CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 18 septembre 2025, n° 21/01858
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Immoxia (SAS)
Défendeur :
Nexity (SA), Bien'ici (SAS), Consortium des Professionnels de l'Immobilier (SAS), F4 (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gérard
Conseillers :
Mme Combrie, Mme Vincent
Avocats :
Me Daval-Guedj, Me Boulan, Me Toumi, Me Magnan, Me Juston
EXPOSE DU LITIGE
M. [K] [E], par le biais de la société Immoxia, a diffusé le concept de Surface Privée qui a pour but d'éditer des annonces immobilières, en édition papier et sur internet.
En 2016, les sociétés Nexity, Consortium des professionnels de l'immobilier et F4, pour le compte de leur filiale commune la société Bien'Ici, d'une part, et la société Immoxia d'autre part, se sont rapprochées pour envisager une collaboration entre elles.
Les pourparlers n'ont pas abouti mais à l'issue de ces négociations la société Immoxia, en charge de l'édition de Surface Privée, a déploré une désorganisation de son réseau de franchises et a dénoncé des faits de concurrence déloyale et de parasitisme de la part de ses anciens interlocuteurs, notamment par le détournement des informations échangées lors des discussions.
Ainsi, le 22 juillet 2019 la société Immoxia a assigné la société Bien'Ici, le Consortium des professionnels de l'immobilier, la société Nexity, la société F4, M. [I] [D], la société VPJ Communication, Socom 38 et la société Cross Media 38 devant le tribunal de commerce de Marseille pour obtenir la condamnation in solidum de la société Bien'Ici, du Consortium des professionnels de l'immobilier, de la société Nexity, de la société F4 et de M. [I] [D] à l'indemniser de son préjudice, au titre de faits de concurrence déloyale et subsidiairement au titre de faits de parasitisme.
Par ailleurs, la société Immoxia, invoquant la résiliation fautive des contrats de franchise par les sociétés Cross Media 38, Socom 38 et VPJ Communication, a sollicité leur condamnation au paiement de dommages et intérêts en indemnisation de son préjudice.
Par jugement en date du 8 décembre 2020 le tribunal de commerce de Marseille a statué ainsi':
- Se déclare territorialement compétent s'agissant des demandes formées à l'encontre de Monsieur [I] [D], la Société Cross Media 38 et les Sociétés Vpj Communication S.A.R.L. et Socom 38 S.A.R.L. prises en la personne de leur liquidateur amiable, Monsieur [I] [D] sur le fondement des dispositions des articles 42 et 46 du Code de Procédure Civile ;
- Déclare la Société Îmmoxia S.A.S. recevable en ses demandes ;
- Déboute la Société Immoxia S.A.S. de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des Sociétés Bien`Ici S.A.S., Consortium des Professionnels de l'Immobilier (Cpi) S.A.S., Nexity S.A., F4 S.A. et à l'encontre de Monsieur [I] [D], tant sur le fondement de la concurrence déloyale que sur celui du parasitisme ;
- Condamne la Société Immoxia S.A.S. à payer à :
- la Société Bien'lci S.A.S. la somme de 8 000 € (huit mille euros),
- la Société Nexity S.A. la somme de 8 000 € (huit mille euros),
- la Société Cpi S.A.S. la somme de 5 000 € (cinq mille euros),
- la Société F4 S.A.S. la somme de 3 000 € (trois mille euros),
au titre des frais irrépétibles occasionnés par la présente procédure ;
- Déclare valables les contrats de franchise conclus entre la Société Immoxia S.A.S. d'une part, et chacune des Sociétés Vpj Communications S.A.R.L., Socom 38 S.A.R.L. et Cross Media 38 S.A.SU. ;
- Condamne Monsieur [I] [D] ès qualités de liquidateur amiable de la Société Vpj Communications S.A.R.L. à payer à la Société Immoxia la somme de 3 654 € ttc (trois mille six cent cinquante-quatre euros ttc) au titre des factures impayées, celle de 178 245,66 € ttc (cent soixante-dix-huit mille deux cent quarante-cinq euros et soixante-six centimes ttc) et celle de 3 000 € (trois mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne Monsieur [I] [D] ès qualités de liquidateur amiable de la Société Socom 38 S.A.R.L. à payer à la Société Immoxia la somme de 474 € ttc (quatre cent soixante-quatorze euros ttc) au titre de factures impayées, celle de 227 670,89 € ttc (deux cent vingt-sept mille six cent soixante-dix euros et quatre-vingt-neuf centimes ttc) et celle de 3 000 € (trois mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne la Société Cross Media 38 à payer à la Société Immoxia la somme de 11 312 € ttc (onze mille trois douze euros ttc) et celle de 3 000 € (trois mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Déboute la Société Immoxia S.A.S. de ses demandes relatives à la perte de chance de percevoir une marge bénéficiaire en raison du départ anticipé et brutal des trois Sociétés et au trouble commercial induit par le départ anticipé et brutal des trois Sociétés ;
Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile,
- Condamne conjointement la Société Cross Media 38 S.A.S.U. et Monsieur [I] [D] ès qualités de liquidateur amiable des Sociétés Vpj Communication S.A.R.L. et Socom 38 S.A.R.L. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de Procédure Civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquidés à la somme de 222,02 euros (deux cent vingt-deux euros et deux centimes ttc.) ;
- Conformément aux dispositions de l'article 515 du Code de Procédure Civile, ordonne pour le tout l'exécution provisoire ;
- Rejette pour le surplus toutes autres demandes, 'ns et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.
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Par acte en date du 8 février 2021 la société Immoxia a interjeté appel du jugement.
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Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 29 octobre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Immoxia (Sas) demande à la cour de':
Vu les articles 1103, 1104, 1112-2, 1231-1 et 1240 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions dont appel ;
A titre principal,
- Juger que les agissements reprochés à Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] sont constitutifs de concurrence déloyale ;
En conséquence,
- Condamner in solidum Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] à payer à Immoxia':
- 190 252 € au titre de la perte de bénéfice ;
- 752 899 € au titre des dépenses engagées pour le développement de l'offre Surface Privée ;
- 73 036 € au titre des dépenses engagées pour le développement du partenariat avec Bien'lci, le Cpi, Nexity et F4 ;
- 1 794 642 € au titre de la perte de chance de voir son activité se développer ;
- 400 000 Ê au titre de son préjudice moral ;
- 400 000 € au titre de la dévalorisation de sa marque Surface Privée ;
- 66 000 € au titre du temps consacré par les dirigeants d'lmmoxia ;
A titre subsidiaire,
- juger que les agissements reprochés à Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] sont constitutifs de parasitisme ;
En conséquence,
Condamner in solidum Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] à payer à Immoxia :
- 190 252 € au titre de la perte de bénéfice ;
- 752 899 € au titre des dépenses engagées pour se développement de l'offre Surface Privée;
- 73 036 € au titre des dépenses engagées pour le développement du partenariat avec Bien'Ici, le Cpi, Nexity et F4 ;
- 1 794 642 € au titre de la perte de chance de voir son activité se développer ;
- 400 000 € au titre de son préjudice moral ;
- 400 000 € au titre de la dévalorisation de sa marque Surface Privée ;
- 66 000 € au titre du temps consacré par les dirigeants d'Immoxia ;
En tout état de cause,
- Juger que les agissements reprochés à Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] caractérisent une rupture fautive des pourparlers ;
En conséquence,
- Condamner in solidum Bien'Ici, le Cpi, Nexity, F4 et [I] [D] à payer à Immoxia :
- 190 252 € au titre de la perte de bénéfice ;
- 752 899 € au titre des dépenses engagées pour le développement de l'offre Surface Privée ;
- 73 036 € au titre des dépenses engagées pour le développement du partenariat avec Bien'Ici, le Cpi, Nexity et F4 ;
- 400 000 € au titre de son préjudice moral ;
- 400 000 € au titre de la dévalorisation de sa marque Surface Privée ;
- 66 000 € au titre du temps consacré par les dirigeants d'lmmoxia ;
Enfin
- Condamner in solidum Bien'Ici, le Cpi, Nexity et F4, [I] [D], à payer à Immoxia la somme de 50 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel de l'instance. ces derniers dístraits au profit de la Scp Cohen Guedj- Montero -Daval-Guedj sur son offre de droit.
La société Immoxia expose que dans le cadre d'un partenariat commercial et d'un projet de prise de participation à son capital envisagés avec la société Bien'Ici, elle a communiqué l'intégralité de son savoir-faire et ses données financières pour s'apercevoir, à l'issue de la rupture des pourparlers, à la fin de l'année 2017, que ces informations avaient été détournées par ses interlocuteurs.
Elle met ainsi en exergue la désorganisation de son réseau de franchises et de licences au titre de la distribution du magazine Surface privée, la perte de ses partenaires de la presse quotidienne, ainsi que la publication d'un magazine Bien'Ici, identique au sien.
La société Immoxia rappelle la personnalité et le rôle joué par chacun de ses interlocuteurs et dénonce une volonté concertée de la déstabiliser en la désorganisant et en créant une confusion préjudiciable avec ses produits et ses activités dans le but de détourner son modèle économique.
Elle conteste être à l'initiative du rapprochement, de même qu'elle conteste être à l'origine de la rupture des pourparlers au motif d'exigences financières démesurées de sa part.
Elle invoque ainsi les actes de concurrence déloyale commis par les intimés et subsidiairement les actes de parasitisme. En tout état de cause, elle dénonce la rupture fautive des pourparlers, et expose le préjudice subi, rappelant que son chiffre d'affaires a diminué à compter du rapprochement avec les intimés.
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Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 28 juin 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [I] [D] demande à la cour de':
Vu les articles 564 et 565 du Code de procédure civile,
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil
Vu l'article 1112 du Code civil,
Vu l'article 559 du Code de procédure civile,
Vu la jurisprudence citée,
Vu les pièces versées au débat,
Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 8 décembre 2020 en ce qu'il a débouté la Société Immoxia SAS de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des Sociétés Bien'Ici SAS, Consortium des Professionnels de l'Immobilier (Cpi) SAS, Nexity SA, F4 SAS et à l'encontre de Monsieur [I] [D], tant sur le fondement de la concurrence déloyale que sur celui du parasitisme,
En tout état de cause :
1/ In limine litis, sur l'irrecevabilité de la demande de la société Immoxia au titre de la rupture des pourparlers formées à l'encontre de Monsieur [I] [D]
Dire que les demandes formulées en cause d'appel par la société Immoxia au titre d'une prétendue rupture fautive des pourparlers ne tendent pas aux mêmes fins que les demandes initiales présentées
en premières instance ;
Dire que les demandes formulées en cause d'appel par la société Immoxia au titre d'une prétendue rupture fautive des pourparlers constituent des prétentions nouvelles ;
Par conséquent :
Juger les demandes formulées en cause d'appel par la société Immoxia au titre d'une prétendue rupture fautive des pourparlers sont irrecevables ;
2/ Sur la confirmation du rejet des demandes au titre d'actes constitutifs de concurrence déloyale
Constater que la société Immoxia se contente de procéder par des affirmations générales qui ne sont aucunement étayées par des pièces et ne rapporte ainsi pas la preuve d'actes constitutifs de concurrence déloyale commis par Monsieur [D] ;
Constater que Monsieur [I] [D] n'était pas soumis à une obligation de non-concurrence post-contractuelle et demeurait libre d'exercer une activité professionnelle dans le secteur de la presse immobilière ;
Constater qu'aucun grief tiré d'une prétendue désorganisation de la société Immoxia du fait du détournement de ses partenaires et de sa clientèle ne peut être formulé à l'égard de Monsieur [I] [D] ;
Constater qu'aucun grief tiré d'une prétendue confusion entre les parutions de la société Immoxia et de la société Bien'Ici ne peut être formulé à l'égard de Monsieur [I] [D] ;
Constater que Monsieur [I] [D] n'a commis aucun acte de concurrence déloyale ;
Par conséquent :
Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a débouté la société Immoxia de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de Monsieur [I] [D] sur le fondement de la concurrence déloyale ;
3/ Sur la confirmation du rejet des demandes au titre d'actes constitutifs de parasitisme
Constater que la société Immoxia se contente de procéder par des affirmations générales qui ne sont aucunement étayées par des pièces et ne rapporte pas la preuve d'une faute de Monsieur [I] [D] constitutive d'actes parasitaires ;
Constater que la société Immoxia n'a en réalité développé aucun savoir-faire original et ne dispose d'aucune notoriété spécifique dans le secteur des annonces immobilières ;
Constater qu'aucun grief tiré d'un prétendu parasitisme entre les services proposés par la société
Immoxia et ceux proposés par la société Bien'Ici ne peut être formulé à l'égard de Monsieur [I] [D] ;
Constater que Monsieur [I] [D] n'a commis aucun acte de parasitisme ;
Par conséquent :
Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a débouté la société Immoxia de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de Monsieur [I] [D] sur le fondement du parasitisme ;
4/ Sur le rejet des demandes formulées par la société Immoxia au titre d'une prétendue rupture fautive des pourparlers
Constater que les pourparlers engagés entre la société Immoxia et la société Bien'Ici sont parfaitement étrangers à Monsieur [I] [D] ;
Constater que Monsieur [I] [D] n'a commis aucune faute dans la rupture des pourparlers engagés entre la société Immoxia et la société Bien'Ici et ses actionnaires ;
Constater que les préjudices allégués par la société Immoxia au titre d'une rupture fautive des pourparlers sont limités aux seuls frais engagés dans le cadre des négociations ;
Par conséquent :
Juger que la rupture des pourparlers engagés avec la société Bien'Ici et ses actionnaires n'est pas de nature à engager la responsabilité de Monsieur [I] [D] ;
Rejeter purement et simplement les demandes de la société Immoxia à ce titre.
5/ Sur le bien-fondé des demandes reconventionnelles formulées par [I] [D] au titre d'un appel dilatoire et abusif
Constater que la société Immoxia a agi de façon abusive en introduisant artificiellement un lien entre Monsieur [I] [D], ainsi que les sociétés qu'il dirigeait, et les autres parties à l'instance.
Constater que l'appel intenté par la société Immoxia devant la Cour d'appel de céans est manifestement abusif et dilatoire ;
Par conséquent :
Condamner, à titre reconventionnel, la société Immoxia à verser 3.000 euros d'amende civile et à Monsieur [I] [D] la somme de et 50.000 euros à titre de dommages-intérêts.
6/ En tout état de cause
Débouter la société Immoxia de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
Condamner la société Immoxia à payer Monsieur [I] [D] la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700, outre les entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Françoise Boulan, Avocats associés, aux offres de droit.
M. [I] [D], spécialiste de la publicité par voie de presse, expose qu'il animait, à la demande de la société Immoxia, un réseau de franchises et a été chargé de développer la commercialisation du magazine Surface privée, mais qu'en l'état de l'absence de transmission de savoir-faire et d'une assistance de la part de la société Immoxia la franchise s'est avérée être un échec.
Il précise qu'il a désormais intégré le groupe Ebra, sans que cette circonstance ne constitue une faute en l'absence de clause de non-concurrence et il conteste avoir été destinataire de données stratégiques.
M. [I] [D] dénonce également la volonté de la société Immoxia de faire reposer sur ses partenaires son propre échec commercial résultant inéluctablement de l'absence de réel savoir-faire et de manquements graves à ses obligations contractuelles.
Il souligne qu'aucune faute spécifique à son égard n'est identifiée dans les développements de la société Immoxia.
M. [I] [D] ajoute que les faits de parasitisme ne le concernent pas davantage et que la société Immoxia ne peut faire grief aux intimés de se placer dans le sillage de la société Immoxia pour une notoriété et un savoir-faire dont elle ne dispose pas.
Enfin, il fait observer qu'il n'a jamais participé aux pourparlers, de sorte que sa responsabilité ne saurait être engagée, et justifie sa demande reconventionnelle au titre d'une amende civile et de dommages et intérêts par le caractère dilatoire et abusif de l'appel interjeté par la société Immoxia.
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Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 20 juillet 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Nexity (Sa) demande à la cour de':
Vu le Code civil et notamment ses articles 1112 et s. et 1240 ;
- Confirmer le Jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 8 décembre 2020 ;
En conséquence :
A titre principal :
- Dire et juger que la société Nexity SA n'a commis aucun acte de concurrence déloyale et/ou de parasitisme, ni n'a été l'auteur d'aucune rupture fautive de pourparlers ;
A titre subsidiaire :
- Dire et juger que la société Immoxia SAS n'a été victime d'aucun acte de concurrence déloyale et/ou de parasitisme ;
En tout état de cause :
- Dire et juger que la société Immoxia SAS n'a été victime d'aucune rupture fautive de pourparlers ;
A titre très subsidiaire :
- Dire et juger que la société Immoxia SAS n'a subi aucun préjudice ;
A titre infiniment subsidiaire :
- Dire et juger que la société Immoxia SAS n'a subi aucun préjudice en lien avec les actes dénoncés ;
En conséquence :
- Rejeter l'intégralité des demandes de la société Immoxia SAS formulées à l'encontre de la société Nexity SA
En tout état de cause :
- Condamner la société Immoxia SAS à payer à la société Nexity SA la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner la société Immoxia SAS aux entiers dépens.
La société Nexity expose qu'elle est une holding qui n'a qu'un rôle d'animatrice de ses filiales et n'a aucune activité commerciale, excluant une quelconque responsabilité à titre principal.
Elle précise qu'effectivement, des discussions ont eu lieu avec la société Immoxia, lesquelles ont pris fin au bout d'un an et demi, mais elle met en exergue pour sa part le fait que la société Immoxia est un acteur marginal sur le marché des petites annonces immobilières, dont l'intérêt était le «'print'», et que c'est son incapacité à développer son activité et à assister ses franchisés qui l'a poussée à chercher un partenaire capable de lui offrir des moyens financiers, techniques et commerciaux.
Elle précise que des échanges ont eu lieu dans les deux sens mais que la société Immoxia avait des attentes démesurées qui n'ont pu aboutir.
La société Nexity ajoute que la société Bien'Ici a engagé des investissements colossaux pour développer son chiffre d'affaires et qu'en revanche, la société Immoxia ne communique aucun élément chiffré sur son propre chiffre d'affaires.
Subsidiairement, elle conteste la réalité des préjudices invoqués et fait valoir qu'en tout état de cause aucun lien de causalité ne peut être établi entre les préjudice allégués et les actes dénoncés.
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Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 27 mai 2025, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Bien'Ici (Sas) venant aux droits de la société Consortium des professionnels de l'Immobilier suite à une opération de fusion-absorption, demande à la cour de':
Vu les articles 1112, 1112-2, 1240 et 1842 du Code civil
Vu les articles L.151-1 et suivants et L.210-6 du Code de commerce,
Vu les pièces versées au débat
Au préalable,
- Recevoir l'intervention volontaire de la société Bien'Ici venant aux droits de la société CPI,
- Révoquer l'ordonnance de clôture intervenue le 15 mai 2025,
- Juger recevable la présente intervention volontaire,
- Juger recevables les présentes écritures
A titre liminaire,
- Juger irrecevable la prétention nouvelle formée par la société Immoxia au titre de la prétendue rupture abusive des pourparlers ;
- Débouter en conséquence la société Immoxia de sa prétention fondée sur la rupture abusive des pourparlers.
A titre principal :
- Constater que la société CPI n'a participé à aucune des pratiques alléguées par la société Immoxia,
- Débouter en conséquence la société Immoxia de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire :
- Constater que les sociétés Bien'Ici, CPI, F4 et Nexity n'ont commis aucun agissement de concurrence déloyale ' ce comprenant aucun acte parasitaire ;
- Constater que les sociétés Bien'Ici, CPI, F4 et Nexity n'ont commis aucun abus dans la rupture des pourparlers ;
- Débouter en conséquence la société Immoxia de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
A titre infiniment subsidiaire :
- Constater que la société Immoxia n'a subi aucun préjudice en lien avec les agissements allégués ;
- Débouter en conséquence la société Immoxia de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause :
- Débouter tous concluants de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Bien'Ici, venant aux droits de la société CPI,
- Condamner la société Immoxia à payer à la société Bien'Ici, venant aux droits de la société CPI, une indemnité d'un montant de 25.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Condamner la société Immoxia aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Joseph Magnan, aux offres de droit.
La société Bien'Ici rappelle pour sa part qu'elle exploite une plate-forme d'annonces immobilières en ligne depuis 2015 et conteste l'existence d'une faute, en rappelant que les informations ont été transmises volontairement par la société Immoxia, excluant toute obtention déloyale, et que la liberté du commerce ne fait pas obstacle à l'usage de méthodes promotionnelles et commerciales similaires.
La société Bien'Ici ajoute qu'en réalité la société Immoxia est seule à l'origine de la désaffection à son égard en l'absence d'investissements dans l'offre digitale et elle conteste l'existence même d'un savoir-faire particulier détenu par cette société.
Elle conteste en outre toute similarité entre les services des deux sociétés de même que le risque de confusion et le parasitisme allégué.
La société Bien'Ici fait en outre valoir qu'au-delà des intentions qui lui sont prêtées la société Immoxia ne démontre pas la réalité des faits dénoncés et ne caractérise pas l'existence de son préjudice.
Elle souligne sa liberté de se désengager et les motifs qui ont justifié son désengagement.
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Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 30 mai 2025, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société F4 (Sa) demande à la cour de':
Vu les articles 9 et 564 du Code de Procédure Civile,
Vu les articles 1240, 1241 et 1363 du Code Civil,
- Confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Immoxia de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société F4;
- Déclarer irrecevable la demande prise de la rupture fautive des pourparlers
- Subsidiairement, la déclarer mal fondée;
En conséquence :
- Débouter la société Immoxia de l°ensemble de ses demandes, fins et prétentions;
- Condamner la société Immoxia à payer à la société F4 la somme de douze mille (12.000) euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
- Condamner la société Immoxia aux entiers dépens.
La société F4, créée en 2002, actionnaire minoritaire de la société Bien'Ici, précise qu'elle est spécialisée dans la 3D et la cartographie et a ainsi développé pour la société Bien'Ici une plateforme de gestion des annonces immobilières ainsi que le site Bienici.com. Elle rappelle le contexte du rapprochement initié par la société Immoxia, laquelle était en échec pour fournir une solution digitale pertinente et compétitive à ses franchisés, et soutient que les discussions n'ont pas abouti en raison des prétentions excessives de celle-ci.
Elle conteste toute faute de sa part en faisant valoir que la société Immoxia ne démontre aucun savoir-faire original, aucun débauchage ni détournement de fichiers clients qui seraient à l'origine d'une désorganisation, qu'elle ne démontre pas davantage de confusion entre ses services et ceux de la société Bien'Ici. La société F4 souligne qu'il est justifié de la défection de trois acteurs de la presse régionale sur les quatorze invoqués, et que la société Bien'Ici n'est pas propriétaire de la maquette.
S'agissant des préjudices invoqués par la société Immoxia au titre des faits de concurrence déloyale elle déplore la production de documents émis en interne et non étayés et conteste tout lien de causalité avec les faits qui lui sont reprochés.
La société F4 conteste également tout parasitisme en rappelant que la société Immoxia n'est pas précurseur sur le marché et ne disposait d'aucune notoriété supérieure sur le marché justifiant une usurpation de sa notoriété ou de son savoir-faire.
Enfin, sous réserve de sa recevabilité, la société F4 dément toute rupture abusive des pourparlers en rappelant le déroulement des discussions et leur caractère peu avancé.
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La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 juin 2025 et l'affaire a été évoquée le jour même à l'audience.
MOTIFS
A titre liminaire il convient de préciser que la question de la compétence territoriale du tribunal de commerce de Marseille n'est pas en débat devant la cour d'appel et que le litige concernant la rupture du contrat de franchise passé entre la société Immoxia et M. [I] [D], suite à l'appel interjeté par ce dernier, a fait l'objet d'une ordonnance de radiation en date du 5 octobre 2021 (RG n°21/00469) de sorte que l'appel est désormais circonscrit aux demandes indemnitaires formées par la société Immoxia au titre de la concurrence déloyale, du parasitisme et de la rupture fautive des pourparlers.
Sur la recevabilité des demandes formées en cause d'appel par la société Immoxia au titre de la rupture fautive des pourparlers':
M. [I] [D], la société Bien'Ici, et la société F4 soulèvent l'irrecevabilité des prétentions formées en appel par la société Immoxia au titre de la prétendue rupture abusive des pourparlers en faisant valoir que ces prétentions sont nouvelles dès lors qu'en première instance, seuls ont été évoqués la concurrence déloyale et le parasitisme, et que les prétentions formulées par la société Immoxia sont sans rapport avec des faits de rupture des pourparlers.
La société Immoxia soutient en réponse que la rupture fautive des pourparlers ne constitue pas une demande nouvelle mais tend aux mêmes fins que les autres demandes, à savoir sanctionner les agissements déloyaux et la mauvaise foi des intimés.
Sur ce, en application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
En outre les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En revanche, il résulte de l'article 563 du code de procédure civile que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.
Il en ressort qu'en l'absence de prétentions nouvelles, la société Immoxia n'est pas irrecevable à invoquer en cause d'appel un moyen nouveau tiré de la rupture fautive des pourparlers dès lors que ses demandes indemnitaires n'excèdent pas celles formées en première instance, à charge pour la présente cour d'apprécier le lien de causalité éventuel entre les faits allégués et les préjudices invoqués.
Sur les faits de concurrence déloyale et parasitisme':
Aux termes de l'article 1240 du code civil tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
A cet égard, la concurrence existant entre deux sociétés, spécialisées dans un secteur de marché similaire, ne constitue pas en soi un acte fautif en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie.
Pour autant, la concurrence est déloyale dès lors qu'elle s'accompagne d'agissements contraires aux règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires.
En l'espèce, le rapprochement entre les sociétés Immoxia et Bien'Ici, au-delà de la personnalité de leurs représentants et des divers intervenants ayant gravité dans la sphère des négociations, s'est opéré dans le cadre rappelé dans une note datée du 24 septembre 2016 intitulée «'Stratégie Bien'ici'», qui explicite le rapprochement avec la société Immoxia en ces termes «'Surface privée, notamment grâce à la personnalité de son fondateur [K] [E], dispose d'un réseau d'implantation locale et de contacts forts tant vis-à-vis des agents immobiliers que des promoteurs ('). Surface privée édite un magazine de belle facture (12 à 14 numéros par an) et dispose d'un site internet du même type que tous les acteurs du secteur avant Bien'ici. Les magazines sont un élément important pour les agents immobiliers moins pour vendre que pour prendre des mandats. Ils sont également un important support de communication pour les promoteurs. Les chiffres cités plus haut montrent que l'édition de magazines, standardisés grâce aux outils de Surface Privée, peut être une activité très rentable'».
Un rapprochement avec A vendre A louer est également évoqué dans la note (pièce 1 de la société Immoxia).
Il ressort ainsi de cette note et des pièces communiquées que le rapprochement avec la société Immoxia a été initiée, non pas pour son site internet «'du même type que tous les acteurs du secteur'» mais essentiellement pour son magazine papier, édité sous forme de «'co-branding'», en l'espèce en association avec des acteurs de la presse locale.
En premier lieu, s'agissant des actes de concurrence déloyale invoqués, il apparaît que l'absence d'accord de confidentialité ou de clause spécifique dans le cadre de négociations commerciales ne saurait exonérer les protagonistes de la négociation de leur obligation de loyauté, laquelle leur impose en tout état de cause de s'abstenir de divulguer ou de détourner les informations recueillies à d'autres fins que celles de parvenir à faire aboutir les pourparlers.
En l'espèce, dans le cadre du rapprochement envisagé avec la société Bien'Ici, et notamment en vue d'une prise de participation à son capital, la société Immoxia a transmis de son propre chef diverses informations chiffrées, tant sur l'organisation de ses franchises et licences, que sur les contrats en cours avec la presse quotidienne régionale, leurs zones de couverture ainsi que des données détaillées sur les ventes du magazine Surface Privée (pièces 20, 26 et 35 de la société Immoxia). Pour autant, la société Immoxia ne démontre par aucune pièce que les intimés auraient fait un usage détourné de ces documents, qu'ils portent la mention de leur caractère confidentiel ou pas.
En outre, il ressort des documents communiqués à l'occasion des pourparlers (pièce 20 de la société Immoxia) qu'ils sont constitués de bilans, de situations financières, de chiffres d'exploitation, d'un «'business plan'» pour Surface Privé et la société Immoxia, et de synthèses sur le réseau de franchises.
La société Immoxia ne démontre pas en quoi ces documents contiennent des informations constitutives d'un savoir-faire spécifique, les pièces revêtant un caractère purement comptable et étant pour certaines consultables par le public. Ainsi, il ne peut être déduit des seules similitudes invoquées entre les sites internet et les magazines en version papier, un détournement déloyal des pièces communiquées par la société Immoxia.
Par ailleurs, la comparaison ne porte pas sur des marques et l'appréciation de leurs similitudes éventuelles, lesquelles seraient de nature à créer une confusion dans l'esprit du public, mais sur la comparaison de deux concepts, à savoir la mise en ligne d'annonces immobilières et la diffusion de magazines en version papier.
En l'occurrence, la société Immoxia n'explicite pas le savoir-faire qu'elle aurait développé au titre des offres en ligne. A contrario, il apparaît que ce mode de diffusion était largement répandu en 2016, au moment du rapprochement avec la société Bien'Ici, et déjà développé par d'autres acteurs économiques du secteur tels que rappelés dans la note ci-dessus.
En ce qui concerne les offres diffusées en version papier, la société Immoxia se prévaut de la spécificité de son modèle économique en mettant en exergue un site internet adossé à ses magazines, un co-branding avec la presse quotidienne régionale au contenu spécifique à leur région, du contenu éditorial (interviews, articles, recommandations), du contenu plurirédactionnel haut de gamme (rubriques higt-tech, design), un degré de finition éditoriale premium, et un mode de distribution gratuite par voie de présentoirs disposés sur la voie publique.
A cet égard il est incontestable que le concept développé par M. [E], par le biais de la société Immoxia, est apparu suffisamment attractif pour que la société Bien'Ici envisage un rapprochement entre les deux entités, notamment en ce qui concerne son édition papier.
Pour autant, au-delà des différences relevées par les premiers juges entre le magazine édité désormais par la société Bien'Ici et le magazine Surface Privée, il apparaît que les similitudes invoquées, tant visuelles qu'éditoriales, ne peuvent être considérées comme un savoir-faire ou une valeur économique propres à la société Immoxia dès lors que d'une part, certaines de ces similitudes ne sont dictées que par l'objet même des magazines et leur fonction d'annonceurs, imposant notamment une présentation de photographies mettant en lumière des biens immobiliers proposés à la vente, et que d'autre part, le détournement allégué suppose que soit démontrée une spécificité du modèle économique, laquelle ressort en tout état de cause de la seule observation de la maquette et du contenu des magazines sans qu'il soit nécessaire pour les autres acteurs du marché de procéder à un détournement des informations communiquées par la société Immoxia.
Au demeurant, la note évoquée à titre liminaire mentionne d'ores et déjà l'existence d'autres concepts similaires sur le marché et notamment la revue Logic-Immo, adossée également à un site internet.
De même, certains contenus, qui relèvent tout autant du contenu publicitaire qu'informatif, ne constituent pas une innovation dans le domaine de la presse.
En outre, la société Immoxia, sous couvert de dénonciation d'une collusion frauduleuse, se dispense de caractériser l'existence de faits précis et circonstanciés constitutifs d'actes déloyaux qu'elle imputerait à chacun des intimés, se limitant à un portrait des protagonistes dont elle soupçonne l'implication dans une man'uvre concertée de déstabilisation à son égard.
Enfin, aucun élément ne démontre davantage que la perte de partenariats noués avec les acteurs de la presse régionale, outre qu'elle n'est démontrée que pour trois d'entre eux, est la conséquence de man'uvres imputées aux intimés. La désaffection de certains représentants de la presse régionale est au contraire motivée par l'incapacité de la société Immoxia à proposer une «'solution digitale efficace'» pour les annonceurs (pièce 46 de la société Immoxia).
En conséquence, et comme l'ont justement retenu les premiers juges, à la motivation desquels il convient de se référer pour le surplus, il résulte de ces éléments que la commission d'actes déloyaux ou contraires aux usages de la vie économique, conditionnant la reconnaissance d'une concurrence déloyale, ne ressort pas des pièces communiquées, de simples présomptions étant insuffisantes à caractériser une concurrence déloyale.
En second lieu, s'agissant du parasitisme, il consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
Pour autant, les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en 'uvre par un concurrent ne constitue pas, en soi, un acte de parasitisme, encore est-il nécessaire pour celui qui invoque des faits de parasitisme d'établir l'originalité du concept pouvant lui conférer une valeur économique identifiée et individualisée.
Or, comme relevé ci-dessus, outre que le concept existait d'ores et déjà sur le marché de l'immobilier lors du rapprochement entre la société Immoxia et la société Bien'Ici, la société appelante ne communique aucun élément attestant de moyens humains et financiers mis en 'uvre pour parvenir à un savoir-faire spécifique, et dont elle aurait pu se déposséder en communiquant des éléments d'information à ses interlocuteurs, sauf à observer que M. [E] a pu développer effectivement un concept porteur, favorisé par «'un réseau d'implantation locale et de contacts forts tant vis-à-vis des agents immobiliers que des promoteurs'» (pièce 1 de la société Immoxia), concept jugé suffisamment intéressant pour que la société Bien'Ici et la société Immoxia unissent leurs compétences afin notamment de peser davantage sur le marché immobilier face à la concurrence d'autres acteurs économiques, jugés prédominants.
La société Immoxia ne démontre pas davantage la volonté des intimés de se placer dans son sillage dans le dessein de profiter de ses investissements et de son savoir-faire, cette volonté ne ressortant d'aucune des pièces produites.
Au regard des échanges entre les parties, le rapprochement envisagé apparaît davantage comme une collaboration entre deux sociétés que comme un transfert du savoir-faire au profit de la société Bien'Ici et de ses autres partenaires, étant relevé que la société Bien'Ici est détenue notamment par la société Nexity, holding du groupe Nexity, qui se présente comme le premier groupe en France de services à l'immobilier, qui est lui-même un acteur majeur dans le domaine de l'immobilier. La note établie le 14 avril 2016 à l'adresse de la société Bien'Ici (pièce 8 de la société Immoxia) relate d'ailleurs les bénéfices pour chacune des sociétés, la société Immoxia concluant «'nous avons une vraie opportunité à travailler ensemble dans un deal gagnant-gagnant'».
La volonté d'usurper la notoriété de la société Immoxia ne peut dès lors être davantage retenue.
En troisième lieu, s'agissant de la rupture abusive des pourparlers, il résulte de l'article 1112 du code civil, dans sa version issue de l'ordonnance du 10 février 2016, que l'initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.
En l'espèce, nonobstant le désaccord existant entre les parties sur l'initiateur du rapprochement entre la société Immoxia et la société Bien'Ici et sur les modalités des premières prises de contact, il n'est pas contesté que les pourparlers ont débuté au premier trimestre 2016, que le projet de prise de participation au capital de la société Immoxia a pris fin en novembre 2016 et que les parties ont néanmoins poursuivi leurs négociations commerciales jusqu'en juillet 2017.
Si les motifs ayant conduit à la fin de la collaboration entre les deux entités ne sont pas explicités formellement, et sont imputés par les intimés aux attentes démesurées ou aux exigences financières excessives de la société Immoxia, il n'en demeure pas moins que sauf les aléas propres à toute négociation, l'appelante ne produit aucune pièce de nature à étayer les griefs énoncés à l'égard des intimés au titre d'une brutalité ou d'une duplicité revêtant un caractère fautif.
Au demeurant, les échanges de mails communiqués entre les parties attestent des réserves émises par la société Bien'Ici au cours des pourparlers, M. [T], pour la société Bien'Ici, remerciant M. [E] le 20 octobre 2016 pour le «'document synthétique'» mais prenant soin de préciser qu'il n'appelle «'pas cela des accords'» et d'exposer les points de divergences (pièce 30 de la société Immoxia).
Enfin, si M. [E] a été amené à présenter le partenariat lors d'un conseil d'administration de la société Bien'Ici le 7 juillet 2017, présentation qui n'a pas abouti à la formalisation d'un accord, aucun élément n'atteste que des assurances lui avaient été données sur la signature d'un contrat, étant relevé qu'aucun projet n'est communiqué, le partenariat étant limité à des échanges de pièces et des chiffrages. Certains documents (pièces 36 et 39 notamment de la société Immoxia) portent la mention de leur caractère confidentiel mais avec cette précision qu'ils sont «'sans valeur contractuelle (basé sur des estimations)'».
Ainsi, la société Immoxia a pu avoir de fortes espérances quant à un rapprochement avec la société Bien'Ici aux termes de plusieurs mois d'échanges et de tractations. Néanmoins, aucun des termes employés par la société Bien'Ici ou ses partenaires n'est de nature à conférer à ces échanges un caractère abouti ni à contenir un engagement ferme au regard des réserves émises à plusieurs reprises, notamment avec dans un premier temps l'arrêt du projet capitalistique.
En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions, sans qu'il soit nécessaire d'examiner à titre surabondant les préjudices invoqués par la société Immoxia en l'absence de faits constitutifs d'une faute, seuls de nature à justifier une indemnisation au titre de la responsabilité délictuelle.
Sur les demandes au titre de l'appel abusif et dilatoire':
En cause d'appel, M. [I] [D] sollicite la condamnation de la société Immoxia au paiement de la somme de 3 000 euros d'amende civile et à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en invoquant un appel dilatoire et abusif et dénonce le lien artificiellement introduit par la société entre lui et les autres parties à l'instance pour justifier ses demandes à son égard.
Sur ce, au visa de l'article 1241 du code civil l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, ne peut constituer un abus de droit susceptible de donner lieu à dommages-intérêts que dans des circonstances particulières le rendant fautif, et notamment lorsqu'est caractérisée une intention malveillante ou une volonté de nuire de la part de celui qui l'exerce.
En outre, aux termes de l'article 559 du code de procédure civile en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui lui seraient réclamés.
Au-delà du rejet des demandes formées par la société Immoxia, M. [I] [D] ne rapporte pas la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de la partie adverse, et n'établit pas davantage l'existence d'un préjudice autre que celui subi du fait des frais de défense exposés.
Il y a donc lieu de le débouter de sa demande de dommages et intérêts.
De même, les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'une amende civile soit prononcée à l'encontre de la société Immoxia, la seule succombance de l'appelante en ses prétentions ne saurait suffire à fonder une condamnation de ce chef.
Sur les frais et dépens':
La société Immoxia, partie succombante, sera tenue aux entiers dépens de l'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile et sera tenue de payer à chacun des intimés la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine,
Dit recevable en cause d'appel le moyen nouveau tiré de la rupture fautive des pourparlers invoqué par la société Immoxia,
Confirme le jugement rendu le 8 décembre 2020 par le tribunal de commerce de Marseille,
Y ajoutant,
Déboute M. [I] [D] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire,
Dit n'y avoir lieu à amende civile,
Condamne la société Immoxia aux dépens de l'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne la société Immoxia à payer à chacun des intimés la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.