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Décisions

CA Limoges, ch. soc., 18 septembre 2025, n° 24/00771

LIMOGES

Arrêt

Autre

CA Limoges n° 24/00771

18 septembre 2025

ARRET N° .

N° RG 24/00771 - N° Portalis DBV6-V-B7I-BITZT

AFFAIRE :

M. [W] [H]

C/

S.A.S. FCF FINANCES prise en la personne de son Président en exercice

[S]

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Grosse délivrée à Me Pascale GOKELAERE, Me Florian BECAM, le 18-09-2025

COUR D'APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

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ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2025

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Le DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:

ENTRE :

Monsieur [W] [H]

né le 25 Juillet 1973 à [Localité 3] (33), demeurant [Adresse 1] et [Adresse 7]

représenté par Me Florian BECAM, avocat au barreau de LIBOURNE

APPELANT d'une décision rendue le 07 OCTOBRE 2024 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BRIVE LA GAILLARDE

ET :

S.A.S. FCF FINANCES prise en la personne de son Président en exercice, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Pascale GOKELAERE de la SELARL PLUMANCY, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 17 Juin 2025. L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 juin 2025.

La Cour étant composée de Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Présidente de chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, et de Madame Johanne PERRIER, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, assistées de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Madame Johanne PERRIER, a été entendue en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Présidente de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 18 Septembre 2025 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR

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FAITS ET PROCÉDURE :

La société FCF Finances, qui exerce une activité de holding, détient notamment:

- la société Trelidis qui exploite à [Localité 8] (Dordogne) le centre commercial 'La Feuilleraie' sous l'enseigne E. Leclerc ;

- la société Disper qui exploite un supermarché Leclerc à [Localité 6] ;

- la librairie Marbot à [Localité 6].

M. [W] [H] a été embauché en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein par la société FCF Finances à compter du 18 avril 2016 en qualité de responsable technique, au statut cadre.

Le contrat de travail a été régi par la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001.

Sa durée de travail a été fixée par une convention de forfait en jours à 216 jours par an en contrepartie d'une rémunération de 2.714,57 euros bruts mensuels.

Plusieurs avenants à sa convention de forfaits en jours sont intervenus les 1er novembre 2017, 1er avril 2018, 1er avril 2019, 09 mars 2020 et 05 mars 2021, par lesquels M. [H] a renoncé , dans la limite de 229 jours de travail par an, à l'octroi de jours de congés moyennant une indemnisation des jours de repos égale à 15% du salaire et payée mensuellement.

En outre, par un avenant du 1er novembre 2016, M. [H] a été nommé, en addition des fonctions déjà occupées, en qualité de responsable unique de sécurité du centre commercial pour une durée d'un an en contrepartie d'une rémunération supplémentaire de 2.582,55 euros bruts mensuels.

Par un second avenant du 1er novembre 2017, il a été renouvelé dans les fonctions de responsable unique de sécurité pour le centre de [Adresse 5] . Par ce même avenant, il a été convenu que M. [H] ne sera plus en charge du service technique et de maintenance mais, en l'attente du recrutement d'un nouveau responsable technique et maintenance, il lui a été attribué en contrepartie de l'intérim assuré sur ces fonctions une prime de poste de 1.675,72 euros mensuels.

Ce recrutement est intervenu en octobre 2018 en la personne de M. [N] et M. [H] a cessé de percevoir la prime de poste correspondant à cet interim.

M. [N] a quitté son poste de responsable technique et maintenance le 31 octobre 2020 et M. [H] a alors occupé un poste de ' responsable sécurité, sûreté et maintenance' moyennant un salaire mensuel brut de 4.000 euros.

A la suite d'une altercation verbale ayant eu lieu le 02 octobre 2021 avec un de ses collègues, M. [H] a été placé en arrêt de maladie à compter du 04 octobre 2021.

Le 04 novembre 2021, il lui a été notifié un avertissement, l'employeur lui reprochant d'avoir eu un comportement inadapté le 02 octobre 2021.

En réplique et par un courrier du 27 décembre 2021, M. [H] s'est plaint auprès de l'employeur d'une situation de surmenage et a dénoncé un harcèlement moral à son encontre.

Il a également saisi la Caisse primaire d'assurance maladie d'une demande en reconnaissance de l'événement du 02 octobre 2021 en accident professionnel, ce que la caisse a rejeté mais qui a été reconnu comme tel par un jugement du tribunal judiciaire de Périgueux en date du14 mars 2024.

Antérieurement à cette décision et par une requête du 05 décembre 2022, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Périgueux afin d'obtenir un dédommagement pour manquement de la société FCF Finances à son obligation de sécurité.

La directrice ressources humaines de l'employeur exerçant un mandat de conseillère au sein du conseil de prud'hommes de Périgueux, l'affaire a été renvoyée devant le conseil de prud'hommes de Brive la Gaillarde par jugement du 11 mars 2024.

Alors que cette instance était en cours, par un avis du médecin du travail du 07 mai 2024, M. [H] a été déclaré inapte à son poste, avec dispense de l'obligation de reclassement.

Il a été convoqué à un entretien préalable, puis licencié pour inaptitude par lettre recommandée du 20 juin 2024.

Par un jugement du 07 octobre 2024, le conseil de prud'hommes de Brive la Gaillarde :

- a dit qu'il n'y a pas de manquement de la part de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail ;

- a dit qu'il n'y a pas de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur;

- a dit et jugé le bien fondé de la convention de forfait en jours ;

En conséquence,

- a débouté M. [H] de l'ensemble des autres demandes ;

- a condamné M. [H] au paiement de la moitié des dépens ;

- a condamné M. [H] au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700.

Par déclaration du 22 octobre 2024, M. [H] a interjeté appel de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures du 24 décembre 2024, M. [H] demande à la cour :

' d'infirmer le jugement sus énoncé en ce qu'il :

- a dit qu'il n'y a pas de manquement de la part de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail.

- a dit qu'il n'y a pas de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur;

- a dit et jugé le bien fondé de la convention de forfait en jours.

En conséquence,

- l'a débouté de l'ensemble des autres demandes ;

- l'a condamné au paiement de la moitié des dépens ;

- a condamné au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

' de fixer son salaire de référence à 4.616,48 euros bruts mensuels ;

' de condamner la société FCF Finances à lui verser :

1) Au titre des manquements dans le cadre de l'exécution du contrat de travail :

- 10.000 euros pour défaut d'organisation des entretiens annuels d'évaluation, des entretiens professionnels et bilans récapitulatifs, conformément à l'article L. 6315-1 du Code du travail ;

- 18.432,92 euros à titre de rappel de salaire sur prime de poste, outre 1.843,29 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

- 3.864,68 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l'année 2019, outre 386,46 euros au titre des congés payés afférents ;

- 36.714,46 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l'année 2020, outre 3.671,44 euros au titre des congés payés afférents,

- 32.849,78 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l'année 2021, outre 3.284,97 euros au titre des congés payés afférents,

- 2.738,70 euros nets à titre d'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2019,

- 20.540,25 euros nets à titre d'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2020,

- 17.801,55 euros nets à titre d'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2021,

- 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de respect du régime légal des astreintes, sur le fondement de l'article L 3121-9 du Code du travail et défaut de respect du repos hebdomadaire dominical ;

- 2.117,92 euros à titre de rappel de salaire pour travail de nuit, outre 211,79 euros au titre des congés payés afférents ;

- 1.460,64 euros au titre des repos compensateurs pour travail de nuit, outre 146,06 euros au titre des congés payés afférents.

- 25.000 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé sur le fondement de l'article L. 8223-1 du Code du travail ;

- 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, sur le fondement de l'article L 4121-1 du Code du travail ;

2) Au titre de la rupture du contrat de travail :

A titre principal,

- de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société FCF Finances ;

En conséquence,

- de juger que la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société FCF Finances à lui verser la somme nette de 36.930 euros (8 mois) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail ;

A titre subsidiaire,

- de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société FCF Finances ;

En conséquence,

- de juger que son licenciement en date du 20 juin 2024 est dépourvu de cause réelle et sérieuse;

- de condamner la société FCF Finances à lui verser la somme nette 36.930 euros nets (8 mois) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du Code du travail ;

- d'ordonner à la société FCF Finances de lui communiquer son certificat de travail, les bulletins de salaire afférents, ainsi que le reçu pour solde de tout compte et l'attestation France Travail, conformes à la décision à intervenir ;

- de condamner la société FCF Finances à lui verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de dire que ces condamnations porteront intérêts moratoires à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes, avec capitalisation des intérêts ;

- de condamner l'intimée aux entiers dépens ;

M. [H] fait principalement valoir :

' que la société FCF Finances a manqué à ses obligations au titre du contrat de travail :

- en ne le faisant pas bénéficier d'entretiens professionnels, ni de bilans récapitulatifs, l'entretien du 12 octobre 2019 n'y étant pas assimilable ;

- en ne lui versant pas la prime de poste prévue à l'avenant du 1er novembre 2017 après le départ de M. [N], alors qu'il avait repris les responsabilités de responsable maintenance et technique en novembre 2020, l'embauche de M. [K] ne justifiant pas le retrait de cette prime puisque ce dernier n'a assumé des missions de maintenance qu'en son absence ;

- en lui imposant une convention forfait-jours qui est frappée de nullité puisque sans réaliser de suivi de sa charge de travail, ni d'entretien annuel ;

- en le faisant travailler au-delà des amplitudes journalières et hebdomadaires légales, sans lui rémunérer les heures supplémentaires réalisées, et sans lui accorder de contrepartie en repos ;

- en ne lui rémunérant pas les astreintes effectuées, notamment le week-end ;

- en lui faisant réaliser des permanences de nuit, sans lui attribuer de repos compensateurs ;

' que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité et causé la dégradation de son état de santé, le plaçant dans une situation d'épuisement professionnel et causant finalement son arrêt de travail postérieurement à l'altercation du 02 octobre 2021.

' que la société FCF Finances a volontairement dissimulé les heures supplémentaires litigieuses.

' que la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur est encourue à raison des manquements susvisés, et, à titre subsidiaire, que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, son inaptitude étant la conséquence des manquements de l'employeur.

Aux termes de ses dernières écritures du 17 mars 2025, la société FCF Finances demande à la cour :

- de confirmer le jugement rendu par le premier Juge en toutes ses dispositions ;

- de débouter M. [H] de l'intégralité de ses demandes ;

- de le condamner reconventionnellement au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- de le condamner aux entiers dépens.

La société FCF Finances soutient :

- qu'elle a respecté ses obligations au titre de la tenue d'entretiens individuels, celui de M. [H] devant être réalisé en fin d'année 2021, mais n'ayant pu l'être suite à son arrêt de travail ;

- au demeurant, que le salarié ne justifierait d'aucun préjudice à ce titre ;

- que M. [H] n'était plus éligible au paiement d'une prime de poste à compter du mois d'octobre 2018 puisqu'il avait cessé d'assurer les fonctions de responsable de maintenance à partir du recrutement de M. [N] et qu'il n'a pas repris l'intégralité de ces fonctions au départ de M. [N], M. [K] ayant été embauché en qualité de responsable sécurité adjoint ;

- qu'elle a respecté ses obligations au titre du forfait-jours en réalisant un suivi du nombre de jours et demi-journées travaillées, et du respect du repos quotidien et hebdomadaire et de la charge de travail ; qu'elle verse aux débats des fiches individuelles de décompte du temps de travail remplies et contresignées par M. [H] ;

- que M. [H] ne s'est jamais plaint d'une surcharge de travail ou d'une violation de la durée légale de travail ;

- que M. [H] ne démontre pas utilement des horaires hebdomadaires, astreintes et permanences, et le volume horaire allégué ; que s'il a pu participer à des événements ponctuels et isolés, ceux-ci ne sauraient à eux seuls en justifier, compte tenu de sa liberté d'organisation ;

- que M. [H] ne justifie pas du préjudice subi par la réalisation d'astreintes et permanences, et il a eu la liberté d'adapter ses horaires suite à ses permanences de nuit.

- qu'elle n'a pas manqué à son obligation de sécurité, car elle n'a pas été alertée d'une surcharge de travail de son salarié alors qu'elle lui a au contraire remis une charte l'informant de son droit à la déconnexion ;

- que M. [H] ne démontre pas avoir subi un harcèlement moral ; Il n'a pas été injurié le 02 octobre 2021, alors qu'il a adopté un comportement inadapté à l'égard de son collègue.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 juin 2025.

SUR CE,

Sur le salaire de référence et la prime de poste :

Par le contrat à durée indéterminée initial, conclu le 18 avril 2016, M. [H] a été engagé pour occuper le poste de responsable technique avec pour mission d'assurer le suivi des dossiers techniques et de sécurité pour l'ensemble des sociétés du groupe dont la société FCF Finances est la holding animatrice, en recevant une délégation de pouvoirs en ce qui concerne les obligations relatives à l'hygiène, la sécurité au travail , la réglementation économique et la protection du consommateur, ainsi que pour donner toute instruction écrite ou verbale au personnel dont il assurait l'encadrement et prendre toute sanction disciplinaire.

Son salaire brut annuel, pour 216 jours de travail par an, était alors fixé à 32.574,84 euros prévus pour être versé par douzième, soit 2.714,57 euros par mois.

L'avenant à ce contrat de travail en date du 1er novembre 2016 a notamment compris les dispositions suivantes :

' Du fait du classement du centre commercial, qui regroupe dans un même bâtiment plusieurs exploitations de types divers, en [Localité 4] de catégorie 1, un responsable unique de sécurité doit être nommé pour le centre commercial 'La Feuilleraie'...

Compte tenu des compétences et connaissances de M. [H], il lui a été proposé d'assurer cette mission en sus de ses fonctions de responsable technique au sein de la société FCF Finances avant que cette mission ne soit reprise par la SCC.

M. [H] ayant accepté cette mission, il a été convenu ce qui suit :

Article 1 : le présent avenant prendra effet à la date du 1er novembre 2016 pour une durée de 12 mois, soit jusqu'au 31 octobre 2017.

A défaut de signature d'un nouvel avenant, la mission ne sera pas reconduite, ce que M. [H] accepte de façon pleine et entière.

Au terme de l'avenant, M. [H] reprendra son poste de responsable technique.

....

Article 2 : Définition de la mission :

' Organisation générale de la sécurité incendie...

' Tenue du registre de sécurité et de ses annexes...

' Instruction du personnel du service de sécurité..

Article 3 : Rémunération complémentaire :

Compte tenu des responsabilités rattachées à ce poste, la rémunération de M. [H] est majorée de 2.582,55 euros par mois pendant la durée de et avenant.

A l'issue de cet avenant, cette rémunération complémentaire ne sera plus due à M. [H]'.

L'avenant en date du 1er novembre 2017 a notamment compris les dispositions suivantes ;

' Article 1 : M. [H] est nommé responsable unique de sécurité pour le centre commercial 'La Feuilleraie et responsable sécurité/sûreté pour l'ensemble des sociétés du groupe et du centre commercial 'La Feuilleraie' à compter du 1er novembre 2017.

En qualité de responsable unique de sécurité, ses missions sont les suivantes :

' Organisation générale de la sécurité incendie...

' Tenue du registre de sécurité et de ses annexes...

' Instruction du personnel du service de sécurité...

Afin de pouvoir mener à bien ces missions de sécurité/sûreté, M. [H] ne sera plus en charge de la maintenance et du service technique sur l'ensemble du périmètre susmentionné.

Il travaillera cependant en binôme avec le futur responsable 'maintenance et technique' afin qu'ils se remplacent pendant leurs absences respectives .

Article 2 : Rémunération :

Dans le cadre de son forfait annuel , jours, M. [H] percevra une rémunération annuelle forfaitaire de 40.800 euros en contrepartie de la mission qui lui a été confiée dans la limite de 216 jours travaillés.

Article 3 : Dans l'attente du recrutement du responsable technique et maintenance, M. [H] a accepté de remplir cette fonction moyennant une prime de poste de 1675,72 euros mensuelle brute à compter du 1er novembre 2017 et jusqu'au mois suivant l'embauche du responsable technique et maintenance.

Parallèlement à la signature de cet avenant à son contrat de travail , les parties ont régularisé un avenant à la convention de forfait en jours dans lequel le salarié a déclaré vouloir travailler davantage et renoncer à des jours de congé, le nombre de jours travaillés ne pouvant cependant être supérieur à 229, ce moyennant le versement d'une indemnisation des jours de congé égale à 15% du salaire brut.

Il est acquis aux débats que M. [N] a été recruté en qualité de responsable technique et maintenance à compter du mois d'octobre 2018 et qu'à partir du 1er novembre 2018, M. [H] a perdu le bénéfice de la prime de poste de 1.675,72 euros.

M. [H] n'a pas alors remis en cause la perte de cette prime, qui a été conforme aux dispositions contractuelles de l'avenant du 1er novembre 2017.

M. [N] a quitté son poste de responsable technique et maintenance avec effet au 31 octobre 2020 et parallèlement :

- par un courrier du 19 octobre 2020, la société FCF Finances a informé M. [H] que son emploi de responsable unique de sécurité s'enrichissait à nouveau de la fonction de 'maintenance' pour devenir 'responsable sécurité, sûreté et maintenance' au salaire brut mensuel de 4.000 euros, majoration de 15% incluse ;

- à compter du 1er novembre 2020, la société FCF Finances a recruté M.[K] en qualité de responsable adjoint sécurité et sûreté et ce dernier atteste avoir eu pour missions : la gestion administrative et opérationnelle de la prestation sécurité, de l'équipe interne de sécurité et des prestataires intervenant sur les installations de sûreté et sécurité incendie, le suivi des vérifications réglementaires des installations de sécurité incendie et sûreté, la préparation des commissions de sécurité, ainsi que, lors des congés de M. [H], la gestion de la maintenance urgente et des collaborateurs.

M. [H] n'est pas fondé à soutenir que les missions de responsable technique et maintenance reprises en novembre 2020 l'ont été sans aucune autre compensation ou rémunération alors que son salaire brut, majoration de 15% incluse, est passé de 3.671,60 euros en octobre 2020 à 4.000 euros en novembre 2020.

En outre, le recrutement d'un adjoint pour l'exercice de ses missions de sécurité et sûreté, qui a été dans le sens d'un allègement de la charge de ces missions et donc de sa charge de travail, ne justifiait pas le maintien d'une prime de poste ; il ne l'a d'ailleurs pas contesté en ce temps .

Sa demande en un rappel de salaire à ce titre est rejetée.

Sur la convention de forfait en jours :

M. [H] fonde sa demande en paiement d'heures supplémentaires sur une nullité de la convention de forfait en jours ou, pour le moins, sur une convention privée d'effet à son égard faute pour la société FCF Finances d'avoir respecté les modalités de contrôle imposées par les dispositions légales et conventionnelles.

Le forfait annuel en jours, qui consiste à décompter le temps de travail en jours ou en demi-journées et non plus en heures et qui exonère l'entreprise des dispositions relatives au décompte de la durée du travail , à l'exception de celles applicables aux repos n'est licite qu'en cas de dispositions conventionnelles respectant les impératifs de protection de santé, de sécurité et de repos des salariés.

À ces fins, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 08 août 2016 et en application de l' article L.3121-64 du code du travail , l'accord collectif doit impérativement fixer les modalités selon lesquelles :

- l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

- l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise;

- le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.

Dans un arrêt du 04 février 2015 (n°13-20.891), antérieur à cette loi, il a été jugé par la Cour de cassation que les dispositions de l'article 5.7.2. de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, qui dans le cas de forfait en jours, se limitaient à prévoir, s'agissant du suivi de la charge et de l'amplitude de travail du salarié concerné, un entretien annuel avec le supérieur hiérarchique, n'étaient pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restaient raisonnables et assuraient une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié et qu'il en résultait que la convention de forfait en jours prévue par la convention collective, régissant ici la relation contractuelle, était nulle.

Depuis, ces dispositions de la convention collective ont été revues par un avenant du 15 janvier 2019 et l'article 5.5.6 précise désormais :

' Le forfait en jours s'accompagne d'un suivi du nombre de jours ou demi-journées travaillées et du respect du repos quotidien et hebdomadaire, ainsi que de la charge de travail.

Ce suivi peut s'effectuer à l'aide d'un document tenu par le salarié sous la responsabilité de l'employeur. Ce document fait apparaître fait apparaître la qualification de chacune des journées ou demi-journées répartie en quatre catégories au minimum : travail, repos, congé payé, autre absence ; afin d'identifier les éventuelles difficultés en matière d'amplitude des journées de travail, le document indique également, lorsqu'un repos quotidien a été inférieur à 12 heures consécutives, quelle en a été la durée.

Il doit également comporter la possibilité pour le salarié d'ajouter toute information complémentaire qu'il jugerait utile d'apporter.

Signé par le salarié, le document de décompte est remis mensuellement à sa hiérarchie...

Un récapitulatif annuel est remis au salarié dans les trois mois suivant la fin de la période.

Au moins une fois par an, le salarié en forfait jours bénéficie à l'initiative de sa hiérarchie d'un entretien portant sur sa charge et son amplitude de travail, sur l'organisation du travail dans l'entreprise, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, ainsi que sur sa rémunération. '

Ces nouvelles dispositions de la convention collective sont de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables et qu'elles assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et, donc, la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

M. [H] verra donc rejeter sa demande se fondant sur une nullité de la convention individuelle de forfait en jours, notamment pour celles qu'il a régularisées par avenants des 1er avril 2019, 09 mars 2020 et 05 mars 2021.

Toutefois, lorsque l'employeur ne respecte pas les dispositions légales et les stipulations de l'accord collectif, notamment celles portant sur le suivi du temps et de la charge de travail, ainsi que sur l'amplitude des journées qui ont pour objet d'assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié et de son droit au repos, la convention de forfait en jours n'est pas nulle, mais seulement privée d'effet à l'égard de l'entreprise pour toute la période durant laquelle l'entreprise ne s'est pas conformée aux prescriptions légales et conventionnelles, de sorte que le salarié peut prétendre, sur toute cette période, au paiement d'heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l'existence et le nombre.

Et, une fois la situation régularisée, le forfait annuel en jours peut reprendre effet pour l'avenir (cf Cass.soc 22 juin 2016 - n°14-15.171).

La société FCF Finances produit le suivi individuel d'activité qui a été contradictoirement établi à la suite d'un entretien du 12 octobre 2019 et dans lequel, au titre de l'évaluation de la charge de travail, il a uniquement été coché une case comportant le qualificatif de ' lourde' .

Si ce document permet de dire que la charge de travail de M. [H] a été évoquée lors de cet entretien, mais sans que le salarié ou son supérieur hiérarchique, ainsi qu'ils en avaient la faculté, ne l'accompagnent de quelques commentaires, il ne répond cependant pas de manière satisfaisante aux prescriptions imposant à l'employeur de faire bénéficier le salarié d'un entretien au moins annuel portant non seulement sur sa charge de travail, mais également sur son amplitude, sur l'organisation du travail dans l'entreprise, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, ainsi que sur sa rémunération, ce qui n'apparaît nullement dans ce document.

Certes, si en application de l'article L. 3121-64 du code du travail disposant que l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année doit déterminer la période de référence du forfait qui peut être l'année civile ou toute autre période de 12 mois consécutifs, chaque année en 2019, en 2020 et en 2021 une nouvelle convention de forfait comportant un plafond de 229 jours de travail a été conclue entre la société FCF Finances et M. [H] y déclarant 'vouloir travailler davantage' et si, à ces occasions, M. [H] a été en mesure d'évoquer sa charge de travail, la signature de ces avenants n'a pas pu avoir pour effet de dispenser l'employeur de son obligation d'un entretien annuel devant être formalisé par écrit.

En outre, aucun autre entretien n'est intervenu entre l'employeur et le salarié entre le 12 octobre 2019 et le 02 mars 2021.

La convention de forfait en jours est donc jugée privée d'effet à son égard.

Sur les heures supplémentaires :

Il s'en suit qu'en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, M. [H], qui en a saisi le conseil de prud'hommes le 05 décembre 2022, antérieurement à son licenciement pour inaptitude intervenu le 20 juin 2024, est recevable en sa demande d'un rappel d'heures supplémentaires au titre d'heures dites effectuées au delà de la 35ème heure hebdomadaire sur la période allant du 05 décembre 2019 au 02 octobre 2021.

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Ainsi, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments et, après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires , il évalue souverainement, sans être tenu au détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, M. [H] expose que ses heures de travail ont été a minima du lundi au vendredi de 7h30 à 13h, puis de 14h à 20h, soit 57,5 heures hebdomadaires et donc, pour chaque semaine, 8 heures supplémentaires majorés à 25% et 14,5 heures supplémentaires majorées à 50% et il produit, en pièce 29, un décompte de ce prétendu temps de travail qui est très curieusement immuable d'une semaine à l'autre, ce qui ne manque pas de surprendre puisqu'il est établi qu'il a notamment pu travailler en heures supplémentaires :

- pour la foire au vin annuelle, le mardi 29 septembre 2020 de 6h à 8h30,

- pour les deux inventaires annuels, en mars 2020 à la librairie Marbot de 21h à la fin , le 30 mars 2021 à la librairie Marbot de 21h à la fin et le 1er avril 2021 au centre culturel du centre commercial 'La Feuilleraie' de 20h15 à la fin,

et ces horaires ne sont pas pris en compte dans le décompte établi de sa main et qui n'est conforté par aucun élément de preuve valable.

En effet, M. [H] produit un unique témoignage rédigé par Mme [O], qui a exercé comme cadre entre avril 2013 et janvier 2023 au sein de la société Disper qui exploite le supermarché Leclerc à [Localité 6], et qui indique qu'il était 'présent sur l'ensemble des sites du lundi au samedi de 8h à 19h/20h' et qu'il a également 'été présent aux inventaires sur l'ensemble des sites '; toutefois, ces affirmations, émanant d'une salariée aujourd'hui en litige avec la société FCF Finances devant un conseil de prud'hommes, sont non conformes à ce que M. [H] avance lui-même, ainsi qu' aux fiches individuelles de décompte des journées de travail que l'intéressé a renseignées et signées, produites par la société FCF Finances et qui établissent que, s'il a a été présent à son poste de travail un samedi sur deux, c'est toujours en bénéficiant d' un autre jour ouvrable de la semaine en repos.

Ce témoignage sera donc écarté comme dépourvu de toute force probante.

La société FCF Finances produit en effet, pour toute la période concernée, l'ensemble des fiches individuelles de décompte du temps de travail en journées et demi-journées - mais sans précision des horaires de début et de fin de travail - que M. [H] a renseignées en conformité aux dispositions de l'article 5.5.6 de la convention collective et M. [H], qui a été parfaitement rempli tant de ses droits à congé annuel avec la prise de 31 jours de congés payés par an, dont 6 jours de repos spécifiques, ne prétend nullement avoir travaillé un trop grand nombre de jours dans l'année mais seulement que son amplitude horaire journalière aurait été déraisonnable et illégale.

Ces même fiches de décompte du temps de travail lui ont toutes rappelé, depuis le début de la relation de travail en 2016 et en attirant son attention par une typographie en caractères gras et/ou soulignés, qu'il devait impérativement respecter un repos quotidien ne pouvant être inférieur à 12 heures consécutives, sauf dérogations prévues par la loi ou en cas de réalisation des inventaires comptables (dans la limite de 2 par an) ou en cas de travaux urgents dans la limite de 9 heures de repos et lui demandant, en cas de difficultés, d'en informer la direction.

Or, aucune de ces fiches ne comporte, notamment dans la colonne 'observations' qui pouvait être renseignée pour chaque semaine concernée, la moindre annotation à ce sujet.

Son affirmation selon laquelle il n'aurait donc jamais pu bénéficier d'un repos quotidien d'au moins 12 heures consécutives, puisque seulement à partir de 20h le soir jusqu'au lendemain matin 7h30, est infirmée, ce qui ôte du crédit au décompte qu'il produit en pièce n°29.

Il en reste que la société FCF Finances a accordé à M. [H], en complément des congés payés habituels de 25 jours par an, 6 jours de repos spécifiques et que ce mécanisme a été appliqué en vue de compenser le temps de travail supplémentaire accompli par le salarié au-delà de la durée de travail hebdomadaire de 35 heures.

Au regard de la convention de forfait en jours qui avait été conclue entre les parties, peu important que celle-ci soit ici jugée inopposable au salarié, ces 6 jours de repos spécifiques ne peuvent pas être considérés, comme pour un salarié soumis à l'horaire légal de 35 heures hebdomadaire, comme ayant constitué un simple repos compensateur de remplacement tel que prévu par l'article L. 3121-28 du code du travail et ouvrant droit, pour toute heure supplémentaire non rémunérée, à un repos compensateur majoré dans les mêmes conditions que celles du salaire.

En conséquence et à défaut pour la société FCF Finances de pouvoir justifier plus amplement du temps de travail que M. [H] a consacré à l'exercice de ses missions, il sera retenu que ce dernier a bien réalisé des heures supplémentaires au delà de 35 heures par semaine, mais sans excéder 39 heures, en ce compris les sujétions qui ont été les siennes à l'occasion de la foire au vin de l'année 2020 et des inventaires des années 2020 et 2021.

Son droit à rappel d'heures supplémentaires au taux majoré de 25% , soit au taux horaire majoré de 38,04 euros, sera donc fixé à :

- 16 heures pour la période allant du 09 décembre au 31 décembre 2019,

- 152 heures pour les 39 semaines travaillées au cours de l'année 2020 (déduction faite des jours où il a été en arrêt de travail pour maladie),

- 136 heures pour les 34 semaines travaillées du 1er janvier au 02 octobre 2021.

Réformant de ce chef le jugement dont appel, la société FCF Finances sera condamnée à lui payer à ce titre la somme brute de (16 + 152 + 136) x 38,04 = 11.564,16 euros, outre celle brute de 1.156,42 euros au titre des congés payés afférents.

Ces sommes sont porteuses d'intérêts au taux légal à compter du 05 décembre 2022, date de saisine du conseil de prud'hommes et capitalisables annuellement à compter de ce jour en application de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les repos compensateurs :

Aux termes de l'article L. 3121-30 du code du travail, seules les heures supplémentaires effectuées au delà du contingent annuel de 220 heures par an ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos et M. [H], qui ne peut y prétendre, verra rejeter cette prétention.

Sur le travail de nuit :

M. [H] fonde sa demande en paiement de la somme de 2.117,92 euros, outre congés payés et repos compensateur afférents, au titre d'un travail de nuit réalisé sur 48 'permanences' de 14h à 5h, prévues pour suppléer le chef d'établissement et le représenter en cas de nécessité et il écrit lui-même que, 'si l'on considère qu'au cours de ces permanences , il est intervenu en moyenne 1h par nuit', il est en droit de percevoir une rémunération majorée de 25% à titre d'heures supplémentaires et de 20% au titre du travail de nuit, soit de 45% .

La permanence se définit comme étant la période au cours de laquelle il est imposé au salarié d'être présent sur son lieu de travail habituel, pour nécessité de service, en dehors de son temps de travail habituel et elle constitue du temps de travail effectif pour son intégralité, à l'inverse de l'astreinte dans le cadre de laquelle seul le temps d'intervention compte comme du temps de travail effectif.

Selon les dires de M. [H] et les tableaux qu'il produit, ces 'permanences' ont eu pour seule finalité d'assurer, en cas de nécessité, une simple suppléance, 24h sur 24, du chef d'établissement qui est la personne responsable de la sécurité et de la santé physique du personnel dans un bâtiment, notamment en matière de sécurité incendie.

M. [H] ne dit nullement qu'il a été astreint, lors de ces permanences, à rester présent sur son lieu de travail et il ne justifie pas être intervenu, ce qu'il ne présente d'ailleurs que de manière hypothétique.

Sa demande non fondée en paiement d'un travail effectif ne peut qu'être écartée.

Sur les astreintes :

L'astreinte est définie par l'article L. 3121-9 du code du travail comme étant la période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, et l'article L. 3121-10 du code du travail intégre la période d'astreinte, exception faite de la durée d'intervention, dans le décompte du temps de repos quotidien et hebdomadaire

Ici, M. [H] ne remet en cause ni le principe même de programmation des astreintes auxquelles il a été assujetti pour répondre à des appels en cas d'intrusion, d'agression, d'incendie ou de tout autre incident technique, et qui ont constitué une sujétion liée aux fonctions exercées.

Il est toutefois inexact pour lui de dire que les astreintes ont été permanentes, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.

En effet, si son numéro de téléphone a bien figuré sur les registres définissant la conduite à tenir en cas d'intrusion, d'agression ou d'incendie, il est néanmoins établi que les astreintes auxquelles il a été assujetti l'ont été, non de manière permanente, mais à raison de deux fois par semaine, les mercredis et les jeudis de 0h à 8h30 et de 20h30 à 0h , selon un tableau de consignes d'appel qu'il produit lui-même en pièce n°30 et dont il ne conteste pas que la diffusion lui en a été faite dans un délai de prévenance suffisant.

Il conteste en revanche avoir pu en percevoir une contrepartie soit sous forme financière, soit sous forme de repos, ce indépendamment d'heures d'intervention dont il n'est pas justifié, et qui ne sont même pas alléguées.

En application de l'article L. 3121-9 du code du travail, la période d'astreinte doit faire l'objet d'une telle contrepartie et la société FCF Finances ne peut conclure au rejet de la demande présentée par M. [H] au seul motif qu'il ne justifie pas d'un préjudice généré par un trouble dans sa vie personnelle ou sur son état de santé.

Toutefois, la société FCF Finances ne dit nullement qu'une telle contrepartie lui a été accordée soit sous forme financière, soit sous forme de repos et le principe même du droit au versement d'une compensation financière devant être retenu, celle-ci sera fixée à la somme brute de 5.000 euros.

Cette somme, qui a la caractère d'un salaire, est porteuse d'intérêts au taux légal à compter du 05 décembre 2022, date de saisine du conseil de prud'hommes et capitalisables annuellement à compter de ce jour en application de l'article 1343-2 du code civil.

Sur le travail dissimulé :

Le travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié consiste notamment pour l'employeur à se soustraire intentionnellement à ses obligations de déclarations sociales et fiscales obligatoires et la remise d'un bulletin de paie mentionnant un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ne peut caractériser un travail dissimulé que s'il est établi que l'employeur a agi intentionnellement, ce qui ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur le bulletin de paie.

En l'espèce, la société FCF Finances a été défaillante dans l'organisation des entretiens annuels au regard de la convention de forfait en jours qui avait été conclue entre les parties et qui a été conforme à celle prévue par la convention collective ; pour autant, et peu important que celle-ci soit pour ce motif jugée inopposable au salarié, il ne peut être retenu que c'est de manière intentionnelle qu'elle n'a pas fait figurer sur les bulletins de paie, qui ont porté la mention de ce forfait en jours et de la majoration de salaire de 15%, un nombre d'heures de travail correspondant précisément à celui qui a été effectivement réalisé.

Le travail dissimulé n'est pas caractérisé et M. [H] est débouté de cette demande.

Sur les entretiens d'évaluation de l'article L. 6315-1 du code du travail :

Ce texte prévoit qu'un entretien professionnel consacré aux perspectives d'évolution professionnelle du salarié doit être organisé par l'employeur tous les deux ans et que, tous les six ans, cet entretien fait un état des lieux du parcours professionnel du salarié.

Lorsque l'employeur ne respecte pas son obligation en matière d'entretien professionnel, ce manquement n'ouvre pas droit, à lui seul, à réparation et le salarié doit démontrer le préjudice distinct qui en résulterait pour en obtenir indemnisation.

La société FCF Finances a conduit un entretien de ce type le 12 octobre 2019, soit trois ans et demi après l'embauche de M. [H] en avril 2016, et son compte rendu est des plus succinct.

Cet entretien aurait été à renouveler avant le 12 octobre 2021 alors que M. [H] a quitté son poste de travail le 02 octobre 2021.

Si M. [H] est fondé à faire fait grief à l'employeur de ne pas s'être conformé à cette obligation, il n'invoque aucun préjudice distinct et particulier lui permettant de soutenir une demande en indemnisation portée à 10.000 euros.

Cette demande est rejetée.

Sur la rupture du contrat de travail :

Le 05 décembre 2022, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation de son contrat de travail en raison de faits reprochés à son employeur et son licenciement pour inaptitude par la société FCF Finances est intervenu ultérieurement le 20 juin 2024.

Lorsque, comme en l'espèce, un licenciement est prononcé postérieurement à l'introduction de la demande de résiliation judiciaire par le salarié mais avant que le juge n'ait statué sur cette demande, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée et ce n'est que s'il considère cette demande injustifiée qu'il doit se prononcer sur le licenciement.

I - Sur La résiliation judiciaire du contrat de travail :

La résiliation judiciaire du contrat de travail peut être prononcée en cas de manquements de l'employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Ici, M. [H] articule comme griefs à l'encontre de la société FCF Finances :

' l'absence de paiement de la prime de poste : M. [H], jugé non fondé en cette prétention, ne peut s'en saisir comme grief à l'encontre de l'employeur .

' l'absence d'entretiens professionnels : ce manquement de l'employeur n'a pas généré de préjudice et serait notoirement insuffisant, à lui seul, à entraîner la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur .

' le courrier d'avertissement du 04 novembre 2021 :

ll résulte du témoignage de M. [Y] que, par deux fois, M. [H] avait demandé devant lui à M. [I], technicien maintenance et beau-frère de M. [X], dirigeant de la société FCF Finances, de réaliser, pendant ses heures de travail, des prestations lui étant personnelles pour la réparation de la béquille d'une moto ou le portail de sa maison.

Le samedi 02 octobre 2020, alors que M. [I] était en repos, M. [H] l'a joint par téléphone pour lui demander de venir le lundi suivant prendre un courrier d'avertissement ; un échange verbal peu amène s'en est suivi, à la suite duquel M. [I] a joint par téléphone M. [X] ; que M. [H], alors furieux ainsi qu'en atteste la secrétaire Mme [R], s'est rendu dans le bureau de M. [X] qui était encore en communication avec M. [I], lequel lui apprenait que M. [H] lui avait fait faire des travaux sur la fourche de la moto de son fils pendant ses heures de travail ; que, devant la réaction de M. [X], qu'il a jugée inappropriée, M. [H] a immédiatement pris l'initiative de quitter l'entreprise.

M. [H] indique avoir été insulté et menacé par M. [I] devant M. [X] qui en aurait souri, mais ceci n'est pas prouvé.

Il résulte au contraire des témoignages produits par des collaborateurs de M. [H], dont M. [Y] et M. [A], et du prestataire, M. [M], dont le personnel était amené à travailler sous l'autorité de M. [H], que plusieurs personnes avaient pu se plaindre de lui pour une forme d'harcèlement et d'intimidation au travail avec des phrases comme 'Si tu ne fais pas ce que je te demande, je m'arrangerai avec ton responsable pour que tu dégages'', en leur parlant sèchement, en humiliant certains employés et en ne leur disant pas bonjour et qu'en particulier, la relation entre M. [H] et M. [I], supposé avoir la protection du dirigeant, avait toujours été conflictuelle.

Par l'avertissement du 04 novembre 2021, l'employeur a reproché à M. [H] :

- d'avoir contacté M. [I] par téléphone le 2 octobre 2021 alors qu'il était en congé,

- d'avoir appris qu'il lui avait demandé d'effectuer des travaux de réparation sur un objet personnel,

- d'avoir quitté l'entreprise à 12h sans prévenir sa direction, en laissant sur son bureau son téléphone professionnel et en transmettant ses codes de dévérouillage à un collègue.

Cet avertissement, dont M. [H] n'a pas demandé l'annulation, a été fondé et il n'est pas à retenir contre la société FCF Finances comme ayant été injustifié.

' le courrier du 08 octobre 2021 lui proposant une rupture conventionnelle : compte tenu des circonstances dans lesquelles M. [H] a quitté l'entreprise le 02 octobre 2021, ne laissant aucun doute sur sa volonté de ne pas y revenir, il n'y a eu aucun abus de la part de l'employeur à lui proposer une rupture conventionnelle, qui lui aurait ouvert droit à des indemnités de chômage, et ce fait n'est pas à retenir contre lui.

' l'absence de paiement des heures supplémentaires : au regard de la convention de forfait en jours qui avait été conclue entre les parties et qui a été conforme à celle prévue par la convention collective, peu important que celle-ci soit ici jugée inopposable au salarié, ce fait est d'autant moins à retenir comme élément pouvant soutenir la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur que M. [H] n'avait formé aucune réclamation à ce titre avant la saisine du conseil de prud'hommes.

' un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité :

L'employeur est tenu, en application des articles L 4121-1 et L.4121-2 du code du travail, d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé de son personnel, l'obligeant notamment à prendre en compte la santé mentale de ses salariés et à ne pas se désintéresser de l'impact que les décisions qu'il prend en matière d'organisation du travail peuvent avoir sur la santé mentale.

Si lors de l'entretien du 12 octobre 2019, au titre de l'évaluation de la charge de travail, il a été coché une case comportant de qualificatif de ' lourde' mais non celui de 'démesurée', il ne résulte pas de ce qui précède que M. [H], en sa qualité de cadre, a été soumis à un horaire de travail déraisonnable .

Il résulte en outre des avis d'aptitude au poste de travail émis par le médecin du travail que M. [H] a fait l'objet d'un suivi individuel renforcé tel que prévu, en application de l'article R. 4624-28 du code du travail, pour les salariés affectés à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, qu'il a été vu par le médecin du travail le 10 mai 2021 puis, à nouveau sur sa demande, le 14 juin 2021, le médecin du travail ne préconisant alors un nouvel examen qu'en mars 2023 et que M. [H] n'a, ni à ces occasions, ni auprès de l'employeur évoqué à un quelconque moment des difficultés liées à ses conditions de travail.

Le seul fait pour l'employeur d'avoir méconnu son obligation d'un entretien annuel portant non sur la charge de travail, mais également sur son amplitude, sur l'organisation du travail dans l'entreprise, ainsi que sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, est insuffisant, en l'absence de toute alerte de l'employeur portant sur ces mêmes points et de démonstration d'un préjudice ouvrant droit à indemnisation qui en aurait résulté pour le salarié, à caractériser un manquement à l'obligation de sécurité

Aucun manquement de l'employeur à son obligation de sécurité n'est donc à retenir contre la société FCF Finances durant le cours de l'exécution du contrat de travail et un tel manquement ne l'est pas davantage lors de l'incident survenu le 02 octobre 2021 dans le bureau de M. [X].

M. [H] doit par suite être débouté de sa demande en dommages et intérêts formée à hauteur de 50.000 euros.

EN CONSÉQUENCE et en l'absence de manquements de l'employeur suffisamment graves pour en empêcher la poursuite, la demande de M. [H] en prononcé de la résiliation du contrat de travail est rejetée.

II - Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement pour inaptitude :

À la suite de l'événement du 02 octobre 2021 , M. [H] a été en arrêt de travail pour un état dépressif qui a été reconnu par la juridiction de sécurité sociale comme devant être pris en charge au titre, non d'une maladie professionnelle, mais d'un accident du travail, et le 07 mai 2024, alors que son arrêt de travail avait été successivement prolongé de manière ininterrompue, le médecin du travail l'a déclaré inapte à toute reprise du travail au sein de la société FCF Finances .

M. [H] soutient que son inaptitude a été la conséquence d'un manquement de la société FCF Finances à son obligation de sécurité.

Il convient donc de rechercher si l'inaptitude du salarié a, au moins partiellement, trouvé son origine dans un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

En outre, compte tenu de l'autonomie du droit du travail par rapport au droit de la sécurité sociale, cette recherche n'est pas subordonnée à la reconnaissance d'un accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie ou judiciairement.

Ce qui est ci-dessus jugé n'a pas mis en avant de manquement de l'employeur susceptible d'être intervenu, même partiellement, dans la déclaration d'inaptitude et, en l'absence de caractérisation d'un tel fait fautif, M. [H] n'est pas fondé à dénier à son licenciement sa cause réelle et sérieuse.

Cette prétention est rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

En cause d'appel , il est fait droit partiellement aux prétentions de M. [H] , de sorte que les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société FCF Finances qui devra en outre verser au salarié une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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PAR CES MOTIFS

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LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

REFORME le jugement du conseil de prud'hommes de Brive la Gaillarde en date du 07 octobre 2024 en ce qu'il a :

- reconnu le bien-fondé de la convention de forfait en jours ;

- débouté M. [H] de sa demande au titre des heures supplémentaires et en indemnisation des astreintes ;

- condamné M. [H] au paiement de la moitié des dépens ;

- condamné M. [H] au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

STATUANT à nouveau de ces chefs,

DIT la convention de forfait en jours conclue par avenants des 1er avril 2019, 09 mars 2020 et 05 mars 2021 inopposable à M. [W] [H] ;

CONDAMNE la société FCF Finances à payer à M. [W] [H] :

- à titre de rappel en heures supplémentaires, la somme brute de 11.564,16 euros, outre celle brute de 1.156,42 euros au titre des congés payés afférents ;

- à titre de contrepartie financière des astreintes, la somme brute de 5.000 euros ;

DIT que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du 05 décembre 2022, capitalisables annuellement à compter de ce jour ;

ORDONNE à la société FCF Finances de remettre à M. [W] [H] un bulletin de salaire et une attestation France Travail conformes au présent arrêt ;

CONFIRME pour le surplus le jugement déféré ;

CONDAMNE la société FCF Finances aux dépens de première instance et d'appel et à verser à M. [H] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

Sophie MAILLANT. Olivia JEORGER-LE GAC.

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