

- disons que M. [U] [K], M. [EN] [TE], M. [E] [NC], Mme [Y] [EW], M. [ZV] [B], Mme [XH] [O], M. [IZ] [NC], Mme [G] [K], et Mme [D] [TE] devront conclure au fond sur leur qualité à agir suite à la cession du bien,

- déboutons les parties de leurs demandes plus amples ou contraires en incident,

- disons que les dépens de l'incident suivront ceux du fond ».

En page n°12 du complément d'expertise, l'expert judiciaire diligenté écrit au sujet du mur longeant la falaise en sa partie supérieur, mur de 84 mètres linéaires et de 4 mètres de hauteur, qu'il pose un problème parce qu'il a été édifié sans « étude géotechnique préalable obligatoire à toute conception d'ouvrage de soutènement », retenant déjà le postulat qu'il s'agissait d'un mur de soutènement, mais sans définir ce qu'il soutenait.

Or, un mur de soutènement se définit comme ainsi « une structure rigide conçue pour retenir ou stabiliser des matériaux de terrain, souvent du sol, sur une pente ou une élévation. Il sert principalement à prévenir les glissements de terrain, l'érosion et à gérer les différences de niveau dans un paysage ».

Ce qui n'est absolument pas le cas en l'espèce, ledit mur étant qualifié de mur de clôture -page 42 du complément- par la S.C.I. Cppx sur le terrain de laquelle il a été édifié avec la précision que s'il y a eu remblais déposés par la suite, ces derniers étaient composés de cailloutis de blocs et de terre sans cohésion, constituant ainsi des matériaux drainant.

Dans le cadre de son complément, l'expert judiciaire désigné note que ledit mur est équivalent à la création d'un barrage en béton avec une quasi absence de possibilité d'écoulement et d'autre part une surcharge avec seulement six barbacanes de 15 centimètres de large, écartant sans véritable explication un constat de commissaire de justice -pièce n°6 de la S.C.I. Cppx- du 15 mars 2023 qui recense quarante-et-une barbacanes, avec leurs photographies, se contentant d'écrire que celles-ci ne permettent pas l'écoulement des eaux pluviales et des eaux de subsurface alors que le mur aurait un effet de rétenteur d'eau, procédant ainsi, en l'absence de toute mise en eau ou d'étude par temps de pluie, par affirmations totalement subjectives.

En effet, il résulte des constatations sur le site de M. [Z] [R], ingénieur géotechnicien -pièce n°7 de l'appelante-, pour le bureau géotechnique Alpes ingé, que les écoulements d'eau se fond principalement à l'Est et à l'Ouest du mur, l'effondrement ayant eu lieu à l'Est, que ce dernier talweg est plus marqué avec une végétation dense à son pied et une canalisation des eaux pluviales par ce talweg sans, a priori, atteindre le mur, la pente ayant une inclinaison vers l'Est de 3 à 5 °. M. [R] écrivant, en décembre 2023, en page n°17 de son diagnostic, « les observations de terrain, la comparaison des levés topographiques de 2004 et d'aujourd'hui, et les modélisations d'écoulements présentées et détaillées dans ce rapport démontent...[que] le terrain non remanié canalise 95 % des écoulements en dehors du mur », ajoutant dans le paragraphe suivant « l'événement se serait inévitablement produit à court ou moyen terme (2 à 10 ans). Le mur n'a pu jouer un rôle que d'accélérateur ou aggravant et ce dans une moindre mesure car il n'est concerné que par 5,2 % des écoulements et présente un drainage fonctionnel et conforme aux règles de l'art » anéantissant ainsi par des observations sur site les conclusions de l'expertise judiciaire complémentaires.

À cela s'ajoute que ledit mur, est décrit avec photographies à l'appui -pièce n°7 de l'appelante- comme étant globalement en bon état, sans déformation spécifique, sans zone humide ou végétation au niveau de son parement, sans ruissellement ou concrétion ni trace d'écoulement de fines ou stagnation d'eau avec un drainage par un réseau de barbacanes régulièrement dispersées, barbacanes complètement fonctionnelles.

À cela, l'expert judiciaire dans le cadre de son complément d'expertise écrit qu'il « observe un mur écran qui interdit le passage aussi bien des eaux de surface que des eaux souterraines » et finit, en page n°15 de son complément de rapport, par qualifier les remarques des techniciens consultés par l'appelante, d' « attaques faites sur les compétences de l'expert...hors de propos voir calomnieuse », cela sans répondre à l'argumentaire développé, pourtant basé sur les observations sur le terrain et, en conséquence, totalement objectives.

L'ingénieur géotechnicien écrit même que sur l'épaisseur du mur il y a un mortier grossier et parfois lacunaire facilitant ainsi le cheminement des éventuelles circulations d'eau et empêchent toute surpression hydraulique, allant ainsi totalement à l'encontre des conclusions de l'expert judiciaire dans le complément d'expertise et sans que ce dernier vienne argumenter au soutien de son hypothèse pourtant totalement anéanti d'une responsabilité du mur dans le survenance de l'effondrement.

D'ailleurs, quand on reprend l'expertise réalisées en première instance et le positionnement des deux dièdres numérotés 4 et 13, qualifiés de dangereux, à l'origine de l'arrêt de péril imminent de la commune de [Localité 27], il en ressort que ces derniers

- pages 46 et 47 du rapport- ne sont pas du tout situés à l'Est du mur et donc dans la zone d'effondrement mais le long du mur lui-même, ce qui infirme totalement la conclusion du complément d'expertise, les eaux pluviales n'étant pas retenues ou déviées par ledit mur mais évacuées par les deux talwegs à l'Est et à l'Ouest du mur et par les fissures du sol, seuls 5,2 % des eaux pluviales atteignant le dit mur -page 21 du complément- et étant évacuées par les barbacanes installées relevées dans le cadre du constat de commissaires de justice sus-mentionné.

De plus, dans un rapport des 30 octobre et 2 novembre 2015, le bureau de recherches géologiques et minières, en la personne de M. [IR] [P], rédacteur, à la demande de la préfecture de la Haute-Corse conclut que le sinistre est dû à des facteurs de prédisposition naturelle, notamment l'existence de fractures à pendages avals se croisant avec la surface topographique pour former un panneau prédécoupé dont la stabilité peut apparaître, à rebours, précaire. Ces fractures continues forment une surface relativement lisse. Elles sont le siège d'écoulements modérés en temps normal, ou de nombreux suintements s'observent sur la paroi.

Il est dû aussi à un paramètre de déclenchement naturel : lors d'une période pluvieuse anormale (le rapport Météo-France précise que les cumuls de précipitations sur les trois et six derniers mois avant l'événement présentent un caractère anormal ainsi que le cumul de pluie sur 24 heures entre le 1er et Ie 2 octobre 2015, supérieure à la valeur décennale).

En effet, il est relevé que les écoulements avals ont été saturés avec un effet entonnoir ayant permis la mise en charge hydraulique des fractures en amont dans le massif ; ce qui a permis de compenser les forces de frottements qui maintenaient les panneaux rocheux en équilibre et initié son mouvement sur un coussin d'eau le long des fractures à pendage aval.

Pour ce bureau, il s'agit d'un mouvement de terrain d'origine naturelle sur un ancien front de taille de carrière qui suit une famille de fractures. Cet éboulement représente un caractère anormal par son intensité principalement lié aux facteurs de prédisposition (fracture majeure à pendage aval se recoupant, lithologie massive), et au facteur de déclenchement (épisode pluvieux anormal).

Conclusions dans lesquelles le mur litigieux n'a aucune incidence dans la survenance du désordre et qui vont à l'encontre de celles du complément d'expertise que la cour ne peut retenir, en application des dispositions de l'article 246 du code de procédure civile précité, l'expert désigné ayant construit son complément d'expertise sur un postulat de responsabilité du mur dans la survenance du désordre sans en démordre malgré les constats objectifs sur site et les critiques fondées développées par les différentes parties.

Il convient ainsi, de ne pas retenir la conclusion émise par l'expert désigné dans le cadre d'une autre procédure et, sur l'origine du désordre d'accueillir celle du seul rapport déposé en première instance dans la présente instance.

- Sur les responsabilités encourues

Les premiers juges ont considéré que les dispositions de l'article 1792 du code civil étaient applicables en l'espèce les désordres portant atteintes à la destination et à la solidité de l'ouvrage, ce qui est incontestable, ayant leur origine dans un vice du sol quand bien même ce vice se situe dans le fonds voisin.

Cette extension des dispositions de la garantie décennale des constructeur au vice existant sur le fonds voisin est osé et ne peut être retenue par la cour, le débat et les pièces produites, dont le rapport d'expertise, excluent toute responsabilité née de l'acte de construire lui-même et pointent un dysfonctionnement dans l'action de la maîtresse d''uvre et dans l'entretien de la falaise par le voisin. C'est donc sur cette base et sur la responsabilité découlant du non-respect du devoir de conseil de l'architecte et de défaut d'entretien de la falaise que les responsabilités des différents intervenants doivent être analysées.

Les premiers juges ont retenu dans le cadre du partage de responsabilité une responsabilité de 80 % pour l'architecte au titre de son obligation de conseil, de 10 % pour la S.C.I. Cppx au titre de la responsabilité du fait des choses en sa qualité du propriétaire de la falaise dont sont issus les éboulements destructeurs et 10 % au titre de la S.A.R.L. Rosa verde en sa qualité de maîtresse de l'ouvrage qui n'a pas retenu, faisant preuve de légèreté, les divers conseils contenus dans les rapports expertaux.

La responsabilité de la S.C.I. Cppx, en sa qualité de propriétaire de la falaise, est en conséquence indéniablement engagée comme les premiers juges l'ont retenu par application de l'article 1242 du code civil qui dispose notamment qu'« On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde...».

Toutes les analyses démontrent que la falaise n'a pas été purgée, que quoi qu'il arrive le désordre se serait produit, selon la pièce n°7 en page n°17 du diagnostic produit par la société civile immobilière elle-même ; il convient de confirmer le premier jugement sur ce point.

En ce qui concerne la responsabilité de la maîtresse d''uvre, la S.A.R.L. Rosa verde, il n'est pas contesté que même en sa qualité de professionnelle de la construction, cette société a fait appel à une architecte pour justement être protégée de tout aléa dans le cadre de son opération de construction.

Il est vrai que la maîtresse de l'ouvrage a été destinataire, comme son architecte, de toutes les études et conseils contenus dans les différents rapports produits.

Cependant, tout en étant professionnelle de la construction, elle a fait appel à une architecte pour justement que des solutions soient trouvées aux difficultés ou problématiques de chantier, et ce, même si elle n'a pas encouragée et sollicitée explicitement ladite professionnelle sur les points de difficultés mis en avant par les bureaux d'études relativement à la falaise et à la nécessite d'un diagnostic géotechnique de type G5.

Ce type de diagnostic est préconisé dans les cas de problèmes structurels tels que des fissures, des affaissements ou des instabilités, dont il est crucial d'identifier l'origine pour permettre mesures de préventions efficaces. Ce diagnostic géotechnique G 5 est une analyse approfondie et essentielle pour évaluer la stabilité de la structure à bâtir en tenant compte des conditions géotechniques locales. Contrairement à des études superficielles, il repose sur des investigations détaillées pour détecter les mouvements du sol, les tassements, les contraintes géologiques et d'autres facteurs pouvant impacter la construction envisagée.

Il est effet mentionné dans le diagnostic de la société Sondatech du 21 janvier 2011 il est indiqué que celui-ci ne concerne pas « la stabilité des talus rocheux amonts et pour lesquels, à notre avis ne mise en sécurité est à prévoir » -page 9- ajoutant -page 10- relativement aux généralités des terrassements « préalablement aux travaux de terrassement, il est nécessaire de vérifier la nature et la géométrie des talus mitoyens (hauteur, nature, pendanges, discontinuités, indices d'instabilité ou de mouvement, etc.) Afin d'établir précisément l'étendue des mesures de protection spécifiques à mettre en 'uvre pour garantir leur stabilité » et un peu plus loin de préciser, en ce qui concerne les talus [autrement dit la falaise de la S.C.I. Cppx] eux -mêmes, « Une série d'imposants talus rocheux sub-verticaux domine la partie arrière du bâtiment projeté. Ces talus feront l'objet des dispositions spécifiques nécessaires à la mise en sécurité du site. Ces dispositions (par exemple à l'aide de grillage pare-chute, épinglage, etc.) Peuvent être établies dans le cadre d'une étude géologique spécifique des talus. », avec en page n°20 l'indication d'un diagnostic G5 à réaliser.

L'expert judiciaire de première instance dans son rapport, relativement à l'architecte, écrit -page 37 du rapport- qu'un contrat d'architecte a été signé le 15 juillet 2010 entre la maîtresse de l'ouvrage, la S.A.R.L. Rosa verde, et la maîtresse d''uvre Mme [AM] [RX], architecte avec une mission relative aux études préliminaires à l'acte de construite.

Il indique que dans ce cadre l'architecte choisi, notamment « analyse le programme, visite les lieux, prend connaissance des données techniques, juridiques et financières qui lui sont communiquées par le maître d'ouvrage. À cette occasion, il émet toutes les observations et propositions qui lui semblent utiles (Cahier des clauses générales Ordre des Architectes) » et que Mme [RX], alors qu'elle avait en main ce qu'elle ne conteste pas, un rapport de la société Corse géosciences recommandant une analyse des risques liés à la falaise, n'en a pas tenu compte, pas plus que dans le cadre de sa mission de « projet de conception générale » dans le cadre de laquelle un architecte « établit l'ensemble des spécifications détaillées des ouvrages sous la forme d'un Cahier des Clauses Techniques Particulières (C.C.T.P.) comprenant : pour chaque corps d'état :

- Un document écrit descriptif des ouvrages, précisant leurs spécifications techniques ; s'il est commun de plusieurs marchés, ce document fixe les limites de chaque marché.

- Des documents graphiques décrivant par des plans et des dessins, éventuellement fourmis sur support informatique ou numérisé, les dispositions particulières des ouvrages à réaliser.

- S'il y a lieu, des pièces annexées fournissant aux entrepreneurs des données complémentaires pour l'exécution des travaux. (Cahier des clauses générales Ordre des Architectes)'

Elle aurait du préconiser à son client, la sarl ROSA VERDE, de réaliser une étude géotechnique pour conforter l'ancien front de taille ».

L'architecte et son assureur font valoir pour contester leur responsabilité qu'il existe des liens forts entre la maîtresse de l'ouvrage, la S.A.R.L. Rosa verde, la propriétaire de la falaise, la S.C.I. Cppx et la propriétaire du fonds sur lequel le bâtiment a été construit faisant que la S.A.R.L. Rosa verde se devait de connaître l'état de la falaise et le risque encouru dans la cadre d'action de construire entreprise. De même, elles font valoir que l'architecte avait une mission partielle relativement au projet de construction, n'ayant pas été associée à la phase de définition technique des ouvrages et pas mise en possession des éléments permettant d'appréhender des contraintes connues des autres intervenants.

Ce positionnement fait totalement fi de la qualité de professionnelle de l'architecte, du fait que comme l'expert judiciaire l'a relevé, il ressort du contrat lui-même la liant à la maîtresse de l'ouvrage que, dans le cadre des études préliminaires, avec les avertissements de deux sociétés de géotechnique relativement à la nécessité d'une étude géotechnique portant sur la falaise, n'état ni géologue ni géotechnicienne, comme l'expert judiciaire le rappelle en page 91 de son rapport, elle se devait de suivre les préconisations des sachants en la matière, ce qu'elle n'a pas fait, commettant une faute, en sa qualité de professionnelle de la construction, qu'elle droit assumer.

Celle-ci d'ailleurs ne le conteste pas vraiment ayant déclaré à l'expert lui-même -page n°57 du rapport- « On nous a juste conseillé de surveiller la falaise...On nous a conseillé de faire réaliser une étude géotechnique G 5 », ce qui est largement suffisant pour caractériser la faute dans le cadre de l'obligation de conseil pesant sur un architecte professionnel de la construction, attitude qualifiée par l'expert judiciaire d' « irresponsable » (-page n°88 du rapport).

En effet, dans ce cadre, un architecte se doit de signaler tous les risques et inconvénients que présente un projet. Et en l'espèce, alors que des avertissements avaient été donnés par plusieurs bureaux géotechniques, l'architecte n'a aucunement mis en garde la maîtresse de l'ouvrage de la réalité dudit risque, ne pouvant en sa qualité de professionnelle se retrancher derrière le fait qu'il y aurait des liens entre la maîtresse de l'ouvrage, la propriétaire du fonds sur lequel la falaise se situe et la propriétaire initiale du lot à construire, et même si la maîtresse de l'ouvrage par le biais de son gérant et de ses sociétaires peut avoir des notions de construction au titre comme cela est indiqué d'entreprise générale, cela ne dispense aucunement l'architecte, professionnelle de la construction, de mettre en exergue, dans le cadre de son devoir de conseil, les difficultés d'un projet dont elle ne nie pas avoir été informée directement par les sociétés de géotechniques, et ce, contrairement à la maîtresse de l'ouvrage, dont il n'est nullement rapporté qu'elle avait analysé cette information ou qu'elle en avait d'ailleurs la capacité d'analyse, pas plus qu'elle aurait commis une faute exonératoire en poursuivant malgré ces information son acte de construire, alors qu'elle avait fait appel une architecte dont la mission était de lui éviter un tel déboire, cette dernière par son abstention, commettant ainsi une faute ayant entraîné des conséquences graves qu'elle se doit de réparer.

Il convient donc de rejeter la demande relative à la maître d'ouvrage présentée par l'architecte.

Au sujet de la responsabilité de la maîtresse de l'ouvrage par rapport à la garantie des vices cachés, il y a lieu de rappeler qu'ayant fait appel à une architecte professionnelle de l'acte de construire, la S.A.R.L. Rosa verde, même si elle a eu connaissance des divers rapports préconisant un diagnostic G 5 de la falaise, il ne peut lui être reproché l'existence d'un vice caché alors qu'elle-même a été victime de l'inconséquence de l'architecte avec laquelle elle était contractuellement liée dont l'attitude a été qualifiée d'irresponsable par l'expert judiciaire. Il y a lieu de rejeter cette demande à l'encontre de la S.A.R.L. Rosa verde qui ne pouvait connaître, en se qualité de non-professionnelle, le vice dont son ouvrage était affecté.

En ce qui concerne le complément d'expertise organisé par le conseiller de la mise en état dans le cadre d'autres procédures similaires concernent d'autres copropriétaires, il a été mis dans le débat par certaines parties qui l'ont produit et qui souhaitent que la cour fasse siennes les conclusions dudit complément.

En page n°12 du complément d'expertise, l'expert judiciaire diligenté écrit au sujet du mur longeant la falaise en sa partie supérieur, mur de 84 mètres linéaire et de 4 mètres de hauteur, qu'il pose un problème parce qu'il a été édifié sans « étude géotechnique préalable obligatoire à toute conception d'ouvrage de soutènement », retenant déjà le postulat qu'il s'agissait d'un mur de soutènement, mais sans définir ce qu'il soutenait.

Or, un mur de soutènement se définit comme ainsi « une structure rigide conçue pour retenir ou stabiliser des matériaux de terrain, souvent du sol, sur une pente ou une élévation. Il sert principalement à prévenir les glissements de terrain, l'érosion et à gérer les différences de niveau dans un paysage ».

Ce qui n'est absolument pas le cas en l'espèce, ledit mur étant qualifié de mur de clôture -page 42 du complément- par la S.C.I. Cppx sur le terrain de laquelle il a été édifié avec la précision que s'il y a eu remblais déposés par la suite ces derniers étaient composés de cailloutis de blocs et de terre sans cohésion, constituant ainsi des matériaux drainant.

Dans le cadre de son complément, l'expert judiciaire désigné note que ledit mur est équivalent à la création d'un barrage en béton avec une quasi absence de possibilité d'écoulement et d'autre part une surcharge avec seulement six barbacanes de 15 centimètres de large, écartant sans véritable explication un constat de commissaire de justice -pièce n°6 de la S.C.I. Cppx- du 15 mars 2023 qui recense quarante-et-une barbacanes, avec leurs photographies, se contentant que celles-ci ne permettent pas l'écoulement des eaux pluviales et des eaux de subsurface alors que le mur aurait un effet de rétenteur d'eau, procédant ainsi, en l'absence de toute mise en eau ou d'études par temps de pluie, par affirmations totalement subjectives.

En effet, il résulte des constatations sur le site de M. [Z] [R], ingénieur géotechnicien -pièce n°7 de l'appelante-, pour le bureau géotechnique Alpes ingé, que les écoulements d'eau se fond principalement à l'Est et à l'Ouest du mur, l'effondrement ayant eu lieu à l'Est, que ce dernier talweg est plus marqué avec une végétation dense à son pied et une canalisation des eaux pluviales par ce talweg sans, a priori, atteindre le mur la pente ayant une inclinaison vers l'Est de 3 à 5 °. M. [R] écrivant, en décembre 2023, en page n°17 de son diagnostic « les observations de terrain, la comparaison des levés topographiques de 2004 et d'aujourd'hui, et les modélisations d'écoulements présentées et détaillées dans ce rapport démontent...[que] le terrain non remanié canalise 95 % des écoulements en dehors du mur », ajoutant dans le paragraphe suivant « l'événement se serait inévitablement produit à court ou moyen terme (2 à 10 ans). Le mur n'a pu jouer un rôle que d'accélérateur ou aggravant et ce dans une moindre mesure car il n'est concerné que par 5,2 % des écoulements et présente un drainage fonctionnel et conforme aux règles de l'art» anéantissant ainsi, par des observations sur site, les conclusions de l'expertise judiciaire complémentaire.

À cela s'ajoute que ledit mur, est décrit avec photographies à l'appui -pièce n°7 de l'appelante- comme étant globalement en bon état, sans déformation spécifique, sans zone humide ou végétation au niveau de son parement, sans ruissellement ou concrétion ni trace d'écoulement de fines ou stagnation d'eau avec un drainage par un réseau de barbacane régulièrement dispersées, barbacanes complètement fonctionnelles.

À cela, l'expert judiciaire dans le cadre de son complément d'expertise écrit qu'il « observe un mur écran qui interdit le passage aussi bien des eaux de surface que des eaux souterraines » et finit, en page n°15 de son complément de rapport par qualifier les remarques des techniciens consultés par l'appelante, d' « attaques faites sur les compétences de l'expert...hors de propos voir calomnieuse », cela sans répondre à l'argumentaire développé, pourtant basé sur les observations sur le terrain et, en conséquence, totalement objectives.

L'ingénieur géotechnicien écrit même que sur l'épaisseur du mur il y a un mortier grossier et parfois lacunaire facilitant ainsi le cheminement des éventuelles circulations d'eau et empêchent toute surpression hydraulique, allant ainsi totalement à l'encontre des conclusions de l'expert judiciaire dans le complément d'expertise et sans que ce dernier vienne argumenter au soutien de son hypothèse pourtant totalement anéanti d'une responsabilité du mur dans le survenance de l'effondrement.

D'ailleurs, quand on reprend l'expertise réalisée en première instance et le positionnement des deux dièdres numérotés 4 et 13, qualifiés de dangereux, à l'origine de l'arrêt de péril imminent de la commune de [Localité 27], il en ressort que ces derniers

- pages 46 et 47 du rapport-, ne sont pas du tout situés à l'Est du mur et donc dans la zone d'effondrement mais le long du mur lui-même, ce qui infirme totalement la conclusion du complément d'expertise les eaux pluviales n'étant pas retenues ou déviées par ledit mur mais évacués par les deux talwegs à l'Est et à l'Ouest du mur et par les fissures du sol seuls 5,2 % des eaux pluviales atteignant le dit mur -page 21 du complément- et étant évacuées par les barbacanes installées relevées dans le cadre du constat de commissaires de justice sus-mentionné.

De plus, dans un rapport des 30 octobre et 2 novembre 2015, le bureau de recherches géologiques et minières, en la personne de M. [IR] [P], rédacteur, à la demande de la préfecture de la Haute-Corse, conclut que le sinistre est dû à des facteurs de prédisposition naturelle, notamment l'existence de fractures à pendages avals se croisant avec la surface topographique pour former un panneau prédécoupé dont la stabilité peut apparaître, à rebours, précaire. Ces fractures continues forment une surface relativement lisse. Elles sont le siège d'écoulements modérés en temps normal, ou de nombreux suintements s'observent sur la paroi.

Il est dû aussi à un paramètre de déclenchement naturel : lors d'une période pluvieuse anormale (le rapport Météo-France précise que les cumuls de précipitations sur les 3 et 6 derniers mois avant l'événement présentent un caractère anormal ainsi que le cumul de pluie sur 24 heures entre le 1er et Ie 2 octobre 2015, supérieur à la valeur décennale).

En effet, il est relevé que les écoulements avals ont été saturés avec un effet entonnoir ayant permis la mise en charge hydraulique des fractures en amont dans le massif ; ce qui a permis de compenser les forces de frottements qui maintenaient les panneaux rocheux en équilibre et initié son mouvement sur un coussin d'eau le long des fractures à pendage aval.

Pour ce bureau, il s'agit d'un mouvement de terrain d'origine naturelle sur un ancien front de taille de carrière qui suit une famille de fractures. Cet éboulement représente un caractère anormal par son intensité principalement lié aux facteurs de prédisposition (fracture majeure à pendage aval se recoupant, lithologie massive), et au facteur de déclenchement (épisode pluvieux anormal).

Conclusions dans lesquelles le mur litigieux n'a aucune incidence dans la survenance du désordre et qui vont à l'encontre de celles du complément d'expertise que la cour ne peut retenir en application des dispositions de l'article 246 du code de procédure civile précité, l'expert désigné ayant construit son complément d'expertise sur un postulat de responsabilité du mur dans la survenance du désordre, sans en démordre malgré les constats objectifs sur site et les critiques fondées développées par les différentes parties.

Il convient ainsi de ne pas retenir la conclusion émise par l'expert désigné et de ne retenir que celle du premier rapport déposé en première instance.

- Sur les responsabilités encourues

Les premiers juges ont retenu une responsabilité de 80 % pour l'architecte au titre de son obligation de conseil, de 20 % pour la S.C.I. Cppx au titre de la responsabilité du fait des choses en sa qualité du propriétaire de la falaise dont sont issus les éboulements destructeurs.

La responsabilité de la S.C.I. Cppx, en sa qualité de propriétaire de la falaise, est en conséquence indéniablement engagée comme les premiers juges l'ont retenue par application de l'article 1242 du code civil qui dispose notamment qu'« On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde...».

Toutes les analyses démontrent que la falaise n'a pas été purgée, que quoi qu'il arrive le désordre se serait produit, selon la pièce n°7 en page n°17 du diagnostic produit par l'appelante elle-même ; il convient de confirmer le premier jugement sur ce point.

En ce qui concerne l'éventuelle responsabilité de la maîtresse d''uvre, la S.A.R.L. Rosa verde, il n'est pas contesté que même en sa qualité de professionnelle de la construction, cette société a fait appel à une architecte pour justement être protégée de tout aléa dans le cadre de son opération de construction.

Il est vrai que la maîtresse de l'ouvrage a été destinataire comme son architecte de toutes les études et conseils contenus dans les différents rapports produits.

Cependant, tout en étant professionnelle de la construction, elle a fait appel à une architecte pour justement que des solutions soient trouvées aux difficultés ou problématique de chantier et même, si elle n'a pas encouragée et sollicitée explicitement ladite professionnelle sur les points de difficultés mis en avant par les bureaux d'études relativement à la falaise et à la nécessite d'un diagnostic géotechnique de type G5.

Ce type de diagnostic est préconisé dans les cas de problèmes structurels tels que des fissures, des affaissements ou des instabilités, dont il est crucial d'identifier l'origine pour permettre mesures de préventions efficaces. Ce diagnostic géotechnique G 5 est une analyse approfondie et essentielle pour évaluer la stabilité de la structure à bâtir en tenant compte des conditions géotechniques locales. Contrairement à des études superficielles, il repose sur des investigations détaillées pour détecter les mouvements du sol, les tassements, les contraintes géologiques et d'autres facteurs pouvant impacter la construction envisagée.

Il est effet mentionné dans le diagnostic de la société Sondatech du 21 janvier 2011 que celui-ci ne concerne pas « la stabilité des talus rocheux amonts et pour lesquels, à notre avis ne mise en sécurité est à prévoir » -page 9- ajoutant -page 10- relativement aux généralités des terrassements « préalablement aux travaux de terrassement, il est nécessaire de vérifier la nature et la géométrie des talus mitoyens (hauteur, nature, pendanges, discontinuités, indices d'instabilité ou de mouvement, etc.) Afin d'établir précisément l'étendue des mesures de protection spécifiques à mettre en 'uvre pour garantir leur stabilité » et un peu plus loin de préciser en ce qui concerne les talus [autrement dit la falaise de la S.C.I. Cppx] eux-mêmes « Une série d'imposants talus rocheux sub-verticaux domine la partie arrière du bâtiment projeté. Ces talus feront l'objet des dispositions spécifiques nécessaires à la mise en sécurité du site. Ces dispositions (par exemple à l'aide de grillage pare-chute, épinglage, etc.) Peuvent être établies dans le cadre d'une étude géologique spécifique des talus. », avec en page n°20, l'indication d'un diagnostic G5 à réaliser.

L'expert judiciaire de première instance dans son rapport, relativement à l'architecte, écrit

- page 37 du rapport- qu'un contrat d'architecte a été signé le 15 juillet 2010 entre la maîtresse de l'ouvrage, la S.A.R.L. Rosa verde, et la maîtresse d''uvre Mme [AM] [RX], architecte avec une mission relative aux études préliminaires à l'acte de construite.

Il indique que dans ce cadre l'architecte choisi, notamment « analyse le programme, visite les lieux, prend connaissance des données techniques, juridiques et financières qui lui sont communiquées par le maître d'ouvrage. A cette occasion, il émet toutes les observations et propositions qui lui semblent utiles (Cahier des clauses générales Ordre des Architectes) » et que Mme [RX], alors qu'elle avait en main ce qu'elle ne conteste pas, un rapport de la société Corse géosciences recommandant une analyse des risques liés à la falaise elle n'en a pas tenu compte pas plus que dans le cadre de sa mission de « projet de conception générale » dans le cadre de laquelle un architecte « établit l'ensemble des spécifications détaillées des ouvrages sous la forme d'un Cahier des Clauses Techniques Particulières (C.C.T.P.) comprenant : pour chaque corps d'état :

- Un document écrit descriptif des ouvrages, précisant leurs spécifications techniques ; s'il est commun de plusieurs marchés, ce document fixe les limites de chaque marché.

- Des documents graphiques décrivant par des plans et des dessins, éventuellement fourmis sur support informatique ou numérisé, les dispositions particulières des ouvrages à réaliser.

- S'il y a lieu, des pièces annexées fournissant aux entrepreneurs des données complémentaires pour l'exécution des travaux. (Cahier des clauses générales Ordre des Architectes)'

Elle aurait du préconiser à son client, la sarl ROSA VERDE, de réaliser une étude géotechnique pour conforter l'ancien front de taille ».

L'architecte et son assureur font valoir pour contester leur responsabilité qu'il existe des liens forts entre la maîtresse de l'ouvrage, la S.A.R.L. Rosa verde, la propriétaire de la falaise, la S.C.I. Cppx et la propriétaire du fonds sur lequel le bâtiment a été construit faisant que la S.A.R.L. Rosa verde se devait de connaître l'état de la falaise et le risque encouru dans la cadre d'action de construire entreprise. De même elles font valoir que l'architecte avait une mission partielle relativement au projet de construction, n'ayant pas été associée à la phase de définition technique des ouvrages et pas mise en possession des éléments permettant d'appréhender des contraintes connues des autres intervenants.

Ce positionnement fait totalement fi de la qualité de professionnelle de l'architecte, du fait que comme l'expert judiciaire l'a relevé, il ressort du contrat lui-même la liant à la maîtresse de l'ouvrage que dans le cadre des études préliminaires, avec les avertissements de deux sociétés de géotechnique relativement à la nécessité d'une étude géotechnique portant sur la falaise, n'étant ni géologue ni géotechnicienne, comme l'expert judiciaire le rappelle en page 91 de son rapport, elle se devait de suivre les préconisations des sachants en la matière, ce qu'elle n'a pas fait, commettant une faute, en sa qualité de professionnelle de la construction, qu'elle droit assumer.

Celle-ci d'ailleurs ne le conteste pas vraiment ayant déclaré à l'expert lui-même -page n°57 du rapport- « On nous a juste conseillé de surveiller la falaise...On nous a conseillé de faire réaliser une étude géotechnique G 5», ce qui est largement suffisant pour caractériser la faute dans le cadre de l'obligation de conseil pesant sur un architecte professionnel de la construction, attitude qualifiée par l'expert judiciaire d' « irresponsable » (-page n°88 du rapport-).

En effet, dans ce cadre, un architecte se doit de signaler tous les risques et inconvénients que présente un projet. Et en l'espèce, alors que des avertissements avaient été donnés par plusieurs bureaux géotechniques, l'architecte n'a aucunement mis en garde la maîtresse de l'ouvrage de la réalité dudit risque, ne pouvant en sa qualité de professionnelle se retrancher derrière le fait qu'il y aurait des liens entre la maîtresse de l'ouvrage, la propriétaire du fonds sur lequel la falaise se situe et la propriétaire initiale du lot à construire, et même si la maîtresse de l'ouvrage par le biais de son gérant et de ses sociétaires peut avoir des notions de construction au titre comme cela est indiqué d'entreprise générale, cela ne dispense aucunement l'architecte, professionnelle de la construction, de mettre en exergue, dans le cadre de son devoir de conseil, les difficultés d'un projet dont elle ne nie pas avoir été informée directement par les sociétés de géotechniques, et ce, contrairement à la maîtresse de l'ouvrage, dont il n'est nullement rapporté qu'elle avait analysé cette information ou qu'elle en avait d'ailleurs la capacité d'analyse, pas plus qu'elle aurait commis une faute exonératoire en poursuivant malgré ces information son acte de construise alors qu'elle avait fait appel une architecte dont la mission était de lui éviter un tel déboire, cette dernière par son abstention, commettant ainsi une faute ayant entraîné des conséquences graves qu'elle se doit de réparer.

Il convient donc de rejeter la demande relative à la maîtresse d'ouvrage présentée par l'architecte.

Quant à la responsabilité recherche tant des anciens propriétaires de la carrière que des autres participants à la construction, elle ne peut prospérer les anciens propriétaires de la carrière ayant obtenu toutes les autorisations lors de la fermeture de celle-ci et les acheteurs des différents fonds qui en sont issus connaissant l'origine de leur propriété immobilière, quant aux autres acteurs de la construction aucun lien n'est mis en exergue entre leur participation à cet acte et le préjudice survenu ; il convient donc de rejeter toutes les demandes présentées à leur encontre et de mettre hors de cause l'assureur du syndicat des copropriétaires la S.A. Axa France iard

Il convient, en conséquence, d'infirmer sur ce point le jugement entrepris en retenant toutefois une responsabilité à hauteur de 85 % pour Mme [SW] [RX] et de 15 % pour la S.C.I. Cppx.

* Sur la réparation des préjudices de M. [E] [EF]

Seule Mme [AM] [RX] et son assureur la Mutuelle des architectes français remettent en cause les montants et même la réalité des préjudices de ce copropriétaire qui par, comme l'a écrit l'expert judiciaire, l'irresponsabilité de l'architecte, maîtresse d''uvre du projet se trouve privé de son logement et devrait assumer seul les pertes financière liés à cette situation.

Mme [AM] [RX] fait valoir que l'appel incident de M. [E] [EF] est irrecevable à défaut d'indication d'une demande d'infirmation, de réformation ou d'annulation du jugement critiqué. M. [E] [EF] n'a pas répondu à ce moyen.

La cour relève que dans ses dernières conclusions du 23 mars 2024 dans leur dispositif, M. [E] [EF] mentionne clairement qu'il demande de « faire droit à son appel incident » ajoutant à la ligne suivante « Et statuant à nouveau » avant d'énumérer ses demandes financières.

Il est vrai que les termes infirmer, réformer ou annuler ne sont pas employés, mais il est évident par l'emploi des termes « appel incident » et « statuant à nouveau » que

M. [E] [EF] a formalisé un appel incident de manière implicite et que faire droit à l'exception soulevée par Mme [AM] [RX] relève d'un formalisme excessif que la plus haute juridiction française réprouve dans sa jurisprudence la plus récente.

Il convient, en conséquence, de rejeter ce moyen inopérant.

Il convient donc d'examiner un à un les différents postes de préjudice contestés :

¿ Sur le préjudice moral

M. [E] [EF] sollicite un préjudice moral chiffré pour à la somme de 15 000 euros.

Il est certain que devoir partir du jour au lendemain de son logement en y laissant tous ses biens, avec interdiction de revenir les chercher et même de pénétrer dans le bien lui-même en raison de sa dangerosité a créé un préjudice incontestable sur le plan moral que la cour chiffre à la somme de 15 000 euros.

¿ Sur le préjudice de jouissance

M. [E] [EF] demande l'indemnisation de son préjudice de jouissance, en qualité de propriétaire résidant faisant valoir une privation de son mobilier ayant été relogés pendant 66 mois.

Pour autant aucun justificatif n'est versé en soutien de cette demande qui est purement formelle, empêchant ainsi la cour d'y faire droit et se trouve pour partie déjà indemnisée dans le carre du préjudice moral alloué.

Il convient en conséquence, d'infirmer le jugement querellé sur ce point.

¿ Sur les différents frais liés à la copropriété

La somme réclamées est liée aux charges de copropriété -pièce n°6 de M. [EF]-, alors qu'il n'avait plus accès à son bien.

Tous ces frais ont été payés alors que ce copropriétaire ne pouvait profiter de son bien en raison de l'indisponibilité du bien immobilier, frappé d'un arrêté de péril avec interdiction de pénétration, situation résultant de l'action des deux responsables retenues par la cour.

Il est manifeste que ce copropriétaire, resté propriétaire de son bien immobilier, a dû, alors qu'il avait l'interdiction de pénétrer dans son appartement, continué à payer des frais liés au fonctionnement de la copropriété.

À ce titre, il a subi un préjudice et les sommes engagés par lui, sans contrepartie, en raison des fautes de Mme [SW] [RX] et de la S.C.I. Cppx devant être réparées au visa des pièces justificatives produites, soit au vu des différents justificatifs produits une somme de 2 132,03 euros, le cour ne rejetant que les frais de justice liés aux expertises judiciaires -3 340 euros page 11 des écritures- compris dans les dépens ou dans les frais irrépétibles.

Il convient en conséquence, d'infirmer sur ce point le jugement entrepris, et d'allouer à ce copropriétaire une somme globale de 17 132,03 euros.

- Sur les appels en garantie

Il convient de prononcer une condamnation in solidum entre la S.C.I. Cppx, Mme [AM] [RX], ès qualités, et son assureur la société d'assurances Mutuelles des architectes français, dans la limite de son plafond de garantie de 1 750 000 euros comme les premiers juges l'ont valablement retenu et en tenant compte de la franchise contractuelle dans son rapport avec son assurée.

En revanche la clause G 6.3.1 du contrat d'architecte n'est pas applicable en l'espèce, la cour n'ayant pas retenu d'autre responsabilité que celle de l'architecte par rapport aux autres intervenants dans l'acte de construire, le seule autre responsabilité retenue étant celle de la société voisine sur le fondement de la responsabilité du fait des choses en tant que gardienne.

En conséquence, la clause limitative du contrat portant sur l'absence de solidarité entre le maître de l'ouvrage, les autres intervenants à l'opération et l'architecte n'est pas applicable en l'espèce.

- Sur la demande de prononcé de l'exécution provisoire

En appel les décisions prononcées sont exécutoires de droit ; cette demande est sans objet.

- Sur les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

S'il est équitable de laisser à la charge de la S.C.I. Cppx, de Mme [AM] [RX] et de son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français les frais irrépétibles qu'elles ont engagés, il n'en va pas de même pour les autres parties.

En conséquence, il convient de débouter la S.C.I. Cppx, Mme [AM] [RX] et son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer, à ce titre la somme de 3 000 euros pour M. [E] [EF], et pour M. [NT] [I], Mme [W] [I] et Mme [J] [I] 700 euros chacun.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette l'exception d'irrecevabilité présentée par Mme [AM] [RX] à l'encontre des demandes financière de M. [E] [EF],

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celles condamnant au paiement des frais irrépétibles et dépens,

Statuant à nouveau,

Déclare Mme [AM] [RX] et la S.C.I. Cppx responsables de l'entier désordre affectant la copropriété Rosa verve situé à [Localité 27], à hauteur de 85 % pour la première et de 15 % pour la seconde,

Met hors de cause la S.A.R.L. Rosa verde et M. [NT] [I], Mme [W] [I] et Mme [J] [I], en leur qualité d'ayants droit d'[M] [WR],

Condamne in solidum la S.C.I. Cppx et Mme [AM] [RX] à payer à M. [E] [EF] la somme de 2 132,03 euros au tire de ses frais divers et de 15 000 euros au titre de son préjudice moral, soit une somme globale due de 17 132,03 euros, portant intérêt à taux légal à compter du 3 janvier 2023,

Condamne la société d'assurance Mutuelle des architectes français à garantir Mme [AM] [RX], son assurée, de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, dans la limite de sa garantie à hauteur de 1 750 000 euros et de sa franchise dans ses rapports avec elle,

Condamne la S.C.I. Cppx à garantir Mme [AM] [RX] et son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français dans la limite de 15 % de l'ensemble des condamnations prononcées in solidum à leur encontre,

Condamne Mme [AM] [RX] et son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français à garantie la S.C.I. Cppx dans la limite de 85 % de l'ensemble des condamnations prononcées in solidum à leur encontre,

Y ajoutant,

Précise que la demande de prononcé de l'exécution provisoire en appel est sans objet,

Déboute la S.C.I. Cppx de sa demande d'organisation d'une nouvelle expertise,

Déboute Mme [AM] [RX], la société d'assurances Mutuelle des architectes français la S.C.I. Cppx, M. [E] [EF], M. [NT] [I] Mme [J] [I] et Mme [W] [I] du surplus de leur demande,

Condamne in solidum la S.C.I. Cppx, Mme [AM] [RX] et son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français au paiement des entiers dépens tant ceux de première instance qu'en cause d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

Condamne in solidum la S.C.I. Cppx, Mme [AM] [RX] et son assureur la société d'assurances Mutuelle des architectes français à payer au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile les sommes suivantes :

3 000 euros à M. [E] [EF],

700 euros à Mme [W] [I],

700 euros à M. [NT] [I],

700 euros à [J] [I].

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

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