CA Paris, Pôle 4 ch. 9 a, 18 septembre 2025, n° 24/06735
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Domofinance (SA), LTE (SAS)
Défendeur :
Domofinance (SA), LTE (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Bensimon, Me Mendes Gil, Me Lhussier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, le 7 juin 2018, M. [Y] [P] a conclu avec la société LTE, un contrat prévoyant la fourniture et la pose d'une centrale photovoltaïque en auto-consommation avec revente du surplus d'énergie produite.
Pour financer cette opération, M. [P] a signé le même jour avec la société Domofinance, un contrat de crédit affecté prévoyant un financement en capital de 26 900 euros au taux d'intérêts contractuel de 4,54 % l'an et TAEG de 4,64 %, remboursable sur une durée de 155 mois en 150 échéances mensuelles de 239,83 euros chacune hors assurance facultative, soit 261,80 euros assurance comprise.
Les travaux ont été réalisés au domicile de M. [P] le 16 mai 2017 et les fonds ont été débloqués par la banque au profit du vendeur sur la base d'une attestation de réception des travaux sans réserve signée à cette date par l'acquéreur.
La société LTE a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du 21 décembre 2021 du tribunal de commerce de Bobigny et Maître [V] [R] désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Saisi par M. [P] le 8 mars 2022 d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Denis par un jugement réputé contradictoire rendu le 11 mars 2024 auquel il convient de se reporter pour un exposé plus ample du litige, a :
- déclaré irrecevables les demandes formées par M. [P] du fait de l'autorité de la chose jugée,
- rejeté le surplus des demandes des parties,
- laissé les dépens à la charge des parties qui les ont avancés,
- rappelé que la présente décision est revêtue de l'exécution provisoire.
Le juge a estimé en application de l'article 2052 du code civil que le protocole transactionnel conclu entre les parties le 2 avril 2020 homologué judiciairement le 11 octobre 2021, avait définitivement réglé le litige portant sur l'installation photovoltaïque.
Il a ajouté que M. [P] ne rapportait pas la preuve de l'absence d'exécution par l'autre partie de ses obligations.
Il en a conclu que le litige étant éteint, l'intégralité des demandes de M. [P] était irrecevable.
Par une déclaration enregistrée le 4 avril 2024, M. [P] a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières écritures enregistrées le 11 décembre 2024, M. [P] demande notamment à la cour :
- de le recevoir et le déclarer bien fondé,
- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
- de déclarer que le protocole signé le 2 avril 2020 entre la société LTE et lui n'a jamais été mis à exécution,
- de déclarer que le contrat conclu entre la société LTE et lui est nul en raison de la violation des dispositions du droit de la consommation,
- de déclarer que la société LTE a commis un dol à son encontre,
- de déclarer que la société Domofinance a délibérément participé au dol commis par la société LTE,
au surplus,
- de déclarer que la société Domofinance a commis des fautes personnelles en laissant prospérer l'activité de la société LTE par la fourniture de financements malgré les nombreux manquements de cette dernière qu'elle ne pouvait prétendre ignorer, en accordant des financements inappropriés s'agissant de travaux de construction, en manquant à ses obligations d'information et de conseil à son égard et en délivrant les fonds au vendeur sans s'assurer de l'achèvement des travaux,
- de déclarer que les fautes commises par la société Domofinance lui ont causé un préjudice,
en conséquence,
- de déclarer que les sociétés LTE et Domofinance sont solidairement responsables de l'ensemble des conséquences de leurs fautes à son égard,
- de prononcer la nullité ou à défaut la résolution du contrat de vente le liant à la société LTE,
- de prononcer la nullité ou à défaut la résolution du contrat de crédit affecté le liant à la société Domofinance,
- de déclarer que la société Domofinance ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs,
- d'ordonner le remboursement des sommes versées par lui à la société Domofinance au jour du jugement à intervenir outre celles à venir soit la somme de 39 304,85 euros sauf à parfaire,
à titre subsidiaire,
- de constater qu'il est un emprunteur non averti,
- de constater que le taux d'endettement de M. [P] est excessif,
- de déclarer que la société Domofinance a manqué à son obligation de mise en garde,
- de condamner la société Domofinance à lui verser la somme de 13 450 euros au titre de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit du 7 juin 2018,
en toutes hypothèses,
- de condamner solidairement les sociétés LTE et Domofinance à lui régler la somme de 5 000 euros au titre des frais de désinstallation et de remise de la toiture dans son état initial à défaut de dépose spontanée,
- de condamner la société Domofinance à lui verser les sommes de 8 000 euros au titre de son préjudice financier et du trouble de jouissance et de 3 000 euros au titre de son préjudice moral,
- de dire qu'à défaut pour la société LTE de récupérer le matériel fourni dans un délai de un mois à compter de la signification du jugement celui-ci sera définitivement acquis par lui,
- de condamner la société LTE à le garantir de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre,
- de déclarer qu'en toutes hypothèses la société Domofinance ne pourra se faire restituer les fonds auprès de lui mais devra nécessairement récupérer les sommes auprès de la société LTE seule bénéficiaire des fonds débloqués eu égard au mécanisme de l'opération commerciale litigieuse,
- de condamner solidairement la société Domofinance et la société LTE à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- de condamner in solidum la société LTE et la société Domofinance dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, une exécution forcée serait nécessaire à supporter le montant des sommes retenues par huissier par application des articles 10 et 12 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96 ' 1080 relatifs au tarif des huissiers en application de l'article R. 613-4 du code de la consommation,
- de fixer la créance au passif de la liquidation de la société LTE.
M. [P] explique avoir été démarché par voie téléphonique par un agent de la société LTE, qui lui a expliqué que ladite société était partenaire de la société EDF et l'a alors persuadé de bénéficier d'une installation photovoltaïque afin de percevoir des revenus tirés de la production d'électricité et de profiter d'économies d'énergie, ce qui a achevé de la convaincre outre le fait qu'il garantissait que les revenus de production allaient non seulement permettre de prendre en charge les mensualités du coût de l'installation photovoltaïque, mais qu'en plus, ils allaient permettre de générer d'importants bénéfices.
Il indique que la pose est intervenue le 22 juin 2018 et que l'installation a été raccordée et mise en service le 17 septembre 2018 mais qu'il a constaté au bout d'un an l'absence totale d'auto-consommation et l'impossibilité de revendre le moindre surplus puisqu'il n'y avait aucun surplus.
Il explique avoir alors assigné la société LTE au motif que les objectifs escomptés n'étaient jamais atteints, puis qu'un protocole d'accord a été signé le 2 avril 2020 entre eux dans le but de réaliser une compensation du différentiel de production.
Il estime que c'est à tort que le premier juge a déclaré ses demandes irrecevables alors que la société LTE ne lui a jamais versé la moindre somme au titre de la compensation et n'a donc jamais exécuté le protocole. Il considère que son droit d'agir a été réactivé à l'encontre de la société venderesse comme de la société Domofinance en raison de l'inexécution du protocole et que le premier jugement doit être infirmé.
À titre subsidiaire, il sollicite la nullité du contrat de vente sur deux fondements : le défaut de mentions obligatoires du bon de commande et le dol réalisé par la société LTE.
Sur le premier point, il considère que ne sont indiqués ni la marque ni le modèle ni le poids ni la surface des panneaux ni leur rendement ; que n'apparaît pas l'indication du prix unitaire et du coût de la main-d''uvre alors qu'il s'agit d'une caractéristique essentielle du bon de commande ; qu'aucun calendrier détaillé de l'exécution de l'ensemble des prestations de service ne figure sur le bon de commande prévoyant l'installation des panneaux, l'ensemble des démarches administratives et techniques ; que les modalités de paiement qui doivent apparaître sur le bon de commande sont complètement illisibles ; que le délai de deux à douze semaines pour la livraison indiquée sur le bon de commande est partiellement irréalisable tant techniquement que juridiquement en raison du délai de deux semaines de rétractation à compter de la signature du bon de commande et du délai d'un mois de traitement de la demande de réalisation des travaux auprès de la mairie ; que le nom du démarcheur est un faux nom ; que le bon de commande ne comporte pas de formulaire de rétractation détachable ; qu'aucune indication relative aux pièces détachées n'apparaît sur le bon pas plus que le recours au médiateur de la consommation.
Sur le second point, il estime que les agissements dolosifs de la société LTE sont caractérisés :
- dans le cadre du démarchage, par le fait qu'elle a fait état de partenariats mensongers avec la société EDF pour rentrer dans son habitation et qu'elle a utilisé l'image de la société Domofinance pour le convaincre de la véracité de son argumentation fallacieuse,
- dans la présentation de l'objet de l'ensemble contractuel, par le fait qu'elle a indiqué qu'il s'agit d'une candidature sans engagement soumise à la confirmation de sa parfaite viabilité économique et de son autofinancement alors qu'il s'agissait d'un contrat définitivement conclu et qu'il n'avait reçu confirmation de l'acceptation financière qu'après l'exécution des travaux confirmant les termes du contrat,
- dans la présentation de perspectives de rendement chiffré dont elle a veillé à ne laisser aucune trace pour le pousser à s'endetter, le commercial gonflant de manière disproportionnée les profits escomptés.
Il considère que la société LTE a également commis un dol par réticence en passant sous silence la durée de vie moyenne d'un onduleur électrique, soit six ans, nécessitant au moins trois fois son remplacement au cours de l'exploitation de la centrale dont la durée de vie peut être estimée à 20 ans, la nécessaire désinstallation des matériels et la remise en état initial de la toiture à l'issue de l'exploitation et de l'obsolescence des panneaux et l'absence d'indication sur le prix d'achat d'électricité pratiquée par EDF ni les rendements envisageables.
Il soulève l'absence de confirmation du contrat vicié en ce qu'il n'a jamais eu connaissance des vices de forme affectant le contrat de vente et en ce qu'il n'a jamais eu l'intention de les purger quand bien même il a laissé la vente s'exécuter.
S'appuyant sur la jurisprudence de la Cour de cassation du 10 juillet 2024, il ajoute que la simple reproduction des articles du code de la consommation sur le bon de commande ne suffit pas à caractériser sa connaissance du vice, en ce qu'il n'est qu'un profane du droit ne lui permettant pas de prendre connaissance des irrégularités du bon et de vérifier ainsi la validité du contrat.
Il invoque par ailleurs la nullité du contrat de crédit sur le fondement de l'indivisibilité de l'ensemble contractuel en application de l'article L. 312-55 du code de la consommation, mais aussi sur le fondement du dol en ce que la société Domofinance a laissé l'activité commerciale de la société LTE prospérer alors qu'elle ne pouvait ignorer les mécanismes douteux de conclusion des nombreux contrats de vente qu'elle a eu à connaître, que la banque a accepté de financer des contrats présentés sur l'entête d'une « demande de candidature » et qu'elle a attendu dans le cas d'espèce la signature de l'attestation de réception des travaux pour lui adresser son accord de financement.
Il considère que la banque a également commis une faute confinant au dol dans la mise en place de prêts disproportionnés au regard des capacités de production de l'installation et qu'elle a ainsi manqué à son obligation de conseil et de mise en garde en apportant son concours à des opérations nécessairement ruineuses.
Il ajoute que la banque a participé au dol en acceptant de financer une installation réalisée avant écoulement du délai laissé à la municipalité pour s'opposer aux travaux alors qu'il s'agissait d'une condition suspensive du contrat.
Il en conclut que la cour devra refuser à la banque le droit d'obtenir remboursement des fonds avancés après avoir prononcé la nullité de l'ensemble contractuel.
Il évoque par ailleurs des fautes personnelles de la banque, devant l'empêcher d'obtenir le remboursement des fonds qu'elle a fautivement versés, de deux ordres : dans la libération des fonds et des manquements à son devoir de mise en garde.
D'une part, il considère que la banque aurait dû s'assurer que le contrat principal auquel était affecté le crédit, était régulier, en vérifiant le respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation car la signature de l'attestation de fin de travaux, document imprécis ne restituant pas au demeurant la complexité de l'opération, ne peut suppléer aux exigences du bon de commande ; que par ailleurs, elle aurait dû ne pas débloquer les fonds entre les mains de la société LTE en l'absence totale d'achèvement des travaux en ce compris la mise en service, puisque l'installation n'a été opérationnelle qu'en septembre 2018,' et en l'absence d'autorisation de la mairie avant l'installation des panneaux.
D'autre part, il considère que la banque ne l'a pas alerté sur le caractère excessif du prêt et ne lui a pas fourni les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé était adapté à sa situation financière et à ses besoins, et ce alors qu'il était un emprunteur non averti, étant retraité, en particulier que son taux d'endettement serait supérieur à 33 % à l'issue de l'octroi du crédit, que la banque aurait dû le mettre en garde sur les risques liés au surendettement et qu'il devra être indemnisé par l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 13 450 euros correspondant à 50 % du capital prêté. Il ajoute que la banque doit s'assurer que le prêt a de bonnes chances d'être remboursé et qu'il s'agit d'une obligation professionnelle et non d'une immixtion de la banque dans les affaires de son client.
M. [P] formule par ailleurs une demande de dommages-intérêts à hauteur de 8 000 euros du fait du déblocage fautif de la banque, fondée sur l'absence de tout profit lié à cette installation, en ce qu'il s'acquitte annuellement d'une somme de 3 132,96 euros au titre des échéances du crédit mais ne perçoit ni économie ni le moindre profit ; il estime donc subir un préjudice lié à l'investissement à perte et subir un préjudice s'analysant en une perte de chance de ne pas contracter mais aussi en une perte de chance de toute action utile contre la société venderesse qui fait l'objet désormais d'une procédure de liquidation judiciaire.
Cette demande inclut également le trouble de jouissance qu'il a subi et qu'il va subir pour l'installation puis la désinstallation des panneaux, alors qu'il s'agit d'une installation inutile, inesthétique et bruyante. Il ajoute que le temps perdu en démarches administratives fait partie de ce préjudice de jouissance.
Enfin, en tant que victime d'un dol, il dit avoir subi un important préjudice moral qu'il convient de réparer selon lui par une indemnisation d'au moins 3 000 euros comprenant les frais bancaires auxquels il doit faire face, liés à des difficultés de trésorerie ; que pour pouvoir faire face au règlement des mensualités du crédit litigieux il a dû se priver des plaisirs de la vie.
Par conclusions n° 2 déposées par RPVA le 5 mai 2025, la société Domofinance demande à la cour :
- de confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint Denis le 11 mars 2024 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par M. [P] du fait de l'autorité de la chose jugée,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté le surplus de ses demandes et en ce qu'il a laissé les dépens à la charge des parties qui les ont avancés,
- statuant à nouveau, sur les chefs critiqués et sur les demandes des parties,
- à titre principal de déclarer irrecevables l'action et l'ensemble des demandes formées par M. [P],
- à défaut, de déclarer irrecevable la demande de M. [P] en nullité-résolution du contrat conclu avec la société LTE, de déclarer par voie de conséquence irrecevable la demande de M. [P] en nullité-résolution du contrat de crédit conclu avec elle, de dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité-résolution des contrats ne sont pas fondées, de débouter M. [P] de sa demande en nullité-résolution du contrat conclu avec la société LTE ainsi que de sa demande en nullité-résolution du contrat de crédit conclu avec elle et de sa demande en restitution des mensualités réglées,
- subsidiairement, en cas de nullité ou résolution des contrats, de déclarer irrecevable la demande de M. [P] visant à la décharge de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de l'en débouter et le condamner, en conséquence, au paiement de la somme de 26 900 euros en restitution du capital prêté, de débouter M. [P] de ses demandes de condamnation à ce qu'elle lui réglait la somme de 39 304,85 euros qui ne correspond pas aux sommes qu'il a réglées, de limiter la restitution des mensualités réglées aux sommes effectivement réglées par l'emprunteur,
- en tout état de cause, de déclarer irrecevables les demandes visant à la privation de sa créance et la demande de dommages et intérêts et à a tout le moins, le débouter,
- très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due par elle eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice, de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [P] d'en justifier et en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et de dire et juger que M. [P] reste tenu de restituer l'entier capital à hauteur de 26 900 euros,
- à titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de la créance de la banque, de condamner M. [P] à lui payer la somme de 26 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable, de lui enjoindre de restituer, à ses frais, le matériel installé chez lui à Maître [V] [R], es-qualité de liquidateur judiciaire dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, et de dire et juger qu'à défaut de restitution, M. [P] restera tenu du remboursement-restitution du capital prêté, et subsidiairement, de le priver de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,
- de débouter M. [P] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,
- en tout état de cause, de le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil.
S'appuyant sur les articles 122 du code de procédure civile, 2052 du code civil et L. 622-13-1 du code de commerce, la banque soutient que le protocole transactionnel a été signé le 2 avril 2020 puis homologué régulièrement de sorte que M. [P] dispose d'un titre exécutoire à l'encontre de la société LTE ; que conformément aux dispositions de l'article L. 641-11-1 du code de commerce, le défaut de paiement ne peut entraîner la résolution du contrat et ne peut donner lieu qu'à une déclaration de créance à laquelle il appartient à M. [P] de procéder, sans pouvoir remettre en cause le protocole du fait de l'ouverture de la procédure collective.
Elle estime que la seconde assignation délivrée ayant le même objet que la première qui a donné lieu au protocole d'accord, le jugement de première instance doit être confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de M. [P].
Elle soulève le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi sur le fondement de l'article 1103 du code civil et qu'est de mauvaise foi la partie qui tend à détourner une cause de nullité de son objet ou de sa finalité à seule fin de remettre en cause le contrat tout en sachant qu'en réalité elle conservera le bien acquis du fait de l'impossibilité matérielle pour l'autre de la récupérer.
Elle soulève le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé, du grief tiré de la nullité-résolution du contrat de vente entraînant la nullité-résolution du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande.
Elle conteste toute méconnaissance des articles L. 111-1, L. 221-5 et L. 221-8 du code de la consommation, rappelle le caractère strict de l'interprétation de ces textes et la nécessité de distinguer l'absence de mention prévue par le texte qui est une cause de nullité et l'imprécision de la mention requise qui est appréciée souverainement par le juge et qui ne peut donner lieu qu'à l'octroi de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité ou à nullité en cas de preuve d'une réticence dolosive d'information.
Elle affirme tout d'abord qu'en raison de la production d'un bon de commande incomplet, seulement le recto, M. [P] est défaillant dans la preuve des vices allégués et que si le verso du bon devait être communiqué a posteriori par la partie adverse il s'agirait d'un procédé non conforme au principe du contradictoire.
Subsidiairement, elle rejette toute irrégularité du bon de commande au regard de la désignation du matériel vendu, des modalités de paiement et d'exécution estimant que l'emprunteur va au-delà des exigences légales. Elle soutient en particulier que la Cour de cassation a elle-même retenu, à deux reprises, que la marque du matériel n'était pas nécessairement une caractéristique essentielle de l'installation photovoltaïque. Elle ajoute que le bon de commande comprend le nombre de modules, leur puissance unitaire ainsi que le détail de l'ensemble des éléments du kit d'installation permettant en conséquence à M. [P] de connaître la nature et les caractéristiques essentielles de ce qu'il achetait conformément aux dispositions prévues par le code de la consommation.
Elle souligne que conformément au principe d'interprétation stricte seule l'omission de la mention prévue par le texte pourrait le cas échéant conduire à la nullité et non sa seule imprécision qui ne peut conduire qu'à une action en responsabilité.
Elle conteste l'absence de délais et modalités de livraison sur le bon de commande alors que celui-ci stipule au recto « délais de livraison : de deux à douze semaines » et qu'habituellement les modalités d'exécution figurent dans les conditions générales du bon de commande c'est-à-dire au verso du bon, ce que M. [P] se dispense de produire. Elle précise que les modalités de pose relevant des contingences techniques n'ont pas à figurer dans le bon de commande et ne sont nullement requises par le code de la consommation qui est d'interprétation stricte, qu'il est matériellement impossible de préciser le délai de raccordement qui dépend d'un tiers, ERDF, le vendeur ne pouvant s'engager en termes de délais que sur sa propre prestation.
Elle indique que le code de la consommation n'exige nullement la mention de prix unitaires, la mention du prix global étant suffisante et ajoute que les mentions afférant au financement figurent bien dans le bon de commande mais aussi dans le contrat de crédit signé par l'emprunteur.
Sur l'absence de mention du démarcheur, elle rappelle que cette mention n'est pas requise par la réglementation applicable dans sa rédaction à la date de signature du bon de commande ; que celle relative au délai de disponibilité des pièces détachées n'est pas requise à peine de nullité.
Elle rappelle que le bon de commande est bien assorti d'un formulaire de rétractation comme le démontre la pièce adverse n° 2.
S'agissant de l'absence d'informations sur le recours à la médiation, elle souligne que ce type de mention figure généralement au verso du bon de commande qui n'est pas produit par M. [P] qui ne pourra donc qu'être débouté de cette demande.
Elle note que M. [P] ne justifie pas d'un préjudice qui résulterait des irrégularités alléguées alors qu'il ressort d'un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 20 mai 2020 que le seul constat d'irrégularités formelles du bon de commande ne suffit pas à fonder le prononcé de la nullité du contrat en l'absence de preuve par l'acquéreur qu'il en a résulté pour lui un préjudice.
A titre subsidiaire, elle fait valoir que M. [P] a confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d'une nullité du bon de commande en exécutant le contrat sur une durée prolongée sans contestation, en réceptionnant l'installation sans réserves et sollicitant de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur, en laissant l'installation être raccordée puis en utilisant l'installation même après avoir eu connaissance des omissions ou de l'incomplétude du bon de commande. Elle soutient que l'acquéreur ne peut adopter une attitude contradictoire en sollicitant, d'un côté, la nullité des contrats et en poursuivant de l'autre, leur exécution et rappelle que conformément au « principe de l'estoppel » une partie ne peut avoir une attitude « incompatible » avec ses demandes (Cass, 2 ème civ. 15 mars 2018).
Elle fait valoir que les allégations de dol au sens des articles 1130 et 1137 du code civil ne sont pas établies puisque M. [P] ne prouve ni les man'uvres dolosives ni l'erreur qu'il aurait commise dans la conclusion du contrat, qu'il ne produit aucun élément à l'appui de ses dires, que M. [P] a bien signé un bon de commande et non une candidature sans engagement ayant dès lors conscience de l'acquisition d'une installation photovoltaïque financée par un crédit qu'il a souscrit.
Elle souligne que M. [P] ne justifie ni du fait que la société LTE aurait fait état d'un faux partenariat avec EDF, ni qu'à supposer que cela soit vrai, cela l'aurait induit en erreur sur la qualité de la prestation puisque il n'établit pas que la prestation serait de mauvaise qualité ni de ce qu'à défaut il n'aurait pas contracté.
Elle indique que l'appelant ne peut poser comme un « postulat » que l'installation ne serait pas rentable, sans fournir à la Cour l'expertise judiciaire nécessaire à en justifier et relève que s'agissant d'une installation d'une durée de vie moyenne de 30 ans, l'estimation de sa rentabilité doit en tenir compte.
En l'absence d'anéantissement des contrats et de tout dol établi, elle note que le contrat de crédit est maintenu. Elle relève qu'aucune tromperie ne peut lui être reprochée alors qu'elle a légitiment adressé à M. [P] le tableau d'amortissement postérieurement à la réception de la prestation, soit après le déblocage des fonds, et qu'aucun grief ne peut lui être fait sur le versement des fonds avant réception de l'accord par la mairie.
Elle s'estime donc bien fondée à solliciter de la cour qu'elle déclare irrecevable, à tout le moins rejette la demande de nullité du contrat de crédit ainsi que la demande de restitution des mensualités réglées. Elle soutient que la demande visant à la privation de la créance de restitution du capital prêté est sans objet en l'absence de nullité des contrats.
Subsidiairement, elle fait valoir que si la nullité du contrat était prononcée, M. [P] devra restituer le montant du capital prêté, peu important que les fonds aient été versés directement entre les mains du vendeur et qu'en tout état de cause la demande de privation de la créance de la banque devra être déclarée irrecevable puisque M. [P] a poursuivi l'exécution volontaire des contrats et les a confirmés ou à tout le moins infondée en l'absence de faute, préjudice et lien de causalité.
Elle conteste toute faute dans le déblocage des fonds et rappelle qu'en cas de nullité du contrat de crédit, seule la responsabilité civile délictuelle des parties peut être engagée, ne permettant pas à celles-ci de faire valoir l'inexécution d'une obligation contractuelle supposée n'avoir jamais existé.
Elle rappelle que l'obligation de vérifier la réalisation de la prestation résulte de l'article L. 312- 48 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige mais qu'en revanche aucun texte ne met à la charge du prêteur l'obligation d'avoir à vérifier la régularité du contrat principal, que l'établissement de crédit est un tiers distinct du prestataire de services, qu'il s'agit de sociétés juridiquement autonomes et que l'établissement de crédit n'est pas garant du respect par le vendeur ou prestation de services de ses obligations. Elle ajoute qu'une obligation de vérification du bon de commande financé ne peut davantage être déduite de ce que les dispositions du code de la consommation prévoient une interdépendance entre le contrat de vente et le contrat de crédit affecté.
Elle conteste cette obligation en ce qu'elle conduit à remettre en cause l'autonomie juridique de l'établissement vendeur, qui se voit imposer un droit de regard de l'établissement de crédit sur la rédaction de ses documents contractuels, à mettre à sa charge une obligation d'avoir à vérifier le respect par un autre professionnel de la réglementation, ce alors qu'une telle obligation incombe aux autorités de surveillance, telles que la DGCCRF, à demander à un établissement de crédit de se substituer au juge dans l'examen de la régularité d'un contrat, ce alors que l'établissement de crédit n'a pas été investi d'un pouvoir juridictionnel par le législateur, à se substituer à l'État dans le contrôle préventif de l'activité d'établissements professionnels, alors qu'il revient à celui-ci de réglementer s'il estime que cette activité génère des risques spécifiques pour le consommateur et à faire naître une insécurité juridique des situations contractuelles établies dans la mesure où un établissement de crédit qui n'est pas habilité à déterminer si le contrat de vente émis par un tiers professionnel est conforme la réglementation se voit exposé au risque d'engagement de sa responsabilité sur ce fondement.
A titre subsidiaire, si la cour devait examiner les moyens allégués au titre d'une faute de sa part, elle fait valoir qu'à supposer qu'une obligation de vérification du bon de commande soit retenue, l'appréciation de la faute s'analyserait in concreto au cas par cas, nécessitant de distinguer entre l'omission grossière de mentions ou la simple insuffisance de mentions, que la banque ne serait pas en mesure de détecter ne pouvant se substituer au juge dans l'appréciation de la suffisance d'une mention, que la seule insuffisance de mentions dont le constat ne pourrait résulter que de la décision du juge, ne saurait constituer rétroactivement une faute de l'établissement prêteur au moment de la souscription des contrats.
Elle ajoute que les irrégularités soulevées en l'espèce constituent des insuffisances de mention puisqu'il y avait bien sur le bon de commande mention des caractéristiques de l'installation, des délais de livraison et du prix et qu'était présent un formulaire de rétractation.
Sur le reproche de M. [P] qu'elle aurait commis une faute dans le déblocage des fonds prêtés au motif qu'elle n'aurait pas procédé aux vérifications préalables concernant la réalisation de la prestation, la société Domofinance rappelle qu'elle ne fait qu'exécuter l'ordre de paiement donné par l'emprunteur, son mandant, conformément aux règles du mandat ce qui était exclusif de toute faute dans le versement des fonds prêtés. Elle précise que M. [P] a lui-même disposé des fonds en donnant l'ordre de paiement ce qui était exclusif également de toute faute dans le versement et qu'au surplus elle a versé les fonds au vu d'un procès-verbal de réception sans réserve de l'installation l'autorisant à le faire, établissant au demeurant que la prestation a bien été réalisée et qu'il ne lui appartient pas de se livrer à de plus amples vérifications.
Elle considère donc n'avoir commis aucune faute.
Elle soutient par ailleurs que l'emprunteur ne justifie d'aucun préjudice qui aurait pu résulter d'une irrégularité purement formelle du bon de commande, en présence d'une installation qui est parfaitement fonctionnelle, productive d'électricité, et ne démontre aucun lien de causalité entre le préjudice et la faute alléguée. Elle ajoute que M. [P] ne justifie pas avoir effectivement perdu une chance de ne pas contracter et ce d'autant qu'il ne justifie nullement quelles mentions prétendument omises du bon de commande auraient pu l'empêcher de poursuivre la relation et aurait donc pu empêcher le déblocage des fonds prêtés, et ce dans un contexte où il a poursuivi l'exécution des contrats.
Elle souligne que M. [P] bénéficie d'ores et déjà, en cas de nullité, de l'exonération du paiement des intérêts.
Elle estime que la cour ne pourrait considérer que le préjudice serait constitué par l'impossibilité pour l'emprunteur de récupérer le prix de vente versé au vendeur en liquidation judiciaire, car le préjudice résulte dans ce cas de la liquidation judiciaire, mais non d'une faute de la banque sans lien de causalité, quand bien même serait appliquée la théorie de l'équivalence des conditions : la faute dans cette hypothèse consisterait pour la banque à ne pas avoir alerté l'emprunteur des irrégularités avant déblocage des fonds mais non dans le déblocage des fonds lui-même.
Elle ne voit aucun lien de causalité entre la faute dans le déblocage des fonds prêtés alors que la prestation n'est pas achevée, qui empêche l'acquéreur d'obtenir le cas échéant l'achèvement de la prestation, et l'impossibilité pour l'acquéreur d'obtenir restitution du prix de vente auprès du vendeur qui résulte de la liquidation judiciaire du vendeur et s'agissant d'une faute dans la vérification du bon de commande qui prive l'acquéreur d'une chance de renoncer à poursuivre le contrat s'il avait été alerté sur les irrégularités mais n'est pas à l'origine de l'impossibilité pour l'acquéreur d'obtenir restitution du prix de vente, laquelle résulte de la liquidation judiciaire.
Si la cour devait considérer que le lien de causalité est caractérisé, la société Domofinance estime que la cour devrait constater que le préjudice reste hypothétique et à tout le moins que l'on ne peut l'apprécier dans sa globalité qu'en tenant compte de l'impossibilité de restitution au titre du contrat du côté acquéreur mais aussi du côté vendeur.
Sur ce point, elle invoque en premier lieu le fait que l'acquéreur a le droit de participer aux répartitions effectuées dans le cadre de la procédure collective et qu'ainsi l'impossibilité d'obtenir restitution du prix de vente ne pourrait être constatée qu'à l'issue de la procédure après déclaration de créance et certificat d'insolvabilité ; en second lieu, elle considère que doit être prise en compte la quasi-certitude que l'emprunteur conservera l'installation puisqu'en cas de liquidation judiciaire les obligations de faire ne peuvent se traduire que par l'inscription d'une créance de dommages et intérêts pour inexécution. Enfin, elle considère que pour évaluer le préjudice il doit être pris en considération le fait que l'emprunteur va rester en possession d'une installation valant 26 900 euros qu'il pourra exploiter.
A titre subsidiaire, si la cour devait estimer qu'un préjudice a été subi et que le lien de causalité est caractérisé, elle demande de limiter sa condamnation en proportion du préjudice effectivement subi en lien de causalité avec la faute opérée, à savoir la part de la prestation qui n'aurait pas été achevée, à charge pour l'acquéreur d'en justifier et de prendre en considération la limitation de responsabilité liée à la signature fautive de l'attestation de fin de travaux et de demande de versement des fonds prêtés.
Dans l'hypothèse où la cour prononcerait la nullité ou la résolution des contrats, elle sollicite que M. [P] soit condamné à lui restituer le capital prêté de 26 900 euros et en tout état de cause soutient qu'elle ne pourrait être condamnée, comme le demande M. [P] à titre de restitution, à payer une somme de 39 304,85 euros qui ne correspond pas à ce qu'il a versé.
Elle estime par ailleurs que l'emprunteur a fait preuve d'une légèreté blâmable qui causerait préjudice à la banque dans la mesure où elle ne pourrait obtenir restitution des fonds prêtés, et demande la condamnation de M. [P] à ce titre à lui verser la somme de 26 900 euros à titre de dommages et intérêts.
Elle soulève le caractère irrecevable ou infondé de la demande de dommages et intérêts qui conduirait à une double indemnisation. Elle rappelle l'absence de faute de sa part dans le déblocage des fonds et la vérification du bon de commande.
Elle conteste avoir manqué à son devoir de mise en garde concernant l'opportunité de l'opération principale envisagée ; elle souligne ne pas avoir de devoir de mise en garde vis-à-vis de l'emprunteur en l'absence de risque d'endettement ressortant de sa situation financière ; que la fiche de renseignements remplie au moment de l'octroi du crédit et signée par l'emprunteur ne faisait ressortir aucun risque d'endettement et qu'ainsi elle n'a pas failli à ses obligations.
Enfin, elle sollicite que M. [P] soit débouté de ses demandes de dédommagement de préjudices rattachés manifestement à des fautes inhérentes à l'entreprise principale car il ne peut demander en même temps une décharge complète à restituer le capital prêté et l'octroi de dommages-intérêts complémentaires, qu'au surplus la somme de 13 450 euros réclamée n'est pas justifiée.
Suivant acte délivré le 13 juin 2024 à personne morale, la société LTE représentée par Maître [V] [R], liquidateur judiciaire, a reçu signification de la déclaration d'appel et des premières conclusions de l'appelant. Elle n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 juin 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 18 juin 2025. En cours de délibéré il a été demandé le 5 août 2025 au conseil de M. [P] de fournir l'original du contrat de vente conclu le 7 juin 2018.
Le 21 août 2025, Maitre [T] a fait parvenir à la cour une copie du contrat de vente.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente conclu le 7 juin 2018 est soumis aux dispositions des articles L. 221-5 et suivants du code de la consommation dans leur version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version postérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Sur les fins de non-recevoir
La société Domofinance soulève dans le corps de ses écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande.
Cette fin de non-recevoir qui figure dans un titre des écritures n'est pas développée de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.
Sur l'irrecevabilité des demandes du fait de l'autorité de la chose jugée
L'article 2044 du code civil prévoit que « La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit ».
L'article 2048 du code civil dispose que « Les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ».
L'article 2049 du code civil prévoit que les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.
L'article 2052 du code civil dispose que « La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ».
Il résulte de ces dispositions qu'une transaction n'a autorité de la chose jugée qu'en ce qui concerne le différend qu'elle règle.
En l'espèce, le protocole d'accord transactionnel signé entre la société LTE et M. [P] le 2 avril 2020 porte sur la rentabilité de l'installation que ce dernier' a estimé différente des estimations que lui avait fournies la société demanderesse (page 2).
Pour circonscrire précisément l'objet du protocole, il convient de se référer dans un premier temps à la présentation générale de l'affaire dans le protocole qui vise expressément la saisine par M. [P] du tribunal d'instance de Saint-Denis en septembre 2018 pour voir prononcer la nullité pour dol du contrat de vente conclue avec la société venderesse ainsi que la nullité consécutive du contrat de crédit affecté régularisé avec la société Franfinance.
L'article 1 du protocole intitulé « compensation du différentiel de production » est ainsi rédigé : « afin de compenser le différentiel entre la production d'énergie annoncée et celle qui sera effectivement réalisée, la société LTE accepte de verser à M. [P] une indemnité annuelle forfaitaire et globale pouvant s'élever jusqu'à la somme de 1 300 euros maximum par ans et ce jusqu'au terme du remboursement du crédit qui lui a été consenti pour le financement de l'installation. Cette indemnité sera réglée par la société LTE sur demande expresse de M. [P] et sur justificatifs de la production réalisée chaque année ».
Il résulte donc tant des énoncés généraux que de l'article premier du protocole que celui-ci ne porte que sur le dol que reprochait M. [P] à la société LTE.
A contrario il ne porte donc ni sur la nullité du contrat de vente pour irrégularité formelle du bon de commande, ni sur le dol qu'il reproche à la société Domofinance, qui n'est par ailleurs pas partie au protocole transactionnel.
L'article 5 du protocole intitulé « autorité de la chose jugée » précise que « d'un commun accord entre les soussignés, la présente transaction a entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort et ne peut être attaquée pour cause d'erreur de droit et pour cause de lésion ».
Dès lors, le protocole qui a été homologué par jugement en date du 11 octobre 2021 est revêtu de l'autorité de la chose jugée sur la question du dol ; M. [P] ne peut donc en application de l'article 122 du code de procédure civile voir déclarée recevable sa demande relative au dol.
Outre que la résolution de la transaction pour inexécution n'a jamais été sollicitée, le défaut d'exécution d'une transaction en raison de la mise en liquidation judiciaire du vendeur ne peut être invoqué par le créancier pour faire échec à l'autorité de la chose jugée qui s'y attache. Or la transaction a été homologuée le 11 octobre 2021 et liquidation a été prononcée par jugement du 21 décembre 2021 empêchant son exécution. Il n'a pas non plus procédé à une déclaration de créance en ce qui concerne cette transaction.'
Le jugement du 11 mars 2024 ne sera donc que partiellement infirmé, les demandes relatives à la nullité du contrat de vente pour irrégularités formelles, au dol et aux fautes de la banque ne seront pas déclarées irrecevables n'étant pas affectées par l'autorité de la chose jugée, n'étant pas visées par le protocole.
Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l'article 1103 du code civil
La société Domofinance se fonde dans ses écritures sur l'article 1103 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé des demandes en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.
Ce faisant, il n'est pas expliqué en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1103 du code civil en leur version applicable en la cause viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées.
Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d'appel doit être rejetée.
Sur la demande d'annulation des contrats tirée du non-respect du formalisme contractuel
En application de l'article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 et lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'État.
Selon l'article R. 221-3 issu du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016, les informations relatives au droit de rétractation mentionnées aux 2°, 3° et 4° de l'article L. 221-5 peuvent être fournies au moyen de l'avis d'information type dûment complété figurant en annexe au présent code.
L'article L. 221-8 du même code prévoit que dans le cas d'un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues à l'article L. 221-5. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.
L'article L. 221-9 dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.
L'article L. 242-1 du même code précise que les dispositions de l'article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Selon l'article L. 111-1 en sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 12 février 2020, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence de toute restriction d'installation de logiciel, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Le dossier de M. [P] tel que communiqué à l'issue des débats contient une pièce numéro deux constituée de la copie en noir et blanc d'un bon de commande par endroits totalement vierge et par endroits illisible, de deux pages à en-tête de la société LTE.
Alors que la cour lui a demandé en cours de délibéré l'original du contrat à en-tête LTE par courriel en date du 5 août 2025, M. [P] n'a pas communiqué cette pièce mais une copie plus lisible que celle versée au dossier ; elle comporte quatre pages en recto-verso.
L'objet de la vente est décrit ainsi :
« La société LTE s'engage à accomplir toutes les démarches administratives relatives à votre dossier à savoir Déclaration préalable à la mairie / [8] / Démarches réseaux.
Délais de livraison': de deux à douze semaines
Centrale auto-consommation
Modules photovoltaïques certifiés CE
Nombre de modules : 14
Puissance unitaire du module 300 WC
Total Puissance 4200 WC
Revente surplus-Autoconsommation
Comprenant
- Kit d'intégration
- Coffret protection
- Disjoncteur
- Parafoudre
- Onduleur
- Mise à la terre des générateurs (norme NF 15-10)
Prise en charge des démarches administratives + Installation complète + Accessoires & Fournitures + Mise en service
Observations : un chèque de 1 200 euros est remis au propriétaire de l'installation
Optimiseur'my light system
Chauffe-eau thermodynamique Thaleos
Installation complète+ accessoires et fournitures+ mise en service
Capacité 220 litres- option solaire
LED': relamping total ».
M. [P] conteste le respect des points 1, 2, 3 et 6 de l'article L. 111-1 du code de la consommation outre une violation des dispositions relatives au droit de rétractation.
Le bon de commande ne précise pas la marque des panneaux laquelle constitue pourtant une caractéristique essentielle des matériels vendus comme le retient désormais la Cour de cassation, comme devant permettre à l'acquéreur de comparer utilement le matériel et les prestations proposées à des offres concurrentes et de vérifier la livraison et la pose conformes avant de signer l'attestation de fin de travaux. En revanche, il n'est pas justifié, au-delà de considérations générales, en quoi le modèle, le poids, la surface, le rendement des panneaux photovoltaïques pouvaient constituer, in concreto, des caractéristiques essentielles des matériels vendus au sens de l'article précité.
Le contrat encourt l'annulation à ce titre.
Si le texte susvisé n'exige pas le détail du prix unitaire de chaque matériel ou prestation, force est de constater que le montant total de l'installation n'est pas indiqué et que seul le montant du crédit de 26 900 euros permet de déduire qu'il s'agit du montant global de l'équipement.
Le contrat encourt donc également l'annulation à ce titre.
Le recours au médiateur à la consommation tel que prévu au titre 1er du livre VI du code de la consommation n'est pas mentionné dans le contrat qui prévoit uniquement en son article 14 des conditions générales de vente une conciliation préalable, c'est à dire que « toute contestation portant sur l'exécution du présent contrat ou sur l'interprétation des obligations qui en découlent devra obligatoirement et préalablement à toute action judiciaire contentieuse donner lieu à une tentative de conciliation préalable par devant tout conciliateur ou médiateur accepté par les parties ou le cas échéant désigné par le tribunal à leurs frais partagés ». Ce qui ne correspond pas à l'information précise et claire que doit délivrer la société de crédit sur l'obligation d'accès au médiateur à la consommation gratuite pour le consommateur.
Le contrat encourt donc l'annulation de ce chef.
La remise d'un calendrier détaillé n'est pas exigée à peine de nullité et les modalités de règlement apparaissent sur la deuxième page du bon en ce qu'il y est précisé le nom de l'établissement prêteur, le montant du crédit, le nombre de mensualités, le montant de la mensualité, le coût total du crédit, le TEG et le taux nominal.
S'agissant du délai de livraison, les conditions générales de vente mentionnent en leur article IV un délai de livraison maximal indicatif de 200 jours à compter de la prise d'effet du contrat et les conditions particulières du contrat indiquent un délai compris entre deux à douze semaines pour la livraison, ce qui correspond au respect de l'obligation d'information sur les délais de livraison. La question de l'impossibilité de mener à bien les opérations dans un tel délai est sans incidence puisque l'installation a été opérationnelle en septembre 2018 soit à l'issue du délai de 12 semaines, alors que le vendeur n'était pas tenu à une date de mise en service de l'installation puisqu'il n'a à sa charge que la réalisation des démarches administratives préalables et alors que le raccordement au réseau électrique, les différentes autorisations administratives nécessaires puis la validation d'un contrat de rachat d'énergie ne relèvent pas de sa compétence.
En revanche, le contrat n'encourt aucune annulation pour n'avoir pas précisé le délai de disponibilité des pièces détachées, ces dispositions prévues par l'article L. 111-4 du code de la consommation n'étant pas sanctionnées par la nullité du contrat mais par une amende administrative aux termes de l'article L. 131-2 du même code.
Le bon de commande comporterait selon M. [P] un faux nom pour le démarcheur mais il n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations ; en outre la mention du nom du démarcheur n'est plus exigée par le texte applicable au contrat en cause.
Le bon de commande est doté d'un bordereau de rétractation séparé du bon de commande par une ligne discontinue facilement détachable mais ne comportant pas l'adresse où il doit être renvoyé.
Par ailleurs le verso du bon ne comporte pas l'adresse du destinataire en cas d'utilisation mais une partie des conditions générales de vente ; il n'est en cela pas conforme à la réglementation (articles L. 312-19 à L. 312-21 du code de la consommation, R. 312-11 à R. 312-16 dudit code).
M. [P] se plaint donc à juste titre d'un défaut d'information du contrat relativement aux modalités d'exercice de ce droit.
Partant le contrat encourt l'annulation sans qu'il soit besoin de démonstration d'un quelconque préjudice.
L'article 1181 du code civil précise que la nullité relative peut être couverte par la confirmation. La confirmation au sens de l'article 1182 du code civil est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. L'exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité vaut confirmation et emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés sans préjudice des droits des tiers.
Il n'est pas contesté que M. [P] a exécuté l'ensemble contractuel en acceptant la livraison et la pose du matériel le 22 juin 2018 sans émettre de réserve, en sollicitant de la banque le paiement du prix de la prestation puis en réglant les échéances du crédit, en laissant l'installation être raccordée puis en revendant l'électricité à la société EDF.
Il reste que depuis un arrêt rendu le 24 janvier 2024 (pourvoi n° 22-15.199), la première chambre civile de la Cour de cassation juge désormais que la reproduction même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l'article 9 de cette ordonnance aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.
En l'espèce aucun élément ne permet de dire que M. [P] a eu connaissance du vice affectant l'obligation critiquée et a eu l'intention de le réparer, aucun acte ultérieur ne révélant sa volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause.
Il convient donc de prononcer la nullité du contrat de vente sur le fondement d'une irrégularité formelle et a constaté celle du contrat de crédit sur le fondement de l'article L. 312-55 du code de la consommation.
Sur le dol imputé à la société Domofinance
Dès lors que M. [P] est irrecevable à se prévaloir d'un dol à l'encontre du vendeur, la demande fondée sur la complicité de la banque au dol du vendeur doit être rejetée.'
Sur le dol commis par la société Domofinance
- 'Sur le dol par complicité
Dès lors que M. [P] est irrecevable à se prévaloir d'un dol à l'encontre du vendeur, la demande fondée sur la complicité de la banque au dol du vendeur doit être rejetée.
- Sur le dol commis par la société Domofinance
M. [P] soutient par ailleurs que la société Domofinance a commis un dol indépendamment de celui de la société LTE en utilisant quatre moyens différents pour obtenir le consentement de l'acheteur, moyens qu'il convient d'examiner.
Le premier concerne la connaissance par la banque des mécanismes douteux de conclusion des contrats par la société LTE'; cette allégation ne repose sur aucun fait précis et M. [P] procède par pures affirmations.'
Le second concerne l'acceptation par la banque de contrats avec l'entête « demande de candidature » ; or, ce n'est pas le cas de l'espèce, le contrat de vente signé par M. [P] avec la société LTE comportant bien la mention « bon de commande » n° 26512.
Le troisième concerne le fait que la banque ait attendu la signature de l'attestation de réception de travaux pour adresser l'accord de financement à M. [P] ; il sera rejeté puisque l'attestation de réception des travaux date du 22 juin 2018, que le contrat de crédit a été signé le 7 juin 2018 et l'acceptation du prêt est intervenu le 14 juin 2018 selon le courrier fourni par la banque ( pièce n° 4), soit antérieurement à la réception des travaux.
Le quatrième concerne la mise en place par la banque d'un prêt disproportionné au regard des capacités de production de l'installation'; or cet argument ne repose sur aucun élément, étant précisé au surplus que les demandes relatives à un dol commis par la société LTE ont été déclarées irrecevables.
Aucun dol ne peut donc être reproché à la société Domofinance.
Sur les conséquences de l'annulation des contrats
1- S'agissant de la vente
L'anéantissement des contrats a pour conséquence de remettre les parties en l'état où elles se trouvaient avant signature du contrat.
Dès lors, il convient de prévoir que pour le cas où le mandataire liquidateur de la société LTE exprimerait le souhait de reprendre son matériel, M. [P] ne pourrait s'y opposer et que la mise à disposition du matériel au domicile de M. [P] pendant un délai de deux mois à compter de la signification de la décision vaut restitution. Comme le demande M. [P], si à l'issue de ce délai le mandataire liquidateur de la société LTE ne le récupère pas, le matériel lui sera considéré comme définitivement acquis à M. [P].
2- S'agissant du contrat de crédit et la responsabilité de la société
Il est admis que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte la remise en l'état antérieur. Elle emporte donc pour la banque l'obligation de rembourser les sommes perçues.
Elle emporte aussi pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.
Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
A ce titre, M. [P] indique que les fonds ont été débloqués avant le raccordement au réseau qui était pourtant une prestation comprise dans le bon de commande et reproche à la banque d'avoir accepté de financer une installation sans accord municipal ce qui est illégal et alors que la signature de l'attestation de fin de travaux est insuffisante, mais aussi de ne pas avoir vérifié la régularité du bon de commande.
A titre liminaire, la société Domofinance oppose que la demande visant à la décharge de l'obligation de restituer le capital prêté doit être déclarée irrecevable tout en ne développant aucun moyen à ce titre de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.
S'agissant de la date de déblocage des fonds au regard de l'avancement des travaux, outre qu'elle est intervenue à la demande expresse de M. [P] et qu'il n'est pas établi ni même soutenu que la mairie se serait opposée au projet, l'installation fonctionne et a été raccordée ce qui résulte de la première instance engagée par celui-ci. Dès lors il n'établit aucun préjudice en lien avec un déblocage prématuré.
S'agissant du financement d'un contrat nul, le contrat principal et le contrat de crédit dédié à son financement forment une « opération commerciale unique », au sens de l'article L. 311-1, 11° du code de la consommation laquelle s'accompagne d'une interdépendance entre le contrat principal et le crédit qui le finance ainsi qu'il résulte des articles L. 311-30 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige. Il est acquis au regard de l'interprétation donnée par la Cour de cassation que le prêteur aurait dû vérifier la régularité du bon de commande avant de débloquer les fonds.
Si la banque ne saurait être tenue à une analyse fine du bon de commande au regard de la réglementation applicable en matière de démarchage à domicile ou encore au regard d'une jurisprudence évolutive notamment des exigences en matière de désignation des matériels et prestations, elle doit en revanche être en mesure, avant de débloquer les fonds, de s'assurer que le bon de commande n'est pas entaché d'une irrégularité manifeste. En l'espèce, l'absence de toute mention relative au prix global de l'installation et au recours au médiateur de la consommation ou l'impossibilité d'utiliser le bordereau de rétractation comme étant au verso d'articles des conditions générales de vente, auraient dû attirer son attention.
Elle a donc commis une faute en débloquant les fonds sur la base d'un contrat atteint d'irrégularités manifestes.
S'agissant du préjudice subi de ce fait, s'il est exact que la nullité doit permettre une remise en état antérieur et que la liquidation du vendeur va priver M. [P] de la possibilité d'une restitution du prix de vente, il reste qu'il ne paiera pas non plus les intérêts du crédit également annulé, qu'il a déjà tiré des revenus de cette installation pendant plusieurs années, versant aux débats des factures qui font apparaître un revenu moyen de 600 euros par an en sus de l'autoconsommation réalisée et qu'il ne chiffre pas, qu'il a été admis à ne plus devoir restituer le matériel passé un délai de 2 mois à compter de la signification de l'arrêt ce qui implique en ce cas qu'il va conserver un matériel fonctionnel dont la valeur n'est pas nulle et dont la durée de vie estimée à 25 ans va lui permettre de percevoir des revenus et de faire des économies au moins équivalents à l'investissement.
Dès lors il convient de considérer que la faute de la banque ne lui cause qu'un préjudice de 26 900 euros si le mandataire vient effectivement procéder à la dépose et ne lui en cause aucun si tel n'est pas le cas.
Il n'y a donc lieu de ne prévoir la privation de la créance de restitution de la banque dans cette mesure que passé le délai octroyé au liquidateur pour la reprise et à défaut pour celui-ci d'y avoir procédé, les modalités étant prévues au dispositif.
M. [P] soulève également une faute de la société Domofinance relativement à son devoir de mise en garde faisant valoir qu'elle ne justifiait pas avoir attiré son attention sur le caractère excessif du prêt qui se mesure à la capacité financière du client, alors que son taux d'endettement était de plus de 33 % après crédit.
Il est admis que le banquier est tenu à l'égard de ses clients profanes d'un devoir de mise en garde, en cas de risque d'endettement excessif de l'emprunteur. Ce devoir oblige le banquier, avant d'apporter son concours, à vérifier les capacités financières de son client et à l'alerter des risques encourus. Il est également tenu à une obligation de se renseigner sur les capacités financières de son client en appréciant les chances de remboursement du prêt.
Le devoir de mise en garde n'existe donc qu'à l'égard de l'emprunteur profane et n'existe qu'en cas de risque d'endettement excessif.
Il appartient à l'emprunteur de rapporter la preuve qu'il doit être considéré comme profane et qu'à l'époque de la souscription du crédit litigieux, sa situation financière imposait l'accomplissement par la banque de son devoir de mise en garde et de son obligation de renseignement.
En l'espèce, il n'est pas contestable que M. [P] doit être considéré comme un consommateur non averti.
La société Domofinance produit aux débats la fiche de dialogue remplie et signée par M. [P] au moment de la signature du contrat ainsi que la fiche d'informations contractuelles signée de sa main.
M. [P] a déclaré percevoir des revenus mensuels de 1 870 euros correspondant à une pension de retraite et assumer des charges mensuelles de crédit immobilier de 200 euros par mois, de 160 euros pour un crédit et de 300 euros pour une pension alimentaire. Il a déclaré être en accession à la propriété de son logement depuis 1999, et être divorcé. Ces éléments ne démontrent pas de risque d'endettement excessif si on ajoute à la charge d'emprunt de 360 euros par mois celle de 239,83 euros au titre du crédit litigieux soit une somme globale de 599,83 euros par mois qui correspond à un taux d'endettement d'environ 32 %.
M. [P] a certifié sur l'honneur l'exactitude des renseignements fournis et pris acte que ces renseignements servent de base pour l'étude de sa demande et reconnaît avoir reçu l'information nécessaire lui permettant de déterminer sur le contrat proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière.
Il ne peut donc désormais considérer qu'il n'a pas été suffisamment averti ou renseigné.
Enfin la banque a pris soin de remettre à M. [P] une fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées comportant des informations circonstanciées lui permettant d'apprécier si le crédit proposé était conforme à ses besoins et à sa situation financière, cette mise en garde figurant au contrat lui-même ainsi que sur la fiche de renseignements comme cela a été relevé.
Il n'est ainsi pas démontré que la banque était tenue à un devoir de mise en garde ou à une obligation de se renseigner.
La demande d'indemnisation complémentaire à hauteur de 3 000 euros pour préjudice moral n'est pas fondée et les autres préjudices invoqués, trouble de jouissance et remis en état de la toiture, sont sans lien avec la faute de la banque. Le jugement ayant rejeté cette demande doit être confirmé.
La compensation des créances réciproques doit être ordonnée.
Sur les autres demandes
Les dispositions du jugement ayant laissé les dépens à la charge des parties qui les ont avancés seront infirmées.
La société Domofinance succombant partiellement sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et sera condamnée à verser à M. [P] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les parties sont déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, et par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par M. [Y] [P] relatives au dol du vendeur du fait de l'autorité de la chose jugée ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Rejette les fins de non-recevoir ;
Prononce la nullité du contrat de vente conclu le 7 juin 2018 entre M. [Y] [P] et la société LTE ;
Constate l'annulation subséquente du contrat de crédit le finançant liant M. [Y] [P] à la société Domofinance conclu le 7 juin 2018 ;
Condamne la société Domofinance à restituer à M. [Y] [P] la somme de 16 145 euros arrêtée au 6 juin 2024 majorée des sommes versées postérieurement ;
Ordonne à M. [Y] [P] de tenir à la disposition de la société LTE, prise en la personne son liquidateur judiciaire Maître [V] [R], le matériel posé en exécution du contrat de vente et ce pendant 2 mois à compter de la signification du présent arrêt afin que celui-ci procède à sa dépose et à la remise en l'état antérieur en prévenant 15 jours à l'avance du jour de sa venue par lettre recommandée avec accusé de réception, et dit qu'à défaut de reprise effective à l'issue de ce délai, il pourra disposer comme bon lui semble dudit matériel'et le conserver ;
Fixe le préjudice de M. [Y] [P] en lien avec les fautes de la banque à la somme de 26 900 euros si le mandataire vient effectivement procéder à la dépose dans ce délai, et dit qu'à défaut il ne subit aucun préjudice en lien avec cette faute ;
En conséquence, condamne M. [Y] [P] passé un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, à rembourser à la société Domofinance le capital emprunté de 26 900 euros sauf à justifier de la reprise effective du matériel par la société LTE, prise en la personne son liquidateur judiciaire dans les deux mois de la signification de l'arrêt ;
Ordonne la compensation des créances réciproques ;
Condamne M. [Y] [P] aux dépens de première instance et d'appel avec pour ces derniers distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.