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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-3, 18 septembre 2025, n° 23/01880

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 23/01880

18 septembre 2025

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50Z

Chambre civile 1-3

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 18 SEPTEMBRE 2025

N° RG 23/01880

N° Portalis DBV3-V-B7H-VX5Y

AFFAIRE :

[E] [O]

...

C/

Maître [I] [L], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS RECONQ HOLDING

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 06 Septembre 2022 par le Conseiller de la mise en état de [Localité 9]

N° Chambre : 12

N° Section :

N° RG : 21/05992

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Julie GOURION-RICHARD, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [E] [O]

né le 24 Août 1986 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Madame [U] [S] épouse [O]

née le 16 Janvier 1989 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Julie GOURION-RICHARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51

Représentant : Me Bertille LACAU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTS

****************

S.A.S. RECONQ HOLDING

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699

INTIMEE

Maître [I] [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS RECONQ HOLDING

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

défaillant

PARTIE INTERVENANTE FORCEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 avril 2025, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Présidente

Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller

Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme FOULON

**********

FAITS ET PROCEDURE :

La société Reconq Holding exerçait en 2019 une activité de menuiserie, sous la dénomination commerciale PLAC'ART.

M. et Mme [O] ont sollicité un devis de fabrication de meubles auprès de la société Reconq Holding.

Le 17 mai 2019, un premier devis a été émis par la société Reconq Holding, pour la fabrication et la pose de deux bibliothèques vaisselier, d'une bibliothèque cheminée, d'un escalier, d'une élévation entrée côté banquette et d'un meuble d'entrée toute hauteur côté desserte pour un montant de 47 245 euros TTC.

Le 31 mai 2019, un second devis a été émis par la société Reconq Holding pour la fabrication de deux dressings ainsi que des tiroirs et tablettes à chaussures.

Ces devis ont été acceptés et contresignés par M. et Mme [O].

Le 13 septembre 2019, une facture relative au premier devis, pour un montant de 47 245 euros, a été émise par la société Reconq Holding.

Au cours du mois d'octobre 2019, M. et Mme [O] ont constaté un travail défectueux et des dégradations occasionnées à leur domicile, lors de l'installation des aménagements par la société Reconq Holding.

Par courriel du 15 octobre 2019, M. et Mme [O] ont indiqué à la société Reconq Holding qu'ils n'honoreraient pas le paiement de la créance aux motifs que l'ouvrage réalisé serait en retard de deux mois, la pose des meubles aurait provoqué des dégradations dans leur appartement, en particulier des peintures, du dressing, du parquet et de la cave à vin et les meubles seraient endommagés et/ou leur montage n'aurait pas été réalisé dans les règles de l'art.

Le 17 octobre 2019, les dégradations et malfaçons imputables à la société Reconq Holding ont été constatées par huissier, par des photographies rendant compte de l'état de défectuosité des installations et des dégâts occasionnés sur d'autres ouvrages de l'habitation.

Par courrier du 18 octobre 2019, la société Reconq Holding a adressé une mise en demeure sommant M. et Mme [O], de payer le reliquat de créance, ou de restituer les meubles en application de la réserve de propriété figurant au devis.

Par courrier du 6 novembre 2019, M. et Mme [O] ont formellement contesté la demande de paiement émise par la société Reconq Holding.

Par exploit d'huissier du 5 décembre 2019, la société Reconq Holding a assigné M. et Mme [O] devant le tribunal judiciaire de Nanterre, aux fins de restitution des meubles et, à titre subsidiaire, en paiement de la créance s'élevant à hauteur de 21 568,30 euros.

Par jugement du 8 avril 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- débouté la société Reconq Holding de sa demande principale tendant à la restitution forcée de l'ensemble des meubles figurant au sein des devis, en application de la clause de réserve de propriété, sous astreinte,

- condamné M. et Mme [O] à payer à la société Reconq Holding, la somme de 16 347 euros TTC, avec intérêts conventionnels correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal, à compter du 18 octobre 2019,

- condamné M. et Mme [O] à payer à la société Reconq Holding la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme [O] aux dépens.

Par acte du 1er octobre 2021, M. et Mme [O] ont interjeté appel.

Par jugement du 20 avril 2022, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Reconq Holding.

Par acte du 15 mars 2023, M. et Mme [O] ont assigné en intervention forcée M. [I] [L], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Reconq Holding. Néanmoins, cet intimé n'a pas constitué avocat.

Par arrêt du 28 novembre 2024, la cour d'appel de Versailles a :

- constaté la survenance d'un élément nouveau intervenu postérieurement au jugement de première instance résidant dans l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Reconq Holding, le 20 avril 2022,

- déclaré recevables M. et Mme [O] en leur demande aux fins d'intervention forcée de M. [L], demeurant [Adresse 3], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Reconq Holding conférée par un jugement du tribunal de commerce de Créteil du 20 avril 2022 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société Reconq Holding,

- prononcé la reprise d'instance de la procédure enregistrée sous le numéro RG 21/05992 sous le numéro RG 23/1880,

- révoqué l'ordonnance de clôture,

- ordonné la réouverture des débats,

Avant-dire droit sur les demandes,

- invité M. et Mme [O], la société Reconq Holding et M. [L] à faire toutes observations utiles relatives à la recevabilité des demandes de la société Reconq Holding qu'elle formule sans son liquidateur en son nom propre,

- invité la société Reconq Holding à produire les conditions générales accompagnant les devis proposés à M. et Mme [O],

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état de la chambre 1-3 du 16 janvier 2025.

Par dernières écritures du 22 janvier 2025, M. et Mme [O] prient la cour de :

- les déclarer recevables et bien-fondés en leur appel,

Y faisant droit,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il :

* les a condamnés à payer à la société Reconq Holding la somme de 16 347 euros, avec intérêts conventionnels correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 18 octobre 2019,

* les a condamnés à payer à la société Reconq Holding la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* les a condamnés aux dépens,

Statuant à nouveau,

- prononcer l'irrecevabilité des demandes formulées par la société Reconq Holding sans son liquidateur judiciaire pour défaut de qualité à agir,

- débouter la société Reconq Holding de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- juger qu'ils sont titulaires d'une créance de cinquante-huit mille neuf cent cinquante-sept euros et soixante-dix centimes à l'encontre de la société Reconq Holding (58 957,70 euros),

- fixer leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Reconq Holding pour la somme de cinquante-huit mille neuf cent cinquante-sept euros et soixante-dix centimes (58 957,70 euros),

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure de collective.

Par dernières conclusions du 15 janvier 2025, la société Reconq Holding prie la cour de :

- la déclarer recevable et fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* condamné M. et Mme [O] à lui payer la somme de 16 347 euros TTC, avec intérêts conventionnels correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal, à compter du 18 octobre 2019,

* condamné M. et Mme [O] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Y ajoutant,

- condamner M. et Mme [O] à lui payer la somme de 5 239,30 euros TTC, avec intérêts conventionnels correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal, à compter du 18 octobre 2019,

- condamner M. et Mme [O] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais engagés dans le cadre de l'instance d'appel,

En tout état de cause,

- débouter M. et Mme [O] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- débouter M. et Mme [O] de leur demande de fixation de créance,

- condamner M. et Mme [O] aux entiers dépens.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2025.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur le périmètre de saisine de la cour

A titre liminaire, il est rappelé qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, et qu'elle n'a donc pas à statuer sur des demandes qui n'y figurent pas. Ainsi la cour n'est pas saisie de la demande de résolution du contrat présentée par les époux [O] dans les conclusions mais non formulée dans le dispositif et la demande de dommages et intérêts formulée (développée ') également par les époux [O], dont le fondement juridique n'est pas précisé et qui n'est pas reprise dans le dispositif.

Sur la qualité à agir de la société Reconq Holding en son nom propre

A la suite de la réouverture des débats sur ce point, la société Reconq Holding estime que ses demandes formées en son nom propre sont recevables, tandis que les époux [O] soutiennent que la société Reconq Holding est irrecevable à agir sur le fondement de l'article L641-9 du code de commerce dans la mesure ou les demandes sont postérieures au prononcé de la liquidation judiciaire en tant qu'elles n'ont pas été reprises par le liquidateur.

Sur ce,

Il résulte de l'article L. 641-9, du code de commerce que « I. le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l'activité professionnelle, même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.

Toutefois, le débiteur peut se constituer partie civile dans le but d'établir la culpabilité de l'auteur d'un crime ou d'un délit dont il serait victime.

Le débiteur accomplit également les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné.

II. - Lorsque le débiteur est une personne morale, un mandataire peut être désigné, en cas de nécessité, au lieu et place des dirigeants sociaux par ordonnance du président du tribunal sur requête de tout intéressé, du liquidateur ou du ministère public. »

Il s'en déduit que le débiteur conserve une capacité à agir en justice pour des droits qui lui sont propres.

Il a en revanche été jugé que si le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens par sa liquidation judiciaire ne dispose en revanche d'aucun droit propre faisant échec à son dessaisissement au profit du liquidateur judiciaire pour l'exercice des actions tendant au recouvrement de ses créances (Cass, com. 18 sept. 2012, no 11-17.546 P ) et que « si le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens par sa liquidation judiciaire, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre de défendre aux instances relatives à la détermination de son passif et d'exercer un recours contre les décisions fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif, en revanche aucun droit propre ne fait échec à son dessaisissement pour l'exercice des actions tendant au recouvrement de ses créances ou à la mise en cause de la responsabilité d'un cocontractant. Il en résulte que si le débiteur est recevable, dans l'exercice de son droit propre, à contester la créance, objet de l'instance en cours, il n'est en revanche pas recevable à former seul, contre le créancier, à l'occasion de cette instance, une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts et en compensation des créances réciproques, qui relève du monopole du liquidateur » (Cass. com. 14 juin 2023 n° 21-24.143 F-B).

En l'espèce, l'instance en cours à hauteur d'appel vise à la réformation du jugement du 8 avril 2021 du tribunal judiciaire de Nanterre en ce qu'il a condamné les époux [O] à payer à la société Reconq Holding SAS la somme de 16.347 euros et à la fixation au passif de la société Reconq Holding de la créance des époux [O]. L'action de la société Reconq Holding a pour objet de recouvrer une créance qu'elle estime lui être due au titre des travaux effectués chez les époux [O].

Il ne s'agit donc pas d'une matière pour laquelle le débiteur dispose d'un droit propre de produire des conclusions de son propre chef, dérogeant au monopole du liquidateur judiciaire.

Dès lors, si la société Reconq Holding est recevable dans l'exercice de son droit propre à contester une créance, elle n'est en revanche pas recevable seul à former seule contre les époux [O] une demande en paiement, qui relève du monopole de son liquidateur.

Ainsi, au regard de la défaillance du liquidateur en l'espèce, les demandes en paiement de la société Reconq Holding sont irrecevables.

Sur les demandes en remboursement des époux [O]

Pour condamner les époux [O] à payer la somme de 16 347 euros TTC et rejeter la demande en restitution forcée des meubles, le tribunal, sur le fondement des articles 1103 et 1231-1 du code civil, a considéré que d'une part, le devis de fabrication de meuble émis le 17 mai 2019 n° I-19-05-48 avait été exécuté et que d'autre part, la clause de réserve de propriété figurant aux devis n'avait pas à s'appliquer du fait que les biens ont été incorporés à la maison des époux [O] et ne sauraient être détachés sans entrainer nécessairement des dommages, ce qui s'oppose à toute demande de restitution forcée.

Les époux [O] réfutent devoir les sommes réclamées au titre des travaux non devisés ou non acceptés, en raison de défauts et d'absence de finitions et de non-conformités relevés dans les travaux. Ils soutiennent que des dégradations de l'appartement et du mobilier ont été provoquées par la société Reconq Holding, que des meubles ont été endommagés et n'ont pas été fabriqués et posés dans les règles de l'art, que la société Reconq Holding n'a pas respecté un délai de fabrication et de pose des meubles, et qu'enfin, ils ont été contraints d'entreprendre de nouveaux travaux d'un montant de 37 197 euros qu'ils demandent à être fixés à la charge de la société Reconq Holding. Ils affirment avoir été trompés dans le choix de faire appel à la société Reconq Holding, au regard de la publicité mensongère de son site internet et de la personnalité de son gérant, M. [C] [Y] (condamné pour différentes infractions notamment blanchiment de fraude fiscale) ayant trait à une précédente activité professionnelle les faisant douter de son professionnalisme.

Ils réclament en conséquence la somme de 58.957,70 euros (soit 21.760,70 euros correspondant à la saisie-attribution effectuée sur leur compte bancaire en exécution du jugement + 37.197 euros correspondant au montant des travaux devisés qu'ils estiment devoir effectuer en réparation des dégradations et malfaçons causées par la société Reconq Holding SAS )

Au soutien de sa demande de confirmation du jugement et de débouté des demandes des époux [O], la société Reconq Holding, ne demande plus la restitution forcée des meubles mais uniquement le paiement des factures qu'elle a émises, demande qui est comme on l'a vu, jugée irrecevable. Elle allègue l'absence de possibilité d'accéder au chantier, en raison du changement de serrures, à compter du 15/10/2019 pour assurer les finitions. Elle fait valoir qu'elle a fabriqué un palier avec l'accord des époux [O], même sans devis signé, et qu'aucune inexécution suffisamment grave ne justifie qu'elle ait procédé à des travaux sans contrepartie financière. En réponse à l'exception d'inexécution soulevée par les époux [O] qui allèguent la dégradation de leur appartement et de leur mobilier, la société Reconq Holding expose qu'une présomption de responsabilité en matière de dégradation de meubles existe à l'endroit de celui qui détient la garde des meubles. En outre, elle relève que l'accès au chantier lui a été refusé de sorte que les défauts figurant sur les meubles et les finitions, à les supposer établis, ne lui sont pas imputables mais qu'ils le sont à la faute commise par les époux [O], au regard des conditions générales de vente, lesquelles précisent que tout empêchement d'accès de l'entreprise par les clients, suppose une acceptation parfaite du chantier en l'état et sans autre notification. La société Reconq Holding fait valoir enfin que les devis qu'elle a établis ne mentionnent ni délai ni date de fin de chantier fixée contractuellement avec les époux [O] et qu'en tout état de cause, les délais de réalisation ont été raisonnables en l'espèce, si bien qu'il ne peut lui être reproché une faute à cet égard.

Sur ce,

En application de l'article 1103 du code civil « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

Si l'article 1219 du code civil dispose qu'« une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave », l'article 1315 du même code dispose que « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ».

En l'espèce, au regard du devis n°I 19-05-48 signé par les époux [O], pour un montant de 47 245 euros TTC sur lesquels seuls 30 898 ont été acquittés, 16 347 euros restant dus.

Bien que le constat d'huissier effectué à la demande des époux [O] permette de mettre en exergue de très nombreux défauts indéniables (notamment l'absence de certains fileurs, les décalages de porte, le non-alignement des façades et des finitions différentes, des trous effectués par erreur au niveau des charnières, un défaut de planéité, des traces d'outils et de colle, des tâches, des rayures et différents vernis non homogènes sur les panneaux), ceux -ci relèvent pour l'essentiel d'un travail de qualité très médiocre et d'une absence de finitions. Ils sont d'ordre esthétique, comprenant des salissures et dégradations des murs autour des meubles livrés et montés. La gravité suffisante de ces malfaçons n'est pas démontrée dès lors que les choses livrées ne sont pas impropres à leur destination d'étagère de trappe, alors que les époux [O] n'ont pas donné accès au chantier après le 15 octobre à la société Reconq Holding, ce qui exclut toute possibilité de lever leurs réserves et de réparer ce qui pouvait l'être.

En outre, le constat d'huissier effectué à la demande de la société Reconq Holding mentionne que les clés qui lui ont été remises n'ouvrent plus le portail le 16 octobre 2019 et que les époux [O] ne répondent pas lorsque l'huissier sonne. Ces derniers ne contestent d'ailleurs pas dans leurs conclusions, avoir fait changer les serrures pour éviter toute intrusion de M. [C] [Y], le gérant de la société Reconq Holding, lequel avait quitté la réunion de fin de chantier avant la fin de celle-ci, le 15 octobre.

Le refus d'accès au chantier, après les réserves effectuées par les époux [O], doit donc s'analyser comme une renonciation à la rectification des réserves effectuées et donc à une acceptation parfaite des désordres, puisqu'il n'a pu y être remédié. S'il est précisé que M. [C] écrivait le 23 septembre 2019 que « pour information le palier n'a pas été devisé ni chiffré, j'ai vu les photos que vous avez adressé, malheureusement on est pas capable faire mieux, et par conséquent nous ne le facturerons pas » (sic), il ne fait pas état des autres meubles (dressing/vaisselier/ bibliothèque) objets du devis signé, pour lesquels celui-ci estime qu'il s'agit de finitions et de quelques rectifications. Les époux [O] qui ne pouvaient en conséquence exciper d'une exception d'inexécution de leur obligation de paiement du fait de l'impossibilité de lever les réserves faute d'accès possible au chantier, seront déboutés de leur demande de paiement des devis de reprise totale des meubles.

S'agissant de la demande la restitution de la somme saisie en exécution du jugement (21.760,70 euros), le sens du présent arrêt déclarant irrecevables les demandes de la société Reconq Holding, commande, sans qu'il y ait lieu à faire droit à une telle demande au regard de l'infirmation prononcée, que cette somme soit restituée aux époux [O], à l'exception de la somme relevant des dépens de première instance.

Ainsi, par ces motifs ajoutés à ceux du tribunal que la cour adopte, les époux [O] sont déboutés de leur demande de fixation au passif de la liquidation judiciaire d'une somme correspondant au montant des travaux devisés qu'ils estiment devoir effectuer en réparation des dégradations et malfaçons causées par la société Reconq Holding SAS et au paiement de la somme saisie sur leur compte bancaire en exécution du jugement.

Sur les autres demandes

Il résulte des articles 696 et 700 du code de procédure civile, que la partie perdante est condamnée, sauf décision contraire, aux dépens et aux frais exposés en vue du litige et non compris dans les dépens. Le montant de l'indemnité fixée au titre de l'article 700 précité est apprécié selon l'équité et la situation économique des parties

Les dispositions du jugement relatives aux dépens sont confirmées.

Les époux [O] succombant, ils sont condamnés ensemble aux dépens de la procédure d'appel et au regard du sens du présent arrêt (débouté des demandes des époux [O] et irrecevabilité des demandes de la société Reconq Holding), chaque partie conservera la charge de ses frais qu'elle a exposés au titre de l'article 700 du code de procédure cvile.

La demande au titre de ses frais irrépétibles de la société Reconq Holding faite en son nom propre est irrecevable.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par décision de défaut, mis à disposition,

Déclare irrecevables les demandes en paiement de la société Reconq Holding à l'encontre de M. [E] [O] et Mme [U] [S] épouse [O]

Infirme en conséquence le jugement en ce qu'il a :

- condamné M. et Mme [O] à payer à la société Reconq Holding, la somme de 16 347 euros TTC, avec intérêts conventionnels correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal, à compter du 18 octobre 2019,

- condamné M. et Mme [O] à payer à la société Reconq Holding la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

Déboute M. [E] [O] et Mme [U] [S] épouse [O] de leur demande de fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société Reconq Holding la somme de 58 957,70 euros,

Condamne M. [E] [O] et Mme [U] [S] épouse [O] aux dépens.

Déclare irrecevable la demande de la société Reconq Holding au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [E] [O] et Mme [U] [S] épouse [O] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que la somme saisie au titre de l'exécution du jugement doit être restituée M. [E] [O] et Mme [U] [S] épouse [O], en ce non compris les frais correspondant aux dépens exposés en première instance.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Florence PERRET, Présidente et par Madame FOULON, Greffière , auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, La Présidente,

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