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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-11 référés, 22 septembre 2025, n° 25/00339

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 25/00339

22 septembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés

ORDONNANCE DE REFERE

du 22 Septembre 2025

N° 2025/52

Rôle N° RG 25/00339 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BO7G2

S.A.R.L. AXIS

C/

[O] [T]

Copie exécutoire délivrée

le : 22 Septembre 2025

à :

Me Alain GALISSARD de l'ASSOCIATION GALISSARD A / CHABROL B, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Laura GRIMALDI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 26 Juin 2025.

DEMANDERESSE

S.A.R.L. AXIS, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Alain GALISSARD de l'ASSOCIATION GALISSARD A / CHABROL B, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

Madame [O] [T], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Laura GRIMALDI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

* * * *

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2025 en audience publique devant Mme Véronique SOULIER, Présidente de chambre, déléguée par ordonnance du premier président.

En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile

Greffier lors des débats : Caroline POTTIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2025.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2025.

Signée par Véronique SOULIER, Présidente de chambre et Caroline POTTIER, adjointe administrative faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par jugement en date du 15 mai 2025, le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence a:

- reconnu le harcèlement moral dont Mme [O] [T] a été victime;

- jugé que l'inaptitude de Mme [T] est d'origine professionnelle;

- requalifié le licenciement pour inaptitude intervenu le 19 janvier 2024 en licenciement nul;

Par conséquent:

- condamné la société Axis à verser à Mme [O] [T] les sommes suivantes:

- 11.124,24 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul;

- 2.253,75 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement;

- 3.708,08 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 370,80 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 12.000 euros au titre des dommages-intérêts pour harcèlement moral;

- 1.496,95 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés;

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- ordonné à la société Axis d'avoir à établir et délivrer à Mme [O] [T] les documents de fin de contrat actualisés le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30ème jour de la notification de la présente décision;

- dit que l'intégralité des sommes allouées à Mme [O] [T] produiront intérêts de droit à compter de la demande en justice avec capitalisation en application des articles 1131-6 et 1131-7 du code civil;

- dit qu'à défaut de réglement spontané des condamnations prononcées par le jugement et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la société Axis en sus de l'indemnité à charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

- rappelé l'exécution provisoire de plein droit en application des dispositions combinées des articles R1454-14 et R 1454-28 du code du travail;

- prononcé l'exécution provisoire de la décision à intervenir sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile;

- débouté Mme [O] [T] du reste de ses demandes;

- débouté la société Axis du reste de ses demandes;

- condamné la société Axis aux entiers dépens.

Ayant interjeté appel de cette décision le 11 juin 2025 par déclaration adressée au greffe de la cour par voie électronique, la société Axis a, par acte en date du 26 juin 2025 remis à sa personne, fait assigner Mme [O] [T] devant la juridiction du premier président statuant en référé pour obtenir :

- à titre principal : l'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement du conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence du 15 mai 2025;

- à titre subsidiaire : la consignation de l'indemnité objet de la condamnation sur compte ouvert auprès de la CARPA de [Localité 2] par règlements mensuels intervenant sur une période de 18 mois et jusqu'à l'issue de la procédure d'appel;

- la condamnation de Mme [T] au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens étant réservés et suivant le sort des dépens de l'appel porté devant la cour.

En défense, Mme [T] demande :

- à titre principal, de juger les demandes de la société Axis irrecevables;

- à titre subsidiaire, de débouter la société Axis de l'ensemble de ses demandes;

- en tout état de cause, de condamner la société Axis aux entiers dépens et à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- juger que l'intégralité des sommes allouées à Mme [T] produira intérêts de droit à compter de la demande en justice avec capitalisation en application des articles 1131-6 et 1131-7 du code civil;

- juger qu'à défaut de réglement spontané des condamnations prononcées par le jugement et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la société Axis en sus de l'indemnité à charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En réplique, la société Axis demande de juger irrecevables devant le premier président les demandes relatives à la capitalisation des intérêts et à la mise à la charge de la débitrice des frais de recouvrement exigibles en vertu du Décret du 12 décembre 1996.

Les parties ont développé oralement leurs écritures, auxquelles il sera renvoyé pour le détail des moyens soutenus, lors des débats du 08 septembre 2025.

SUR CE :

A titre liminaire, les demandes de Mme [T] de capitalisation des intérêts et de mise à la charge de la société Axis des frais de recouvrement exigibles en vertu du décret du 12 décembre 1996 ne relevant pas de la compétence de la juridiction du premier président sont déclarées irrecevables.

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose :

'En cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.'.

L'article 517-1 du code de procédure civile prévoit que 'lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée que dans les cas suivants:

1° Si elle est interdite par la loi;

2° Lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522...(...)'.

L'article R 1454-28 du code du travail dispose qu'est de droit exécutoire à titre provisoire le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R 1454-14 dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, moyenne mentionnée dans le jugement.

L'article R 1454 énumère les sommes en question qui peuvent être constituées des salaires accessoires du salaire, commissions, indemnité de congés payés, de préavis et de licenciement, indemnité compensatrice et indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnée à l'article L.1226-14, indemnité de fin de contrat prévu à l'article L.1243-8 et indemnité de fin de mission mentionnée à l'article L.12512-32.

Mme [T] soutient que les demandes de la société Axis sont irrecevables celle-ci n'ayant pas fait valoir d'observations sur l'exécution provisoire en première instance et ne justifiant pas que les conséquences manifestement excessives évoquées se seraient révélées postérieurement à la décision de première instance, alors qu'elle connaissait parfaitement sa situation comptable lors de l'audience devant le bureau de jugement du 30 janvier 2025.

La société Axis réplique que sa demande de suspension/aménagement de l'exécution provisoire est liée à des éléments postérieurs au déroulement de l'instance s'agissant de la constatation des effets de la concurrence déloyale orchestrée par Mme [E] et Mme [T], l'évolution du chiffre d'affaires 2025 ne pouvant être connue à la date de rédaction des conclusions de première instance et d'audience du 31 janvier 2025 alors que la situation comptable établie à la date du 31 juillet 2025 met en évidence que l'activité, déjà déficitaire en 2024, s'est aggravée du fait d'actes de concurrence déloyale imputables aux actions conjuguées de trois anciens salariés dont Mme [T], cette situation n'ayant été portée à sa connaissance que durant l'assemblée générale ordinaire du 16/06/2025.

Il résulte du jugement prud'homal critiqué que celui-ci, après avoir rappelé les conditions de l'exécution provisoire de droit, a ordonné l'exécution provisoire facultative de sa décision sur l'ensemble des condamnations prononcées et non seulement sur celles de nature salariale limitées à 9 mois de salaire alors que la société Axis ne conteste pas n'avoir formulé aucune observation relativement à l'exécution provisoire lors des débats du 30 janvier 2025.

Or, il ressort des comptes arrêtés au mois de mai 2024 antérieurs à la décision de première instance que dès cette période l'exercice était déficitaire à concurrence de 94.986 euros la situation arrêtée au 31 juillet 2025 objectivant une dette de 96.842 euros confirmant seulement l'existence des difficultés financières antérieures de la société Axis alors que cette dernière ayant développé en première instance qu'elle était victime d'actes de concurrence déloyale imputables à d'anciens salariés, Mme [E] et Mme [T] notamment, la juridiction prud'homale ayant relevé qu'à cette période, elle ne justifiait pas avoir engagé des poursuites à leur encontre, ne peut valablement soutenir que sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire est fondée sur la découverte d'éléments économiques postérieurs au déroulement de l'instance celle-ci ayant simplement tiré les conséquences de l'argumentation développée en première instance en déposant le 19 juin 2025 une plainte pour abus de confiance à l'encontre de Mme [E] et de sa société S2L.

L'absence de cette condition légale conduit à déclarer irrecevable la demande de la société Axis d'arrêt de l'exécution provisoire de droit.

S'agissant de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire facultative, qui n'est pas soumise à la troisième condition de l'article 514-3 du code de procédure civile, et qui est recevable la société Axis ne justifie ni de la nullité du jugement rendu pour violation du principe d'impartialité et défaut de réponse aux conclusions alors que le jugement critiqué s'il a fait droit à l'argumentation de la salariée est suffisamment motivé au sens de l'article 455 du code de procédure civile et répond aux moyens soulevés par l'employeur, ni de l'existence d'un moyen sérieux de réformation de la décision s'agissant d'une appréciation factuelle des éléments de preuve présentés par les parties relativement à la situation de harcèlement moral alléguée comme à l'évaluation du préjudice retenu.

En conséquence, la seule absence de cette première condition, sans qu'il y ait lieu d'examiner le bien fondé de la seconde condition, justifie le rejet de la demande de la société Axis d'arrêt de l'exécution provisoire facultative du jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 15 mai 2025.

Par ailleurs, la société Axis, qui ne développe aucun moyen au soutien de cette demande subsidiaire, ne justifie pas de la nécessité de la mesure de consignation sollicitée parfaitement contradictoire avec l'impossibilité économique alléguée d'exécuter le jugement entrepris, cette demande étant également rejetée.

La société Axis est condamnée aux dépens de l'instance, et à payer à Mme [T] une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé :

Déclarons irrecevables les demandes de Mme [T] de capitalisation des intérêts et la mise à la charge de la société Axis des frais de recouvrement exigibles en vertu du décret du 12 décembre 1996.

Déclarons irrecevable la demande de la société Axis d'arrêt de l'excution provisoire de droit du jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence du 15 mai 2025.

Rejetons la demande de la société Axis d'arrêt de l'exécution provisoire facultative du jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence du 15 mai 2025.

Rejetons la demande de la société Axis de consignation des sommes dues sur un compte ouvert auprès de la CARPA de [Localité 2].

Condamnons la société Axis aux dépens et à payer à Mme [T] une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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