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Décisions

CA Poitiers, 1re ch., 23 septembre 2025, n° 23/02479

POITIERS

Arrêt

Autre

CA Poitiers n° 23/02479

23 septembre 2025

ARRET N°278

N° RG 23/02479 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5HE

S.C.I. [Localité 11]

C/

S.C.I. PATRIMINAGE

S.A.R.L. CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON

Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le à

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Copie gratuite délivrée

Le à

Le à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2025

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02479 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5HE

Décision déférée à la Cour : jugement du 03 octobre 2023 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de La Rochelle.

APPELANTE :

S.C.I. [Localité 11]

[Adresse 5]

[Localité 4]

ayant pour avocat Me Florence BILLARD, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMEES :

S.C.I. PATRIMINAGE

[Adresse 6]

[Localité 4]

ayant pour avocat Me Véronique CASTEL de la SELARL BONNEAU-CASTEL-PORTIER-GUILLARD, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON

[Adresse 7]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SELARL 1927 AVOCATS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Catherine LATAPIE-SAYO, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Juin 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller qui a fait le rapport

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par acte authentique du 12 mars 2019, la SCI PATRIMINAGE a acquis auprès de la SCI [Localité 11] un ensemble immobilier sis [Adresse 9] à [Localité 12], cadastré LE n°[Cadastre 1] et [Cadastre 2], au prix de 359 000 €, par l'intermédiaire de l'agence immobilière SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON, mandatée par la SCI [Localité 11] pour réaliser ladite vente.

Le 18 mars 2019, soit postérieurement à la vente intervenue le 12 mars 2019, Mme [S], voisine dont la propriété donne sur l'arrière de l'immeuble cédé, a contacté la Société GAUDUCHON pour lui indiquer une « nouvelle dégradation du mur latéral et arrière de l'immeuble (chute d'une plaque de crépi 30 x 30 cm et d'ardoises)'.

Arguant dès après acquisition de la découverte de désordres au niveau du mur arrière du bâtiment cédé, visibles uniquement depuis la cour de la propriété privée de la SCI [S], cadastrée LE n° [Cadastre 3], la SCI PATRIMINAGE a fait établir un constat d'huissier de justice et a mandaté la société APAVE afin de procéder à un diagnostic de l'ouvrage, laquelle a établi, le 24 juin 2019, un rapport non contradictoire concluant à la nécessité d'entreprendre des travaux de mise en sécurité.

C'est dans ces conditions que, par acte en date d'huissier de justice en date du 12 novembre 2019, la SCI PATRIMINAGE a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de LA ROCHELLE aux fins de voir organiser une mesure d'expertise permettant de déterminer l'origine et l'ampleur des désordres ainsi que les solutions pour y remédier. Il a été fait droit à cette demande par ordonnance du 23 juin 2020. M. [U] a été désigné en qualité d'expert et a déposé son rapport le 29 octobre 2021.

Par acte en date du 25 mars 2022, la SCI PATRIMINAGE a fait assigner la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON et la SCI [Localité 11] devant le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE en réparation du préjudice subi.

La SCI PATRIMINAGE a par suite renoncé à ses demandes présentées à l'encontre de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON.

Aux termes de ses dernières écritures, la SCI PATRIMINAGE demandait au tribunal de :

- Débouter la SCI [Localité 11] et la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la SCI [Localité 11] à lui verser la somme de 39 480,71 euros au titre de la réfection du mur arrière de l'immeuble et des études préalables, somme indexée sur l'indice BT 01, l'indice de référence étant celui en vigueur à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire ;

- Condamner la SCI [Localité 11] à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et de jouissance ;

- Condamner la SCI [Localité 11] à lui verser la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance qui comprendront les honoraires de l'expert commis et le coût du constat d'huissier du 28 mars 2019.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 31 mai 2023, la SCI [Localité 11] demandait au tribunal judiciaire de :

A titre principal :

- Débouter la SCI PATRIMINAGE de ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés et sur le dol ;

- Condamner la SCI PATRIMINAGE à lui verser la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, à recouvrer par Me BILLARD conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger qu'elle ne saurait être condamnée à verser à la SCI PATRIMINAGE une somme supérieure à 12 401,32 euros hors taxe ;

- Condamner la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON à la garantir et relever indemne de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au profit de la SCI PATRIMINAGE ;

- Condamner la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens, à recouvrer par Me BILLARD conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 12 avril 2023, la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON demandait au tribunal judiciaire de :

- Débouter la SCI [Localité 11] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- Condamner la SCI [Localité 11] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article

700 du code de procédure civile ;

- Condamner la SCI [Localité 11] aux entiers dépens ;

- Ecarter l'exécution provisoire de plein droit.

Par jugement contradictoire en date du 3 octobre 2023, le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE a statué comme suit :

'CONDAMNE la SCI [Localité 11] à verser à la SCI PATRIMINAGE la somme de TRENTE-NEUF MILLE QUATRE CENT QUATRE-VINGTS EUROS ET SOIXANTE-ET-ONZE CENTIMES (39 480,71€) indexée sur l'indice BT 01, l'indice de référence étant celui en vigueur à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire ;

REJETTE la demande indemnitaire au titre des préjudices moraux et de jouissance formulée par la SCI PATRIMINAGE à l'encontre de la SCI [Localité 11] ;

REJETTE la demande en garantie formulée par la SCI [Localité 11] à l'encontre de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON ;

CONDAMNE la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de SIX MILLE EUROS (6 000€) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI [Localité 11] à payer à la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2 500 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SCI [Localité 11] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI [Localité 11] aux entiers dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- sur la demande indemnitaire au titre de la restitution du prix et le principe de la garantie des vices cachés, il résulte des conclusions du rapport d'expertise judiciaire déposé le 29 octobre 2021 l'existence de désordres importants sur le mur arrière cadastré LE n°[Cadastre 2].

- au regard de son objet social, soit «l'acquisition [...J d'un immeuble [ ...] dont elle pourrait devenir propriétaire', la SCI PATRIMINAGE a agi en qualité de professionnel de l'immobilier sur lequel pèse une présomption simple de connaissance des vices décelables.

- cependant, il ressort du plan cadastral produit que le mur arrière de la propriété cadastrée LE n°[Cadastre 2] n'est visible que depuis la cour privée cadastrée LE n°[Cadastre 3] appartenant à Madame [S], et l'autorisation d'accès à la cour de Madame [S] était nécessaire afin de pouvoir apprécier l'état du mur arrière au jour de la vente.

- le mur pignon Sud-Est désigné présente des défauts d'une ampleur minime en comparaison des désordres du mur arrière litigieux. Par conséquent, le simple constat des défauts minimes de ce mur pignon Sud-Est n'aurait pu induire la nécessité pour l'acquéreur de s'interroger sur l'état potentiellement dégradé du mur arrière.

Les défauts du mur arrière étaient indécelables par simple examen visuel du mur pignon Sud-Est.

- de par l'impossibilité de visualiser, depuis le domaine public ou par un angle de vue quelconque des propriétés cédées, les détériorations relevées sur le mur arrière, lesdits vices ne peuvent être caractérisés d'apparents au moment de la vente.

- sur la gravité des vices, l'expert précisant que les défauts portent atteinte à la solidité de l'ouvrage, en ce que le mur arrière du bâtiment est un élément essentiel de la structure, outre le risque de chutes de matériaux pour les utilisateurs de la cour.

- la SCI [Localité 11] invoque l'existence de « nouvelles dégradations » survenues postérieurement à la vente. Cependant il importe peu que les conséquences du vice soient antérieures ou postérieures à la vente, seule doit être démontrée l'antériorité du vice même, ce qui est le cas, les courriers de Mme [S] des 6 août 2017 et 18 mars 2019 en témoignant.

- la vente du bien immobilier litigieux ayant été conclue entre deux professionnels présentant une identité de spécialité, la clause exclusive de garantie prend effet et la SCI [Localité 11] ne peut répondre que des vices dont elle a eu connaissance.

- il ressort du rapport d'expertise judiciaire que la SCI [Localité 11], laquelle le reconnaît au sein de ses écritures et de la lettre officielle de Me [T] en date du 3 octobre 2019, a eu connaissance à de multiples reprises, en 2014, 2016 et 2017, de l'existence de dégradations sur le mur arrière du bâtiment, outre les courriers de Mme [S].

- la SCI [Localité 11] ne peut arguer de ce qu'elle n'a eu connaissance que d'une partie des désordres à l'exclusion de la fissure, alors que la photographie transmise au gérant de ladite SCI en date du 21 octobre 2016 fait apparaître en germe ladite fissure, comme le relève l'expert judiciaire.

- la SCI [Localité 11] avait connaissance des vices avant la vente et ne peut donc invoquer la clause exclusive de garantie.

- selon le rapport d'expertise, le coût total des travaux nécessaires à la reprise du mur arrière de la propriété de la SCI PATRIMINAGE est estimé à 35256,71 euros et la SCI PATRIMINAGE a, de plus réglé diverses factures, correspondant à des études et diagnostics préalables à la réfection, à hauteur de 4 224 euros.

La SCI [Localité 11] qui a eu connaissance de l'ensemble des vices, développés ou en germe, depuis l'année 2014, sera condamnée à verser à la SCI PATRIMINAGE une somme de 39 480, 71 euros, indexée sur l'indice BT 01 de la construction.

- la SCI PATRIMINAGE ne démontre pas suffisamment l'existence de préjudices 'moraux ou de jouissance ' distincts de sa demande précédente de restitution du prix et sa demande indemnitaire sera rejetée.

- sur la demande en garantie, manque à son devoir de conseil l'agent immobilier qui omet d'informer l'acheteur sur l'existence de désordres apparents affectant l'immeuble vendu et qu'en sa qualité de professionnel de l'immobilier il ne peut ignorer, mais non sur l'existence de désordres non apparents, si n'est pas rapportée la preuve qu'il en avait connaissance.

- il résulte du mandat simple de vente conclu entre la SCI [Localité 11] et la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON qu'aucune clause ne stipule une obligation de vérification de l'entier état du bâtiment cédé par l'agent immobilier.

- les désordres en cause sont non apparents puisque présentant le caractère de vices cachés, l'agent immobilier n'a pu matériellement, en raison de la configuration cadastrale des lieux, s'en convaincre lui-même, et aucune preuve n'est rapportée par la SCI [Localité 11] que la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a eu connaissance desdits désordres, la demande de garantie devant être rejetée.

LA COUR

Vu l'appel en date du interjeté par la société SCI [Localité 11]

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 29/11/2024, la société SCI [Localité 11] a présenté les demandes suivantes :

'Déclarer recevable et bien fondée la SCI [Localité 11] en son appel du jugement rendu le 3 octobre 2023 par le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE.

Y faisant droit,

REFORMER le jugement rendu le 3 octobre 2023 par le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

A titre principal :

Débouter la SCI PATRIMINAGE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner la SCI PATRIMINAGE à payer à la SCI [Localité 11] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC en première instance ainsi qu'aux entiers dépens.

Y ajoutant,

Condamner la SCI PATRIMINAGE à payer à la SCI [Localité 11] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC en cause d'appel ainsi qu'aux dépens d'appel.

A titre subsidiaire :

Condamner la Société GAUDUCHON à garantir et relever indemne la SCI [Localité 11] à hauteur de 95% des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au profit de la SCI PATRIMINAGE ;

Condamner la Société GAUDUCHON à payer à la SCI [Localité 11] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC en première instance ainsi qu'en tous les dépens.

Y ajoutant,

Condamner la SARL CABINET GAUDUCHON à payer à la SCI [Localité 11] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC en cause d'appel ainsi qu'aux dépens d'appel.

DÉBOUTER la SCI PATRIMINAGE de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

DÉBOUTER la SARL CABINET GAUDUCHON de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Dire et juger que les dépens pourront être recouvrés par Me BILLARD conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC'.

A l'appui de ses prétentions, la société SCI [Localité 11] soutient notamment que :

- la SCI [Localité 11] n'est pas un professionnel de l'immobilier. Si son objet social se rapporte à l'acquisition, la propriété, la gestion, l'administration et la disposition de biens dont elle pourrait devenir propriétaire, elle a acquis en tout et pour tout un seul immeuble et ne fait pas commerce de transactions immobilières. Elle n'a réalisé aucune autre opération que l'achat (en 2011) puis la vente de cet immeuble (en 2019) dont le prix n'a pas été réinvesti dans une autre opération immobilière.

- sur les désordres et leur connaissance, elle n'avait aucunement connaissance des vices et de leur ampleur tels que dénoncés par le rapport APAVE : désordre lié à la fissure sur le contrefort et problème des ossatures métalliques rouillées, et désordre lié à la perte d'enduit et chute de moellons.

Elle était informée de l'existence de dégradations d'enduit et chute de pierres survenues sur la propriété de la SCI [S] mais n'avait nullement conscience et n'a jamais considéré que cette chute de revêtement constituait un vice, l'immeuble étant par ailleurs très ancien.

S'agissant de la fissure, la SCI [Localité 11] n'a jamais considéré qu'il s'agissait d'un vice, elle-même ayant acquis cet immeuble ' datant du 18ème siècle- en 2011 avec cette fissure

L'entreprise RIPEAU MARTEAU, considérant l'absence de gravité de cette fissure, n'a pas jugé utile d'établir un devis de reprise à ce titre ou d'alerter la SCI PATRIMINAGE sur la nécessité d'une intervention.

- la SCI [Localité 11] n'a fait preuve d'aucune dissimulation ni mis en 'uvre aucun stratagème pour empêcher l'acquéreur de visualiser le mur litigieux

- la SCI PATRIMINAGE, professionnelle de l'immobilier a négocié et obtenu une baisse du prix de vente de l'immeuble précisément à raison de sa vétusté.

- la SCI [Localité 11] qui avait acquis l'immeuble en cet état et qui n'est pas un professionnel de l'immobilier et de la construction ne peut être considérée comme vendeur de mauvaise foi.

- la cause de non garantie des vices cachés doit s'appliquer.

- la qualité de professionnel de l'immobilier et de la construction de la SCI PATRIMINAGE est établie, la SARL KHEOPS (signataire du compromis en tant qu'acheteur) est une société holding au capital de 2.536.000 € détenue à 100% par Monsieur [B] [Z] tandis que la Société PATRIMINAGE qu'elle s'est substituée à l'acte authentique, également animée par Monsieur [B] [Z], gérant de 26 sociétés à prépondérance immobilière et/ou de construction.

- les vices dont est atteint l'immeuble étaient décelables selon des diligences raisonnables pour un professionnel. Constituaient en l'espèce des diligences normales pour un acquéreur profane le fait d'examiner les murs pignons de l'immeuble qu'il projetait d'acquérir.

L'expert retient : 'l'état "moyen" du mur pignon Sud-Est, visible depuis la [Adresse 13]. De ce fait, M. [Z] (gérant de la SCI PATRIMINAGE) aurait dû logiquement s'inquiéter de l'état du mur arrière.

L'immeuble très ancien montrait en effet des signes de vétusté, lesquels ont d'ailleurs suscité des discussions sur les travaux nécessaires devant être exécutés par l'acheteur qui avait fait faire des devis, et qui a obtenu une réduction du prix.

Les diligences normales d'un acquéreur professionnel consistaient à demander à la Société GAUDUCHON de visiter l'arrière de la propriété, notamment au regard du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 10], en date du 19 mars 2018,dont l'acquéreur indique à l'acte de vente du 12 mars 2019 « avoir eu parfaite connaissance préalablement aux présentes.

- en sa qualité de professionnel, la société PATRIMINAGE ne peut invoquer le caractère caché des désordres, décelables selon une diligence raisonnable pour un professionnel et elle doit être déboutée.

- la SCI PATRIMINAGE s'est vu indemnisée de l'intégralité de ses préjudices matériels, et ne justifie d'aucun préjudice moral ou de jouissance, l'immeuble ayant été vendu loué s'agissant du fonds de commerce.

- les dispositions de l'article 1112-1 du code civil relatives au dol ne peuvent s'appliquer, la SCI [Localité 11] n'ayant aucunement connaissance d'un quelconque problème structurel des ouvrages, et n'a dissimulé intentionnellement aucune information qu'elle jugeait déterminante. Elle n'a fait preuve d'aucune dissimulation ni mis en 'uvre aucun stratagème pour empêcher l'acquéreur de visualiser le mur litigieux.

- subsidiairement, la SARL CABINET GAUDUCHON devra garantir la SCI [Localité 11] de toutes condamnations.

L'agence immobilière à qui elle a confié de soin de vendre son immeuble est un professionnel de l'immobilier et les désordres dont était atteint l'immeuble étaient apparents pour l'agent immobilier. En outre, il pèse sur l'agent immobilier une obligation d'information et de conseil qu'elle ne démontre pas avoir remplie.

Il appartenait en effet à la Société GAUDUCHON de demander à visiter l'arrière de la propriété et/ou d'interroger la SCI [Localité 11] sur l'état du mur arrière.

- si le mandat ne contient en effet aucune clause expresse confiant au mandataire le soin de « vérifier l'entier état du bâtiment cédé », il contient la clause suivant laquelle l'agent est autorisé par le vendeur à « réaliser toutes actions utiles à la vente de mon bien »

- en matière de devoir de conseil le préjudice s'établit en estimant la perte de chance subie du fait de ne pas avoir reçu le conseil que le cocontractant était en droit d'attendre, et la garantie doit représenter 95 % du montant des condamnations qui seraient prononcées.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 04/03/2024, la société SCI PATRIMINAGE a présenté les demandes suivantes :

'JUGER la SCI [Localité 11] mal fondée en son appel,

En conséquence,

CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE le 3 octobre 2023 en ce qu'il a :

CONDAMNE la SCI [Localité 11] à verser à la SCI PATRIMINAGE la somme de TRENTE-NEUF MILLE QUATRE CENT-QUATRE-VINGTS EUROS ET SOIXANTE-ET-ONZE CENTIMES (39 480,71€) indexée sur l'indice BT 01, l'indice de référence étant celui en vigueur à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire ;

DÉBOUTE la SCI [Localité 11] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

RECEVOIR la SCI PATRIMINAGE en son appel incident et l'en DÉCLARER bien fondée,

En conséquence,

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a,

REJETTE la demande indemnitaire au titre des préjudices moraux et de jouissance formulée par la SCI PATRIMINAGE à l'encontre de la SCI [Localité 11] ;

CONDAMNE la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de SIX MILLE EUROS (6 000€) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI [Localité 11] aux entiers dépens ;

STATUANT à nouveau,

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 5.000,00 € TTC en réparation de son préjudice moral et de jouissance ;

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 8.000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront les honoraires de l'expert commis par ordonnance présidentielle et le coût du constat d'huissier du 28 mars 2019 ;

En tous les cas,

REJETER les demandes de la SCI [Localité 11] ;

DIRE et JUGER que l'immeuble acquis par la SCI PATRIMINAGE est affecté de vices cachés dont la gravité est telle qu'elle en aurait acquis un moindre coût si elle les avait connus ;

DIRE que la SCI [Localité 11] avait une parfaite connaissance du vice ; ECARTER la clause exonératoire de responsabilité ;

DIRE et JUGER que la restitution du prix correspondra au coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices tels qu'arbitrés par l'expert ;

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 39.480,71 € TTC au titre de la réfaction du mur arrière de l'immeuble et des études préalables;

DIRE que cette somme sera indexée sur l'indice BT 01, l'indice de référence étant celui en vigueur à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire, soit le 29 octobre 2021 ;

Dans l'hypothèse où la Cour infirmerait le jugement entrepris sur l'existence des vices cachés et l'opposabilité à la SCI PATRIMINAGE de la clause élusive de responsabilité,

DIRE et JUGER que la SCI [Localité 11] a dissimulé intentionnellement à la SCI PATRIMINAGE des informations dont elle connaissait le caractère déterminant pour l'autre partie ;

En conséquence,

JUGER qu'elle a engagé sa responsabilité délictuelle sur le fondement de l'article 1240 du code civil ;

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 39.480,71 € TTC à titre de dommages et intérêts pour la réfaction du mur arrière de l'immeuble et des études préalables;

DIRE que cette somme sera indexée sur l'indice BT 01, l'indice de référence étant celui en vigueur à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire, soit le 29 octobre 2021 ;

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 5.000,00 € TTC en réparation de son préjudice moral et de jouissance ;

En tout état de cause,

CONDAMNER la SCI [Localité 11] à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 4.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

A l'appui de ses prétentions, la société SCI PATRIMINAGE soutient notamment que :

- sitôt après son acquisition, la SCI PATRIMINAGE a découvert des désordres affectant l'ensemble immobilier, dont certains revêtent un caractère de danger manifeste.

- le 28 mars 2019, la SCI PATRIMINAGE a fait dresser un procès-verbal de constat de l'état de l'ensemble immobilier. Elle a mandaté la société APAVE afin de procéder à un diagnostic de l'ouvrage et plus particulièrement de son mur arrière.

- sur la qualification de vendeur professionnel, la Cour de Cassation considère qu'une SCI dont l'objet social est en rapport direct avec l'acte accompli est un contractant professionnel, y compris si elle a été constituée par un particulier, pour une opération unique visant à satisfaire ses besoins personnels. Et l'opération réalisée entre dans son objet social.

Tant pour la SCI [Localité 11] que pour la SCI PATRIMINAGE, la vente contractée entre les parties, est en rapport direct avec l'objet social de ces deux sociétés.

Comme retenu par le tribunal, la vente du bien immobilier litigieux ayant été conclue entre deux professionnels présentant une identité de spécialité, la clause exclusive de garantie prend effet et la SCI [Localité 11] ne peut répondre que des vices dont elle a eu connaissance.

- or la voisine Mme [S] a interpellé la SCI [Localité 11] à plusieurs reprises depuis au moins l'année 2014, selon son courrier du 6 août 2017, et peu importe qu'elle se soit méprise sur la gravité des désordres.

A aucun moment, la SCI [Localité 11] et la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON n'ont informé la SCI PATRIMINAGE de l'état très inquiétant du mur arrière.

- la SCI [Localité 11] ne peut sérieusement soutenir que les dégradations qu'elle a pu elle-même constater puisqu'elle s'est rendue sur place, n'emportaient aucune gravité.

Il lui appartenait de prendre les mesures qui s'imposaient pour protéger la propriété voisine et sauvegarder le mur qui menaçait ruine.

Dans ces conditions, il est totalement incompréhensible qu'elle ait tu cette information à son acheteur, la SCI PATRIMINAGE.

- s'agissant de la fissure verticale, l'expert judiciaire a relevé que celle-ci existait depuis octobre 2016 comme il en est attesté par une photographie jointe au SMS de Madame [S] à M. [N] du 21 octobre 2016.

Ce n'est pas parce que la SCI [Localité 11] n'a pas réalisé l'importance de ce désordre, qu'elle n'a pas vu la fissure et la connaissance du vice par le vendeur n'emporte pas celle de ses conséquences, ni de sa gravité.

- la SCI [Localité 11] ne peut opposer à la SCI PATRIMINAGE la clause de non garantie, ni alléguer d'une exclusion partielle de sa garantie.

- la SCI PATRIMINAGE s'est donc engagée en toute conscience des travaux à réaliser pour remettre en état l'immeuble et a fait établir des devis, mais aucun doute n'a été émis sur l'état du mur arrière dont il lui a été dit qu'il était en bon état et ne nécessitait aucuns travaux.

Elle n'avait donc aucune raison d'effectuer des recherches au cadastre ou sur GOOGLE EARTH

- la mention dans le procès-verbal de l'agence ORPI du 19 mars 2018 qu'il convient de prendre rendez-vous avec Madame [S] pour photographier le mur de la résidence, placé au même niveau que « Monsieur [I] s'engage à réparer le trou derrière la porte d'entrée crée par la poignée » au paragraphe QUESTIONS DIVERSES n'était certainement pas de nature à alerter la SCI PATRIMINAGE.

- en outre, l'état du mur pignon dont parle l'expert, visible depuis la [Adresse 13] et qui n'avait pas besoin d'être conforté ne donne aucune indication sur celui du mur arrière qui n'était pas visible..

La SCI PATRIMINAGE n'a commis aucune négligence et s'est livrée à un examen attentif de l'immeuble en requérant les services de professionnels qui ont établi des devis et en questionnant son vendeur et son mandataire

- le mur arrière de l'immeuble vendu n'est visible et accessible que de la propriété de Madame [S]. Il était donc impossible de constater son état lors de la visite au moyen des diligences minimales que doit effectuer tout acquéreur, s'agissant de vérifications élémentaires.

La dégradation du mur arrière en ce qu'il n'était pas accessible constitue bien un vice caché.

- sur les conséquences de la garantie des vices cachés, les défauts sont graves et nécessitent un traitement curatif. Compte-tenu de l'urgence à sécuriser les lieux, la SCI PATRIMINAGE a fait réaliser les travaux, comme il en est justifié. La SCI [Localité 11] sera donc condamnée à payer à la SCI PATRIMINAGE la somme de 39.480,71 € TTC avec indexation, par confirmation du jugement.

- la SCI PATRIMINAGE démontre suffisamment l'existence des préjudices moraux et de jouissance dont elle fait état. Elle n'avait pas prévu la réalisation de travaux de reconstruction et les sujétions auxquelles elle a été exposée avec le risque d'effondrement du mur, la somme de 5000 € étant réclamée.

- à titre subsidiaire, la SCI PATRIMINAGE est fondée à rechercher la responsabilité délictuelle de la SCI [Localité 11] au titre de sa réticence dolosive, tant il est patent qu'elle devait livrer les informations déterminantes dont elle disposait et constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. Or, la SCI [Localité 11] a tu l'information qu'elle détenait sur l'état réel du mur arrière de l'immeuble donnant dans la cour de Madame [S].

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 30/04/2024, la société SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a présenté les demandes suivantes :

'Vu les articles 1991 et suivants du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

- VOIR CONFIRMER le jugement du 03 octobre 2023 du tribunal judiciaire de LA ROCHELLE dans toutes ses dispositions,

Ainsi,

- DÉBOUTER la SCI [Localité 11] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Par suite,

- CONDAMNER la SCI [Localité 11] à verser à la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON la somme de 4 000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- CONDAMNER la SCI [Localité 11] aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Marion LE LAIN, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile'.

A l'appui de ses prétentions, la société SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON soutient notamment que :

- la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON, mandataire de la SCI [Localité 11], a assuré l'entremise.

Postérieurement à la vente, la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a été alertée par un courriel du 18 mars 2019 de la SCI [S] propriétaire de l'immeuble voisin, sur le mauvais état du pignon « arrière ».

- la SCI [Localité 11] n'a jamais informé la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON d'une quelconque dégradation du mur de l'ensemble immobilier, inaccessible autrement que par l'immeuble de la SCI [S].

- la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a aussitôt communiqué cette information au vendeur et à l'acquéreur ainsi qu'à leurs notaires respectifs par courriel du 19 mars 2019 et une réunion au contradictoire de la SCI [Localité 11], de la SCI PATRIMINAGE et de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a été organisée en mars 2019, en présence de la société RIPEAU MARTEL.

- n'ignorant pas les désordres affectant le pignon de l'immeuble, la SCI [Localité 11] s'est engagée à « exécuter les travaux nécessaires » et a validé le devis établi par la société RIPEAU MARTEL d'un montant de 2 977,82 euros TTC.

- la responsabilité d'un agent immobilier ne peut être engagée du chef des vices apparents dont l'acquéreur a pu se convaincre lui-même ou du chef de vices cachés que seul l'usage du bien, ou des investigations réalisées par un homme de l'art, peuvent révéler.

- l'agent immobilier ne manque pas à son devoir de conseil lorsque les désordres affectant le bien vendu n'étaient pas apparents lors de la transaction et que la preuve n'est pas rapportée qu'il a eu connaissance des vices cachés.

- l'agent immobilier n'a pas à vérifier l'absence de vices cachés.

Il incombe aux acquéreurs de rapporter la preuve que l'agent immobilier connaissait une information déterminante sans lui en avoir fait part.

- un agent immobilier n'est pas un professionnel du bâtiment ou de la construction. Il n'a qu'un rôle d'entremise dans l'acte de vente et n'est pas présumé devoir posséder les compétences techniques d'un professionnel.

En outre, il n'est pas chargé d'une mission d'investigation.

- en l'espèce, la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON n'avait pas à mener d'investigations techniques dont elle n'en a pas les compétences, alors que les désordres affectant le mur arrière de l'ensemble immobilier n'étaient pas apparents au moment de la vente. Le pignon est inaccessible sauf à accéder à la cour intérieure d'une propriété privée (cadastré LE [Cadastre 3]) appartenant à la SCI [S] alors que la porte d'accès à la cour de la SCI [S] ne dispose pas de sonnette, ni d'interphone.

- l'agent immobilier n'avait pu matériellement, en raison de la configuration des lieux, se convaincre de l'existence de désordres, alors que la SCI [Localité 11] était informée du mauvais état du mur depuis -a minima- 2014 et a tu cette information, n'ayant jamais informé la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON.

- aux termes de la première réunion d'expertise judiciaire, l'expert judiciaire a demandé à la SCI [S] d'interdire l'accès à sa cour.

- la SCI [Localité 11] fait montre d'une parfaite mauvaise foi et reproche à l'agent immobilier de ne pas l'avoir contrôlée et ne pas l'avoir empêchée de nuire.

La responsabilité de l'agent immobilier peut ne pas être engagée si son mandant est à l'origine de la faute commise et n'a pas coopéré de manière efficace dans la réalisation du mandat.

- la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON justifie de sa parfaite bonne foi et a immédiatement réagi alors que la vente était déjà conclue.

- la SCI [Localité 11] a agi en qualité de professionnel de l'immobilier, dans le cadre de son objet social, alors que l'associé-gérant de la SCI [Localité 11], M. [R] [N] détient et gère plusieurs sociétés civiles immobilières ayant un objet social similaire : la SCI AVESCO et la SCI LUGNY.

- ainsi, aucune faute ne saurait être reprochée à l'encontre de l'agent immobilier.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 17/02/2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande formée au titre de la garantie des vices cachés :

L'article 1134 ancien du code civil dispose que :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

Le principe de ces dispositions est repris désormais aux articles 1103 du code civil : ' les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits,' et 1104 du code civil 'les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi'.

L'article 1641 du code civil dispose que 'le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'.

L'article 1642 du code civil précise : 'le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même'.

L'article 1643 indique que le vendeur 'est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie'.

L'article 1644 du code civil dispose : 'Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix'.

L'article 1645 du même code précise que 'si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.'

L'article 1646 dispose que 'si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente'.

En l'espèce, la clause suivante est stipulée à l'acte de vente : 'Le vendeur ne sera pas tenu à la garantie des vices apparents ou cachés pouvant affecter le sol, le sous-sol ou les bâtiments, à l'exception toutefois et le cas échéant, de ce qui est dit ci-dessus sous le titre « Environnement ' Santé publique ». Toutefois, il est ici précisé que cette exonération de la garantie des vices cachés ne peut s'appliquer aux défauts de la chose vendue dont le vendeur a déjà connaissance'.

Or, le 18 mars 2019, quelques jours après la vente intervenue le 12 mars 2019, Mme [S], voisine arrière de l'immeuble cédé, a contacté la société GAUDUCHON pour lui indiquer une « nouvelle dégradation du mur latéral et arrière de l'immeuble (chute d'une plaque de crépi 30 x 30 cm et d'ardoises).

La SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON a alors communiqué cette information au vendeur et à l'acquéreur ainsi qu'à leurs notaires respectifs par courriel du 19 mars 2019.

Si une réunion s'est tenue fin mars 2019 au contradictoire de la SCI [Localité 11], de la SCI PATRIMINAGE et de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON, en présence de la société RIPEAU MARTEL, un accord n'a pu toutefois être trouvé entre les parties, la SCI PATRIMINAGE ayant fait dresser un procès-verbal de constat de l'état de l'ensemble immobilier le 28 mars 2019 puis ayant mandaté la société APAVE qui a dressé rapport le 24 juin 2019, afin de procéder à un diagnostic de l'ouvrage et plus particulièrement de son mur arrière.

Il convient de rappeler ici les principales constatations du rapport d'expertise judiciaire du 29 octobre 2021 :

' Mur arrière parcelle n°[Cadastre 2] (SCI PATRIMINAGE n°[Adresse 8]) :

- Une fissure/lézarde est présente sur la hauteur de l'excroissance /contrefort (Photos 5 à 10, 14, 16, 17).

- Des fissures/lézardes sont présentes à certains endroits (Photos 16 et 17), essentiellement sur le volume en excroissance.

- Une ossature métallique dégradée par la corrosion prend appui sur le mur appartenant à la SCI PATRIMINAGE et surplombe la cour de la SCI [S] (Photos 5, 14, ...).

- Des moellons sont tombés. La zone concerne une surface de quelques m2 (Photos 3, 8, 14, 15).

- Des zones ne sont plus protégées par l'enduit vétuste tombé au sol et/ou dégradé par le temps et les intempéries (Photos 2, 3, ...18).

- A certains endroits les moellons ne sont plus jointoyés.

- Des plaques d'enduit partiellement décollées menacent de tomber.

- La sur épaisseur inclinée du mur arrière sur laquelle les pigeons viennent se poser est mal protégée (en tête). Un remplissage en mortier de ciment très dégradé sur lequel étaient probablement fixées des ardoises (comme sur le mur pignon) semble avoir été utilisé pour protéger le mur des infiltrations d'eau (Photos 1, 6 et 19).

...

sans intervention les désordres constatés sur le mur arrière vont inévitablement s'aggraver... portent atteinte à la solidité de l'ouvrage ... en effet le mur arrière du bâtiment est un élément essentiel de la structure. (...) Il existe un risque de chute de matériaux (moellons, enduits) pour les utilisateurs de la cour (parcelle [Cadastre 3]) appartenant à la SCI [S] ... des chutes d'enduit sont possibles il existe là aussi, mais dans une moindre mesure un risque pour les utilisateurs de la cour (parcelle [Cadastre 3]). A ce jour les désordres constatés ne portent pas encore atteinte à la solidité de l'ouvrage mais des travaux d'entretien doivent être réalisés sans attendre...

Selon dire de Mme [S] et de M. [N] lui-même, ce dernier avait constaté l'état du mur dès 2014. Puis en octobre 2016, Mme [S] s'adressait à nouveau à M. [N] en évoquant l'état du mur. Ce point est confirmé par les sms (comportant 3 photos) de Mme [S] à M. [N], transmis à l'expert de justice par Mme [S] le 11 septembre 2020 suite à la 1ére réunion contradictoire (Voir pièces jointes).

L'état du mur était donc connu de M. [N] (SCI [Localité 11], vendeur) bien avant le jour de la vente en 2019. Cependant l'autorisation d'accès à la cour de la SCI [S] aurait été nécessaire préalablement à la vente afin que le Cabinet IMMOBILIER GAUDUCHON et la SCI PATRIMINAGE puissent apprécier visuellement l'état du mur... Les désordres constatés par l'expert de Justice sur le mur arrière étaient donc parfaitement visibles au jour de la vente du 12 mars 2019...

L'autorisation d'accès à la cour de la SCI [S] ou à défaut l'autorisation d'accès à une propriété voisine était nécessaire afin de pouvoir apprécier l'état du mur arrière au jour de la vente.

Il convient de rappeler que le mur arrière n'est pas visible depuis le domaine public...'

Est ainsi démontrée l'existence de désordres importants sur le mur arrière de l'immeuble cadastré LE n°[Cadastre 2] appartenant à la SCI PATRIMINAGE, notamment : des fissures multiples dont l'une apparaît sur la hauteur du contrefort ; une ossature métallique dégradée par la corrosion ; une chute de moellons ; des zones non protégées par l'enduit vétusté tombé au sol et/ou dégradé par le temps et les intempéries ; des moellons non jointoyés et des plaques d'enduit partiellement décollées qui menacent de tomber.

Il résulte de ces éléments précisément circonstanciés et non contredits par les productions que le vendeur du bien, la SCI [Localité 11] avait pleinement connaissance de l'existence des vices de l'immeuble tels que constatés par l'expert, cela bien antérieurement à la vente.

Elle connaissait d'une part l'existence de dégradations d'enduit et de chute de pierres survenues sur la propriété de la SCI mais d'autre part également l'existence de la fissure - même en germe - qui existait selon elle lorsqu'elle avait acquis l'immeuble, et dont Mme [S] avait transmis le 21 octobre 2016 à 19H55 à M. [G] [N] la photographie examinée par l'expert.

Au surplus, la SCI [S] informait M. [G] [N] et la SCI [Localité 11] par courrier LRAR du 06 août 2017 de ce que 'la dégradation de ce mur se poursuit : il y a maintenant plusieurs trous profonds qui se creusent un peu plus chaque jour, les eaux de ruissellement s'infiltrent entre les pierres et la dégradation des matérieux s'accélèrent, des pierres tombent et de nouveaux trous apparaissent...'

Indépendamment des conséquences des vices en termes de nécessité de réparation, la SCI [Localité 11] ne démontre nullement en avoir révélé l'existence à son vendeur ni à l'agent immobilier mandaté, alors même qu'elle ne pouvait ignorer ses obligations de loyauté, ayant qualité de professionnelle au regard de son objet social, soit : 'L'acquisition de biens immobiliers. La propriété, la gestion, l'administration et la disposition de biens dont elle pourrait devenir propriétaire par la suite par voie d'acquisition, échanges, apport ou autrement, tous placements de capitaux sous toutes ses formes y compris la souscription ou l'acquisition de toutes actions ou obligations, parts sociales. Et en général toutes opérations ayant trait à l'objet ci-dessus défini, en tous pays, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société '.

Il doit être retenu en l'espèce que la vente du bien immobilier litigieux a été conclue entre deux professionnels présentant une identité de spécialité.

Si d'une part la SCI [Localité 11] ne peut se prévaloir de la clause exclusive de garantie dès lors qu'elle avait connaissance des vices avant la vente et ne les a pas révélés, la SCI PATRIMINAGE en qualité d'acquéreur professionnel ne supporte qu'une présomption de connaissance des vices décelables selon une diligence raisonnable.

Or, le mur arrière de l'immeuble vendu n'est visible et accessible que de la propriété de Mme [S] et il n'était donc pas possible de constater son état lors de la visite au moyen des diligences minimales que doit effectuer tout acquéreur, s'agissant de vérifications élémentaires, d'autant que les désordres ne lui étaient pas révélés par le vendeur.

Il doit être retenu que bien que le mur pignon Sud-Est visible présentait des défauts d'une ampleur minime en comparaison des désordres du mur arrière litigieux, il ne pouvait en être déduit qu'existaient des défauts du mur arrière, indécelables par simple examen visuel du mur pignon Sud-Est.

En outre, si la SCI PATRIMINAGE a pu avoir connaissance avant la vente de l'existence de la résolution n° 12 du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires en date du 19 mars 2018, puisque l'acquéreur reconnaît en page 26 de l'acte de vente en avoir eu parfaite connaissance, le simple fait que rendez-vous devait être pris avec Mme [S] afin de prendre des photos du mur arrière de la résidence ne permettait pas de révéler l'existence d'un vice apparent, dès lors qu'il n'était pas fait mention de la nature de la dégradation du mur et s'agissant du mur en copropriété cadastré LE n°[Cadastre 1].

Le jugement doit être en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu que les vices étaient cachés au jour de la vente à la SCI PATRIMINAGE, la SCI [Localité 11] qui les connaissait en devant entière garantie et devant être condamnée à verser à la SCI PATRIMINAGE une somme de 39 480, 71 euros, indexée sur l'indice BT 01, tel que justement retenu par le tribunal au regard du montant réparatoire déterminé par l'expert judiciaire et du montant des factures acquittées au titre des réparations nécessaires et urgentes.

Sur la demande indemnitaire de la SCI PATRIMINAGE à l'encontre de la SCI [Localité 11] au titre du préjudice moral et de jouissance :

Si la réparation des désordres justifie le versement des sommes nécessaires à cette réparation, la SCI PATRIMINAGE, même confrontée dans les jours suivant la vente à la découverte de désordres qu'elle n'avait pas soupçonné, ne justifie pas d'un préjudice de jouissance personnel ou moral qu'elle allègue, indépendamment des frais de réparation qu'elle ne supporte pas.

La SCI PATRIMINAGE sera en conséquence déboutée de la demande formée à ce titre, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la demande en garantie de la SCI [Localité 11] à l'encontre de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON :

Si l'agent immobilier est un professionnel de la vente immobilière, il n'est pas un professionnel du bâtiment ou de la construction. Il ne possède donc pas les compétences techniques d'un professionnel et n'est pas chargé de mesures d'investigation en matière technique.

Sa responsabilité ne peut donc être engagée du chef de vices apparents dont l'acquéreur a pu se convaincre lui-même ou du fait de vices cachés que seul l'usage du bien, ou des investigations réalisées par un homme de l'art, pouvaient révéler.

Il ne peut au surplus lui être reproché un manquement à son devoir de conseil lorsque les désordres affectant le bien vendu n'étaient pas apparents et lorsque la preuve n'est pas rapportée qu'il a eu connaissance des vices cachés.

En l'espèce, les désordres affectant le mur arrière de l'ensemble immobilier n'étaient pas apparents au moment de la vente, dès lors que le pignon est inaccessible sauf à accéder à la cour intérieure d'une propriété privée appartenant à la SCI [S], étant relevé que la porte d'accès à la cour de la SCI [S] ne dispose pas de sonnette, ni d'interphone.

La SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON dont le simple mandat ne stipulait pas une obligation de vérification de l'entier état du bâtiment objet de la vente ne pouvait, en raison de la configuration des lieux, réaliser l'existence de désordres cachés, alors que son mandant la SCI [Localité 11] était informée du mauvais état du mur depuis 2014 et ne révélait pas lui-même cette information.

La demande en garantie formulée par la SCI [Localité 11] à l'encontre de la SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON doit être en conséquence rejetée par confirmation du jugement entrepris.

Sur les dépens :

Les chefs de décision du jugement afférents aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile sont pertinents et adaptés, et seront confirmés.

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de la SCI [Localité 11].

Il sera fait application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Marion LE LAIN, avocat.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner la société SCI [Localité 11] à payer à la société SCI PATRIMINAGE et à la société SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON les sommes fixées au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, le surplus des demandes étant écarté.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE la société SCI [Localité 11] à payer à la société SCI PATRIMINAGE la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la société SCI [Localité 11] à payer à la société SARL CABINET IMMOBILIER GAUDUCHON la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la société SCI [Localité 11] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Marion LE LAIN, avocat.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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