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CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 17 septembre 2025, n° 24/00284

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 24/00284

17 septembre 2025

17/09/2025

ARRÊT N° 25/ 325

N° RG 24/00284

N° Portalis DBVI-V-B7I-P64U

SL - SC

Décision déférée du 19 Décembre 2023

TJ de [Localité 10] - 19/04068

E. JOUEN

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 17/09/2025

à

Me Marie-Victoire CHAZEAU

Me Corine CABALET

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANT

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA [Adresse 7] [Adresse 13]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie-Victoire CHAZEAU, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A. ALLIANZ IARD

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. DEFIX, président

S. LECLERCQ, conseillère

N. ASSELAIN, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE

La société civile immobilière (Sci) [Adresse 6] a entrepris l'édification d'une résidence composée de 12 bâtiments, située [Adresse 2] Toulouse (31).

Pour ce faire, la Sci Fonta Villa Veneto a notamment fait appel a :

- la Selarl d'Architecture Martinie, titulaire d'une mission de maîtrise d'oeuvre complète, assurée auprès de la Maf,

- la Sarl Jm [H], titulaire du lot gros-oeuvre, assurée auprès de la compagnie Groupama d'Oc,

- la Sarl 4S Façades, titulaire du lot enduit, assurée auprès de la société AGF IARD devenue Allianz,

- la Sas Bretonnet Peinture Revêtement, titulaire du lot peinture, assurée auprès de la Smabtp,

- la société Bureau Veritas, en tant que bureau de contrôle.

Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la Sma Sa, qui est également l'assureur Cnr de la Sci [Adresse 6].

En cours de chantier, la Sarl Jm [H] a été placée en liquidation judiciaire. Le maître d'oeuvre a alors fait appel, pour la remplacer, à la société Aquitaine de Bâtiment, assurée auprès de la compagnie Groupama d'Oc.

Selon procès verbal du 9 février 2011, la réception des travaux a eu lieu avec réserves.

L'immeuble a été soumis au régime de la copropriété.

Postérieurement, les copropriétaires se sont plaints de l'apparition de multiples fissures et autres dégradations de l'enduit/maçonnerie. Une déclaration de sinistre a été effectuée auprès de l'assureur dommages-ouvrage, laquelle a été rejetée pour absence de caractère décennal des désordres.

Par jugement du 12 juin 2014, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sarl 4S Façades.

Par jugement du 12 février 2015, le tribunal de commerce de Toulouse a converti le redressement judiciaire en liquidation judiciaire et désigné comme liquidateur Me [N] [F].

Par acte du 13 octobre 2017, le [Adresse 8] Villa Veneto a fait assigner la Selarl d'Architecture Martinie, les sociétés 4S Façades et Aquitaine du Bâtiment, ainsi que les compagnies Maf et Groupama d'Oc, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Toulouse, aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire.

Il a été fait droit à sa demande par ordonnance du 25 janvier 2018, M. [M] étant désigné en qualité d'expert.

Suivant ordonnance du 14 août 2018, les opérations d'expertise ont été déclarées communes et opposables à la Sma Sa ès qualités d'assureur dommages-ouvrage et CNR de la Sci [Adresse 6], à la Smabtp ès qualités d'assureur de la société Bretonnet Peinture Revêtement, au bureau de contrôle Veritas et à la compagnie Groupama d'Oc ès qualités d'assureur de la Sarl Jm [H].

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Parallèlement et par actes des 13, 14,15, 18 novembre et 3 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse, aux fins de réparation de ses préjudices :

- la Selarl d'Architecture Martinie et son assureur, la Maf,

- la Sas Aquitaine du Bâtiment et son assureur, la société Groupama d'Oc,

- la Sarl 4S Façades et son assureur, la société AGF Iart devenue Allianz Iard,

- la Sci [Adresse 6],

- le bureau de contrôle Veritas, et son assureur, la compagnie Qbe Insurance Limited,

- la compagnie Groupama d'Oc en sa qualité d'assureur de la Sarl Jm [H],

- la Sas Bretonnet Peinture Revêtement et son assureur, la Smabtp,

- la Sma Courtage [Localité 10] (Socobat [Localité 10]) en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage,

- Maître [F], ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl 4S Façades.

Par ordonnance du 22 octobre 2020, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse a sursis à statuer sur les demandes formées par le syndicat des copropriétaires de la résidence [12], dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, et réservé les dépens.

L'expert a établi son rapport le 31 mars 2021.

Par jugement du 8 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Toulouse a ordonné la réouverture des débats, et invité les parties à formuler leurs observations sur la recevabilité de la demande présentée par le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] tendant à voir condamner la Sarl JM [H], in solidum avec les autres défendeurs, à lui verser la somme de 369.961,59 euros, et a invité le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] à verser aux débats la déclaration de créance effectuée dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la Sarl 4S Façades. Il a sursis à statuer sur les autres demandes et réservé les dépens.

-:-:-:-

Par un jugement du 19 décembre 2023, rectifié par jugement du 29 février 2024, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- accueilli l'intervention volontaire à l'instance de la société Bureau Veritas Construction venant aux droits de la société Bureau Veritas,

- accueilli l'intervention volontaire de la société Qbe Europe Sa/Nv venant aux droits de la société Qbe Insurance (Europe) Limited,

- accueilli l'intervention volontaire du syndic nouvellement élu, la société Be Immobilier,

- mis hors de cause la société Bureau Veritas,

- mis hors de cause la société Qbe Insurance (Europe) Limited,

- mis hors de cause la Sma Sa,

- fixé la créance du syndicat des copropriétaires de la résidence [12] au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl 4S Façades à la somme de 316.935,04 euros toutes taxes comprises, au titre de la réparation des désordres n° 1,2, 4, 5 et 6 et 7,

- condamné la Sarl Jm [H] à régler au syndicat des copropriétaires de la résidence [12] la somme de 57.163,65 euros toutes taxes comprises au titre de la réparation des désordres n° 8 et 9,

- condamné in solidum la société Bretonnet Peinture Revêtement Peinture et son assureur, la Smabtp, la Selarl MR3A et son assureur, la Maf, à régler au syndicat des copropriétaires de la résidence [12] la somme de 2.005,49 euros toutes taxes comprises au titre de la réparation du désordre n° 10,

- dit que les franchises contractuelles de la Maf et de la Smabtp sont opposables erga omnes,

- débouté la Selarl MR3A de son recours à l'encontre de la Sci [Adresse 6],

- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge de la dette finale sera supportée dans les proportions ci-dessous fixées dans lesquelles il est fait droit aux recours :

* Selarl MR3A venant aux droits de la Selarl Martinie assurée par la Maf : 80 %,

* Société Bretonnet Peinture Revêtement assurée par la Smabtp : 20 %,

- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] du surplus de ses demandes indemnitaires,

- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] de ses demandes formulées à l'encontre de la Sci [Adresse 13] ;

- dit que la garantie de la Sa Groupama d'Oc n'est pas mobilisable ;

- condamné in solidum la Sarl Jm [H], Maître [N] [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, la Société Bretonnet Peinture Revêtement, la Smabtp, la Selarl MR3A et la Maf aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- condamné in solidum la Sarl Jm [H], Maître [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, la Société Bretonnet Peinture Revêtement, la Smabtp, la Selarl MR3A à régler au [Adresse 8] [Adresse 11] Veneto la somme de 6.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la Sarl Jm [H], Maître [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades la société Bretonnet Peinture Revêtement, la Smabtp, la Selarl MR3A à régler à la Sci [Adresse 6] la somme de 1.500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la Sarl Jm [H], Maître [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, la Société Bretonnet Peinture Revêtement, la Smabtp, la Selarl MR3A à régler à la compagnie Groupama d'Oc la somme de 1.500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la Sarl Jm [H], Maître [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, la société Bretonnet Peinture Revêtement, la Smabtp, la Selarl MR3A à régler à la Sma Sa la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] à régler à la Société Aquitaine Bâtiment la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le [Adresse 9] à régler à la société Bureau Veritas Construction et à la société Qbe Europe Sa/Nv la somme de 1.500 euros chacun,

- rejeté toutes autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que la charge finale des dépens et celui de l'indemnité accordée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, seront réparties dans les proportions suivantes :

* Sarl Jm [H] : 18 %,

* Maître [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades : 80%,

* Société Bretonnet Peinture Revêtement assurée par la Smabtp : 1 %,

* Selarl MR3A assurée par la Maf : 1 %,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que s'agissant des enduits, l'expert judiciaire relevait les désordres suivants :

- n°1 : fissures horizontales au droit des planchers ;

- n°2 : fissures verticales au droit des poteaux raidisseurs d'angle ;

- n°3 : fissures au droit des allèges des ouvertures ;

- n°4 : fissures en escalier à proximité des angles des bâtiments ;

- n°5 : faïençages de l'enduit ;

- n°6 : début de décollement d'enduit ;

- n°7 : absence d'enduit et maçonneries visibles en pied de mur.

Il a considéré que la responsabilité de la société 4S Façades était engagée pour les désordres n° 1,2, 4, 5, 6 et 7.

Il a retenu que la réparation de ces désordres relevaient de la responsabilité contractuelle de la société 4S Façades, ceux-ci ne pouvant être qualifiés ni d'ouvrage ni d'élément d'équipement.

Il a fixé les frais de réparation de ces désordres à la somme de 316.935,04 euros TTC.

Il a dit que la garantie de la Sa Allianz Iad n'était pas due, car les garanties complémentaires n'avaient pas pour objet d'assurer la reprise des travaux de l'assurée.

-:-:-:-

Par déclaration du 24 janvier 2024, le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] a relevé appel du jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 19 décembre 2023, intimant la Sa Allianz Iard, en ce qu'il a :

- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] du surplus de ses demandes indemnitaires,

'Statuant à nouveau, il est demandé à la cour,

- de condamner la Sa Allianz à relever et garantir Maître [N] [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, de l'ensemble des condamnations prononcées contre elle au titre du jugement du 19/12/2023 ou de prononcer une condamnation solidaire entre elles.'

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 juin 2025, le syndicat des copropriétaires de la résidence [12], appelant, demande à la cour de:

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires du surplus de ses demandes indemnitaires, notamment à l'encontre de la Sa Allianz Iard,

Y ajoutant,

À titre principal,

- condamner la société Allianz à relever et garantir Maître [N] [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades, de l'ensemble des condamnations prononcées contre elle au titre du jugement du 19 décembre 2023, soit la somme de 316.935,04 euros,

À titre subsidiaire,

- condamner solidairement la Sa Allianz et la Sarl 4S Façades et Maître [N] [F] es qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl 4S Façades à payer la somme de 316.935,04 euros,

- condamner la Sa Allianz à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 13] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure, ainsi que les entiers dépens.

Il fait valoir qu'il a une action directe contre l'assureur de la société 4S Façades. Il soutient que les désordres engagent la responsabilité décennale de la société 4S Façades, car l'enduit constitue un ouvrage lorsqu'il a une fonction d'étanchéité. Il fait valoir qu'il ressort du rapport d'expertise, s'agissant du désordre de faïençage de l'enduit, qu'à terme l'étanchéité de l'enduit sera compromise et de ce fait, la solidité de l'ouvrage elle aussi, dans le délai décennal.

Subsidiairement, il soutient que l'enduit a un rôle d'imperméabilisation, et constitue un élément d'équipement qui ouvre droit à la garantie décennale, dès lors que l'ouvrage est impropre à sa destination.

Il conteste que le désordre ne soit qu'esthétique.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 mai 2025, la Sa Allianz Iard, intimée, demande à la cour de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et manifestement infondées,

- confirmer la décision du tribunal judiciaire de Toulouse rendue le 19 décembre 2023,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 13] de son appel,

- condamner le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 13] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, 'dont distraction' au profit de Maître Corinne Cabalet, avocat, sur son affirmation de droit.

Elle soutient que la responsabilité décennale de la société 4S Façades n'est pas engagée, car les enduits n'ont pas de fonction d'étanchéité, mais uniquement une fonction d'imperméabilisation. Elle soutient que l'enduit d'imperméabilisation n'est pas un élément d'équipement, car il n'est pas destiné à fonctionner. Elle soutient que les enduits n'avaient qu'une fonction esthétique.

Subsidiairement, elle soutient que les désordres ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination ni ne portent atteinte à sa solidité, dans le délai décennal.

Elle fait valoir que les garanties complémentaires n'ont pas pour objet d'assurer la reprise des travaux de l'assurée.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 mai 2025. L'affaire a été examinée à l'audience du mardi 10 juin 2025 à 14h00. À l'audience, les parties se sont accordées pour que l'ordonnance de clôture soit révoquée, et que la clôture soit prononcée le jour des plaidoiries. L'ordonnance de clôture a donc été révoquée, et la clôture prononcée le 10 juin 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la saisine de la cour :

La cour n'est saisie que de l'action directe du syndicat des copropriétaires contre l'assureur de la société 4S Façades.

Sur la garantie de l'assureur :

L'article L 124-3 du code des assurances dispose que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

Selon l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

Selon l'article 1147 ancien du code civil, dans sa version applicable en la cause, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En l'espèce, le lot n°8 (enduit) a été confié à la société 4S Façades par marché du 20 octobre 2008. Le marché décrit les ouvrages à exécuter :

5.1 : enduit de parement extérieur monocouche : application d'enduit de parement extérieur du type 'enduit monocouche Weberpral F' des ets Weber et Broutin ou similaire, enduit à base de liants hydrauliques, applicable par projection mécanique uniquement. Il devra être appliqué sur béton et maçonnerie de bloc béton, conformément aux prescriptions du fabricant, son épaisseur ne sera pas inférieure à 15 mm prestation finie ;

5.2 enduit sur tableau : traitement et application identique à l'article 5.1 ;

5.3 : enduit extérieur au mortier bâtard : enduit ordinaire dressé en touts sens, compris arêtes, cueillies, calfeutrements et toutes sujétions ; localisation : faces extérieures des maçonneries recevant du parement type Trespa, à l'exception des murs de façade recevant enduit (lot enduit) et autres finitions ;

5.4 : enduit pour protection relevés d'étanchéité : enduit ordinaire grillagé dressé en tous sens pour protéger les relevés d'étanchéité sur terrasses accessibles.

La réception est du 9 février 2011.

Le délai d'épreuve expirait le 9 février 2021.

Dans son rapport d'expertise établi le 31 mars 2021, M. [M] a notamment relevé les désordres suivants :

- n°1 : fissures horizontales au droit des planchers : L'expert indique : 'Il s'agit d'un phénomène dit structurel, lié aux différences de dilatation des matériaux supports de l'enduit. Il se produit un effet de cisaillement sur ces enduits, qui provoque ces microfissures. Il s'agit de désordres à caractère esthétique, qui trouvent leur origine dans deux phénomènes cumulés, à savoir l'absence d'entoilage des enduits au droit des nez de planchers, ainsi que l'insuffisance d'épaisseur de l'enduit (mesurée à 10 mm, à plus ou moins 1 mm près, au lieu des 15 mm prescrits au CCTP). Il s'agit, sur ces deux points, respectivement d'une non-façon et d'une malfaçon de l'entreprise qui a réalisé ces enduits, à savoir la société 4S Façades.

Ces microfissurations sont appelées à évoluer, et si elles ne sont pas infiltrantes à ce jour, à terme, elles seront amenées à le devenir. L'eau qui s'infiltrera alors provoquera le décollement de l'enduit, qui va tomber progressivement. Et sur ces zones non protégées, l'eau s'infiltrera alors dans la maçonnerie. L'enduit, qui a pour fonction d'assurer la protection du gros-oeuvre, n'assurera alors plus son office.'

- n°2 : fissures verticales au droit des poteaux raidisseurs d'angle : L'expert indique : 'Il s'agit d'un phénomène dit structurel, lié aux différences de dilatation des matériaux supports de l'enduit. Il s'agit ici aussi de désordres à caractère esthétique, liés à une insuffisance de préparation du support ainsi qu'à l'insuffisance d'épaisseur de l'enduit, comme décrit précédemment. Il s'agit là aussi de malfaçons imputables à l'entreprise qui a réalisé ces enduits, à savoir la société 4S Façades. Ces microfissurations ne sont pas de nature à présenter un risque pour la solidité et la stabilité de l'ouvrage, et ne remettent pas en question l'usage qui peut en être attendu.'

- n°4 : fissures en escalier à proximité des angles des bâtiments : L'expert indique : 'Il s'agit d'un phénomène caractéristique d'un tassement différentiel des sols d'assise, qui se produit généralement dans les angles, et notamment au cours des périodes de sécheresse, qui favorise les assèchements des sols argileux au contact des fondations. Ces argiles, en perdant une partie de leurs propriétés mécaniques, favorisent alors un léger basculement et provoquent l'apparition de ces fissurations.

- n°5 : faïençages de l'enduit : L'expert indique : 'Il s'agit d'un phénomène lié principalement à l'épaisseur insuffisante d'enduit ainsi qu'à un défaut de préparation de support. Ces deux malfaçons sont imputables à l'enduiseur 4S Façades. Il s'agit de désordres qui sont, dans un premier temps, à caractère esthétique, mais sont de nature à évoluer et à remettre en cause à terme l'étanchéité de l'enduit, avec les conséquences que nous avons décrites précédemment.'

- n°6 : début de décollement d'enduit : L'expert indique : 'Ceux-ci sont généralement situés au droit de fissures horizontales sur la maçonnerie au niveau des nez des planchers que nous avons décrits précédemment, suite à l'absence d'entoilage et à l'insuffisance d'épaisseur de l'enduit. L'analyse en est identique, et leur imputabilité revient également à 4S Façades.'

- n°7 : absence d'enduit et maçonneries visibles en pied de mur : L'expert indique : 'Il ne peut y avoir qu'une seule origine à ce désordre, à savoir la présence de terre au moment de la phase de mise en oeuvre de l'enduit qui, après régalage des terres, laisse un vide visible et inesthétique. Celui-ci est imputable à la fois à l'enduiseur 4S Façades, qui n'a pas exigé les conditions de bonne exécution de son ouvrage, ainsi qu'à la maîtrise d'oeuvre, la Selarl d'architecture Martinie, qui n'a pas relevé ces mauvaises conditions d'exécution. Ces désordres ne pas de nature à évoluer, ni à mettre en péril la stabilité et la solidité de l'ouvrage.'

Le premier juge a fixé la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la liquidation judiciaire de la société 4S Façades à la somme de 316.935,04 euros TTC au titre de la réparation des désordres n° 1,2, 4, 5 et 6 et 7.

Pour demander la garantie de l'assureur de la société 4S Façades, le syndicat des copropriétaires fait valoir que les désordres engagent la responsabilité décennale de l'assuré.

L'enduit constitue un ouvrage lorsqu'il a une fonction d'étanchéité. En revanche, il ne constitue pas un élément d'équipement, même s'il a une fonction d'imperméabilisation, dès lors qu'il n'est pas destiné à fonctionner.

L'expert judiciaire évoque le fait que l'enduit a pour objet la protection du gros-oeuvre. Il évoque la fonction d'étanchéité de l'enduit, à propos du désordre n°5.

Dès lors, en l'espèce, il est établi l'enduit a une fonction d'étanchéité. Il constitue donc un ouvrage.

Cependant, les désordres doivent revêtir le caractère décennal dans le délai d'épreuve, pour relever de la responsabilité décennale.

Or, en l'espèce, les désordres ne sont pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à porter atteinte à sa solidité dans le délai d'épreuve. En effet, le rapport d'expertise judiciaire a été établi plus de 10 ans après la réception. Or, à la date du rapport d'expertise judiciaire, les microfissures n'étaient pas encore infiltrantes, et l'étanchéité de l'enduit n'était pas encore remise en cause.

En conséquence, les désordres imputables à la société 4S Façades ne sont pas de nature décennale. Ils engagent sa responsabilité contractuelle.

Il ressort des conditions générales de la police souscrite par la Sarl 4S Façades le 20 juin 2007 qu'au titre des garanties facultatives, sont garanties après réception des ouvrages :

- le bon fonctionnement ;

- les dommages aux existants ;

- les dommages immatériels consécutifs.

Ainsi, les garanties facultatives n'ont pas pour objet d'assurer la reprise des travaux de l'assurée.

Il s'ensuit que la garantie de la Sa Allianz Iard n'est pas due.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] du surplus de ses demandes indemnitaires.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement dont appel sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Le syndicat des copropriétaires de la résidence [12], partie perdante, sera condamné aux dépens d'appel, avec application au profit de Me Corine Cabalet, avocat qui le demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il sera condamné à payer à la Sa Allianz Iard la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Il sera débouté de sa demande sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 19 décembre 2023, rectifié par jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 29 février 2024 ;

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [12] aux dépens d'appel, avec application au profit de Me Corine Cabalet, avocat qui le demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Le condamne à payer à la Sa Allianz Iard la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Le déboute de sa demande sur le même fondement.

La greffière Le président

M. POZZOBON M. DEFIX

.

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