CA Douai, 8e ch. sect. 1, 18 septembre 2025, n° 24/01591
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Solfinea (SA)
Défendeur :
Solfinea (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Benhamou
Conseillers :
Mme Convain, Mme Ménegaire
Avocats :
Me Boulaire, Me Deffrennes
EXPOSE DU LITIGE
Le 31 août 2009, M. [A] [J] et Mme [L] [K] épouse [J] ont contracté auprès de la société Energia une prestation relative à la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque, pour un montant TTC de 20 045 euros, dans le cadre d'un démarchage à domicile.
Cette installation a été financée au moyen d'un crédit affecté souscrit par M. [J] et Mme [K] auprès de la société Solfea, aux droits de laquelle vient désormais la société Solfinea, selon offre préalable acceptée le 31 août 2009, d'un montant de 20 045 euros, remboursable en 145 mensualités, au taux débiteur de 5,76 % l'an.
Le matériel a été livré et installé le 8 décembre 2009.
Les emprunteurs ont remboursé le crédit par anticipation en février 2016.
Par jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon du 12 novembre 2020, la société Energia a été placée en liquidation judiciaire, la Selarl [F] [Z] ayant été désignée en qualité de liquidateur.
Par exploits d'huissier en date des 26 et 27 octobre 2022, M. [J] et Mme [K] ont fait assigner la société Solfinea et la Selarl [F] [Z] ès qualité de liquidateur de la société Energia afin notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 8 février 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Cambrai a :
- déclaré prescrite l'action intentée par M. [J] et Mme [K] par actes des 26 et 27 octobre 2022,
- déclaré M. [J] et Mme [K] irrecevables en leur action et en leurs demandes,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [K] aux dépens,
- condamné solidairement M. [J] et Mme [K] à payer à la société Solfinea la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 4 avril 2024, M. [J] et Mme [K] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 8 avril 2025, les appelants demandent à la cour de :
Vu l'article liminaire du code de la consommation ;
Vu les anciens articles 1109 et 1116 du code civil, devenus les articles 1130 et 1137 du même
code ;
Vu l'article 16 de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012 ;
Vu les article L.121-23 à L.121-26 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993,
Vu la jurisprudence citée et l'ensemble des pièces visées aux débats ;
- infirmer le jugement entrepris purement et simplement,
statuant à nouveau et ajoutant ;
- déclarer les demandes de M. [J] et Mme [K] recevables et bien
fondées ;
- prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Energia, M. [J] et Mme [K],
- mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Energia l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble et dire qu'à défaut de reprise dans le délai déterminé, celle-ci demeurera acquise aux concluants, lesquels pourront en disposer librement,
- prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [J], Mme [K] et la société Solfinea,
- constater que la société Solfinea a commis une faute lors de la conclusions puis lors de l'exécution du contrat de prêt, et doit être privée de sa créance de restitution,
par conséquent,
- condamner la société Solfinea à verser à M. [J] et Mme [K] l'intégralité des sommes suivantes au titre des fautes commises :
- 20 045 euros correspondant au montant du capital emprunté, en raison de la privation de sa créance de restitution ;
- 7 895,02 euros correspondant au montant des intérêts conventionnels et frais payés par M. [J] et Mme [K] à la société Solfinea en exécution du prêt souscrit ;
- 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
En tout état de cause,
- prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société Solfinea,
- condamner la société Solfinea à rembourser à M. [J] et Mme [K] l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement, et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgé des dits intérêts,
- débouter la société Solfinea de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes,
- condamner la société Solfinea à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 15 avril 2025, la société Solfinea demande à la cour de :
Vu l'article 2224 du code civil
vu l'article L.110-4 du code de commerce,
vu l'article 122 du code de procédure civile,
vu l'ancien article 1134 du code civil,
vu les anciens articles 1108 et suivants du code civil,
vu l'ancien article 1338 du code civil,
vu l'ancien article 1315 du code civil,
vu l'article 9 du code de procédure civile,
vu les pièces versées aux débats,
à titre principal,
- dire bien jugé, mal appelé,
- confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Cambrai 8 février 2024 en ce qu'il a :
- déclaré prescrite l'action intentée par M. [J] et Mme [K] par actes des 26 et 27 octobre 2022,
- déclaré M. [J] et Mme [K] irrecevable en leur action et en leurs demandes,
- condamné in solidum M. [J] et Mme [K] aux dépens,
- condamné solidairement M. [J] et Mme [K] à payer à la société Solfinea la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- déclarer M. [J] et Mme [K] irrecevables en leurs prétentions pour cause de prescription de leur action,
- débouter M. [J] et Mme [K] de l'intégralité de leurs prétentions,
à titre subsidiaire
- constater la carence probatoire de M. [J] et Mme [K],
- dire et juger que les conditions d'annulation du contrat principal de vente sur le fondement d'un prétendu dol ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. [J] et Mme [K] n'est pas annulé,
- dire et juger que le bon de commande régularisé le 31 août 2009 par M. [J] et Mme [K] respecte les dispositions des anciens articles L.121-23 et L.121-24 du code de la consommation,
- à défaut, dire et juger que M. [J] et Mme [K] ont amplement manifesté leur volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l'affectant sur le fondement des anciens articles L.121-23 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,
- en conséquence, débouter M. [J] et Mme [K] de l'intégralité de leur demandes et notamment de leur demande de remboursement des sommes d'ores et déjà versées au prêteur dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti le 31 août 2009,
à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour estimait devoir réformer jugement entrepris et prononcer la nullité du contrat principal de vente conclu le 31 août 2009 et de manière subséquente constater la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté,
- constater, dire et juger que la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient la société Solfinea n'a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds, ni dans l'octroi du crédit,
- en conséquence, débouter M. [J] et Mme [K] de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de la société Solfinea et notamment de leur demande de remboursement des sommes d'ores et déjà versées par M. [J] et Mme [K] dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti le 31 août 2009, à l'exception des seules sommes qui auraient pu être versées par l'emprunteur au-delà du montant du capital prêté,
à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour considérait que la société Banque Solfea a commis une faute dans le déblocage des fonds,
- dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,
- dire et juger que les panneaux solaires photovoltaïques et les autres matériels commandés par M. [J] et Mme [K] ont bien été livrés et posés à leur domicile, qu'ils fonctionnent parfaitement puisque M. [J] et Mme [K] ne rapportent pas la preuve d'un quelconque dysfonctionnement qui affecterait les matériels et serait de nature à les rendre impropres à leur destination,
- dire et juger que M. [J] et Mme [K] conserveront l'installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à son domicile par la société Energia (puisque ladite société a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire de sorte qu'elle ne se présentera jamais au domicile de M. [J] et Mme [K] pour récupérer le matériel), que l'installation photovoltaïque fonctionne parfaitement et que M. [J] et Mme [K] perçoivent chaque année des revenus énergétiques grâce à l'installation photovoltaïque litigieuse,
- par conséquent, dire et juger que la société Solfinea ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution compte tenu de l'absence de préjudice avéré subi par M. [J] et Mme [K],
- en conséquence, débouter M. [J] et Mme [K] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, et notamment de leur demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées par eux dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté, à l'exception des seules sommes qui auraient pu être versées par l'emprunteur au-delà du montant du capital prêté,
- à défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par M. [J] et Mme [K] et les condamner à restituer à la société Solfinea une fraction du capital prêté, qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,
en tout état de cause,
- débouter M. [J] et Mme [K] de l'intégralité de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts complémentaires telles que formulées à l'encontre de la société Solfinea Finance, en l'absence de faute imputable au prêteur et à défaut de justifier de la réalité et du sérieux d'un quelconque préjudice qui serait directement lié à la prétendue faute que M. [J] et Mme [K] tentent de mettre à la charge du prêteur,
- condamner M. [J] et Mme [K] à payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens, y compris ceux d'appel, dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Régulièrement assignée par acte de commissaire de justice délivré à personne morale, la Selarl [F] [Z] ès qualité de liquidateur de la société Energia n'a pas constitué avocat.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 avril 2025.
MOTIFS
Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la nullité des contrats de vente et de crédit affecté
La banque soulève la prescription de l'action en nullité formelle comme de l'action en nullité pour dol, ce à quoi les appelants s'opposent en faisant valoir que si le contrat de vente a été conclu le 31 août 2009,
- ils n'étaient pas en mesure de déceler par eux-mêmes les irrégularités dénoncées,
- qu'il résulte clairement de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quiquennale extinctive n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice mais que par principe, ce point de départ doit être reporté à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait du les connaître, se prévalant d'une consultation des professeurs [M] [V] et [H] [O],
- que le point de départ du délai de prescription ne peut être que le moment où le titulaire du droit d'agir a eu connaissance effective non seulement du préjudice subi et ce dans toute son ampleur, ou de son aggravation, mais encore du fait générateur de responsabilité,
- qu'ils se sont engagés sur la base d'un contrat de vente irrégulier, ne comprenant pas toutes les mentions obligatoires, et que si la loi impose à la banque de vérifier la régularité du bon de commande avant le déblocage des fonds, c'est précisément parce qu'il est admis qu'un consommateur ne peut identifier les irrégularités que le contrat litigieux pourrait enfermer,
- qu'ils ont légitimement ignoré les faits permettant d'agir et ce n'est que lorsqu'ils ont saisi un avocat que leur attention a été attirée à cet égard,
- que la reproduction même lisibles des dispositions du code de la consommation dans le bon de commande ne permet pas au consommateurs d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat ; que ce principe a été confirmé en matière de prescription par la cour de cassation aux termes d'un arrêt du 12 mars 2025 (n° 23-22.043),
- qu'aucune prescription ne peut donc leur être opposée.
- Sur la demande de nullité pour dol
En vertu de l'article 122 du code de procédure civile 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.'
L'article 2224 du code civil dispose que 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'
Aux termes des dispositions de l'article 1304 du code civil, l'action en nullité doit être exercée dans le délai de cinq ans à compter de la découverte du dol ou de l'erreur.
Les faits constitutifs de dol allégués, à savoir une promesse mensongère de rentabilité et d'autofinancement de l'installation, doivent être considéré comme étant découverts à réception de la première facture d'électricité. En effet, dès cette date, l'acheteur est en mesure se rendre compte par un simple calcul du coût annuel du crédit et en le comparant au montant de la première facture annuelle de revente d'électricité, que l'installation ne peut pas s'autofinancer et qu'elle n'a pas la rentabilité escomptée.
En l'espèce, les époux [J] se gardent de produire leur première facture d'achat d'électricité, qui selon toute vraisemblance, a du intervenir dans l'année suivant la pose de l'installation soit dans les années 2010/2011.
Toutefois, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a constaté que si les époux [J] ne communiquent pas aux débats les factures d'achat de l'électricité photovoltaïque produite avec leur installation à compter des années 2010/2011 et 2011/2012, à compter de la période 2012/2013, les factures versées aux débats montrent que sur la première période de facturation 2012/2013 (facture du 4 septembre 2013), les consommateurs ne pouvaient espérer une rentabilité de l'installation avec un autofinancement, comme suggéré dans le document 'auto-financement photovoltaïque plan d'accompagnement à gestion libre' (pièce n° 1 en demande) dès lors que les gains mensuels pour cette période sont de 71,32 euros en moyenne alors que les échéances du prêt affecté sont de 136,55 euros par mois à compter du 5 février 2011.
Dès lors, ils ont nécessairement eu connaissance du dol allégué à compter de cette facture du 4 septembre 2013.
Par suite, l'action engagée sur le fondement du dol, par actes des 26 et 27 octobre 2022, date nécessairement de plus de cinq années après la première facture d'achat communiquée à la juridiction, de telle manière que cette action doit être déclarée irrecevable comme prescrite.
- Sur la demande de nullité à raison des irrégularités formelles du contrat de vente
Les appelants invoquent également la nullité du contrat de vente à raison des irrégularités qu'il comporte au regard des dispositions de l'article L.121-23 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige.
Ils font valoir que le contrat ne comporte pas la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens ou services proposés à la vente au motif que le poids, la taille, la surface, le prix unitaire ainsi que la distinction entre le coût de la main d'oeuvre et le coût du matériel ne figurent pas au bon de commande litigieux.
Il convient tout d'abord de relever que les conditions générales de vente portées au verso reproduisent intégralement les dispositions des textes applicables et les mentions obligatoires que le contrat de vente devait comporter, ce qui constitue un premier indice qui permet d'affirmer que les acheteurs étaient en mesure de se rendre compte par eux-même que l'acte ne comportait pas certaines mentions dont ils déplore l'omission.
Cet indice est complété en l'espèce par le fait que les irrégularités purement formelles du contrat visées par les appelants, soit l'absence de certaines mentions, étaient parfaitement visibles par eux dès la conclusions du contrat, sans procéder à une étude approfondie du bon de commande.
Les époux [J] étaient donc parfaitement en mesure de constater par eux-mêmes dès la conclusions de l'acte, que ne figuraient pas les mentions dont ils déplorent l'omission, et ce d'autant plus qu'ils soutiennent qu'ils s'agissait pour eux d'informations essentielles. La cour relève en outre que le fait que les acheteur bénéficient d'une protection accrue en matière de vente à domicile ne les exonère pas de toute vigilance s'agissant d'un contrat de vente dont le prix est très élevé et qui porte sur leur immeuble d'habitation.
Le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande et c'est donc la date de signature de ce bon de commande qui doit être retenue comme point de départ de prescription puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence.
Toute l'argumentation des appelants, qui se gardent d'ailleurs de donner une date concrète de point de départ de la prescription qui pourrait leur être opposée, vise en fait à voir repousser le point de départ du délai de prescription de leur action en nullité formelle du contrat à la date à laquelle ils ont pu avoir connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme. Les suivre dans cette voie reviendrait en réalité à rendre imprescriptible une action en nullité purement formelle puisque seule la date à laquelle ils l'invoquent pourrait alors être retenue comme point de départ de la prescription.
Dès lors, le contrat de vente ayant été conclu le 31 décembre 2009, l'action en nullité à raison des irrégularités formelles du contrat ayant été engagée par exploit d'huissier en date des 26 et 27 octobre 2022 est manifestement prescrite et le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré l'action en nullité irrecevable.
Il suit que l'action en nullité du contrat de crédit affecté fondée sur l'article L. 311-32 devenu L.312-55 du code de la consommation est également prescrite, et partant irrecevable.
Sur la demande de privation de la banque de sa créance de restitution et de paiement de diverses sommes
Dès lors que les contrats de vente et de crédit ne sont donc pas annulés, les appelants ne sont pas fondés à reprocher à la société Solfinea la commission d'une faute en s'abstenant de vérifier la régularité formelle du contrat de vente avant le déblocage des fonds, ni la commission d'une faute pour participation au prétendu dol commis par la société venderesse.
Ils ne sont dès lors pas fondés en leur demande tendant à la privation de la banque de sa créance de restitution et en l'ensemble de leurs demandes en paiement du capital emprunté et des intérêts, ainsi que de dommages et intérêts pour préjudice moral formées à l'encontre de la banque, qui ne sont que la conséquence de la nullité des contrats de vente et de crédit affecté et supposent au préalable que la nullité de ces contrats soit prononcée.
En conséquence, à supposer même que les demandes des époux [J] ne soient pas prescrites, il convient en tout état de cause de les en débouter.
Sur les demandes subsidiaires de déchéance du droit aux intérêts contractuels
Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention de pièces invoquées. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
En l'espèce, la cour observe que s'agissant de l'action en déchéance du droit aux intérêts, contrairement à l'action en nullité, la société Solfinea ne développe strictement aucun moyen d'irrecevabilité ni sur le fond.
Au visa de l'article L.312-14 du code de la consommation, les époux [J] soutiennent que la banque doit être déchue de son droit aux intérêts contractuels au motif qu'elle a manqué à son obligation de conseil et son devoir de mise en garde quant à l'opportunité du projet économique en acceptant de financier des installations dont elle ne pouvait ignorer le caractère ruineux.
Il est rappelé que le contrat ayant été conclu le 31 août 2009, les dispositions de l'article L.312-14 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ne sont pas applicables. Ne sont pas davantage applicables les dispositions de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, qui a consacré les obligations de mise en garde et d'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur aux articles L.311-8 et L.311-9 du code de la consommation.
Il y a donc lieu de se référer à l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date de conclusion du crédit, en vertu duquel, l'établissement de crédit est tenu à un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti lors de la conclusion du contrat de prêt ; ce devoir consiste à consentir un prêt adapté aux capacités financières de l'emprunteur et, le cas échéant, à l'alerter sur les risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; il implique l'obligation pour la banque de se renseigner sur les capacités financières de l'emprunteur pour l'alerter, si nécessaire, sur un risque d'endettement. Il incombe à l'emprunteur qui invoque un devoir de mise en garde de la banque à son égard de démontrer que les prêts n'étaient pas adaptés à sa situation financière et créaient un risque d'endettement contre lequel il devait être mis en garde.
Or, d'une part, la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas applicable aux manquements de la banque à son devoir de mise en garde résultant de l'article 1147 du code civil, ce manquement donnant lieu à l'octroi d'éventuels dommages et intérêts.
La cour relève en outre que les époux [J], emprunteurs profanes, ne démontrent aucunement que le crédit affecté, qu'ils ont intégralement remboursé sans qu'il soit fait mention du moindre incident de paiement, était inadapté à leur situation et créait un risque d'endettement sur lequel la banque aurait dû les mettre en garde.
Dès lors, ils seront déboutés de leur demande de déchéance du droit aux intérêts de ce chef.
Les appelants soutiennent également que le prêteur doit être déchu de son droit aux intérêts contractuels au visa des articles L.311-8 et D.311-4-3 du code de la consommation (dans leur rédaction à une date qui n'est pas précisée), au motif que la banque ne justifie pas que le crédit a été distribué par un professionnel compétent et formé, ni qu'elle a consulté le FICP avant la conclusion du contrat.
Toutefois, les dispositions visées par les appelants n'étaient pas applicables à la date de conclusion du crédit puisqu'elles sont issues de la loi issues de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, entrée en application le 1er mai 2011.
En outre, l'article L.311-33 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige ne prévoit pas la déchéance du droit aux intérêts dans les cas évoqués par les époux [J].
Dès lors, ils seront déboutés de leur demande de déchéance droit aux intérêts ainsi que de leur demande subséquente de remboursement des intérêts versés au titre de l'exécution du contrat de crédit et de production d'un nouveau tableau d'amortissement expurgé des intérêts.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Les motifs du premier juge méritant d'être adoptés, le jugement entrepris sera confirmé en ces dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
M. [J] et Mme [K], qui succombent en appel, sont condamné in solidum aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'équité commande de les condamner in solidum à payer à la société Solfinea la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code civil au titre des frais irrépétibles d'appel, et de les débouter de leur demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions :
Y ajoutant ;
Déboute M. [A] [J] et Mme [L] [K] de leurs demandes tendant à la privation de la société Solfinea de sa créance de restitution, de leurs demandes tendant au paiement des sommes de 20 045 euros et 7 895,02 euros au titre des restitutions, de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Déboute M. [A] [J] et Mme [L] [K] de leur demande de déchéance du droit du prêteur de son droit aux intérêts contractuels ;
Déboute M. [A] [J] et Mme [L] [K] de leur demande de remboursement des intérêts versés au titre de l'exécution du contrat de crédit et de production d'un nouveau tableau d'amortissement expurgé des intérêts ;
Condamne in solidum M. [A] [J] et Mme [L] [K] à payer à la société Solfinea la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code civil au titre des frais irrépétibles d'appel,
Déboute M. [A] [J] et Mme [L] [K] de leur demande au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamne in solidum M. [A] [J] et Mme [L] [K] aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.