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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 18 septembre 2025, n° 24/01836

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

MMA IARD (SA), MMA IARD Assurances Mutuelles (Sté), Saur (SAS)

Défendeur :

MMA IARD (SA), MMA IARD Assurances Mutuelles (Sté), Saur (SAS), Celyts (SAS), Queguiner Beton (SAS), Queguiner Materiaux (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Desalbres

Conseillers :

Mme Malardel, Mme Desvalois

Avocats :

Me Dussud, Me Couette, Me Ouairy Jallais, Me Hallouet, Me Francois, SCP Larmier - Tromeur-Dussud, SELARL Cabanes Avocats, SELARL Chevallier et Associés, Cabinet Cotte & Francois (A.A.R.P.I.)

TJ [Localité 7], du 7 mars 2024, n° 23/0…

7 mars 2024

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

La communauté de communes du Pays Bigouden Sud a entrepris la construction de deux bâches de stockage d'eau traitée de 4 000m³ au lieudit de [Localité 8] à [Localité 11].

La maîtrise d'oeuvre de cette opération a été confiée à la société IRH Ingénieur.

La réalisation des deux bâches a été confiée à un groupement constitué :

- de la société par actions simplifiée SAUR en charge des équipements et en qualité de mandataire,

- de la société par actions simplifiée Entreprise [O] en charge du génie civil,

- de la société Cise TP en charge des canalisations,

- de la société Actemium en charge de l'électricité et de l'automatisme.

Les travaux ont débuté le 9 septembre 2022.

La SAS Entreprise [O] a fait appel à la société Queguiner Matériaux pour lui livrer les matériaux nécessaires et notamment le béton.

Des livraisons ont été effectuées par d'autres sociétés du groupe Queguiner, les sociétés Celtys et Queguiner Béton.

Suivant un courrier en date du 2 décembre 2022, la SAS Entreprise [O] a informé la société Queguiner Matériaux d'un défaut de qualité du béton, laquelle l'a avertie du changement de la formule par courrier du 9 décembre 2022.

[M] 14 décembre 2022, le maître d'ouvrage a été prévenu que la résistance à la compression du béton stipulée au contrat n'était pas atteinte.

Suite à d'autres contrôles, le maître d'oeuvre a informé la SAS Entreprise [O] que les tests de résistance n'étaient pas concluants de sorte que ce résultat nécessitait la mise en place d'un protocole d'essai.

[M] laboratoire CBPT a effectué un rapport d'analyse le 1er février 2023 à la suite duquel la société Entreprise [O] a de nouveau informé la société Queguiner des non-conformités constatées.

Par ordre de service du 6 février 2023, le maître d'ouvrage a notifié au groupement d'entreprise l'arrêt temporaire des opérations de coulage de béton.

Les 16 février, 3 mars et 22 mars 2023, le laboratoire CBPT a mis en avant de nouvelles non-conformités.

Suivant un exploit de commissaire de justice du 28 mars 2023, la SAS Entreprise [O] a assigné en référé d'heure à heure les intervenants aux opérations de construction aux fins d'expertise, laquelle a été ordonnée par le juge des référés du tribunal de commerce de Brest suivant une ordonnance rendue le 3 avril 2023 qui a désigné M. [P] pour y procéder.

Par courrier du 31 mai 2023, le maître d'ouvrage a mis en demeure les sociétés Entreprise [O] et Saur de produire un protocole décrivant les travaux à réaliser et un planning, sous peine de résiliation du marché.

L'expert a déposé son rapport le 7 juillet 2023.

Suivant une ordonnance du 11 août 2023, le tribunal judiciaire de Brest a autorisé la SAS Entreprise [O] à assigner à jour fixe les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en tant qu'assureur des sociétés Queguiner.

Par actes des 21 et 22 août 2023, la SAS Entreprise [O] a fait assigner lesdites sociétés devant le tribunal judiciaire de Brest.

La SAS SAUR est intervenue volontairement à l'instance suivant des conclusions du 20 octobre 2023.

Par jugement en date du 7 mars 2024, le tribunal judiciaire de Brest a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société SAUR ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir de la société Entreprise [O] à l'encontre de la société Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys,

- déclaré recevable la demande de nullité du rapport d'expertise,

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire,

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys de leur demande visant à faire application de la clause limitative de responsabilité,

- condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à la société [O] les sommes de :

- 255 590 euros HT au titre de démolition de l'ouvrage,

- 1 238 348 euros HT au titre de la reconstruction de l'ouvrage,

- débouté la société Entreprise [O] de ses demandes d'indemnisation au titre des différentes investigations, calculs complémentaires, assistance de commissaires de justice et d'expertise technique, coût de l'arrêt du chantier et la perte des frais généraux,

- débouté la société Saur de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys de leur appel en garantie à l'égard la société Entreprise [O],

- déclaré que les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles pourront appliquer au titre des assurances facultatives les limites contractuelles (plafond) tant à l'assurée qu'au tiers,

- ordonné la compensation entre les condamnations prononcées à l'encontre des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys et la créance afférente au montant des factures impayées pour la somme de 155 015,86 euros TTC,

- condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement :

- des entiers dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la Selarl Chevalier & Associes en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- à la société Entreprise [O] la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ont relevé appel de cette décision le 28 mars 2024 (RG 24/01836).

La SAS Saur a également interjeté appel de cette décision le 11 avril 2024 (RG 24/02238).

Par ordonnance en date du 30 janvier 2025, le conseiller de la mise en état a joint les deux affaires sous le n° RG 24/01836.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 juin 2025.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions du 27 mai 2025, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles demandent à la cour de :

- réformer purement et simplement le jugement en ce qu'il :

- a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Saur,

- a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir de la société Entreprise [O] à l'encontre de la société Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys,

- a déclaré recevable la demande de nullité du rapport d'expertise,

- les a déboutées ainsi que les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys de leur demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire,

- a débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys de leur demande visant à faire application de la clause limitative de responsabilité,

- les a condamnées in solidum avec les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys à payer à la société [O] la somme de 255.590 € HT au titre de démolition de l'ouvrage,

- les a condamnées in solidum avec les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys à payer à la société Entreprise [O] la somme de 1 238 348 euros HT au titre de la reconstruction de l'ouvrage,

- a débouté la société Entreprise [O] de ses demandes d'indemnisation au titre des différentes investigations, calculs complémentaires, assistance de commissaires de justice et d'expertise technique, coût de l'arrêt du chantier et de la perte des frais généraux,

- a débouté la société Saur de l'ensemble de ses demandes,

- a débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys de leur appel en garantie à l'égard la société Entreprise [O],

- a déclaré qu'elles pourront appliquer au titre des assurances facultatives les limites contractuelles (plafond) tant à l'assurée qu'au tiers,

- a ordonné la compensation entre les condamnations prononcées à l'encontre des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys et la créance afférente au montant des factures impayées pour la somme de 155 015,86 euros TTC,

- les a condamnées in solidum avec les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, aux entiers dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la SELARL Chevalier & Associés en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- les a condamnées in solidum avec les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, à payer à la société Entreprise [O] la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- a dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit,

- a débouté les parties du surplus de leurs demandes,

Et, statuant de nouveau :

A titre liminaire :

- prononcer la nullité du rapport d'expertise déposé le 7 juillet 2023 par M. [P],

- débouter en conséquence la société [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter en conséquence la société Saur de toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce qu'elles sont dirigées à leur encontre et à l'encontre des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys,

A titre subsidiaire :

- constater la faute de la société [O] dans la commande du béton,

- condamner la société [O] à les garantir ainsi que les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre,

- débouter la société [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause :

- faire application de la limite de garantie du contrat souscrit par le groupe Queguiner auprès d'elles, à hauteur de 609 000 euros,

- dire qu'elles ne pourront être condamnées à garantir le groupe Queguiner au-delà de 609 000 euros,

- condamner la société [O] au paiement de la somme de 20 000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens.

Dans ses dernières écritures du 24 décembre 2024, la société par actions simplifiée Saur demande à la cour :

- de débouter les MMA de leurs conclusions d'appel,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et par conséquent :

- de condamner in solidum les sociétés [O], Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à lui verser une somme de 304 250,62 euros HT,

- d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2023, date de ses conclusions d'intervention volontaire en première instance,

- de condamner les appelantes, les sociétés [O], Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys aux dépens et à lui verser une somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières écritures du 23 juillet 2024, la société par actions simplifiée Entreprise [O] demande à la cour de :

Sur l'appel principal des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles :

- confirmer le jugement en ce qu'il :

- a rejeté la fin de non-recevoir tirée d'une absence d'intérêt à agir de sa part à l'encontre de la société Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys,

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire,

- a débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys de leurs demandes visant à faire application de la clause limitative de responsabilité,

- a condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 255 590 euros HT au titre de la démolition des ouvrages,

- a condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 1 238 348 euros HT au titre de la reconstruction des ouvrages,

- a débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys en leur appel à une garantie à son encontre,

- a condamné les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys à payer les entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

Sur son appel incident :

- réformer le jugement en ce qu'il :

- l'a déboutée de ses demandes d'indemnisation au titre des différentes investigations, calculs complémentaires, assistance de commissaire de justice et d'expertise technique, coût de l'arrêt de chantier et de la perte des frais généraux,

- a fixé l'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 8 000 euros et condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer ladite somme,

- condamner les appelantes à lui verser les sommes de :

- 17 240,25 euros au titre des frais d'analyse et relatifs aux investigations,

- 238 968,10 euros au titre du coût de l'arrêt du chantier,

- 48 714 euros au titre du coût d'encadrement du chantier exposé à perte,

- dire que lesdites sommes seront majorées des intérêts au taux légal à compter de la date de la délivrance de l'assignation, soit le 28 mars 2023,

- dire que les intérêts seront capitalisés dans les conditions fixées à l'article 1343-2 du code civil,

- condamner les deux sociétés MMA au paiement de la somme de 31 463,50 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens de l'instance, y compris les frais d'expertise judiciaire s'élevant à la somme de 13 692,48 euros TTC, dont distraction au profit de la Selarl Chevallier & Associes en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 2 juin 2025, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys demandent à la cour de :

I/ Sur l'appel interjeté par la SAUR

- confirmer le jugement entrepris ayant débouté la SAUR de l'intégralité de ses demandes de condamnation formées à leur encontre ;

Et, statuant de nouveau :

- débouter la SAUR ou tout appelant en garantie de l'intégralité de ses demandes de condamnation formées à leur encontre ;

A titre subsidiaire, si la cour faisait droit aux demandes de la SAUR :

- condamner la société [O] à les garantir et relever indemnes de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre ;

II/Sur leur appel incident :

A/ infirmer le jugement entrepris en ce :

- qu'il n'a pas fait droit à la demande de nullité du rapport d'expertise judiciaire ;

- qu'elles ont été condamnées à régler à la société [O] la somme de 255.590 € HT au titre des frais de démolition de l'ouvrage, 1.238.348 € HT au titre des frais de reconstruction de l'ouvrage et 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens ;

- qu'elles ont été déboutées de leur appel en garantie formé à l'encontre de la société [O] ;

- qu'elles ont été déboutées de leur demande visant à faire application de la clause limitative de responsabilité ;

Et statuant de nouveau :

- prononcer la nullité du rapport d'expertise judiciaire ;

- rejeter en conséquence l'intégralité des demandes formées à leur encontre toutes basées sur ce rapport d'expertise ;

- rejeter l'intégralité des demandes formées à leur encontre compte tenu de l'absence de démonstration d'une non-conformité, d'un dommage et d'un lien de causalité direct ;

A titre subsidiaire :

- Sur le quantum des demandes :

- rejeter l'intégralité des demandes formées à leur encontre, le caractère nécessaire des travaux dont le paiement est réclamé n'étant pas démontré ;

- Sur les appels en garantie :

- condamner la société [O] à garder à sa charge et/ou à les garantir pour l'intégralité des condamnations qui seraient susceptibles d'être prononcées à leur encontre en principal, intérêts, frais et accessoires ;

- limiter, en cas de condamnation, le montant pouvant être accordé à la société [O] à la somme de 40 876,70 € TTC en application des dispositions contractuelles, la garantie étant limitée au remboursement des bétons fournis ;

B/ confirmer le jugement entrepris en ce :

- que la société [O] a été condamnée à leur verser la somme de 155.015,86 € HT au titre des factures impayées ;

- que la compensation entre les créances respectives des parties ;

- que la société [O] a été déboutée de ses demandes de condamnation au titre des différentes investigations, calculs complémentaires, assistance de commissaires de justice et d'expertise technique, coût de l'arrêt du chantier et de la perte des frais généraux ;

- qu'il a condamné les deux sociétés MMA à les garantir ;

Et, statuant de nouveau :

- condamner la société [O] à leur verser une somme de 155 015,86 € TTC au titre des factures de béton non payées, avec intérêt au taux légal à compter de la date d'émission des factures, outre la somme de 40 € en application de l'article L. 441-10 du Code de commerce, correspondant à l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;

- ordonner le cas échéant la compensation entre leurs créances et celle de la société [O] ;

- débouter la société [O] de ses demandes de condamnation au titre des différentes investigations, calculs complémentaires, assistance de commissaires de justice et d'expertise technique, coût de l'arrêt du chantier et de la perte des frais généraux ;

- condamner les deux sociétés MMA à les garantir en cas de condamnation;

III/ en Tout Etat de Cause :

- condamner in solidum la SAUR et la société [O] au paiement de la somme de 5.000 € chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction faite au profit de Me Caroline Dussud au visa de l'article 699 du même Code.

MOTIVATION

Il sera observé que les deux sociétés MMA réclament dans le dispositif de leurs dernières écritures l'infirmation du jugement entrepris ayant déclaré recevable l'intervention volontaire de la SAS Saur mais ne sollicitent pas pour autant son irrecevabilité. La cour n'est donc pas saisie d'une fin de non-recevoir sur ce point.

Certains points du litige ne sont ainsi plus discutés dans le dispositif des dernières écritures des parties, s'agissant :

- de la recevabilité de l'intervention volontaire de la SAS SAUR ;

- du rejet de la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir de la société Entreprise [O] à l'encontre des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys ;

- de la recevabilité de la demande de nullité du rapport d'expertise;

- de la compensation entre les condamnations prononcées à l'encontre des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys et la créance afférente au montant des factures impayées pour la somme de 155 015,86 euros TTC.

La cour n'étant pas saisie de prétentions sur ce point, ces éléments sont donc acquis et ne seront dès lors par repris dans son propre dispositif.

Sur la nullité du rapport d'expertise judiciaire

[M] tribunal a écarté la demande tendant à obtenir la nullité du rapport d'expertise judiciaire présentée par les deux sociétés MMA et les Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys en retenant :

- que l'absence de déplacement de l'expert sur le site, alors que sa mission contenait une demande sur ce point, ne peut être sanctionnée ;

- que l'affirmation selon laquelle l'expert a fondé ses conclusions sur des essais réalisés en cours de chantier non réglementaires constitue un moyen de défense non établi ;

- que l'expert a accordé un délai suffisant aux parties pour faire valoir leurs observations dans le cadre d'un débat contradictoire ;

- que l'utilisation occasionnelle d'un ton polémique ne démontre pas une quelconque partialité lors de l'exercice de sa mission ;

- que l'expert n'avait pas à tirer de conséquences juridiques d'une inexécution contractuelle alléguée par une des parties ;

- que l'expert a été saisi selon une procédure d'urgence et a correctement rempli sa mission, établi un pré-rapport et répondu aux dires des parties, de sorte que le caractère prématuré du dépôt de son rapport n'est pas démontré.

Les deux sociétés MMA entendent rappeler que l'expert ne leur a spontanément accordé un délai supplémentaire pour faire valoir leurs observations mais qu'il y en a été contraint. Elles considèrent que M. [P] n'a pas répondu 'sur la limite de sa mission au titre des préjudices qui lui sont soumis' de sorte qu'il a agi en dehors de ses prérogatives tirées de l'ordonnance de référé. Elles lui reprochent d'avoir trop rapidement écarté certains éléments qui auraient mérité un temps d'analyse supérieur. Elles stigmatisent l'absence de réponse de l'expert à un certain nombre de moyens qui ont été soulevés au cours de sa mission.

Elles concluent en sollicitant de nouveau le prononcé de la nullité de son rapport.

Les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys font valoir :

- que l'expert judiciaire n'a organisé qu'une seule réunion qui ne s'est pas déroulée sur site alors que sa mission le prévoyait expressément,

- que celui-ci n'a pas permis aux parties de s'exprimer ;

- que le chiffrage du coût des désordres a été établi le 27 juin 2023, soit peu de temps avant la date du dépôt de son rapport, de sorte que le contradictoire n'a pas été respecté ;

- qu'il n'a pas procédé par lui-même ou sous son autorité à toutes investigations et prélèvements utiles comme le mentionnait sa mission ;

- qu'il a changé brutalement d'analyse sur les causes des non-conformités alléguées sans leur permettre d'apporter des éléments de contradictoire ;

- qu'il a développé ses conclusions sur des essais et données incorrectes et obtenues irrégulièrement ;

- que ses investigations ne sont ni exhaustives, ni représentatives ;

- que sa note n°3 et une réponse apportée par M. [P] à un dire démontre son absence d'objectivité de sorte qu'il a fait preuve de partialité ;

- que l'expert ne leur a pas accordé un délai suffisant pour répondre aux éléments recueillis alors que d'autres parties ont bénéficié d'un report.

En réponse, la SAS Saur considère que les deux assureurs, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys ne précisent à aucun moment le fondement de la contestation relative à la réalisation des prélèvements. Elle expose que seule une hostilité de l'expert à l'égard de l'une des parties peut entraîner le prononcé de la nullité de son rapport et ajoute que cette démonstration est inexistante.

Enfin, la SAS Entreprise [M] Bris estime que M. [P] avait reçu tous les documents techniques nécessaires lui permettant de réaliser sa mission sans avoir à opérer un déplacement sur les lieux du litige, stigmatisant les contradictions des deux assureurs MMA. Elle entend rappeler l'urgence de la situation et souligne la lenteur avec laquelle les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys ont fait parvenir les pièces complémentaires réclamées par l'expert judiciaire. Elle soutient que les prélèvements qu'elle a effectués ont été réalisés en présence d'un laboratoire indépendant et n'ont pas donné lieu à critique de la part de l'expert judiciaire. Elle affirme que toutes les parties ont disposé d'un temps identique pour répondre aux éléments avancés par M. [P] dans ses notes puis dans son pré-rapport et que ce dernier a répondu aux dires des deux assureurs. Elle conclut en indiquant que la preuve de la partialité de l'expert judiciaire n'est pas rapportée.

Les éléments suivants doivent être relevés :

La recevabilité de ce moyen de défense n'est pas contestée.

Une demande de récusation de M. [P], présentée en fin d'expertise, a été déposée auprès du juge chargé des missions d'expertise. [M] dépôt du rapport d'expertise le 7 juillet 2023, entraînant le dessaisissement de l'expert, explique l'absence de réponse apportée à cette demande.

Les irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise, en ce comprises celles résultant d'un manquement à l'article 233 du code de procédure civile, sont sanctionnées selon les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile, qui renvoient aux règles régissant la nullité des actes de procédure, et notamment aux irrégularités de forme de l'article 114 du code de procédure civile, dont l'observation ne peut être sanctionnée par la nullité qu'à charge de prouver un grief conformément aux dispositions de l'article 114 du même code (2ème Civ., 8 septembre 2022, pourvoi n° 21-12.030).

Sur le fondement de l'article 16 du code de procédure civile, l'expert doit laisser un temps suffisant aux parties pour qu'elles puissent présenter leurs observations avant le dépôt du rapport.

1 La mission dévolue à l'expert lui enjoignait de se déplacer sur le site du chantier de construction des deux bâches.

Les parties admettent que M. [P] ne s'est pas rendu sur les lieux du litige.

Ce dernier s'est justifié dans son rapport en indiquant que ce déplacement s'avérait totalement inutile.

[M] non-respect de cette obligation imposée par le tribunal ne pourrait être critiquable que si cela avait nui au reste de sa mission, ce qui n'est pas établi.

Ce moyen sera donc rejeté.

2 Les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys soutiennent sans le démontrer qu'un déplacement sur les lieux de leur propre expert aurait permis la réalisation par celui-ci d'investigations. S'il est exact qu'elles ne connaissaient pas les lieux au sein duquel le béton a été appliqué, elles ne précisent cependant pas la teneur des investigations alléguées et ne démontrent pas en quoi la carence de M. [P] leur a été préjudiciable. Cette argumentation est donc inopérante.

3 Une réunion contradictoire s'est tenue en présence de toutes les parties. Aucun texte n'impose l'organisation de plusieurs rencontres contradictoires et notamment peu avant l'achèvement de sa mission. Il ne peut donc être reproché à M. [P] un quelconque manquement sur ce point.

4 Lors de cette réunion, la SAS Entreprise [M] Bris a produit un rapport émanant du Lerm rédigé à partir de prélèvements, en l'occurrence des carottages, qu'elle avait opérés précédemment en l'absence des autres parties.

Les éléments figurant dans ce document ont donc été portés à la connaissance de toutes les parties.

Initialement, M. [P] a formulé des observations très négatives sur ce rapport en observant en page 3 de sa note aux parties °3 valant pré-rapport que :

- les chiffres figurant dans ce document étaient 'arbitraires et défavorables à l'une des parties ;

- les conclusions qui y figurent doivent être écartées en raison du faible nombre de carottages ;

- des analyses plus poussées sur un nombre plus important de prélèvements devront être réalisées.

Par la suite, l'expert judiciaire s'est cependant abstenu de faire pratiquer des carottages complémentaires. Il a cependant justifié son changement d'avis en :

- observant que les parties n'avaient pas donné suite au devis qu'il avait établi en vue de refaire une compagne de sondage ;

- estimant que le litige ne nécessitait qu'une analyse des pièces du dossier comprenant notamment, mais pas uniquement, les prélèvements sus-évoqués. Il a réclamé aux sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys des pièces complémentaires.

Aucune nullité ne saurait résulter de cette situation. [M] bien fondé des conclusions expertales et l'examen des arguments contraires soulevés par certaines parties, tendant notamment à relever le caractère non réglementaire des prélèvements effectués, relèvent de l'appréciation du fond du litige.

Il en est de même pour ce qui concerne le moyen soulevé par les deux sociétés MMA qui reprochent à M. [P] de s'être abstenu de répondre aux nombreux points développés par leur conseil technique tenant notamment à la question de la non-conformité du béton commandé au regard des exigences formulées par le maître de l'ouvrage dans le CCTP.

5 L'article 237 du Code de procédure civile énonce que le technicien commis doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité.

Il est établi que, M. [P], fait état dans son rapport, mentionne :

- une tentative de confusion,

- que le cabinet IXI fait semblant de ne pas comprendre,

- que le raisonnement d'IXI qui 'tente de faire diversion',

- que 'ce n'est pas sérieux',

- qu'il s'agit là 'd'une tentative grossière d'explication',

- 'qu'il est un fait que le cabinet IXI ne fait que confirmer l'expert judiciaire maladroitement. À sa décharge, défendre techniquement l'indéfendable est un art. Pas toujours maîtrisé'.

[M] devoir d'impartialité de l'expert constitue une formalité substantielle susceptible d'entraîner la nullité du rapport d'expertise en cas de manquement de l'expert, dont la preuve relève de l'appréciation souveraine des juges du fond. (Civ., 3ème, 23 juin 2010 n° 09-14.102).

Comme le relève justement le tribunal, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys ne sollicitent pas l'annulation de ces phrases qui reflètent quelque peu une exaspération de M. [P] face aux arguments utilisés par les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys et les deux assureurs.

S'il peut être reproché à l'expert d'avoir employé des termes parfois inadaptés voire sarcastiques, les appréciations, qui peuvent être qualifiées de discutables quant à la forme, qu'il a portées dans son rapport ne révèlent aucunement son souhait de favoriser la SAS Entreprise [O] ou la SAS Saur mais traduisent au contraire sa volonté de répondre au plus vite aux observations des parties afin de tenir compte des conditions d'urgence dans lesquelles il a été saisi.

S'il est établi que les Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys ont disposé d'un temps réduit pour formuler des observations et remarques à la suite du chiffrage des désordres fourni par la SAS Entreprise [O], il ne peut pour autant en être déduit que M. [P] a entendu favoriser celle-ci à leur détriment, n'ayant été destinataire que le 31 mai précédent de documents utiles à sa mission adressés par la société en charge du génie civil. L'expert a en outre, dans des courriers des 25 mai 2023 et 1er juin 2023, adressé aux parties ses observations et analyses sur les éléments qu'il avait jusqu'à présent recueillis.

Il sera ajouté que les parties ont bénéficié, nonobstant les conditions d'urgence dans lesquelles M. [P] est intervenu, d'un délai d'un mois entre la date du dépôt du pré-rapport, en l'occurrence sa note n°3 du 6 juin 2023, et celle du rapport définitif (7 juillet 2023). En conséquence, le principe du contradictoire a été respecté.

De même, ce sont les deux assureurs MMA qui ont sollicité un court délai entre la communication du chiffrage du coût des désordres et la date de leur réponse (27 juin -5 juillet 2023). Celles-ci ne justifient pas avoir apporté des éléments en réponse.

Il sera ajouté que le chiffrage retenu par M. [P] n'est qu'une proposition chiffrée qui peut être débattue devant le juge et contredite par la production d'éléments de nature technique, le magistrat disposant d'une liberté d'appréciation sur ce point.

Il en résulte que l'expert judiciaire a accompli sa mission conformément aux textes en vigueur. Aucun grief n'est donc établi.

6 L'expert judiciaire n'était en effet pas missionné pour se prononcer, dans l'hypothèse de l'existence d'un préjudice subi par SAS Entreprise [O], sur les frais annexes invoqués par cette dernière. Pour autant, aucune demande d'annulation partielle portant sur ces éléments n'est formulée par les deux sociétés MMA qui échouent à démontrer que le dépassement de la mission dévolue à M. [P] sur ce point précis doit entraîner la nullité de la totalité de ses travaux.

7 En conclusions, ces éléments motivent dès lors la confirmation du jugement entrepris ayant rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire.

Sur la non-conformité du béton

[M] tribunal a estimé que l'examen des bons de livraison, de ceux de pesée en centrale ainsi que les conclusions du rapport d'analyse établis par le CBTP établissaient la non-conformité du béton livré à la SAS Entreprise [O] par la société Queguiner Matériaux dans la mesure où il ne présentait pas la résistance à la compression contractuellement exigée. Il a donc estimé que la responsabilité contractuelle de cette dernière était engagée en raison de cette non-conformité qui a entraîné pour la SAS Entreprise [O] un préjudice dans la mesure où la communauté de communes a exigé la démolition des bâches puis leur reconstruction.

Les deux MMA font valoir qu'aucune classe de résistance du béton n'a été communiquée à son assurée lors de la commande passée par la société chargée du génie civil. Elles ajoutent que les CCTP, qui en font mention, n'ont pas été adressés à la société Queguiner Matériaux. Elles considèrent que le béton livré est conforme aux stipulations contractuelles et contestent ainsi les conclusions contraires de M. [P]. Elles soutiennent que l'ajout d'eau dans le béton a été nécessairement réalisé à la demande du client de son assurée de sorte qu'aucun reproche ne peut être adressé à cette dernière. Elles indiquent au surplus que les opérations de coulage relèvent de la propre responsabilité de la SAS Entreprise [O]. Elles concluent en précisant que la solidité et la pérennité des ouvrages ne sont pas compromises de sorte qu'il n'y a pas lieu d'envisager la démolition puis la reconstruction des bâches, invitant également la cour à faire application du principe de proportionnalité.

La SAS Saur relève que la clause de résistance à la compression souhaitée n'est pas atteinte par le béton livré à la SAS Entreprise [O] alors que le marché contracté avec la société Queguiner avait bien spécifié la qualité attendue du produit. Elle estime que la non-conformité du produit livré engage la responsabilité contractuelle du fournisseur.

Pour leur part, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys entendent rappeler que les conclusions du Lerm ont été remises en cause par l'expert judiciaire mais également par le technicien qu'elles ont mandaté, en l'occurrence le cabinet CPA, du fait de la non-conformité des prélèvements réalisés. Elles considèrent dès lors que M. [P] ne pouvait se fonder uniquement sur les conclusions de ce laboratoire. Elles contestent avoir procédé au coulage du béton et font valoir que l'ajout d'eau en quantité importante réalisé par SAS Entreprise [O] a eu une incidence sur la résistance et indirectement sur la durabilité du produit. Elles indiquent avoir rempli leurs obligations contractuelles en fournissant un matériau conforme au marché. Elles font également valoir que la SAS Entreprise [O] leur a commandé un béton qui ne correspondait pas à celui exigé par le maître d'ouvrage et soulignent dès lors l'absence de lien de causalité entre sa prestation et la non-conformité invoquée.

Enfin, la SAS Entreprise [O] soutient que les analyses confirment que les bétons livrés ne sont pas conformes à un type XA2 et ne présente donc pas une résistance à la compression de 35 MPa. Elle affirme que la question relative à la non-conformité des prélèvements est sans incidence sur cette non-conformité. Elle prétend avoir alerté à plusieurs reprises son fournisseur sur le problème de la qualité du produit et entend rappeler que les conditions de mise en oeuvre du béton n'ont aucune incidence sur la non-conformité. Elle fait sienne les conclusions de l'expert judiciaire et les motifs retenus par les premiers juges.

Les éléments suivants doivent être relevés :

[M] CCTP définissait les ouvrages hydrauliques de type C1. Il imposait à la SAS Entreprise [O] de :

- respecter les normes béton NF-EN 206/CN et NF-EN 206-1 ;

- 'viser en moyenne des résistances supérieures d'au moins 15% de la valeur caractéristique' du béton.

Il est acquis que ce document n'a pas été porté à la connaissance des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys. Celles-ci ne pouvaient donc être tenues au respect de son contenu.

Ces dernières considèrent dès lors à bon droit qu'il ne peut leur être reproché d'avoir livré un béton ne présentant pas une classe de résistance supérieure d'au moins 15%.

Les différents bons de commande font apparaître que la SAS Entreprise [O] a sollicité la fourniture d'un béton BPS NE EN 206/CN XA[Immatriculation 4]/45 conformément aux exigences formulées par le maître de l'ouvrage.

La classe XA2 signifie que le produit doit résister à des attaques chimiques modérées, notamment lorsqu'il est en contact d'un environnement (eau) comportant un Ph compris entre 4,5 et 5,5. La classe de résistance C35/45 caractérise une résistance à la compression à 28 jours de 35 MPa sur une éprouvette cylindrique (cf rapport IXI p5).

Contrairement à ce que soutiennent les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys, la SAS Entreprise [O], qui y était contractuellement tenue au regard du CCTP, a réalisé des prélèvements du béton dès le démarrage du chantier et pas exclusivement par le Lerm.

[M] fournisseur du béton ne conteste pas avoir été alerté par son cocontractant de l'absence de résistance à la compression de 35 MPa et a modifié à compter du 9 décembre 2022 la formule du produit par le réajustement de son dosage (350kg/m3 au lieu de 335/341 kg/m3).

[M] technicien mandaté par les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys a justement observé que les tests de convenance contractuellement prévus n'avaient pas été effectués par la SAS Entreprise [O]. Toutefois, l'expert judiciaire estime, sans être utilement contredit sur ce point, que cette méthode n'était pas adaptée. En conséquence, l'absence de leur réalisation n'apparaît pas dommageable et n'a aucune incidence sur les autres éléments que M. [P] a collectés relatifs à la qualité du béton livré.

La société titulaire du lot génie civil va alors confier au LERM des prélèvements portant tout à la fois sur le béton initialement livré et celui modifié par la suite.

Ce laboratoire va conclure que la compression à 35 MPa n'est pas atteinte sur plus de 80% des ouvrages de sorte que le produit livré n'est pas de classe C35/45. La norme XA2 ne serait en conséquence pas respectée.

Les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys contestent la méthodologie employée pour réaliser les prélèvements et conserver les éprouvettes avant leur analyse.

M. [P] ne les a pas contredites lorsqu'il indique dans son rapport que les résultats obtenus à la suite de deux carottages qui ont été réalisés sur site sont insuffisamment représentatifs.

C'est l'analyse combinée des nombreux bons de livraison et de pesées en centrale, ainsi que les données fournies par le CBTP qui a conduit l'expert judiciaire à conclure à la non-conformité des bétons livrés. Il a relevé que le produit, qui provenait de deux centrales différentes, n'utilisait pas la même formule en fonction des additifs employés et de la teneur en eau, de sorte que les conditions de fabrication ne pouvaient que générer une hétérogénéité des résultats obtenus en compression. Il a estimé qu'au regard de ces éléments, la compression était en moyenne de 30 a 32 MPa et donc inférieure à la norme contractuelle de 35MPa.

Ont été justement écartées les conditions de mise en oeuvre du béton par la SAS Entreprise [O] en tant que cause des résultats insuffisants visés ci-dessus.

L'ajout ultérieur d'eau dans le béton, qui doit être différencié de celui réalisé lors de la fabrication (notamment lors des opérations de pompage) a été réalisé par la SAS Entreprise [O] et non les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys. Mais cette intervention n'a aucune incidence sur les résultats obtenus, l'expert qualifie cette adjonction d'insignifiante car n'ayant concerné que trois toupies.

Ces éléments sont contestés par le cabinet mandaté par les fournisseurs du béton mais il doit être relevé que son analyse ne prend pas en considération les caractéristiques du béton résultat du contrat conclu entre ceux-ci et la SAS Entreprise [O].

Si la recherche de rentabilité de la part du fournisseur du béton, évoquée par M. [P] dans son rapport ne semble pas établie, il apparaît ainsi que le produit livré par les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys présentait un défaut de conformité contractuelle de sorte que l'obligation du vendeur prévue à l'article 1604 du Code civil n'a pas été respectée.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

[M] recours en garantie formé par les sociétés ayant fourni le béton à l'encontre de leur client repose sur l'existence d'une faute commise par cette dernière leur ayant occasionné un préjudice (ajout d'eau, modalités de mise en oeuvre). Or les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys n'en rapportent pas la preuve de sorte que la décision de première instance sera également confirmée sur ce point.

Sur le préjudice de la SAS Entreprise [O]

Les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys entendent rappeler le très court délai qui leur a été imparti par l'expert judiciaire pour analyser la question du coût des travaux de reprise. Elles invoquent l'absence d'atteinte à la solidité et la pérennité des deux bâches pour soutenir que leur démolition n'est absolument pas justifiée car seuls des travaux nécessaires seraient susceptibles de faire l'objet d'une indemnisation. Elles allèguent l'absence de tout désordre de sorte que la réparation du préjudice ne peut consister en la destruction puis la reconstruction de l'ouvrage. Elles considèrent que le chiffrage a été unilatéralement effectué par la SAS Entreprise [O] sans aucun contrôle ni aucune vérification, tant de l'expert que des parties, que ce soit sur site ou en fonction des pièces produites. Elles réclament en conséquence l'infirmation de la décision entreprise sur ce point.

Leurs deux assureurs MMA insistent également sur l'absence de toute nécessité de procéder à la démolition puis la reconstruction des deux bâches. Elles prétendent qu'une limite doit être apportée au principe de la réparation intégrale du préjudice dès lors qu'elle apparaît disproportionnée au regard de la nature et de l'ampleur des désordres. Elles observent que le coût des différentes investigations réalisées pour déterminer la qualité du béton ainsi que celui relatif à l'arrêt du chantier n'ont pas été débattus devant l'expert judiciaire et sont en l'état injustifiés.

La SAS Saur fait valoir que M. [P] a estimé que les préjudices liés à l'arrêt du chantier étaient bien réels. Elle entend rappeler qu'elle avait chiffré son préjudice à la SAS Entreprise [O] dans différents courriels qu'elle verse aux débats.

En réponse, la SAS Entreprise [O] indique que l'expert judiciaire a validé le quantum de son préjudice. Au regard des coûts des analyses nécessaires afin d'apprécier la qualité du béton, de déconstruction/reconstruction, ceux liés à l'arrêt du chantier, d'encadrement et de maîtrise du chantier, elle sollicite désormais la somme totale de 304 922,35 euros.

Les éléments suivants doivent être relevés :

Il est acquis que la non-conformité du béton n'occasionne aucune difficulté structurelle des deux bâches de stockage d'eau nonobstant la plus grande porosité du produit livré. M. [P] estime que les deux ouvrages peuvent être conservés. Il préconise la réalisation d'un cuvelage dans l'hypothèse d'une conservation des deux réservoirs d'eau en l'état et de recherche d'une meilleure longévité. Il conclut clairement en indiquant que la démolition ne se justifie pas sur un plan technique.

Pour autant, après avoir fait procéder à l'arrêt temporaire du chantier à compter du 6 février 2023 suivant l'ordre de service n°3, le maître de l'ouvrage a exigé la démolition et la reconstruction en conformité avec les normes figurant au CCTP. Il a également refusé la proposition alternative présentée par la SAS Entreprise [O]. Cette dernière pouvait dès lors, en raison de l'absence de conformité du béton, voir engager sa responsabilité contractuelle envers la communauté de commune du fait du non-respect des termes du marché. Ainsi, face aux exigences légitimes du maître de l'ouvrage, relayées par le maître d'oeuvre, et la suite d'une réunion commune en date du 18 juillet 2023, la société titulaire du lot génie civil a été contrainte de proposer un protocole prévoyant la démolition et la reconstruction intégrale des deux bâches de stockage d'eau.

Il résulte de la lecture des comptes rendus de chantier que les travaux 'de reprise', après expertise d'un architecte pour constater les avoisinants suite à une décision du juge des référés du tribunal administratif de Nantes, ont débuté au mois de mars 2024, soit un peu plus de 42 semaines après l'interruption du chantier.

L'expert judiciaire, certes dans un délai assez court et après avoir accordé un délai supplémentaire à certaines parties pour pouvoir prendre connaissance des chiffrages produits par la SAS Entreprise [O] et y répondre, sans qu'il puisse lui être reproché l'absence d'organisation d'une réunion contradictoire sur ce point, a validé le coût des travaux de démolition (255 590 euros HT) et de reconstruction (1 320 079,94 euros HT). Cependant, il sera observé que la SAS Entreprise [O] sollicite la confirmation du jugement entrepris ayant retenu un montant relatif à ces derniers travaux de 1 238 348 euros HT.

Ces sommes constituent une partie du préjudice qu'elle a subi et qui est directement en lien avec la non-conformité du béton commandé auprès des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys. Une réduction de son montant en application du principe de disproportion ne peut donc être opérée.

Les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys réclament de nouveau devant la cour la limitation du montant de leur condamnation en application des dispositions prévues au contrat de vente qui stipulait, au titre de la garantie des BPE (bétons prêts à l'emploi) fournis au professionnel : 'La garantie de nos bétons est de convention expresse limitée, à notre choix, soit au remplacement des produits reconnus défectueux, soit au remboursement de leur valeur avant emploi, sans indemnité, ni dommages et intérêts d'aucune sorte'.

Cette clause a été portée à la connaissance de la SAS Entreprise [O] comme l'attestent les factures émises par la société fournisseur du béton les 14 novembre 2022 et 14 janvier 2023 qui ont été intégralement payées sans aucune réserve sur ce point.

Cependant, comme l'a justement indiqué le tribunal, seule la fourniture de produits non conformes, et non de produits défectueux, est reprochée aux sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys.

Dès lors, la limitation du montant de sa condamnation au paiement du coût des travaux de démolition-reconstruction des deux bâches de stockage d'eau stipulée par la clause susvisée n'est pas applicable au présent litige. La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Pour le surplus, le tribunal a débouté la société titulaire du lot génie civil de ses demandes d'indemnisation au titre des frais d'analyses et d'investigations, des calculs complémentaires, des frais d'assistance de commissaires de justice et d'expertise technique, du coût de l'encadrement de la maîtrise et de l'arrêt du chantier et la perte des frais généraux.

La SAS Entreprise [O] réitère ses prétentions en cause d'appel.

En réponse, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys estiment que la société titulaire du lot génie civil ne peut se constituer des preuves à elle-même pour fonder ses demandes indemnitaires.

Les éléments suivants doivent être relevés :

Face à la contestation de la non-conformité du béton, la SAS Entreprise [O] a été contrainte de faire procéder à des investigations de nature technique par la société SFB (4 410 euros), le laboratoire CBTP (10 334,7 euros mais celle-ci réclame la somme de 10 206,25 euros), Les frais d'assistance à expertise de M. [N] (3 600 euros), de constat, de commissaire de justice et postaux seront pris en compte au titre de l'indemnité fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile. Sera exclu le montant facturé par le laboratoire Lerm car les résultats obtenus par celui-ci sont sans incidence sur la solution du litige.

[M] préjudice représentant la somme totale de 14 616,25 euros sans indexation.

Il est acquis au regard notamment des divers comptes rendus de chantier versés par la SAS Saur mais également à la lecture de l'ordre de service n°5bis du 13 février 2024 que la SAS Entreprise [O] s'est exécutée en reprenant intégralement sa prestation pour le compte du maître de l'ouvrage.

Au regard de ces documents, ces travaux ont duré plusieurs mois.

La SAS Entreprise [O] fournit des documents qu'elle a elle-même confectionnés pour attester le paiement des salaires d'un conducteur de travaux, d'un chef de chantier et les frais inhérents au chantier (fourniture des matériaux, bennes, échafaudage, ciment, etc).

Les autres parties contestent le chiffrage du coût des travaux 'de reprise'.

L'existence du préjudice allégué n'est pas contestable de sorte que la cour ne peut rejeter la demande en l'état comme l'a fait le tribunal de sorte que la décision déférée sera infirmée sur ce point. Toutefois, insuffisamment éclairée, la cour ordonnera une mesure d'expertise judiciaire afin de le chiffrer, étant observé que cette mission n'avait pas été préalablement confiée à M. [P].

L'expert devra donc déterminer quel est le préjudice réel supporté par la SAS Entreprise [O] au titre du coût de l'arrêt du chantier (frais de location de divers matériels, achats de matériaux nécessaires pour démolir et reconstruire, temps passé par son personnel), et de l'encadrement du chantier exposé à perte (coût du personnel employé pour effectuer de nouveau les travaux suite à la non-conformité), en lien avec l'opération de démolition/reconstruction des deux bâches de chauffage.

Sur le préjudice de la SAS Saur

[M] tribunal a rejeté les demandes d'indemnisation présentées par la SAS Saur en estimant que celle-ci ne démontrait pas la faute qui aurait été commise à son encontre par la SAS Entreprise [O] et les sociétés ayant livré le béton. Il a considéré que les autres préjudices invoqués n'étaient pas suffisamment démontrés.

La SAS Saur entend rappeler qu'elle n'a pas été conviée aux opérations d'expertise judiciaire. Elle estime avoir subi un préjudice financier résultant de la non-conformité du béton livré qui a contraint la SAS Entreprise [O] à démolir puis reprendre son ouvrage. Elle invoque l'application des articles 4, 5.2 et 11 de la convention de groupement qu'elle a conclu avec la société titulaire du lot génie civil et réclame dès lors sa condamnation au titre de sa responsabilité contractuelle en raison des fautes commises par celle-ci. Elle sollicite, en tant que tiers au contrat conclu avec la société Queguiner, la condamnation des parties adverses en raison de leur manquement à l'obligation de délivrance, ainsi que la garantie des deux assureurs MMA. Elle réclame à l'ensemble des parties le versement d'une indemnité d'un montant de 304 250,62 euros.

Les deux sociétés MMA soulignent l'absence de production par la SAS Saur de documents comptables attestant le préjudice allégué, précisant que la seule attestation de son directeur financier est nettement insuffisante pour constituer un élément probant.

Pour leur part, les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys se contentent de solliciter la confirmation du jugement attaqué.

Enfin, la SAS Entreprise [O] ne formule aucune observation se rapportant aux demandes de la SAS Saur et ne réclame pas dans son dispositif le rejet des prétentions de cette dernière.

Les éléments suivants doivent être relevés :

[M] chantier a été initialement confié :

- à la SAS Entreprise [O] au titre de la réalisation du lot génie civil ;

- à la SAS Saur au titre des travaux d'équipement des installations mais également en sa qualité de mandataire des membres du groupement vis à vis du maître de l'ouvrage.

La SAS Saur reproche à la SAS Entreprise [O] la commission d'une faute :

- en ne respectant pas les dates contractuelles de mise à dispositions des deux bâches ;

- en refusant toute intervention en démolition-reconstruction dans l'attente du prononcé du jugement.

La SAS Saur réclame l'indemnisation :

- résultant de la mobilisation supplémentaire de son personnel d'encadrement durant les opérations de démolition-reconstruction ;

- découlant du retard pris ainsi par la SAS Entreprise [O] pour l'exécution de sa prestation comme l'attestent les plannings contractuels qui lui sont opposables ;

- du coût de différentes démarches, recours à un expert d'assurance, d'organisation de réunions, de démarches diverses pour préparer et suivre les opérations de démolition-reconstruction.

Si l'expert judiciaire a qualifié les préjudices liés à l'arrêt du chantier de bien réels, il ne s'agissait pas de ceux invoqués par la SAS Saur car il n'était pas saisi de cette question par la juridiction l'ayant désigné.

Il est évident que l'attestation du directeur financier de la SAS Saur n'est à elle seule pas suffisante pour démontrer le préjudice qui existe nécessairement dans la mesure où celle-ci, mandataire des membres du groupement vis à vis du maître de l'ouvrage, a nécessairement été 'impactée' par les opérations de démolition-reconstruction qui ont été effectivement entreprises par la SAS Entreprise [O] comme l'attestent les comptes rendus de chantier. Leur durée apparaît en revanche quelque peu incertaine.

[M] jugement entrepris ayant rejeté les demandes présentées par la SAS Saur sera infirmé.

Seule la désignation d'un expert, qui pourra s'entourer de l'aide d'un sapiteur le cas échéant, permettra de chiffrer ce préjudice qui ne peut en l'état être qualifié d'hypothétique ou d'incertain comme l'a indiqué à tort le tribunal.

Sur la garantie des deux sociétés MMA.

[M] tribunal a constaté que les deux sociétés MMA ne contestaient pas leur garantie mais que celles-ci ne justifiaient pas du montant du plafond de garantie qu'elles invoquaient pour limiter les indemnités d'assurance devant être allouées. Il a cependant précisé dans son dispositif que celles-ci pouvaient appliquer au titre des assurances facultatives 'les limites contractuelles (plafond) tant à l'assurée qu'aux tiers'.

Estimant que la couverture assurantielle de ses assurées les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys, à supposer leur responsabilité établie, est mobilisable au titre de la garantie facultative 'produit défectueux' dans la mesure où la qualité du béton livrée par ses assurées serait en cause, les deux assureurs appelantes entendent faire valoir l'existence d'un plafond de garantie à hauteur de la somme de 609 000 euros.

La SAS Saur fait valoir que les deux assureurs ne justifient toujours pas de la réalité du plafond de garantie en ne produisant pas en cause d'appel les documents y afférents.

Enfin, la SAS Entreprise [O] et les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys réclament la garantie des deux sociétés MMA. La SAS Entreprise [O] estime que la clause limitative de responsabilité invoquée par les assureurs de son fournisseur est inapplicable et que seul le plafond de garantie de 2 millions d'euros par sinistre au titre des dommages matériels et immatériels est susceptible de recevoir application.

Les éléments suivants doivent être relevés :

Il appartient à l'assureur qui invoque une limitation de sa garantie, et non une clause d'exclusion comme le soutient à tort la SAS Saur, d'en apporter la démonstration.

[M] tribunal se devait de répondre à la question relative à l'application du plafond de garantie de 609 000 euros allégué par les deux MMA, son dispositif laissant subsister un problème d'interprétation qui aurait nécessairement abouti au dépôt par une ou plusieurs parties d'une requête en ce sens.

Il a été rappelé ci-dessus que la responsabilité des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys est engagée en raison d'un manquement à leur obligation de conformité et non en raison de la livraison d'un produite défectueux ou atteint d'un vice caché.

En conséquence, les deux sociétés MMA ne peuvent soutenir que la seule garantie applicable est celle relative aux produits défectueux.

Comme le relève justement le tribunal dans les motifs de sa décision mais également la SAS Entreprise [O], le plafond de garantie, au titre de la responsabilité civile après livraison, est de 2 millions d'euros par sinistre. Il est opposable tant aux assurées qu'aux tiers.

En conséquence, le jugement déféré sera complété sur ce point.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

La décision de première instance sera confirmée sur ce point, à l'exception du rejet des demandes présentées par la SAS Saur en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile qui seront réservées.

Les prétentions formulées au titre des frais irrépétibles exposés en appels seront réservées.

Si les dépens de première instance demeureront à la charge des sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys et des deux assureurs MMA, ceux d'appel seront réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu le 7 mars 2024 par le tribunal judiciaire de Brest en ce qu'il a :

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire,

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys de leur demande tendant à faire application de la clause limitative de responsabilité,

- condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à la société par actions simplifiée Entreprise [O] les sommes de :

- 255 590 euros HT au titre de démolition de l'ouvrage,

- 1 238 348 euros HT au titre de la reconstruction de l'ouvrage,

- débouté les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys de leur appel en garantie à l'égard de la société par actions simplifiée Entreprise [O],

- déclaré que les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles pourront appliquer au titre des assurances facultatives les limites contractuelles (plafond) tant à l'assurée qu'au tiers, avec la précision que le plafond de garantie est égal à la somme de 2 000 000 d'euros par sinistre,

- condamné in solidum les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement:

- des entiers dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la Selarl Chevalier & Associes en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- à la société Entreprise [O] la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les demandes présentées par les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne la société par actions simplifiée Entreprise [O] au paiement aux sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton et Celtys de la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

- Infirme la décision déférée en ce qu'elle a :

- rejeté les demandes présentées par la société par actions simplifiée Entreprise [O] au titre :

- des frais d'analyse et des coûts relatifs aux investigations,

- du coût de l'arrêt du chantier,

- du coût d'encadrement du chantier exposé à perte,

- rejeté les demandes présentées par la société par actions simplifiée Saur au titre :

- des frais exposés en raison de l'interruption du chantier ;

- des frais exposés lors des opérations de démolition-reconstruction des deux bâches ;

- des autres dépenses alléguées en lien direct avec le sinistre;

- rejeté les demandes présentées par la société par actions simplifiée Saur en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

et, statuant à nouveau dans cette limite :

- Condamne la société MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement à la société par actions simplifiée Entreprise [O] de la somme de 14 616,25 euros en réparation du montant des frais d'analyse et des coûts relatifs aux investigations, avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2023 et capitalisation des intérêts par années entières conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil,

Sursoit à statuer sur les demandes présentées par :

- la société par actions simplifiée Entreprise [O] au titre :

- du coût de l'arrêt du chantier,

- du coût d'encadrement du chantier exposé à perte,

- la société par actions simplifiée Saur au titre :

- des frais exposés en raison de l'interruption du chantier ;

- des frais exposés lors des opérations de démolition-reconstruction des deux bâches ;

- des autres dépenses alléguées en lien direct avec le sinistre;

- Ordonne la réouverture des débats sur ce point ainsi que l'organisation d'une mesure d'expertise ;

- Commet pour y procéder M. [Z] [U], KPMG [Adresse 6], Tél : [XXXXXXXX01] Mèl : [Courriel 9], avec pour mission, après avoir pris connaissance des faits de la cause et s'être fait remettre tous documents utiles par les parties :

- se rendre sur les lieux du chantier mais uniquement s'il l'estime nécessaire à l'exercice de sa mission ;

- prendre connaissance des données du présent litige, des pièces produites par la SAS Entreprise le Bris et la SAS Saur à l'appui de leurs demandes indemnitaires, et procéder à leur analyse ;

- prendre connaissance des pièces et éléments produits en réponse par les sociétés Queguiner Matériaux, Queguiner Béton, Celtys, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, et les analyser ;

- se prononcer sur l'existence des préjudices allégués par :

- la société par actions simplifiée Entreprise [O], s'agissant :

- du coût de l'arrêt du chantier,

- du coût de l'encadrement du chantier exposé à perte,

- et par la société par actions simplifiée Saur au titre :

- des frais exposés en raison de l'interruption du chantier,

- des frais exposés lors des opérations de démolition-reconstruction des deux bâches,

- des autres dépenses alléguées en lien direct avec le sinistre,

- et, dans l'affirmative, procéder à leur chiffrage,

- fournir tous éléments de fait de nature à permettre à la cour de statuer sur le bien fondé et, dans l'affirmative, sur le chiffrage des indemnités réclamées,

- faire toutes observations utiles à la solution du litige,

Dit que lors de la première réunion qui devra se dérouler dans un délai maximum d'un mois à compter de l'avis donné par le greffe de la consignation de la provision, l'expert devra, en concertation avec les parties, dresser un programme de ses investigations et proposer d'une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires, de ses frais et débours, ainsi que la date de dépôt de son rapport avant d'adresser ces informations au juge chargé du contrôle lequel rendra, si nécessaire, une ordonnance complémentaire fixant le montant de la provision complémentaire ainsi que le délai prévu pour le dépôt du rapport,

Invite l'expert à solliciter, en leur adressant un pré-rapport, les observations des parties dans un délai qu'il fixera et à y répondre dans son rapport définitif conformément aux dispositions de l'article 276 du code de procédure civile,

Rappelle que l'expert peut s'adjoindre d'initiative, si besoin est, un technicien dans une autre spécialité que la sienne dont le rapport sera joint à son rapport définitif en application des articles 278 et 282 du code de procédure civile et/ou se faire assister par une personne de son choix intervenant sous son contrôle et sa responsabilité en application de l'article 278-1 du code de procédure civile,

Fixe à la somme de 5 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que la société par actions simplifiée Entreprise [O] et la société par actions simplifiée Saur, à raison de la moitié de ce montant pour chacune d'entre-elles, devront consigner au moyen d'un virement effectué à l'ordre du régisseur de la cour d'appel de Rennes dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, faute de quoi la désignation de l'expert sera caduque,

Dit que l'expert devra déposer son rapport dans un délai de 7 mois à compter du jour où il sera informé de la consignation sauf demande de prorogation motivée de ce délai adressée au juge chargé du contrôle des expertises,

Dit qu'en cas de difficulté, il en sera référé par simple requête de la partie la plus diligente au président de la chambre de la cour chargé du contrôle des expertises,

Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert désigné il pourra être pourvu à son remplacement par ordonnance prise par le juge chargé du contrôle des expertises,

Dit que lors du dépôt de son rapport, accompagné de sa demande de rémunération, l'expert devra adresser un exemplaire de celle-ci aux parties par le moyen de son choix permettant d'en établir la date de réception, que les parties pourront s'il y a lieu adresser à l'expert et au magistrat chargé du contrôle des opérations leurs observations écrites sur la demande de rémunrétaion faite par l'expert dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la copie de la demande de rémunération,

Renvoie l'affaire à la mise en état du 2 juin 2026 à 10h30

Réserve les dépens et les demandes formées par les parties au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

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