CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 22 septembre 2025, n° 24/01066
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/01066 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JENF
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
27 février 2024
RG :23/238
[K] [S]
C/
E.A.R.L. [U] [G]
Grosse délivrée le 22 SEPTEMBRE 2025 à :
- Me BENAMARA
- Me NOGAREDE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 27 Février 2024, N°23/238
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Septembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [D] [I] [K] [S]
né le 03 Septembre 1969 à [Localité 5] ' BARCELOS- PORTUGAL
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Mathilde BENAMARA, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
E.A.R.L. [U] [G]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Guilhem NOGAREDE de la SELARL GN AVOCATS, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [D] [I] [K] [S] a été employé par l'Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL) [G] [U] en qualité d'ouvrier agricole, à compter du 15 décembre 2014 au 13 mai 2015 puis du 9 novembre 2015 au 31 mai 2016 suivant contrat à durée déterminée respectivement à temps partiel puis à temps complet. À compter du 3 juin 2016, il était embauché pour le même poste suivant contrat de travail à durée indéterminée, à temps plein, niveau 3, échelon 1, coefficient 140. Au dernier état de la relation contractuelle, son salaire mensuel s'élevait à la somme de 1633,49 euros bruts pour 151,67 heures de travail.
Le contrat de travail est soumis à la convention collective nationale des Ouvriers et Employés des Exploitations Agricoles du Gard du 1er avril 2003 (IDCC 9301).
En parallèle, le salarié était locataire de l'époux de l'employeur depuis le 13 janvier 2012 puis de la SCI Les Rizières, dont l'employeur devint associé, dès janvier 2015 par cession de bail.
Le 11 septembre 2019, M. [D] [I] [K] [S] a transmis en main propre à l'employeur un décompte d'heure supplémentaires à payer, demande réitérée par courrier.
Les 15 octobre, 19 novembre, 29 novembre, 4 décembre 2019 et les 7 et 9 janvier 2020, M. [D] [I] [K] [S] se voyait notifier des avertissements.
Du 18 octobre 2019 au 1er novembre 2019, le salarié a été placé en arrêt de travail pour 'problématique au travail'.
Le 17 janvier 2020, l'EARL [G] [U] notifiait à M. [D] [I] [K] [S] une convocation pour un entretien préalable à un éventuel licenciement assorti d'une mise à pied conservatoire.
Par courrier du 5 février 2020, l'EARL [G] [U] notifiait à M. [D] [I] [K] [S] son licenciement pour faute grave.
Par requête en date du 4 mai 2020, M. [D] [I] [K] [S] a saisi le conseil de prud'hommes d'Alès aux fins de voir son licenciement requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et son employeur condamné à lui verser diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement en date du 27 février 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- dit que les avertissements du 04/12/2019 et du 07/01/2020 sont injustifiés, le conseil les annule,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes au titre du préjudice moral,
- débouté [D] [I] [K] [S] sur ses demandes :
- d'heures supplémentaires et congés payés si afférents,
- de travail dissimulé,
- de rectification des bulletins de salaires,
- de rappel de salaire sur maintien de salaire pendant la maladie et congés payés y afférents,
- sur le harcèlement moral,
- débouté les deux parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'EARL [G] [U] de ses autres demandes,
- renvoyé au juge départiteur les demandes relatives à la mise à pied conservatoire, au préavis et ses congés payés si afférents ainsi que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par acte du 22 mars 2024, M. [D] [I] [K] [S] a régulièrement interjeté appel de la décision, la procédure étant enregistrée sous le numéro RG 24 01066
Par jugement de départage en date du 6 mai 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné M. [D] [I] [K] [S] aux dépens.
Par acte du 05 juin 2024, M. [D] [I] [K] [S] a régulièrement interjeté appel de la décision, la procédure étant enregistrée sous le numéro RG 24 011913.
Par ordonnance de jonction en date du 13 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures n° RG 24/01913 et 24/01066 et dit que la procédure se poursuivra sous le n° 24/01066.
Par ordonnance en date du 6 février 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 25 avril 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 27 mai 2025.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 15 avril 2025, M. [D] [I] [K] [S] demande à la cour de :
- recevoir ses deux appels,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, rg 23/238 en ce qu'il a :
- dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral inhérent au caractère injustifié des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires sur maintien de salaires pendant la maladie et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande de rectification des bulletins de salaires,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du 6 mai 2024, rg 23/238 en ce qu'il a :
- jugé le licenciement pour faute grave de M. [D] [I] [K] [S] bien fondé,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel de salaires au titre du préavis et congés payés afférents, rappel d'indemnité de licenciement et rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
Statuant à nouveau,
- déclarer qu'au cours de la relation contractuelle l'EARL [G] [U] est venue aux droits de Mme [G] [U],
1/ sur les heures supplémentaires, l'avantage en nature et le travail dissimulé,
- constater une communauté d'intérêt entre la SCI les rizières et l'EARL [G] [U]
- constater que tenant l'attribution d'un logement à son profit dont le paiement n'a jamais été exigé pendant toute la durée du contrat de travail à durée indéterminée, un avantage en nature logement doit être caractérisé, qui aurait dû être valorisé sur les fiches de paie du salarié,
- constater une situation de travail dissimulé imputable à l'EARL [G] [U],
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 9800 euros d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer :
* la somme de 16.101,12388 euros bruts de rappel de salaires à titre d'heures supplémentaires sur la période janvier 2017 au 31 juillet 2019,
* 1610,11 euros bruts de rappel de salaires au titre des congés payés afférents,
- condamner l'EARL [G] [U] à rectifier ses bulletins de salaire sur la période de janvier 2017 à février 2020 pour tenir compte du montant des heures supplémentaires à réintégrer et de l'avantage en nature logement,
2/ sur la demande au titre du le maintien de salaire pendant la maladie, les sanctions disciplinaires injustifiées et le harcèlement moral,
- condamner l'EARL [G] [U] au paiement d'un complément employeur pendant son arrêt de travail de 362,75625 euros bruts outre 36.27 euros bruts de congés payés afférents sur la période du 18 octobre 2019 faut 1er novembre 2019,
- dire et juger non justifiés les 6 avertissements notifiés les 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019, 4 décembre 2019, 7 janvier 2020, 9 janvier 2020,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer les sommes de :
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 15 octobre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 19 novembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 29 novembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 4 décembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du7 janvier 2020,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 9 janvier 2020,
- dire et juger qu'il a été victime d'harcèlement moral
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
4/ sur le licenciement pour faute grave,
- dire et juger le licenciement pour faute grave notifié le 5 février 2020 dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- par conséquent, condamner l'EARL [G] [U] à lui payer les sommes suivantes:
* 1012,38 euros bruts de rappel de salaires au titre de la mise à pied conservatoire sur la période du 18 janvier au 5 février 2020,
* 101.23 euros bruts de congés payés afférents,
* 3266,98 euros bruts de rappel de salaires pour préavis (2 mois),
* 326,69 euros bruts de congés payés afférents sur préavis,
* 9800 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens du procès.
Au soutien de ses demandes, M. [D] [I] [K] [S] fait valoir que :
- à compter de son embauche en contrat de travail à durée indéterminée en juin 2016, le logement lui a été mis à disposition gracieusement, et M. [U] ne lui a plus demandé le paiement du loyer pour l'appartement qu'il occupait depuis 2012 ; et ce jusqu'à ce que lui-même demande le paiement de ses heures supplémentaires en novembre 2019,
- s'il a été débouté à hauteur d'appel dans le cadre du contentieux civil l'opposant à son bailleur, cela n'empêche pas la chambre sociale de statuer sur la réalité de la situation,
- les deux situations sont intrinsèquement liées puisque la SCI bailleur est détenu à 49% par Mme [U] qui est son employeur par l'EARL qu'elle détient,
- Mme [G] [U] a imaginé un système totalement illégal consistant à ne pas payer les heures supplémentaires accomplies par le salarié à sa demande et connaissance, lui mettre à disposition un logement sur le domaine (par l'habillage d'une communauté d'intérêt qui est la SCI Les Rizières) sans déclarer un quelconque avantage en nature et habiller le tout par un bail, sans demander le paiement des loyers depuis a minima son recrutement en CDI le 3 janvier 2016, cette situation caractérisant une situation de travail dissimulé dont il est fondé à demander réparation,
- s'il a effectivement signé les relevés horaires mensuels établis par l'EARL [G] [U] c'est en raison du rapport de force mis en place, sa paie ne lui étant remise qu'après signature de ces rapports,
- il a d'ailleurs fait l'objet de deux avertissements lorsqu'il a refusé de signer ces relevés horaires,
- il justifie de la réalité de ses heures de travail par les décomptes qu'il produit, et qui sont confirmés par les attestations versées aux débats décrivant son amplitude horaire,
- il justifie également que le maintien de son salaire auquel il pouvait prétendre pendant son arrêt de travail n'a pas été assuré par l'EARL [G] [U] ,
- alors que son comportement n'avait donné lieu à aucune remarque jusqu'en octobre 2019, il va faire l'objet d'un acharnement de son employeur à partir du moment où il va demander le respect de ses droits, et se verra notifier pas moins de 6 avertissements entre le 15 octobre 2019 et le 9 janvier 2020 avant de se voir notifier une mise à pied conservatoire puis un licenciement pour faute grave pour prétendument avoir refusé d'effectuer une prestation sur un tracteur,
- l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve des griefs fondant les quatre premiers avertissements, les deux derniers étant dénués de tout fondement faute de viser des faits relevant de la discipline,
- Mme [U] va ainsi se livrer à un véritable harcèlement moral à son encontre, l'isolant des autres salariés, remettant en cause l'accord convenu en mettant en oeuvre la procédure d'expulsion et en multipliant les procédures disciplinaires, cette attitude entraînant la dégradation de son état de santé et son placement en arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019 pour ' problématique au travail',
- l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve de la faute grave qu'il lui reproche, le juge départiteur l'ayant cru sur parole et faisant fi des règles de preuve,
- au surplus, la sanction est disproportionnée par rapport aux faits qui lui sont reprochés, ce qui suffit à caractériser l'absence de cause réelle et sérieuse,
- par suite, ses demandes indemnitaires sont fondées.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimé en date du 24 avril 2025, l'EARL [G] [U] demande à la cour de :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a annulé les avertissements des 4/12/2019 et 7/01/2020,
- débouter M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'annulation des avertissements des 4/12/2019 et 7/01/2020,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts en réparation de son prétendu préjudice moral inhérent au caractère prétendument injustifié des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024,RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires sur maintien de salaires pendant la maladie et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation paritaire du 27 février 2024,RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande de rectification des bulletins de salaires,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation paritaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a jugé le licenciement pour faute grave de M. [D] [I] [K] [S] bien fondé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel de salaires au titre du préavis et congés payés afférents, rappel d'indemnité de licenciement et rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- débouter M. [D] [I] [K] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- le condamner à 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi
qu'aux entiers dépens,
A titre subsidiaire,
- ramener à de plus justes proportions le montant des condamnations sollicitées.
Au soutien de ses demandes, l'EARL [G] [U] fait valoir que :
- le décompte d'heures supplémentaires produit par M. [D] [I] [K] [S] dans le cadre de la présente instance, plus de deux ans après la saisine du conseil de prud'hommes, outre qu'il présente des incohérences et des erreurs quant aux périodes de congés en comparaison avec les bulletins de salaire, est différent de celui qui avait été adressé en septembre 2019 au soutien de la demande de paiement d'heures supplémentaires,
- les attestations dont il se prévaut ne font état que d'une amplitude horaire quant à son absence de son domicile et ne saurait attester de la réalité de son temps de travail,
- contrairement à ce que soutient M. [D] [I] [K] [S], il comprend parfaitement le français, a toujours compris les consignes qui lui étaient données, et a su répondre à Mme [U] lors de l'entretien préalable,
- aucun travail dissimulé ne peut lui être reproché, l'avantage en nature dont se prévaut M. [D] [I] [K] [S] n'étant pas établi, et celui-ci ne peut prétendre que l'EARL [G] [U] et la SCI Les Rizières auraient une communauté d'intérêts, de sorte qu'il pourrait être fait abstraction des règles de droit les plus élémentaires,
- les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] constituent des manquements à ses obligations contractuelles, sont établis par les relevés horaires et sont en outre concomitants du litige relatif au paiement des loyers et au refus de jours de congés payés du 9 décembre 2019,
- M. [D] [I] [K] [S] a d'ailleurs expliqué lors de l'entretien préalable le comportement qui lui était ainsi reproché par le litige relatif aux heures supplémentaires,
- M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas de la réalité du préjudice fondant ses demandes de dommages et intérêts,
- M. [D] [I] [K] [S] ne produit pas le relevé des indemnités journalières qu'il a perçues pendant son arrêt de travail, ce qui ne permet pas d'apprécier le bien fondé de sa demande au titre du maintien de son salaire pendant son arrêt de travail,
- le harcèlement moral dont M. [D] [I] [K] [S] se prévaut ne repose que sur ses seules allégations et il a justement été débouté de sa demande de dommages et intérêts en première instance,
- M. [D] [I] [K] [S] n'a jamais contesté le comportement caractérisant la faute grave, et a tenté de le justifier lors de l'entretien préalable en exposant qu'il ne reprendrait le travail qu'une fois que l'employeur aurait cédé à son chantage,
- à perte de procès, M. [D] [I] [K] [S] prétend que son refus de conduire le tracteur serait justifié, puisqu'il n'était pas titulaire du permis de conduire mais comme l'a justement relevé le premier juge, par dérogation à l'obligation légale, en application de l'article R.221-20 du Code de la Route, les conducteurs des véhicules et appareils agricoles ou forestiers attachés à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou à une coopérative d'utilisation de matériel agricole ne sont pas tenus d'être titulaire du permis de conduire pour conduire un tracteur sur l'exploitation agricole,
- par suite, le refus opposé par M. [D] [I] [K] [S] n'était pas légitime et caractérisait un nouvel acte d'insubordination, qui justifiait sa mise à pied conservatoire et par suite son licenciement pour faute grave au regard de son passé disciplinaire, et de l'incidence de son comportement sur le fonctionnement de l'exploitation dont il était le seul salarié permanent,
- subsidiairement, M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas de son préjudice et ne peut prétendre qu'au montant minimal de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
* rappel de salaire en raison d'heures supplémentaires
Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l'article 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties; il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l'opposition à l'exécution de celle-ci de l'employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires à raison de l'accord tacite de l'employeur. Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l'employeur de la réalisation d'heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l'absence d'opposition de l'employeur à la réalisation de ces heures.
En l'espèce, M. [D] [I] [K] [S] soutient que l'EARL [G] [U] lui est redevable d'une somme de 16.101,12388 euros correspondant aux heures supplémentaires effectuées entre janvier 2017 et juillet 2019, outre 1.610,11 euros de congés payés y afférents.
M. [D] [I] [K] [S] explique qu'il a signé les décomptes horaires mensuels sous la contrainte, ne recevant son salaire et sa fiche de paie qu'en contrepartie de cette signature. Il précise que la réalité de cette contrainte est démontrée par les deux avertissements dont il a fait l'objet précisément pour avoir refusé de signer ces décomptes.
Il produit à l'appui de ses prétentions :
- un tableau de synthèse mensuelle de son temps de travail avec les heures payées et les heures effectuées,
- des 'feuille d'heure mois de' mensuelles à compter de janvier 2017, mentionnant par jour travaillé une durée de travail, sans précision d'horaire,
- un décompte manuel identique au tableau précédent,
- une attestation de Mme [X] [Y], qui se présente comme 'belle-soeur' et indique qu'à l'occasion de séjours chez M. [D] [I] [K] [S] elle a constaté qu'il travaillait de ' 7h du matin à 18h le soir', sans précision de date,
- une attestation de Mme [L] [H], qui se présente comme tante de la compagne de M. [D] [I] [K] [S] et indique que lors d'un séjour à leur domicile entre le 4 et le 23 janvier 2019, ' Monsieur [K] partait de la maison pour son travail quotidiennement vers 7h du matin et ne rentrait du travail que vers 19 heure le soir',
- l'avertissement en date du 4 décembre 2019: « Le vendredi 29 novembre je vous ai demandé comme chaque fin de mois de venir au bureau afin de signer votre rapport d'activité comme vous le faites depuis le début de votre contrat de travail.
A mon grand étonnement, vous n'avez pas voulu le signer, me prétextant que votre conseil vous a dit de ne pas le faire ceci n'étant pas obligatoire.
Je prends note de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard, organisme établissant les bulletins de salaire.'
- l'avertissement en date du 7 janvier 2020 : « Une fois encore vous n'avez pas voulu signer votre rapport d'activité, et ce pour la deuxième fois. Je prends note encore une fois de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard organisme établissant les bulletins de salaire.'
Ces éléments sont suffisamment précis au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation pour permettre à l'EARL [G] [U] d'y répondre.
L'EARL [G] [U] conteste devoir un quelconque rappel de salaire pour des heures supplémentaires non rémunérées et observe que M. [D] [I] [K] [S] a signé ses relevés horaires conformes à ses bulletins de paie jusqu'en octobre 2019, et qu'il a refusé de le faire une fois qu'il a demandé la compensation entre ses heures supplémentaires et ses loyers impayés.
Elle fait valoir qu'il existe des contradictions entre le décompte que M. [D] [I] [K] [S] lui a adressé en septembre 2019 et celui qu'il a finalement produit dans le cadre de la présente instance le 9 mai 2023 puisqu'il était revendiqué initialement le paiement:
- de 539,5 heures supplémentaires pour 2017, et désormais 507,8 heures supplémentaires
- de 525 heures supplémentaires pour 2018, et désormais 340,64 heures supplémentaires
- de 343 heures supplémentaires pour 2019, et désormais 356,31 heures supplémentaires.
L'EARL [G] [U] observe que le premier décompte présentait des incohérences avec les bulletins de salaire puisque :
- pour les mois d'octobre 2018 à décembre 2018, M. [D] [I] [K] [S] mentionne un nombre d'heures travaillées inférieur à celui porté sur les bulletins de salaire correspondant,
- entre le 16 et le 31 août 2019, M. [D] [I] [K] [S] était en congés mais revendique avoir travaillé 15 heures.
Elle souligne des incohérences différentes sur le décompte versé aux débats, précisant ' 'à titre d'exemple Monsieur [K] [S] y prétend :
- avoir travaillé du 1er au 6 octobre 2017, alors que sa fiche de paie du mois d'octobre 2017 démontre qu'à cette époque, il était en congés.
- avoir effectué 5 h le 11 novembre 2017, qui était pourtant un jour férié non travaillé.
- avoir réalisé 4h30 le 23 décembre 2017, alors qu'il était en congés payés, ce que confirme sa fiche de paie, qu'il n'a jamais contestée.
- avoir effectué 4h30 le 21 mai 2018, alors qu'il s'agissait d'un jour férié non travaillé.
- avoir travaillé du 21 au 31 mars 2019, alors qu'il était en congés payés, ce que rappelle sa fiche de paie, qu'il n'a jamais contestée.
- avoir travaillé les 8 et 30 mai 2019, jours pourtant chômés'.
L'EARL [G] [U] conteste toute valeur probante aux attestations produites par M. [D] [I] [K] [S] lesquelles ne font mention que d'un temps d'absence de celui-ci du domicile.
Elle produit au soutien de ses explications :
- les rapports d'activité mensuels annexés aux bulletins de salaire, signés par M. [D] [I] [K] [S], qui ne mentionnent aucune heure supplémentaire,
- le décompte horaire produit par M. [D] [I] [K] [S] au soutien de sa demande initiale de paiement d'heures supplémentaires en septembre 2019,
- une attestation de M. [O] [B] [W] qui se présente comme ouvrier agricole ayant travaillé pour l'EARL [G] [U] du 19 novembre 2018 au 18 mars 2019 et indique ' toutes les heures effectuées pendant ma période de travail ont été entièrement payées sur mon bulletin de salaire. Je n'ai jamais entendu Mr [K] se plaindre d'heures non rémunérées ou supplémentaires. Quand Mr [K] a eu ses problèmes de famille, je sais que la SCI Les Rizières ne l'a pas embêté pour le paiement de ses loyers en retard car il m'en a parlé'.
Enfin, elle fait valoir que contrairement à ce que soutient désormais M. [D] [I] [K] [S], celui-ci s'exprime correctement en français, langue qu'il comprend et renvoie notamment au compte rendu d'entretien préalable établi par son conseiller qui reprend les propos qu'il a tenus en fin d'entretien, en français.
Force est de constater que M. [D] [I] [K] [S] qui ne produit aucun décompte comportant ses horaires de travail, mais uniquement des temps de travail qui correspondent tous à des heures entières ou des heures et demi de travail, n'apporte aucune explication quant aux différences importantes de volume entre les heures revendiquées en septembre 2019 et celles dont il se prévaut désormais, soit près de 200 heures de différence uniquement sur l'année 2018.
Par ailleurs, la comparaison entre le décompte produit par M. [D] [I] [K] [S] et l'attestation de Mme [H] fait apparaître des contradictions puisque si cette dernière fait état de journées de travail de 12 heures, le décompte produit mentionne des journées comprises en 4 et 9h30 de travail, notamment le 6 janvier '6:00", le 12 janvier ' 5:00", le 19 janvier ' 4:00".
Concernant la pression dont il se dit victime au moment de la signature de chaque décompte horaire, outre qu'elle résulte de ses seules affirmations, elle est également en contradiction avec la formulation des avertissements qu'il dénonce, dans lesquels il est indiqué par l'EARL [G] [U] qu'elle informe la FDSEA qui établit les bulletins de salaire du refus de signature, soit une absence de concomitance entre la signature du relevé et l'établissement du bulletin de salaire.
Enfin, alors que M. [D] [I] [K] [S] n'a pas signé à deux reprises ces relevés horaires, il ne soutient pas ne pas avoir reçu en représailles le paiement de son salaire.
Par suite, les éléments produits par M. [D] [I] [K] [S] ne permettent pas de remettre en cause les décomptes de temps de travail produits par l'EARL [G] [U] et celui-ci a justement été débouté de sa demande de paiement d'heures supplémentaires par le premier juge.
* demande d'annulation des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020
Par application des dispositions de l'article L1333-1 du code du travail , en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En application de l'article L.1333-2 du code du travail, le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Le conseil de prud'hommes, juge du contrat de travail, saisi de la contestation sur le bien-fondé d'une sanction disciplinaire, peut l'annuler si elle apparaît irrégulière dans la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Saisi d'une demande en annulation de la sanction disciplinaire, le juge a l'obligation d'apprécier si les faits reprochés au salarié étaient de nature à la justifier. Le juge doit ainsi vérifier l'existence des faits invoqués par l'employeur. Celui-ci doit fournir les éléments retenus pour prendre la sanction. Il doit donc se prononcer sur la réalité des faits.
- s'agissant de l'avertissement en date du 15 octobre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « En début d'après-midi, un de vos collègues de travail vous a attendu de 13h55 à 14h10 afin de vous remettre matériel nécessaire afin d'accomplir les tâches affectées pour l'après-midi. Ce dernier m'a informée de votre absence. Je me suis rendue immédiatement sur les lieux et vous et ai trouvé à votre véhicule à 14h17. Vous comprendrez bien que vous désorganisez le travail de l'entreprise, ayant fait perdre du temps à votre collègue et les tâches vous étant confiées n'ayant pas pu être effectuées.
Ceci faisant subir des conséquences financières à l'entreprise et une surcharge de travail à vos collègues.
Vous m'avez envoyé un SMS à 17h55 relatant votre journée de ce jour. Ce n'est pas ce que j'ai pu constater en me rendant sur les lieux. Je vous prie de ne pas mentir sur vos agissements.
(')
Vous m'avez demandé par SMS le vendredi 4 octobre 2019 à 17h42 faire une journée continue le lundi 7 octobre 2019 afin de terminer plus tôt votre travail suite à un rendez- vous ce même jour. Une journée continue sans pause n'étant pas légale, je vous ai répondu de poser une journée ou une demi-journée de congé et de me préciser votre volonté pour la bonne marche de l'entreprise.
Vous avez pris un congé anticipé le 7 octobre 2019, sans m'en informer par écrit comme vous y êtes obligé. Je vous rappelle que toute demande de congé anticipé doit faire l'objet d'une demande par écrit à l'avance et doit être validée par mes soins.
Comprenez que vos attitudes causent de graves préjudices financiers et d'organisation à mon entreprise et que vos collègues doivent supporter une charge de travail. »
Pour établir la réalité de ce grief, contesté par M. [D] [I] [K] [S], l'EARL [G] [U] se réfère au contrat de travail qui mentionne :
- à l'article intitulé « durée du travail » : « Monsieur [K] [S] effectuera 35 heures par semaine, soit 151,67 heures. Monsieur [K] [S] s'engage à respecter les horaires de travail qui lui seront communiqués. »,
- à l'article intitulé « obligations professionnelles » : « Monsieur [K] [S] s'engage pendant la durée de son contrat à respecter les instructions et à consacrer professionnellement toute son activité ou ses soins à l'entreprise.
Il sera responsable de la bonne exécution de son travail et devra dans tous les cas rendre des comptes de son travail à son supérieur hiérarchique.
En cas d'absence, Monsieur [K] [S] devra produire un justificatif dans les 48 heures. (') »,
- à l'article intitulé « congés payés » : « Monsieur [K] [S] bénéficiera de 2,5 jours ouvrables par mois de congés payés conformément aux dispositions de l'article L.3141-3 du Code du travail.
La période de ces congés sera déterminée en accord avec l'employeur compte tenu des nécessités de l'exploitation.',
et à l'article 24 de la convention collective des ouvriers des exploitations agricoles du Gard qui dispose que ' Les absences résultant de la maladie doivent, sauf cas de force majeure, faire l'objet d'une information dans les plus brefs délais à l'employeur. Cet avis est confirmé, dans un délai maximum de trois jours ouvrables par un certificat médical délivré par le médecin traitant de l'intéressé. Les mêmes règles s'appliquent pour les avis de prolongation d'arrêt de travail pour maladie. (') »
Elle renvoie aux relevés horaires qui mentionnent ces horaires litigieux et observe que M. [D] [I] [K] [S] n'a jamais contesté cet avertissement au moment de sa notification ou lors de l'entretien préalable.
Pour autant, force est de constater que l'EARL [G] [U] ne produit aucun élément qui permette d'objectiver ce grief, le relevé horaire n'ayant pas été contresigné par le salarié.
Par suite, l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité du grief fondant l'avertissement qui sera par suite annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 19 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le 13 novembre vous avez quitté votre poste à 16h30.
Je vous rappelle encore une fois vos horaires de travail : 8h00-12h00 et 14h00-17h00.
Depuis, vous ne m'avez fourni aucun justificatif pour cet abandon de poste.
Votre attitude répétée désorganise le bon déroulement de l'entreprise et votre insubordination au respect des horaires m'oblige à vous signifier un avertissement pour abandon de poste. (')»
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 29 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le mercredi 20 novembre, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail.
Je vous rappelle encore une fois vos horaires de travail : 8h00-12h00 et 14h00-17h00.
Vous m'avez envoyé un SMS me disant être absent la matinée du 20 et ce sans motif, mais vous ne vous êtes pas présenté de toute la journée. Je vous rappelle encore une fois que vous n'avez plus de congés payés et que, si vous désirez prendre des congés anticipés, vous devez en faire la demande par écrit.
Votre attitude répétée désorganise le bon déroulement de l'entreprise et votre insubordination au respect des horaires m'oblige à vous signifier un avertissement pour non présentation à votre poste de travail. (') »
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 9 janvier 2020
Cet avertissement est ainsi formulé : « Depuis maintenant mi-novembre, vous avez commencé la taille de la vigne. Dans un premier temps seul, puis avec des saisonniers. À mon grand étonnement vous ne respectez pas les cadences et êtes toujours en retard par rapport à vos collègues. Malgré mes différentes remarques vous n'en avez pas tenu compte et persistez dans votre raisonnement. Je ne comprends pas un tel agissement. (') »
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 19 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le vendredi 29 novembre je vous ai demandé comme chaque fin de mois de venir au bureau afin de signer votre rapport d'activité comme vous le faites depuis le début de votre contrat de travail.
A mon grand étonnement, vous n'avez pas voulu le signer, me prétextant que votre conseil vous a dit de ne pas le faire ceci n'étant pas obligatoire.
Je prends note de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard, organisme établissant les bulletins de salaire.'
Cet avertissement qui ne se fonde pas sur un motif disciplinaire mais marque uniquement un désaccord entre le salarié et l'employeur sur le décompte de son temps de travail a justement été annulé par le premier juge.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
- s'agissant de l'avertissement en date du 7 janvier 2020 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Une fois encore vous n'avez pas voulu signer votre rapport d'activité, et ce pour la deuxième fois.
Je prends note encore une fois de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard organisme établissant les bulletins de salaire.'
Cet avertissement qui ne se fonde pas sur un motif disciplinaire mais marque uniquement un désaccord entre le salarié et l'employeur sur le décompte de son temps de travail a justement été annulé par le premier juge.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
En réparation du préjudice moral résultant de la notification injustifiée de ces avertissements, M. [D] [I] [K] [S] sollicite la somme de 1.500 euros de dommages et intérêts par avertissement annulé.
Il fait valoir qu'il a vu son état de santé se dégradé en raison de ses conditions de travail délétère et invoque son arrêt de travail du 18 octobre 2019 au 1er novembre 2019.
Force est de constater que seul le premier avertissement est concomitant de l'arrêt de travail, sans qu'il soit toutefois établi de lien entre celui-ci et la pathologie fondant l'arrêt de travail en dehors des seules affirmations de M. [D] [I] [K] [S].
Pour autant, la notification d'un avertissement infondé, soit une sanction disciplinaire, est en soit constitutif d'un préjudice moral, qui sera justement réparé par une somme de 100 euros par avertissement annulé.
* Sur l'existence d'un travail dissimulé
La dissimulation d'emploi salarié prévue par le dernier alinéa de l'article L. 8221-5 du code du travail n'est caractérisée que si l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Pour allouer au salarié cette indemnité pour travail dissimulé, les juges du fond doivent rechercher le caractère intentionnel de la dissimulation. Mais ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.
L'élément moral de l'infraction peut résulter de ce que l'employeur n'a pu ignorer l'amplitude du travail des salariés en raison des moyens de contrôle du temps de travail existant dans l'entreprise.
Au soutien de sa demande de 9.800 euros de dommages et intérêts, M. [D] [I] [K] [S] explique qu'il a bénéficié d'un accord mis en place frauduleusement par l'EARL [G] [U] aux termes duquel à compter de la signature de son contrat de travail à durée indéterminée, il a bénéficié d'un avantage en nature non déclaré socialement et fiscalement consistant en la mise à disposition de son logement à titre gratuit et qu'en contrepartie, il n'était pas payé des multiples heures supplémentaires qu'il effectuait.
Pour justifier de la réalité de cet accord non formalisé qu'il invoque, M. [D] [I] [K] [S] observe que son bailleurs, la SCI Les Rizières, détenue à 49% par Mme [U], son employeur via L'EARL [G] [U] , et à 51% par le conjoint de celle-ci, ne lui a demandé de payer un arriéré de loyers de trois années qu'à partir du moment où il a sollicité de son employeur le paiement de ses heures supplémentaires.
Il en déduit l'existence d'une communauté d'intérêt entre les deux sociétés, et une volonté de dissimulation de ses heures supplémentaires caractérisant un travail dissimulé.
L'EARL [G] [U] conteste tout accord en ce sens et rappelle que M. [D] [I] [K] [S] était locataire de son logement depuis 2012 et qu'il a réglé ses loyers jusqu'en septembre 2016, soit postérieurement à la conclusion de son contrat de travail à durée indéterminée.
Elle explique que celui-ci a rencontré des difficultés à régler ses loyers concomitamment à ses problèmes familiaux et que cela est sans lien avec un quelconque avantage en nature.
Elle observe à juste titre que les deux entités présentent des personnalités morales distinctes et qu'aucun accord de quelque nature que ce soit n'a été formalisé.
L'EARL [G] [U] observe que le bail liant M. [D] [I] [K] [S] à la SCI Les Rizières n'a jamais été remis en cause par celui-ci avant l'instance judiciaire et se prévaut du courrier de son salarié daté du 11 septembre 2019 dans lequel ce dernier confirme que le logement est couvert par une assurance et après avoir sollicité le paiement de ses heures supplémentaires indique ' je vous remercie de ne pas confondre la relation du contrat de travail avec celui de l'habitat' .
Enfin, elle rappelle que par arrêt définitif de la cour d'appel de Nîmes, M. [D] [I] [K] [S] a été condamné au paiement à la SCI Les Rizières notamment de l'arriéré de loyers et qu'à l'occasion d'un contrôle dont elle a été l'objet en présence de l'appelant, aucune situation de travail dissimulé n'a été retenue à son encontre.
De fait, la réalité de l'accord dont se prévaut M. [D] [I] [K] [S] ne ressort que de ses seules affirmations qui sont contredites par les éléments factuels et chronologiques développés par l'EARL [G] [U] .
Par ailleurs, la réalité des heures supplémentaires dont M. [D] [I] [K] [S] se prévaut et qui serait l'explication de l'absence de mise en recouvrement des loyers n'est pas établie.
Par suite, aucune situation de travail dissimulé n'est caractérisée et M. [D] [I] [K] [S] a justement été débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef par le premier juge dont la décision sera confirmée sur ce point.
* sur le maintien du salaire pendant l'arrêt de travail
L'article L 1226-1 du code du travail dispose que 'Tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, à condition :
1° D'avoir justifié dans les quarante-huit heures de cette incapacité, sauf si le salarié fait partie des personnes mentionnées à l'article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ;
2° D'être pris en charge par la sécurité sociale ;
3° D'être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres Etats partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.
Un décret en Conseil d'Etat détermine les formes et conditions de la contre-visite mentionnée au premier alinéa.
Le taux, les délais et les modalités de calcul de l'indemnité complémentaire sont déterminés par voie réglementaire'.
L'article D 1226-1 du code du travail précise que 'l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 est calculée selon les modalités suivantes :
1° Pendant les trente premiers jours,90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;
2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération'
Au visa de ces deux textes, M. [D] [I] [K] [S] sollicite la somme de ' 362,75625 euros bruts outre 36.27 euros bruts de congés payés afférents, ce qui correspond à un maintien de salaire de 50 % sur la période de 15 jours. (Les indemnités journalières de la sécurité sociale couvrent environ 50 % du gain journalier net )'.
Ceci étant, la cour ne peut que constater, comme le premier juge, que M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas du montant des indemnités journalières perçues lors de son arrêt de travail, préalable nécessaire au constat de ce qui pourrait le cas échéant être mis à la charge de l'employeur.
La décision déférée ayant débouté M. [D] [I] [K] [S] de cette demande sera confirmée sur ce point.
* harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l'article L. 1154-1 du Code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du Code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
Au soutien de sa demande de 8.000 euros de dommages et intérêts, M. [D] [I] [K] [S] fait valoir que ' Mme [U] s'est livrée à un véritable harcèlement moral lorsque M. [K] a osé demander le paiement d'heures supplémentaires caractérisé par les faits suivants :
- Isolement dans son travail des autres ouvriers agricoles
- fin de la pratique des heures supplémentaires dissimulées et mise en oeuvre d'une procédure d'expulsion au nom de la SCI LES RIZIÈRES pour non-paiement des loyers, remettant ainsi en cause l'accord convenu,
- Multiplication des courriers disciplinaires en deux mois infondés : 6 en deux mois avant d'initier une semaine plus tard une procédure pour faute grave avec mise à pied à titre conservatoire', et impute à cette situation une dégradation de son état de santé ayant conduit à son placement en arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019.
Il produit aux débats :
- le compte rendu d'entretien préalable au licenciement rédigé par son conseiller aux termes duquel il reproche en fin d'entretien à son employeur de travailler avec un sécateur manuel depuis deux mois alors que les autres salariés travaillent avec un sécateur électrique, et de devoir se déplacer entre les parcelles sur son scooter alors que les autres salariés se déplacent dans le véhicule de l'entreprise,
- les 6 avertissements détaillés supra,
- son arrêt de travail au titre de l'assurance maladie pour la période du 18 octobre au 1er novembre 2019, mentionnant ' problématique travail'.
Ces éléments pris dans leur ensemble établissent une présomption de harcèlement moral.
L'employeur conteste toute forme de harcèlement moral et fait valoir que ces accusations reposent sur les seules allégations de M. [D] [I] [K] [S], que les avertissements étaient justifiés et qu'il n'a fait l'objet d'aucune différence de traitement par rapport aux autres salariés, et que le seul document médical produit n'établit pas de lien entre le travail et la dégradation de l'état de santé du salarié.
Ceci étant, si les faits d'isolement résultent de la seule affirmation de M. [D] [I] [K] [S], et que le certificat médical est antérieur à 5 des 6 avertissements ; il n'en demeure pas moins que ces avertissements, notifiés sur une période de moins de trois mois, ont été annulés pour absence de justification des griefs par l'employeur dans le cadre de la présente instance.
Par suite, l'employeur n'apporte pas d'explication utile à la multiplication des sanctions disciplinaire envers M. [D] [I] [K] [S] sur une courte période.
Il en résulte que le harcèlement moral dénoncé par M. [D] [I] [K] [S] au soutien de sa demande de dommages et intérêts est caractérisé.
Pour caractériser le préjudice résultant de cette situation de harcèlement moral, M. [D] [I] [K] [S] se réfère uniquement au certificat médical portant arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019 qui mentionne ' problématique au travail'.
Il sera en conséquence justement indemnisé de son préjudice par une somme que la cour arbitre à 500 euros
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
* sur l'existence d'une faute grave
M. [D] [I] [K] [S] a été licencié pour faute grave par courrier en date du 5 février 2020 rédigé dans les termes suivants :
' Monsieur,
Par courrier sous pli recommandé du 17 janvier 2020, nous vous avons convoqué à un entretien préalable fixé au 30 janvier 2020, dans la mesure où nous envisagions de prononcer à votre égard une santion pouvant aller jusqu'à votre licenciement.
Dans l'attente, nous vous avons notifié votre mise à pied à titre conservatoire.
Lors de l'entretien, au cours duquel vous étiez assisté, nous vous avons fait part des raisons nous ayant conduits à envisager votre licenciement pour faute grave.
Face à votre refus de vous expliquer, nous avons décidé de vous licencier.
Ainsi que nous vous l'avons exposé lors de l'entretien, les motifs de ce licenciement pour faute grave sont les suivants :
Vous avez été embauché à compter du 3 juin 2016, en qualité de salarié agricole, tractoriste, coefficient 140 de la convention collective en vigueur, dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein.
Vos horaires de travail qui vous ont été rappelés à plusieurs reprises étaient les suivants : du lundi au vendredi, de 8 heures à midi et de 14 heures à 17 heures.
A ce titre, vous êtes tenu d'exécuter personnellement et consciencieusement le travail prévu au contrat. Vous devez respecter l'organisation générale du travail, notamment en matière d'horaires et de discipline.
Vous avez fourni un travail consciencieux pendant plusieurs années mais votre attitude a radicalement changé à compter du mois de septembre 2019.
En effet, depuis l'année 2012, soit bien avant votre embauche, vous êtes locataire de la SCI LES RIZIÈRES dont mon mari est le gérant.
Or, vous avez cessé le règlement régulier des loyers à partir du mois d'octobre 2016. La SCI vous a réclamé le paiement d'un important arriéré de loyers courant septembre 2019, vous avez en réaction, et pour la première fois, prétendu avoir réalisé des heures supplémentaires qui ne vous auraient pas été payées par notre société depuis la date de votre embauche.
Il vous a été répondu que vous n'aviez réalisé aucunes heures supplémentaires, ce qu'établissent les relevés d'heures que vous avez signé tous les mois depuis votre embauche.
Concernant les loyers impayés, pour lequel vous proposiez une compensation avec les sommes que vous réclamez au titre des heures supplémentaires, nous vous avons rappelé qu'il vous incombait de vous rapprocher de votre bailleresse en cas de difficulté, mais que ces deux questions étaient totalement indépendantes.
A partir de ces échanges, vous n'avez plus travaillé correctement.
Ainsi, nous avons eu à déplorer votre absence injustifiée du 7 octobre 2019, ainsi que votre arrivée tardive à votre poste de travail le 15 octobre 2019. Nous avons été contraints de vous adresser un premier avertissement au titre de ces manquements.
Loin de vous ressaisir, vous avez alors multiplié les actes d'insubordination.
Le 13 novembre 2019, vous avez quitté votre poste de travail avec une demi-heure d'avance, ce qui nous a contraint à vous adresser un second avertissement.
Le 20 novembre 2019, vous ne vous êtes de nouveau pas présenté à votre poste de travail, sans nous en avertir, ce qui là encore justifiait l'envoi d'un troisième avertissement.
A partir du mois de janvier 2020, vous avez fait preuve d'une mauvaise volonté évidente dans l'accomplissement de vos missions, à tel point que vous n'avez pas respecté les cadences de travail, affichant un retard systématique par rapport aux salariés saisonniers, alors que, au regard de votre ancienneté au sein de l'entreprise et de vos compétences acquises, rien ne pouvait le justifier.
Nous avons été contraints de vous adresser un nouvel avertissement, au regard de votre mauvaise volonté avérée à accomplir vos missions et de la déloyauté qui en découle.
A réception de chacun de ces avertissements, vous n'avez pas réagi, sans en contester le bien-fondé.
C'est dans ce cadre que le 17 janvier 2020, vous avez persisté dans votre refus d'exécuter nos consignes.
Alors que nous avions demandé de réaliser une prestation sur le tracteur, vous vous y êtes opposé, déclarant vouloir uniquement tailler la vigne.
Nous vous avons demandé de vous ressaisir, mais vous avez affiché le plus grand mépris pour nos consignes, poursuivant les travaux de taille, sans exécuter la tâche confiée.
Face à ce énième refus, nous n'avons eu d'autre choix que de vous notifier une mise à pied à titre conservatoire et de vous convoquer à un entretien préalable à votre éventuel licenciement.
Nous avons tenté, lors de l'entretien préalable, de comprendre les raisons de votre refus réitéré de respecter nos directives.
Vous avez refusé de vous exprimer et de nous fournir une excuse acceptable à ces actes d'insubordination répétés et dont la fréquence se multiplie et s'aggrave, laissant votre conseiller prendre la parole à votre place.
Pour seule explication, vous nous avez fait savoir par son intermédiaire, que nous ne vouliez plus vous adresser à nous, car vous n'aviez pas obtenu ce que vous demandiez.
Vous comprendrez que ce refus d'échange rend à lui seul impossible la poursuite de notre relation de travail.
De plus, vous ne pouvez subordonner la reprise de votre travail à la satisfaction de revendications que nous estimons infondées. Si vous estimez que malgré nos explications vos droits ont été méconnus, il vous incombe de saisir les instances compétentes, mais vous ne pouvez refuser de fournir le travail pour lequel nous vous rémunérons.
En outre, pour justifier votre insubordination, vous avez fait dire par l'intermédiaire de votre conseiller, qu'en contrepartie des heures supplémentaires réalisées depuis le mois de juin 2016 selon vous, vous auriez bénéficié un 'logement de fonction'.
C'est totalement inexact.
Comme nous vous l'avons exprimé à plusieurs reprises, vous n'avez réalisé aucunes heures supplémentaires impayées, ce que confirment tous les rapports d'activité que vous avez signé tous les mois jusqu'au mois d'octobre 2019 inclus.
Vous ne pouvez non plus prétendre avoir bénéficié d'un 'logement de fonction', alors que vous occupez un logement d'une société tierce, depuis 2012, tandis que vous n'êtes salarié permanent de notre entreprise que depuis juin 2016, de sorte que vous ne pouvez affirmer que ce logement serait la contrepartie d'un travail pour le compte de notre structure.
Je rappelle en effet qu'il n'y a aucun lien juridique entre la SCI dont vous êtes locataire et l'EARL dont vous êtes le salarié, de sorte que cet argument ne peut non plus prospérer.
De même, vous ne sauriez prétendre ne pas comprendre le français ainsi que la teneur des relevés d'heures que vous avez signés sans discussion jusqu'au mois d'octobre 2019 inclus.
En effet, tout au long de la relation de travail, nos échanges écrits et verbaux ont toujours été en français. D'ailleurs, lors de l'entretien préalable, vous vous êtes entretenu régulièrement avec votre conseiller, en français, ce qui démontre votre parfaite connaissance de notre langue.
Nous vous avons encore fait part de notre étonnement, alors que nous avons fait l'objet d'un contrôle inopiné et en notre absence à l'initiative de la MSA, et en présence des forces de l'ordre, au cours duquel aucune anomalie n'a été constatée. Si véritablement vous aviez eu des revendications à formuler, et alors que nous n'étions pas présent lors du contrôle, rien ne vous empêchait d'en faire part aux contrôleurs, ce que vous n'avez pas fait, puisque vous saviez pertinemment qu'aucune heure ne vous est due.
Nous vous rappelons enfin que l'ensemble des travaux qui vous ont été demandés relevaient de vos attributions étaient justifiés.
En définitive, vous avez multiplié les actes d'insubordination après que votre bailleresse vous ait réclamé le paiement de loyers impayés. Vous avez prétexté la réalisation d'heures supplémentaires au sein de l'EARL pour refuser d'accomplir les missions que vous étaient données.
Pourtant, vous n'avez réalisé aucunes heures supplémentaires et votre refus caractérisé d'accomplir vos missions n'est nullement justifié.
Au regard de la multiplication des actes d'insubordination, dans un délai très court, et de l'impossibilité de poursuivre une relation de travail, émaillé par votre refus répété d'accomplir les missions qui vous sont données, ainsi que votre refus de tout dialogue, nous n'avons d'autre choix que de prononcer votre licenciement pour faute grave, votre maintien dans l'entreprise s'avérant impossible, y compris pendant le préavis.
Le licenciement prend donc effet immédiatement sans indemnité de préavis, ni de licenciement et votre contrat de travail s'achève au jour de la présente notification. Vous recevrez par courrier séparé votre solde de tout compte, arrêté au jour de votre mise à pied à titre conservatoire, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi.
Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.
Nous vous informons par ailleurs qu nous vous dispensons de toute éventuelle obligation de non concurrence quelle qu'en soit le support.
Vous pourrez donc exercer librement votre activité et nous serons dispensés du paiement de toute indemnité de non concurrence.
Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les 15 jours de sa notification (....)
Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article L 911-8 du code de la sécurité sociale, sous réserve d'en remplir les conditions, vous pourrez bénéficier (...)
Veuillez agréer, Monsieur, nos salutations distinguées'.
S'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs formulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en rapporter la preuve.
La faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits allégués dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire.
La gravité du manquement retenu est appréciée au regard du contexte, de la nature et du caractère éventuellement répété des agissements, des fonctions exercées par le salarié dans l'entreprise, un niveau de responsabilité important étant le plus souvent un facteur aggravant, de son ancienneté, d'éventuels manquements antérieurs et des conséquences de ces agissements en résultant pour l'employeur.
La faute grave libère l'employeur des obligations attachées au préavis. Elle ne fait pas perdre au salarié le droit aux éléments de rémunération acquis antérieurement à la rupture du contrat, même s'ils ne sont exigibles que postérieurement.
Si l'article L1332-4 du code du travail prévoit en principe qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance, en revanche ce texte ne s'oppose à pas à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai.
Le licenciement prononcé en raison de la faute disciplinaire du salarié doit donc respecter un délai maximum de deux mois entre la connaissance des faits et l'engagement de la procédure disciplinaire et un délai maximum d'un mois entre l'entretien préalable et la notification de la sanction, à défaut, le licenciement est irrégulier.
Il résulte de la lettre de licenciement du 5 février 2020 que l'EARL [G] [U] reproche à M. [D] [I] [K] [S] de ne pas avoir respecté ses ordres dans le cadre d'une mission qui lui était demandée, soit d'avoir poursuivi la taille de la vigne au lieu d'effectuer une tâche avec le tracteur, ce refus s'inscrivant dans la continuité des faits d'insubordination visés aux avertissements notifiés depuis le 15 octobre 2019.
Pour établir la réalité de ce grief, l'EARL [G] [U] se réfère aux avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] et à l'entretien préalable au cours duquel le salarié a justifié son comportement par le refus de lui payer ses heures supplémentaires.
Elle rappelle que devant le premier juge, M. [D] [I] [K] [S] avait justifié en vain son refus par le fait qu'il n'était pas titulaire du permis de conduire, ce qui a justement été écarté puisque la conduite d'un tracteur sur une exploitation agricole n'est pas subordonné à sa détention.
M. [D] [I] [K] [S] conteste désormais le refus de conduire le tracteur qui lui est reproché, et observe que la matérialité de celui-ci n'est pas rapportée par l'EARL [G] [U] . Il considère par ailleurs que la sanction est disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés ce qui justifierait également la requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Force est de constater que l'EARL [G] [U] ne produit aucun élément en dehors de ses propres affirmations pour caractériser le refus de conduire le tracteur opposé à M. [D] [I] [K] [S].
Au surplus, ensuite de l'annulation des avertissements notifiés entre octobre 2019 et janvier 2020, la réitération de faits d'insubordination visée à la lettre de licenciement n'est pas caractérisée.
En conséquence, l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité du grief fondant la faute grave visée à la lettre de licenciement et le licenciement notifié à M. [D] [I] [K] [S] par courrier en date du 5 février 2020 doit être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
Sur les conséquences indemnitaires du licenciement sans cause réelle et sérieuse
Il sera observé que M. [D] [I] [K] [S] ne présente pas de demande au dispositif de ses écritures au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire
La demande de M. [D] [I] [K] [S] d'une somme de 1.012,38 euros , outre 101,23 euros pour les congés payés y afférents n'est pas contestée à titre subsidiaire par l'EARL [G] [U] et il sera fait droit à la demande
- rappel de salaire sur la période de préavis
La demande de M. [D] [I] [K] [S] d'une somme de 3266,98 euros de rappel de salaires pour les deux mois correspondant à la durée du préavis outre 326,69 euros de congés payés afférents sur préavis n'est pas contestée à titre subsidiaire par l'EARL [G] [U] et il sera fait droit à la demande.
- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Par application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail, M. [D] [I] [K] [S] qui présentait à la date de son licenciement une ancienneté de 4 années complètes dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés peut prétendre à une indemnité comprise entre 1 et 5 mois de salaire.
Au soutien de sa demande de 9.800 euros d'indemnité, correspondant à 6 mois de salaire, M. [D] [I] [K] [S] n'apporte aucun élément relatif à sa situation personnelle et professionnelle actuelle.
Compte tenu de son âge et de son ancienneté à la date de son licenciement et de l'absence d'élément de situation soumis à l'appréciation de la cour, il lui sera alloué la somme de 1.700 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 27 février 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'annulation des avertissements en date des 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019 et 09 janvier 2020, de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral subséquent, et de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Infirme le jugement de départage rendu le 6 mai 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,
Annule les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] par l'EARL [G] [U] par courriers en date des 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019 et 09 janvier 2020,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 100 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral ensuite de l'annulation de chacun des 6 avertissements, soit la somme totale de 600 euros,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 500 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Requalifie le licenciement pour faute grave notifié par l'EARL [G] [U] à M. [D] [I] [K] [S] par courrier en date du 5 février 2020 pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] les sommes de :
- 1.012,38 euros de rappel de salaire sur la période de mise à pied à titre conservatoire, outre 101,23 euros pour les congés payés y afférents,
- 3266,98 euros de rappel de salaires pour la durée du préavis outre 326,69 euros de congés payés afférents
- 1.700 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne l'EARL [G] [U] aux dépens de première instance et de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/01066 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JENF
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
27 février 2024
RG :23/238
[K] [S]
C/
E.A.R.L. [U] [G]
Grosse délivrée le 22 SEPTEMBRE 2025 à :
- Me BENAMARA
- Me NOGAREDE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 27 Février 2024, N°23/238
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Septembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [D] [I] [K] [S]
né le 03 Septembre 1969 à [Localité 5] ' BARCELOS- PORTUGAL
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Mathilde BENAMARA, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
E.A.R.L. [U] [G]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Guilhem NOGAREDE de la SELARL GN AVOCATS, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [D] [I] [K] [S] a été employé par l'Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL) [G] [U] en qualité d'ouvrier agricole, à compter du 15 décembre 2014 au 13 mai 2015 puis du 9 novembre 2015 au 31 mai 2016 suivant contrat à durée déterminée respectivement à temps partiel puis à temps complet. À compter du 3 juin 2016, il était embauché pour le même poste suivant contrat de travail à durée indéterminée, à temps plein, niveau 3, échelon 1, coefficient 140. Au dernier état de la relation contractuelle, son salaire mensuel s'élevait à la somme de 1633,49 euros bruts pour 151,67 heures de travail.
Le contrat de travail est soumis à la convention collective nationale des Ouvriers et Employés des Exploitations Agricoles du Gard du 1er avril 2003 (IDCC 9301).
En parallèle, le salarié était locataire de l'époux de l'employeur depuis le 13 janvier 2012 puis de la SCI Les Rizières, dont l'employeur devint associé, dès janvier 2015 par cession de bail.
Le 11 septembre 2019, M. [D] [I] [K] [S] a transmis en main propre à l'employeur un décompte d'heure supplémentaires à payer, demande réitérée par courrier.
Les 15 octobre, 19 novembre, 29 novembre, 4 décembre 2019 et les 7 et 9 janvier 2020, M. [D] [I] [K] [S] se voyait notifier des avertissements.
Du 18 octobre 2019 au 1er novembre 2019, le salarié a été placé en arrêt de travail pour 'problématique au travail'.
Le 17 janvier 2020, l'EARL [G] [U] notifiait à M. [D] [I] [K] [S] une convocation pour un entretien préalable à un éventuel licenciement assorti d'une mise à pied conservatoire.
Par courrier du 5 février 2020, l'EARL [G] [U] notifiait à M. [D] [I] [K] [S] son licenciement pour faute grave.
Par requête en date du 4 mai 2020, M. [D] [I] [K] [S] a saisi le conseil de prud'hommes d'Alès aux fins de voir son licenciement requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et son employeur condamné à lui verser diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement en date du 27 février 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- dit que les avertissements du 04/12/2019 et du 07/01/2020 sont injustifiés, le conseil les annule,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes au titre du préjudice moral,
- débouté [D] [I] [K] [S] sur ses demandes :
- d'heures supplémentaires et congés payés si afférents,
- de travail dissimulé,
- de rectification des bulletins de salaires,
- de rappel de salaire sur maintien de salaire pendant la maladie et congés payés y afférents,
- sur le harcèlement moral,
- débouté les deux parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'EARL [G] [U] de ses autres demandes,
- renvoyé au juge départiteur les demandes relatives à la mise à pied conservatoire, au préavis et ses congés payés si afférents ainsi que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par acte du 22 mars 2024, M. [D] [I] [K] [S] a régulièrement interjeté appel de la décision, la procédure étant enregistrée sous le numéro RG 24 01066
Par jugement de départage en date du 6 mai 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné M. [D] [I] [K] [S] aux dépens.
Par acte du 05 juin 2024, M. [D] [I] [K] [S] a régulièrement interjeté appel de la décision, la procédure étant enregistrée sous le numéro RG 24 011913.
Par ordonnance de jonction en date du 13 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures n° RG 24/01913 et 24/01066 et dit que la procédure se poursuivra sous le n° 24/01066.
Par ordonnance en date du 6 février 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 25 avril 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 27 mai 2025.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 15 avril 2025, M. [D] [I] [K] [S] demande à la cour de :
- recevoir ses deux appels,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, rg 23/238 en ce qu'il a :
- dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral inhérent au caractère injustifié des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires sur maintien de salaires pendant la maladie et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande de rectification des bulletins de salaires,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du 6 mai 2024, rg 23/238 en ce qu'il a :
- jugé le licenciement pour faute grave de M. [D] [I] [K] [S] bien fondé,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel de salaires au titre du préavis et congés payés afférents, rappel d'indemnité de licenciement et rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire et congés payés afférents,
- débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
Statuant à nouveau,
- déclarer qu'au cours de la relation contractuelle l'EARL [G] [U] est venue aux droits de Mme [G] [U],
1/ sur les heures supplémentaires, l'avantage en nature et le travail dissimulé,
- constater une communauté d'intérêt entre la SCI les rizières et l'EARL [G] [U]
- constater que tenant l'attribution d'un logement à son profit dont le paiement n'a jamais été exigé pendant toute la durée du contrat de travail à durée indéterminée, un avantage en nature logement doit être caractérisé, qui aurait dû être valorisé sur les fiches de paie du salarié,
- constater une situation de travail dissimulé imputable à l'EARL [G] [U],
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 9800 euros d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer :
* la somme de 16.101,12388 euros bruts de rappel de salaires à titre d'heures supplémentaires sur la période janvier 2017 au 31 juillet 2019,
* 1610,11 euros bruts de rappel de salaires au titre des congés payés afférents,
- condamner l'EARL [G] [U] à rectifier ses bulletins de salaire sur la période de janvier 2017 à février 2020 pour tenir compte du montant des heures supplémentaires à réintégrer et de l'avantage en nature logement,
2/ sur la demande au titre du le maintien de salaire pendant la maladie, les sanctions disciplinaires injustifiées et le harcèlement moral,
- condamner l'EARL [G] [U] au paiement d'un complément employeur pendant son arrêt de travail de 362,75625 euros bruts outre 36.27 euros bruts de congés payés afférents sur la période du 18 octobre 2019 faut 1er novembre 2019,
- dire et juger non justifiés les 6 avertissements notifiés les 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019, 4 décembre 2019, 7 janvier 2020, 9 janvier 2020,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer les sommes de :
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 15 octobre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 19 novembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 29 novembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 4 décembre 2019,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du7 janvier 2020,
* 1500 euros pour le préjudice moral du fait de l'avertissement non justifié en date du 9 janvier 2020,
- dire et juger qu'il a été victime d'harcèlement moral
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
4/ sur le licenciement pour faute grave,
- dire et juger le licenciement pour faute grave notifié le 5 février 2020 dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- par conséquent, condamner l'EARL [G] [U] à lui payer les sommes suivantes:
* 1012,38 euros bruts de rappel de salaires au titre de la mise à pied conservatoire sur la période du 18 janvier au 5 février 2020,
* 101.23 euros bruts de congés payés afférents,
* 3266,98 euros bruts de rappel de salaires pour préavis (2 mois),
* 326,69 euros bruts de congés payés afférents sur préavis,
* 9800 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner l'EARL [G] [U] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens du procès.
Au soutien de ses demandes, M. [D] [I] [K] [S] fait valoir que :
- à compter de son embauche en contrat de travail à durée indéterminée en juin 2016, le logement lui a été mis à disposition gracieusement, et M. [U] ne lui a plus demandé le paiement du loyer pour l'appartement qu'il occupait depuis 2012 ; et ce jusqu'à ce que lui-même demande le paiement de ses heures supplémentaires en novembre 2019,
- s'il a été débouté à hauteur d'appel dans le cadre du contentieux civil l'opposant à son bailleur, cela n'empêche pas la chambre sociale de statuer sur la réalité de la situation,
- les deux situations sont intrinsèquement liées puisque la SCI bailleur est détenu à 49% par Mme [U] qui est son employeur par l'EARL qu'elle détient,
- Mme [G] [U] a imaginé un système totalement illégal consistant à ne pas payer les heures supplémentaires accomplies par le salarié à sa demande et connaissance, lui mettre à disposition un logement sur le domaine (par l'habillage d'une communauté d'intérêt qui est la SCI Les Rizières) sans déclarer un quelconque avantage en nature et habiller le tout par un bail, sans demander le paiement des loyers depuis a minima son recrutement en CDI le 3 janvier 2016, cette situation caractérisant une situation de travail dissimulé dont il est fondé à demander réparation,
- s'il a effectivement signé les relevés horaires mensuels établis par l'EARL [G] [U] c'est en raison du rapport de force mis en place, sa paie ne lui étant remise qu'après signature de ces rapports,
- il a d'ailleurs fait l'objet de deux avertissements lorsqu'il a refusé de signer ces relevés horaires,
- il justifie de la réalité de ses heures de travail par les décomptes qu'il produit, et qui sont confirmés par les attestations versées aux débats décrivant son amplitude horaire,
- il justifie également que le maintien de son salaire auquel il pouvait prétendre pendant son arrêt de travail n'a pas été assuré par l'EARL [G] [U] ,
- alors que son comportement n'avait donné lieu à aucune remarque jusqu'en octobre 2019, il va faire l'objet d'un acharnement de son employeur à partir du moment où il va demander le respect de ses droits, et se verra notifier pas moins de 6 avertissements entre le 15 octobre 2019 et le 9 janvier 2020 avant de se voir notifier une mise à pied conservatoire puis un licenciement pour faute grave pour prétendument avoir refusé d'effectuer une prestation sur un tracteur,
- l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve des griefs fondant les quatre premiers avertissements, les deux derniers étant dénués de tout fondement faute de viser des faits relevant de la discipline,
- Mme [U] va ainsi se livrer à un véritable harcèlement moral à son encontre, l'isolant des autres salariés, remettant en cause l'accord convenu en mettant en oeuvre la procédure d'expulsion et en multipliant les procédures disciplinaires, cette attitude entraînant la dégradation de son état de santé et son placement en arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019 pour ' problématique au travail',
- l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve de la faute grave qu'il lui reproche, le juge départiteur l'ayant cru sur parole et faisant fi des règles de preuve,
- au surplus, la sanction est disproportionnée par rapport aux faits qui lui sont reprochés, ce qui suffit à caractériser l'absence de cause réelle et sérieuse,
- par suite, ses demandes indemnitaires sont fondées.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimé en date du 24 avril 2025, l'EARL [G] [U] demande à la cour de :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a dit que les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] en date du 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019 et 09/01/2020 sont justifiés,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a annulé les avertissements des 4/12/2019 et 7/01/2020,
- débouter M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'annulation des avertissements des 4/12/2019 et 7/01/2020,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts en réparation de son prétendu préjudice moral inhérent au caractère prétendument injustifié des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024,RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation partiaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de rappel de salaires sur maintien de salaires pendant la maladie et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation paritaire du 27 février 2024,RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande de rectification des bulletins de salaires,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, section agriculture, formation paritaire du 27 février 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a jugé le licenciement pour faute grave de M. [D] [I] [K] [S] bien fondé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel de salaires au titre du préavis et congés payés afférents, rappel d'indemnité de licenciement et rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire et congés payés afférents,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes, formation départage du
6 mai 2024, RG 23/238 en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'article 700 cpc,
- débouter M. [D] [I] [K] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- le condamner à 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi
qu'aux entiers dépens,
A titre subsidiaire,
- ramener à de plus justes proportions le montant des condamnations sollicitées.
Au soutien de ses demandes, l'EARL [G] [U] fait valoir que :
- le décompte d'heures supplémentaires produit par M. [D] [I] [K] [S] dans le cadre de la présente instance, plus de deux ans après la saisine du conseil de prud'hommes, outre qu'il présente des incohérences et des erreurs quant aux périodes de congés en comparaison avec les bulletins de salaire, est différent de celui qui avait été adressé en septembre 2019 au soutien de la demande de paiement d'heures supplémentaires,
- les attestations dont il se prévaut ne font état que d'une amplitude horaire quant à son absence de son domicile et ne saurait attester de la réalité de son temps de travail,
- contrairement à ce que soutient M. [D] [I] [K] [S], il comprend parfaitement le français, a toujours compris les consignes qui lui étaient données, et a su répondre à Mme [U] lors de l'entretien préalable,
- aucun travail dissimulé ne peut lui être reproché, l'avantage en nature dont se prévaut M. [D] [I] [K] [S] n'étant pas établi, et celui-ci ne peut prétendre que l'EARL [G] [U] et la SCI Les Rizières auraient une communauté d'intérêts, de sorte qu'il pourrait être fait abstraction des règles de droit les plus élémentaires,
- les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] constituent des manquements à ses obligations contractuelles, sont établis par les relevés horaires et sont en outre concomitants du litige relatif au paiement des loyers et au refus de jours de congés payés du 9 décembre 2019,
- M. [D] [I] [K] [S] a d'ailleurs expliqué lors de l'entretien préalable le comportement qui lui était ainsi reproché par le litige relatif aux heures supplémentaires,
- M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas de la réalité du préjudice fondant ses demandes de dommages et intérêts,
- M. [D] [I] [K] [S] ne produit pas le relevé des indemnités journalières qu'il a perçues pendant son arrêt de travail, ce qui ne permet pas d'apprécier le bien fondé de sa demande au titre du maintien de son salaire pendant son arrêt de travail,
- le harcèlement moral dont M. [D] [I] [K] [S] se prévaut ne repose que sur ses seules allégations et il a justement été débouté de sa demande de dommages et intérêts en première instance,
- M. [D] [I] [K] [S] n'a jamais contesté le comportement caractérisant la faute grave, et a tenté de le justifier lors de l'entretien préalable en exposant qu'il ne reprendrait le travail qu'une fois que l'employeur aurait cédé à son chantage,
- à perte de procès, M. [D] [I] [K] [S] prétend que son refus de conduire le tracteur serait justifié, puisqu'il n'était pas titulaire du permis de conduire mais comme l'a justement relevé le premier juge, par dérogation à l'obligation légale, en application de l'article R.221-20 du Code de la Route, les conducteurs des véhicules et appareils agricoles ou forestiers attachés à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou à une coopérative d'utilisation de matériel agricole ne sont pas tenus d'être titulaire du permis de conduire pour conduire un tracteur sur l'exploitation agricole,
- par suite, le refus opposé par M. [D] [I] [K] [S] n'était pas légitime et caractérisait un nouvel acte d'insubordination, qui justifiait sa mise à pied conservatoire et par suite son licenciement pour faute grave au regard de son passé disciplinaire, et de l'incidence de son comportement sur le fonctionnement de l'exploitation dont il était le seul salarié permanent,
- subsidiairement, M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas de son préjudice et ne peut prétendre qu'au montant minimal de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
* rappel de salaire en raison d'heures supplémentaires
Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l'article 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties; il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l'opposition à l'exécution de celle-ci de l'employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires à raison de l'accord tacite de l'employeur. Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l'employeur de la réalisation d'heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l'absence d'opposition de l'employeur à la réalisation de ces heures.
En l'espèce, M. [D] [I] [K] [S] soutient que l'EARL [G] [U] lui est redevable d'une somme de 16.101,12388 euros correspondant aux heures supplémentaires effectuées entre janvier 2017 et juillet 2019, outre 1.610,11 euros de congés payés y afférents.
M. [D] [I] [K] [S] explique qu'il a signé les décomptes horaires mensuels sous la contrainte, ne recevant son salaire et sa fiche de paie qu'en contrepartie de cette signature. Il précise que la réalité de cette contrainte est démontrée par les deux avertissements dont il a fait l'objet précisément pour avoir refusé de signer ces décomptes.
Il produit à l'appui de ses prétentions :
- un tableau de synthèse mensuelle de son temps de travail avec les heures payées et les heures effectuées,
- des 'feuille d'heure mois de' mensuelles à compter de janvier 2017, mentionnant par jour travaillé une durée de travail, sans précision d'horaire,
- un décompte manuel identique au tableau précédent,
- une attestation de Mme [X] [Y], qui se présente comme 'belle-soeur' et indique qu'à l'occasion de séjours chez M. [D] [I] [K] [S] elle a constaté qu'il travaillait de ' 7h du matin à 18h le soir', sans précision de date,
- une attestation de Mme [L] [H], qui se présente comme tante de la compagne de M. [D] [I] [K] [S] et indique que lors d'un séjour à leur domicile entre le 4 et le 23 janvier 2019, ' Monsieur [K] partait de la maison pour son travail quotidiennement vers 7h du matin et ne rentrait du travail que vers 19 heure le soir',
- l'avertissement en date du 4 décembre 2019: « Le vendredi 29 novembre je vous ai demandé comme chaque fin de mois de venir au bureau afin de signer votre rapport d'activité comme vous le faites depuis le début de votre contrat de travail.
A mon grand étonnement, vous n'avez pas voulu le signer, me prétextant que votre conseil vous a dit de ne pas le faire ceci n'étant pas obligatoire.
Je prends note de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard, organisme établissant les bulletins de salaire.'
- l'avertissement en date du 7 janvier 2020 : « Une fois encore vous n'avez pas voulu signer votre rapport d'activité, et ce pour la deuxième fois. Je prends note encore une fois de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard organisme établissant les bulletins de salaire.'
Ces éléments sont suffisamment précis au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation pour permettre à l'EARL [G] [U] d'y répondre.
L'EARL [G] [U] conteste devoir un quelconque rappel de salaire pour des heures supplémentaires non rémunérées et observe que M. [D] [I] [K] [S] a signé ses relevés horaires conformes à ses bulletins de paie jusqu'en octobre 2019, et qu'il a refusé de le faire une fois qu'il a demandé la compensation entre ses heures supplémentaires et ses loyers impayés.
Elle fait valoir qu'il existe des contradictions entre le décompte que M. [D] [I] [K] [S] lui a adressé en septembre 2019 et celui qu'il a finalement produit dans le cadre de la présente instance le 9 mai 2023 puisqu'il était revendiqué initialement le paiement:
- de 539,5 heures supplémentaires pour 2017, et désormais 507,8 heures supplémentaires
- de 525 heures supplémentaires pour 2018, et désormais 340,64 heures supplémentaires
- de 343 heures supplémentaires pour 2019, et désormais 356,31 heures supplémentaires.
L'EARL [G] [U] observe que le premier décompte présentait des incohérences avec les bulletins de salaire puisque :
- pour les mois d'octobre 2018 à décembre 2018, M. [D] [I] [K] [S] mentionne un nombre d'heures travaillées inférieur à celui porté sur les bulletins de salaire correspondant,
- entre le 16 et le 31 août 2019, M. [D] [I] [K] [S] était en congés mais revendique avoir travaillé 15 heures.
Elle souligne des incohérences différentes sur le décompte versé aux débats, précisant ' 'à titre d'exemple Monsieur [K] [S] y prétend :
- avoir travaillé du 1er au 6 octobre 2017, alors que sa fiche de paie du mois d'octobre 2017 démontre qu'à cette époque, il était en congés.
- avoir effectué 5 h le 11 novembre 2017, qui était pourtant un jour férié non travaillé.
- avoir réalisé 4h30 le 23 décembre 2017, alors qu'il était en congés payés, ce que confirme sa fiche de paie, qu'il n'a jamais contestée.
- avoir effectué 4h30 le 21 mai 2018, alors qu'il s'agissait d'un jour férié non travaillé.
- avoir travaillé du 21 au 31 mars 2019, alors qu'il était en congés payés, ce que rappelle sa fiche de paie, qu'il n'a jamais contestée.
- avoir travaillé les 8 et 30 mai 2019, jours pourtant chômés'.
L'EARL [G] [U] conteste toute valeur probante aux attestations produites par M. [D] [I] [K] [S] lesquelles ne font mention que d'un temps d'absence de celui-ci du domicile.
Elle produit au soutien de ses explications :
- les rapports d'activité mensuels annexés aux bulletins de salaire, signés par M. [D] [I] [K] [S], qui ne mentionnent aucune heure supplémentaire,
- le décompte horaire produit par M. [D] [I] [K] [S] au soutien de sa demande initiale de paiement d'heures supplémentaires en septembre 2019,
- une attestation de M. [O] [B] [W] qui se présente comme ouvrier agricole ayant travaillé pour l'EARL [G] [U] du 19 novembre 2018 au 18 mars 2019 et indique ' toutes les heures effectuées pendant ma période de travail ont été entièrement payées sur mon bulletin de salaire. Je n'ai jamais entendu Mr [K] se plaindre d'heures non rémunérées ou supplémentaires. Quand Mr [K] a eu ses problèmes de famille, je sais que la SCI Les Rizières ne l'a pas embêté pour le paiement de ses loyers en retard car il m'en a parlé'.
Enfin, elle fait valoir que contrairement à ce que soutient désormais M. [D] [I] [K] [S], celui-ci s'exprime correctement en français, langue qu'il comprend et renvoie notamment au compte rendu d'entretien préalable établi par son conseiller qui reprend les propos qu'il a tenus en fin d'entretien, en français.
Force est de constater que M. [D] [I] [K] [S] qui ne produit aucun décompte comportant ses horaires de travail, mais uniquement des temps de travail qui correspondent tous à des heures entières ou des heures et demi de travail, n'apporte aucune explication quant aux différences importantes de volume entre les heures revendiquées en septembre 2019 et celles dont il se prévaut désormais, soit près de 200 heures de différence uniquement sur l'année 2018.
Par ailleurs, la comparaison entre le décompte produit par M. [D] [I] [K] [S] et l'attestation de Mme [H] fait apparaître des contradictions puisque si cette dernière fait état de journées de travail de 12 heures, le décompte produit mentionne des journées comprises en 4 et 9h30 de travail, notamment le 6 janvier '6:00", le 12 janvier ' 5:00", le 19 janvier ' 4:00".
Concernant la pression dont il se dit victime au moment de la signature de chaque décompte horaire, outre qu'elle résulte de ses seules affirmations, elle est également en contradiction avec la formulation des avertissements qu'il dénonce, dans lesquels il est indiqué par l'EARL [G] [U] qu'elle informe la FDSEA qui établit les bulletins de salaire du refus de signature, soit une absence de concomitance entre la signature du relevé et l'établissement du bulletin de salaire.
Enfin, alors que M. [D] [I] [K] [S] n'a pas signé à deux reprises ces relevés horaires, il ne soutient pas ne pas avoir reçu en représailles le paiement de son salaire.
Par suite, les éléments produits par M. [D] [I] [K] [S] ne permettent pas de remettre en cause les décomptes de temps de travail produits par l'EARL [G] [U] et celui-ci a justement été débouté de sa demande de paiement d'heures supplémentaires par le premier juge.
* demande d'annulation des avertissements des 15/10/2019, 19/11/2019, 29/11/2019, 04/12/2019, 07/01/2020 et 09/01/2020
Par application des dispositions de l'article L1333-1 du code du travail , en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En application de l'article L.1333-2 du code du travail, le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Le conseil de prud'hommes, juge du contrat de travail, saisi de la contestation sur le bien-fondé d'une sanction disciplinaire, peut l'annuler si elle apparaît irrégulière dans la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Saisi d'une demande en annulation de la sanction disciplinaire, le juge a l'obligation d'apprécier si les faits reprochés au salarié étaient de nature à la justifier. Le juge doit ainsi vérifier l'existence des faits invoqués par l'employeur. Celui-ci doit fournir les éléments retenus pour prendre la sanction. Il doit donc se prononcer sur la réalité des faits.
- s'agissant de l'avertissement en date du 15 octobre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « En début d'après-midi, un de vos collègues de travail vous a attendu de 13h55 à 14h10 afin de vous remettre matériel nécessaire afin d'accomplir les tâches affectées pour l'après-midi. Ce dernier m'a informée de votre absence. Je me suis rendue immédiatement sur les lieux et vous et ai trouvé à votre véhicule à 14h17. Vous comprendrez bien que vous désorganisez le travail de l'entreprise, ayant fait perdre du temps à votre collègue et les tâches vous étant confiées n'ayant pas pu être effectuées.
Ceci faisant subir des conséquences financières à l'entreprise et une surcharge de travail à vos collègues.
Vous m'avez envoyé un SMS à 17h55 relatant votre journée de ce jour. Ce n'est pas ce que j'ai pu constater en me rendant sur les lieux. Je vous prie de ne pas mentir sur vos agissements.
(')
Vous m'avez demandé par SMS le vendredi 4 octobre 2019 à 17h42 faire une journée continue le lundi 7 octobre 2019 afin de terminer plus tôt votre travail suite à un rendez- vous ce même jour. Une journée continue sans pause n'étant pas légale, je vous ai répondu de poser une journée ou une demi-journée de congé et de me préciser votre volonté pour la bonne marche de l'entreprise.
Vous avez pris un congé anticipé le 7 octobre 2019, sans m'en informer par écrit comme vous y êtes obligé. Je vous rappelle que toute demande de congé anticipé doit faire l'objet d'une demande par écrit à l'avance et doit être validée par mes soins.
Comprenez que vos attitudes causent de graves préjudices financiers et d'organisation à mon entreprise et que vos collègues doivent supporter une charge de travail. »
Pour établir la réalité de ce grief, contesté par M. [D] [I] [K] [S], l'EARL [G] [U] se réfère au contrat de travail qui mentionne :
- à l'article intitulé « durée du travail » : « Monsieur [K] [S] effectuera 35 heures par semaine, soit 151,67 heures. Monsieur [K] [S] s'engage à respecter les horaires de travail qui lui seront communiqués. »,
- à l'article intitulé « obligations professionnelles » : « Monsieur [K] [S] s'engage pendant la durée de son contrat à respecter les instructions et à consacrer professionnellement toute son activité ou ses soins à l'entreprise.
Il sera responsable de la bonne exécution de son travail et devra dans tous les cas rendre des comptes de son travail à son supérieur hiérarchique.
En cas d'absence, Monsieur [K] [S] devra produire un justificatif dans les 48 heures. (') »,
- à l'article intitulé « congés payés » : « Monsieur [K] [S] bénéficiera de 2,5 jours ouvrables par mois de congés payés conformément aux dispositions de l'article L.3141-3 du Code du travail.
La période de ces congés sera déterminée en accord avec l'employeur compte tenu des nécessités de l'exploitation.',
et à l'article 24 de la convention collective des ouvriers des exploitations agricoles du Gard qui dispose que ' Les absences résultant de la maladie doivent, sauf cas de force majeure, faire l'objet d'une information dans les plus brefs délais à l'employeur. Cet avis est confirmé, dans un délai maximum de trois jours ouvrables par un certificat médical délivré par le médecin traitant de l'intéressé. Les mêmes règles s'appliquent pour les avis de prolongation d'arrêt de travail pour maladie. (') »
Elle renvoie aux relevés horaires qui mentionnent ces horaires litigieux et observe que M. [D] [I] [K] [S] n'a jamais contesté cet avertissement au moment de sa notification ou lors de l'entretien préalable.
Pour autant, force est de constater que l'EARL [G] [U] ne produit aucun élément qui permette d'objectiver ce grief, le relevé horaire n'ayant pas été contresigné par le salarié.
Par suite, l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité du grief fondant l'avertissement qui sera par suite annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 19 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le 13 novembre vous avez quitté votre poste à 16h30.
Je vous rappelle encore une fois vos horaires de travail : 8h00-12h00 et 14h00-17h00.
Depuis, vous ne m'avez fourni aucun justificatif pour cet abandon de poste.
Votre attitude répétée désorganise le bon déroulement de l'entreprise et votre insubordination au respect des horaires m'oblige à vous signifier un avertissement pour abandon de poste. (')»
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 29 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le mercredi 20 novembre, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail.
Je vous rappelle encore une fois vos horaires de travail : 8h00-12h00 et 14h00-17h00.
Vous m'avez envoyé un SMS me disant être absent la matinée du 20 et ce sans motif, mais vous ne vous êtes pas présenté de toute la journée. Je vous rappelle encore une fois que vous n'avez plus de congés payés et que, si vous désirez prendre des congés anticipés, vous devez en faire la demande par écrit.
Votre attitude répétée désorganise le bon déroulement de l'entreprise et votre insubordination au respect des horaires m'oblige à vous signifier un avertissement pour non présentation à votre poste de travail. (') »
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 9 janvier 2020
Cet avertissement est ainsi formulé : « Depuis maintenant mi-novembre, vous avez commencé la taille de la vigne. Dans un premier temps seul, puis avec des saisonniers. À mon grand étonnement vous ne respectez pas les cadences et êtes toujours en retard par rapport à vos collègues. Malgré mes différentes remarques vous n'en avez pas tenu compte et persistez dans votre raisonnement. Je ne comprends pas un tel agissement. (') »
L'EARL [G] [U] reprend les mêmes arguments que pour l'avertissement précédent, ce qui de la même manière ne permet pas de caractériser la réalité du grief qui sera en conséquence annulé.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
- s'agissant de l'avertissement en date du 19 novembre 2019 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Le vendredi 29 novembre je vous ai demandé comme chaque fin de mois de venir au bureau afin de signer votre rapport d'activité comme vous le faites depuis le début de votre contrat de travail.
A mon grand étonnement, vous n'avez pas voulu le signer, me prétextant que votre conseil vous a dit de ne pas le faire ceci n'étant pas obligatoire.
Je prends note de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard, organisme établissant les bulletins de salaire.'
Cet avertissement qui ne se fonde pas sur un motif disciplinaire mais marque uniquement un désaccord entre le salarié et l'employeur sur le décompte de son temps de travail a justement été annulé par le premier juge.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
- s'agissant de l'avertissement en date du 7 janvier 2020 :
Cet avertissement est ainsi formulé : « Une fois encore vous n'avez pas voulu signer votre rapport d'activité, et ce pour la deuxième fois.
Je prends note encore une fois de votre refus et vous informe en avoir fait part à la FDSEA du Gard organisme établissant les bulletins de salaire.'
Cet avertissement qui ne se fonde pas sur un motif disciplinaire mais marque uniquement un désaccord entre le salarié et l'employeur sur le décompte de son temps de travail a justement été annulé par le premier juge.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
En réparation du préjudice moral résultant de la notification injustifiée de ces avertissements, M. [D] [I] [K] [S] sollicite la somme de 1.500 euros de dommages et intérêts par avertissement annulé.
Il fait valoir qu'il a vu son état de santé se dégradé en raison de ses conditions de travail délétère et invoque son arrêt de travail du 18 octobre 2019 au 1er novembre 2019.
Force est de constater que seul le premier avertissement est concomitant de l'arrêt de travail, sans qu'il soit toutefois établi de lien entre celui-ci et la pathologie fondant l'arrêt de travail en dehors des seules affirmations de M. [D] [I] [K] [S].
Pour autant, la notification d'un avertissement infondé, soit une sanction disciplinaire, est en soit constitutif d'un préjudice moral, qui sera justement réparé par une somme de 100 euros par avertissement annulé.
* Sur l'existence d'un travail dissimulé
La dissimulation d'emploi salarié prévue par le dernier alinéa de l'article L. 8221-5 du code du travail n'est caractérisée que si l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Pour allouer au salarié cette indemnité pour travail dissimulé, les juges du fond doivent rechercher le caractère intentionnel de la dissimulation. Mais ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.
L'élément moral de l'infraction peut résulter de ce que l'employeur n'a pu ignorer l'amplitude du travail des salariés en raison des moyens de contrôle du temps de travail existant dans l'entreprise.
Au soutien de sa demande de 9.800 euros de dommages et intérêts, M. [D] [I] [K] [S] explique qu'il a bénéficié d'un accord mis en place frauduleusement par l'EARL [G] [U] aux termes duquel à compter de la signature de son contrat de travail à durée indéterminée, il a bénéficié d'un avantage en nature non déclaré socialement et fiscalement consistant en la mise à disposition de son logement à titre gratuit et qu'en contrepartie, il n'était pas payé des multiples heures supplémentaires qu'il effectuait.
Pour justifier de la réalité de cet accord non formalisé qu'il invoque, M. [D] [I] [K] [S] observe que son bailleurs, la SCI Les Rizières, détenue à 49% par Mme [U], son employeur via L'EARL [G] [U] , et à 51% par le conjoint de celle-ci, ne lui a demandé de payer un arriéré de loyers de trois années qu'à partir du moment où il a sollicité de son employeur le paiement de ses heures supplémentaires.
Il en déduit l'existence d'une communauté d'intérêt entre les deux sociétés, et une volonté de dissimulation de ses heures supplémentaires caractérisant un travail dissimulé.
L'EARL [G] [U] conteste tout accord en ce sens et rappelle que M. [D] [I] [K] [S] était locataire de son logement depuis 2012 et qu'il a réglé ses loyers jusqu'en septembre 2016, soit postérieurement à la conclusion de son contrat de travail à durée indéterminée.
Elle explique que celui-ci a rencontré des difficultés à régler ses loyers concomitamment à ses problèmes familiaux et que cela est sans lien avec un quelconque avantage en nature.
Elle observe à juste titre que les deux entités présentent des personnalités morales distinctes et qu'aucun accord de quelque nature que ce soit n'a été formalisé.
L'EARL [G] [U] observe que le bail liant M. [D] [I] [K] [S] à la SCI Les Rizières n'a jamais été remis en cause par celui-ci avant l'instance judiciaire et se prévaut du courrier de son salarié daté du 11 septembre 2019 dans lequel ce dernier confirme que le logement est couvert par une assurance et après avoir sollicité le paiement de ses heures supplémentaires indique ' je vous remercie de ne pas confondre la relation du contrat de travail avec celui de l'habitat' .
Enfin, elle rappelle que par arrêt définitif de la cour d'appel de Nîmes, M. [D] [I] [K] [S] a été condamné au paiement à la SCI Les Rizières notamment de l'arriéré de loyers et qu'à l'occasion d'un contrôle dont elle a été l'objet en présence de l'appelant, aucune situation de travail dissimulé n'a été retenue à son encontre.
De fait, la réalité de l'accord dont se prévaut M. [D] [I] [K] [S] ne ressort que de ses seules affirmations qui sont contredites par les éléments factuels et chronologiques développés par l'EARL [G] [U] .
Par ailleurs, la réalité des heures supplémentaires dont M. [D] [I] [K] [S] se prévaut et qui serait l'explication de l'absence de mise en recouvrement des loyers n'est pas établie.
Par suite, aucune situation de travail dissimulé n'est caractérisée et M. [D] [I] [K] [S] a justement été débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef par le premier juge dont la décision sera confirmée sur ce point.
* sur le maintien du salaire pendant l'arrêt de travail
L'article L 1226-1 du code du travail dispose que 'Tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, à condition :
1° D'avoir justifié dans les quarante-huit heures de cette incapacité, sauf si le salarié fait partie des personnes mentionnées à l'article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ;
2° D'être pris en charge par la sécurité sociale ;
3° D'être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres Etats partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.
Un décret en Conseil d'Etat détermine les formes et conditions de la contre-visite mentionnée au premier alinéa.
Le taux, les délais et les modalités de calcul de l'indemnité complémentaire sont déterminés par voie réglementaire'.
L'article D 1226-1 du code du travail précise que 'l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 est calculée selon les modalités suivantes :
1° Pendant les trente premiers jours,90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;
2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération'
Au visa de ces deux textes, M. [D] [I] [K] [S] sollicite la somme de ' 362,75625 euros bruts outre 36.27 euros bruts de congés payés afférents, ce qui correspond à un maintien de salaire de 50 % sur la période de 15 jours. (Les indemnités journalières de la sécurité sociale couvrent environ 50 % du gain journalier net )'.
Ceci étant, la cour ne peut que constater, comme le premier juge, que M. [D] [I] [K] [S] ne justifie pas du montant des indemnités journalières perçues lors de son arrêt de travail, préalable nécessaire au constat de ce qui pourrait le cas échéant être mis à la charge de l'employeur.
La décision déférée ayant débouté M. [D] [I] [K] [S] de cette demande sera confirmée sur ce point.
* harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l'article L. 1154-1 du Code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du Code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
Au soutien de sa demande de 8.000 euros de dommages et intérêts, M. [D] [I] [K] [S] fait valoir que ' Mme [U] s'est livrée à un véritable harcèlement moral lorsque M. [K] a osé demander le paiement d'heures supplémentaires caractérisé par les faits suivants :
- Isolement dans son travail des autres ouvriers agricoles
- fin de la pratique des heures supplémentaires dissimulées et mise en oeuvre d'une procédure d'expulsion au nom de la SCI LES RIZIÈRES pour non-paiement des loyers, remettant ainsi en cause l'accord convenu,
- Multiplication des courriers disciplinaires en deux mois infondés : 6 en deux mois avant d'initier une semaine plus tard une procédure pour faute grave avec mise à pied à titre conservatoire', et impute à cette situation une dégradation de son état de santé ayant conduit à son placement en arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019.
Il produit aux débats :
- le compte rendu d'entretien préalable au licenciement rédigé par son conseiller aux termes duquel il reproche en fin d'entretien à son employeur de travailler avec un sécateur manuel depuis deux mois alors que les autres salariés travaillent avec un sécateur électrique, et de devoir se déplacer entre les parcelles sur son scooter alors que les autres salariés se déplacent dans le véhicule de l'entreprise,
- les 6 avertissements détaillés supra,
- son arrêt de travail au titre de l'assurance maladie pour la période du 18 octobre au 1er novembre 2019, mentionnant ' problématique travail'.
Ces éléments pris dans leur ensemble établissent une présomption de harcèlement moral.
L'employeur conteste toute forme de harcèlement moral et fait valoir que ces accusations reposent sur les seules allégations de M. [D] [I] [K] [S], que les avertissements étaient justifiés et qu'il n'a fait l'objet d'aucune différence de traitement par rapport aux autres salariés, et que le seul document médical produit n'établit pas de lien entre le travail et la dégradation de l'état de santé du salarié.
Ceci étant, si les faits d'isolement résultent de la seule affirmation de M. [D] [I] [K] [S], et que le certificat médical est antérieur à 5 des 6 avertissements ; il n'en demeure pas moins que ces avertissements, notifiés sur une période de moins de trois mois, ont été annulés pour absence de justification des griefs par l'employeur dans le cadre de la présente instance.
Par suite, l'employeur n'apporte pas d'explication utile à la multiplication des sanctions disciplinaire envers M. [D] [I] [K] [S] sur une courte période.
Il en résulte que le harcèlement moral dénoncé par M. [D] [I] [K] [S] au soutien de sa demande de dommages et intérêts est caractérisé.
Pour caractériser le préjudice résultant de cette situation de harcèlement moral, M. [D] [I] [K] [S] se réfère uniquement au certificat médical portant arrêt de travail du 18 octobre au 1er novembre 2019 qui mentionne ' problématique au travail'.
Il sera en conséquence justement indemnisé de son préjudice par une somme que la cour arbitre à 500 euros
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
* sur l'existence d'une faute grave
M. [D] [I] [K] [S] a été licencié pour faute grave par courrier en date du 5 février 2020 rédigé dans les termes suivants :
' Monsieur,
Par courrier sous pli recommandé du 17 janvier 2020, nous vous avons convoqué à un entretien préalable fixé au 30 janvier 2020, dans la mesure où nous envisagions de prononcer à votre égard une santion pouvant aller jusqu'à votre licenciement.
Dans l'attente, nous vous avons notifié votre mise à pied à titre conservatoire.
Lors de l'entretien, au cours duquel vous étiez assisté, nous vous avons fait part des raisons nous ayant conduits à envisager votre licenciement pour faute grave.
Face à votre refus de vous expliquer, nous avons décidé de vous licencier.
Ainsi que nous vous l'avons exposé lors de l'entretien, les motifs de ce licenciement pour faute grave sont les suivants :
Vous avez été embauché à compter du 3 juin 2016, en qualité de salarié agricole, tractoriste, coefficient 140 de la convention collective en vigueur, dans le cadre d'un contrat de travail à temps plein.
Vos horaires de travail qui vous ont été rappelés à plusieurs reprises étaient les suivants : du lundi au vendredi, de 8 heures à midi et de 14 heures à 17 heures.
A ce titre, vous êtes tenu d'exécuter personnellement et consciencieusement le travail prévu au contrat. Vous devez respecter l'organisation générale du travail, notamment en matière d'horaires et de discipline.
Vous avez fourni un travail consciencieux pendant plusieurs années mais votre attitude a radicalement changé à compter du mois de septembre 2019.
En effet, depuis l'année 2012, soit bien avant votre embauche, vous êtes locataire de la SCI LES RIZIÈRES dont mon mari est le gérant.
Or, vous avez cessé le règlement régulier des loyers à partir du mois d'octobre 2016. La SCI vous a réclamé le paiement d'un important arriéré de loyers courant septembre 2019, vous avez en réaction, et pour la première fois, prétendu avoir réalisé des heures supplémentaires qui ne vous auraient pas été payées par notre société depuis la date de votre embauche.
Il vous a été répondu que vous n'aviez réalisé aucunes heures supplémentaires, ce qu'établissent les relevés d'heures que vous avez signé tous les mois depuis votre embauche.
Concernant les loyers impayés, pour lequel vous proposiez une compensation avec les sommes que vous réclamez au titre des heures supplémentaires, nous vous avons rappelé qu'il vous incombait de vous rapprocher de votre bailleresse en cas de difficulté, mais que ces deux questions étaient totalement indépendantes.
A partir de ces échanges, vous n'avez plus travaillé correctement.
Ainsi, nous avons eu à déplorer votre absence injustifiée du 7 octobre 2019, ainsi que votre arrivée tardive à votre poste de travail le 15 octobre 2019. Nous avons été contraints de vous adresser un premier avertissement au titre de ces manquements.
Loin de vous ressaisir, vous avez alors multiplié les actes d'insubordination.
Le 13 novembre 2019, vous avez quitté votre poste de travail avec une demi-heure d'avance, ce qui nous a contraint à vous adresser un second avertissement.
Le 20 novembre 2019, vous ne vous êtes de nouveau pas présenté à votre poste de travail, sans nous en avertir, ce qui là encore justifiait l'envoi d'un troisième avertissement.
A partir du mois de janvier 2020, vous avez fait preuve d'une mauvaise volonté évidente dans l'accomplissement de vos missions, à tel point que vous n'avez pas respecté les cadences de travail, affichant un retard systématique par rapport aux salariés saisonniers, alors que, au regard de votre ancienneté au sein de l'entreprise et de vos compétences acquises, rien ne pouvait le justifier.
Nous avons été contraints de vous adresser un nouvel avertissement, au regard de votre mauvaise volonté avérée à accomplir vos missions et de la déloyauté qui en découle.
A réception de chacun de ces avertissements, vous n'avez pas réagi, sans en contester le bien-fondé.
C'est dans ce cadre que le 17 janvier 2020, vous avez persisté dans votre refus d'exécuter nos consignes.
Alors que nous avions demandé de réaliser une prestation sur le tracteur, vous vous y êtes opposé, déclarant vouloir uniquement tailler la vigne.
Nous vous avons demandé de vous ressaisir, mais vous avez affiché le plus grand mépris pour nos consignes, poursuivant les travaux de taille, sans exécuter la tâche confiée.
Face à ce énième refus, nous n'avons eu d'autre choix que de vous notifier une mise à pied à titre conservatoire et de vous convoquer à un entretien préalable à votre éventuel licenciement.
Nous avons tenté, lors de l'entretien préalable, de comprendre les raisons de votre refus réitéré de respecter nos directives.
Vous avez refusé de vous exprimer et de nous fournir une excuse acceptable à ces actes d'insubordination répétés et dont la fréquence se multiplie et s'aggrave, laissant votre conseiller prendre la parole à votre place.
Pour seule explication, vous nous avez fait savoir par son intermédiaire, que nous ne vouliez plus vous adresser à nous, car vous n'aviez pas obtenu ce que vous demandiez.
Vous comprendrez que ce refus d'échange rend à lui seul impossible la poursuite de notre relation de travail.
De plus, vous ne pouvez subordonner la reprise de votre travail à la satisfaction de revendications que nous estimons infondées. Si vous estimez que malgré nos explications vos droits ont été méconnus, il vous incombe de saisir les instances compétentes, mais vous ne pouvez refuser de fournir le travail pour lequel nous vous rémunérons.
En outre, pour justifier votre insubordination, vous avez fait dire par l'intermédiaire de votre conseiller, qu'en contrepartie des heures supplémentaires réalisées depuis le mois de juin 2016 selon vous, vous auriez bénéficié un 'logement de fonction'.
C'est totalement inexact.
Comme nous vous l'avons exprimé à plusieurs reprises, vous n'avez réalisé aucunes heures supplémentaires impayées, ce que confirment tous les rapports d'activité que vous avez signé tous les mois jusqu'au mois d'octobre 2019 inclus.
Vous ne pouvez non plus prétendre avoir bénéficié d'un 'logement de fonction', alors que vous occupez un logement d'une société tierce, depuis 2012, tandis que vous n'êtes salarié permanent de notre entreprise que depuis juin 2016, de sorte que vous ne pouvez affirmer que ce logement serait la contrepartie d'un travail pour le compte de notre structure.
Je rappelle en effet qu'il n'y a aucun lien juridique entre la SCI dont vous êtes locataire et l'EARL dont vous êtes le salarié, de sorte que cet argument ne peut non plus prospérer.
De même, vous ne sauriez prétendre ne pas comprendre le français ainsi que la teneur des relevés d'heures que vous avez signés sans discussion jusqu'au mois d'octobre 2019 inclus.
En effet, tout au long de la relation de travail, nos échanges écrits et verbaux ont toujours été en français. D'ailleurs, lors de l'entretien préalable, vous vous êtes entretenu régulièrement avec votre conseiller, en français, ce qui démontre votre parfaite connaissance de notre langue.
Nous vous avons encore fait part de notre étonnement, alors que nous avons fait l'objet d'un contrôle inopiné et en notre absence à l'initiative de la MSA, et en présence des forces de l'ordre, au cours duquel aucune anomalie n'a été constatée. Si véritablement vous aviez eu des revendications à formuler, et alors que nous n'étions pas présent lors du contrôle, rien ne vous empêchait d'en faire part aux contrôleurs, ce que vous n'avez pas fait, puisque vous saviez pertinemment qu'aucune heure ne vous est due.
Nous vous rappelons enfin que l'ensemble des travaux qui vous ont été demandés relevaient de vos attributions étaient justifiés.
En définitive, vous avez multiplié les actes d'insubordination après que votre bailleresse vous ait réclamé le paiement de loyers impayés. Vous avez prétexté la réalisation d'heures supplémentaires au sein de l'EARL pour refuser d'accomplir les missions que vous étaient données.
Pourtant, vous n'avez réalisé aucunes heures supplémentaires et votre refus caractérisé d'accomplir vos missions n'est nullement justifié.
Au regard de la multiplication des actes d'insubordination, dans un délai très court, et de l'impossibilité de poursuivre une relation de travail, émaillé par votre refus répété d'accomplir les missions qui vous sont données, ainsi que votre refus de tout dialogue, nous n'avons d'autre choix que de prononcer votre licenciement pour faute grave, votre maintien dans l'entreprise s'avérant impossible, y compris pendant le préavis.
Le licenciement prend donc effet immédiatement sans indemnité de préavis, ni de licenciement et votre contrat de travail s'achève au jour de la présente notification. Vous recevrez par courrier séparé votre solde de tout compte, arrêté au jour de votre mise à pied à titre conservatoire, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi.
Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.
Nous vous informons par ailleurs qu nous vous dispensons de toute éventuelle obligation de non concurrence quelle qu'en soit le support.
Vous pourrez donc exercer librement votre activité et nous serons dispensés du paiement de toute indemnité de non concurrence.
Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les 15 jours de sa notification (....)
Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article L 911-8 du code de la sécurité sociale, sous réserve d'en remplir les conditions, vous pourrez bénéficier (...)
Veuillez agréer, Monsieur, nos salutations distinguées'.
S'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs formulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en rapporter la preuve.
La faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits allégués dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire.
La gravité du manquement retenu est appréciée au regard du contexte, de la nature et du caractère éventuellement répété des agissements, des fonctions exercées par le salarié dans l'entreprise, un niveau de responsabilité important étant le plus souvent un facteur aggravant, de son ancienneté, d'éventuels manquements antérieurs et des conséquences de ces agissements en résultant pour l'employeur.
La faute grave libère l'employeur des obligations attachées au préavis. Elle ne fait pas perdre au salarié le droit aux éléments de rémunération acquis antérieurement à la rupture du contrat, même s'ils ne sont exigibles que postérieurement.
Si l'article L1332-4 du code du travail prévoit en principe qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance, en revanche ce texte ne s'oppose à pas à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai.
Le licenciement prononcé en raison de la faute disciplinaire du salarié doit donc respecter un délai maximum de deux mois entre la connaissance des faits et l'engagement de la procédure disciplinaire et un délai maximum d'un mois entre l'entretien préalable et la notification de la sanction, à défaut, le licenciement est irrégulier.
Il résulte de la lettre de licenciement du 5 février 2020 que l'EARL [G] [U] reproche à M. [D] [I] [K] [S] de ne pas avoir respecté ses ordres dans le cadre d'une mission qui lui était demandée, soit d'avoir poursuivi la taille de la vigne au lieu d'effectuer une tâche avec le tracteur, ce refus s'inscrivant dans la continuité des faits d'insubordination visés aux avertissements notifiés depuis le 15 octobre 2019.
Pour établir la réalité de ce grief, l'EARL [G] [U] se réfère aux avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] et à l'entretien préalable au cours duquel le salarié a justifié son comportement par le refus de lui payer ses heures supplémentaires.
Elle rappelle que devant le premier juge, M. [D] [I] [K] [S] avait justifié en vain son refus par le fait qu'il n'était pas titulaire du permis de conduire, ce qui a justement été écarté puisque la conduite d'un tracteur sur une exploitation agricole n'est pas subordonné à sa détention.
M. [D] [I] [K] [S] conteste désormais le refus de conduire le tracteur qui lui est reproché, et observe que la matérialité de celui-ci n'est pas rapportée par l'EARL [G] [U] . Il considère par ailleurs que la sanction est disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés ce qui justifierait également la requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Force est de constater que l'EARL [G] [U] ne produit aucun élément en dehors de ses propres affirmations pour caractériser le refus de conduire le tracteur opposé à M. [D] [I] [K] [S].
Au surplus, ensuite de l'annulation des avertissements notifiés entre octobre 2019 et janvier 2020, la réitération de faits d'insubordination visée à la lettre de licenciement n'est pas caractérisée.
En conséquence, l'EARL [G] [U] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité du grief fondant la faute grave visée à la lettre de licenciement et le licenciement notifié à M. [D] [I] [K] [S] par courrier en date du 5 février 2020 doit être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La décision déférée sera infirmée en ce sens.
Sur les conséquences indemnitaires du licenciement sans cause réelle et sérieuse
Il sera observé que M. [D] [I] [K] [S] ne présente pas de demande au dispositif de ses écritures au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire
La demande de M. [D] [I] [K] [S] d'une somme de 1.012,38 euros , outre 101,23 euros pour les congés payés y afférents n'est pas contestée à titre subsidiaire par l'EARL [G] [U] et il sera fait droit à la demande
- rappel de salaire sur la période de préavis
La demande de M. [D] [I] [K] [S] d'une somme de 3266,98 euros de rappel de salaires pour les deux mois correspondant à la durée du préavis outre 326,69 euros de congés payés afférents sur préavis n'est pas contestée à titre subsidiaire par l'EARL [G] [U] et il sera fait droit à la demande.
- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Par application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail, M. [D] [I] [K] [S] qui présentait à la date de son licenciement une ancienneté de 4 années complètes dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés peut prétendre à une indemnité comprise entre 1 et 5 mois de salaire.
Au soutien de sa demande de 9.800 euros d'indemnité, correspondant à 6 mois de salaire, M. [D] [I] [K] [S] n'apporte aucun élément relatif à sa situation personnelle et professionnelle actuelle.
Compte tenu de son âge et de son ancienneté à la date de son licenciement et de l'absence d'élément de situation soumis à l'appréciation de la cour, il lui sera alloué la somme de 1.700 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 27 février 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a débouté M. [D] [I] [K] [S] de sa demande d'annulation des avertissements en date des 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019 et 09 janvier 2020, de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral subséquent, et de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Infirme le jugement de départage rendu le 6 mai 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,
Annule les avertissements notifiés à M. [D] [I] [K] [S] par l'EARL [G] [U] par courriers en date des 15 octobre 2019, 19 novembre 2019, 29 novembre 2019 et 09 janvier 2020,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 100 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral ensuite de l'annulation de chacun des 6 avertissements, soit la somme totale de 600 euros,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 500 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Requalifie le licenciement pour faute grave notifié par l'EARL [G] [U] à M. [D] [I] [K] [S] par courrier en date du 5 février 2020 pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] les sommes de :
- 1.012,38 euros de rappel de salaire sur la période de mise à pied à titre conservatoire, outre 101,23 euros pour les congés payés y afférents,
- 3266,98 euros de rappel de salaires pour la durée du préavis outre 326,69 euros de congés payés afférents
- 1.700 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne l'EARL [G] [U] à verser à M. [D] [I] [K] [S] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne l'EARL [G] [U] aux dépens de première instance et de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT