CA Paris, Pôle 4 - ch. 3, 18 septembre 2025, n° 23/07697
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2025
(n° , 14 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07697 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHQV4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mars 2023-Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris- RG n° 22/01989
APPELANTS
Monsieur [C] [K] [J]
né le 03 Juillet 1941 à [Localité 4] (75)
[Adresse 2]
[Localité 3]
et
Madame [D] [Y] épouse [J]
née le 05 Mai 1945 à [Localité 4] (75)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Tous deux représentés par Me Jean-emmanuel NUNES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0025
INTIMÉE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP)
immatriculée au RCS de [Localité 4] sous le numéro 552 032 708
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Muriel PAGE, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Anne-Laure MEANO, Présidente de Chambre
Madame Muriel PAGE, Conseillère
Madame Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Aurély ARNELL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre et par Madame Aurély ARNELL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 28 mai 2003, la société La Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (ci-après la RIVP) a donné en location à M. [C] [J] un logement situé [Adresse 2] à [Localité 4] moyennant un loyer mensuel de 1 028,31 euros, hors charges. Ce bail stipule une prise d'effet au 1er février 1979.
Ce logement fait partie des 73 logements ayant fait l'objet d'une convention PLS entre l'Etat et la société RIVP le 18 novembre 2002.
Par acte d'huissier délivré le 21 avril 2021, la société RIVP a fait assigner Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris afin d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, leur condamnation solidaire :
- à lui payer la somme de 28 105,38 euros au titre d'une dette locative, en ce compris un supplément de loyer de solidarité ;
- aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
A l'audience du 17 novembre 2021, M. [C] [J], représenté, a sollicité la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité suivante :
'L'article 82 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 (codifié à l'article L.441-4 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation) et de l'article 144 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 (codifié à l'article L.452-4 al.2 du code de la construction de l'habitation) contreviennent-ils au principe d'égalité devant la loi fiscale et au principe d'égalité devant les charges publiques, garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 '
Le 18 novembre 2021, cette question prioritaire de constitutionnalité a été transmise au ministère public qui a déclaré s'en rapporter à la décision de la juridiction le 23 novembre 2021.
A l'audience du 6 janvier 2023 M. [C] [J], représenté, a tout d'abord repris sa demande tendant à la transmission de sa question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation et a sollicité qu'il soit sursis à statuer jusqu'à la décision de la Cour de cassation et, le cas échéant, jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel.
La société RIVP, représentée, a sollicité le rejet de la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. [C] [J].
Sur le fond, la société RIVP a sollicité le rejet des prétentions de M. et Mme [J] et leur condamnation solidaire :
- à lui payer la somme de 46 517,06 euros au titre de la dette locative ou, à titre subsidiaire, la somme de 46 332,50 euros si le tribunal venait à considérer que la surface habitable est de 78,85 mètres carrés ;
- aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
M. et Mme [J] ont sollicité :
- à titre principal, que le juge des contentieux de la protection se déclare incompétent au profit du tribunal judiciaire de Paris ;
- à titre subsidiaire, l'annulation des décisions contraignant Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à verser le supplément de loyer de solidarité ;
- à titre infiniment subsidiaire : le rejet des prétentions de la société RIVP et sa condamnation :
- à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation précontractuelle d'information ;
- à leur payer la somme de 25 896,60 euros au titre du remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022 ;
- aux dépens et à payer à M. [C] [J] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire entrepris du 6 mars 2023 le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a ainsi statué :
Déclare recevable la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. [C] [J];
Dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 82 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 (codifié à l'article L.441-4 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation) et l'article 144 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 (codifié à l'article L.452-4 al.2 du code de la construction et de l'habitation) selon le mémoire déposé ;
Rejette l'exception d'incompétence soulevée par Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à payer à la société RIVP la somme de 46 179,02 euros au titre des loyers, charges et suppléments de loyer de solidarité impayés au 22 décembre 2022 ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à payer à la société RIVP la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] aux dépens ;
Rappelle que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 24 avril 2023 par M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J],
Vu les dernières écritures remises au greffe le 24 juillet 2023 par lesquelles M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] demandent à la cour de :
- Prononcer l'annulation du Jugement en date du 6 mars 2023, rendu par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Paris, ou à défaut, l'infirmer totalement ;
Statuant en premier et dernier ressort,
- Constater et prononcer l'incompétence d'attribution du Juge des contentieux de la protection pour connaître de l'affaire présente comme relevant du Tribunal judiciaire de Paris, et statuer sur l'ensemble du litige ;
- Prononcer l'annulation des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022 contraignant Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022 ;
Subsidiairement,
- Débouter la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (R.I.V.P.) à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation précontractuelle d'information ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (R.I.V.P.) à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de 25896,60 euros à titre de remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022 ;
En tout état de cause,
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de 1900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] aux entiers dépens.
Vu les dernières écritures remises au greffe le 19 octobre 2023 aux termes desquelles la société RIVP demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
En conséquence,
DEBOUTER Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] au paiement de la somme de 46.517,06 euros au titre de la dette locative et notamment des S.L.S arriérés ;
A titre subsidiaire,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] au paiement de la somme de 46.332,50 euros au titre de la dette locative et notamment des S.L.S arriérés, si le tribunal venait à considérer que la surface habitable était de 78,85 m²;
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] aux entiers dépens ;
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont remises au greffe et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande d'annulation du jugement
M. et Mme [J] sollicitent l'annulation du jugement sur le fondement des articles 126-3 du code de procédure civile et 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, au motif qu'il a été statué par un jugement unique tant sur la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité que sur le fond. Ils font valoir qu'en statuant ainsi, le premier juge les a empêchés de voir leur appel contre la décision portant refus de transmission être instruit rapidement par la cour, ce qui leur fait nécessairement grief.
La RIVP répond que les appelants font une analyse erronée des dispositions législatives dont ils se prévalent.
Aux termes de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel :
'La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies :
1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;
2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;
3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.
En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation.
La décision de transmettre la question est adressée au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou les conclusions des parties. Elle n'est susceptible d'aucun recours. Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige'.
Aux termes de l'article 126-3 du code de procédure civile :
'Le juge qui statue sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité est celui qui connaît de l'instance au cours de laquelle cette question est soulevée, sous réserve des alinéas qui suivent.
Le magistrat chargé de la mise en état, ainsi que le magistrat de la cour d'appel chargé d'instruire l'affaire, statue par ordonnance sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée devant lui. Lorsque la question le justifie, il peut également renvoyer l'affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l'instruction, pour qu'elle statue sur la transmission de la question. Cette décision de renvoi est une mesure d'administration judiciaire.
Le président de la formation de jugement du tribunal paritaire des baux ruraux, du tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16, de la cour d'appel spécialement désignée en application de l'article L. 311-16 du code de l'organisation judiciaire et de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail statuent sur la transmission de la question'.
Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile : 'Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public'.
En l'espèce, comme le souligne à juste titre la RIVP aucune des dispositions précitées n'exige que la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soit tranchée par un jugement distinct de celui du fond, a fortiori lorsque le tribunal décide de ne pas transmettre à la Cour de cassation.
Ces dispositions exigent qu'il soit statué par ordonnance sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité lorsqu'un magistrat chargé de la mise en état est désigné.
Or, en l'espèce, la procédure est orale devant le juge des contentieux de la protection, aucun magistrat de la mise en état n'a été désigné.
S'agissant du grief évoqué, il convient de constater que les dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 prévoient expressément que le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige.
Dans ces conditions, M. et Mme [J] ne peuvent valablement considérer qu'ils subissent un préjudice en ce que leur appel contre la décision portant refus de transmission n'a pas pu être instruit rapidement par la cour.
La demande d'annulation du jugement doit être rejetée.
Sur la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité et le refus de transmission du premier juge
Selon l'article 954, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune de ces prétention est fondée, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.
En l'espèce, M. et Mme [J] concluent à l'infirmation du jugement dans sa totalité ; puis, dans le dispositif de leurs conclusions, ils ne formulent cependant aucune prétention sur les demandes tranchées dans le jugement au sujet de la question prioritaire de constitutionnalité et ne sollicitent plus sa transmission.
Ils ne développent dans leurs écritures aucun moyen ou argument s'agissant de cette question prioritaire de constitutionnalité.
Il convient de rappeler que la demande d'infirmation ne suffit pas à émettre une prétention sur le fond des demandes qui ont été tranchées.
En application de l'article 954 précité et d'une jurisprudence constante (2ème Civ., 5 décembre 2013, n° 12-23.611, bull n°230, 2e civ., 23 février 2017, pourvoi n° 16-12.288, 1re Civ., 17 mars 2016, pourvoi n° 14-27.168, Bull. n° 64, 2ème civ 10 décembre 2020, n°1921187, 2ème Civ., 4 février 2021, n°19-23.615), en l'absence de prétention sur les demandes tranchées dans le jugement, la cour ne peut que constater qu'elle n'est pas saisie de prétentions relatives à ces demandes et ne pourra que confirmer le jugement sur les chefs de dispositif concernés, déclarant recevable la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. [C] [J] et disant n'y avoir lieu à sa transmission.
Sur l'exception d'incompétence soulevée par M. et Mme [J]
M. et Mme [J] font valoir que le SLS est une contribution indirecte au profit de la Caisse de garantie du logement locatif social et relève en application de l'article 2 de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales, de la compétence du seul tribunal judiciaire et non du juge des contentieux de la protection.
Ils demandent à la cour d'infirmer le jugement du chef de la compétence et néanmoins en application de l'article 90 du code de procédure civile de statuer sur le fond du litige puisqu'elle est aussi juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Paris.
La RIVP répond qu'elle a assigné M. et Mme [J] pour recouvrer une dette locative et que si la cotisation qu'elle verse à la Caisse de garantie du logement locatif social est qualifiée d'impôt dans un courrier du 15 septembre 2021, cette qualification ne concerne que la cotisation versée par la RIVP et non le SLS versé par les locataires, qui n'est qu'une composante de l'assiette permettant de déterminer le montant de la cotisation.
Aux termes de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales : 'En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif.
En matière de droits d'enregistrement, d'impôt sur la fortune immobilière, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal judiciaire. Les tribunaux judiciaires statuent en premier ressort'.
Aux termes de l'article L 213-4-4 du code de l'organisation judiciaire : 'Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d'immeubles à usage d'habitation ou un contrat portant sur l'occupation d'un logement est l'objet, la cause ou l'occasion ainsi que des actions relatives à l'application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement'.
En l'espèce, M. et Mme [J] versent aux débats un courrier de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) du 15 septembre 2021, dans lequel, il est indiqué que les cotisations recouvrées par la CGLLS sont qualifiées d'impôt.
Ce courrier ne vise pas les SLS payés par M. et Mme [J] mais bien les cotisations perçues par la CGLLS, dont il n'est pas contesté que le SLS n'est qu'une composante.
Il n'est pas davantage démontré en appel que le SLS, dont les dispositions sont prévues par le code de la construction et de l'habitation, est une contribution indirecte qui relève du champ d'application de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales.
Le présent litige est bien de la compétence du juge des contentieux de la protection dès lors que l'action en paiement de la RIVP a pour origine le contrat de bail signé entre M. et Mme [J] et la RIVP.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. et Mme [J].
Sur l'absence de notification préalable et individuelle du SLS
M. et Mme [J] font valoir que toutes les notifications des décisions de taxation au titre du SLS doivent être préalablement notifiées individuellement à chacun des co-titulaires du bail, l'absence de cette notification constituant un vice de forme faisant grief.
Ils invoquent la jurisprudence selon laquelle la notification prévue par l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui a une incidence sur le montant du loyer, doit être adressée à chacun des cotitulaires du bail (3e Civ., 12 mars 2014, pourvoi n° 13-14.403, Bull. 2014, III, n° 36) et l'article 9-1 de la loi du 6 juillet 1989.
Ils font valoir que pour les années 2019 à 2022, la RIVP ne leur pas notifié individuellement à chacun, la décision annuelle de taxation visant à les contraindre à verser le SLS, qu'elle produit des décisions rétroactives pour cette période sans justifier de leur envoi et de leur réception en dépit du principe de non-rétroactivité des actes administratifs et notamment fiscaux.
Ils soutiennent qu'en raison de l'absence totale de notification préalable de ces décisions, il convient de constater leur nullité et prononcer leur annulation sur le fondement des articles 112 et suivants du code de procédure civile, précisant que leur grief est constitué en ce qu'ils n'ont pas été informés du montant de la contribution qu'ils devaient verser s'ils restaient dans les lieux et prendre parti en temps utiles.
La RIVP répond que l'article L 441-9 du code de la construction et de l'habitation n'impose pas que toutes les notifications du montant du SLS soient notifiées individuellement aux cotitulaires du bail mais prévoit seulement qu'une mise en demeure soit envoyée aux locataires si ceux-ci n'ont pas répondu à l'enquête et que dans l'arrêt du 12 mars 2014, les courriers litigieux n'indiquaient pas 'M. et Mme' mais seulement 'M.'.
Elle fait valoir qu'en l'espèce, les courriers ont bien été adressés à 'M. et Mme [J]' et qu'en tout état de cause les dispositions de l'article L 441-9 du code de la construction et de l'habitation ne sont pas applicables ni cet arrêt du 12 mars 2014, dans la mesure où les époux [J] ont répondu aux enquêtes SLS 2019 à 2022.
Il résulte de l'article L441-9 du code de la construction et de l'habitation, que l'organisme d'HLM demande annuellement à chaque locataire communication des avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu et des renseignements concernant l'ensemble des personnes vivant au foyer permettant de calculer l'importance du dépassement éventuel du plafond de ressources et de déterminer si le locataire est redevable du supplément de loyer.
Le locataire est tenu de répondre à cette demande dans un délai d'un mois et, à défaut et après mise en demeure infructueuse, l'organisme d'HLM liquide provisoirement le supplément de loyer, en faisant application d'un coefficient de dépassement du plafond de ressources maximal.
Pour mémoire l'absence d'une double notification en cas de cotitularité du bail, qu'elle soit légale ou conventionnelle, n'est pas sanctionnée par la nullité mais par une inopposabilité à l'égard du conjoint non visé.
En l'espèce, les appelants ne demandent pas l'inopposabilité des demandes de paiement à Mme [J] mais concluent à la nullité des courriers litigieux qui ne saurait en tout état de cause être la conséquence du moyen invoqué.
Au demeurant, ils visent dans leurs écritures les articles 112 et suivants du code de procédure civile qui sont relatifs aux actes de procédure uniquement.
De plus, ils se réfèrent à la jurisprudence selon laquelle la notification prévue par l'article L.441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui a une incidence sur le montant du loyer, doit être adressée à chacun des cotitulaires du bail (3e Civ., 12 mars 2014, pourvoi n° 13-14.403, Bull. 2014, III, n° 36).
Or, si cet article permet au bailleur social, à défaut de réponse du locataire à l'enquête sociale, de liquider provisoirement le supplément de loyer, selon un coefficient de dépassement du plafond de ressources maximal, tel n'est pas le cas en l'espèce, M. et Mme [J] ayant répondu aux enquêtes sociales, comme le fait valoir exactement la RIVP ; en outre dans cette espèce, le courrier concernant l'enquête sociale n'avait été adressé qu'à un seul des deux époux.
Les courriers des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 ont été adressés à M. et Mme [J] et non pas à M. [J] seulement. Pour ces années, le montant du SLS chaque année ainsi que son mode de calcul, ont bien été notifiés à M. et Mme [J].
M. et Mme [J] ne se sont jamais plaints de ne pas avoir reçu ces notifications, qui ne peuvent être qualifiées de rétroactives puisqu'elles ont été adressées en début de chaque année.
S'il apparaît néanmoins que le courrier de notification du SLS avec son décompte du 17 janvier 2022 porte mention uniquement de M. [J], cette seule circonstance ne saurait établir que Mme [J] n'a pas eu connaissance de ce courrier.
Au demeurant, le montant du SLS a été porté sur leur avis d'échéance dès le mois de janvier 2022 adressé à 'M. et Mme [J]' de sorte que Mme [J] a eu immédiatement connaissance du montant facturé pour l'année 2022.
Le premier juge a rejeté à juste titre dans ses motifs la demande de nullité des décisions imposant à M. et Mme [J] de payer un SLS.
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande d'annulation 'des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022" les contraignant à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022.
Sur la violation des droits fondamentaux
M. et Mme [J] font valoir qu'ils étaient titulaires d'un bail privé aux conditions normales, avant le conventionnement d'office de leur immeuble, qui a transformé leur bail privé en bail conventionné et leur a imposé de payer un SLS.
Ils soutiennent en substance que ce SLS est contraire à leurs droits fondamentaux en ce que le bail privé aux conditions normales constituait pour eux un intérêt patrimonial bénéficiant de la protection visée à l'article 1 du protocole additionnel n° 1 de la convention européenne des droits de l'Homme, et en ce que les modifications directes ou indirectes opérées d'office par l'administration aux conditions d'un bail en cours constituent des ingérences de l'Etat au sens de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme.
Ils considèrent que le juge doit contrôler la proportionnalité de la modification des conditions du bail et des conséquences financières sur le locataire 'car autrement cela priverait d'effectivité ses droits de la défense et les faibles pouvoirs de contrôle judiciaire mènent alors à une violation de l'article 13 de la convention européenne des droits de l'Homme'.
La RIVP fait valoir que M. et Mme [J] ne démontrent pas en quoi l'application d'un SLS violerait leurs droits fondamentaux.
Selon l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'Homme, 'toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes'.
L'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme intitulé 'droit au respect de la vie privée et familiale' dispose :
'1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui'.
L'article 13 de la convention européenne des droits de l'Homme intitulé 'droit à un recours effectif', dispose :
'Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles'.
Le SLS est régi par les articles L. 441-3 et suivants du code de la construction et de l'habitation, lequel dispose que les organismes d'habitations à loyer modéré perçoivent des locataires des logements visés au premier alinéa de l'article L. 441-1 le paiement d'un supplément de loyer de solidarité en sus du loyer principal et des charges locatives dès lors qu'au cours du bail les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements.
Il ne s'agit ni d'un loyer ni d'une charge locative, mais d'une sorte de redevance dont une partie est reversée par les bailleurs sociaux à l'État, notamment dans le cadre de leur cotisation à la caisse de garantie du logement locatif social.
L'article L. 441-11 du même code dispose que l'organisme d'habitations à loyer modéré qui n'a pas exigé le paiement du supplément de loyer ou qui n'a pas procédé aux diligences lui incombant pour son recouvrement est passible d'une pénalité égale à un certain pourcentage des sommes exigibles et non mises en recouvrement et recouvrée par l'Etat.
Ce pourcentage, qui était égal à 50 % des sommes exigibles et non mises en recouvrement jusqu'à la loi 2017-86 du 23 décembre 2017, a été porté par cette loi à 100 % des sommes exigibles et non mises en recouvrement.
En l'espèce, M. et Mme [J] n'établissent pas en quoi la perception d'un SLS par le bailleur contreviendrait à l'article 1er du protocole additionnel n°1 de la CEDH précité, lequel a pour objet, la 'protection de la propriété', alors qu'ils sont locataires.
Ils n'expliquent pas davantage en quoi le SLS porterait atteinte au respect de leur vie privée et familiale ou de leur domicile garanti par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme.
Au demeurant, le SLS vise à assurer le droit au logement des locataires dotés de ressources modestes et à financer la construction et l'amélioration du parc locatif social, et le législateur a ainsi poursuivi des motifs d'intérêt général, dès lors que l'effort de solidarité exigé au moyen du SLS des locataires qui conservent un logement dans le parc HLM bien que leurs ressources dépassent significativement les seuils prévus pour l'attribution de tels logements vise à satisfaire une exigence de justice sociale et se trouve d'autant plus justifié que le besoin de construction de logements sociaux se trouve accru du fait du maintien dans ceux existants de locataires plus favorisés.
Enfin, M. et Mme [J] ne justifient pas d'une atteinte à leur droit à un recours effectif.
A titre surabondant, il convient de préciser que le montant du SLS n'est pas exorbitant ni disproportionné eu égard du but poursuivi, dès lors qu'il dépend des ressources du foyer et est plafonné à 30 % de ces ressources.
Le moyen tiré de l'atteinte aux droits fondamentaux de M. et Mme [J] a été écarté à juste titre par le premier juge.
Sur l'encadrement du loyer de base et la demande en paiement d'une somme de 25 896,60 euros à titre de remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022
M. et Mme [J] maintiennent que l'article 9 bis de la Convention conclue entre l'Etat et la RIVP prévoit que le loyer pratiqué applicable à chaque logement occupé par un locataire dont les ressources excèdent les plafonds de ressources pour l'attribution des logements sociaux, ne peut excéder le loyer maximum fixé à l'article 8bis, que cependant la RIVP se prévaut d'un loyer dérogatoire au loyer maximum fixé alors qu'un tel loyer est interdit depuis le 1er janvier 2018 en vertu de l'article 82 § I.8 de la loi du 27 janvier 2017 ayant abrogé l'ancien article L. 445-5 du code de la construction et de l'habitation.
Ils soutiennent que la RIVP continue à solliciter le paiement d'un loyer dérogatoire totalement prohibé et calcule le montant du SLS en se basant sur ce loyer, et non sur le loyer maximum désormais applicable à tous les locataires titulaires d'un bail social.
Ils sollicitent le débouté de la RIVP de sa demande en paiement faute de notification préalable d'un SLS calculé conformément aux articles L 441-3 et R 441-20 du code de la construction et de l'habitation, ainsi que le remboursement du trop-perçu résultant de la différence entre les loyers dérogatoires qu'ils ont réglés, et les loyers maximums autorisés de 2018 à 2022 inclus (total réclamé : 25 896,60 euros).
La RIVP répond que M. et Mme [J] font une analyse erronée des articles 8bis et 9 bis de la convention, qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles que le loyer de base dérogatoire ne peut dépasser 25,89 euros par m² de surface habitable, pour les locataires dont les ressources excèdent les plafonds de ressources prévus par le code de la construction et de l'habitation.
Elle affirme que le loyer de base de M. et Mme [J] n'a jamais dépassé le plafond de 25,89 euros par m² de surface habitable fixé par l'article 8bis de la convention applicable en l'espèce.
L'article L 445-5 du code de la construction et de l'habitation, applicable aux organismes d'HLM ayant conclu une convention d'utilité sociale, et abrogé par l'article 81 de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 disposait : 'Les dispositions de l'article L 441-4 sont applicables au supplément de loyer de solidarité prévu par le cahier des charges mentionné à l'article L 445-2. Toutefois, l'organisme peut, pour la durée de la convention et dans les conditions fixées par celle-ci, déroger à ces dispositions'.
Le premier juge en a donc justement déduit, qu'en abrogeant l'article L 445-5 du code de la construction et de l'habitation, la loi du 27 janvier 2017 n'a pas abrogé la possibilité pour un bailleur social d'appliquer un loyer dérogatoire au loyer conventionné mais la possibilité de déroger aux règles du SLS dans le cadre des conventions d'utilité sociale.
En l'espèce, la convention du 18 novembre 2002 est une convention type conclue en application de l'article L 351-2 (2° ou 3°) du code de la construction et de l'habitation (convention d'aide personnalisée au logement), entre l'Etat et la RIVP.
Ses articles 8 et 8 bis, prévoient que si le montant du loyer maximum est fixé à 7,35 euros le mètre carré de surface utile, valeur juillet 2002, ce loyer n'est pas applicable aux personnes dont les ressources dépassent le plafond prévu pour l'attribution d'un logement social, qui se voient appliquer un loyer dérogatoire fixé à 25,89 euros par mètre carré de surface utile, ce loyer maximum étant révisé chaque année, le 1er juillet, dans les conditions prévues à l'article 17d de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.
En conséquence, si les appelants soutiennent qu'ils ont réglé un loyer de base hors charges supérieur au loyer maximum autorisé, ils font en réalité une confusion entre loyer de base dérogatoire et loyer de base conventionné (hors SLS), ainsi que le fait valoir exactement la RIVP qui indique que le loyer inscrit dans le tableau de la convention est le loyer conventionné maximum tel qu'il résulte de la combinaison des articles 8 et 9 de la convention; mentionné à titre indicatif, il ne s'applique pas aux intéressés, qui, eux, bénéficiaient d'un loyer dérogatoire.
Il résulte de la combinaison des articles 8 bis et 9 bis de la convention que le loyer de base dérogatoire ne peut dépasser 25,89 euros par m² de surface habitable, pour les locataires dont les ressources excèdent les plafonds de ressources prévus par le code de la construction et de l'habitation et déjà dans les lieux lors du conventionnement, ce qui est bien le cas en l'espèce.
Il ne résulte pas des éléments produits que le loyer dérogatoire hors SLS ait en l'espèce excédé le plafond fixé par l'article 8 bis ; le loyer courant hors SLS s'élevait ainsi, à 1001,47 euros en 2018, 1014,01 euros en 2019, 1021,62 euros en 2020, 1028,31 euros en 2021 et 1032,64 euros en 2022 , soit 12,90 euros par m² de surface habitable, ce qui est conforme aux stipulations de la convention et n'excède pas le maximum autorisé.
Au demeurant, ces considérations apparaissent sans incidence sur la dette locative tirée de l'arriéré de SLS invoqué par la RIVP, dès lors que le calcul du SLS ne prend pas en considération le loyer pratiqué.
Le premier juge a rejeté à juste titre les demandes de M. et Mme [J].
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande en paiement de la somme de 25 896,60 euros au titre du remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022.
Sur le défaut d'information et la demande de dommages-intérêts à hauteur de 15 000 euros
M. et Mme [J] font valoir que le SLS n'est dû que par les locataires ayant accepté de signer un nouveau bail proposé par le bailleur après conventionnement dudit immeuble, que la RIVP ne justifie pas avoir notifié à M. [J], son droit à ne pas signer le bail conventionné et ne l'a pas informé des conséquences d'une telle signature.
Ils considèrent que la responsabilité civile de la RIVP est engagée sur le fondement de l'article 1112-1 du code civil en ce qu'elle a méconnu son obligation précontractuelle d'information et réitèrent leur demande en paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts.
La RIVP répond que le bail signé par M. [J], opposable à Mme [J] précise que le logement est conventionné et que le régime juridique applicable est celui de l'article L 351-2 du code de la construction et de l'habitation, et qu'en tout état de cause M. et Mme [J] auraient été soumis au régime du bail social qu'un nouveau bail conventionné ait été signé ou non.
En l'espèce, le bail de 2003 indique expressément que le régime juridique du logement loué est celui des logements conventionnés - article L 351-2 du code de la construction et de l'habitation, de sorte que le manquement à l'obligation d'information du bailleur n'est pas établi.
Au demeurant et contrairement aux affirmations de M. et Mme [J], même en l'absence de signature d'un nouveau bail, ils auraient été soumis au SLS.
L'article L. 353-19 dispose en effet, dans sa version antérieure à la loi Elan du 23 novembre 2018 et à la date de la convention de 2002, que :
"Pour les logements appartenant à des sociétés d'économie mixte et par dérogation à l'article L. 353-7, les dispositions de la convention s'appliquent de plein droit, à compter de sa date d'entrée en vigueur ou de la date d'achèvement des travaux lorsqu'elle en prévoit, aux titulaires de baux en cours ou aux bénéficiaires du droit au maintien dans les lieux sans qu'il soit nécessaire de leur donner congé".
La signature du bail de 2003 en mauvaise connaissance de cause est ainsi inopérante puisque le SLS s'appliquait en réalité dès l'entrée en vigueur de la convention signée avec l'État de sorte que le contrat de bail signé le 1er février 1979 aurait été soumis à ce dispositif, même sans la signature d'un nouveau bail.
Le premier juge a rejeté à juste titre la demande de dommages-intérêts de M. et Mme [J].
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande en paiement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur le montant de la dette locative
En l'espèce, le décompte versé aux débats par la RIVP fait état d'une dette locative d'un montant de 46 517,06 euros au 22 décembre 2022.
Le premier juge a condamné solidairement M. et Mme [J] à payer à la RIVP la somme de 46 179,02 euros au titre des loyers et charges et SLS impayés au 22 décembre 2022, déduction faite, à juste titre, d'une somme de 338,04 euros, correspondant à une erreur dans le calcul du SLS dès lors que le logement de M. et Mme [J] n'est pas d'une surface de 80 m² mais de 78,85 m², ainsi qu'il ressort du certificat de surfaces habitables produit par M. et Mme [J].
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point étant précisé que la circonstance selon laquelle le SLS facturé à M. et Mme [J] pour les années 2020 à 2022 est moindre que le plafond applicable est indifférente, et que le premier juge a exactement indiqué que les loyers de référence appliqués tiennent compte, conformément à l'article R 441-21 du code de la construction et de l'habitation, de l'indexation.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les termes de la présente décision ne justifient pas d'infirmer le jugement en ce qui concerne les dépens et les frais de l'article 700 de première instance.
M. et Mme [J], parties perdantes à titre principal, seront condamnés solidairement aux dépens d'appel.
L'équité commande de les condamner solidairement au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Rejette la demande tendant à l'annulation du jugement du 6 mars 2023 rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris,
Confirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris,
Et y ajoutant,
Déboute M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] de leur demande d'annulation 'des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022" les contraignant à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022.
Déboute M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J], de leurs demandes en paiement des sommes de :
- 25 896,60 euros à titre de remboursement 'du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022"
- 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamne solidairement M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] à payer à la RIVP, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne solidairement M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] aux dépens d'appel,
Rejette toutes autres demandes.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2025
(n° , 14 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07697 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHQV4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mars 2023-Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris- RG n° 22/01989
APPELANTS
Monsieur [C] [K] [J]
né le 03 Juillet 1941 à [Localité 4] (75)
[Adresse 2]
[Localité 3]
et
Madame [D] [Y] épouse [J]
née le 05 Mai 1945 à [Localité 4] (75)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Tous deux représentés par Me Jean-emmanuel NUNES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0025
INTIMÉE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP)
immatriculée au RCS de [Localité 4] sous le numéro 552 032 708
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Muriel PAGE, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Anne-Laure MEANO, Présidente de Chambre
Madame Muriel PAGE, Conseillère
Madame Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Aurély ARNELL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre et par Madame Aurély ARNELL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 28 mai 2003, la société La Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (ci-après la RIVP) a donné en location à M. [C] [J] un logement situé [Adresse 2] à [Localité 4] moyennant un loyer mensuel de 1 028,31 euros, hors charges. Ce bail stipule une prise d'effet au 1er février 1979.
Ce logement fait partie des 73 logements ayant fait l'objet d'une convention PLS entre l'Etat et la société RIVP le 18 novembre 2002.
Par acte d'huissier délivré le 21 avril 2021, la société RIVP a fait assigner Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris afin d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, leur condamnation solidaire :
- à lui payer la somme de 28 105,38 euros au titre d'une dette locative, en ce compris un supplément de loyer de solidarité ;
- aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
A l'audience du 17 novembre 2021, M. [C] [J], représenté, a sollicité la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité suivante :
'L'article 82 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 (codifié à l'article L.441-4 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation) et de l'article 144 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 (codifié à l'article L.452-4 al.2 du code de la construction de l'habitation) contreviennent-ils au principe d'égalité devant la loi fiscale et au principe d'égalité devant les charges publiques, garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 '
Le 18 novembre 2021, cette question prioritaire de constitutionnalité a été transmise au ministère public qui a déclaré s'en rapporter à la décision de la juridiction le 23 novembre 2021.
A l'audience du 6 janvier 2023 M. [C] [J], représenté, a tout d'abord repris sa demande tendant à la transmission de sa question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation et a sollicité qu'il soit sursis à statuer jusqu'à la décision de la Cour de cassation et, le cas échéant, jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel.
La société RIVP, représentée, a sollicité le rejet de la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. [C] [J].
Sur le fond, la société RIVP a sollicité le rejet des prétentions de M. et Mme [J] et leur condamnation solidaire :
- à lui payer la somme de 46 517,06 euros au titre de la dette locative ou, à titre subsidiaire, la somme de 46 332,50 euros si le tribunal venait à considérer que la surface habitable est de 78,85 mètres carrés ;
- aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
M. et Mme [J] ont sollicité :
- à titre principal, que le juge des contentieux de la protection se déclare incompétent au profit du tribunal judiciaire de Paris ;
- à titre subsidiaire, l'annulation des décisions contraignant Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à verser le supplément de loyer de solidarité ;
- à titre infiniment subsidiaire : le rejet des prétentions de la société RIVP et sa condamnation :
- à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation précontractuelle d'information ;
- à leur payer la somme de 25 896,60 euros au titre du remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022 ;
- aux dépens et à payer à M. [C] [J] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire entrepris du 6 mars 2023 le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a ainsi statué :
Déclare recevable la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. [C] [J];
Dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 82 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 (codifié à l'article L.441-4 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation) et l'article 144 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 (codifié à l'article L.452-4 al.2 du code de la construction et de l'habitation) selon le mémoire déposé ;
Rejette l'exception d'incompétence soulevée par Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à payer à la société RIVP la somme de 46 179,02 euros au titre des loyers, charges et suppléments de loyer de solidarité impayés au 22 décembre 2022 ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] à payer à la société RIVP la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles ;
Condamne solidairement Mme [D] [Y] épouse [J] et M. [C] [J] aux dépens ;
Rappelle que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 24 avril 2023 par M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J],
Vu les dernières écritures remises au greffe le 24 juillet 2023 par lesquelles M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] demandent à la cour de :
- Prononcer l'annulation du Jugement en date du 6 mars 2023, rendu par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Paris, ou à défaut, l'infirmer totalement ;
Statuant en premier et dernier ressort,
- Constater et prononcer l'incompétence d'attribution du Juge des contentieux de la protection pour connaître de l'affaire présente comme relevant du Tribunal judiciaire de Paris, et statuer sur l'ensemble du litige ;
- Prononcer l'annulation des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022 contraignant Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022 ;
Subsidiairement,
- Débouter la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (R.I.V.P.) à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation précontractuelle d'information ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] (R.I.V.P.) à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de 25896,60 euros à titre de remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022 ;
En tout état de cause,
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] à verser à Monsieur [C], [K] [J] et Madame [D] [Y] épouse [J] la somme de 1900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 4] aux entiers dépens.
Vu les dernières écritures remises au greffe le 19 octobre 2023 aux termes desquelles la société RIVP demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
En conséquence,
DEBOUTER Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] au paiement de la somme de 46.517,06 euros au titre de la dette locative et notamment des S.L.S arriérés ;
A titre subsidiaire,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] au paiement de la somme de 46.332,50 euros au titre de la dette locative et notamment des S.L.S arriérés, si le tribunal venait à considérer que la surface habitable était de 78,85 m²;
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER solidairement Madame [D] [J] et Monsieur [C] [J] aux entiers dépens ;
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont remises au greffe et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande d'annulation du jugement
M. et Mme [J] sollicitent l'annulation du jugement sur le fondement des articles 126-3 du code de procédure civile et 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, au motif qu'il a été statué par un jugement unique tant sur la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité que sur le fond. Ils font valoir qu'en statuant ainsi, le premier juge les a empêchés de voir leur appel contre la décision portant refus de transmission être instruit rapidement par la cour, ce qui leur fait nécessairement grief.
La RIVP répond que les appelants font une analyse erronée des dispositions législatives dont ils se prévalent.
Aux termes de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel :
'La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies :
1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;
2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;
3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.
En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation.
La décision de transmettre la question est adressée au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou les conclusions des parties. Elle n'est susceptible d'aucun recours. Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige'.
Aux termes de l'article 126-3 du code de procédure civile :
'Le juge qui statue sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité est celui qui connaît de l'instance au cours de laquelle cette question est soulevée, sous réserve des alinéas qui suivent.
Le magistrat chargé de la mise en état, ainsi que le magistrat de la cour d'appel chargé d'instruire l'affaire, statue par ordonnance sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée devant lui. Lorsque la question le justifie, il peut également renvoyer l'affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l'instruction, pour qu'elle statue sur la transmission de la question. Cette décision de renvoi est une mesure d'administration judiciaire.
Le président de la formation de jugement du tribunal paritaire des baux ruraux, du tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16, de la cour d'appel spécialement désignée en application de l'article L. 311-16 du code de l'organisation judiciaire et de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail statuent sur la transmission de la question'.
Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile : 'Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public'.
En l'espèce, comme le souligne à juste titre la RIVP aucune des dispositions précitées n'exige que la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soit tranchée par un jugement distinct de celui du fond, a fortiori lorsque le tribunal décide de ne pas transmettre à la Cour de cassation.
Ces dispositions exigent qu'il soit statué par ordonnance sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité lorsqu'un magistrat chargé de la mise en état est désigné.
Or, en l'espèce, la procédure est orale devant le juge des contentieux de la protection, aucun magistrat de la mise en état n'a été désigné.
S'agissant du grief évoqué, il convient de constater que les dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 prévoient expressément que le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige.
Dans ces conditions, M. et Mme [J] ne peuvent valablement considérer qu'ils subissent un préjudice en ce que leur appel contre la décision portant refus de transmission n'a pas pu être instruit rapidement par la cour.
La demande d'annulation du jugement doit être rejetée.
Sur la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité et le refus de transmission du premier juge
Selon l'article 954, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune de ces prétention est fondée, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.
En l'espèce, M. et Mme [J] concluent à l'infirmation du jugement dans sa totalité ; puis, dans le dispositif de leurs conclusions, ils ne formulent cependant aucune prétention sur les demandes tranchées dans le jugement au sujet de la question prioritaire de constitutionnalité et ne sollicitent plus sa transmission.
Ils ne développent dans leurs écritures aucun moyen ou argument s'agissant de cette question prioritaire de constitutionnalité.
Il convient de rappeler que la demande d'infirmation ne suffit pas à émettre une prétention sur le fond des demandes qui ont été tranchées.
En application de l'article 954 précité et d'une jurisprudence constante (2ème Civ., 5 décembre 2013, n° 12-23.611, bull n°230, 2e civ., 23 février 2017, pourvoi n° 16-12.288, 1re Civ., 17 mars 2016, pourvoi n° 14-27.168, Bull. n° 64, 2ème civ 10 décembre 2020, n°1921187, 2ème Civ., 4 février 2021, n°19-23.615), en l'absence de prétention sur les demandes tranchées dans le jugement, la cour ne peut que constater qu'elle n'est pas saisie de prétentions relatives à ces demandes et ne pourra que confirmer le jugement sur les chefs de dispositif concernés, déclarant recevable la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. [C] [J] et disant n'y avoir lieu à sa transmission.
Sur l'exception d'incompétence soulevée par M. et Mme [J]
M. et Mme [J] font valoir que le SLS est une contribution indirecte au profit de la Caisse de garantie du logement locatif social et relève en application de l'article 2 de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales, de la compétence du seul tribunal judiciaire et non du juge des contentieux de la protection.
Ils demandent à la cour d'infirmer le jugement du chef de la compétence et néanmoins en application de l'article 90 du code de procédure civile de statuer sur le fond du litige puisqu'elle est aussi juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Paris.
La RIVP répond qu'elle a assigné M. et Mme [J] pour recouvrer une dette locative et que si la cotisation qu'elle verse à la Caisse de garantie du logement locatif social est qualifiée d'impôt dans un courrier du 15 septembre 2021, cette qualification ne concerne que la cotisation versée par la RIVP et non le SLS versé par les locataires, qui n'est qu'une composante de l'assiette permettant de déterminer le montant de la cotisation.
Aux termes de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales : 'En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif.
En matière de droits d'enregistrement, d'impôt sur la fortune immobilière, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal judiciaire. Les tribunaux judiciaires statuent en premier ressort'.
Aux termes de l'article L 213-4-4 du code de l'organisation judiciaire : 'Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d'immeubles à usage d'habitation ou un contrat portant sur l'occupation d'un logement est l'objet, la cause ou l'occasion ainsi que des actions relatives à l'application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement'.
En l'espèce, M. et Mme [J] versent aux débats un courrier de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) du 15 septembre 2021, dans lequel, il est indiqué que les cotisations recouvrées par la CGLLS sont qualifiées d'impôt.
Ce courrier ne vise pas les SLS payés par M. et Mme [J] mais bien les cotisations perçues par la CGLLS, dont il n'est pas contesté que le SLS n'est qu'une composante.
Il n'est pas davantage démontré en appel que le SLS, dont les dispositions sont prévues par le code de la construction et de l'habitation, est une contribution indirecte qui relève du champ d'application de l'article L 199 du Livre des Procédures Fiscales.
Le présent litige est bien de la compétence du juge des contentieux de la protection dès lors que l'action en paiement de la RIVP a pour origine le contrat de bail signé entre M. et Mme [J] et la RIVP.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. et Mme [J].
Sur l'absence de notification préalable et individuelle du SLS
M. et Mme [J] font valoir que toutes les notifications des décisions de taxation au titre du SLS doivent être préalablement notifiées individuellement à chacun des co-titulaires du bail, l'absence de cette notification constituant un vice de forme faisant grief.
Ils invoquent la jurisprudence selon laquelle la notification prévue par l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui a une incidence sur le montant du loyer, doit être adressée à chacun des cotitulaires du bail (3e Civ., 12 mars 2014, pourvoi n° 13-14.403, Bull. 2014, III, n° 36) et l'article 9-1 de la loi du 6 juillet 1989.
Ils font valoir que pour les années 2019 à 2022, la RIVP ne leur pas notifié individuellement à chacun, la décision annuelle de taxation visant à les contraindre à verser le SLS, qu'elle produit des décisions rétroactives pour cette période sans justifier de leur envoi et de leur réception en dépit du principe de non-rétroactivité des actes administratifs et notamment fiscaux.
Ils soutiennent qu'en raison de l'absence totale de notification préalable de ces décisions, il convient de constater leur nullité et prononcer leur annulation sur le fondement des articles 112 et suivants du code de procédure civile, précisant que leur grief est constitué en ce qu'ils n'ont pas été informés du montant de la contribution qu'ils devaient verser s'ils restaient dans les lieux et prendre parti en temps utiles.
La RIVP répond que l'article L 441-9 du code de la construction et de l'habitation n'impose pas que toutes les notifications du montant du SLS soient notifiées individuellement aux cotitulaires du bail mais prévoit seulement qu'une mise en demeure soit envoyée aux locataires si ceux-ci n'ont pas répondu à l'enquête et que dans l'arrêt du 12 mars 2014, les courriers litigieux n'indiquaient pas 'M. et Mme' mais seulement 'M.'.
Elle fait valoir qu'en l'espèce, les courriers ont bien été adressés à 'M. et Mme [J]' et qu'en tout état de cause les dispositions de l'article L 441-9 du code de la construction et de l'habitation ne sont pas applicables ni cet arrêt du 12 mars 2014, dans la mesure où les époux [J] ont répondu aux enquêtes SLS 2019 à 2022.
Il résulte de l'article L441-9 du code de la construction et de l'habitation, que l'organisme d'HLM demande annuellement à chaque locataire communication des avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu et des renseignements concernant l'ensemble des personnes vivant au foyer permettant de calculer l'importance du dépassement éventuel du plafond de ressources et de déterminer si le locataire est redevable du supplément de loyer.
Le locataire est tenu de répondre à cette demande dans un délai d'un mois et, à défaut et après mise en demeure infructueuse, l'organisme d'HLM liquide provisoirement le supplément de loyer, en faisant application d'un coefficient de dépassement du plafond de ressources maximal.
Pour mémoire l'absence d'une double notification en cas de cotitularité du bail, qu'elle soit légale ou conventionnelle, n'est pas sanctionnée par la nullité mais par une inopposabilité à l'égard du conjoint non visé.
En l'espèce, les appelants ne demandent pas l'inopposabilité des demandes de paiement à Mme [J] mais concluent à la nullité des courriers litigieux qui ne saurait en tout état de cause être la conséquence du moyen invoqué.
Au demeurant, ils visent dans leurs écritures les articles 112 et suivants du code de procédure civile qui sont relatifs aux actes de procédure uniquement.
De plus, ils se réfèrent à la jurisprudence selon laquelle la notification prévue par l'article L.441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui a une incidence sur le montant du loyer, doit être adressée à chacun des cotitulaires du bail (3e Civ., 12 mars 2014, pourvoi n° 13-14.403, Bull. 2014, III, n° 36).
Or, si cet article permet au bailleur social, à défaut de réponse du locataire à l'enquête sociale, de liquider provisoirement le supplément de loyer, selon un coefficient de dépassement du plafond de ressources maximal, tel n'est pas le cas en l'espèce, M. et Mme [J] ayant répondu aux enquêtes sociales, comme le fait valoir exactement la RIVP ; en outre dans cette espèce, le courrier concernant l'enquête sociale n'avait été adressé qu'à un seul des deux époux.
Les courriers des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 ont été adressés à M. et Mme [J] et non pas à M. [J] seulement. Pour ces années, le montant du SLS chaque année ainsi que son mode de calcul, ont bien été notifiés à M. et Mme [J].
M. et Mme [J] ne se sont jamais plaints de ne pas avoir reçu ces notifications, qui ne peuvent être qualifiées de rétroactives puisqu'elles ont été adressées en début de chaque année.
S'il apparaît néanmoins que le courrier de notification du SLS avec son décompte du 17 janvier 2022 porte mention uniquement de M. [J], cette seule circonstance ne saurait établir que Mme [J] n'a pas eu connaissance de ce courrier.
Au demeurant, le montant du SLS a été porté sur leur avis d'échéance dès le mois de janvier 2022 adressé à 'M. et Mme [J]' de sorte que Mme [J] a eu immédiatement connaissance du montant facturé pour l'année 2022.
Le premier juge a rejeté à juste titre dans ses motifs la demande de nullité des décisions imposant à M. et Mme [J] de payer un SLS.
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande d'annulation 'des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022" les contraignant à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022.
Sur la violation des droits fondamentaux
M. et Mme [J] font valoir qu'ils étaient titulaires d'un bail privé aux conditions normales, avant le conventionnement d'office de leur immeuble, qui a transformé leur bail privé en bail conventionné et leur a imposé de payer un SLS.
Ils soutiennent en substance que ce SLS est contraire à leurs droits fondamentaux en ce que le bail privé aux conditions normales constituait pour eux un intérêt patrimonial bénéficiant de la protection visée à l'article 1 du protocole additionnel n° 1 de la convention européenne des droits de l'Homme, et en ce que les modifications directes ou indirectes opérées d'office par l'administration aux conditions d'un bail en cours constituent des ingérences de l'Etat au sens de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme.
Ils considèrent que le juge doit contrôler la proportionnalité de la modification des conditions du bail et des conséquences financières sur le locataire 'car autrement cela priverait d'effectivité ses droits de la défense et les faibles pouvoirs de contrôle judiciaire mènent alors à une violation de l'article 13 de la convention européenne des droits de l'Homme'.
La RIVP fait valoir que M. et Mme [J] ne démontrent pas en quoi l'application d'un SLS violerait leurs droits fondamentaux.
Selon l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'Homme, 'toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes'.
L'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme intitulé 'droit au respect de la vie privée et familiale' dispose :
'1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui'.
L'article 13 de la convention européenne des droits de l'Homme intitulé 'droit à un recours effectif', dispose :
'Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles'.
Le SLS est régi par les articles L. 441-3 et suivants du code de la construction et de l'habitation, lequel dispose que les organismes d'habitations à loyer modéré perçoivent des locataires des logements visés au premier alinéa de l'article L. 441-1 le paiement d'un supplément de loyer de solidarité en sus du loyer principal et des charges locatives dès lors qu'au cours du bail les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements.
Il ne s'agit ni d'un loyer ni d'une charge locative, mais d'une sorte de redevance dont une partie est reversée par les bailleurs sociaux à l'État, notamment dans le cadre de leur cotisation à la caisse de garantie du logement locatif social.
L'article L. 441-11 du même code dispose que l'organisme d'habitations à loyer modéré qui n'a pas exigé le paiement du supplément de loyer ou qui n'a pas procédé aux diligences lui incombant pour son recouvrement est passible d'une pénalité égale à un certain pourcentage des sommes exigibles et non mises en recouvrement et recouvrée par l'Etat.
Ce pourcentage, qui était égal à 50 % des sommes exigibles et non mises en recouvrement jusqu'à la loi 2017-86 du 23 décembre 2017, a été porté par cette loi à 100 % des sommes exigibles et non mises en recouvrement.
En l'espèce, M. et Mme [J] n'établissent pas en quoi la perception d'un SLS par le bailleur contreviendrait à l'article 1er du protocole additionnel n°1 de la CEDH précité, lequel a pour objet, la 'protection de la propriété', alors qu'ils sont locataires.
Ils n'expliquent pas davantage en quoi le SLS porterait atteinte au respect de leur vie privée et familiale ou de leur domicile garanti par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme.
Au demeurant, le SLS vise à assurer le droit au logement des locataires dotés de ressources modestes et à financer la construction et l'amélioration du parc locatif social, et le législateur a ainsi poursuivi des motifs d'intérêt général, dès lors que l'effort de solidarité exigé au moyen du SLS des locataires qui conservent un logement dans le parc HLM bien que leurs ressources dépassent significativement les seuils prévus pour l'attribution de tels logements vise à satisfaire une exigence de justice sociale et se trouve d'autant plus justifié que le besoin de construction de logements sociaux se trouve accru du fait du maintien dans ceux existants de locataires plus favorisés.
Enfin, M. et Mme [J] ne justifient pas d'une atteinte à leur droit à un recours effectif.
A titre surabondant, il convient de préciser que le montant du SLS n'est pas exorbitant ni disproportionné eu égard du but poursuivi, dès lors qu'il dépend des ressources du foyer et est plafonné à 30 % de ces ressources.
Le moyen tiré de l'atteinte aux droits fondamentaux de M. et Mme [J] a été écarté à juste titre par le premier juge.
Sur l'encadrement du loyer de base et la demande en paiement d'une somme de 25 896,60 euros à titre de remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022
M. et Mme [J] maintiennent que l'article 9 bis de la Convention conclue entre l'Etat et la RIVP prévoit que le loyer pratiqué applicable à chaque logement occupé par un locataire dont les ressources excèdent les plafonds de ressources pour l'attribution des logements sociaux, ne peut excéder le loyer maximum fixé à l'article 8bis, que cependant la RIVP se prévaut d'un loyer dérogatoire au loyer maximum fixé alors qu'un tel loyer est interdit depuis le 1er janvier 2018 en vertu de l'article 82 § I.8 de la loi du 27 janvier 2017 ayant abrogé l'ancien article L. 445-5 du code de la construction et de l'habitation.
Ils soutiennent que la RIVP continue à solliciter le paiement d'un loyer dérogatoire totalement prohibé et calcule le montant du SLS en se basant sur ce loyer, et non sur le loyer maximum désormais applicable à tous les locataires titulaires d'un bail social.
Ils sollicitent le débouté de la RIVP de sa demande en paiement faute de notification préalable d'un SLS calculé conformément aux articles L 441-3 et R 441-20 du code de la construction et de l'habitation, ainsi que le remboursement du trop-perçu résultant de la différence entre les loyers dérogatoires qu'ils ont réglés, et les loyers maximums autorisés de 2018 à 2022 inclus (total réclamé : 25 896,60 euros).
La RIVP répond que M. et Mme [J] font une analyse erronée des articles 8bis et 9 bis de la convention, qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles que le loyer de base dérogatoire ne peut dépasser 25,89 euros par m² de surface habitable, pour les locataires dont les ressources excèdent les plafonds de ressources prévus par le code de la construction et de l'habitation.
Elle affirme que le loyer de base de M. et Mme [J] n'a jamais dépassé le plafond de 25,89 euros par m² de surface habitable fixé par l'article 8bis de la convention applicable en l'espèce.
L'article L 445-5 du code de la construction et de l'habitation, applicable aux organismes d'HLM ayant conclu une convention d'utilité sociale, et abrogé par l'article 81 de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 disposait : 'Les dispositions de l'article L 441-4 sont applicables au supplément de loyer de solidarité prévu par le cahier des charges mentionné à l'article L 445-2. Toutefois, l'organisme peut, pour la durée de la convention et dans les conditions fixées par celle-ci, déroger à ces dispositions'.
Le premier juge en a donc justement déduit, qu'en abrogeant l'article L 445-5 du code de la construction et de l'habitation, la loi du 27 janvier 2017 n'a pas abrogé la possibilité pour un bailleur social d'appliquer un loyer dérogatoire au loyer conventionné mais la possibilité de déroger aux règles du SLS dans le cadre des conventions d'utilité sociale.
En l'espèce, la convention du 18 novembre 2002 est une convention type conclue en application de l'article L 351-2 (2° ou 3°) du code de la construction et de l'habitation (convention d'aide personnalisée au logement), entre l'Etat et la RIVP.
Ses articles 8 et 8 bis, prévoient que si le montant du loyer maximum est fixé à 7,35 euros le mètre carré de surface utile, valeur juillet 2002, ce loyer n'est pas applicable aux personnes dont les ressources dépassent le plafond prévu pour l'attribution d'un logement social, qui se voient appliquer un loyer dérogatoire fixé à 25,89 euros par mètre carré de surface utile, ce loyer maximum étant révisé chaque année, le 1er juillet, dans les conditions prévues à l'article 17d de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.
En conséquence, si les appelants soutiennent qu'ils ont réglé un loyer de base hors charges supérieur au loyer maximum autorisé, ils font en réalité une confusion entre loyer de base dérogatoire et loyer de base conventionné (hors SLS), ainsi que le fait valoir exactement la RIVP qui indique que le loyer inscrit dans le tableau de la convention est le loyer conventionné maximum tel qu'il résulte de la combinaison des articles 8 et 9 de la convention; mentionné à titre indicatif, il ne s'applique pas aux intéressés, qui, eux, bénéficiaient d'un loyer dérogatoire.
Il résulte de la combinaison des articles 8 bis et 9 bis de la convention que le loyer de base dérogatoire ne peut dépasser 25,89 euros par m² de surface habitable, pour les locataires dont les ressources excèdent les plafonds de ressources prévus par le code de la construction et de l'habitation et déjà dans les lieux lors du conventionnement, ce qui est bien le cas en l'espèce.
Il ne résulte pas des éléments produits que le loyer dérogatoire hors SLS ait en l'espèce excédé le plafond fixé par l'article 8 bis ; le loyer courant hors SLS s'élevait ainsi, à 1001,47 euros en 2018, 1014,01 euros en 2019, 1021,62 euros en 2020, 1028,31 euros en 2021 et 1032,64 euros en 2022 , soit 12,90 euros par m² de surface habitable, ce qui est conforme aux stipulations de la convention et n'excède pas le maximum autorisé.
Au demeurant, ces considérations apparaissent sans incidence sur la dette locative tirée de l'arriéré de SLS invoqué par la RIVP, dès lors que le calcul du SLS ne prend pas en considération le loyer pratiqué.
Le premier juge a rejeté à juste titre les demandes de M. et Mme [J].
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande en paiement de la somme de 25 896,60 euros au titre du remboursement du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022.
Sur le défaut d'information et la demande de dommages-intérêts à hauteur de 15 000 euros
M. et Mme [J] font valoir que le SLS n'est dû que par les locataires ayant accepté de signer un nouveau bail proposé par le bailleur après conventionnement dudit immeuble, que la RIVP ne justifie pas avoir notifié à M. [J], son droit à ne pas signer le bail conventionné et ne l'a pas informé des conséquences d'une telle signature.
Ils considèrent que la responsabilité civile de la RIVP est engagée sur le fondement de l'article 1112-1 du code civil en ce qu'elle a méconnu son obligation précontractuelle d'information et réitèrent leur demande en paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts.
La RIVP répond que le bail signé par M. [J], opposable à Mme [J] précise que le logement est conventionné et que le régime juridique applicable est celui de l'article L 351-2 du code de la construction et de l'habitation, et qu'en tout état de cause M. et Mme [J] auraient été soumis au régime du bail social qu'un nouveau bail conventionné ait été signé ou non.
En l'espèce, le bail de 2003 indique expressément que le régime juridique du logement loué est celui des logements conventionnés - article L 351-2 du code de la construction et de l'habitation, de sorte que le manquement à l'obligation d'information du bailleur n'est pas établi.
Au demeurant et contrairement aux affirmations de M. et Mme [J], même en l'absence de signature d'un nouveau bail, ils auraient été soumis au SLS.
L'article L. 353-19 dispose en effet, dans sa version antérieure à la loi Elan du 23 novembre 2018 et à la date de la convention de 2002, que :
"Pour les logements appartenant à des sociétés d'économie mixte et par dérogation à l'article L. 353-7, les dispositions de la convention s'appliquent de plein droit, à compter de sa date d'entrée en vigueur ou de la date d'achèvement des travaux lorsqu'elle en prévoit, aux titulaires de baux en cours ou aux bénéficiaires du droit au maintien dans les lieux sans qu'il soit nécessaire de leur donner congé".
La signature du bail de 2003 en mauvaise connaissance de cause est ainsi inopérante puisque le SLS s'appliquait en réalité dès l'entrée en vigueur de la convention signée avec l'État de sorte que le contrat de bail signé le 1er février 1979 aurait été soumis à ce dispositif, même sans la signature d'un nouveau bail.
Le premier juge a rejeté à juste titre la demande de dommages-intérêts de M. et Mme [J].
Ajoutant au jugement en ce qu'il ne l'a pas précisé à son dispositif, M. et Mme [J] seront donc déboutés de leur demande en paiement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur le montant de la dette locative
En l'espèce, le décompte versé aux débats par la RIVP fait état d'une dette locative d'un montant de 46 517,06 euros au 22 décembre 2022.
Le premier juge a condamné solidairement M. et Mme [J] à payer à la RIVP la somme de 46 179,02 euros au titre des loyers et charges et SLS impayés au 22 décembre 2022, déduction faite, à juste titre, d'une somme de 338,04 euros, correspondant à une erreur dans le calcul du SLS dès lors que le logement de M. et Mme [J] n'est pas d'une surface de 80 m² mais de 78,85 m², ainsi qu'il ressort du certificat de surfaces habitables produit par M. et Mme [J].
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point étant précisé que la circonstance selon laquelle le SLS facturé à M. et Mme [J] pour les années 2020 à 2022 est moindre que le plafond applicable est indifférente, et que le premier juge a exactement indiqué que les loyers de référence appliqués tiennent compte, conformément à l'article R 441-21 du code de la construction et de l'habitation, de l'indexation.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les termes de la présente décision ne justifient pas d'infirmer le jugement en ce qui concerne les dépens et les frais de l'article 700 de première instance.
M. et Mme [J], parties perdantes à titre principal, seront condamnés solidairement aux dépens d'appel.
L'équité commande de les condamner solidairement au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Rejette la demande tendant à l'annulation du jugement du 6 mars 2023 rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris,
Confirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris,
Et y ajoutant,
Déboute M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] de leur demande d'annulation 'des décisions rétroactives, prétendument en date des 8 janvier 2019, 14 janvier 2020, 13 janvier 2021 et 17 janvier 2022" les contraignant à verser le Supplément de loyer de solidarité du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022.
Déboute M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J], de leurs demandes en paiement des sommes de :
- 25 896,60 euros à titre de remboursement 'du loyer de base excessif indûment versé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022"
- 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamne solidairement M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] à payer à la RIVP, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne solidairement M. [C] [J] et Mme [D] [Y] épouse [J] aux dépens d'appel,
Rejette toutes autres demandes.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,