CA Aix-en-Provence, ch. 3-2, 18 septembre 2025, n° 24/07126
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 18 SEPTEMBRE 2025
Rôle N° RG 24/07126 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNEMI
[L] [J]
C/
S.E.L.A.R.L. [19]
Copie exécutoire délivrée
le : 18 septembre 2025
à :
Me [Localité 20] [Localité 17]
Me Julie GIANELLI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 30 Mai 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2024F2.
APPELANT
Monsieur [L] [J]
né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 18], de nationalité française, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Romain CALLEN de la SELARL ROMAIN CALLEN, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
S.E.L.A.R.L. [19]
prise en la personne de Maître [X] [N], ès qualités de liquidateur de la SARL [22], fonctions auxquelles elle a été nommée suivant ordonnance du Président du Tribunal de commerce en date du 19 janvier 2023, dont le siège social est sis [Adresse 3] inscrite au RCS de TOULON sous le n° D [N° SIREN/SIRET 10]
représentée par Me Julie GIANELLI, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Juin 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère rapporteure
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2025.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2025,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre et Madame Chantal DESSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société [22] est une société à responsabilité limitée immatriculée au RCS de [Localité 21] depuis le 20 novembre 2000. La gérance est assurée par Monsieur [L] [J].
Elle exploitait un fonds de commerce dont l'activité était l'achat, la vente, la location de véhicules et bateaux neufs et occasion, de tous accessoires connexes et lubrifiants, ainsi que la mécanique générale auto, moto et bateaux.
Le local au sein duquel l'activité était exploitée a subi un incendie le 26 septembre 2009.
À la suite de ce sinistre, le bail commercial a été résilié par les bailleurs à la date du 16 février 2010.
Suivant jugement en date du 24 septembre 2015, le tribunal de commerce de Toulon, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamné la société [16] au paiement de la somme globale de 684.380,59 euros, se décomposant comme suit :
- 106.325,19 euros au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation,
- 578.055,40 euros au titre de l'indemnité pour perte du fonds.
Par ordonnance de référé du 19 février 2016, le premier président de la cour d'appel a, notamment':
- dit que l'exécution provisoire du jugement rendu le 24 septembre 2015 par le tribunal de commerce de Toulon est subordonnée à l'inscription par [L] [J] au profit de la SA [16], en garantie des restitutions ou réparations qui seraient dues par la SARL [22] à la suite de l'arrêt à intervenir sur l'appel du jugement précité, d'une hypothèque à hauteur de 690 000 euros sur le bien immobilier situé [Adresse 1] commune de Le Beausset cadastré section A1 n° [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], A1 n° [Cadastre 8] et [Cadastre 9] et AK n° [Cadastre 11] ;
- dit que l'exécution provisoire du jugement susvisé est suspendue tant que cette garantie n'aura pas été constituée par [L] [J] ;
- dit que la société [16] devra régler à la SARL [22] les sommes qu'elle doit lui payer en exécution du jugement du 24 septembre 2015 dans les quinze jours de la justification de la constitution de la garantie susvisée par [L] [J].
La société [15] a versé les sommes dues à la société [22] en exécution de la condamnation.
Suivant arrêt en date du 14 septembre 2017, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon en toutes ses dispositions et débouté la société [22] de l'ensemble de ses demandes.
Suivant arrêt en date du 22 novembre 2018, la Cour de cassation a'cassé partiellement l'arrêt en ce qu'il a débouté la société [22] de sa demande au titre de l'indemnité de perte d'exploitation et renvoyé les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Suivant arrêt en date du 24 octobre 2019, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a alloué une somme provisionnelle de 20 691 euros à la société [22], dans l'attente de la liquidation du préjudice d'exploitation dans le cadre d'une expertise judiciaire.
La société a été radiée du Registre du commerce et des sociétés le 23 septembre 2021.
Suivant exploit d'huissier en date du 21 juin 2022, la société [16] a fait signifier à la société [22] un commandement de payer la somme de 844 871,77€ au titre de la créance de restitution de la somme versée, des intérêts et frais irrépétibles, soustraction faite de la somme allouée à titre provisionnel, transformé en procès-verbal de recherches infructueuses.
Saisi par assignation de la société [16], le tribunal de commerce de Toulon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société [22] suivant jugement en date du 20 septembre 2022, et désigné Maître [Z] [C] en qualité de liquidateur judiciaire.
La société [22] n'a pas comparu à cette audience.
Suivant ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulon en date du 19 janvier 2023, la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] a été désignée en remplacement de la SELU [Z] [C].
Suivant arrêt de cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2024, statuant sur renvoi de la Cour de cassation, le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon le 24 septembre 2015 a été infirmé en ce qu'il a condamné la SA [13] à payer la somme de 106.325,60 euros au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence a fixé la somme due au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation à la somme de 38.216,60 euros hors déduction de la provision déjà versée d'un montant de 20.691 euros.
Suivant jugement en date du 30 mai 2024 et retenant les griefs élevés par le liquidateur, le tribunal de commerce de Toulon, saisi par le liquidateur ès qualités, a':
- dit que Monsieur [J] [L] a commis des fautes de gestion qui ont contribué à l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société [22] ;
- déclaré Monsieur [J] [L] responsable de l'insuffisance d'actif de la société [22] à concurrence de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ;
- condamné Monsieur [J] [L] au paiement de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L651-2 du code de commerce ;
- dit que la somme sera payable entre les mains de SELARL [19] prise en la personne de Me [X] [N] dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
- passé les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Suivant déclaration d'appel en date du 5 juin 2024, Monsieur [L] [J] a interjeté appel du jugement du 30 mai 2024 rendu par le tribunal de commerce de Toulon.
Selon conclusions notifiées par la voie du RPVA le 19 juillet 2024, M. [J] demande à la cour de':
Recevoir Monsieur [L] [J] en son appel et le déclarer bien fondé';
Infirmer la décision déférée en ce qu'elle a :
- dit que Monsieur [J] [L] a commis des fautes de gestion qui ont contribué à l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société [22] ;
- déclaré Monsieur [J] [L] responsable de l'insuffisance d'actif de la société [22] à concurrence de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ;
- condamné Monsieur [J] [L] au paiement de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L651-2 du code de commerce ;
- dit que la somme sera payable entre les mains de SELARL [19] prise en la personne de Me [X] [N] dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
Statuant à nouveau,
Débouter la SELARL [19] ès qualités de toutes ses demandes fins et conclusions;
Subsidiairement, et à défaut,
Ramener le montant de la condamnation à plus justes proportions ;
Statuer ce que de droit sur les dépens.
A l'appui de ses demandes, M. [J] soutient que c'est par la délivrance de l'assignation aux fins de condamnation à supporter l'insuffisance d'actif qu'il a appris l'existence d'une procédure collective frappant la société [23]alors que la compagnie [12] est à l'origine de cette procédure collective et n'ignorait pas qu'il avait mis sa société en sommeil et ne pouvait être joignable à l'adresse de la société.
Selon M. [J], le fait de ne pas avoir indiqué au RCS l'adresse personnelle du dirigeant ne peut être constitutif en soi d'une faute de gestion au sens des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce.
Il conteste toute faute de gestion ou agissements répréhensibles, soutient avoir au contraire apporté la meilleure des garanties avec l'hypothèque en rang utile sur son bien immobilier propre, et observe que la société [16] n'a pas à ce jour mis en oeuvre ladite hypothèque.
Enfin, il rappelle le principe de proportionnalité.
Selon conclusions notifiées le 12 mai 2025, la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] demande à la cour de':
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon le 30 mai 2024 en toutes ses dispositions';
Débouter Monsieur [L] [J] de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions':
Subsidiairement,
Prononcer qu'il existe une insuffisance d'actif qui s'élève à 883.541,36 euros, dans la liquidation judiciaire de la société [22]';
Prononcer l'existence de fautes de gestion commises par Monsieur [L] [J]';
Prononcer que les fautes de gestion commises par Monsieur [L] [J] sont à l'origine de cette insuffisance d'actif';
Condamner Monsieur [L] [J] à payer à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22], la somme de 883.541,36 euros, montant de l'insuffisance d'actif définitivement acquise';
En toute hypothèse,
Condamner Monsieur [L] [J] à payer à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22], la somme de 4.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner Monsieur [L] [J] aux entiers dépens.
Le liquidateur reproche deux fautes de gestion à M. [J]': l'absence de restitution de l'indemnité d'assurance et la méconnaissance de l'existence de la procédure collective et l'absence de rectification de l'adresse de la société.
A l'appui de ses demandes, le liquidateur ès qualités fait valoir que la société [22] a bénéficié de liquidités d'un montant de 684.380,59 euro en exécution d'un jugement de première instance rendu en 2015, lesquelles auraient dû être restituées dès l'arrêt d'appel l'infirmant rendu en 2017 et que les liquidités versées au bénéfice de la société n'ont jamais été restituées, ont produit intérêts, et viennent désormais grever le passif de celle-ci.
Il soutient que M. [J] n'a pris aucune mesure pour garantir une éventuelle restitution malgré le caractère non définitif de la créance et des contestations dont elle faisait l'objet et qu'il a agi en toute connaissance de cause et n'a pu être guidé que par une pensée spéculative.
Il soutient qu'une restitution antérieure par le dirigeant aurait notamment permis de réduire le passif de la société, puisque la somme a très lourdement produit intérêt.
Selon le liquidateur, Monsieur [J] ne saurait soutenir qu'aucune faute de gestion ne peut être mise à sa charge en raison de l'absence de mise en oeuvre d'une procédure de saisie immobilière sur le bien donné qu'il avait mis en garantie et soutient qu'il lui est était parfaitement loisible, avant l'ouverture de la procédure collective, de procéder à une vente amiable du bien immobilier, d'une valeur substantielle, pour désintéresser le créancier assureur.
Il observe que Monsieur [J] invoque sa situation personnelle mais ne fournit aucun élément permettant de l'apprécier.
Selon le liquidateur, la mise en sommeil dont Monsieur [J] se prévaut pour expliquer son ignorance de la procédure ne pouvait durer que deux ans et il lui appartenait de compléter sa déclaration de cessation temporaire d'activité par un changement d'adresse personnelle du gérant auprès du Registre du commerce et des sociétés, ce qu'il s'est abstenu fautivement de faire.
Il soutient que son absence de connaissance de la procédure collective, et en conséquence de son absence de coopération avec les organes de la procédure a eu notamment pour conséquence de priver le liquidateur de toute chance de réalisation d'actif, et a donc contribué à l'insuffisance d'actif de la société [22].
Selon avis notifié par RPVA le 22 avril 2025, le ministère public s'en rapporte sur les mérites de l'appel.
Les parties ont été avisées le 20 juin 2024 de la fixation de l'affaire à bref délai à l'audience du 4 juin 2025 et de la date prévisible de la clôture.
La clôture a été prononcée le 15 mai 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
'
La cour n'étant saisie d'aucun moyen de contestation de la recevabilité de l'appel, il est sans objet de statuer sur la demande de l'appelant tendant à le recevoir en son appel.
Sur l'insuffisance d'actif
'
L'article L.651-2 du code de commerce dispose que : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.»
'
La'charge'de la'preuve'de l''insuffisance'd''actif'pèse sur le demandeur à l'action en responsabilité pour'insuffisance'd''actif.
'
En application du texte susvisé, doivent être établis :
1-une insuffisance d'actif,
2-une ou plusieurs fautes de gestion, excédant la simple négligence, imputables à Monsieur [F] [O],
3-un lien de causalité entre la ou les fautes commises et l'insuffisance d'actif.
Sur l'insuffisance d'actif
L'insuffisance d'actif correspond à la différence entre le passif déclaré antérieur à l'ouverture de la procédure collective et l'actif. Il n'est pas nécessaire qu'elle soit chiffrée ni définitive ; il suffit qu'elle soit certaine. L'existence et le montant de l'insuffisance d'actif sont appréciés au moment où statue la juridiction saisie de l'action.
Selon les éléments communiqués par le liquidateur, non contestés par M. [J], le passif déclaré dans le cadre de la procédure s'élève à la somme de 883 541,36 euros.
Aucune réalisation d'actif n'a pu être opérée, ce dont il résulte une insuffisance d'actif à hauteur de 883 541,36 euros.
- Sur le défaut de remboursement de l'indemnisation d'assurance
M. [J] ne conteste pas que sa société n'a pas remboursé la moindre somme à la compagnie d'assurances mais reporte, de mauvaise foi, la faute sur cette dernière arguant qu'elle aurait dû mettre en 'uvre l'hypothèque inscrite à son profit sur son bien immobilier.
C'est en réalité à M. [J] qu'il appartenait de mettre en 'uvre toutes les mesures utiles pour que société [22] rembourse les sommes dues, par exemple en vendant son bien immobilier à l'amiable ' et il lui appartenait de se mettre en état de rembourser dès l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 14 septembre 2017 qui avait infirmé le jugement du tribunal de commerce du 24 septembre 2015, ce qu'il s'est gardé de faire compte tenu de l'absence totale de remboursement des sommes dues.
En outre, il sera rappelé que le créancier est maître du choix de ses poursuites et qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas mis en 'uvre une procédure coûteuse et potentiellement soumise à aléa.
En s'abstenant de rembourser la moindre somme, non seulement M. [J] est à l'origine dudit passif constitué des sommes versées par la société [14] mais il est également à l'origine des intérêts de retard sur les sommes dues.
- Sur le défaut de démarches pour changer l'adresse de la société
M. [J] ne conteste pas sa carence mais c'est à tort qu'il fait valoir la mise en sommeil de sa société comme une démarche suffisante de gestion.
En effet, la cessation temporaire d'activité d'une société ne peut durer que deux années et à l'issue de ce délai, le greffier du tribunal de commerce peut, en application de l'article R123-130 du code de commerce, ordonner la radiation de la société, radiation qui est d'ailleurs intervenue le 23 septembre 2021.
Cette déclaration de cessation temporaire d'activité n'a, de plus, pas été complétée par un changement d'adresse personnelle du gérant auprès du Registre du commerce et des sociétés lequel mentionne dès le 15 juin 2012 que «le dirigeant n'habite pas à l'adresse indiquée ».
M. [J] ne pouvait ignorer qu'en ne mentionnant pas sa nouvelle adresse au Registre du commerce des sociétés, il ne pouvait être joint en sa qualité de gérant de la société.
Ce défaut qui résulte d'un désintérêt total de sa part pour la société est constitutif d'un défaut de collaboration avec les organes de la procédure, excède la simple négligence et constitue une faute de gestion.
En manquant à son obligation de collaboration, M. [J] a privé le liquidateur de toute information lui permettant de réaliser le moindre actif. Par sa carence, il a nécessairement fait durer plus longtemps que nécessaire la procédure collective, ce qui a eu pour effet l'augmentation des intérêts produits par les sommes dues.
Sur le lien de causalité qui existe entre les fautes commises et l'insuffisance d'actif
La cour considère comme les premiers juges que les deux fautes de gestion reprochés par le liquidateur sont caractérisées.
Compte tenu de la gravité des fautes retenues à l'encontre de M. [J], du désintérêt total qu'il a manifesté pour sa société confinant à la mauvaise foi, c'est de manière fondée et proportionnée que les premiers juges ont condamné M. [J] au paiement de la somme de 883 541,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif.
En conséquence, le jugement querellé sera confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires
'
M. [J] succombant sera condamné aux dépens d'appel.
En équité, il sera condamné à payer la somme de 2 000 euros à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
'
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe,
Déclare sans objet la demande de M. [L] [J] tendant à ce que l'appel soit déclaré recevable;
Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions';
Condamne M. [L] [J] à payer la somme de 2000 euros à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';
'
'Condamne M. [L] [J] aux dépens'd'appel.
'
LA GREFFIÈRE,''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''' LA PRÉSIDENTE,
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 18 SEPTEMBRE 2025
Rôle N° RG 24/07126 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNEMI
[L] [J]
C/
S.E.L.A.R.L. [19]
Copie exécutoire délivrée
le : 18 septembre 2025
à :
Me [Localité 20] [Localité 17]
Me Julie GIANELLI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 30 Mai 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2024F2.
APPELANT
Monsieur [L] [J]
né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 18], de nationalité française, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Romain CALLEN de la SELARL ROMAIN CALLEN, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
S.E.L.A.R.L. [19]
prise en la personne de Maître [X] [N], ès qualités de liquidateur de la SARL [22], fonctions auxquelles elle a été nommée suivant ordonnance du Président du Tribunal de commerce en date du 19 janvier 2023, dont le siège social est sis [Adresse 3] inscrite au RCS de TOULON sous le n° D [N° SIREN/SIRET 10]
représentée par Me Julie GIANELLI, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Juin 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère rapporteure
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2025.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2025,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre et Madame Chantal DESSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société [22] est une société à responsabilité limitée immatriculée au RCS de [Localité 21] depuis le 20 novembre 2000. La gérance est assurée par Monsieur [L] [J].
Elle exploitait un fonds de commerce dont l'activité était l'achat, la vente, la location de véhicules et bateaux neufs et occasion, de tous accessoires connexes et lubrifiants, ainsi que la mécanique générale auto, moto et bateaux.
Le local au sein duquel l'activité était exploitée a subi un incendie le 26 septembre 2009.
À la suite de ce sinistre, le bail commercial a été résilié par les bailleurs à la date du 16 février 2010.
Suivant jugement en date du 24 septembre 2015, le tribunal de commerce de Toulon, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamné la société [16] au paiement de la somme globale de 684.380,59 euros, se décomposant comme suit :
- 106.325,19 euros au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation,
- 578.055,40 euros au titre de l'indemnité pour perte du fonds.
Par ordonnance de référé du 19 février 2016, le premier président de la cour d'appel a, notamment':
- dit que l'exécution provisoire du jugement rendu le 24 septembre 2015 par le tribunal de commerce de Toulon est subordonnée à l'inscription par [L] [J] au profit de la SA [16], en garantie des restitutions ou réparations qui seraient dues par la SARL [22] à la suite de l'arrêt à intervenir sur l'appel du jugement précité, d'une hypothèque à hauteur de 690 000 euros sur le bien immobilier situé [Adresse 1] commune de Le Beausset cadastré section A1 n° [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], A1 n° [Cadastre 8] et [Cadastre 9] et AK n° [Cadastre 11] ;
- dit que l'exécution provisoire du jugement susvisé est suspendue tant que cette garantie n'aura pas été constituée par [L] [J] ;
- dit que la société [16] devra régler à la SARL [22] les sommes qu'elle doit lui payer en exécution du jugement du 24 septembre 2015 dans les quinze jours de la justification de la constitution de la garantie susvisée par [L] [J].
La société [15] a versé les sommes dues à la société [22] en exécution de la condamnation.
Suivant arrêt en date du 14 septembre 2017, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon en toutes ses dispositions et débouté la société [22] de l'ensemble de ses demandes.
Suivant arrêt en date du 22 novembre 2018, la Cour de cassation a'cassé partiellement l'arrêt en ce qu'il a débouté la société [22] de sa demande au titre de l'indemnité de perte d'exploitation et renvoyé les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Suivant arrêt en date du 24 octobre 2019, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a alloué une somme provisionnelle de 20 691 euros à la société [22], dans l'attente de la liquidation du préjudice d'exploitation dans le cadre d'une expertise judiciaire.
La société a été radiée du Registre du commerce et des sociétés le 23 septembre 2021.
Suivant exploit d'huissier en date du 21 juin 2022, la société [16] a fait signifier à la société [22] un commandement de payer la somme de 844 871,77€ au titre de la créance de restitution de la somme versée, des intérêts et frais irrépétibles, soustraction faite de la somme allouée à titre provisionnel, transformé en procès-verbal de recherches infructueuses.
Saisi par assignation de la société [16], le tribunal de commerce de Toulon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société [22] suivant jugement en date du 20 septembre 2022, et désigné Maître [Z] [C] en qualité de liquidateur judiciaire.
La société [22] n'a pas comparu à cette audience.
Suivant ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulon en date du 19 janvier 2023, la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] a été désignée en remplacement de la SELU [Z] [C].
Suivant arrêt de cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2024, statuant sur renvoi de la Cour de cassation, le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon le 24 septembre 2015 a été infirmé en ce qu'il a condamné la SA [13] à payer la somme de 106.325,60 euros au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence a fixé la somme due au titre de l'indemnité pour perte d'exploitation à la somme de 38.216,60 euros hors déduction de la provision déjà versée d'un montant de 20.691 euros.
Suivant jugement en date du 30 mai 2024 et retenant les griefs élevés par le liquidateur, le tribunal de commerce de Toulon, saisi par le liquidateur ès qualités, a':
- dit que Monsieur [J] [L] a commis des fautes de gestion qui ont contribué à l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société [22] ;
- déclaré Monsieur [J] [L] responsable de l'insuffisance d'actif de la société [22] à concurrence de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ;
- condamné Monsieur [J] [L] au paiement de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L651-2 du code de commerce ;
- dit que la somme sera payable entre les mains de SELARL [19] prise en la personne de Me [X] [N] dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
- passé les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Suivant déclaration d'appel en date du 5 juin 2024, Monsieur [L] [J] a interjeté appel du jugement du 30 mai 2024 rendu par le tribunal de commerce de Toulon.
Selon conclusions notifiées par la voie du RPVA le 19 juillet 2024, M. [J] demande à la cour de':
Recevoir Monsieur [L] [J] en son appel et le déclarer bien fondé';
Infirmer la décision déférée en ce qu'elle a :
- dit que Monsieur [J] [L] a commis des fautes de gestion qui ont contribué à l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société [22] ;
- déclaré Monsieur [J] [L] responsable de l'insuffisance d'actif de la société [22] à concurrence de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ;
- condamné Monsieur [J] [L] au paiement de la somme de 883 541,36 euros sur le fondement de l'article L651-2 du code de commerce ;
- dit que la somme sera payable entre les mains de SELARL [19] prise en la personne de Me [X] [N] dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
Statuant à nouveau,
Débouter la SELARL [19] ès qualités de toutes ses demandes fins et conclusions;
Subsidiairement, et à défaut,
Ramener le montant de la condamnation à plus justes proportions ;
Statuer ce que de droit sur les dépens.
A l'appui de ses demandes, M. [J] soutient que c'est par la délivrance de l'assignation aux fins de condamnation à supporter l'insuffisance d'actif qu'il a appris l'existence d'une procédure collective frappant la société [23]alors que la compagnie [12] est à l'origine de cette procédure collective et n'ignorait pas qu'il avait mis sa société en sommeil et ne pouvait être joignable à l'adresse de la société.
Selon M. [J], le fait de ne pas avoir indiqué au RCS l'adresse personnelle du dirigeant ne peut être constitutif en soi d'une faute de gestion au sens des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce.
Il conteste toute faute de gestion ou agissements répréhensibles, soutient avoir au contraire apporté la meilleure des garanties avec l'hypothèque en rang utile sur son bien immobilier propre, et observe que la société [16] n'a pas à ce jour mis en oeuvre ladite hypothèque.
Enfin, il rappelle le principe de proportionnalité.
Selon conclusions notifiées le 12 mai 2025, la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] demande à la cour de':
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon le 30 mai 2024 en toutes ses dispositions';
Débouter Monsieur [L] [J] de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions':
Subsidiairement,
Prononcer qu'il existe une insuffisance d'actif qui s'élève à 883.541,36 euros, dans la liquidation judiciaire de la société [22]';
Prononcer l'existence de fautes de gestion commises par Monsieur [L] [J]';
Prononcer que les fautes de gestion commises par Monsieur [L] [J] sont à l'origine de cette insuffisance d'actif';
Condamner Monsieur [L] [J] à payer à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22], la somme de 883.541,36 euros, montant de l'insuffisance d'actif définitivement acquise';
En toute hypothèse,
Condamner Monsieur [L] [J] à payer à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22], la somme de 4.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner Monsieur [L] [J] aux entiers dépens.
Le liquidateur reproche deux fautes de gestion à M. [J]': l'absence de restitution de l'indemnité d'assurance et la méconnaissance de l'existence de la procédure collective et l'absence de rectification de l'adresse de la société.
A l'appui de ses demandes, le liquidateur ès qualités fait valoir que la société [22] a bénéficié de liquidités d'un montant de 684.380,59 euro en exécution d'un jugement de première instance rendu en 2015, lesquelles auraient dû être restituées dès l'arrêt d'appel l'infirmant rendu en 2017 et que les liquidités versées au bénéfice de la société n'ont jamais été restituées, ont produit intérêts, et viennent désormais grever le passif de celle-ci.
Il soutient que M. [J] n'a pris aucune mesure pour garantir une éventuelle restitution malgré le caractère non définitif de la créance et des contestations dont elle faisait l'objet et qu'il a agi en toute connaissance de cause et n'a pu être guidé que par une pensée spéculative.
Il soutient qu'une restitution antérieure par le dirigeant aurait notamment permis de réduire le passif de la société, puisque la somme a très lourdement produit intérêt.
Selon le liquidateur, Monsieur [J] ne saurait soutenir qu'aucune faute de gestion ne peut être mise à sa charge en raison de l'absence de mise en oeuvre d'une procédure de saisie immobilière sur le bien donné qu'il avait mis en garantie et soutient qu'il lui est était parfaitement loisible, avant l'ouverture de la procédure collective, de procéder à une vente amiable du bien immobilier, d'une valeur substantielle, pour désintéresser le créancier assureur.
Il observe que Monsieur [J] invoque sa situation personnelle mais ne fournit aucun élément permettant de l'apprécier.
Selon le liquidateur, la mise en sommeil dont Monsieur [J] se prévaut pour expliquer son ignorance de la procédure ne pouvait durer que deux ans et il lui appartenait de compléter sa déclaration de cessation temporaire d'activité par un changement d'adresse personnelle du gérant auprès du Registre du commerce et des sociétés, ce qu'il s'est abstenu fautivement de faire.
Il soutient que son absence de connaissance de la procédure collective, et en conséquence de son absence de coopération avec les organes de la procédure a eu notamment pour conséquence de priver le liquidateur de toute chance de réalisation d'actif, et a donc contribué à l'insuffisance d'actif de la société [22].
Selon avis notifié par RPVA le 22 avril 2025, le ministère public s'en rapporte sur les mérites de l'appel.
Les parties ont été avisées le 20 juin 2024 de la fixation de l'affaire à bref délai à l'audience du 4 juin 2025 et de la date prévisible de la clôture.
La clôture a été prononcée le 15 mai 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
'
La cour n'étant saisie d'aucun moyen de contestation de la recevabilité de l'appel, il est sans objet de statuer sur la demande de l'appelant tendant à le recevoir en son appel.
Sur l'insuffisance d'actif
'
L'article L.651-2 du code de commerce dispose que : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.»
'
La'charge'de la'preuve'de l''insuffisance'd''actif'pèse sur le demandeur à l'action en responsabilité pour'insuffisance'd''actif.
'
En application du texte susvisé, doivent être établis :
1-une insuffisance d'actif,
2-une ou plusieurs fautes de gestion, excédant la simple négligence, imputables à Monsieur [F] [O],
3-un lien de causalité entre la ou les fautes commises et l'insuffisance d'actif.
Sur l'insuffisance d'actif
L'insuffisance d'actif correspond à la différence entre le passif déclaré antérieur à l'ouverture de la procédure collective et l'actif. Il n'est pas nécessaire qu'elle soit chiffrée ni définitive ; il suffit qu'elle soit certaine. L'existence et le montant de l'insuffisance d'actif sont appréciés au moment où statue la juridiction saisie de l'action.
Selon les éléments communiqués par le liquidateur, non contestés par M. [J], le passif déclaré dans le cadre de la procédure s'élève à la somme de 883 541,36 euros.
Aucune réalisation d'actif n'a pu être opérée, ce dont il résulte une insuffisance d'actif à hauteur de 883 541,36 euros.
- Sur le défaut de remboursement de l'indemnisation d'assurance
M. [J] ne conteste pas que sa société n'a pas remboursé la moindre somme à la compagnie d'assurances mais reporte, de mauvaise foi, la faute sur cette dernière arguant qu'elle aurait dû mettre en 'uvre l'hypothèque inscrite à son profit sur son bien immobilier.
C'est en réalité à M. [J] qu'il appartenait de mettre en 'uvre toutes les mesures utiles pour que société [22] rembourse les sommes dues, par exemple en vendant son bien immobilier à l'amiable ' et il lui appartenait de se mettre en état de rembourser dès l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 14 septembre 2017 qui avait infirmé le jugement du tribunal de commerce du 24 septembre 2015, ce qu'il s'est gardé de faire compte tenu de l'absence totale de remboursement des sommes dues.
En outre, il sera rappelé que le créancier est maître du choix de ses poursuites et qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas mis en 'uvre une procédure coûteuse et potentiellement soumise à aléa.
En s'abstenant de rembourser la moindre somme, non seulement M. [J] est à l'origine dudit passif constitué des sommes versées par la société [14] mais il est également à l'origine des intérêts de retard sur les sommes dues.
- Sur le défaut de démarches pour changer l'adresse de la société
M. [J] ne conteste pas sa carence mais c'est à tort qu'il fait valoir la mise en sommeil de sa société comme une démarche suffisante de gestion.
En effet, la cessation temporaire d'activité d'une société ne peut durer que deux années et à l'issue de ce délai, le greffier du tribunal de commerce peut, en application de l'article R123-130 du code de commerce, ordonner la radiation de la société, radiation qui est d'ailleurs intervenue le 23 septembre 2021.
Cette déclaration de cessation temporaire d'activité n'a, de plus, pas été complétée par un changement d'adresse personnelle du gérant auprès du Registre du commerce et des sociétés lequel mentionne dès le 15 juin 2012 que «le dirigeant n'habite pas à l'adresse indiquée ».
M. [J] ne pouvait ignorer qu'en ne mentionnant pas sa nouvelle adresse au Registre du commerce des sociétés, il ne pouvait être joint en sa qualité de gérant de la société.
Ce défaut qui résulte d'un désintérêt total de sa part pour la société est constitutif d'un défaut de collaboration avec les organes de la procédure, excède la simple négligence et constitue une faute de gestion.
En manquant à son obligation de collaboration, M. [J] a privé le liquidateur de toute information lui permettant de réaliser le moindre actif. Par sa carence, il a nécessairement fait durer plus longtemps que nécessaire la procédure collective, ce qui a eu pour effet l'augmentation des intérêts produits par les sommes dues.
Sur le lien de causalité qui existe entre les fautes commises et l'insuffisance d'actif
La cour considère comme les premiers juges que les deux fautes de gestion reprochés par le liquidateur sont caractérisées.
Compte tenu de la gravité des fautes retenues à l'encontre de M. [J], du désintérêt total qu'il a manifesté pour sa société confinant à la mauvaise foi, c'est de manière fondée et proportionnée que les premiers juges ont condamné M. [J] au paiement de la somme de 883 541,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif.
En conséquence, le jugement querellé sera confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires
'
M. [J] succombant sera condamné aux dépens d'appel.
En équité, il sera condamné à payer la somme de 2 000 euros à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
'
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe,
Déclare sans objet la demande de M. [L] [J] tendant à ce que l'appel soit déclaré recevable;
Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions';
Condamne M. [L] [J] à payer la somme de 2000 euros à la SELARL [19] prise en la personne de Maître [X] [N] ès qualités de liquidateur de la société [22] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';
'
'Condamne M. [L] [J] aux dépens'd'appel.
'
LA GREFFIÈRE,''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''' LA PRÉSIDENTE,