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Décisions

Cass. 1re civ., 10 mai 1988, n° 86-16.031

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Défendeur :

AMPAFRANCE (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsard

Cass. 1re civ. n° 86-16.031

9 mai 1988

Sur le pourvoi formé par Monsieur René A..., directeur de société, demeurant actuellement ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 13 mai 1986 par la cour d'appel de Paris (1ère chambre, section supplémentaire), au profit de la société anonyme AMPAFRANCE, dont le siège social est à Castres (Tarn), boîte postale 178, zone industrielle "La Chartreuse", représentée par Monsieur Klaub STRAUB, son directeur général,

défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 22 mars 1988, où étaient présents :

M. Ponsard, président, M. Camille Bernard, rapporteur, M. Fabre, président faisant fonctions de conseiller, MM. Z..., X..., Grégoire, Lesec, Kuhnmunch, Fouret, Bernard de Saint-Affrique, Thierry, conseillers, M. Charruault, conseiller référendaire, M. Dontenwille, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Camille Bernard, les observations de la SCP Desaché et Gatineau, avocat de M. A..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de la société Ampafrance, les conclusions de M. Dontenwille, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 13 mai 1986), que, par convention du 13 avril 1981, M. A..., de nationalité belge, cédait à la société anonyme de droit français Ampafrance 32 000 actions sur les 40 000 composant le capital de la société anonyme Eurolando, ayant son siège à Attiches (Nord) ; que le prix des actions était fixé en tenant compte de la situation comptable d'Eurolando au 30 avril 1981 ; que, par convention annexe, intitulée "garantie", signée entre les mêmes parties le 8 juillet 1981, M. A... garantissait notamment toute diminution d'actif ou l'apparition de tout passif qui pourrait se révéler, en s'engageant à en verser le montant à Eurolando ; que les deux contrats comportaient une clause compromissoire ; qu'un différend étant survenu entre les parties au sujet, notamment, de l'interprétation et de la portée des clauses de garantie de passif stipulées en faveur de la société Ampafrance, celle-ci a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage ; qu'au cours de l'instance, cette société a formé une demande relative au "sursalaire" de M. Y..., directeur de la société Eurolando (supérieur à celui qui était prévu à l'article 48 de la convention du 13 avril 1981) ; que, par sentence rendue à Paris le 31 octobre 1984, les arbitres ont condamné M. A... à payer la somme de 6 436 000 francs à la société Eurolando au titre de la garantie du passif, et celle de 326 000 francs à la société Ampafrance, à titre d'indemnité, en raison du sursalaire de M. Y... ; que M. A... a formé contre cette sentence un recours en annulation sur le fondement des articles 1504, 1502, 3° et 5° du nouveau Code de procédure civile ;

que l'arrêt attaqué a rejeté le recours ; Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. A... fait grief à la cour d'appel d'en avoir ainsi décidé, en ce qui concerne le chef de décision relatif au sursalaire de M. Y..., alors, de première part, que, selon le moyen, dans un arbitrage international comme dans tout arbitrage, l'objet du litige est, à peine de nullité, délimité par le compromis, de sorte qu'en statuant sur une question qui n'était pas incluse dans le compromis, les arbitres, qui ont, au vu de la convention, décidé d'appliquer le droit français, ont outrepassé leur mission ; alors, de deuxième part, que la demande relative au sursalaire de M. Y... n'était pas une prétention accessoire à la question de garantie du passif mais une demande distincte dans sa cause et son objet et qu'en admettant néanmoins, selon le moyen, que les arbitres avaient pu statuer en raison de leurs pouvoirs d'amiables compositeurs, l'arrêt attaqué a dénaturé le compromis ; alors, enfin, qu'en retenant que la demande additionnelle de la société Ampafrance "avait été discutée au fond par le mémoire de René A... (pages 23 et 24), sous le titre "les demandes accessoires", sans la moindre réserve de ce dernier sur la recevabilité d'un tel débat devant les arbitres", la cour d'appel a relevé d'office un moyen sans respecter le principe de la contradiction ; Mais attendu, d'abord, que l'arbitrage n'était pas, d'après la convention, régi par la loi française de procédure, le droit français ayant seulement été choisi par les parties comme loi de fond ; que les dispositions de l'article 1448 du nouveau Code de procédure civile, relatives aux mentions du compromis exigées à peine de nullité -applicables à l'arbitrage international seulement dans la mesure prévue par l'article 1495 du même code-, n'étaient pas en cause ; que la cour d'appel, ayant estimé qu'une demande incidente était possible après la conclusion du compromis, n'a donc pas violé l'article 1502, 3° du nouveau Code de procédure civile en retenant que le tribunal arbitral pouvait se prononcer sur cette demande ; Attendu, ensuite, que les arbitres n'ont usé de leurs pouvoirs d'amiables compositeurs que pour fixer le montant de l'indemnité, ainsi que l'a relevé l'arrêt attaqué, qui n'a pas dénaturé le compromis ; Attendu, enfin, que M. A... soutenait, dans ses conclusions déposées devant la cour d'appel, qu'il avait contesté devant les arbitres la recevabilité de la demande incidente ; que, dès lors, était soumise à la libre discussion des parties la question de savoir si, dans son mémoire qui était produit, M. A... avait soulevé l'irrecevabilité de cette demande ou s'il s'était au contraire expliqué sur le fond ; que le principe de la contradiction n'a donc pas été violé ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses trois branches ; Sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. A... reproche encore à la cour d'appel d'avoir rejeté son recours en annulation, formé sur le fondement des articles 1504 et 1502, 5°, concernant le chef de la sentence relatif à la garantie du passif, alors, d'une part, que les arbitres ont prononcé une condamnation au paiement au profit de la société Eurolando sans que l'intervention de cette société ait été exigée, et qu'ainsi auraient été violés le texte précité ainsi que l'article 14 du même Code ; alors, d'autre part, que la société Ampafrance n'ayant pas qualité pour introduire une action au profit de la société Eurolando, la règle "nul ne plaide par procureur" aurait été aussi violée ; alors, enfin, que le syndic de la société Eurolando, en liquidation des biens, n'ayant pas été appelé en intervention devant le tribunal arbitral, l'arrêt attaqué, qui refuse de prononcer la nullité de la sentence, aurait violé les dispositions d'ordre public des articles 13, 15 et suivants de la loi du 13 juillet 1967 et, en conséquence, l'article 1502, 5°, du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d'appel a retenu qu'en condamnant M. A... à payer une certaine somme à la société Eurolando, le tribunal arbitral n'a fait que contraindre le premier à l'exécution d'une obligation mise à sa charge par la convention passée avec la société Ampafrance et qu'il importait peu que cette condamnation ait eu pour effet d'en faire profiter un tiers, la société dont le passif était seulement garanti dans les rapports entre M. A... et la société Ampafrance ; qu'ainsi, elle n'a pas violé la règle "nul ne plaide par procureur" et a pu estimer qu'en s'abstenant d'exiger la mise en cause du syndic de la liquidation des biens de la société Eurolando, -lequel ne peut, d'ailleurs, exercer les actions du débiteur que dans la mesure où celles-ci sont ouvertes-, les arbitres n'ont pas méconnu une règle d'ordre public ; Que le moyen doit donc être écarté ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

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