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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 2, 18 septembre 2025, n° 24/02060

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 24/02060

18 septembre 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 18/09/2025

N° de MINUTE :

N° RG 24/02060 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VQ27

Décision (N° 2022003695) rendue le 19 avril 2023 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

APPELANTE

SAS Kiloutou agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Christian Hanus, avocat constitué, substitué par Me Dominique Lelièvre, avocats au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉE

Société HAD-OC Solutions prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Jérémy Balzarini, avocat au barreau de Montpellier, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 03 juin 2025 tenue par Anne Soreau magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Stéphanie Barbot, présidente de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Anne Soreau, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 6 mai 2025

****

EXPOSE DES FAITS :

Par contrat de location du 3 mai 2018, la société HAD-Oc Solutions (la société Had-Oc) a loué auprès de la société Kiloutou une pelleteuse.

Le 14 mai 2018, la société Kiloutou a déclaré le vol de ce matériel à la gendarmerie.

Par acte du 11 février 2022, la société Kiloutou a assigné la société Had-Oc devant le tribunal de commerce de Lille Métropole afin d'obtenir à titre principal le paiement de la franchise prévue dans le contrat en cas de vol ou de détérioration du matériel loué.

Par jugement du 19 avril 2023, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

- débouté la société Kiloutou de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné cette dernière à payer à la solution Had-Oc la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par déclaration du 24 avril 2024, la société Kiloutou a relevé appel de l'entière décision.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par conclusions récapitulatives notifiées par la voie électronique le 17 janvier 2025, la société Kiloutou demande à la cour de :

Vu les articles 1103, 1231 et suivants, 1344-1 du code civil,

Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Condamner la société Had-Oc à lui payer les sommes de :

6 000 euros correspondant au principal, outre les intérêts judiciaires à compter de la mise en demeure du 2 février 2021 avec capitalisation ;

900 euros à titre de dommages et intérêts contractuels ;

Les pénalités légales de retard conformément à l'article L.441-6 du code de commerce, au taux égal à trois fois l'intérêt légal en cours, fixé par l'article 15 des conditions générales de location ;

40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article D.441-5 du code de commerce ;

4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société Had-Oc aux entiers frais et dépens d'instance et d'appel, outre le remboursement des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire dont elle s'est acquittée, soit 1 513 euros.

La société Kiloutou fait valoir que :

Contrairement à ce que prétend le tribunal de commerce dans son jugement, c'est bien le matériel loué à la société Had-Oc, identifié sur le contrat de location du 30 avril 2018, le procès-verbal d'infraction initial et la facture du 24 mai 2018, sous le numéro de parc 10857, qui a fait l'objet d'un vol ;

Elle s'est rendue sur chantier le 7 mai 2018 mais n'a pu récupérer la pelleteuse qui était détériorée ; elle a dû reporter l'enlèvement pour chercher un camion équipé d'une grue, permettant l'enlèvement du matériel ; en revenant sur le chantier le 9 mai 2018, la pelleteuse n'était plus à son emplacement et elle en a immédiatement déclaré le vol après avoir effectué des recherches infructueuses ; aucun autre élément que la disparition n'a pu être constaté dans la mesure où le chantier de la société Had-Oc était un chantier ouvert, et qu'il appartenait à cette dernière de le sécuriser ;

La société Had-Oc, en qualité de locataire, avait l'obligation de restituer le bien loué, et cette obligation n'a pas été remplie ;

Elle est intervenue pour reprendre le matériel le 1er jour ouvré suivant la demande de reprise de la société Had-Oc, et donc dans un délai raisonnable, le terme de la location étant le vendredi 4 mai et son intervention datant du 7 mai ;

L'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de récupérer le matériel lors de son passage le 7 mai résulte des dommages occasionnés au matériel alors que celui-ci se trouvait sous la garde de la société Had-Oc ;

L'article 12 du contrat, accepté par la société Had-Oc, prévoit que la garde juridique de la chose et la responsabilité qui s'ensuit, ne cesse pas à la demande de reprise mais à la reprise effective du matériel ;

En application de l'article 1732 du code civil, le locataire répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute ;

La société Had-Oc est responsable de la détérioration du matériel mais aussi de son vol dont les conséquences sont pour elle de payer la franchise contractuelle de 5 000 euros HT, soit 6 000 euros TTC en application de l'article 7 du contrat et l'article 6 de la notice d'assurance remise au locataire ;

Sur le caractère prétendument disproportionné du contrat : la société Had-Oc a librement accepté les conditions du contrat, elle a contracté avec elle à plusieurs reprises en 2018. Le locataire pouvait se fournir auprès d'un autre loueur de matériel de chantier et également choisir le retrait-restitution du matériel en magasin, la livraison-reprise n'étant qu'un service offert par elle, société Kiloutou ;

La société Had-Oc ne caractérise pas le déséquilibre significatif qui affecterait les conditions générales de location ;

Le transfert de la garde du matériel ne peut intervenir que lors de la reprise effective du bien loué par le locataire qui doit avoir été informé de la disponibilité du bien selon les modalités prévues au contrat ; il faut aussi que le matériel soit accessible au loueur et en état d'être repris.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 18 octobre 2024, la société Had-Oc demande à la cour de :

Vu les articles 1103, 1119, 1171 et 1353 du code civil,

Vu l'article L.442-1 du code de commerce,

Vu l'article 9 du code de procédure civile,

Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

En ce sens,

A titre principal,

Juger que la société Kiloutou n'établit pas la preuve de la matérialité et des circonstances d'un prétendu vol ;

A titre subsidiaire,

Juger que l'article 12 des conditions générales de location crée un déséquilibre significatif entre les parties ;

Juger, par voie de conséquence, que l'article 12 des conditions générales de location est réputé non écrit ;

Juger que la société Kiloutou a commis des manquements contractuels, cause exclusive du prétendu vol de la pelleteuse ;

En tout état de cause,

Débouter la société Kiloutou de l'ensemble de ses demandes.

La société Had-Oc réplique que :

Elle a loué la pelleteuse le 3 mai 2018 pour une journée et appelé la société Kiloutou le même jour pour organiser le retrait ; celle-ci est venue sur la zone, mais ne s'est pas rendue sur le site de livraison pour charger la pelleteuse ; le 10 mai, la société Kiloutou l'a appelée pour lui signaler que le bloc numérique de la pelleteuse avait été arraché ; le 24 mai, la société l'a appelée à nouveau pour indiquer qu'elle n'était plus sur le site ; elle a mis 20 jours pour procéder au retrait de son engin ;

La société Kiloutou ne rapporte pas la preuve que la pelleteuse déclarée volée à la gendarmerie serait celle qu'elle, société Had-Oc, avait louée ; le numéro de série présent sur le dépôt de plainte (AHNM22712) n'est aucunement indiqué sur le bon de réservation ou les factures liant les parties ;

les déclarations d'un vol entre le 7 et le 9 mai 2018 ne sont soutenues par aucun autre élément probant circonstancié : la société Kiloutou ne produit pas la déclaration de sinistre à son assureur, ne justifie pas de l'acquisition d'un engin de même type à la suite du vol allégué, ni de la prise en charge par son assureur du coût de remplacement du matériel, ni de l'application d'une franchise ; elle ne verse pas aux débats son contrat d'assurance qui justifierait une telle franchise ;

conformément à la durée de location prévue au contrat, la société Kiloutou se devait d'anticiper la reprise du véhicule et s'assurer de la disponibilité du matériel de transport et du personnel compétent pour le récupérer ;

Le contrat est un contrat d'adhésion dont la société utilisatrice ne peut qu'accepter les termes en l'état ;

Il existe un déséquilibre significatif entre les parties à l'article 12 des conditions générales de location, cette clause réservant le droit discrétionnaire pour le loueur de venir récupérer le matériel loué, quand il le souhaite, dans l'irrespect absolu des dispositions contractuelles qu'il régularise avec son co-contractant ; la durée de la location indiquée au contrat est purement indicative pour le loueur, tandis qu'elle est impérative pour le preneur ; cette clause doit donc être réputée non écrite ;

cette clause étant réputée non écrite, le locataire n'était tenu à la garde de la pelleteuse que le temps de la location et le transfert des risques au profit de la société Kiloutou est bien intervenu le 4 mai 2018 à 8 heures 21, après qu'elle-même, société Had-Oc, a dûment informé la société Kiloutou de la mise à disposition du matériel ; le temps de location contractuellement prévu et le règlement spécifique des frais de retour démontrent que l'esprit du contrat prévoyait un engagement de reprise de l'engin dès le 4 mai à 8 heures 21 avec transfert de garde ; si le loueur était venu rechercher son matériel aux date et heure convenues, il n'y aurait eu aucune difficulté puisqu'il était en bon état de fonctionnement et à disposition ;

la société Kiloutou ne peut prétendre que le contrat s'est prolongé, puisqu'une prolongation est conditionnée à l'émission d'un bon et que la facture du 24 mai 2018 prévoit bien un temps de location d'une journée du « jeudi 3 mai 2018 9 heures 05 au jeudi 3 mai 2018 inclus »

il résulte des échanges de courriels que la société Kiloutou est venue reprendre le matériel le 7 mai 2018, puis le 10 mai 2018 ; elle prétend que le matériel aurait été endommagé en produisant une photographie sans force probante ; en admettant que le dommage soit réel, il appartenait au loueur, puisque la garde était transférée, d'assurer la conservation du véhicule ;

les conditions générales du contrat vont à l'encontre des conditions particulières stipulant une reprise au 4 mai à 8 heures 21, les conditions particulières doivent donc primer en application de l'article 1119 du code civil.

MOTIVATION :

En application des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Selon l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier du paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Concernant la formation du contrat, l'article 1113 du code civil indique que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager et l'article 1119 du même code précise que :

« les conditions générales invoquées par une partie n'ont effet à l'égard de l'autre que si elles ont été portées à la connaissance de celles-ci et si elles les a acceptées.

En cas de discordance entre des conditions générales invoquées par l'une et l'autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet.

En cas de discordance entre les conditions générales et des conditions particulières, les secondes l'emportent sur les premières ».

En l'espèce, le contrat de location du 3 mai 2018, conclu entre la société Kiloutou et la société Had-Oc pour la location d'une pelleteuse 1.2t, prévoit une location « du jeudi 3 mai 2018 à 07:22 au vendredi 4 mai 2018 à 08:21 » et mentionne la remise au preneur, qui en accepte les termes, des conditions générales de location. Il prévoit également la livraison et la reprise du véhicule loué par la société Kiloutou, ce que cette dernière ne conteste pas (pièce 1 de la société Had-Oc).

Les conditions générales de vente, produites aux débats (pièce 7 Kiloutou) prévoient de leur côté :

à l'article 2 relatif à la durée de location, que la location prend effet au moment où le matériel est mis à disposition du locataire. Cette date est fixée sur le contrat ou le bon de livraison. Lors de la remise du matériel la charge est transférée au locataire qui en assume la garde matérielle et juridique sous sa responsabilité. La location et la garde juridique prennent fin le jour où la totalité du matériel est restituée par le locataire en agence ou reprise par Kiloutou sur site du locataire ;

à l'article 7, 2/ relatif aux dommages au bien loué, que le locataire est responsable de l'utilisation du matériel et des dommages subis par ce matériel. Il assume la charge des conséquences financières des sinistres survenus pendant sa location. En cas de vol, le montant à la charge du locataire est égal à 5 000 euros HT (6 000 euros TTC) ou à la valeur résiduelle du matériel si elle est inférieure ;

à l'article 12, alinéa 1, relatif à la restitution, que, en cas de reprise par Kiloutou, le locataire doit informer Kiloutou par écrit de la disponibilité du matériel avec un préavis raisonnable et suffisant en précisant le lieu où il se trouve. Le matériel à reprendre doit être accessible par Kiloutou. Le locataire reste tenu de toutes les obligations découlant du contrat jusqu'à récupération effective par Kiloutou, il reste gardien de la chose louée et s'engage à la conserver sous surveillance. Le matériel n'est considéré restitué et la garde transférée à Kiloutou qu'après remise d'un bon de retour signé d'un salarié de Kiloutou. La restitution est obligatoire à l'expiration de la durée de location sans qu'il y ait lieu d'adresser une mise en demeure ;

à l'article 12, alinéa 2, que le locataire est tenu de rendre le matériel en bon état et en conformité avec tous les accessoires et équipements, notamment dispositifs de sécurité, nettoyé et au même niveau de carburant qu'à la mise à disposition. En cas de reprise de matériel par Kiloutou, en l'absence du locataire, un courrier mentionnant les éventuels dégâts apparents est envoyé au locataire, qui dispose de 5 jours pour faire état de ses observations par écrit ou en venant en agence.

Il n'apparaît pas, à la lecture de ces stipulations, et notamment de celles de l'article 12, de discordance entre les conditions particulières et les conditions générales du contrat, ni de déséquilibre significatif créé entre les parties au détriment de la société Had-oc.

En effet, si les conditions particulières du contrat fixent les dates de location, ce sont les conditions générales du contrat qui organisent la restitution entre les parties ; ces deux clauses sont donc complémentaires et doivent être lues de manière combinée.

Selon l'accord des parties, la date de fin de location est fixée au vendredi 4 mai à 8 heures 21 selon les conditions particulières du contrat, d'une part, le locataire ne peut exiger une reprise hors des heures d'ouverture des agences et doit accorder au loueur un préavis nécessaire et suffisant pour récupérer son bien, selon les conditions générales du contrat, d'autre part.

Ce délai nécessaire et suffisant pour la récupération du bien éclaire les conditions de gardiennage et de surveillance de la chose louée, décrites dans la suite de l'article.

Ainsi, ces dispositions ne créent pas de déséquilibre au détriment de l'une ou l'autre des parties, mais assurent au contraire une certaine souplesse, permettant au loueur d'organiser la reprise de son matériel, d'une part, et donnant au preneur la faculté de prolonger la durée de location s'il le souhaite, d'autre part.

En faisant application à la fois des conditions particulières et des conditions générales du contrat, et non des unes plutôt que des autres, la société Kiloutou ne peut donc exiger de la société Had-Oc, qu'elle assure la garde de l'engin, avec les frais et les responsabilités qui en découlent, selon son bon vouloir, si elle-même ne respecte pas les dates de location prévues par le contrat, et la reprise dans un délai raisonnable et suffisant qui se déduit de la lecture de l'article 12 des conditions générales.

La société Kiloutou ne conteste pas le fait que la société Had-Oc l'ait informée de la disponibilité du matériel pour reprise concomitamment à l'expiration du contrat de location puisqu'elle indique s'être présentée le 7 mai qui correspondait au « premier jour ouvré suivant la demande de reprise ».

Cependant, la société Had-Oc ne verse aux débats aucune pièce, et notamment pas d'écrit, prouvant la date exacte à laquelle elle a avisé la société Kiloutou de la possibilité qu'elle avait de récupérer le matériel.

Dans ces conditions, en considérant que cet avertissement est intervenu au plus tard à la date du lundi 7 mai, avancée par la société Kiloutou comme étant celle à laquelle elle serait venue reprendre la pelleteuse louée, la cour d'appel estime que cela constitue un délai de reprise raisonnable au sens de l'article 12 précité, en tenant compte du week-end au cours duquel la reprise du véhicule pouvait s'avérer plus difficile à organiser, voire impossible.

La société Kiloutou indique s'être rendue sur le site du retrait le lundi 7 mai 2018, et avoir constaté que le matériel avait été dégradé, ce qui aurait retardé sa récupération au mercredi 9 mai, date à laquelle il aurait disparu.

Toutefois, cette dernière, d'une part, ne démontre par aucune pièce s'être rendue sur le site de livraison, le 7 mai 2018 ou encore le 9 mai, ses seules affirmations sur ce point, notamment dans un courriel adressé à la société Had-Oc le 11 mai 2018 seulement, étant insuffisantes. On peut d'ailleurs s'étonner qu'un tel courriel n'ait pas été adressé à la société Had-Oc dès le 7 mai, en cas de déplacement sur site avec constat de dégradations sur la pelleteuse ce jour-là.

D'autre part, à supposer un déplacement le 7 mai, la société Kiloutou ne verse aucune pièce, aucun constat notamment, propre à démontrer que le matériel loué aurait été dégradé, se contentant d'éditer dans ses conclusions la photo d'une partie d'engin aux fils déconnectés, le numéro d'identification du véhicule photographié étant illisible. Rien ne permet de dater cette photo ni de dire qu'elle concernait la pelleteuse louée ni, partant, d'en déduire que celle-ci était hors d'état de redémarrer, ce qui aurait nécessité une prise en charge par un camion grue.

Le seul élément objectif de datation d'une tentative de reprise, mise en échec par la disparition du matériel, qui pourrait être retenue, est le dépôt d'une plainte pour vol de matériel, effectué par la société Kiloutou le 14 mai.

Néanmoins, cette plainte vise « une pelleteuse de marque Bobcat, 1 tonne 3, n°AHNM22712, n° de parc 10 857 », dont on ne peut certifier qu'elle corresponde au véhicule loué, le contrat de location portant sur « une pelleteuse 1.2t chenilles caoutchouc, canopy », sans plus de précisions. Par ailleurs, à supposer que le matériel objet de la plainte corresponde bien à celui loué, une venue de la société Kiloutou en vue de le reprendre le 14 mai 2018 seulement, alors qu'elle n'a pas contesté avoir été avisée par la société Had-Oc, au plus tard le 5 mai, de la disponibilité du matériel pour reprise, ne constituerait plus un délai raisonnable. Le contractant ne peut en effet exiger du locataire une obligation de surveillance 9 jours après la fin de la location

Ainsi, la société Kiloutou ne justifie pas de la date à laquelle elle s'est présentée pour récupérer son matériel, ni des circonstances qui l'aurait empêchée de le récupérer.

Elle ne démontre pas être venue dans un délai raisonnable ni ne peut, dès lors, exiger la prise en charge par la société Had-Oc de frais liés à la disparition du véhicule loué.

La société Kiloutou doit en conséquence être déboutée de sa demande de paiement de la somme de 6 000 euros ainsi que ses demandes visant à l'obtention des dommages et intérêts contractuels, des pénalités légales de retard et de l'indemnité forfaitaire prévus aux articles L.441-6 et D. 441-5 du code de commerce.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la société Kiloutou de l'ensemble de ses demandes.

Sur les mesures accessoires :

La société Kiloutou, qui succombe, assumera les entiers dépens d'appel et sera condamnée à verser à la société Had-Oc une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La demande de la société Kiloutou à ce titre sera rejetée.

La décision entreprise sera confirmée du chef des dépens et de l'indemnité procédurale de première instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME en toutes ses dispositions la décision entreprise ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Kiloutou aux entiers dépens d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE la demande de la société Kiloutou et la CONDAMNE à verser à la société Had-Oc Solutions la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier

Marlène Tocco

La présidente

Stéphanie Barbot

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