CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 18 septembre 2025, n° 24/06805
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ecomaltenergie (SASU)
Défendeur :
Domofinance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Sanjabi, SCP Revest-Lequin-Nogaret-de Metz-Croci-RLNDC, SELAS Cloix & Mendes-Gil
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 2 avril 2021, dans le cadre d'un démarchage à domicile, Mme [R] [B] [S] a conclu avec la société Ecomaltenergie un contrat prévoyant la fourniture et la pose d'une pompe à chaleur air-air et d'un ballon thermodynamique au prix de 23 210 euros.
Pour financer cette opération, Mme [B] [S] a signé le même jour avec la société Domofinance et par voie électronique, un contrat de crédit affecté prévoyant un financement en capital de 23 210 euros remboursable passé un moratoire de 180 jours en 185 échéances de 173,27 euros hors assurance au taux d'intérêts contractuel de 3,90 % l'an, soit un TAEG de 3,97 % et une mensualité avec assurance de 193,99 euros.
Le 20 avril 2021, Mme [B] [S] a signé une fiche de réception des travaux sollicitant de la société Domofinance le déblocage des fonds au profit du vendeur. La facture a été remise le même jour.
Les 2 et 18 novembre 2022, Mme [B] [S] a fait assigner le vendeur et la banque devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Auxerre sollicitant principalement l'annulation des contrats pour dol, la condamnation du vendeur à tout remettre en état et celle du vendeur et de la banque solidairement à lui payer des dommages et intérêts et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire en date du 17 janvier 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Auxerre a :
- prononcé l'annulation du contrat de vente conclu le 2 avril 2021 entre Mme [B] [S] et la société Ecomaltenergie, sur le fondement du vice du consentement pour dol,
- ordonné à la société Ecomaltenergie de reprendre les biens vendus à Mme [B] [S] à savoir la pompe à chaleur et le ballon thermodynamique à charge pour l'entreprise d'assurer la remise en état des lieux au domicile de Mme [B] [S] et ce aux frais de l'entreprise,
- dit que cette reprise devra être effectuée dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement et qu'à défaut la société Ecomaltenergie sera condamnée au paiement d'une astreinte de 50 euros par jour de retard au bénéfice de Mme [B] [S] et ce jusqu'à la dépose effective de la pompe à chaleur et du ballon thermodynamique ainsi qu'à la remise en état des lieux,
- condamné la société Ecomaltenergie à restituer à Mme [B] [S] la somme de 23 210 euros correspondant au prix de la vente des biens et services, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement,
- prononcé l'annulation subséquente du contrat de prêt affecté conclu le 2 avril 2021 entre Mme [B] [S] et la société Domofinance,
- condamné Mme [B] [S] à payer à la société Domofinance la somme de 20 453,43 euros en restitution du capital prêté déduction faite des règlements déjà effectués par l'emprunteur au titre du contrat de crédit affecté,
- condamné la société Ecomaltenergie à payer à Mme [B] [S] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices,
déclaré irrecevable la demande d'indemnisation de la société « BNP Paribas Personal Finance » à l'encontre de Mme [B] [S],
- condamné la société Ecomaltenergie à garantir le paiement de la somme de 20 453,43 euros par Mme [B] [S] à la société Domofinance en restitution du capital prêté,
- débouté la société Domofinance du surplus de ses demandes,
- condamné in solidum la société Ecomaltenergie et la société Domofinance à payer à Mme [B] [S] la somme de 1'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société Domofinance de sa demande au titre des frais irrépétibles,
- condamné in solidum la société Ecomaltenergie et la société Domofinance à supporter les entiers dépens de l'instance,
- rappelé que l'exécution provisoire était de droit.
Le premier juge a relevé qu'il résultait des pièces produites que le contrat de vente avait été conclu par l'intermédiaire de M. [V] [J] qui représentait la société Ecomaltenergie quelle que soit la nature juridique les liant.
Il a considéré qu'il était établi que Mme [B] [S] avait signé le bon de commande du 2 avril 2021 à la suite de déclarations orales effectuées par M. [J] apporteur d'affaires agissant au nom de la société Ecomaltenergie relatives à la perception ultérieure des primes de l'état présentées comme équivalentes au montant total du prix de la pompe à chaleur et du ballon thermodynamique et donc au montant du crédit affecté. Il a relevé que ces déclarations constituaient un procédé usuel de la part de celui-ci, ne correspondant pas à la réalité des dispositifs étatiques de prime à la rénovation et caractérisant donc des mensonges et man'uvres frauduleuses, énoncés intentionnellement dans le but d'obtenir la signature du contrat de vente de la part de Mme [B] [S] en l'induisant sciemment en erreur. Il a retenu que celle-ci n'aurait pas contracté si elle avait su que le montant des primes de l'Etat ne couvrait pas l'intégralité du coût de l'installation réalisée par la société Ecomaltenergie et laisserait à sa charge le remboursement du crédit affecté sur une durée de 180 mois.
Il a précisé que l'annulation du contrat de vente entraînait celle du contrat de crédit en application des dispositions de l'article L. 312-55 du code de la consommation.
Il a rappelé que la nullité des contrats devait conduire à remettre les parties en l'état antérieur et a ordonné les restitutions du matériel et des fonds, après avoir relevé que Mme [B] [S] avait déjà versé la somme de 2 756,57 euros à la société Domofinance selon décompte arrêté au 7 décembre 2022 de sorte que la société Domofinance devait lui rembourser le capital déduction faite de cette somme.
Il a relevé que Mme [B] [S] supportait difficilement le paiement des échéances du prêt, que la souscription de ces contrats et les man'uvres dolosives avaient contribué à la placer dans une situation financière délicate en l'absence de versement des aides promises. Il a évalué son préjudice à 1 000 euros après avoir écarté tout préjudice de jouissance relatif à la dépose du matériel litigieux qui n'était que futur et hypothétique.
Il a rappelé que seules les demandes figurant dans les dernières écritures devaient être prises en compte et que la société Domofinance'présentait une demande d'indemnisation au bénéfice de « la société BNP PARIBAS Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea » laquelle n'était pas partie au litige de telle sorte que ses demandes présentées contre Mme [B] [S] devaient être déclarées irrecevables.
S'agissant de la demande en garantie formée à l'encontre de la société Ecomaltenergie, il a considéré que dès lors que les contrats étaient annulés par la suite d'un dol de cette dernière elle devait sa garantie.
Par déclaration électronique du 4 avril 2024, la société Ecomaltenergie a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 21 novembre 2024, elle demande à la cour :
- de la recevoir en ses demandes et la déclarer bien fondée,
- d'infirmer le jugement et statuant à nouveau,
- de débouter Mme [B] [S] de sa demande de nullité du contrat de vente,
- de condamner Mme [B] [S] à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi,
- de rejeter les demandes de condamnation formulées par la société Domofinance,
- si par extraordinaire le contrat de crédit était annulé, de débouter la société Domofinance de ses demandes,
- de condamner Mme [B] [S] à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts,
- en tout état de cause, de condamner Mme [B] [S] et le cas échéant la société Domofinance à lui verser la somme de 3 500 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner les mêmes aux dépens.
Elle fait valoir que le contrat de vente a été régularisé par l'intermédiaire de M. [V] [J] [G], qui avait lui-même régularisé un contrat d'apporteur d'affaires avec la société Ecomaltenergie le 25 janvier 2021 lequel lui présentait des clients et percevait une commission représentant 20 % du chiffre d'affaires hors taxes, après l'installation du matériel vendu.
Elle indique que M. [J] [G] a été condamné par le tribunal correctionnel de Sens par un jugement rendu en date du 21 septembre 2023 pour pratiques commerciales trompeuses, infraction commise du 1er février au 5 juillet 2021 et que son gérant a été relaxé.
Elle soutient qu'il appartenait à Mme [B] [S] de vérifier si une prime versée par l'Etat existait et que celle-ci ne pouvait se satisfaire pour souscrire un crédit portant sur une somme de 23 000 euros et sur une durée de 15 ans de simples déclarations orales dont elle ne peut apporter la preuve.
Elle affirme ne plus être en possession du contrat lequel a été saisi par la justice mais soutient qu'il prévoit qu'il appartient au client de vérifier s'il peut prétendre au crédit d'impôts pour la transition énergétique, avec les sites à consulter, en article 12 : « il appartient au client de vérifier que ce dernier peut prétendre au crédit d'impôts pour la transition énergétique' ». Elle ajoute que Mme [B] [S] ne démontre pas que la perception de la prime était un élément déterminant ni que cette perception était contractuellement prévue.
Elle souligne avoir parfaitement exécuté le contrat en ce qu'il porte sur la fourniture et la pose d'une pompe à chaleur et d'un ballon d'eau chaude thermodynamique, ce qu'elle a effectué.
Elle considère ne pouvoir être responsable des éventuels agissements de M. [J] [G] qui n'était pas son salarié. Elle se prévaut des termes du contrat qui la liait à celui-ci.
Elle soutient avoir subi un préjudice moral d'atteinte à sa réputation, et demande une somme de 5 000 euros à l'encontre de Mme [B] [S].
Elle s'oppose à la demande de la société Domofinance à son encontre et soutient que dans le cas où il y serait fait droit, Mme [B] [S] devrait être condamnée à lui payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Aux termes de ses écritures notifiées par RPVA le 19 août 2024, Mme [B] [S] demande à la cour :
- confirmant le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- de prononcer la nullité du contrat de vente la liant à la société Ecomaltenergie,
- de condamner la société Ecomaltenergie à lui verser la somme de 23 210 euros correspondant à la restitution du prix de vente, outre intérêts de droit à compter de la délivrance de l'assignation,
- de condamner la société Ecomaltenergie à déposer l'installation posée chez elle et à remettre les lieux en état, à ses frais,
- et de dire qu'à compter du 8ème jour franc suivant la signification de la décision à intervenir, à défaut de dépose de l'installation et de remise en état des lieux chez elle, la société Ecomaltenergie sera redevable d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à son bénéfice,
- de condamner la société Ecomaltenergie à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait de la nullité des contrats,
- en conséquence, de constater l'annulation de plein droit du contrat de crédit souscrit auprès de la société Domofinance et,
- de dire qu'elle ne sera tenue qu'au remboursement du capital emprunté, « soit la somme de 20 910 euros au terme de la demande de Domofinance », déduction faite de l'intégralité des sommes déjà versées au titre des échéances.
- de débouter la société Domofinance de l'ensemble de ses demandes,
- y ajoutant,
- de condamner solidairement la société Ecomaltenergie et la société Domofinance à lui verser la somme de 4 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Se prévalant des dispositions de l'article 1137 du code civil, elle fait valoir que le représentant de la société Ecomaltenergie a usé de mensonges et man'uvres pour obtenir son consentement en lui faisant croire qu'elle percevrait des primes d'Etat équivalentes au montant total du prix du matériel, qu'il est allé jusqu'à créer une fausse adresse internet invitant les clients à déposer sur ce site les documents nécessaires à la constitution de leur dossier pour obtenir les primes. Elle souligne que la société Ecomaltenergie a confirmé l'usage par son représentant de ce type de man'uvres et ce notamment dans un mail du 17 février 2022. Elle rappelle qu'aux termes de l'article 1138 du code civil « le dol est également constitué s'il émane du représentant, gérant d'affaires, préposé ou porte-fort du contractant » et en déduit que la société Ecomaltenergie ne peut donc se départir de sa responsabilité en mettant en avant le fait que le dol a été réalisé par son représentant.
Elle rappelle que le contrat de crédit affecté est nul de plein droit lorsque le contrat de vente est annulé.
Elle ajoute demander des dommages et intérêts en réparation de son préjudice, soulignant la modestie de sa situation et les difficultés qu'elle rencontre du fait de ce crédit.
Elle relève que les demandes qui émanent de la société Domofinance et sont faites' pour la société BNP Paribas Personal Finance sont irrecevables. Elle conteste toute légèreté blâmable et rappelle que la société Domofinance ne peut lui réclamer que le capital déduction faite des sommes versées.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 2 octobre 2024, la société Domofinance demande à la cour :
- d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté certaines des demandes de Mme [B] [S], et statuant à nouveau sur les chefs critiqués,
- à titre principal, de débouter Mme [B] [S] de sa demande en nullité du contrat conclu avec la société Ecomaltenergie ainsi que de sa demande en nullité du contrat de crédit conclu avec elle et de leur demande en restitution des mensualités réglées,
- de constater que Mme [B] [S] est défaillante dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 7 février 2024, de condamner Mme [B] [S] à lui payer à la somme de 22 417,37 euros avec les intérêts au taux contractuel de 3,90 % l'an à compter du 7 février 2024 sur la somme de 20 756,68 euros et au taux légal pour le surplus, subsidiairement, de condamner Mme [B] [S] à lui régler les mensualités échues impayées au jour où la cour statue, outre la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, et de leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,
- subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de condamner Mme [B] [S] à lui régler la somme de 23 210 euros en restitution du capital prêté et la somme de 7 978,60 euros correspondant aux intérêts perdus à titre de dommages et intérêts en raison de sa légèreté blâmable,
- de dire et juger, en tout état de cause, en cas de nullité des contrats, que la société Ecomaltenergie est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n'exonère toutefois pas l'emprunteur de son obligation lorsqu'il n'en a pas été déchargé,
- de condamner, en conséquence, la société Ecomaltenergie à garantir la restitution de l'entier capital prêté, et donc à lui payer la somme de 23 210 euros (déduction faite des sommes déjà versées au titre des échéances) au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté outre le paiement de la somme de 7'978,60 euros correspondant aux intérêts perdus, subsidiairement, si la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n'y faire droit que partiellement, de condamner la société Ecomaltenergie à lui payer la somme de 23 210 euros ou le solde, sur le fondement de la répétition de l'indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité, de condamner, par ailleurs, la société Ecomaltenergie au paiement des intérêts perdus du fait de l'annulation des contrats, et donc à lui payer la somme de 7 978,60 euros à ce titre,
- de dire et juger que les autres griefs formés par les acquéreurs ne sont pas fondés ; de débouter la société Ecomaltenergie de toutes autres demandes, fins et conclusions formées à son encontre,
- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,
- de condamner Mme [B] [S] le cas échéant avec la société Ecomaltenergie à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil.
Elle rappelle que l'installation est parfaitement fonctionnelle et que le jugement a d'ailleurs relevé qu'aucune contestation quant à sa rentabilité n'était formulée.
Se prévalant des dispositions des articles 1130 et 1137 du code civil, elle relève que c'est à celui qui invoque le dol de le démontrer et soutient que l'acquéreur n'établit pas les man'uvres dolosives et l'erreur qu'elle aurait commise dans la conclusion du contrat. Elle souligne qu'elle ne produit aucun engagement contractuel certifiant que la prise en charge de l'installation aurait été intégralement financée par l'état, ce qui n'est, au demeurant, ni réaliste, ni crédible. Elle conteste toute valeur probante aux mails produits. Elle affirme que ce type d'achat ne s'inscrit pas exclusivement dans une finalité de rentabilité, mais s'inscrit naturellement dans une finalité d'achat responsable dans le cadre d'un objectif de protection de l'environnement, et que la rentabilité de l'installation n'est pas nécessairement, de facto, le critère prépondérant de l'acquisition.
Elle rappelle qu'en l'absence de nullité du contrat principal entraînant la nullité ou résolution du contrat de crédit, le contrat de crédit est maintenu. Elle souligne que l'infirmation du jugement emporte obligation de rembourser les sommes versées au titre de l'exécution provisoire. Elle ajoute que Mme [B] [S] ayant cessé de régler les échéances du crédit du fait de l'exécution provisoire, et celle-ci s'opérant aux risques de celui qui en bénéficie, elle n'a d'autre choix que de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 7 février 2024 du fait des mensualités impayées et la condamnation de Mme [B] [S] au paiement de la somme due au titre du crédit soit capital restant dû après l'échéance du 7 février 2024 pour 20 756,68 euros et indemnité d'exigibilité anticipée sur capital pour 1 160,69 euros soit un total de 22 417,37 euros avec les intérêts au taux contractuel de 3,90 % l'an à compter du 7 février 2024 sur la somme de 10 234,78 euros et au taux légal pour le surplus.
À titre subsidiaire, elle fait valoir que la nullité des contrats emporterait obligation pour Mme [B] [S] de restituer les biens et le capital emprunté, pour le vendeur l'obligation de rembourser le prix et pour elle celle de rembourser les échéances payées.
Elle soutient qu'il appartient à l'acquéreur d'être également vigilant dans les documents qu'il signe et qu'il ne peut rechercher la responsabilité de l'organisme ayant exécuté l'ordre qu'il a lui-même donné sans assumer la responsabilité de ses propres fautes. Elle considère qu'en signant l'ordre de règlement désormais critiqué attestant par ailleurs de la réception sans réserve des travaux, l'emprunteur a fait preuve d'une légèreté blâmable qui causerait préjudice à la banque dans la mesure où elle ne peut plus obtenir les intérêts du prêt.
Elle se prévaut des dispositions de l'article L. 311-33 du code de la consommation pour réclamer la garantie de la société Ecomaltenergie pour la restitution du capital prêté et des intérêts soit un total de 31 188,60 euros au total déduction faite des échéances déjà versées.
Subsidiairement, si par extraordinaire la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n'y faire droit que partiellement, elle demande la condamnation de la société venderesse à lui payer la somme correspondant au capital versé, ou à défaut le solde n'entrant pas dans le champ de la garantie, sur le fondement de la répétition de l'indu ou sur le fondement de la responsabilité civile dès lors que l'annulation du contrat résulterait bien du fait du vendeur, étant relevé que l'article L. 311-33 du code de la consommation susvisé prévoit expressément que le vendeur est tenu de tous dommages et intérêts vis-à-vis de la banque du fait de l'annulation dont il est à l'origine.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 mai 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience le 11 juin 2025 pour être mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 18 septembre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente souscrit le 2 avril 2021 est soumis aux dispositions du code de la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile est soumis aux dispositions en leur version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Sur la nullité des contrats de vente et de crédit
Selon l'article 1130 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
Aux termes de l'article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
L'article 1137 du même code définit le dol par le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges ou encore par dissimulation intentionnelle par l'un des cocontractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre.
Enfin l'article 1138 du même code précise que le dol est également constitué s'il émane du représentant, gérant d'affaires, préposé ou porte-fort du contractant ou encore d'un tiers de connivence.
Le dol ne se présume pas et doit être prouvé par celui qui l'invoque.
Mme [B] [S] soutient que le représentant de la société Ecomaltenergie l'a trompée en lui faisant croire que les primes d'état couvriraient la totalité du coût de l'installation et que c'est ce qui a conduit à ce qu'elle signe les contrats.
La réalité de cette affirmation est corroborée, comme l'a retenu le premier juge, d'une part par l'envoi par Mme [B] [S] le 7 février 2022 à la société Ecomaltenergie de courriers électroniques par lesquels elle sollicite des explications concernant l'absence de réponse suite à sa demande pour bénéficier de la prime rénovation versée par l'état mais surtout par les propres mails de l'assistante administrative et commerciale de la société Ecomaltenergie à Mme [B] [S] du 17 février 2022 par lesquels elle lui écrit « il s'avère qu'en plus de vous avoir garanti des primes à la hauteur du montant total de votre installation, Mr [J] n'en a pas fait la demande. Ce qui est « logique » puisque ce qu'il vous avait avancé comme arguments était totalement faux comme j'ai pu vous l'expliquer par téléphone ['] Dans l'immédiat et au regard de tous ces éléments et suite au premier retour de notre avocat, il faut que vous alliez déposer plainte contre M. [J] pour escroquerie ». Elle le précise encore le même jour quelques heures plus tard en indiquant : « ce qu 'il faut tout de suite retenir c'est qu'une personne vous a garanti de s'occuper de toutes ces démarches, en l'occurrence Mr [J], afin de vous faire signer des documents dans le but de percevoir une commission. Son but n'était absolument pas de vous proposer un confort écologique et économique comme notre entreprise le fait et demande de faire à tous ces collaborateurs » puis « Pour être totalement transparente avec vous, je vous joins les barèmes et plafonds des primes de l'Etat en vigueur ce qui vous prouvera que la démarche initiale de Mr [J] était malhonnête et que bien sûr il cherche à se dédouaner de toutes responsabilités ». Elle le confirme le 29 septembre 2022 en précisant « notre plainte déposée envers Mr [J] prouve que nous aussi nous avons été lésés et que d'aucune façon nous n'aurions cautionné ce genre de démarche frauduleuse ».
La cour observe que M. [J] [G] a d'ailleurs été condamné pour des faits équivalents par le tribunal correctionnel de Sens.
La réalité du dol et son caractère déterminant sont ainsi largement établis et dès lors que M. [J] [G] était le représentant de la société Ecomaltenergie, c'est à juste titre que le premier juge a prononcé l'annulation du contrat de vente.
Le contrat de vente étant annulé le jugement doit aussi être confirmé en ce qu'il a annulé le contrat de crédit lié par application des dispositions de l'article L.312-55 du code de la consommation.
Sur les conséquences de la nullité des contrats
Sur la vente
Les contrats étant anéantis, il convient de replacer les parties dans leur état antérieur à la conclusion des contrats.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a ordonné la reprise du matériel sous astreinte sauf à prévoir un nouveau délai de 2 mois à compter de la signification de l'arrêt et le remboursement par la société Ecomaltenergie à Mme [B] [S] du prix de vente.
Sur le crédit
Il est admis que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance emporte pour la banque l'obligation de rembourser les sommes perçues soit la somme de 2 756,57 euros et pour' Mme [B] [S] celle de rembourser le capital soit 23 210 euros et le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné la société Domofinance à lui rembourser la somme de 20 453,43 euros.
Sur la demande indemnitaire présentée par la société Ecomaltenergie contre Mme [B] [S]
Dès lors que Mme [B] [S] a été victime d'un dol de la part de celui qui représentait la société Ecomaltenergie, cette dernière ne peut prétendre à la voir condamnée à la dédommager. Le fait que le dol ait été commis par un apporteur d'affaire ne change rien dans ses rapports avec ses clients qui contractaient avec la société et non avec l'apporteur d'affaires. Cette demande doit donc être rejetée.
Sur la demande indemnitaire présentée par Mme [B] [S]
Mme [B] [S] qui a été victime d'un dol démontré émanant du représentant de la société Ecomaltenergie dont celle-ci est responsable à son égard, justifie avoir subi un préjudice financier lié à l'achat de cette installation dont elle démontre que la gratuité finale lui avait été promise. Il y a donc lieu de faire droit à sa demande de confirmation du jugement sur ce point conformément à sa demande, le montant ayant été justement apprécié par le premier juge.
Sur les demandes reconventionnelles de la société Domofinance
Sur la demande formée contre Mme [B] [S]
La société Domofinance demande la condamnation de Mme [B] [S] à lui payer la somme de 7 978,60 euros correspondant aux intérêts perdus à titre de dommages et intérêts en raison de sa légèreté blâmable.
Toutefois, Mme [B] [S] n'a présenté aucune légèreté blâmable puisqu'elle a été victime d'un dol et le problème n'est en aucun cas celui de la signature du procès-verbal de réception ou d'une demande de déblocage des fonds inconsidérée. Mme [B] [S] démontre en effet qu'il lui avait été affirmé par le représentant de la société Ecomaltenergie qu'elle percevrait des aides d'état correspondant au coût de l'opération. La banque, qui n'est certes pas responsable de cette situation et ne pouvait la prévoir, ne peut cependant reprocher à Mme [B] [S] de n'avoir pas fait de recherches auparavant. Elle doit être déboutée de cette demande.
Sur la demande formée contre la société Ecomaltenergie
L'annulation des contrats est entièrement imputable au dol du représentant de la société Ecomaltenergie dont celle-ci répond à l'égard des tiers et notamment de la banque. De son côté celle-ci n'avait aucun moyen de s'en prémunir.
Il doit donc être fait droit à la demande de confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Ecomaltenergie à garantir le paiement de la somme de 20 453,43 euros par Mme [B] [S] à la société Domofinance en restitution du capital prêté.
Il doit également être fait droit à la demande de la société Domofinance tendant à la condamnation de la société Ecomaltenergie à lui payer la somme de 7 978,60 euros correspondant aux intérêts perdus par suite de l'annulation des contrats par suite du dol.
Sur la demande de confirmation de la condamnation à garantie au bénéfice de Mme [B] [S]
Mme [B] [S] qui a été victime d'un dol doit être garantie par le vendeur de son obligation de restituer le capital à la banque le jugement étant confirmé sur ce point.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
La société Ecomaltenergie qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil pour ceux dont elle a fait l'avance et au paiement à Mme [B] [S] et à la société Domofinance d'une somme de 3 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le point de départ de l'astreinte ;
Dit que l'astreinte commencera à courir passé un délai de 2 mois après la signification de la présente décision ;
Y ajoutant,
Condamne la société Domofinance à payer à la société Ecomaltenergie la somme de 7 978,60 euros correspondant aux intérêts perdus par suite de l'annulation des contrats par suite du dol ;
Condamne la société Ecomaltenergie à payer à Mme [R] [B] [S] et à la société Domofinance une somme de 3 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Ecomaltenergie aux dépens d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil pour ceux dont elle a fait l'avance ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.