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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 10, 18 septembre 2025, n° 22/08498

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Deka (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Devillers

Conseillers :

Mme Morlet, Mme Zysman

Avocats :

Me Fernandes, Me Greiner, Me Tanguy-Martin, Me Minne Guerroudj

TJ Bobigny, du 22 févr. 2022, n° 20/0215…

22 février 2022

EXPOSE DU LITIGE

Le 23 juillet 2017, M. [U] [H] a acquis auprès de la société Ambulances Omega 75 un véhicule d'occasion de marque Citroën modèle C4 Picasso immatriculé [Immatriculation 8] mis en circulation pour la première fois le 21 octobre 2014.

Le 13 février 2018, M. [H] a conclu avec la société Deka exerçant sous le nom commercial Hanker Cars un mandat de vente portant sur ce véhicule.

Le 13 juin 2018, Mme [W] [Y] a signé un bon de commande portant sur ce véhicule moyennant le prix de 13.500 euros. La déclaration de cession entre Mme [Y] et M. [H] a été signée le 27 juin 2018.

Le 28 novembre 2018, Mme [Y] a endommagé son véhicule en percutant une barrière de parking au niveau de l'aile avant droite, de la porte avant droite et du bas de caisse latéral droit. Dans le cadre des opérations de réparation du véhicule, le garagiste a constaté que plusieurs faisceaux électriques avaient été coupés. Les travaux de réparation ont été arrêtés et le véhicule a fait l'objet d'une mesure d'expertise amiable le 10 avril 2019 à la demande de l'assureur protection juridique de Mme [Y]. L'expert, dans son rapport du 31 mai 2019, indique que le véhicule a fait l'objet d'une procédure VGE (Véhicule Gravement Endommagé) en 2015, qu'il présente un montage non normalisé du faisceau de porte avant droite et que ce montage génère des dysfonctionnements électriques, concluant que la responsabilité de M. [H] peut être recherchée.

Par acte du 7 février 2020, Mme [W] [Y] a fait assigner la société Deka et M. [U] [H] devant le tribunal judiciaire de Bobigny en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés prévue par les articles 1641 et suivants du code civil.

Par jugement du 22 février 2022, le tribunal a :

- déclaré Mme [W] [Y] recevable mais mal fondée en son action en garantie des vices cachés à l'encontre de la société Hanker Cars Deka et de M. [U] [H] et l'a déboutée tant de sa demande en résolution de la vente que de ses demandes en paiement des sommes de 13.500 euros en restitution du prix et de 8.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- déclaré la société Hanker Cars Deka et M. [U] [H] recevables mais mal fondés en leurs demandes reconventionnelles sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et les en a déboutés,

- condamné Mme [W] [Y] à payer à la société Hanker Cars Deka la somme de 2.000 euros et à M. [U] [H] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [W] [Y] aux entiers dépens de l'instance,

- rappelé que la décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions, et notamment Mme [W] [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a relevé que la société Hanker Cars Deka n'avait pas la qualité de vendeur et ne pouvait donc pas être tenue de la garantie des vices cachés prévue par les articles 1641 et suivants du code civil.

S'agissant des demandes formées à l'encontre de M. [H], le tribunal a retenu que Mme [Y] ne rapportait pas la preuve de l'impropriété du véhicule à son usage, l'expert n'ayant pas décrit les désordres électriques générés par le montage non normalisé du faisceau de porte avant droite qu'il a pu constater, et l'a donc déboutée de toutes ses demandes.

Par déclaration du 26 avril 2022, Mme [Y] a interjeté appel de ce jugement, intimant la société Hanker Cars Deka et M. [H] devant la cour.

Par ordonnance du 18 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré recevables les conclusions en date du 23 novembre 2022 de Mme [Y],

- débouté Mme [Y] de sa demande d'expertise,

- débouté la société Hanker Cars Deka de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [Y] aux dépens de l'incident.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2025, Mme [W] [Y] demande à la cour de :

Vu le jugement de première instance du 22 février 2022,

Vu le rapport de l'expertise amiable,

Vu les articles cités,

Vu les pièces versées au débat,

- Déclarer l'appel interjeté par Mme [W] [Y] recevable et bien-fondé,

- Infirmer le jugement rendu le 22 février 2022 par le tribunal judiciaire de Bobigny en ce qu'il a :

' déclaré Mme [W] [Y] recevable mais mal fondée en son action en garantie des vices cachés à l'encontre de la société Hanker Cars Deka et de M. [U] [H] et l'a déboutée tant de sa demande en résolution du prix de vente que de ses demandes des sommes de 13.500 euros en restitution du prix et de 8.000 euros à titre de dommages-intérêts,

' condamné Mme [W] [Y] à payer à la société Hanker Cars Deka la somme de 2.000 euros et à M. [U] [H] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné Mme [W] [Y] aux entiers dépens de l'instance,

' débouté Mme [W] [Y] de sa demande de juger que la société Hanker Cars Deka a manqué à son obligation de délivrance conforme en lui vendant un véhicule avec un contrôle technique erroné,

' débouté Mme [W] [Y] de sa demande de voir condamnés solidairement la société Hanker Cars Deka et M. [U] [H] lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouté Mme [W] [Y] de sa demande de voir condamnés solidairement la société Hanker Cars Deka et M. [U] [H] aux entiers dépens,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- Juger l'existence d'un vice caché sur le véhicule de marque Citroën modèle C4 Picasso immatriculé sous le numéro [Immatriculation 8],

- Juger que la société Hanker Cars Deka a manqué à son obligation précontractuelle d'information,

En conséquence,

- Prononcer la nullité de la vente intervenue le 27 juin 2018 entre Mme [Y] et M. [H] et la société Hanker Cars Deka sur le véhicule de marque Citroën modèle C4 Picasso immatriculé sous le numéro [Immatriculation 8] pour vice cachés,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à restituer à Mme [Y] le prix de cession du véhicule d'un montant de 13.500 euros majoré des intérêts de retard au taux légal à compter du prononcé de la décision,

- Ordonner l'enlèvement du véhicule aux entiers frais de M. [H] et de la société Hanker Cars Deka sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à régler à Mme [Y] la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à régler à Mme [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

A titre subsidiaire,

- Juger que le contrat de vente intervenue entre la société Hanker Cars Deka et l'acheteur Mme [Y] est nul pour dol,

- Juger que la société Hanker Cars Deka a failli à son obligation de délivrance conforme, En conséquence,

- Prononcer la résolution de la vente intervenue le 27 juin 2018 entre Mme [Y] et M. [H] et la société Hanker Cars Deka sur le véhicule de marque Citroën modèle C4 Picasso immatriculé sous le numéro [Immatriculation 8],

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à restituer à Mme [Y] le prix de cession du véhicule d'un montant de 13.500,00 euros majoré des intérêts de retard au taux légal à compter de la date de la décision à intervenir

- Ordonner l'enlèvement du véhicule aux frais de M. [H] et de la société Hanker Cars Deka sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à régler à Mme [Y] la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à régler à Mme [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

A titre très subsidiaire,

- Ordonner une expertise judiciaire et désigner tel expert qu'il plaira à la cour d'appel de Paris de nommer, avec la mission suivante :

' convoquer les parties et se rendre sur les lieux,

' se faire communiquer et prendre connaissance de tous documents intéressant le litige, et entendre les parties et leurs conseils,

' procéder à l'examen du véhicule en cause,

' décrire les désordres qui l'affectent dans leur nature et leur importance,

' en déterminer les causes techniques,

' dire si les désordres préexistaient à la date de la vente du 27 juin 2018 et s'ils trouvent leur origine dans un défaut caché du véhicule,

' dire s'ils étaient apparents au jour de la vente pour un profane,

' dire si les désordres rendent le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné ou s'ils en diminuent l'usage,

' dire si les désordres affectent la valeur du bien et dans quelle mesure,

' fournir des éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction saisie de déterminer les responsabilités encourues et évaluer s'il y a lieu tous les

préjudices subis,

' indiquer les travaux propres à remédier à ces désordres et à leurs conséquences dommageables, et en évaluer le coût,

' en cas d'urgence reconnue par l'expert, autoriser le demandeur à faire exécuter à ses frais avancés, les travaux estimés indispensables par l'expert et sous son constat, lequel dans ce cas déposera un pré-rapport précisant la nature et l'importance des travaux,

' établir un pré-rapport et le soumettre à la contradiction des parties,

' répondre à tous les dire des parties,

' à l'issue de ces opérations, dresser un rapport et le déposer au greffe de la juridiction,

' réserver les dépens,

- Prononcer l'interruption de toutes prescriptions, notamment sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil,

En tout état de cause,

- Débouter la société la société Deka de sa demande reconventionnelle de dommages intérêts du préjudice financier de 50.000 euros et 4.000 euros pour le préjudice moral du représentant légal,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka à régler à Mme [Y] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile,

- Condamner in solidum M. [H] et la société Hanker Cars Deka aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Priscillia Fernandes, avocat au barreau de Paris.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 juillet 2023, la société Deka demande à la cour de :

Vu le mandat de vente en date du 13 février 2018,

Vu le bon de commande en date du 13 juin 2018,

Vu les articles 16, 1130, 1131, 1137, 1139, 1603, 1604, 1984 et suivants du code civil,

Vu les articles 32-1, 145, 564, 567 et 700 du code de procédure civile,

Vu les jurisprudences susvisées,

Vu les pièces versées au débat,

- Confirmer le jugement rendu le 22 février 2022 par le tribunal judiciaire de Bobigny en ce qu'il déclare Mme [Y] mal fondée en son action et la déboute de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

A titre liminaire :

- Déclarer irrecevable la demande d'expertise de Mme [Y],

Par conséquent,

- Rejeter la demande d'expertise de Mme [Y],

A titre principal :

- Déclarer irrecevables comme constituant des prétentions nouvelles l'ensemble des demandes de Mme [Y],

Par conséquent,

- Débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions formulées à l'égard de la société Deka,

Subsidiairement :

- Constater l'exclusion de la responsabilité de la société Deka en tant que mandataire en cas de réclamation quant au fonctionnement du véhicule,

- Dire que la demande de nullité de la vente pour dol de Mme [Y] est mal fondée,

- Dire que la demande de résolution pour défaut de délivrance conforme de Mme [Y] est mal fondée,

- Déclarer le rapport d'expertise du 31 mai 2019 inopposable à la société Deka,

- Dire que les éventuels défauts ne compromettent pas l'usage du véhicule,

- Dire que le préjudice allégué par Mme [Y] n'est pas justifié,

- Débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions formulées à l'égard de la société Deka,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Condamner Mme [Y] à verser à la société Deka la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier,

- Condamner Mme [Y] à verser à la société Deka la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral de son représentant,

- Condamner Mme [Y] à verser à la société Deka la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Mettre à la charge de Mme [Y] les entiers dépens de première instance et d'appel.

La cour renvoie aux conclusions précitées des parties pour ce qui concerne l'exposé détaillé de leurs moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

M. [H] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

La clôture a été prononcée le 14 mai 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'existence de demandes nouvelles

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Il résulte toutefois de l'article 565 du même code que les prétentions ne sont pas nouvelles lorsqu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En l'espèce, les demandes subsidiaires formulées par Mme [Y] tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, à savoir la résolution de la vente, mais reposent sur des moyens juridiques nouveaux. Elle ne constituent pas des demandes nouvelles et sont donc recevables.

Sur la résolution de la vente pour vices cachés

En application des dispositions de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il incombe à l'acheteur de rapporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères. Il doit ainsi établir que la chose vendue est atteinte d'un vice inhérent constituant la cause des défectuosités et présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose. Il doit également démontrer que le vice existait antérieurement à la vente au moins en l'état de germe et n'était ni apparent, ni connu de lui, le vendeur n'étant pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même conformément à l'article 1642 du code civil.

L'article 1643 du même code précise que le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus.

Selon l'article 1644 du code civil, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

Enfin, en application des articles 1645 et 1646 du code civil, le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur, tandis que le vendeur qui ignorait les vices de la chose n'est tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente, qui s'entendent des dépenses directement liées à la conclusion du contrat. Au vendeur qui connaissait les vices de la chose est assimilé celui qui, par sa profession, ne pouvait les ignorer.

En application des textes précités, seul le vendeur de la chose est en principe tenu de garantir l'acheteur contre les vices cachés présentés par celle-ci. Le professionnel intervenu en qualité de mandataire de vente ne peut être tenu d'une telle garantie que s'il est établi qu'il a dissimulé sa qualité de mandataire à l'acquéreur et qu'il s'est comporté comme étant le vendeur de la chose, de sorte que l'acquéreur pouvait légitimement penser qu'il avait en réalité contracté avec le vendeur.

En l'espèce, c'est à bon droit que le premier juge a retenu, au vu du certificat d'immatriculation du véhicule litigieux, que le 27 juin 2018, date de sa vente à Mme [Y], M. [H] en était le propriétaire de sorte que ce dernier était le seul à avoir la qualité de vendeur au sens de l'article 1641 du code civil et que la société Deka, en sa qualité de mandataire du vendeur, justifiée par la production d'un mandat de vente conclu le 13 février 2018 avec M. [H], n'était pas tenue à l'égard de l'acheteur de la garantie des vices cachés.

Il convient d'ajouter que si le bon de commande du 13 juin 2018 a été signé par la société Deka en tant que « vendeur », Mme [Y] n'a pu ignorer que le véhicule n'appartenait pas à cette dernière mais à M. [H] dont le nom figurait, au jour de la vente, sur le certificat d'immatriculation et la déclaration de cession. En outre, il résulte des messages SMS échangés avec la société Deka préalablement à la vente que cette dernière a indiqué à Mme [Y], le 2 juin 2018, que la proposition de prix à hauteur de 13.500 euros avait été soumise à son client et validée, laissant ainsi bien apparaître sa qualité de mandataire.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il débouté Mme [Y] de ses demandes formées à ce titre à l'encontre de la société Deka.

S'agissant de la demande formée à l'encontre de M. [H], Mme [Y] produit, comme en première instance, le rapport d'expertise amiable établi par le cabinet [C], mandaté par son assureur protection juridique, dont il résulte que :

- le véhicule a été mis en circulation pour la première fois le 21 octobre 2014,

- le 14 octobre 2015, il a fait l'objet d'une procédure VGE (Véhicule Gravement Endommagé), l'historique faisant état d'un choc sur la partie avant/latéral et d'un montant de réparations de 14.003 euros,

- le 23 novembre 2018, Mme [Y] a endommagé son véhicule en percutant une barrière de parking au niveau de l'aile avant droite, de la porte avant droite et du bas de caisse latéral droit,

- le 10 décembre 2018, après avoir dégarni le véhicule, le garagiste a constaté une réparation non conforme du faisceau de porte avant droite,

- le 11 décembre 2018, l'expert d'assurance a constaté des séquelles de réparations antérieures non conformes,

- lors des opérations d'expertise qui se sont déroulées le 10 avril 2019 en présence notamment de Mme [Y] et de M. [H], l'expert a constaté la présence de traces de séquelle de réparation sur le pied de porte et le support d'aile avant droite, ainsi que le montage non conforme du faisceau de porte avant droite, des fils coupés et shuntés, certains fils n'étant plus alimentés. Il conclut que ce véhicule présente un montage non normalisé du faisceau de porte avant droite et que ce montage génère des dysfonctionnements électriques, qu'il n'est pas possible de voir ce montage non conforme, la garniture cachant les faisceaux électriques, que ces derniers constituent des vices cachés en ce qu'ils n'étaient pas visibles et qu'ils étaient présents au moment de la vente, Mme [Y] n'ayant fait aucune intervention sur le véhicule depuis son acquisition. Il évalue le coût de remise en état des faisceaux électriques à la somme de 3.403,01 euros.

Cependant, l'expert ne décrit pas les désordres électriques générés par le montage non normalisé du faisceau de porte avant droite qu'il a constaté et n'indique pas que ce défaut rendrait le véhicule impropre à son usage.

Au vu de ces éléments, le tribunal a, à bon droit, considéré que si le véhicule litigieux présentait, au moment de la vente, des vices cachés, la preuve n'était pas rapportée que ces défauts affectant le véhicule rendaient celui-ci impropre à l'usage auquel il était destiné, relevant de surcroît que Mme [Y] avait pu utiliser son véhicule pendant cinq mois et parcourir plus de 8.000 km sans aucun problème jusqu'à la survenance de son propre accident.

La Cour constate que, pas davantage qu'en première instance, Mme [Y], qui ne produit aucune pièce nouvelle, ne fait la démonstration de ce que les défauts cachés du véhicule vendu le rendent impropre à l'usage auquel il était destiné, ou diminuent tellement cet usage qu'elle ne l'aurait pas acquis, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, si elle les avait connus.

Les conditions de la garantie des vices cachés prévue aux articles 1641 et suivants du code civil n'étant pas réunis en l'espèce, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré Mme [Y] mal fondée en son action à l'encontre de M. [H] et l'a, en conséquence, déboutée de sa demande de résolution de la vente et de ses demandes subséquentes en restitution du prix et paiement de dommages et intérêts.

Sur le manquement de la société Deka à son obligation précontractuelle d'information

Aux termes de l'article 1112-1 du code civil, « [Localité 7] des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation. Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou les qualités des parties. (...) Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Comme indiqué à juste titre par Mme [Y], il résulte de ce texte que le vendeur a l'obligation de délivrer à l'acquéreur une information claire, loyale et complète. Or, il résulte des développements qui précèdent que la société Deka n'est intervenue qu'en qualité de mandataire du vendeur.

Si en cette qualité d'intermédiaire professionnel de la vente de véhicules automobiles d'occasion, la société Deka était tenue envers l'acquéreur d'un devoir d'information et de conseil, il n'est pas établi qu'elle a manqué à cette obligation. En effet, dans le cadre du mandat de vente, M. [H], le mandant, a déclaré sur l'honneur que le véhicule déposé entre les mains du mandataire était en bon état de fonctionnement et n'avait subi aucun accident ou modification de quelque nature que ce soit. Aucun élément ne permet d'établir que la société Deka avait connaissance des désordres affectant le véhicule et de ce qu'il avait été gravement endommagé en 2015.

En tout état de cause, le manquement de la société Deka, mandataire du vendeur, à son devoir d'information et de conseil, à le supposer établi, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ne saurait entraîner la résolution ou la nullité de la vente à laquelle elle n'est pas partie.

Mme [Y] sera en conséquence déboutée de toute demande formée de ce chef.

Sur la nullité de la vente pour dol

L'article 1130 du code civil dispose que « l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ».

L'article 1137 du code civil définit le dol comme « le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».

L'article 1138 du même code précise que le dol est également constitué s'il émane du représentant, gérant d'affaires, préposé ou porte-fort du contractant. Il l'est encore lorsqu'il émane d'un tiers de connivence.

Le dol suppose donc la démonstration d'une dissimulation intentionnelle par une partie d'un élément dont elle connaissait le caractère déterminant pour l'autre. Il appartient à celui qui s'en prévaut d'en rapporter la preuve.

En l'occurrence, si l'expert amiable indique dans son rapport que le véhicule a été gravement endommagé en 2015, il n'est pas démontré que M. [H], qui a acquis le véhicule le 23 juillet 2017, ou son mandataire, la société Deka, en avait connaissance.

En effet, il convient de rappeler que lors de la signature du mandat de vente, M. [H] a déclaré sur l'honneur à son mandataire que le véhicule déposé entre ses mains était en bon état de fonctionnement et n'avait subi aucun accident ou modification de quelque nature que ce soit. En outre, comme le relève à juste titre la société Deka, le contrôle technique réalisé le 13 juin 2017, préalablement à l'acquisition du véhicule litigieux par M. [H], ne fait apparaître aucun défaut. La société Deka précise, sans être contredite sur ce point par Mme [Y], que conformément à la législation en vigueur, le contrôle technique n'avait pas à être renouvelé dans le cadre de la vente du 13 juin 2018. De surcroît, il ressort du rapport d'expertise amiable que les défauts constatés n'étaient pas visibles.

Mme [Y] ne rapportant pas la preuve de manoeuvres dolosives ou d'une quelconque dissimulation intentionnelle imputables à M. [H] ou à son mandataire, la société Deka, il convient de la débouter de ses demandes présentées sur ce fondement.

Sur la résolution de la vente pour défaut de délivrance conforme

L'article 1603 du code civil dispose que le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.

L'article 1604 du code civil définit la délivrance comme le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur. Cette obligation impose au vendeur de fournir une chose en tous points conforme aux spécifications convenues avec l'acquéreur.

En revanche, le défaut de conformité de la chose vendue à sa destination normale, constitue le vice prévu par les articles 1641 et suivants du code civil.

La conformité matérielle de la chose vendue aux stipulations contractuelles se trouve donc

sanctionnée par l'obligation de délivrance, alors que sa conformité fonctionnelle relève de l'action en garantie des vices cachés.

Il convient en premier lieu de relever que, comme la garantie des vices cachés, l'obligation de délivrance conforme pèse sur le vendeur. Or, la société Deka n'ayant pas la qualité de vendeur mais de mandataire de celui-ci ainsi qu'il a été dit précédemment, elle n'est pas tenue à l'égard de l'acheteur de l'obligation de délivrance conforme.

La demande sur ce fondement ne peut donc être formée qu'à l'encontre du vendeur, M. [H].

ll appartient à Mme [Y] qui l'invoque de rapporter la preuve de la non-conformité de la chose aux prévisions contractuelles.

Or, tant le bon de commande que le certificat de cession mentionnent que la vente portait sur un véhicule d'occasion, mis en circulation pour la première fois le 21 octobre 2014 et affichant 27.000 kilomètres au compteur, de sorte que Mme [Y] s'est vue délivrer un véhicule conforme aux éléments du contrat de vente. Aucune spécification contractuelle ne portait sur l'état du véhicule et il ressort des pièces versées aux débats que le carnet d'entretien a été remis à Mme [Y] ainsi que le procès-verbal de contrôle technique du 13 juin 2017 n'ayant décelé aucune anomalie.

L'existence antérieure à la vente d'une procédure de véhicule gravement endommagé, dont la remise en état est strictement encadrée, ne peut suffire à emporter manquement du vendeur à l'obligation de délivrance, étant rappelé de surcroît qu'il n'est pas établi que M. [H], qui a acquis le véhicule postérieurement à la procédure VGE, en ait lui-même eu connaissance.

Les réparations non conformes du faisceau de porte avant droite générant, selon l'expert, des dysfonctionnements électriques, dont il a été retenu précédemment qu'ils ne rendaient pas le véhicule impropre à sa destination normale, ne constituent pas un défaut de délivrance conforme et, en tout état de cause, ne justifient pas la résolution de la vente.

Mme [Y] sera en conséquence déboutée de ses demandes sur ce fondement.

Sur la demande d'expertise judiciaire

L'article 144 du code de procédure civil dispose que les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas des éléments suffisants pour statuer.

La demande d'expertise judiciaire formée par l'appelante est donc recevable.

Elle apparaît cependant mal fondée, l'expertise judiciaire sollicitée à titre subsidiaire par Mme [Y], plus de sept années après son accident, ne pouvant plus être utilement ordonnée. En outre, la mesure d'expertise ne peut avoir pour objet de pallier la carence de la partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe (article 146 du code de procédure civile).

Elle sera en conséquence rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Deka pour procédure abusive

Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés (article 32-1 du code de procédure civile). Cette demande de dommages et intérêts est alors analysée sur le fondement de l'article 1240 du code civil laissant à la charge de celui qui demande une indemnisation de prouver une faute de la part de la partie adverse et d'un dommage en lien avec cette faute. L'appréciation inexacte qu'une partie se fait de ses droits n'est pas constitutive en soi d'une faute.

En l'espèce, la société Deka ne caractérise aucune faute de Mme [Y] ayant fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice, pas plus qu'elle ne démontre l'existence d'un préjudice distinct des frais qu'elle a dû exposer pour la présente instance et qui seront indemnisés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Deka de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance, mis à la charge de Mme [Y], seront confirmées.

Ajoutant au jugement, il y a lieu de condamner Mme [Y], qui succombe en son recours, aux dépens d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile ainsi qu'à payer à la société Deka la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en appel en application de l'article 700 du même code. Elle ne peut, de ce fait, prétendre à l'application de ce texte à son profit.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant

Déclare recevables mais mal fondées toutes les demandes de Mme [W] [Y],

Condamne Mme [W] [Y] à payer à la société Deka la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [W] [Y] aux dépens d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

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