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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 17 septembre 2025, n° 23/17581

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Elite Connexion (SARL)

Défendeur :

View6 (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Douillet

Conseillers :

Mme Barutel, Mme Bohee

Avocats :

Me Hinoux, Me Weissenbacher, Me Armet

TJ Paris, 3e ch. sect. 3, du 27 sept. 20…

27 septembre 2023

EXPOSÉ DU LITIGE

La société ELITE CONNEXION, immatriculée en 2006, indique exercer une activité d'agence matrimoniale haut de gamme exploitée sous la direction de Mme [O] [S], ancien mannequin, également connue sous le nom de [F] [S], et développée via le site internet www.[05].com, dont le nom de domaine a été réservé le 3 avril 2006.

La société VIEW6, immatriculée depuis le 29 décembre 2009, exerce également une activité d'agence matrimoniale et propose ses services par l'intermédiaire du site internet www.[06].com.

La société ELITE CONNEXION reproche à la société VIEW6 d'avoir réservé, sur les régies publicitaires des moteurs de recherche Google et Ask, les mots-clés ELITE CONNEXION et [F] [S] afin de déclencher des annonces promotionnelles redirigeant les internautes vers le site www.[06].com. A la demande de la société ELITE CONNEXION, la réservation de ces mots-clés par la société VIEW6 a fait l'objet de deux constats d'huissier en date des 6 et 13 juillet 2018.

Par courrier du 16 juillet 2018, la société ELITE CONNEXION, par l'intermédiaire de son conseil, a mis en demeure la société VIEW6 de cesser tout usage des signes litigieux. Par courrier du 2 août 2018, la société VIEW6 a contesté toute réservation fautive desdits signes, en précisant avoir retiré les annonces sponsorisées litigieuses dès le 21 juillet 2018.

Par acte du 3 septembre 2018, la société ELITE CONNEXION a assigné la société VIEW6 devant le tribunal de commerce de Bordeaux sur le fondement de la concurrence déloyale, sollicitant la cessation des faits reprochés ainsi que la réparation du préjudice allégué.

Le 26 septembre 2018, la société ELITE CONNEXION a déposé la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n°17961695 (ci-après, la marque n° 695), qui a été enregistrée le 18 février 2019 pour désigner des services en classes 35, 41 et 45, notamment les services d'agence matrimoniale (en classe 45).

En raison de demandes fondées sur la contrefaçon de marque, la juridiction consulaire bordelaise, après avoir reçu Mme [S] en son intervention volontaire, s'est, par jugement du 20 décembre 2019, déclarée incompétente au profit du tribunal de grande instance (devenu tribunal judiciaire) de Paris.

Devant le tribunal judiciaire de Paris, le juge de la mise en état, par ordonnance du 20 juillet 2021, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société VIEW6, l'a condamnée au paiement d'une amende civile de 1 500 euros, ainsi que de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et a renvoyé au fond le moyen tiré du défaut de qualité et d'intérêt à agir de la société ELITE CONNEXION.

Par jugement rendu le 27 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Paris :

a écarté les fins de non-recevoir soulevées par la société VIEW6 ;

a condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION 5 000 euros à titre provisionnel à titre de dommages et intérêts en réparation de la contrefaçon de la marque de l'Union européenne « [F] » n° 695 ;

a interdit à la société VIEW6 la réservation du signe [F] à titre de mot clef dans le cadre de référencements payants sur tout moteur de recherche pour déclencher une annonce promotionnelle de ses services d'agence matrimoniale présentée de manière à créer un risque de confusion avec la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n° 695, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;

s'est réservé la liquidation de l'astreinte ;

a rejeté la demande de la société ELITE CONNEXION :

en réparation d'actes de concurrence déloyale,

de communication de documents,

de désignation d'experts informatique et comptable,

de publication du jugement à intervenir aux frais avancés de la société VIEW6 ;

a rejeté la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral de Mme [S] ;

a rejeté les demandes reconventionnelles de la société VIEW6 en dénigrement et au titre des frais non compris dans les dépens ;

a condamné la société VIEW6 aux dépens ;

a condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 30 octobre 2023, la société ELITE CONNEXION et Mme [S] ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 5, transmises le 12 mai 2025, la société ELITE CONNEXION et Mme [S], appelantes et intimées à titre incident, demandent à la cour de :

Vu l'article 9 du Règlement UE 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne

Vu l'article 1240 du code civil,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

débouté la société VIEW6 des fins de non-recevoir soulevées ;

dit que la société VIEW6, par la réservation du signe « [F] » à titre de mot-clé, et son association à une annonce promotionnelle ne présentant ni dans son titre ni dans sa description le signe distinctif « [E] [Z] », sur les régies publicitaires AdWords et Ask Sponsored Listings des moteurs de recherche Google et Ask, a créé un risque de confusion entre la société ELITE CONNEXION et la société VIEW6, et commis par là-même des actes de contrefaçon par reproduction de la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n° 695, au préjudice de la société ELITE CONNEXION ;

en conséquence, interdit à la société VIEW6 la réservation du signe « [F] » à titre de mot-clef dans le cadre de référencements payants sur tout moteur de recherche pour déclencher une annonce promotionnelle de ses services d'agence matrimoniale présentée de manière à créer un risque de confusion avec la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n°17961695, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;

réservé au tribunal judiciaire de Paris la liquidation de l'astreinte ;

débouté la société VIEW6 de ses demandes reconventionnelles en dénigrement et au titre des frais non compris dans les dépens ;

condamné la société VIEW6 aux dépens ;

réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

condamné la société VIEW6 à une indemnité de 5.000 € en réparation des actes de contrefaçon par reproduction de la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n° 695 ;

débouté la société ELITE CONNEXION de ses demandes :

en réparation d'actes de concurrence déloyale ;

de communication de documents ;

de désignation d'experts informatique et comptable ;

de publication du jugement à intervenir aux frais avancés de la société VIEW6 ;

débouté Mme [S] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

réformant le jugement entrepris et statuant à nouveau :

dire que la société VIEW6, par la réservation des signes « ELITE CONNEXION » et « [F] [S] », et leur association à une annonce promotionnelle ne présentant ni dans son titre ni dans sa description le signe distinctif « [E] [Z] », sur les régies publicitaires AdWords et Ask Sponsored Listings des moteurs de recherche Google et Ask, a créé un risque de confusion entre la société ELITE CONNEXION et la société VIEW6, et commis ainsi des actes de concurrence déloyale et parasitaire, au préjudice de la société ELITE CONNEXION;

en conséquence, à titre principal :

ordonner la communication, sous astreinte de 10.000 € par jour de retard, à compter du mois suivant la signification du jugement à intervenir, la Cour se réservant le droit de liquider directement l'astreinte, des « analytics » certifiés de toutes les campagnes promotionnelles (certifiées comme étant exhaustives par les régies publicitaires des moteurs de recherche), pour tous les sites web de la société VIEW6 ' au premier rang desquels [06].com -, faisant état notamment des « impressions », des « clics » et des « conversions » relatifs à toutes les annonces déclenchées à partir de requêtes présentant en leur sein les signes « ELITE CONNEXION », « [F] » et/ou « [S] », et ce pour les régies publicitaires de tous les moteurs de recherches sur Internet ' dont Google, Ask, Orange, Bing, Yahoo, Qwant, Lycos et Search Encrypt ;

désigner tels experts informatique et comptable qu'il plaira à la cour avec pour mission d'établir le manque à gagner de la société ELITE CONNEXION résultant de l'utilisation par la société VIEW6 de la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n°17961695, ainsi que des signes distinctifs « ELITE RENCONTRE » et « [F] [S] », à destination d'un public français, et ce pour les cinq années ayant précédé la délivrance de l'acte introductif d'instance et ce jusqu'au jour du jugement ;

condamner la société VIEW6 au paiement d'une indemnité à fixer au résultat de l'expertise ordonnée, en réparation du manque à gagner de la société ELITE CONNEXION ;

en conséquence, subsidiairement :

condamner la société VIEW6 au paiement d'une indemnité d'un montant de 200.000 €, en réparation du manque à gagner de la société ELITE CONNEXION;

condamner la société VIEW6 au paiement d'une indemnité de 30.000 €, en réparation des pertes subies par la société ELITE CONNEXION ;

condamner la société VIEW6 au paiement d'une indemnité de 20.000 €, en réparation du préjudice moral subi par Mme [S] ;

en conséquence, en tout état de cause :

ordonner à la société VIEW6 de cesser toute promotion de ses services d'agence matrimoniale par le déclenchement d'annonces promotionnelles créant un risque de confusion avec la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n°17961695, ainsi qu'avec les signes distinctifs « ELITE CONNEXION » et « [F] [S] », par le truchement des régies publicitaires de tous les moteurs de recherche sur Internet, et ce sous astreinte de 2.000 € par infraction constatée et par jour de retard, à compter de la signification du jugement à intervenir, la Cour se réservant le droit de liquider l'astreinte directement ;

ordonner la publication du jugement à intervenir, dans son intégralité ou par extraits, au choix de la société ELITE CONNEXION, dans 3 journaux ou publications professionnelles au choix de cette dernière, et aux frais avancés de la société VIEW6, sans que le coût de chaque insertion puisse excéder la somme de 3.000 € HT, soit la somme totale de 9.000 € HT ;

condamner la société VIEW6 au paiement de la somme de 15.000 € au profit de la société ELITE CONNEXION et de Mme [S], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en première instance ;

condamner la société VIEW6 au paiement de la somme de 15.000 € au profit de la société ELITE CONNEXION et de Mme [S], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en cause d'appel ;

condamner la société VIEW6 aux entiers dépens en cause d'appel.

Dans ses dernières conclusions numérotées 3, transmises le 8 mai 2025, la société VIEW6, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :

Vu l'article 122 du code de procédure civile,

Vu les articles L.712-1, L.713-1 et L.716-2 (ancien) du code de la propriété intellectuelle,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu les articles 9 et suivants du Règlement 2017/1001 du 14 juin 2017,

infirmer le jugement en ce qu'il a :

« Ecarté les fins de non-recevoir soulevées par la société VIEW6 ;

condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION 5.000 € à titre provisionnel à titre de dommages et intérêts en réparation de la contrefaçon de la marque de l'Union Européenne [F] n° 695 ;

interdit à la société VIEW6 la réservation du signe [F] à titre de mot clef dans le cadre de référencements payants sur tout moteur de recherche pour déclencher une annonce promotionnelle de ses services d'agence matrimoniale présentée de manière à créer un risque de confusion avec la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n°17961695, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;

s'est réservé la liquidation de l'astreinte ;

rejeté les demandes reconventionnelles de la société VIEW6 en dénigrement et au titre des frais non compris dans les dépens ;

condamné la société VIEW6 aux dépens ;

condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile » ;

confirmer le jugement en ce qu'il a :

« rejeté la demande de la société ELITE CONNEXION :

en réparation d'actes de concurrence déloyale ;

de communication de documents ;

de désignation d'experts informatique et comptable ;

de publication du jugement à intervenir aux frais avancés de la société VIEW6 ;

rejeté la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral de Mme [O] [S] » ;

et statuant à nouveau :

juger que la société VIEW6 a réservé les termes « ELITE CONNEXION », « [F] » et « [F] [S] » du 6 juillet 2018 au 21 juillet 2018 ;

en conséquence,

déclarer irrecevable la société ELITE CONNEXION en ses demandes pour défaut de qualité à agir et d'intérêt à agir compte tenu de ses prétentions et demandes fondées sur le nom patronymique « [F] [S] » et sur la marque « [F] » déposée le 26 septembre 2018 et enregistrée le 18 février 2019 ;

déclarer irrecevable Mme [S] en ses demandes pour défaut d'intérêt à agir dans la mesure où elle ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui de la société ELITE CONNEXION ;

juger que la société VIEW6 n'a commis aucun acte de contrefaçon postérieurement au dépôt de la marque « [F] » le 26 septembre 2018 ou relatif à la marque « ELITE CONNEXION » et n'a commis aucune faute délictuelle caractérisant un acte de concurrence déloyale ;

juger que la société ELITE CONNEXION et Mme [S] ne justifient d'aucun préjudice financier et/ou moral distinct compte tenu du nombre de clics intervenus avant le 21 juillet 2018 et de la cessation de la réservation des termes « ELITE CONNEXION », « [F] » et « [F] [S] » par VIEW6 après le 21 juillet 2018 ;

en conséquence,

débouter la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de l'ensemble de leurs demandes du fait de l'absence de faute caractérisant un acte de contrefaçon ou un acte de concurrence déloyale de la part de la société VIEW6 ;

débouter la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de l'ensemble de leurs demandes du fait de l'absence de préjudice consécutif à l'utilisation des termes litigieux

à titre d'appel incident, condamner solidairement la société ELITE CONNEXION et Mme [S] à payer à la société VIEW6 la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de dénigrements constatés à compter du 21 février 2022 ;

en tout état de cause :

débouter la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de toutes demandes;

condamner la société ELITE CONNEXION, solidairement avec Mme [S] à verser à la société VIEW6 la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en 1ère instance et en cause d'appel ;

condamner la société ELITE CONNEXION, solidairement avec Mme [S], aux entiers dépens, y compris les éventuels frais d'exécution et le remboursement des procès-verbaux de constat du 12 octobre 2018, du 7 octobre 2021 et 12 octobre 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par la société VIEW6

La société VIEW6 soutient que sont irrecevables les demandes de la société ELITE CONNEXION (i) au titre de la marque « [F] » pour les faits antérieurs au 18 février 2019, date d'enregistrement de la marque, et (ii) au titre de la réservation du nom [F] [S]. Sur le premier point, elle fait valoir qu'en application des articles L. 712-1, L. 713-1 et L. 716-2 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, seule une marque déposée et enregistrée bénéficie de la protection spécifique de l'action en contrefaçon et que des faits antérieurs à la demande d'enregistrement ne peuvent être considérés comme ayant porté atteinte aux droits qui y sont attachés ; qu'en l'espèce, la marque « [F] » a été déposée par ELITE CONNEXION, pour les seuls besoins de la cause, le 26 septembre 2018, soit à une date postérieure aux faits visés par les demandes et prétentions de la société ELITE CONNEXION dont l'assignation est du 3 septembre 2018 ; que la protection de la marque débute à compter de la publication de l'enregistrement de la marque, le 18 février 2019 ; que ELITE CONNEXIOIN est donc irrecevable pour agir sur le fondement de sa marque pour des faits antérieurs à cette date. Sur le second point, la société VIEW6 fait valoir que la société ELITE CONNEXION ne peut valablement revendiquer un quelconque droit d'usage sur le nom [F] [S] ; qu'en première instance, Mme [S] est intervenue volontairement à la procédure mais sans pour autant formuler de demande contre la société VIEW6 relative au prétendu usage de son nom patronymique dans le cadre du référencement sponsorisé sur les moteurs de recherche ; qu'ELITE CONNEXION, en tant que personne morale indépendante de la personne de Mme [S], n'avait donc aucun droit ni titre à faire valoir sur l'utilisation dudit nom ; que quand bien même ELITE CONNEXION disposerait d'un droit d'usage du nom patronymique de Mme [S], elle ne peut se substituer à celle-ci sauf à méconnaître la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », pour intenter une action qui lui permettrait d'obtenir réparation d'un éventuel préjudice ; qu'elle doit donc être déclarée irrecevable, pour défaut de qualité à agir pour poursuivre la défense de droits personnels dont elle n'est nullement titulaire dans le cadre de la réservation du nom patronymique [F] [S].

La société VIEW6 soutient par ailleurs que Mme [S] est irrecevable en ses demandes pour défaut d'intérêt à agir dans la mesure où elle ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui de la société ELITE CONNEXION.

La société ELITE CONNEXION et Mme [S] demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société VIEW6.

Sur la recevabilité des demandes de la société ELITE CONNEXION au titre de la marque « [F] » pour les faits antérieurs au 18 février 2019

Le tribunal a jugé à juste raison que l'argumentation de la société VIEW6 relative à l'irrecevabilité de la société ELITE CONNEXION en ses demandes en contrefaçon de la marque « [F] » pour ce qui concerne la période antérieure au 18 février 2019, date d'enregistrement de la marque, est une question de fond qui a vocation à être tranchée dans le cadre de l'analyse des actes de contrefaçon allégués.

Sur la recevabilité des demandes de la société ELITE CONNEXION au titre de la réservation du nom [F] [S]

Le tribunal a relevé à juste raison que Mme [S], intervenue volontairement à la procédure en première instance et appelante, déclare avoir consenti à la société ELITE CONNEXION, dont elle est la fondatrice et la gérante, le droit d'user de son nom patronymique pour les besoins de son activité commerciale et que les articles de presse versés au débat par la société ELITE CONNEXION et Mme [S] établissent que la société use de la notoriété, attestée par lesdits articles et non contestée, du nom de Mme [S] pour faire la promotion de ses services d'agence matrimoniale.

La titularité de la société ELITE CONNEXION sur la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n'est pas contestée ; elle a donc intérêt et qualité à agir en contrefaçon de cette marque, qui reprend le prénom de Mme [S], et à demander la réparation de son préjudice résultant des atteintes à sa marque. La société ELITE CONNEXION invoque par ailleurs, dans le cadre de son action en concurrence déloyale et parasitaire, un préjudice propre résultant pour elle de l'usage non autorisé et à des fins commerciales par la société VIEW6 du nom de Mme [S] et, à ce titre également, a intérêt et qualité à agir compte tenu de ce qu'elle use de ce nom et de la notoriété qui lui est attachée, avec l'autorisation de Mme [S], dans le cadre de son activité commerciale, pour faire la promotion des services d'agence matrimoniale qu'elle propose.

Sur la recevabilité des demandes de Mme [S]

Selon les articles 325, 329 et 330 du code de procédure civile, l'intervention est recevable quand elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ; l'intervention principale, qui élève une prétention au profit de celui qui la forme, est recevable si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention et l'intervention, qui appuie les prétentions d'une partie, est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.

Mme [S] est intervenue volontairement en première instance au soutien des intérêts de sa société ELITE CONNEXION, pour appuyer la thèse de cette dernière selon laquelle elle lui a consenti le droit d'user de son nom patronymique pour les besoins de son activité commerciale. Mme [S] a en outre formé une demande indemnitaire, qu'elle réitère en appel, pour obtenir réparation d'un préjudice moral qui lui est propre résultant des pratiques litigieuses.

Mme [S] avait qualité et intérêt à agir, dans le cadre de son intervention volontaire en première instance, dans l'intérêt de la société [S], dont elle est la gérante, et également pour demander réparation d'un préjudice qu'elle estime lui être propre, le bien-fondé de cette demande étant examiné ci-après.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir concernant les prétentions de Mme [S].

Il résulte de ce qui précède que le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté l'ensemble des fins de non-recevoir soulevées par la société VIEW6.

Sur la contrefaçon de la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n° 695 de la société ELITE CONNEXION

Pour contester tout acte de contrefaçon de marque ' et, en même temps, de concurrence déloyale et parasitaire ', la société VIEW6 fait valoir qu'il résulte de la jurisprudence, tant communautaire que nationale, que la responsabilité de l'annonceur n'est pas engagée s'il est possible pour un internaute « raisonnablement attentif » de distinguer l'annonceur du titulaire réel de la marque (ou du signe distinctif) dans le cadre de l'utilisation de services de référencement sponsorisé ; qu'aucune disposition du code de la propriété intellectuelle n'impose d'exclure les marques de concurrents via des mots-clés négatifs, seul important l'existence ou non d'un usage fautif de la marque d'autrui ; que le simple fait de ne pas avoir exclu un mot-clé concurrent ne suffit pas à caractériser une faute, seul étant sanctionnable, l'usage de la marque dans l'annonce elle-même ou un usage qui suscite une confusion sur l'origine commerciale du service annoncé ; que de même, le choix du nom d'une personne physique comme mot-clé destiné à faciliter le référencement par les moteurs de recherche sur internet des pages qui le supportent n'est pas fautif lorsqu'il n'est associé à aucune autre donnée personnelle, et ne le devient que lorsqu'est répréhensible le contenu de la page à laquelle ce mot-clé est associé ; qu'en l'espèce, le tribunal a commis une erreur déterminante dans son appréciation temporelle et matérielle de la commission d'actes de contrefaçon ; qu'en effet, VIEW6 n'a pu commettre aucun acte de contrefaçon antérieurement à l'enregistrement de la marque « [F] » le 18 février 2019 et en outre, a cessé toute réservation des termes « [F] », « [F] [S] » et « Elite Connexion » sur les moteurs de recherche depuis le 21 juillet 2018 ; qu'en tout état de cause, les contenus des annonces sponsorisées renvoyant au site www.[06].com emploient des termes génériques, font généralement référence dans leur titre à « [E] [Z] » et ne font aucune référence aux marques « Elite Connexion » et « [F] » ou à des expressions qui leur seraient associées ; que le nom de domaine www.[06].com apparaît toujours clairement dans l'annonce et permet d'identifier l'annonceur VIEW6 ; qu'ELITE CONNEXION ne justifie d'aucun droit de propriété intellectuelle sur les mots « agence », « matrimoniale » et « paris » ; que l'apparition d'annonces sponsorisées renvoyant au site www.[06].com est due au seul algorithme de Google qui connaît l'internaute utilisant le système des mots clés, habitué à voir s'afficher les résultats de sa recherche avec le nom et les sites de concurrents proposant le service ou le produit recherché ; que le procès-verbal de constat d'huissier de justice qu'elle a fait établir en date du 12 octobre 2021 fait état de l'absence d'impressions, de clics et de conversions relatifs aux termes « Elite Connexion », « [F] » et « [F] [S]».

La société ELITE CONNEXION et Mme [S] soutiennent que la société VIEW6 a commis des actes de contrefaçon de la marque verbale de l'Union européenne « [F] » en recourant à la réservation de ce signe à titre de mot-clé dans le cadre de campagnes de référencement payant sur le moteur de recherche Google. Elles font valoir que la réservation de la marque d'un concurrent à titre de mot-clé permettant de déclencher une annonce promotionnelle est contrefaisante dès lors que (i) l'annonce suggère l'existence d'un lien économique entre l'annonceur et le titulaire de la marque ou que (ii) l'annonce demeure à tel point vague sur l'origine des produits et services en cause qu'un internaute normalement informé et raisonnablement attentif n'est pas en mesure de savoir si l'annonceur est un tiers par rapport au titulaire de la marque ou s'il est économiquement lié à celui-ci ; qu'en l'espèce, postérieurement au dépôt de la marque, le 26 septembre 2018, deux procès-verbaux de constat, en date des 9 novembre 2018 et 12 juin 2019, ont établi que des requêtes comportant le terme « [F] », telles que « agence matrimoniale [F] » et « agence matrimoniale [F] paris », ont déclenché des annonces publicitaires de la société VIEW6, ces annonces ne comportant aucune mention du signe distinctif « [E] [Z] » et étant rédigées dans des termes génériques, ce qui ne permettait pas à l'internaute de déterminer l'origine des services proposés ; que la société VIEW6 reconnaît avoir réservé le mot-clé « [F] » dans un groupe d'annonces intitulé « Concurrents », générant impressions, clics et conversions, ce qui révèle une intention délibérée de capter la clientèle de la marque « [F] » ; qu'indépendamment de l'existence ou non d'une réservation active au jour des constats, ce qui importe est le déclenchement d'annonces susceptibles d'induire en erreur le public sur l'origine des services proposés ; que l'assertion de l'intimée selon laquelle ces déclenchements d'annonces promotionnelles constatées à partir du 21 juillet 2018 résulteraient seulement d'une stratégie de « requête large » (« broad match ») mise en 'uvre par Google est inopérante, dès lors notamment que seul le déclenchement constaté compte, qu'il résulte d'une réservation ou non, dès lors qu'il déclenche une annonce confusante ; qu'en outre, les constatations réalisées notamment le 12 juin 2019, postérieurement à l'enregistrement de la marque, révèlent que les annonces déclenchées à partir de requêtes « agence matrimoniale paris » présentent le signe distinctif « [06].com » dans leur titre alors même que les annonces déclenchées à partir de requêtes « agence matrimoniale [F] » ne présentent pas le signe distinctif « [E] [Z] » dans leur titre et sont libellées dans des termes à tel point vagues qu'un internaute normalement informé et raisonnablement attentif n'est pas en mesure de savoir si l'annonceur est un tiers par rapport au titulaire de la marque ou s'il est économiquement lié à celui-ci ; que sont inopérants pour apprécier le risque de confusion les résultats issus du référencement naturel pour apprécier le risque de confusion, de même que la prise en compte de l'URL affichée ou encore le contenu et la consultation du site associé à l'annonce litigieuse.

Ceci étant exposé, l'article 9 du règlement 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne énonce que :

« 1. L'enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit exclusif.

2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque :

a) ce signe est identique à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée ;

b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque (') ».

L'article 11 du même règlement précise que « 1. Le droit conféré par une marque de l'Union européenne est opposable aux tiers à compter de la date de publication de l'enregistrement de la marque ».

Aux termes de l'article L.717-1 du code de la propriété intellectuelle, « Constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 13 et 15 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne ».

La CJUE a dit pour droit que les dispositions de l'article 5 paragraphe 1 a), de la directive 89/104 (reprises en substance par l'article 9 paragraphe 2 a), précité du règlement 2017/1001), doivent être interprétées en ce sens que le titulaire d'une marque est habilité à interdire l'usage, sans son consentement, d'un signe identique à ladite marque par un tiers, lorsque cet usage a lieu dans la vie des affaires, est fait pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, et porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque (notamment, Céline, 11 septembre 2007, C-17/06, point 16 ; L'Oréal, 18 juin 2009, C-487/07, point 58).

La CJUE, dans un arrêt Google France du 23 mars 2010, a dit pour droit que « le titulaire d'une marque est habilité à interdire à un annonceur de faire, à partir d'un mot clé identique à ladite marque que cet annonceur a sans le consentement dudit titulaire sélectionné dans le cadre d'un service de référencement sur Internet, de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels ladite marque est enregistrée, lorsque ladite publicité ne permet pas ou permet seulement difficilement à l'internaute moyen de savoir si les produits ou les services visés par l'annonce proviennent du titulaire de la marque ou d'une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d'un tiers »
1: Mise en gras par la cour.

(C-236/08 à C-238/08).

Dans un arrêt Interflora du 22 septembre 2011, la Cour de justice a précisé que « le droit exclusif prévu à l'article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive a été octroyé afin de permettre au titulaire de la marque de protéger ses intérêts spécifiques en tant que titulaire de la marque, c'est-à-dire d'assurer que la marque puisse remplir ses fonctions propres. L'exercice de ce droit doit dès lors être réservé aux cas dans lesquels l'usage du signe par un tiers porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque et notamment à sa fonction essentielle qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit » (point 37). Dans le même arrêt, la Cour a encore précisé, en ce qui concerne l'atteinte à la fonction d'indication d'origine de la marque, au sens de l'article 5 paragraphe 1 a), de la directive 89/104 (reprises en substance par l'article 9 paragraphe 2 a), précité du règlement 2017/1001), que « La question de savoir s'il est porté atteinte à la fonction d'indication d'origine d'une marque lorsqu'est montrée aux internautes, à partir d'un mot clé identique à cette marque, une annonce d'un tiers, tel qu'un concurrent du titulaire de la marque, dépend en particulier de la façon dont cette annonce est présentée. Il y a atteinte à cette fonction lorsque l'annonce ne permet pas ou permet seulement difficilement à l'internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l'annonce proviennent du titulaire de la marque ou d'une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d'un tiers
2: Mises en gras par la cour.

(arrêts précités Google France et Google, points 83 et 84, ainsi que Portakabin, point 34). En effet, dans une telle situation, qui est au demeurant caractérisée par la circonstance que l'annonce apparaît tout de suite après l'introduction de la marque en tant que mot de recherche et est affichée à un moment où la marque est, dans sa qualité de mot de recherche, également indiquée sur l'écran, l'internaute peut se méprendre sur l'origine des produits ou des services en cause (arrêt Google France et Google, précité, point 85). Lorsque l'annonce du tiers suggère l'existence d'un lien économique entre ce tiers et le titulaire de la marque, il y a lieu de conclure qu'il y a atteinte à la fonction d'indication d'origine de cette marque. De même, lorsque l'annonce, tout en ne suggérant pas l'existence d'un lien économique, reste à tel point vague sur l'origine des produits ou des services en cause qu'un internaute normalement informé et raisonnablement attentif n'est pas en mesure de savoir, sur la base du lien promotionnel et du message commercial qui est joint à celui-ci, si l'annonceur est un tiers par rapport au titulaire de la marque ou, bien au contraire, s'il est économiquement lié à celui-ci, il convient de conclure qu'il y a atteinte à ladite fonction de la marque (arrêts précités Google France et Google, points 89 et 90, ainsi que Portakabin, point 35) » (points 44 et 45).

En l'espèce, la société ELITE CONNEXION est titulaire de la marque de l'Union européenne « [F] » n° 695 qui vise notamment, en classe 45, les services d'agence matrimoniale. Il est constant qu'elle n'a pas consenti à l'usage de sa marque par la société VIEW6 qui exploite sous le nom de domaine [06].com un service d'agence matrimoniale identique aux services désignés par la marque « [F] ».

Le tribunal a retenu à juste raison qu'en application de l'article 11 du règlement 2017/1001 précité, la protection de cette marque débutant avec la publication de son enregistrement, le 18 février 2019, seuls les faits constatés à compter de cette date peuvent être pris en compte dans l'appréciation de la contrefaçon alléguée.

Le procès-verbal de constat du 12 juin 2019 versé aux débats par les appelantes (leur pièce n°20), postérieur à la publication de l'enregistrement de la marque, montre qu'une recherche avec les mots clés 'agence matrimoniale [F] [Localité 7]', sur le moteur de recherche Google déclenche l'apparition en première position d'une annonce portant l'intitulé 'Agence matrimoniale à [Localité 7] / Confidentialité / accompagnement' et présentant un lien vers le site www.[06].com, après la mention 'Annonce' caractéristique d'un référencement payant (1ère situation). Cette annonce précède un résultat intitulé 'Elite connexion Agence Matrimoniale haut de...' correspondant à un résultat dit naturel, c'est-à-dire déterminé par le seul algorithme du moteur de recherche et ne résultant pas d'un référencement payant. Le même constat montre qu'une recherche avec les mots clés 'agence matrimoniale [Localité 7]' (sans le terme '[F]') sur le même moteur de recherche Google déclenche l'apparition en seconde position d'une annonce intitulée 'Rencontrez la bonne personne / nous nous chargeons de tout / [06].com' avec, également, un lien vers le site www.[06].com, après la mention 'Annonce' caractéristique d'un référencement payant (2nde situation).

La cour ne fait pas sienne l'analyse du tribunal et considère que la façon dont est présentée l'annonce sponsorisée de la société VIEW6 intitulée 'Agence matrimoniale à [Localité 7] / Confidentialité / accompagnement' permet à l'internaute normalement informé et raisonnablement attentif, qui appartient au grand public eu égard à la nature des services concernés, et qui est, comme le souligne la société intimée, habitué à voir s'afficher les résultats de ses recherches avec les noms et sites de concurrents proposant les produits ou services recherchés, de comprendre sans difficulté que les services d'agence matrimoniale visés par cette annonce ne proviennent pas de la société exploitant la marque « [F] » mais d'une société tierce, dès lors, d'une part, que le terme « [F] » constitutif de la marque de la société ELITE CONNEXION n'apparaît que dans le mot-clé utilisé pour la recherche sur Google et n'est aucunement reproduit ou imité dans le texte même de l'annonce (la description) obtenue grâce à ce mot-clé ' ce texte ne contenant que des termes génériques propres au secteur d'activité concerné (« Rencontre sérieuse et de qualité. Agence haut de gamme à [Localité 7]. Profils vérifiés. Prestation sur-mesure. Service haut de gamme. Choix important. Profils très sélectionnés. RDV rapide avec candidats ») ', pas plus que dans le titre de l'annonce, et d'autre part, que le texte même de l'annonce (la description) est précédé de l'adresse internet www.[06].com, de sorte que tout internaute comprendra immédiatement que cette adresse ouvre accès au site sur lequel sont offerts les services promus par l'annonceur. En outre, la société auteur de l'annonce est identifiable grâce à l'adresse www.[06].com, mentionnée après le terme « Annonce » signalant un référencement payant, cette adresse, qui n'est pas susceptible de faire l'objet d'un quelconque rattachement avec le titulaire de la marque « [F] », rendant possible, au sens de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), l'identification de la personne, physique ou morale, pour le compte de laquelle l'annonce promotionnelle est diffusée puisqu'elle renvoie à un site où sont indiqués les éléments d'identification de l'éditeur (dénomination sociale, forme juridique, n° SIRET, adresse).

Dans ces conditions, la circonstance que, dans la première situation décrite ci-dessus, les termes [06].com n'apparaissent pas dans l'intitulé de l'annonce comme dans la seconde situation et que l'annonce obtenue grâce aux mots clés incluant le terme '[F]' s'affiche tout de suite après les termes de la requête comportant le terme « [F] » ne sont pas de nature à abuser l'internaute.

Dans la seconde situation, générée par une requête comportant seulement les termes « agence matrimoniale paris » à l'exclusion du terme « [F] », en raison de la mention « Annonce ' www.[06].com » et de la présence de « [06].com » dans le libellé même du titre de l'annonce, aucune confusion n'est susceptible d'amener l'internaute, normalement informé et raisonnablement attentif, à croire que les services d'agence matrimoniale visés dans l'annonce proviennent du titulaire de la marque « [F] », alors que, là encore, le texte descriptif de l'annonce ne reprend pas le terme « [F] », que l'annonce est précédée du nom de domaine www.[06].com dont l'internaute comprendra qu'il permet d'accéder au site internet sur lequel sont offerts les services promus par l'annonceur et qui permet au surplus d'identifier cet annonceur.

Les annonces promotionnelles de la société VIEW6, qui ne comportent dans leur description aucune mention du terme « [F] » ou référence à la société ELITE CONNEXION ou à la personne de Mme [S], ne suggèrent pas de lien économique avec cette dernière société et permettent de comprendre aisément que l'entité qui les émet n'est pas le titulaire de la marque « [F] ».

La même analyse doit être appliquée aux constatations du procès-verbal de constat du 7 avril 2022, établi en cours d'instance à la demande de la société ELITE CONNEXION (pièce 26 des appelantes) qui montre qu'une recherche avec les mots clés '[F] [S]', sur le moteur de recherche Seekweb déclenche l'apparition en première position d'une annonce portant l'intitulé 'Agence matrimoniale efficace ' profils sérieux par régions' avec un lien vers le site https//www.[06].com/agence/matrimoniale dont la mention est précédée du terme 'Annonce' caractéristique d'un référencement payant. Comme précédemment, le texte même de l'annonce (description) ne comporte aucune mention des termes '[F] [S]', qui ne se retrouvent donc que dans le mot-clé permettant la recherche, et ce texte est précédé d'une adresse URL dont l'internaute comprendra qu'elle permet d'accéder au site internet sur lequel sont offerts les services promus par l'annonceur et qui permet en outre l'identification de ce dernier.

Les constatations concernant les annonces promotionnelles de la société VIEW6 sur le moteur de recherche Ask ne résultent que de procès-verbaux antérieurs au 18 février 2019, date de publication de l'enregistrement de la marque « [F] » (procès-verbaux des 6 et 13 juillet 2018, 9 novembre 2018), et ne peuvent donc être prises en compte pour apprécier l'existence de la contrefaçon alléguée.

Il résulte de ce qui précède que les annonces promotionnelles de la société VIEW6, qui ne font aucune référence dans leur texte à la marque « [F] », à Mme [S] ou à la société ELITE CONNEXION et qui comportent la mention « Annonce », caractéristique d'un référencement payant, suivie de l'adresse du site internet www.[06].com, et parfois même dans leur titre les termes « [E] [Z] » (seconde situation du procès-verbal de constat du 12 juin 2019), ne portent pas atteinte à la fonction essentielle d'indication d'origine de la marque « [F] » de la société ELITE CONNEXION. La contrefaçon de cette marque n'est donc pas caractérisée.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION une provision à titre de dommages et intérêts en réparation de la contrefaçon de sa marque de l'Union européenne et prononcé une mesure d'interdiction à l'encontre de la société VIEW6, sous astreinte dont le tribunal s'est réservé la liquidation. La société ELITE CONNEXION sera donc déboutée de l'ensemble de ses demandes en contrefaçon de marque.

Sur la concurrence déloyale et le parasitisme reprochés à la société VIEW6

La société ELITE CONNEXION et Mme [S] soutiennent qu'indépendamment des actes de contrefaçon, la société VIEW6 a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire par (i) l'utilisation de la dénomination sociale et du nom commercial ELITE CONNEXION à titre de mots clés sur les moteurs de recherche Google et Ask, (ii) l'utilisation à titre de mot clé du nom patronymique [F] [S], (iii) le manquement aux usages des règles de commerce tenant à l'utilisation de mots clés négatifs lorsqu'une société a connaissance que l'utilisation de signes distinctifs d'un concurrent est abusive et (iv) la volonté de se placer dans le sillage de la société ELITE CONNEXION. Elles font valoir que si le démarchage de clientèle est en principe licite, tout comme la reproduction d'éléments d'identification d'une société afin de rallier sa clientèle, ils peuvent devenir fautifs lorsqu'ils excèdent les limites fixées par les usages loyaux du commerce ; que VIEW6 a délibérément adopté des pratiques déloyales afin d'induire le consommateur en erreur et de détourner la clientèle d'ELITE CONNEXION ; que l'utilisation par VIEW6 de la dénomination sociale et du nom commercial ELITE CONNEXION à titre de mots-clés sur des moteurs de recherche, comme l'utilisation du nom patronymique [F] [S], fondatrice et gérante de la société ELITE CONNEXION, utilisé comme signe distinctif par ELITE CONNEXION, afin de déclencher des annonces promotionnelles pour son propre site [06].com, sont déloyales ; que cette stratégie publicitaire, mise en 'uvre alors que les deux sociétés exercent des activités directement concurrentes, est de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif qui n'est pas en mesure de savoir, du fait de la présentation ambiguë des annonces, si l'annonceur est un tiers par rapport à ELITE CONNEXION ; que ce risque de confusion est d'autant plus avéré que ni le titre ni le descriptif des annonces litigieuses ne font référence au signe distinctif « [E] [Z] » et ne permettent d'identifier clairement la société VIEW6 ; que VIEW6 ne peut invoquer le bon référencement naturel du site elite-connexion.com pour des requêtes « ELITE CONNEXION » comme étant susceptible d'exclure le risque de confusion créé par ses annonces promotionnelles, alors même qu'un tel classement est le résultat exclusif des efforts entrepris par ELITE CONNEXION pour bénéficier d'un bon référencement naturel, et que ce positionnement n'a rien de figé et évolue à chaque instant ; que VIEW6 ne peut non plus invoquer la présence de l'URL affichée www.[06].com/agencematrimoniale au sein des annonces déclenchées pour tenter de nier tout risque de confusion, compte tenu du fait que l'URL affichée n'est jamais prise en considération dans ce cadre, dès lors qu'elle n'est pas pleinement maîtrisée par l'annonceur ; que sont également indifférents le contenu et la consultation du site vers lequel renvoie l'annonce pour apprécier le risque de confusion, dès lors que le trouble est consommé dès le clic de l'internaute et que l'ambiguïté doit être appréciée à l'aune de l'annonce elle-même ; que le préjudice subi résulte directement de cette confusion, le comportement fautif de la société VIEW6 ayant détourné des visites et des clients potentiels de leur site au profit du site [06].com ; qu'en outre, ELITE CONNEXION a manqué aux règles du commerce en ne réagissant pas après avoir été informée, dès le mois d'août 2018, du trouble occasionné par les pratiques dénoncées, notamment en mettant ses signes distinctifs en mots-clés négatifs ; que le manque de diligence de la société VIEW6 pour faire cesser l'atteinte illicite résultant de l'utilisation indue des signes distinctifs de la société ELITE CONNEXION a eu pour conséquence directe la persistance et l'aggravation de ce trouble ; que la société VIEW6 a agi de la sorte afin de se placer dans le sillage de la société ELITE CONNEXION ; qu'en effet, en réservant le nom commercial de cette société, le nom de sa gérante ' lequel peut être assimilé à un signe distinctif ', ainsi que la marque « [F] », VIEW6 a voulu détourner la notoriété de la société ELITE CONNEXION à son profit ; qu'en utilisant les termes « haut de gamme » et « rencontres sérieuses » très fréquemment utilisés par ELITE CONNEXION, tant dans le cadre de son référencement que sur son site Internet, VIEW6 a cherché à profiter indûment de la notoriété de cette dernière, de sa communication et de ses investissements publicitaires, à tirer profit de son renom dans le milieu des agences matrimoniales, établi par la revue de presse très étoffée versée au débat ; que pour atteindre ce niveau de reconnaissance, ELITE CONNEXION a mobilisé des moyens humains, financiers et intellectuels considérables (constitution d'un réseau, développement d'un savoir-faire spécifique, mise en 'uvre de campagnes de communication ciblées et différenciantes), qui permettent d'identifier une valeur économique individuelle, laquelle a fait l'objet d'un détournement indu de la part de VIEW6.

La société VIEW6 conteste tout acte de concurrence déloyale et de parasitisme pour les raisons exposées supra au titre de la contrefaçon de marque, arguant qu'aucune confusion de peut résulter de ses annonces promotionnelles. Elle ajoute que la société ELITE CONNEXION, pas plus qu'en première instance, n'apporte la preuve du préjudice qu'elle aurait subi ; que la période d'utilisation des mots-clés litigieux a été très courte (du 6 au 21 juillet 2018, date de réception de la mise en demeure adressée par ELITE CONNEXION) ; qu'elle justifie par un procès-verbal de constat relatif au nombre de clics et de conversions, que pendant cette courte période, ÉLITE CONNEXION n'a subi aucune perte de clientèle, les rares clics constatés provenant manifestement des appelantes elles-mêmes ou des huissiers qu'elles ont mandatés.

Ceci étant exposé, la concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l'article 1240 du code civil, selon lequel « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer », mais sont caractérisés par application de critères distincts, la concurrence déloyale l'étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

Le démarchage de la clientèle d'autrui est licite s'il n'est pas accompagné d'actes déloyaux. Ainsi, le simple usage à titre de mots clefs de signes distinctifs d'un concurrent n'est pas en lui-même déloyal, sauf s'il en est résulté un risque de confusion sur l'origine des produits commercialisés par les deux entreprises (Com, 29 novembre 2011, n°10-26.969 ; Com., 29 janvier 2013, n°11-24.713, 11-21.011).

Sur l'utilisation de la dénomination sociale et du nom commercial ELITE CONNEXION et du nom [F] [S] à titre de mots-clés

Le procès-verbal de constat du 6 juillet 2018 versé aux débats par les appelantes (leur pièce 8) montre qu'une recherche avec les mots-clés 'élite connexion' et ' [F] [S]', sur le moteur de recherche Google, déclenche, dans le cadre du référencement payant, l'apparition d'annonces promotionnelles de la société VIEW6 intitulées 'Agence matrimoniale sérieuse / accompagnement haut de gamme' avec un lien vers le site www.[06].com/agence/matrimoniale. De la même façon, le procès-verbal de constat du 13 juillet 2018 (pièce 9) montre qu'une recherche avec les mêmes mots-clés sur les moteurs de recherche Google et Ask conduit au déclenchement, dans le cadre du référencement payant, d'annonces promotionnelles de la société VIEW6 intitulées « Agence matrimoniale efficace ' Rencontrez la bonne personne » et « Agence matrimoniale sérieuse ' accompagnement haut de gamme » avec un lien vers le même site internet www.[06].com/agence/matrimoniale.

Cependant, comme l'a relevé le tribunal, les termes 'élite connexion' et ' [F] [S]' n'apparaissent ni dans les titres, ni dans les textes (descriptions), ni dans l'adresse URL de ces annonces. Dès lors, pour les motifs qui ont été exposés supra dans les développements consacrés à la contrefaçon de marque, l'internaute normalement informé et raisonnablement attentif, et qui est habitué à voir s'afficher les résultats de ses recherches avec les noms et sites de concurrents proposant les produits ou services recherchés, comprendra sans difficulté que les services d'agence matrimoniale visés par ces annonces ne proviennent pas de la société ELITE CONNEXION qui a pour fondatrice et dirigeante Mme [F] [S], mais d'une société tierce, d'autant que, comme relevé par le tribunal, (i) apparaît immédiatement sous lesdites annonces promotionnelles, et donc sur la même page de résultats, une annonce présentant les services de la société ELITE CONNEXION sous la mention de sa dénomination sociale, tant dans le titre que dans le texte de l'annonce, et de l'adresse URL elite-connexion.com, (ii) l'annonce litigieuse constatée 13 juillet 2018, déclenchée par les mots-clés '[F] [S]' est immédiatement suivie par des annonces, non sponsorisées, concernant « [F] » ou « [F] [S] » et la société ELITE CONNEXION, et (iii) le descriptif de l'annonce litigieuse constatée le 6 juillet 2018 indique expressément « [E] [Z] a bâti sa réputation sur l'excellence de son carnet d'adresses (...) ». Il s'en déduit que le risque de confusion allégué n'est pas caractérisé.

Il en est de même des annonces déclenchées sur les moteurs de recherche Ask et Orange avec les mots clés 'agence matrimoniale elite connexion' telles que constatées par le procès-verbal du 9 novembre 2018 (pièce 17 des appelantes), qui ne font apparaître les termes 'elite connexion' ni dans les titres, ni dans les textes descriptifs, ni dans l'adresse URL de ces annonces www.[06].com/agence/matrimoniale.

La concurrence déloyale du fait de ces annonces n'est ainsi pas caractérisée.

Sur le défaut de diligences de la société VIEWS6

Il s'infère des développements qui précèdent qu'il ne peut être reproché à la société VIEW6 un défaut de diligences, s'agissant notamment du défaut de mise en 'uvre de mots-clés négatifs, afin de faire cesser un trouble né d'une confusion dont la réalité n'est pas caractérisée.

Sur le parasitisme

Le fait pour un opérateur économique d'utiliser les signes distinctifs d'un concurrent pour promouvoir ses propres produits ou services par la réservation de mots-clés dans le cadre de services de référencement proposés par des moteurs de recherche, et de tenter ainsi de rallier de nouveaux clients, n'est pas en soi fautif, dès lors, quand il s'agit d'une marque, que cet usage ne porte pas atteinte aux fonctions de la marque du concurrent, notamment à sa fonction essentielle d'indication de l'origine des produits ou services concernés et, plus généralement, dès lors que cet usage n'est pas à l'origine d'un risque de confusion pour l'internaute. Ce procédé est en effet considéré comme favorisant le jeu de la concurrence et réputé bénéfique pour le consommateur qui voit apparaître sur l'écran des offres alternatives et peut alors les mettre en concurrence avec celle qu'il recherchait.

En l'espèce, comme il a été dit, l'usage par la société VIEW6 du terme « [F] », constitutif de la marque de la société ELITE CONNEXION, ne porte pas atteinte à la fonction d'indication de l'origine des services proposés et n'est donc pas constitutif de contrefaçon, et l'usage par la même société des termes 'élite connexion' et ' [F] [S]', à défaut de risque de confusion caractérisé, n'est pas constitutif de concurrence déloyale.

Par ailleurs, comme le tribunal l'a jugé, la société ELITE CONNEXION n'est pas fondée à faire grief à la société VIEW6 de l'usage des termes 'haut de gamme' et 'rencontres sérieuses' qui ne sauraient faire l'objet d'une quelconque appropriation pour les services d'agence matrimoniale.

L'usage de tous ces termes ne constitue pas non plus des actes de parasitisme par lesquels la société VIEW6 aurait cherché à se placer dans le sillage de la société ELITE CONNEXION sans bourse délier, mais des actions promotionnelles légitimes dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la marque de la société ELITE CONNEXION.

Au demeurant, la société ELITE CONNEXION ne justifie pas des investissements qu'elle allègue, se bornant à produire une revue de presse d'une douzaine d'articles concernant la société et/ou sa dirigeante, Mme [S], et quelques photographies prises à l'occasion d'émissions audiovisuelles auxquelles cette dernière participait.

En définitive, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société ELITE CONNEXION en concurrence déloyale.

Il sera complété en ce que la demande de la société ELITE CONNEXION en parasitisme sera également rejetée.

Sur la demande indemnitaire de Mme [S]

Mme [S] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de la somme de 20 000 € en réparation de son préjudice moral né de l'atteinte portée à son image, mais elle ne consacre aucun développement pour soutenir cette demande.

Le jugement qui a rejeté sa demande, en retenant qu'elle n'exposait pas les moyens fondant sa demande et ne caractérisait pas la faute de la société VIEW6 à son égard, sera en conséquence confirmé pour les justes motifs qu'il comporte et que la cour adopte.

Sur les autres demandes de la société ELITE CONNEXION et de Mme [S]

Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de leurs demandes de communication de documents, de désignation d'experts informatique et comptable et de publication aux frais avancés de la société VIEW6.

Les demandes présentées en appel à ces titres sont également rejetées.

Sur la demande reconventionnelle de la société VIEW6 fondée sur le dénigrement

La société VIEW6 soutient que la société ELITE CONNEXION a ouvertement dénigré la qualité de ses services auprès de sa clientèle ; que ELITE CONNEXION a désormais recours de manière régulière à des actes de dénigrement auprès de la clientèle de VIEW6 ; que la volonté de détournement de la clientèle de VIEW6 par ELITE CONNEXION ne fait nul doute, pas plus que sa volonté de nuire.

Les appelantes répondent que le dénigrement n'est aucunement démontré par les éléments fournis par la société VIEW6.

C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal a débouté la société VIEW6 de sa demande en retenant que les deux courriels versés au débat par celle-ci, qui ne font que faire référence à des « propos médisants » ou à des « propos négatifs », dont la teneur n'est pas même rapportée, sont insuffisants à établir la réalité du dénigrement allégué.

Le jugement sera confirmé de ce chef également.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société ELITE CONNEXION et Mme [S], parties perdantes, seront condamnées aux dépens de première instance et d'appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant infirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société ELITE CONNEXION et Mme [S] in solidum au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société VIEW6 peut être équitablement fixée à 16 000 € pour la première instance et l'appel, en ce compris les frais exposés pour les procès-verbaux de constat de commissaires de justice.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

condamné la société VIEW6 à verser à la société ELITE CONNEXION 5 000 euros à titre provisionnel à titre de dommages et intérêts en réparation de la contrefaçon de la marque de l'Union européenne « [F] » n° 695 ;

interdit à la société VIEW6 la réservation du signe [F] à titre de mot clef dans le cadre de référencements payants sur tout moteur de recherche pour déclencher une annonce promotionnelle de ses services d'agence matrimoniale présentée de manière à créer un risque de confusion avec la marque verbale de l'Union européenne « [F] » n° 695, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;

s'est réservé la liquidation de l'astreinte ;

a condamné la société VIEW6 aux dépens et au paiement à la société ELITE CONNEXION de la somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,

Déboute la société ELITE CONNEXION de l'ensemble de ses demandes en contrefaçon de marque,

Déboute la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,

Déboute la société ELITE CONNEXION de sa demande en parasitisme,

Déboute la société ELITE CONNEXION et Mme [S] de leurs demandes de communication de documents, désignation d'experts informatique et comptable et publication aux frais avancés de la société VIEW6,

Condamne in solidum la société ELITE CONNEXION et Mme [S] aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne in solidum la société ELITE CONNEXION et Mme [S] à payer à la société VIEW6 la somme de 16 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l'appel, en ce compris les frais exposés pour les procès-verbaux de constat de commissaires de justice.

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