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Décisions

CA Riom, ch. com., 17 septembre 2025, n° 24/01318

RIOM

Arrêt

Autre

CA Riom n° 24/01318

17 septembre 2025

COUR D'APPEL

DE [Localité 17]

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°331

DU : 17 SEPTEMBRE 2025

N° RG 24/01318 - N° Portalis DBVU-V-B7I-GHF5

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Arrêt rendu le dix sept septembre deux mille vingt cinq

Sur appel d'un jugement au fond du tribunal de commerce de Clermont Ferrand en date du 10 Juin 2024, enregistrée sous le n° 23/6985

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Société ALPHACHAMPLOUP

SARL immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le numéro 485 359 756

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me François-Xavier DOS SANTOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

M. [J] [N]

[Adresse 4]

[Localité 10]

Représenté par Me Richard LAURENT de la SCP S.C.P. LAURENT - ANCIENNEMENT PEKLE-LAURENT, avocat au barreau de CREUSE - et par Me Maryline DIAT, avocat au barreau de MONTLUCON

M. [D] [I]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Richard LAURENT de la SCP S.C.P. LAURENT - ANCIENNEMENT PEKLE-LAURENT, avocat au barreau de CREUSE - et par Me Maryline DIAT, avocat au barreau de MONTLUCON

M. [Z] [K]

[Adresse 15]

[Localité 5]

Représenté par Me Richard LAURENT de la SCP S.C.P. LAURENT - ANCIENNEMENT PEKLE-LAURENT, avocat au barreau de CREUSE - et par Me Maryline DIAT, avocat au barreau de MONTLUCON

M. [W] [N]

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représenté par Me Richard LAURENT de la SCP S.C.P. LAURENT - ANCIENNEMENT PEKLE-LAURENT, avocat au barreau de CREUSE - et par Me Maryline DIAT, avocat au barreau de MONTLUCON

Mme [B] [N] EPOUSE [X] épouse [X]

[Adresse 6]

[Localité 16] QUEBEC

Représenté par Me Richard LAURENT de la SCP S.C.P. LAURENT - ANCIENNEMENT PEKLE-LAURENT, avocat au barreau de CREUSE - et par Me Maryline DIAT, avocat au barreau de MONTLUCON

INTIMÉS

DEBATS : A l'audience publique du 15 Mai 2025 Madame DUBLED-VACHERON a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 804 du CPC. La Cour a mis l'affaire en délibéré au 09 Juillet 2025, prorogé au 23 juillet 2025 puis au 17 septembre 2025.

ARRET :

Prononcé publiquement le 17 septembre 2025, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte sous seing privé du 30 juin 2017, les associés de la SAS « Laiterie de [Localité 14] », M. [J] [N], Mme [B] [N], M [W] [N], M. [Z] [K], M. [D] [I] et M. [T] [M] ont cédé à la SARL Alpha Champloup la totalité des 2 508 actions composant le capital de la SAS Laiterie de [Localité 14] pour un prix provisoire de 1 365 000 euros.

Aux termes de l'article 9-3 de la convention de cession, le prix définitif devait être établi en fonction de la variation des capitaux propres de la société au 30 juin 2017, par rapport à ceux comptabilisés le 31 décembre 2016, à savoir 670 941 euros.

Aux termes de l'article 13 du contrat, les cédants ont déclaré souscrire le même jour et par un acte séparé un contrat de garantie « contenant notamment diverses déclarations, attestations et garanties relatives à la société. » Il est précisé que les engagements pris dans ce contrat sont pour le cessionnaire une cause déterminante et essentielle de son engagement d'acquérir.

Le bilan arrêté au 30 juin 2017 a fait apparaitre une augmentation des capitaux propres (763 745,95 euros) de 92 804.52 euros.

Aucun accord n'est intervenu sur le prix définitif et la désignation d'un tiers arbitre par le président du tribunal de commerce de Guéret n'a pas permis aux parties d'aboutir à une solution. Par ordonnance du 20 juin 2018 et sur saisine de M. [J] [N], le juge des référés a ordonné à la société Alpha Champloup de séquestrer la somme de 13 865,36 euros entre les mains du bâtonnier.

Par exploit d'huissier du 21 juin 2022, les consorts [N] ont fait assigner la SARL Alpha Champloup afin de voir arrêter le solde du prix de cession à la somme de 64 825.52 euros et afin d'obtenir le versement d'un complément de prix de 64.773.82 euros.

Par jugement du 19 juillet 2023, le tribunal de commerce Guéret s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, lequel a, suivant jugement du 10 juin 2024 :

- Débouté la SARL Alpha Champloup de la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mise en cause du sixième cessionnaire des parts de la SAS « Laiterie de [Localité 14] », M. [T] [M] et déclaré l'action recevable ;

- Arrêté le solde du prix de cession des 2508 actions de la SAS « Laiterie de [Localité 14] » à la somme de 64.825,52 euros, soit 25,8475 euros par action ;

- Condamné la SARL Alpha Champloup à payer et porter en complément de prix à :

* M. [J] [N] les sommes de 22.022,07 euros au titre des 852 actions en pleine propriété et 12.923,75 euros au titre des 1 000 actions en usufruit,

* M. [D] [I] la somme de 51.69 euros au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [Z] [K] la somme de 51.69 au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [W] [N] les sommes de 8.400, 44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6.461,87 euros au titre des 500 actions en usufruit,

* Mme [B] [N] épouse [X], les sommes de 8.400,44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6.461 ,87 euros au titre des 500 actions en usufruit

- Rejeté les demandes de garantie de passif de la SARL Alpha Champloup,

- Condamné la SARL Alpha Champloup à payer et porter à M. [J] [N], Mme [B] [N], M [W] [N], M. [Z] [K], M. [D] [I] la somme de 500 euros, chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SARL Alpha Champloup aux dépens d'instance dont frais de greffe liquidés à 183.60 euros

Le tribunal a jugé que l'absence de M. [T] [M] (6ème cessionnaire) à l'instance n'était pas une cause d'irrecevabilité de l'action en ce que l'acte de cession ne faisait apparaître aucune obligation de solidarité ou d'invisibilité entre les cédants et qu'il est prévu de procéder à une répartition du prix au prorata des droits sociaux de chacun. Il a également considéré que la réponse du conseil des cédants aux demandes d'ajustement de prix formées par la société Alpha Champloup le 8 décembre 2017 ainsi que les ordonnances de nomination des tiers arbitres avaient eu pour effet d'interrompre la prescription quinquennale ; que l'action de la SARL Alpha Champloup était donc recevable tant en ce qui concerne la demande d'ajustement du prix que la demande en garantie de passif.

Pour le surplus, il a justifié des modalités de calcul du prix définitif.

Par déclaration d'appel du 5 août 2024, la SARL Alpha Champloup a relevé appel de ce jugement

Par conclusions en date du 21 octobre 2024, elle demande à la cour :

- de juger son appel recevable ;

- de réformer le jugement sauf en ce qu'il a jugé ses demandes recevables et dit que les sommes de 22.999 euros, 508 euros, 836 euros et 2 735 euros, non contestées par les cédants, devaient être déduites du prix définitif de cession.

- de juger que le prix définitif de cession n'excédera pas la somme de 50 101,52 euros, chacun des cessionnaires ayant droit à une fraction du prix à concurrence de ses droits réels dans les parts sur la base de 19,9767 euros l'action,

- De la condamner, en deniers ou quittances compte-tenu de la provision globale qu'elle a versée à hauteur de 13.865,36 euros au paiement du prix définitif.

- De condamner M. [J] [N] seul, en sa qualité de débiteur de la garantie de passif, à lui payer et porter :

- au titre de sa garantie de passif : 53.401,32 euros

- au titre de la perte d'image liée à l'absence de contrat de distribution annoncé avec le centre Leclerc : 12.500 euros.

- D'ordonner la compensation judiciaire entre les créances détenues par elle à l'encontre de M. [J] [N] et la créance de ce dernier à due concurrence de ses droits réels dans le solde du prix définitif,

- de condamner M. [J] [N] à lui payer la différence outre intérêts au taux légal à compter de la notification du travail de M. [O] le 7 novembre 2017,

En tout état de cause,

- Condamner l'ensemble des demandeurs à lui payer et porter une indemnité de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux dépens.

Par conclusions du 17 janvier 2025, les consorts [N] demandent à la cour de :

* Retenir que l'effet dévolutif de l'appel du 5 août 2024 n'est pas intervenu pour les chefs suivants du jugement du 10 juin 2024 du tribunal de commerce :

« -Déboute la SARL Alpha Champloup de sa demande de voir juger l'action irrecevable faute de mise en cause du sixième cessionnaire des parts de la SAS « Laiterie de [Localité 14] », M. [T] [M] ;

- Condamne la SARL Alpha Champloup à payer et porter à M. [J] [N], Mme [B] [N], M [W] [N], M. [Z] [K], M. [D] [I] la somme de 500 euros, chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la SARL Alpha Champloup aux dépens d'instance dont frais de greffe liquidés à 183.60 euros. »

* Débouter la SARL Alpha Champloup de toutes ses demandes de réformation en appel :

* Confirmer le jugement en ce qu'il a :

Dit l'action de la SARL Alpha Champloup en ses demandes d'ajustements recevable,

Arrêté le solde du prix de cession des 2508 actions de la SAS « Laiterie de [Localité 14] » à la somme de 64 825.52 euros, soit 25,8475 euros par action

Condamné la SARL Alpha Champloup à payer et porter en complément de prix à :

°M. [J] [N] les sommes de 22 022,07 euros au titre des 852 actons en pleine propriété et 12 923.75 euros au titre des 1 000 actions en usufruit de la Lait,

°M. [D] [I] la somme de 51,69 euros au titre des 2 actions en plein propriété de la SAS LAIT,

°M. [Z] [K] la somme de 51,69 au titre des 2 actions en plein propriété de la SAS LAIT,

°M. [W] [N] les sommes de 8.400,44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6 461.87 euros au titre des 500 actions en usufruit de la LAIT,

°Mme [B] [N] épouse [X], les sommes de 8.400,44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6.461,87 euros au titre des 500 actions en usufruit de la LAIT

- Dit recevables mais mal fondées les demandes de garantie de passif de la SARL Alpha Champloup et l'en déboute,

Subsidiairement, si la cour se déclarait saisie,

* Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- Condamné la SARL Alpha Champloup à payer et porter à M. [J] [N], Mme [B] [N], M [W] [N], M. [Z] [K], M. [D] [I] la somme de 500 euros, chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SARL Alpha Champloup aux dépens d'instance dont frais de greffe liquidés à 183.60 euros

* Condamner la SARL Alpha Champloup au paiement d'une indemnité de 5 000 euros à Monsieur [J] [N], 1 500 euros à M. [W] [N], 1 500 euros à Mme [B] [N], 800 euros chacun à M. [D] [I] et M. [Z] [K] en application de l'article 700 du code de procédure civile. Ainsi qu'aux dépens d'appel.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des moyens développés par les ces dernières au soutien de leurs prétentions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 avril 2025.

Motivation :

I-Sur l'effet dévolutif de l'appel :

Les intimés font valoir que la déclaration d'appel ne vise pas les chefs suivants du jugement critiqué :

« Déboute la SARL Alpha Champloup de se demande de voir juger l'action irrecevable faute de mise en cause du sixième cessionnaire des parts de la société Laiterie de [Localité 14], M. [T] [M]. »

Ils estiment en conséquence que la décision est définitive sur ce point.

Par ailleurs, et s'agissant des autres chefs du jugement critiqués, ils font observer qu'il n'est pas demandé dans le dispositif des conclusions la réformation, l'infirmation des condamnations intervenues. Ils en concluent que le jugement est définitif sur ces chefs de jugement.

La société Alpha Champloup indique que la recevabilité de l'action des consorts [N] faute d'intervention du sixième cédant des actions de la SAS Laiterie de [Localité 14] a été tranchée définitivement.

Il n'y a pas de désaccord entre les parties sur ce point et donc pas lieu à statuer sur cette question.

La déclaration d'appel est ainsi rédigée :

- appel partiel qui tend à l'annulation et/ou l'infirmation des chefs suivants du dispositif de la décision rendue :

- Arrête le solde du prix de cession des 2508 actions de la SAS « Laiterie de [Localité 14] » à la somme de 64.825,52 euros, soit 25,8475 euros par action ;

- Condamne la SARL Alpha Champloup à payer et porter en complément de prix à :

* M. [J] [N] les sommes de 22.022,07 euros au titre des 852 actions en pleine propriété et 12.923,75 euros au titre des 1 000 actions en usufruit,

* M. [D] [I] la somme de 51.69 euros au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [Z] [K] la somme de 51.69 au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [W] [N] les sommes de 8.400, 44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6.461,87 euros au titre des 500 actions en usufruit,

* Mme [B] [N] épouse [X], les sommes de 8.400,44euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 6.461 ,87 euros au titre des 500 actions en usufruit

- Dit mal fondées les demandes de garantie de passif de la SARL Alpha Champloup et l'en déboute

- Condamne la SARL Alpha Champloup à payer et porter à M. [J] [N], Mme [B] [N], M [W] [N], M. [Z] [K], M. [D] [I] la somme de 500 euros, chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SARL Alpha Champloup aux dépens d'instance dont frais de greffe liquidés à 183.60 euros.

Les conclusions notifiées par l'appelante ne modifient ni ne réduisent sur ce point le périmètre de saisine de la cour dès qu'il est indiqué « réformer le jugement pour le surplus »

La demande tendant à voir juger que l'effet dévolutif de l'appel n'est pas intervenu sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée.

II- Sur les demandes d'ajustement :

La société Alpha Champloup expose que la variation des capitaux propres devrait théoriquement conduire à fixer le complément de prix à la somme de 92 804,52 euros ; que ce calcul théorique ne correspond pas à la réalité ce que les consorts [N] n'ignorent pas puisque leur demande se cantonne à la somme de 64 825,52 euros.

Elle expose sa demande poste par poste tel que mentionné dans le rapport de M. [O] expert-comptable. La cour reprendra cette numérotation.

1-1 : Les cotisations exploitant :

L'appelante indique que les parties sont d'accord pour la somme de 11 556 euros et rappelle que le tribunal a exclu ce montant du décompte puisqu'un accord a été trouvé. Les intimés confirment leur accord sur cette somme en précisant qu'elle a déjà été déduite dans son intégralité et qu'il n'y a pas lieu de la comptabiliser de nouveau.

Il n'y a donc pas lieu à statuer sur ce point.

1.2 : matériels et consommables :

Un accord existe sur :

* le fuel : 836 euros

* les fournitures de bureau : 1.523 euros

* chaudière : les appelants comme les intimés sollicitent la confirmation de l'analyse du tribunal qui a ajouté à ce poste la somme de 508 euros.

Il n'y a donc pas lieu à statuer sur ce poste.

1.3 : La cession d'actifs :

Les parties s'accordent sur une confirmation de la décision du tribunal qui a réduit e prix de cession de la somme de 836 euros. Il n'y a donc également pas lieu à statuer sur ce point.

2.1 Omission de charges :

Les parties sont parvenues à un accord pour déduire du prix définitif la somme de 8.084 euros. Il n'y a pas lieu à statuer sur ce point.

2.2 : Stocks :

L'inventaire de juin 2017 valorise un stock extérieur de fromages qui a été perdu, générant une perte de 6.336 euros.

La société Alpha Champloup explique que cette perte est due au fait que l'entreposeur ne disposait pas d'un tunnel de congélation.

Elle retient que le prix de vente a été fixé en fonction de stock qui appartenait encore à la société Laiterie de [Localité 14] ; qu'il incombait à cette dernière de s'assurer que l'entreposeur pouvait conserver les fromages dans des conditions normales.

Elle reproche au tribunal d'avoir considéré que son analyse n'était étayée par aucun élément probant et souligne qu'elle fait une simple application des règles de responsabilité civile du cédant.

Les intimés sollicitent la confirmation du jugement en indiquant que la perte est intervenue en juillet 2017 soit après la cession du 30 juin 2017 alors que rien n'établit que le préjudice était en germe avant la cession ; qu'en application des articles 1582 et 1583 du code civil, l'acte de cession des parts sociales mettait les risques à la charge de l'acquéreur au jour de la cession.

Au cours des échanges entre les parties à ce sujet, les intimés ont répliqué que la laiterie ne pouvait être tenue pour responsable de la rupture de la chaîne du froid et que par ailleurs le cessionnaire avait écarté les conseils de M. [N] ce qui a conduit à la destruction des stocks quelle qu'en soit l'origine.

Il résulte cependant de l'annexe 5 des pièces fournies par le cabinet de M. [O] :

- que la directrice adjointe de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations de la [Localité 13] s'est adressée le 28 juillet 2017 à la laiterie de [Localité 14] pour lui indiquer :

* qu'il n'existait aucune traçabilité de congélation ni de respect de la chaîne du froid au niveau de l'entrepôt ;

* que les fromages n'étaient pas congelés en surgélateur mais en congélation lente au sein du hall d'entreposage ;

* que de son côté Mme [L] (laiterie de la [Localité 18]) n'avait pas connaissance d'un contrat de prestation de congélation entre la laiterie et la FAFS qui aurait défini les modalités de la congélation/surgélation des formages

* qu'au regard de ces éléments, sous leur responsabilité, l'usage en l'état des fromages après décongélation lente et affinage était impossible puisque la qualité sanitaire des produits n'était plus garantie car il leur était impossible d'avoir une traçabilité de suivi de la congélation correspondante à la durée d'entreposage.

Il apparaît que le fait même de transférer les fromages dans un entrepôt dépourvu de tunnel de congélation a entraîné une rupture de la chaîne du froid. Ainsi la perte des stocks était en en germe avant la cession des parts du fait de la prévisibilité du dommage imputable au manque de précautions et de vérifications de la Laiterie de [Localité 14] s'agissant de la traçabilité de suivi de la congélation et de l'assurance de bonnes conditions de conservation des stocks confiés.

Il sera donc fait droit à la demande de la société Alpha Champloup sur ce point et la somme de 6.336 euros qui n'aurait pas dû être valorisée dans le bilan de cession sera déduite du prix de vente.

2.3 -Petit matériel :

La société Alpha Champloup soutient que le petit matériel valorisé à 9.388 euros ne vaut pas en réalité plus de 1.000 euros.

Les cédants s'opposent à sa demande de diminution du prix au motif que celui-ci résulte d'une liste dressée contradictoirement signée par les parties et donc définitive.

L'appelante réplique que l'acte dont les cédants se prévalent n'est pas annexé à l'acte de vente et que ces derniers sont dans l'incapacité de justifier du prix demandé.

Elle prétend que contrairement à l'analyse des juges consulaires, la liste du matériel n'est pas contractualisée.

Les intimés relèvent que si l'article 9.2 de l'acte de cession retient que seules les pièces détachées et le petit matériel en stock « non valorisés dans les derniers comptes annuels » donneront lieu à valorisation contradictoire, la société Alpha Champloup n'est pas recevable à remettre en cause la valorisation du matériel listé à l'annexe 6 de sa propre revue limitée alors qu'elle fait l'économie de la liste de ce petit matériel et de sa valorisation, se privant ainsi de rapporter aujourd'hui la preuve d'une valeur plus faible.

Il résulte effectivement de l'article 9-2 a) de l'acte de cession que les comptes seront établis selon les mêmes principes comptables et méthodes d'évaluation que celles retenues pour l'établissement des derniers comptes annuels, notamment pour le calcul des amortissements, la constitution des provisions et la valorisation des éléments de l'actif circulant.

Il est prévu qu'à la date du 30 juin 2017 un inventaire physique des éléments corporels de l'actif immobilisé (matériels, outillages, mobiliers..) soit établi contradictoirement.

Comme l'indiquent les intimés, la liste du matériel en stock neuf ou d'occasion pour chantier et dépannage a été dressée et valorisée le 30 juin 2017, de façon contradictoire, à la somme de 9.388 euros. Cette liste figure en annexe 6 de la revue limitée des comptes de cession établie au 30 juin 2017 par l'expert comptable.

La société Alpha Champloup ne justifie pas de la valeur de 1.000 euros qu'elle avance aujourd'hui et, ainsi que le relève le tribunal, n'a pas fait vérifier la valeur de cet actif qui a été fixé amiablement.

Il est indiqué que selon son opinion l'évaluation est très exagérée mais elle n'en rapporte pas la preuve.

La décision du tribunal sera donc confirmée sur ce point.

2.4 : Créance client :

La société Alpha Champloup demande une déduction de 901 euros à raison du caractère irrecouvrable d'une créance sur le client [S] datant de 2014. Elle écarte l'argument selon lequel cette créance réduite à 50% fait l'objet d'un plan de continuation en affirmant que ce plan n'a jamais été respecté par le client.

Elle reproche au tribunal d'avoir statué ultra petita alors que les consorts [N] ne contestaient plus dans l'assignation cette difficulté.

A hauteur de cour, les intimés répliquent que l'appelante n'a jamais prouvé le non-recouvrement de cette créance et ne prouve pas son préjudice.

En l'espèce, la cour constate que cette affirmation est énoncée sans renvoi à la moindre pièce ; qu'il n'est effectivement pas produit de certificat d'irrécouvrabilité.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2.5 Immobilisations :

La société Alpha Champloup sollicite la confirmation du jugement sur ce point et les intimés rappellent qu'ils ne forment pas appel incident. Il n'y a donc pas lieu à statuer sur ce point.

2.6 Réparation de matériel :

La société Alpha Champloup explique que ce poste ne relève pas directement de la clause de fixation du prix définitif mais de la garantie de passif. Il sera examiné dans la paragraphe correspondant. Il en va de même pour le poste 3.2 « Fonds de commerce grande et moyenne surface ».

3.1 Caisse/Espèces :

Il n'y a pas lieu à statuer sur ce point les parties étant parvenues à un accord.

3.3 Machine Linapack :

La société Alpha Champloup ramène à 0 cette réclamation. Il n'y a pas lieu à statuer sur ce point.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la déduction complémentaire du prix est la suivante: 22.999 euros+508 euros+836 euros+2735 euros+6336 euros= 33.414 euros.

Le prix définitif s'établit donc comme suit : 92.804,52 euros- 33.414 euros = 59.390,52 euros soit (59.390,52/2508) 23,68 euros par action.

Il est dû aux cédants les sommes suivantes :

* M. [J] [N] les sommes de 20.175,36 euros au titre des 852 actions en pleine propriété et 11.840 euros (23,68 x1000x1/2 eu égard à son âge de 57 ans révolu à la date de la donation du 28 juin 2017 à ses enfants) au titre des 1 000 actions en usufruit,

* M. [D] [I] la somme de 47,36 euros au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [Z] [K] la somme de 47,36 au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [W] [N] les sommes de 7.696 euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 5.920 euros au titre des 500 actions en usufruit,

* Mme [B] [N] épouse [X], les sommes de 7.696 euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 5.920 euros au titre des 500 actions en usufruit

Il sera tenu compte de la provision de 13 865,36 euros dont la société Alpha Champloup s'est acquittée.

III- Sur la garantie de passif :

La société Alpha Champloup indique qu'il est clairement stipulé à l'article 5.4.7 relatif au matériel et installations qu'il est fait référence aux matériels et installations qui existent physiquement et qui sont en état d'usure normale.

Elle précise que le formalisme visé à l'article 7.1 ne concerne que les réclamations sociales ou fiscales.

Elle se fonde sur le rapport de M. [O] pour solliciter une garantie de 2.652,04 euros pour la remise en état d'un véhicule Iveco, celle de 4.699,95 euros pour le remplacement d'un évaporateur frigorifique, 3.145 euros pour le remplacement d'une pompe à eau, 1.819 euros au titre d'un logiciel, 2.268,67 euros pour le remplacement d'un évaporateur de centrale frigorifique, 32.204 euros au titre de travaux de conformité.

M. [J] [N] soutient que la garantie de passif n'est pas opposable aux autres cédants. Il ne soulève plus l'irrecevabilité de la demande. Il soutient que la société Alpha Champloup n'a jamais justifié du formalisme prévu contractuellement, applicable à toutes les garanties ouvertes par la convention, (article 7.1 de l'acte de garantie de passif) et se trouve donc irrecevable à réclamer l'application de la garantie de passif.

Il ajoute que la convention conditionnait la durée d'application des garanties aux prescriptions légales applicables et que le domaine de la garantie de passif précisé à l'article 6 indique bien que la garantie ne s'étend pas aux actifs immobilisés.

Il fait observer :

- que la réclamation de l'appelante porte sur les actifs immobilisés de la société (poste 2.6)

- qu'elle porte également sur une prétendue perte de substance du fonds de commerce à hauteur de la clientèle perdue dans l'acquisition par la société Distrifromages de la société Comptoir des artisans fromagers alors même que cette cession de fonds de commerce n'entre pas dans la convention de garantie de passif.

L'article 7.1 portant sur l'exécution des garanties, stipule que la mise en 'uvre des garanties implique que le garant, après avoir reçu une information préalable, ait la faculté de faire valoir ses observations et de défendre ses intérêts. Le bénéficiaire doit ainsi l'associer ou lui proposer de l'associer à toute vérification, décision, instance ou procédure pouvant avoir une incidence sur le montant de leur éventuelle dette à son égard. Toute réclamation, tout fait ou évènement susceptible d'entraîner la mise en jeu des garanties est porté à la connaissance du garant par le bénéficiaire au plus tard dans les quinze jours suivant celui où il en aura lui-même pris connaissance. En outre, le bénéficiaire informera le garant dans le délai de 15 jours suivant leur réception, de tout avis de vérification fiscale, douanière ou sociale de la société et de toute assignation, dont il n'aurait pas déjà connaissance. Toutefois le non-respect de ces délais n'aura pour effet d'entraîner la déchéance des droits du bénéficiaire à dédommagement au titre des garanties conférées sous les articles 5 et 6 que dans la mesure où il aura privé le garant de l'exercice d'un droit de recours ou d'un recours quelconque.

L'article 7.2 précisent les modalités spécifiques aux vérifications fiscales douanières ou sociales.

Il résulte de la combinaison de ces articles que le formalisme prévu à l'article 7.1 s'applique à toutes les garanties stipulées à la convention.

Le tribunal a observé que l'article 10.2 de celle-ci stipule que toute notification ou autre communication au titre du contrat sera valablement effectuée si elle est envoyée par lettre recommandée avec AR ou par un moyen de télécommunication aux adresses mentionnées au contrat ou à toutes autres qui s'y substitueraient après notification faite par la ou les parties concernées à tous ses cocontractants. Il s'est fondé sur l'absence de respect de ce formalisme pour écarter la demande.

La société Alpha Champloup ne justifie pas du formalisme prescrit. Toutefois il est précisé que le non-respect de ces délais n'aura pour effet d'entraîner la déchéance des droits du bénéficiaire à dédommagement au titre des garanties conférées sous les articles 5 et 6 que dans la mesure où il aura privé le garant de l'exercice d'un droit de recours ou d'un recours quelconque.

Il apparaît surtout que l'article 6.2 exclut de la garantie des actifs :

- les actifs immobilisés : seule l'inexistence des biens corporels ou des inexactitudes ou omissions dans les déclarations et attestations faites en référence à ces actifs sous le paragraphe 5 pouvant donner lieu à réclamation.

Les demandes portent sur le remplacement de deux évaporateurs et la remise en état d'un véhicule automobile, soit sur deux actifs immobilisés.

S'agissant des travaux de mise en conformité, il est indiqué à l'article 5.2.3 que le bénéficiaire a procédé à un audit réalisé par sa responsable qualité, consistant en une visite des lieux lors d'un cycle de production, audit des installations techniques, du matériel, de l'outillage ; que cet audit de deux jours n'a fait l'objet d'aucune observation et qu'après remise des rapports de [Adresse 11] et de la DDCSPP le bénéficiaire déclare faire son affaire desdits rapports.

La demande relative au mauvais état du matériel allégué ne peut donc prospérer.

La société Alpha Champloup sollicite par ailleurs une somme de 12.500 euros au titre de la perte de marge liée à l'absence de contrat de distribution avec le centre Leclerc.

Le tribunal a rejeté cette demande pour absence de justificatif.

M. [O] mentionne dans son rapport que la société Distrifromages a acquis auprès de la société Comptoire des Artisans Fromagers (CAF) le fonds de commerce relatif aux clients de la grande et moyenne distribution. Une partie du chiffre d'affaires était réalisée par le groupe Leclerc. Il indique que la société SCACHAP a cessé toute relation avec la LAV depuis le 1er août 2017 au motif que les contrats de référencement n'étaient pas régularisés par la LAV depuis 2013.

Toutefois, il résulte de l'acte de cession que la société Alpha Champloup a acquis 100% des droits sociaux et des droits de vote de la société Laiterie de [Localité 14]. La société Distrifromages a acquis le même jour la société Comptoir des Artisans Fromagers.

La garantie de passif invoquée concerne « la cession de 100% de la société Laiterie de [Localité 14] » ainsi que l'indique la mention portée en tête de l'acte. La cession du fonds de commerce invoquée par M. [O] n'entre pas dans la convention de garantie de passif.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande présentée au titre de la garantie de passif.

IV- Sur les autres demandes :

La société Alpha Champoup sollicite la réformation du jugement sur les dépens et l'article 700 en première instance.

Les parties n'étant pas parvenues à un accord les consorts [N] se sont trouvés dans l'obligation de saisir le tribunal. La proposition de médiation faite par la cour a échoué. Il résulte du jugement que le prix de cession a effectivement été modifié d'une part suivant l'accord des parties, d'autre part et de façon plus marginale par le tribunal puis par la cour. L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel ainsi que ses frais irrépétibles.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Rejette la demande tendant à voir juger que l'effet dévolutif de l'appel n'est pas intervenu sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Infirme le jugement sauf :

- en ce qu'il a débouté la société Alpha Champloup de sa demande de voir déclarer l'action irrecevable faute de mise en cause du sixième cessionnaire de la société Laiterie de [Localité 14], M. [T] [M] ; dit que l'action de la SARL Alpha Chamloup en ses demandes d'ajustement est recevable ; dit recevables mais mal fondées les demandes de garantie de passif de la SARL Alpha Champloup et l'en a débouté,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que le prix de cession des 2 508 actions de la société Laiterie de [Localité 14] s'établit à la somme de 59.390,52 euros soit 23,68 euros par action.

Condamne la SARL Alpha Champloup à payer en complément de prix, et en deniers ou quittances eu égard à la provision versée :

* M. [J] [N] les sommes de 20.175,36 euros au titre des 852 actions en pleine propriété et 11.840 euros (23,68 x1000x1/2 eu égard à son âge de 57 ans révolu à la date de la donation du 28 juin 2017 à ses enfants) au titre des 1 000 actions en usufruit,

* M. [D] [I] la somme de 47,36 euros au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [Z] [K] la somme de 47,36 au titre des 2 actions en plein propriété

* M. [W] [N] les sommes de 7.696 euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 5.920 euros au titre des 500 actions en usufruit,

* Mme [B] [N] épouse [X], les sommes de 7.696 euros au titre des 325 actions en pleine propriété et 5.920 euros au titre des 500 actions en usufruit

Dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens de première instance et d'appel et rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance comme en appel.

Le greffier La présidente

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