CA Lyon, ch. soc. d (ps), 23 septembre 2025, n° 22/06444
LYON
Arrêt
Autre
AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE
DOUBLE RAPPORTEUR
RG : N° RG 22/06444 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OQZG
S.A.S. [13]
C/
[G]
[10]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Pole social du TJ de [Localité 17]
du 31 Août 2022
RG : 18/00261
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2025
APPELANTE :
S.A.S. [12] [Localité 18]
venant aux droits de la Sté [16]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON substituée par Me Lamia SEBAOUI, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
[L] [G]
né le 27 Février 1987 à [Localité 14] (42)
[Adresse 5]
[Localité 4]
comparant en personne, assisté de Me Zerrin BATARAY de la SAS BATARAY AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Cécile RITOUET de la SELARL CABINET RITOUET RUIZ, avocat au barreau de LYON
[10]
[Adresse 11]
[Localité 3]
représenté par Mme [T] [R] (Membre de l'entrep.) en vertu d'un pouvoir général
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 24 Juin 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS:
Présidée par Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente et Nabila BOUCHENTOUF, conseillère, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistées pendant les débats de Anais MAYOUD, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente
Nabila BOUCHENTOUF, conseillère
Anne BRUNNER , conseillère
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 23 Septembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Magistrate et par Anais MAYOUD, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [G] (le salarié) a été engagé par la société [16], aujourd'hui la société [12] [Localité 18] (la société, l'employeur), en qualité d'employé commercial sédentaire à compter du 26 août 2013.
Le 30 mai 2016, il a établi une déclaration d'accident du travail survenu le 13 octobre 2015 aux alentours de 15 heures, déclaration accompagnée d'un certificat médical initial du 14 octobre 2015 mentionnant un « état anxieux aigu réactionnel ».
Le 19 octobre 2016, la [7] (la caisse, la [9]) a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.
L'état de santé du salarié a été déclaré consolidé au 8 décembre 2017 et, le 19 janvier 2018, la [9] lui a notifié un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10%.
Le 4 mai 2018, M. [G] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, devenu le pôle social du tribunal judiciaire, aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Par jugement du 31 août 2022, le tribunal :
- déclare le présent jugement commun et opposable à la [10],
- dit que l'accident du travail dont M. [G] a été victime le 13 octobre 2015 trouve son origine dans une faute inexcusable de l'employeur, la société [12] [Localité 18],
- ordonne la majoration à son taux maximum de la rente servie à M. [G],
- accorde à M. [G] la somme de 5 000 euros à titre de provision,
Avant dire droit,
- sur la liquidation des préjudices subis par M. [G], ordonne une expertise judiciaire et désigne pour y procéder le docteur [C] (infirmerie protestante -1[Adresse 1]) avec pour mission de :
1°) convoquer les parties et recueillir leurs observations,
2°) se faire communiquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies, en particulier le certificat médical initial,
3°) fournir le maximum de renseignements sur l'identité de la victime, sa situation familiale, son niveau d'études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l'accident,
4º) à partir des déclarations de la victime et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d'hospitalisation et, pour chaque période d'hospitalisation, la nature et le nom de l'établissement, le ou les services concernés et a nature des soins,
5°) retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaitre les lésions initiales et les principales étapes de l'évolution ; prendre connaissance et interpréter les examens complémentaires produits,
6°) décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles,
7°) procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime,
8°) décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l'autonomie et, lorsque la nécessité d'une aide temporaire est alléguée, la consigner et émettre un avis motivé sur sa nécessité et son imputabilité en particulier,
- indiquer si l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne (étrangère ou non à la famille) a été nécessaire avant le 3 novembre 2015 en décrivant avec précision les besoins (nature de l'aide apportée, niveau de compétence technique, durée d'intervention quotidienne ou hebdomadaire),
- lorsque la nécessité de dépenses liées à la réduction de l'autonomie (frais d'aménagement du logement, frais de véhicule adaptés, aide technique, par exemple) est alléguée, indiquer dans quelle mesure elles sont susceptibles d'accroître l'autonomie de la victime,
9°) déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec lésions occasionnées par l'accident, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou habituelles ; si l'incapacité fonctionnelle n'a été que partielle, en préciser le taux,
10°) lorsque la victime allègue, pour la période antérieure à sa guérison, une répercussion dans l'exercice de ses activités professionnelles, recueillir les doléances et les analyser, étant rappelé que pour obtenir l'indemnisation du préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle, la victime devra rapporter la preuve que de telles possibilités préexistaient,
11°) décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique, soit avant la guérison, du fait des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles, et les évaluer selon l'échelle de sept degrés ;
12°) donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique avant la guérison,
13°) lorsque la victime allègue une impossibilité ou des difficultés pour se livrer à des activités spécifiques sportives ou de loisir, donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette gêne et son caractère définitif, sans prendre position sur l'existence ou non d'un préjudice afférent à cette allégation,
14°) dire s'il existe un préjudice sexuel et l'évaluer, le décrire en précisant s'il recouvre l'un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l'acte sexuel propre dit (difficultés, perte de libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction),
15°) établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission,
- dit que l'expert pourra s'adjoindre l'avis d'un expert d'une autre spécialité, si nécessaire,
- dit qu'en cas de refus ou d'empêchement légitime, il sera procédé aussitôt à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête de la partie la plus diligente, ou même d'office, par le magistrat chargé du contrôle de cette expertise,
- dit que les parties communiqueront à l'expert toutes les pièces dont elles entendent faire état préalablement à la première réunion d'expertise,
- dit que l'expert pourra s'entourer de tous renseignements utiles auprès notamment de tout établissement hospitalier où la victime a été traitée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé,
- dit que l'expert rédigera, au terme de ses opérations, un pré-rapport qu'il communiquera aux parties en les invitant à présenter leurs observations dans un délai maximum d'un mois,
- dit qu'après avoir répondu de façon appropriée aux éventuelles observations formulées dans le délai imparti ci-dessus, l'expert devra déposer au greffe du pôle social du tribunal judiciaire un rapport définitif en double exemplaire dans le délai de 6 mois à compter de sa saisine,
- rappelle que l'article 173 du code de procédure civile fait obligation à l'expert d'adresser copie du rapport à chacune des parties ou, pour elles, à leur avocat,
- dit que la [9] fera l'avance des frais d'expertise ainsi que de l'ensemble des sommes accordées, provision incluse, à charge pour elle ensuite d'en recouvrer le montant directement auprès de l'employeur,
- dit que la mesure d'instruction sera mise en 'uvre sous le contrôle du magistrat qui l'a ordonnée,
- condamne la société [13] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- déboute les parties de leurs autres demandes,
- ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.
La mesure d'instruction confiée à l'expert judiciaire n'a pas encore été diligentée.
Par déclaration enregistrée le 14 septembre 2022, la société a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 juillet 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, la société demande à la cour de :
- infirmer le jugement et statuant à nouveau :
- juger, à titre principal, la prescription de l'action engagée par le salarié et le débouter (sic) en conséquence de toutes ses demandes,
- juger, à titre subsidiaire, que :
* le salarié ne démontre pas l'existence, au sens de la loi, de l'existence d'un accident du travail au titre du harcèlement dont il prétend avoir été victime - écarter le témoignage de Mme [W] comme n'étant pas fiable dans la mesure où :
- une attestation reposant sur des éléments subjectifs, tels que des impressions, sera écartée par les juges (Cass. Soc., 3 mai 2016, n°14-29.297),
- une attestation émanant d'une salariée qui a fait l'objet d'une rupture conventionnelle le 29 avril 2016 et dont l'impartialité est sujette à caution ne pourra être retenue par la cour,
* le salarié a été l'origine des incidents survenus les 12 et 13 octobre 2015 qui l'ont conduit à bénéficier d'un arrêt de travail le 13 octobre 2015,
* elle n'avait pas connaissance, au moment du licenciement intervenu le 7 juin 2016, que le salarié avait entamé une procédure de reconnaissance d'accident du travail auprès de la [9],
* le salarié ne l'a informée de ce qu'il avait engagé une action en reconnaissance d'accident de travail qu'à la date du 16 juin 2016 soit postérieurement à son licenciement qui est intervenu le 7 juin 2016,
- débouter le salarié de toutes ses demandes notamment d'expertise,
- condamner le salarié au paiement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 2 août 2024 (reçues au greffe le 13 juin 2025) et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, le salarié demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* déclaré ses demandes comme recevables et bien fondées,
* retenu la faute inexcusable de l'employeur à son égard,
* ordonné la majoration de la rente à son taux maximum,
* ordonné avant dire droit une expertise judicaire,
- infirmer le jugement sur le surplus,
Statuant à nouveau,
* dire que les missions de l'expert seront les suivantes :
- après avoir recueilli les éléments nécessaires sur l'identité de la victime et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son niveau scolaire, son statut et/ou sa formation, son mode de vie antérieur à l'accident et sa situation actuelle,
- après avoir recueilli les déclarations et les doléances de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant,
- après avoir interrogé la victime sur les conditions d'apparition des lésions, l'importance des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences,
- après avoir consulté l'ensemble des documents médicaux fournis,
- après avoir procédé, en présence des médecins mandatés par les parties avec l'assentiment de la victime, à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime,
* il conviendra de :
- déterminer les dépenses de santé actuelles, restées à charge,
- évaluer les frais divers, (les frais administratifs, frais de trajets ou de changement du véhicule par exemple),
- évaluer les pertes de gains professionnels actuels : indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été du fait de son déficit fonctionnel temporaire dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle et en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée,
- évaluer les dépenses de santé futures, le cas échéant,
- fixer la perte de gain professionnelle future : indiquer notamment si le déficit fonctionnel permanent a entrainé l'obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle de manière anticipée par rapport à son projet de départ à la retraite, et les pertes de salaire consécutives jusqu'à la date qu'elle s'était fixée pour prendre sa retraite ;
- déterminer l'incidence professionnelle : indiquer notamment si le déficit fonctionnel permanent a entrainé des répercutions sur son parcours professionnel actuel (prise de retrait anticipée réduisant le montant de sa retraite '),
- fixer le déficit fonctionnel temporaire en indiquant les périodes pendant lesquelles la victime a été du fait de son déficit fonctionnel temporaire dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles, en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée,
- fixer les souffrances endurées : décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant des blessures subis pendant la maladie traumatique, les évaluer distinctement dans une échelle de un à sept,
- fixer le préjudice esthétique temporaire, le cas échéant,
- fixer le déficit fonctionnel permanent, le cas échéant : indiquer si après la consolidation, la victime subi un déficit fonctionnel permanent définit comme une altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques sensorielles, mentales ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé entrainant une limitation d'activité ou une restriction de participation à la vie en société subie au quotidien par la victime dans son environnement, en évaluer l'importance et en chiffre le taux,
- fixer le préjudice d'agrément : indiquer notamment que la victime est empêchée en toute ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisirs,
- déterminer le préjudice esthétique permanent, le cas échéant : donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique en attribuant une note fixée de 1 à 7,
- déterminer le préjudice sexuel, le cas échéant,
- déterminer le préjudice d'établissement, le cas échéant,
- déterminer s'il existe des préjudices permanents exceptionnels,
- condamner la société à lui verser une indemnité provisionnelle de 10 000 euros,
- condamner la société à lui verser la somme de 6 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement,
En tout état de cause,
- condamner la société à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,
- débouter la société de l'intégralité de ses demandes,
- condamner la société aux dépens,
- déclarer opposable et commune à la [9] la décision à intervenir.
Par ses écritures reçues au greffe le 20 mai 2025 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, la [9] demande à la cour de :
- lui donner acte qu'elle s'en remet sur l'appréciation de la faute inexcusable de l'employeur,
- prendre acte de ce qu'elle fera l'avance des sommes allouées à la victime au titre de la majoration de la rente et de l'indemnisation des préjudices complémentaires,
- dire et juger qu'elle procédera au recouvrement de l'intégralité des sommes dont elle sera amenée à faire l'avance auprès de l'employeur, ainsi que des frais d'expertise.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour relève liminairement que la société ne maintient pas, à hauteur de cour, sa demande de sursis à statuer rejetée par le premier juge.
SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION
La société conclut à la prescription de la demande du salarié considérant que plus de 2 ans se sont écoulés entre le 13 octobre 2015, date de l'accident, et le 30 avril 2018, date du recours saisissant le tribunal.
En réponse, le salarié prétend qu'ayant établi sa déclaration d'accident de travail le 30 mai 2016, il n'est pas prescrit en son action puisqu'il disposait d'un délai de deux ans à compter du 19 octobre 2016, date de notification par la caisse de la prise en charge de l'accident, pour saisir le tribunal.
En vertu de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable se prescrit par deux ans à compter du jour de l'accident ou de la clôture de l'enquête de la caisse ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière.
Plusieurs événements peuvent ainsi marquer le début du délai de la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur par le salarié victime d'un accident du travail. Seule la plus récente des dates est retenue entre celles de ces différents événements (Soc, 12 décembre 2002, nº0103243).
La prescription est, en application des articles 2240, 2241 et 2244 du même code interrompue par la reconnaissance du débiteur, une demande en justice, même en référé, une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution, ou un acte d'exécution forcée.
De plus, le délai de prescription de l'action d'un salarié tendant à établir la faute inexcusable de son employeur est interrompu par l'exercice de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et ne recommence à courir qu'à compter de la date de la reconnaissance de celui-ci (Civ. 2ème 24 juin 2013, nº 11-28.707, 11-28.595, Bull II nº 14).
Il est également admis que l'initiative de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle saisissant la [9] d'une requête tendant à la reconnaissance amiable d'une faute inexcusable en application de l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale équivaut à la demande en justice visée à l'article 2241 du code civil (en ce sens au regard de l'article 2244 alors en vigueur, Civ. 2e, 3 mars 2011 ; Civ. 2e, 16 septembre 2003, 02-30.490 ; Civ. 2e, 10 décembre 2009, 08-21.969).
Ici, le salarié a été victime, le 13 octobre 2015, d'un accident qui a été pris en charge par la [8] au titre de la législation sur les risques professionnels par décision du 19 octobre 2016. Un nouveau délai de deux ans a recommencé à courir à compter de cette date pour expirer le 19 octobre 2018.
La saisine de la juridiction en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur étant intervenue le 4 mai 2018, l'action engagée par le salarié est recevable comme non prescrite.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
SUR LA FAUTE INEXCUSABLE
La société conteste sa faute inexcusable et soutient que le salarié ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un harcèlement au travail qui justifierait l'existence d'un accident du travail, ajoutant qu'elle n'avait pas conscience du danger prétendument encouru par M. [G].
Le salarié rétorque que le caractère professionnel de son accident est établi ainsi que la faute inexcusable de l'employeur.
Il est constant que le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis l'intéressé et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié. Il suffit, pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, qu'elle en soit la cause nécessaire, alors même que d'autres facteurs ont pu concourir à la réalisation du dommage. L'employeur ne peut s'affranchir de son obligation de sécurité par la conclusion d'un contrat prévoyant qu'un tiers assurera cette sécurité.
De même, la faute éventuelle de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable.
Sauf cas limitativement énumérés, la faute inexcusable ne se présume pas et il incombe au salarié ou à ses ayants droit de rapporter la preuve que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé et qu'il n'a pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La conscience du danger exigée de l'employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective et précise de celui-ci. En d'autres termes, il suffit de constater que l'auteur ne pouvait ignorer celui-ci ou ne pouvait pas ne pas en avoir conscience ou encore qu'il aurait dû en avoir conscience. Cette conscience s'apprécie au moment ou pendant la période de l'exposition au risque.
Pour que l'employeur puisse s'exonérer de la faute inexcusable, il ne suffit pas qu'il invoque les mesures prises pour protéger le salarié, encore faut-il qu'il ait pris les mesures nécessaires à la protection de l'intéressé.
En tout état de cause, la reconnaissance de la faute inexcusable d'un employeur suppose préétablie l'existence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
Au cas particulier, les parties divergent sur le caractère professionnel de l'accident du 13 octobre 2015, ainsi que sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur à l'origine dudit accident.
1 - sur le caractère professionnel de l'accident déclaré
Tandis que l'employeur retient comme fait accidentel à l'origine de son éventuelle faute inexcusable le harcèlement moral invoqué par le salarié, ce dernier expose qu'il ne fonde pas sa demande sur ces faits mais sur le fait d'avoir été victime, en présence d'un témoin, d'une agression verbale le 13 octobre 2015, aux temps et lieu du travail, qui lui a occasionné un état anxieux aigu réactionnel constitutif d'un accident du travail.
Il résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. ( 2e Civ 9 juillet 2020, n° 19-13.852).
En application de ce texte, l'accident qui s'est produit au temps et au lieu du travail est présumé être un accident du travail.
Celui qui déclare avoir été victime d'un accident du travail doit établir autrement que par ses simples affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel. Il lui appartient dès lors de rapporter la preuve de la réalité de la lésion ainsi que sa survenance au lieu et au temps du travail, c'est-à-dire celui au cours duquel le salarié se trouve soumis au contrôle et à l'autorité du chef d'entreprise. Toutefois, cette absence de témoins ne peut faire obstacle à la reconnaissance d'un accident du travail dès lors qu'un ensemble de présomptions graves et concordantes permet de corroborer, par des éléments objectifs, les déclarations de la victime ou si les circonstances peuvent expliquer cette absence de témoins et que des éléments de preuve sont apportés.
La qualification d'accident du travail peut être retenue en cas de lésion psychologique, notamment si celle-ci est imputable à un événement ou à une série d'événements survenus à des dates certaines.
Il revient ensuite à l'employeur, ou la caisse, qui entend contester la présomption légale d'imputabilité de prouver l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ou que le salarié n'était pas, au moment de l'accident, sous l'autorité de l'employeur.
Au cas d'espèce, le fait accidentel déclaré est bien un événement qui est survenu le 13 octobre 2015 vers 15h, résultant de violences verbales et menaces dont a été victime le salarié, ayant donné lieu à dépôt de plainte puis saisine de l'inspection du travail par l'intéressé dont les lésions afférentes aux faits ont été constatées médicalement le 16 octobre suivant. La cour considère sur ce point que le jugement repose sur des motifs exacts et pertinents qu'elle adopte et valide, par suite, le caractère professionnel des faits litigieux.
En l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves, le jugement sera confirmé sur ce point.
2 - sur les conditions de la faute inexcusable
La société se contente d'affirmer qu'elle n'avait pas conscience du risque.
Le salarié réplique que l'employeur ne pouvait ignorer le risque qu'il lui faisait peser d'être victime d'intenses pressions, de chantage, de la part de ses supérieurs hiérarchique, ajoutant que ce climat délétère a précisément conduit à son accident du travail. Il souligne que l'employeur n'a pris aucune mesure de prévention ou de protection efficace ; que les responsables et dirigeants de la société, pourtant informés de la situation, n'ont pas songé à y remédier.
La cour constate que les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée en ce qu'elle retient la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de l'accident du travail du 13 octobre 2015.
SUR LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE INEXCUSABLE
Le jugement sera confirmé en ce qu'il ordonne la majoration de la rente au maximum, dans les conditions énoncées à l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale.
Il le sera également en ce qu'il ordonne une mesure d'expertise selon les modalités énoncées à son dispositif afin d'évaluer l'ensemble des préjudices subis par la victime, soit les préjudices définis par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et ceux non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, sauf à ajouter l'évaluation du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'établissement et, le cas échéant, des préjudices permanents exceptionnels.
La provision de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices personnels du salarié sera confirmée, ainsi que les dispositions du jugement sur l'avance des sommes par la caisse et son action récursoire à l'encontre de l'employeur au titre de la majoration de la rente d'accident du travail et des sommes dues en réparation des préjudices subis, y compris celles accordées à titre provisionnel.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
La société, qui succombe, supportera les dépens d'appel et une indemnité au visa de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Ordonne un complément d'expertise médicale afin d'évaluer :
- le déficit fonctionnel permanent de M. [G], mesure confiée à l'expert judiciaire désigné par le tribunal judiciaire, le docteur [C] ([Adresse 15]) qui devra indiquer si, après la consolidation, la victime conserve un déficit fonctionnel permanent défini comme une altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles ou mentales, ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé, entraînant une limitation d'activité ou une restriction de participation à la vie en société subie au quotidien par la victime dans son environnement ; dans l'affirmative, le décrire, en évaluer l'importance et en chiffrer le taux sur pièces,
- le préjudice d'établissement,
- les préjudices permanents exceptionnels,
Dit que la [7] devra consigner à la régie de la cour avant le 15 octobre 2025 une provision de 1 000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert, et qu'à défaut la désignation de l'expert sera caduque ;
Dit que les parties devront communiquer les pièces utiles à l'expert pour l'accomplissement de sa mission dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Dit que l'expert devra communiquer ses conclusions aux parties dans un pré-rapport, leur impartir un délai pour présenter leurs observations, y répondre point par point dans un rapport définitif, et remettre son rapport au greffe et aux parties dans les six mois de sa saisine, sauf prorogation dûment sollicitée auprès du juge chargé du contrôle des opérations d'expertise, et en adresser une copie aux conseils des parties,
Rappelle que si l'expert ne dépose pas son rapport dans le délai prévu au premier alinéa du présent article, il peut être dessaisi de sa mission par le président de la chambre sociale section D à moins qu'en raison de difficultés particulières, il n'ait obtenu de prolongation de ce délai,
Dit que les frais de ce complément d'expertise seront avancés par la [7], qui en récupérera le montant auprès de l'employeur, la société [13],
Désigne le président de la section D de la chambre sociale pour suivre les opérations d'expertise,
Dit qu'après dépôt du rapport d'expertise, l'affaire sera renvoyée au pole social du tribunal judiciaire de Saint Etienne pour qu'il soit statué sur l'indemnisation des préjudices de M. [G] et dit que ce dernier devra transmettre des conclusions écrites au tribunal dans un délai de deux mois, la société [13] ayant deux mois pour éventuellement y répondre ainsi que la [10],
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [12] [Localité 18] et la condamne à payer complémentairement en cause d'appel à M. [G] la somme de 1 500 euros,
Condamne la société [12] [Localité 18] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
DOUBLE RAPPORTEUR
RG : N° RG 22/06444 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OQZG
S.A.S. [13]
C/
[G]
[10]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Pole social du TJ de [Localité 17]
du 31 Août 2022
RG : 18/00261
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2025
APPELANTE :
S.A.S. [12] [Localité 18]
venant aux droits de la Sté [16]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON substituée par Me Lamia SEBAOUI, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
[L] [G]
né le 27 Février 1987 à [Localité 14] (42)
[Adresse 5]
[Localité 4]
comparant en personne, assisté de Me Zerrin BATARAY de la SAS BATARAY AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Cécile RITOUET de la SELARL CABINET RITOUET RUIZ, avocat au barreau de LYON
[10]
[Adresse 11]
[Localité 3]
représenté par Mme [T] [R] (Membre de l'entrep.) en vertu d'un pouvoir général
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 24 Juin 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS:
Présidée par Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente et Nabila BOUCHENTOUF, conseillère, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistées pendant les débats de Anais MAYOUD, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente
Nabila BOUCHENTOUF, conseillère
Anne BRUNNER , conseillère
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 23 Septembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Magistrate et par Anais MAYOUD, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [G] (le salarié) a été engagé par la société [16], aujourd'hui la société [12] [Localité 18] (la société, l'employeur), en qualité d'employé commercial sédentaire à compter du 26 août 2013.
Le 30 mai 2016, il a établi une déclaration d'accident du travail survenu le 13 octobre 2015 aux alentours de 15 heures, déclaration accompagnée d'un certificat médical initial du 14 octobre 2015 mentionnant un « état anxieux aigu réactionnel ».
Le 19 octobre 2016, la [7] (la caisse, la [9]) a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.
L'état de santé du salarié a été déclaré consolidé au 8 décembre 2017 et, le 19 janvier 2018, la [9] lui a notifié un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10%.
Le 4 mai 2018, M. [G] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, devenu le pôle social du tribunal judiciaire, aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Par jugement du 31 août 2022, le tribunal :
- déclare le présent jugement commun et opposable à la [10],
- dit que l'accident du travail dont M. [G] a été victime le 13 octobre 2015 trouve son origine dans une faute inexcusable de l'employeur, la société [12] [Localité 18],
- ordonne la majoration à son taux maximum de la rente servie à M. [G],
- accorde à M. [G] la somme de 5 000 euros à titre de provision,
Avant dire droit,
- sur la liquidation des préjudices subis par M. [G], ordonne une expertise judiciaire et désigne pour y procéder le docteur [C] (infirmerie protestante -1[Adresse 1]) avec pour mission de :
1°) convoquer les parties et recueillir leurs observations,
2°) se faire communiquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies, en particulier le certificat médical initial,
3°) fournir le maximum de renseignements sur l'identité de la victime, sa situation familiale, son niveau d'études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l'accident,
4º) à partir des déclarations de la victime et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d'hospitalisation et, pour chaque période d'hospitalisation, la nature et le nom de l'établissement, le ou les services concernés et a nature des soins,
5°) retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaitre les lésions initiales et les principales étapes de l'évolution ; prendre connaissance et interpréter les examens complémentaires produits,
6°) décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles,
7°) procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime,
8°) décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l'autonomie et, lorsque la nécessité d'une aide temporaire est alléguée, la consigner et émettre un avis motivé sur sa nécessité et son imputabilité en particulier,
- indiquer si l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne (étrangère ou non à la famille) a été nécessaire avant le 3 novembre 2015 en décrivant avec précision les besoins (nature de l'aide apportée, niveau de compétence technique, durée d'intervention quotidienne ou hebdomadaire),
- lorsque la nécessité de dépenses liées à la réduction de l'autonomie (frais d'aménagement du logement, frais de véhicule adaptés, aide technique, par exemple) est alléguée, indiquer dans quelle mesure elles sont susceptibles d'accroître l'autonomie de la victime,
9°) déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec lésions occasionnées par l'accident, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou habituelles ; si l'incapacité fonctionnelle n'a été que partielle, en préciser le taux,
10°) lorsque la victime allègue, pour la période antérieure à sa guérison, une répercussion dans l'exercice de ses activités professionnelles, recueillir les doléances et les analyser, étant rappelé que pour obtenir l'indemnisation du préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle, la victime devra rapporter la preuve que de telles possibilités préexistaient,
11°) décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique, soit avant la guérison, du fait des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles, et les évaluer selon l'échelle de sept degrés ;
12°) donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique avant la guérison,
13°) lorsque la victime allègue une impossibilité ou des difficultés pour se livrer à des activités spécifiques sportives ou de loisir, donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette gêne et son caractère définitif, sans prendre position sur l'existence ou non d'un préjudice afférent à cette allégation,
14°) dire s'il existe un préjudice sexuel et l'évaluer, le décrire en précisant s'il recouvre l'un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l'acte sexuel propre dit (difficultés, perte de libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction),
15°) établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission,
- dit que l'expert pourra s'adjoindre l'avis d'un expert d'une autre spécialité, si nécessaire,
- dit qu'en cas de refus ou d'empêchement légitime, il sera procédé aussitôt à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête de la partie la plus diligente, ou même d'office, par le magistrat chargé du contrôle de cette expertise,
- dit que les parties communiqueront à l'expert toutes les pièces dont elles entendent faire état préalablement à la première réunion d'expertise,
- dit que l'expert pourra s'entourer de tous renseignements utiles auprès notamment de tout établissement hospitalier où la victime a été traitée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé,
- dit que l'expert rédigera, au terme de ses opérations, un pré-rapport qu'il communiquera aux parties en les invitant à présenter leurs observations dans un délai maximum d'un mois,
- dit qu'après avoir répondu de façon appropriée aux éventuelles observations formulées dans le délai imparti ci-dessus, l'expert devra déposer au greffe du pôle social du tribunal judiciaire un rapport définitif en double exemplaire dans le délai de 6 mois à compter de sa saisine,
- rappelle que l'article 173 du code de procédure civile fait obligation à l'expert d'adresser copie du rapport à chacune des parties ou, pour elles, à leur avocat,
- dit que la [9] fera l'avance des frais d'expertise ainsi que de l'ensemble des sommes accordées, provision incluse, à charge pour elle ensuite d'en recouvrer le montant directement auprès de l'employeur,
- dit que la mesure d'instruction sera mise en 'uvre sous le contrôle du magistrat qui l'a ordonnée,
- condamne la société [13] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- déboute les parties de leurs autres demandes,
- ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.
La mesure d'instruction confiée à l'expert judiciaire n'a pas encore été diligentée.
Par déclaration enregistrée le 14 septembre 2022, la société a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 juillet 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, la société demande à la cour de :
- infirmer le jugement et statuant à nouveau :
- juger, à titre principal, la prescription de l'action engagée par le salarié et le débouter (sic) en conséquence de toutes ses demandes,
- juger, à titre subsidiaire, que :
* le salarié ne démontre pas l'existence, au sens de la loi, de l'existence d'un accident du travail au titre du harcèlement dont il prétend avoir été victime - écarter le témoignage de Mme [W] comme n'étant pas fiable dans la mesure où :
- une attestation reposant sur des éléments subjectifs, tels que des impressions, sera écartée par les juges (Cass. Soc., 3 mai 2016, n°14-29.297),
- une attestation émanant d'une salariée qui a fait l'objet d'une rupture conventionnelle le 29 avril 2016 et dont l'impartialité est sujette à caution ne pourra être retenue par la cour,
* le salarié a été l'origine des incidents survenus les 12 et 13 octobre 2015 qui l'ont conduit à bénéficier d'un arrêt de travail le 13 octobre 2015,
* elle n'avait pas connaissance, au moment du licenciement intervenu le 7 juin 2016, que le salarié avait entamé une procédure de reconnaissance d'accident du travail auprès de la [9],
* le salarié ne l'a informée de ce qu'il avait engagé une action en reconnaissance d'accident de travail qu'à la date du 16 juin 2016 soit postérieurement à son licenciement qui est intervenu le 7 juin 2016,
- débouter le salarié de toutes ses demandes notamment d'expertise,
- condamner le salarié au paiement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 2 août 2024 (reçues au greffe le 13 juin 2025) et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, le salarié demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* déclaré ses demandes comme recevables et bien fondées,
* retenu la faute inexcusable de l'employeur à son égard,
* ordonné la majoration de la rente à son taux maximum,
* ordonné avant dire droit une expertise judicaire,
- infirmer le jugement sur le surplus,
Statuant à nouveau,
* dire que les missions de l'expert seront les suivantes :
- après avoir recueilli les éléments nécessaires sur l'identité de la victime et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son niveau scolaire, son statut et/ou sa formation, son mode de vie antérieur à l'accident et sa situation actuelle,
- après avoir recueilli les déclarations et les doléances de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant,
- après avoir interrogé la victime sur les conditions d'apparition des lésions, l'importance des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences,
- après avoir consulté l'ensemble des documents médicaux fournis,
- après avoir procédé, en présence des médecins mandatés par les parties avec l'assentiment de la victime, à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime,
* il conviendra de :
- déterminer les dépenses de santé actuelles, restées à charge,
- évaluer les frais divers, (les frais administratifs, frais de trajets ou de changement du véhicule par exemple),
- évaluer les pertes de gains professionnels actuels : indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été du fait de son déficit fonctionnel temporaire dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle et en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée,
- évaluer les dépenses de santé futures, le cas échéant,
- fixer la perte de gain professionnelle future : indiquer notamment si le déficit fonctionnel permanent a entrainé l'obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle de manière anticipée par rapport à son projet de départ à la retraite, et les pertes de salaire consécutives jusqu'à la date qu'elle s'était fixée pour prendre sa retraite ;
- déterminer l'incidence professionnelle : indiquer notamment si le déficit fonctionnel permanent a entrainé des répercutions sur son parcours professionnel actuel (prise de retrait anticipée réduisant le montant de sa retraite '),
- fixer le déficit fonctionnel temporaire en indiquant les périodes pendant lesquelles la victime a été du fait de son déficit fonctionnel temporaire dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles, en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée,
- fixer les souffrances endurées : décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant des blessures subis pendant la maladie traumatique, les évaluer distinctement dans une échelle de un à sept,
- fixer le préjudice esthétique temporaire, le cas échéant,
- fixer le déficit fonctionnel permanent, le cas échéant : indiquer si après la consolidation, la victime subi un déficit fonctionnel permanent définit comme une altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques sensorielles, mentales ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé entrainant une limitation d'activité ou une restriction de participation à la vie en société subie au quotidien par la victime dans son environnement, en évaluer l'importance et en chiffre le taux,
- fixer le préjudice d'agrément : indiquer notamment que la victime est empêchée en toute ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisirs,
- déterminer le préjudice esthétique permanent, le cas échéant : donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique en attribuant une note fixée de 1 à 7,
- déterminer le préjudice sexuel, le cas échéant,
- déterminer le préjudice d'établissement, le cas échéant,
- déterminer s'il existe des préjudices permanents exceptionnels,
- condamner la société à lui verser une indemnité provisionnelle de 10 000 euros,
- condamner la société à lui verser la somme de 6 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement,
En tout état de cause,
- condamner la société à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,
- débouter la société de l'intégralité de ses demandes,
- condamner la société aux dépens,
- déclarer opposable et commune à la [9] la décision à intervenir.
Par ses écritures reçues au greffe le 20 mai 2025 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, la [9] demande à la cour de :
- lui donner acte qu'elle s'en remet sur l'appréciation de la faute inexcusable de l'employeur,
- prendre acte de ce qu'elle fera l'avance des sommes allouées à la victime au titre de la majoration de la rente et de l'indemnisation des préjudices complémentaires,
- dire et juger qu'elle procédera au recouvrement de l'intégralité des sommes dont elle sera amenée à faire l'avance auprès de l'employeur, ainsi que des frais d'expertise.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour relève liminairement que la société ne maintient pas, à hauteur de cour, sa demande de sursis à statuer rejetée par le premier juge.
SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION
La société conclut à la prescription de la demande du salarié considérant que plus de 2 ans se sont écoulés entre le 13 octobre 2015, date de l'accident, et le 30 avril 2018, date du recours saisissant le tribunal.
En réponse, le salarié prétend qu'ayant établi sa déclaration d'accident de travail le 30 mai 2016, il n'est pas prescrit en son action puisqu'il disposait d'un délai de deux ans à compter du 19 octobre 2016, date de notification par la caisse de la prise en charge de l'accident, pour saisir le tribunal.
En vertu de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable se prescrit par deux ans à compter du jour de l'accident ou de la clôture de l'enquête de la caisse ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière.
Plusieurs événements peuvent ainsi marquer le début du délai de la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur par le salarié victime d'un accident du travail. Seule la plus récente des dates est retenue entre celles de ces différents événements (Soc, 12 décembre 2002, nº0103243).
La prescription est, en application des articles 2240, 2241 et 2244 du même code interrompue par la reconnaissance du débiteur, une demande en justice, même en référé, une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution, ou un acte d'exécution forcée.
De plus, le délai de prescription de l'action d'un salarié tendant à établir la faute inexcusable de son employeur est interrompu par l'exercice de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et ne recommence à courir qu'à compter de la date de la reconnaissance de celui-ci (Civ. 2ème 24 juin 2013, nº 11-28.707, 11-28.595, Bull II nº 14).
Il est également admis que l'initiative de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle saisissant la [9] d'une requête tendant à la reconnaissance amiable d'une faute inexcusable en application de l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale équivaut à la demande en justice visée à l'article 2241 du code civil (en ce sens au regard de l'article 2244 alors en vigueur, Civ. 2e, 3 mars 2011 ; Civ. 2e, 16 septembre 2003, 02-30.490 ; Civ. 2e, 10 décembre 2009, 08-21.969).
Ici, le salarié a été victime, le 13 octobre 2015, d'un accident qui a été pris en charge par la [8] au titre de la législation sur les risques professionnels par décision du 19 octobre 2016. Un nouveau délai de deux ans a recommencé à courir à compter de cette date pour expirer le 19 octobre 2018.
La saisine de la juridiction en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur étant intervenue le 4 mai 2018, l'action engagée par le salarié est recevable comme non prescrite.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
SUR LA FAUTE INEXCUSABLE
La société conteste sa faute inexcusable et soutient que le salarié ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un harcèlement au travail qui justifierait l'existence d'un accident du travail, ajoutant qu'elle n'avait pas conscience du danger prétendument encouru par M. [G].
Le salarié rétorque que le caractère professionnel de son accident est établi ainsi que la faute inexcusable de l'employeur.
Il est constant que le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis l'intéressé et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié. Il suffit, pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, qu'elle en soit la cause nécessaire, alors même que d'autres facteurs ont pu concourir à la réalisation du dommage. L'employeur ne peut s'affranchir de son obligation de sécurité par la conclusion d'un contrat prévoyant qu'un tiers assurera cette sécurité.
De même, la faute éventuelle de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable.
Sauf cas limitativement énumérés, la faute inexcusable ne se présume pas et il incombe au salarié ou à ses ayants droit de rapporter la preuve que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé et qu'il n'a pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La conscience du danger exigée de l'employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective et précise de celui-ci. En d'autres termes, il suffit de constater que l'auteur ne pouvait ignorer celui-ci ou ne pouvait pas ne pas en avoir conscience ou encore qu'il aurait dû en avoir conscience. Cette conscience s'apprécie au moment ou pendant la période de l'exposition au risque.
Pour que l'employeur puisse s'exonérer de la faute inexcusable, il ne suffit pas qu'il invoque les mesures prises pour protéger le salarié, encore faut-il qu'il ait pris les mesures nécessaires à la protection de l'intéressé.
En tout état de cause, la reconnaissance de la faute inexcusable d'un employeur suppose préétablie l'existence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
Au cas particulier, les parties divergent sur le caractère professionnel de l'accident du 13 octobre 2015, ainsi que sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur à l'origine dudit accident.
1 - sur le caractère professionnel de l'accident déclaré
Tandis que l'employeur retient comme fait accidentel à l'origine de son éventuelle faute inexcusable le harcèlement moral invoqué par le salarié, ce dernier expose qu'il ne fonde pas sa demande sur ces faits mais sur le fait d'avoir été victime, en présence d'un témoin, d'une agression verbale le 13 octobre 2015, aux temps et lieu du travail, qui lui a occasionné un état anxieux aigu réactionnel constitutif d'un accident du travail.
Il résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. ( 2e Civ 9 juillet 2020, n° 19-13.852).
En application de ce texte, l'accident qui s'est produit au temps et au lieu du travail est présumé être un accident du travail.
Celui qui déclare avoir été victime d'un accident du travail doit établir autrement que par ses simples affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel. Il lui appartient dès lors de rapporter la preuve de la réalité de la lésion ainsi que sa survenance au lieu et au temps du travail, c'est-à-dire celui au cours duquel le salarié se trouve soumis au contrôle et à l'autorité du chef d'entreprise. Toutefois, cette absence de témoins ne peut faire obstacle à la reconnaissance d'un accident du travail dès lors qu'un ensemble de présomptions graves et concordantes permet de corroborer, par des éléments objectifs, les déclarations de la victime ou si les circonstances peuvent expliquer cette absence de témoins et que des éléments de preuve sont apportés.
La qualification d'accident du travail peut être retenue en cas de lésion psychologique, notamment si celle-ci est imputable à un événement ou à une série d'événements survenus à des dates certaines.
Il revient ensuite à l'employeur, ou la caisse, qui entend contester la présomption légale d'imputabilité de prouver l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ou que le salarié n'était pas, au moment de l'accident, sous l'autorité de l'employeur.
Au cas d'espèce, le fait accidentel déclaré est bien un événement qui est survenu le 13 octobre 2015 vers 15h, résultant de violences verbales et menaces dont a été victime le salarié, ayant donné lieu à dépôt de plainte puis saisine de l'inspection du travail par l'intéressé dont les lésions afférentes aux faits ont été constatées médicalement le 16 octobre suivant. La cour considère sur ce point que le jugement repose sur des motifs exacts et pertinents qu'elle adopte et valide, par suite, le caractère professionnel des faits litigieux.
En l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves, le jugement sera confirmé sur ce point.
2 - sur les conditions de la faute inexcusable
La société se contente d'affirmer qu'elle n'avait pas conscience du risque.
Le salarié réplique que l'employeur ne pouvait ignorer le risque qu'il lui faisait peser d'être victime d'intenses pressions, de chantage, de la part de ses supérieurs hiérarchique, ajoutant que ce climat délétère a précisément conduit à son accident du travail. Il souligne que l'employeur n'a pris aucune mesure de prévention ou de protection efficace ; que les responsables et dirigeants de la société, pourtant informés de la situation, n'ont pas songé à y remédier.
La cour constate que les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée en ce qu'elle retient la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de l'accident du travail du 13 octobre 2015.
SUR LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE INEXCUSABLE
Le jugement sera confirmé en ce qu'il ordonne la majoration de la rente au maximum, dans les conditions énoncées à l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale.
Il le sera également en ce qu'il ordonne une mesure d'expertise selon les modalités énoncées à son dispositif afin d'évaluer l'ensemble des préjudices subis par la victime, soit les préjudices définis par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et ceux non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, sauf à ajouter l'évaluation du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'établissement et, le cas échéant, des préjudices permanents exceptionnels.
La provision de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices personnels du salarié sera confirmée, ainsi que les dispositions du jugement sur l'avance des sommes par la caisse et son action récursoire à l'encontre de l'employeur au titre de la majoration de la rente d'accident du travail et des sommes dues en réparation des préjudices subis, y compris celles accordées à titre provisionnel.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
La société, qui succombe, supportera les dépens d'appel et une indemnité au visa de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Ordonne un complément d'expertise médicale afin d'évaluer :
- le déficit fonctionnel permanent de M. [G], mesure confiée à l'expert judiciaire désigné par le tribunal judiciaire, le docteur [C] ([Adresse 15]) qui devra indiquer si, après la consolidation, la victime conserve un déficit fonctionnel permanent défini comme une altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles ou mentales, ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé, entraînant une limitation d'activité ou une restriction de participation à la vie en société subie au quotidien par la victime dans son environnement ; dans l'affirmative, le décrire, en évaluer l'importance et en chiffrer le taux sur pièces,
- le préjudice d'établissement,
- les préjudices permanents exceptionnels,
Dit que la [7] devra consigner à la régie de la cour avant le 15 octobre 2025 une provision de 1 000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert, et qu'à défaut la désignation de l'expert sera caduque ;
Dit que les parties devront communiquer les pièces utiles à l'expert pour l'accomplissement de sa mission dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Dit que l'expert devra communiquer ses conclusions aux parties dans un pré-rapport, leur impartir un délai pour présenter leurs observations, y répondre point par point dans un rapport définitif, et remettre son rapport au greffe et aux parties dans les six mois de sa saisine, sauf prorogation dûment sollicitée auprès du juge chargé du contrôle des opérations d'expertise, et en adresser une copie aux conseils des parties,
Rappelle que si l'expert ne dépose pas son rapport dans le délai prévu au premier alinéa du présent article, il peut être dessaisi de sa mission par le président de la chambre sociale section D à moins qu'en raison de difficultés particulières, il n'ait obtenu de prolongation de ce délai,
Dit que les frais de ce complément d'expertise seront avancés par la [7], qui en récupérera le montant auprès de l'employeur, la société [13],
Désigne le président de la section D de la chambre sociale pour suivre les opérations d'expertise,
Dit qu'après dépôt du rapport d'expertise, l'affaire sera renvoyée au pole social du tribunal judiciaire de Saint Etienne pour qu'il soit statué sur l'indemnisation des préjudices de M. [G] et dit que ce dernier devra transmettre des conclusions écrites au tribunal dans un délai de deux mois, la société [13] ayant deux mois pour éventuellement y répondre ainsi que la [10],
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [12] [Localité 18] et la condamne à payer complémentairement en cause d'appel à M. [G] la somme de 1 500 euros,
Condamne la société [12] [Localité 18] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE