Cass. com., 10 mai 2000, n° 96-22.247
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Compagnie industrielle du papier (Sté), Compagnie papetière de l'Essonne (Sté)
Défendeur :
Torcy Québécor imprimerie (Sté), Brochage routage Québécor (Sté), Loupe Québécor imprimerie (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grimaldi
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 18 septembre 1996), que, par sept actes sous seing privé du 10 mars 1995, la société Compagnie industrielle du papier (la société CIP) s'est engagée à enlever pour les remettre à la société Compagnie papeterie de l'Essonne (société CPE) les rognures et déchets de vieux papiers des sociétés du groupe d'imprimerie Jacques X... ; qu'après ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de ces dernières sociétés, le tribunal de commerce de Meaux a, par jugement du 3 février 1996, arrêté le plan de cession totale de leurs actifs au profit de la société Imprimerie Québécor France, qui s'est substitué les sociétés Torchy Québécor imprimerie, Brochage routage Québécor et la Loupe Québécor imprimerie (les sociétés du groupe Québécor) ; qu'il a déterminé les contrats cédés au cessionnaire ainsi que les contrats en cours de renégociation et ordonné la résiliation de tout contrat non repris ou non renégocié ; que les sept contrats susmentionnés ne faisaient pas partie des contrats repris ou en cours de renégociation mais que les relations se sont poursuivies entre les parties jusqu'à ce que les sociétés du groupe Québécor y mettent fin par lettre du 15 mai 1996 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés CIP et CPE reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de désignation d'un arbitre, alors, selon le pourvoi, que, selon l'article 1444 du nouveau Code de procédure civile, si, le litige né, la constitution du tribunal arbitral se heurte à une difficulté du fait de l'une des parties ou dans la mise en oeuvre des modalités de désignation, le président du tribunal de grande instance ou le président du tribunal de commerce si la convention l'a expressément prévu, désigne le ou les arbitres et que si la clause compromissoire est soit manifestement nulle, soit insuffisante pour permettre de constituer le tribunal arbitral, le président le constate et dit n'y avoir lieu à désignation ;
que les pouvoirs ainsi conférés au président du tribunal ne sont pas subordonnés à l'absence de contestation sérieuse, si bien qu'en refusant de statuer sur la demande de désignation d'un arbitre formulée par la société CIP en raison de l'existence d'une contestation sérieuse sur l'existence de la clause compromissoire, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, violant ainsi le texte précité ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les contrats contenant la clause compromissoire invoqués ont été résiliés par le jugement du 3 février 1996 et que des relations contractuelles nouvelles se sont créées entre les parties sans écrit, faisant ainsi ressortir que l'article 1444 du nouveau Code de procédure civile n'était pas applicable ; que, par ce seul motif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen :
Attendu que les sociétés CIP et CPE reprochent encore à l'arrêt d'avoir refusé d'ordonner à titre provisoire la poursuite des relations contractuelles entre les parties alors, selon le pourvoi, que, selon l'article 873 du nouveau Code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite, si bien qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte précité ;
Mais attendu que les sociétés CIP et CPE ayant demandé la poursuite des relations contractuelles, l'arrêt retient que par jugement du 3 février 1996, le tribunal de commerce de Meaux a ordonné la résiliation des contrats du 10 mars 1995, ce dont il résulte qu'abstraction faite des motifs critiqués par le moyen, la mesure de remise en état sollicitée ne pouvait être prise ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés CIP et CPE reprochent enfin à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande d'expertise, alors, selon le pourvoi, que, selon l'article 872 du nouveau Code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend, si bien qu'en ne recherchant pas si l'instauration de la mesure d'expertise sollicitée n'était pas justifiée par l'existence d'un différend constaté entre les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;
Mais attendu qu'en relevant que les contrats avaient été résiliés par le tribunal de commerce, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de rejeter la demande d'expertise, destinée à permettre le calcul de l'indemnité due en vertu de l'article 8 de ces contrats par la partie à l'origine de la rupture, qui ne pouvait faire l'objet d'un différend;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés CIP et CPE aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne in solidum les sociétés CIP et CPE à payer aux sociétés Tory Québécor imprimerie, Brochage routage Québécor et La Loupe Québécor imprimerie la somme totale de 15 000 francs ;