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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-3, 26 septembre 2025, n° 21/02087

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

FINANCIERE TOPVER (S.A.S.), LE LAMPARO (S.A.R.L.)

Défendeur :

SOLISO EUROPE (S.A.S.), Société ELITE INSURANCE COMPANY LIMITED, Société ALPHA INSURANCE

CA Aix-en-Provence n° 21/02087

25 septembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 26 SEPTEMBRE 2025

N° 2025/178

Rôle N° RG 21/02087 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG54L

S.A.S. FINANCIERE TOPVER

S.A.R.L. LE LAMPARO

C/

[Y], [J] [A]

S.A.S. SOLISO EUROPE

Société ELITE INSURANCE COMPANY LIMITED

Société ALPHA INSURANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Eric AGNETTI

Me Elie LIONS

Me Caroline PAYEN

Décision déférée à la cour :

Jugement du tribunal de commerce de NICE en date du 28 janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 2019F00328.

APPELANTES

S.A.S. FINANCIERE TOPVER agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège

sis [Adresse 2]

représentée par Me Eric AGNETTI, avocat au barreau de NICE

S.A.R.L. LE LAMPARO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

sis [Adresse 4]

représentée par Me Elie LIONS, avocat au barreau de NICE

INTIMES

S.A.S. SOLISO EUROPE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

sis [Adresse 1]

représentée par Me Caroline PAYEN de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Beverly CAMBIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et assistée de Me Florent LUCAS de la SELARL CVS, avocat au barreau de NANTES, plaidant

Société ELITE INSURANCE COMPANY LIMITED représentée par M. [Y] [J] [A], administrateur judiciaire

Signification déclaration d'appel et conclusions le 11 mai 2021 : PVRI

défaillante

Société ALPHA INSURANCE

Signification déclaration d'appel et conclusions le 10 mai 2021 : transmission aux autorités étrangères pour signification

défaillante

Monsieur [Y], [J] [A] nommé conjointement avec M. [C], [O], [R] [W], tous deux ès qualités d'administrateurs judiciaires de la société ELITE INSURANCE COMPAGNY LIMITED

Signification déclaration d'appel et conclusions le 12 mai 2021 : transmission aux autorités étrangères pour signification

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 juin 2025 en audience publique.

Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Marianne FEBVRE, présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La cour était composée de :

Madame Marianne FEBVRE, présidente rapporteure,

Madame Béatrice MARS, conseillère,

Madame Florence TANGUY, conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Flavie DRILHON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2025.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2025,

Signé par Marianne FEBVRE, présidente et Christiane GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Bénéficiaire d'une convention portant délégation de service public, la société Le Lamparo exploite un établissement d'une surface totale de 783 m2 (500 m2 de plage et 283 m2 de bâtiments et terrasses) sur la plage naturelle du 'Marquet' à [Localité 3].

Par le biais d'un devis d'un montant de 115 000 euros HT (138 000 euros TTC) accepté le 29 avril 2015, cette société a commandé à la société Financière Topver l'installation d'une pergola bioclimatique fabriquée par la société Soliso Europe, effectivement installée au début du mois de juillet 2025 (facturée le 8 juillet 2015).

Neuf mois plus tard, par un courrier du 30 avril 2016, la société Le Lamparo a fait part à la société Financière Topver des différents problèmes techniques suivants :

- malfaçons (luminaires défectueux, barre d'entrée dévissée),

- toile d'un store déchirée,

- pannes récurrentes du mécanisme d'ouverture-fermeture des toitures avec pour conséquence un blocage du toit.

Une réunion a été organisée sur place le 26 mai 2016, en présence du fournisseur et du fabricant.

Par un courrier du 22 juin 2016 adressé au premier, la société Le Lamparo a déploré l'absence de toute réparation et dénoncé l'apparition de nouveaux désordres :

- toile screen supérieure bloquée et déchirée,

- 4 toitures sur 6 bloquées et donc inutilisables.

Le 22 juin 2016, elle a également fait établir un procès-verbal de constat dénoncé à la société Financière Topver le 24 juin suivant.

Par acte du 23 juin 2017, la société Le Lamparo a sollicité en référé l'organisation d'une expertise auprès du président du tribunal de commerce de Nice qui a désigné M. [X] [M] par une ordonnance en date du 25 juillet 2017.

Les opérations d'expertise qui visaient initialement les sociétés Financière Topver et Soliso Europe ont ensuite été déclarées communes aux différents fabricants des pièces composant l'ouvrage ainsi qu'aux sociétés Elite Insurance Company Limited et Alpha Assurances, respectivement assureur décennal et assureur responsabilité civile de la société Financière Topver, par une nouvelle ordonnance du 27 mars 2018.

M. [M] a déposé son rapport le 21 janvier 2019.

En lecture de ce rapport et par actes des 23 et 29 mai 2019 et 11 juin 2019 visant les dispositions de l'article 1792 du code civil et, subsidiairement, celles des articles 1604 et 1245 du code civil, la société Le Lamparo a assigné la société Financière Topver, la société Soliso Europe ainsi que les sociétés Elite Insurance Company Limited et Alpha Assurances pour obtenir le paiement des sommes suivantes :

- 115 000 euros HT, avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation) au titre de son préjudice matériel,

- 20 000 euros pour son préjudice de jouissance,

- 10 000 euros au titre de son préjudice d'agrément,

- 10 000 euros pour son préjudice esthétique,

- 10 000 euros au titre de son préjudice d'image,

- 82 070 pour son préjudice financier.

Par jugement en date du 28 janvier 2021, le tribunal de commerce de Nice saisi a :

- prononcé la résolution du contrat d'entreprise conclu entre la société Le Lamparo et la société Financière Topver,

- condamné solidairement la société Financière Topver, la société Elite Insurance Company Limited et la société Alpha Insurance à

- payer à la société Le Lamparo la somme de 115 000 euros hors taxes assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,

- procéder à l'enlèvement de la structure existante dans sa totalité, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement,

- débouté la société Le Lamparo de ses demandes d'indemnisation au titre de préjudice de jouissance, d'agrément, d'esthétique, d'image et financier,

- débouté société Elite Insurance Company Limited et la société Alpha Insurance de l'ensemble de leurs demandes,

- débouté la société Le Lamparo de ses demandes à l'encontre de la société Soliso Europe,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné solidairement la société Financière Topver, la société Elite Insurance Company Limited et la société Alpha Insurance à payer à la société Le Lamparo la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire avancés par la société Le Lamparo et le coût du procès-verbal de constat d'huissier du 22 juin 2016,

- liquidé les dépens du jugement à la somme de 126,72 euros.

La cour est saisie des appels successifs de :

- la société Le Lamparo, par une déclaration en date du 11 février 2021 intimant la société Financière Topver et la société Soliso Europe (RG 21/02087),

- la société Financière Topver, par deux déclarations successives des 18 et 25 février 2021 intimant les sociétés Le Lamparo, Soliso Europe, Elite Insurance et Alpha Insurance ainsi que les administrateurs judiciaires de la société Elite Insurance (RG 21/02551 et 21/02941).

Ces procédures ont fait l'objet de jonctions dans le cadre de la mise en état par deux ordonnances successives en date des 16 juin et 1er septembre 2021.

Vu les dernières conclusions, notifiées le 24 mars 2023, pour la société Le Lamparo qui demande à la cour en substance - à titre principal comme à titre subsidiaire - de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- prononcé la résolution du contrat d'entreprise conclu avec la société Financière Topver,

- condamné la société Financière Topver à lui payer la somme principale de 115 000 euros, une indemnité de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire avancés par la société Le Lamparo et le coût du procès-verbal de constat d'huissier du 22 juin 2016,

- le réformer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- condamner in solidum la société Financière Topver et la société Soliso Europe à :

* lui rembourser la somme de 115 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé du 23 mai 2019,

* l'indemniser de ses préjudices en lui versant les sommes suivantes :

- 20 000 euros pour son préjudice de jouissance,

- 10 000 euros au titre de son préjudice d'agrément,

- 10 000 euros pour son préjudice esthétique,

- 10 000 euros au titre de son préjudice d'image,

- 82 070 pour son préjudice financier,

* lui payer une indemnité de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, ceux dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, assortis au profit de Maître Elie Lions,

Vu les dernières conclusions notifiées le 26 mars 2025 pour la société Financière Topver, tendant à voir :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- déclarer la société Le Lamparo irrecevable en ses demandes à son encontre,

- débouter la société Le Lamparo de toutes ses demandes,

- condamner la société Le Lamparo ainsi que tout succombant au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Vu les uniques conclusions notifiées le 7 juillet 2021 pour la société Soliso Europe, aux fins de :

- confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société Le Lamparo de l'intégralité de ses demandes à son encontre,

- condamnation de la société Le Lamparo à lui payer une indemnité de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec droit de recouvrement au profit de la SCP Drujon D'Astros et Associés (Maître Caroline Payen),

Vu l'absence de constitution d'avocat pour les autres parties intimées, auxquelles la déclaration d'appel et les premières conclusions de la société Financière Topver ont été signifiées par des actes délivrés le 11 mai 2021 à la société Elite Insurance Company Limited à Gibraltar, le 12 mai 2021 à M. [Y] [J] [V], son liquidateur à Londres, et le 10 mai 2021 à la société Alpha Insurance en liquidation judiciaire au Danemark,

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 avril 2025,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites susvisées.

A l'issue de l'audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue le 26 septembre 2025 par mise à disposition au greffe.

SUR CE :

- Sur la recevabilité des demandes à l'encontre de la société Financière Topver

Cette société a formé appel principal du jugement par deux déclarations successives en date des 18 et 25 février 2021 (RG 21/02551 et 21/02941) et elle en a également relevé appel incident par le biais de ses premières conclusions notifiées le 10 mai 2021 dans l'instance ouverte sur l'appel de la société Le Lamparo (RG 21/02087).

Dans ces premières conclusions, comme dans ses dernières écritures qui saisissent la cour, elle fait valoir :

- qu'elle a bénéficié d'une procédure de sauvegarde par un jugement d'ouverture du 19 janvier 2017,

- que les travaux de dépose d'une ancienne pergola et d'installation de la nouvelle date du mois de juillet 2015, et ont donc été réalisés antérieurement,

- que la société Le Lamparo aurait dû déclarer sa créance, née de l'exécution défectueuse de ces travaux, dans les deux mois de la publication au Bodacc du jugement d'ouverture,

- qu'à défaut de déclaration entre les mains du mandataire judiciaire, Maître [Z] [L], cette créance lui est inopposable,

- que, par ailleurs, la société Le Lamparo ne pouvait l'assigner en paiement eu égard à la règle de l'interdiction des poursuites individuelles.

La société Le Lamparo n'a pas conclu dans les instances ouvertes sur les appels principaux de la société Financière Topver et, dans les dernières écritures qu'elle a notifiées le 24 mars 2023 dans l'instance RG 21/02087 (intitulées 'conclusions d'appelant'), elle ne répond pas sur la fin de non-recevoir de la société Financière Topver.

Il résulte effectivement de l'article L 622-21 du code de commerce que le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire interdit au créancier dont la créance est née antérieurement, d'agir en paiement de cette créance.

Cette interdiction constitue une fin de non-recevoir d'ordre public, qu'il appartient au juge de relever au besoin d'office. Toute action en paiement engagée postérieurement au jugement d'ouverture par un créancier antérieur est donc irrecevable.

Le créancier n'a d'autre choix que de se soumettre à la procédure de vérification et d'admission des créances devant le juge-commissaire, procédure dont l'étape préalable et obligatoire est la déclaration de créance entre les mains du mandataire - imposée par l'article L 622-24 du code de commerce - et ce, dans les deux mois qui suivent la publication du jugement d'ouverture assurée par l'insertion d'un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Boddac).

La créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure collective qui n'a pas été déclarée dans le délai prescrit est inopposable au débiteur pendant l'exécution du plan, faute d'avoir été déclarée dans les délais. Le créancier n'est donc pas recevable à agir en paiement et ce, peu important que la procédure se soit terminée par l'adoption d'un plan de redressement ou que le débiteur ait omis d'alerter ses créanciers de sa mise en redressement judiciaire (Com., 6 juin 2018, pourvoi n° 16-23.996, Bull. 2018, IV, n° 69).

Par ailleurs, une créance née de la garantie des vices cachés a son origine au jour de la conclusion du contrat de vente et non pas à celui de la révélation du vice, tandis que celle née de l'exécution incomplète ou défectueuse de travaux est antérieure au jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire si elle trouve son origine dans des prestations effectuées avant ce jugement.

En l'espèce, il résulte des explications concordantes des parties ainsi que des pièces versées aux débats que la société Financière Topver a réalisé les travaux d'installation de la pergola litigieuse au début du mois de juillet 2025, sur la base d'un devis du 29 avril 2015 et ses travaux ont donné lieu à l'établissement le 8 juillet 2015 d'une facture que la société Le Lamparo affirme avoir intégralement acquittée.

Or, la société Financière Tover justifie avoir bénéficié d'une procédure de sauvegarde par un jugement d'ouverture du 19 janvier 2017, publié au Bodac le 1er février 2017, puis d'un jugement arrêtant un plan de sauvegarde en date du 5 décembre 2018. Par ailleurs, au vu de la liste déposée le 10 janvier 2018 par la SCP BTSG2 désigné en qualité de mandataire judiciaire, il est établi que la société Le Lamparo n'a pas déclaré sa créance.

Les demandes financières dont elle fait l'objet dans le cadre de la présente procédure sont donc irrecevables, peu important que la difficulté n'ait pas été évoquée en première instance.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Financière Topver à payer diverses sommes à la société Le Lamparo ainsi qu'à procéder à l'enlèvement de la structure sous astreinte.

- Sur les demandes à l'encontre de la société Soliso

Au soutien de son appel, la société Le Lamparo fait valoir que :

- les désordres ne relèvent pas uniquement d'un défaut de mise en 'uvre et d'une mauvaise installation, mais aussi d'une non-conformité de l'ouvrage (quant à l'étanchéité de l'air ainsi qu'en terme de « perméabilité à l'eau »),

- selon l'expert, la société Soliso Europe engage sa responsabilité « en ayant conçu et assemblé des matériaux sans pouvoir en justifier la compatibilité entre « chaque partie de l'ouvrage », la pergola fournie n'étant par ailleurs pas conforme à la directive européenne sur les produits de la construction,

- la société Soliso Europe doit donc être condamnée solidairement avec la société Financière Topver à l'indemniser des préjudices subis,

- si la cour écartait la qualification d'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, elle retiendrait la responsabilité de l'installateur et du fabricant sur le fondement des articles 1604 et 1245 du code civil (obligation de délivrance conforme de la chose vendue ; responsabilité des produits défectueux),

- s'agissant de ses préjudices : elle a été contrainte de faire procéder à l'enlèvement de la pergola et d'acquérir un nouvel ouvrage, conforme et correctement installé ; elle justifie d'un préjudice de jouissance, caractérisé par l'expert qui a retenu que « Les lumières leds, par leur fonctionnement intermittent, impactent le confort visuel des clients et du personnel de l'établissement en cours de service » et elle a été privée d'une jouissance paisible pendant 4 ans, jusqu'à ce qu'elle fasse enlever l'ouvrage et installer la nouvelle pergola ; elle justifie d'un préjudice d'agrément compte tenu des mauvaises conditions de travail de son personnel, d'un préjudice esthétique (luminaires défectueux, barre d'entrée dévissée, toiles déchirées, traces de corrosion sur l'ossature notamment ; elle a souffert d'une baisse de son image de marque auprès de sa clientèle aisée et habituée à un certain confort et elle a subi une baisse de son chiffre d'affaires et préjudice financier qu'elle évalue à 10% de son chiffre d'affaires sur les 4 exercices comptables concernés.

La société Soliso Europe objecte que :

- la société Le Lamparo a été indemnisée par son assureur du coût du remplacement de la pergola suite à la tempête Adrian des 29 et 30 octobre 2018 et l'arrêté de catastrophe naturelle du 15 avril 2019, qui lui a permis de prétendre au paiement d'une indemnité de 125 000 euros,

- c'est un défaut d'ancrage qui est à l'origine des désordres, relevant de la responsabilité exclusive de la société Financière Topver, par référence aux constatations de l'expert,

- il n'existe aucune directive « produit » ou réglementation relative aux pergolas, qui ne sont pas des vérandas,

- les préjudices immatériels invoqués ne sont pas justifiés.

Dans son rapport du 21 janvier 2019, dans lequel il est conclu à « une absence de reprise possible de l'ouvrage et à la nécessité d'un remplacement total », l'expert a mis en évidence que :

- « L'ancrage en zone de sol est indéfinissable » (p.13).

- « Aucun matériau isolant n'a été injecté afin de (protéger les lames en feuillard d'aluminium) de la dilatation provoquée par les apports solaires » ; « Il s'agit d'un ensemble composé de 3 pergolas reliées entre elles par une technique non prévue à la conception de produits similaires » ; « Des aménagements ont été réalisés après coup » ; « Aucun document de certification ne nous a été communiqué » ; « Les capotages en zone de faîtes entre les modules ont été étanchés avec des techniques non courantes matérialisées par des protections additionnelles et des calfeutrements et platras de mastics exécutés en contradiction avec les préconisations des fournisseurs SNJF » ; « Des fissurations confirment une instabilité de l'ouvrage en situation » (p. 21).

- « Constituées avec des matériaux hétérogènes par son fabricant Soliso, (les trois pergolas aboutées) ont été adaptées sur chantier par l'équipe de pose de la société Financière Topver » ; « L'ossature (...) est affectée par des défauts de géométrie. Ils prennent leur origine dans une instabilité en zone de sol issue du poids propre de la pergola (800 kg). Ce désordre est matérialisé par l'écrasement du plancher en bois » (p.22).

- « Les défauts de géométrie provoquent un effort de triangulation, lors des manouvres les toiles se déchirent, la zone d'accroche sort de son logement, la rigidité de la toile n'étant plus maintenue par la rigidité du PVC » ; « (une) adaptation n'était pas prévue à l'origine » (p.23).

- « Les liaisons en tête et pied des poteaux et chevrons de rives d'ossature ont fait l'objet d'adaptation approximative avec des manchons et des capots inadaptés » (p.27).

- « En période de dépression atmosphérique et de lors de leurs déploiement les toiles des stores sont en contact parasitaire avec les profilés qu'ils équipent : elles se rayent et se déchirent » ; « Non-conformité des revêtements de protection contre la corrosion consécutive à une exposition au milieu salin issue d'un indice de protection insuffisant et des profilés de capotages additionnels inadaptés » ; « Le choix de teintes sombres exposées dans le midi de la France est fortement déconseillé, le RAL NOIR a un coefficient d'absorption calorifique supérieur aux teintes claires » (p.27).

Les conclusions de M. [M] sont les suivantes : « Les origines de ces dysfonctionnements proviennent de lames voilées et d'ossatures déformées par un effet bilame et une instabilité de la structure au regard du poids propre de la perqola (800 KG) sur une terrasse bois qui s'est déformée peu de temps après (...) La société Topver devait ancrer ses poteaux sur une fondation en béton précontraint. Les examens préalables relèvent de la responsabilité de l'exécutant définissant ou pas leur faisabilité de mise en 'uvre. A défaut, il y a acceptation implicite du support. » (p. 37).

Contrairement à ce qu'affirme la société Le Lamparo, il n'est pas démontré que la société Soliso Europe soit intervenue dans l'installation de l'ouvrage ou dans l'assemblage des matériaux hétérogènes fournis, ni dans le choix du coloris inadapté à la localisation des pergolas.

Par ailleurs, si l'expert a émis l'hypothèse que la réglementation applicable était celle des fermetures et stores, la société Le Lamparo n'en justifie pas alors que le rapport précise que « la règlementation applicable pour ce type d'ouvrage est laissée à l'initiative de chaque fabricant / fournisseur » (p. 8).

Inversement, la société Soliso Europe expose, s'agissant du DTU 34.4 relatif à la mise en 'uvre des fermetures et stores auquel se réfère l'expert, que celui-ci n'est aucunement applicable puisqu'il exclut expressément : « les fermetures et les stores non directement liés à un bâtiment ou à une structure existante ou fixe d'un bâtiment » ainsi que « les produits nécessitant la mise en 'uvre simultanée d'une structure métallique et d'une protection solaire », comme c'est le cas en l'espèce.

Le jugement qui a constaté à juste titre que la société Soliso Europe n'était pas responsable des défauts de mise en 'uvre et d'installation de la pergola sera confirmé sur le rejet des demandes de la société Le Lamparo à son encontre, alors qu'il n'est justifié d'aucune non-conformité qui lui soit imputable, ni aucun vice caché.

- Sur les autres demandes

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société Le Lamparo supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à la société Topver Financière d'une part et à la société Soliso Europe d'autre part une indemnité au titre des frais irrépétibles qu'elles ont exposés en cause d'appel pour la première et en première instance ainsi qu'en cause d'appel pour la seconde.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par défaut, et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe, dans les limites de sa saisine :

- Infirme le jugement rendu le 28 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Nice en ce qu'il a condamné la société Financière Topver - solidairement avec la société Elite Insurance Company Limited et la société Alpha Insurance - à payer à la société Le Lamparo la somme de 115 000 euros hors taxes assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation et une indemnité 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à procéder à l'enlèvement de la structure existante dans sa totalité sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement, et aux dépens ;

- Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

- Déclare irrecevables les demandes de la société Le Lamparo à l'encontre de la société Financière Topver ;

- Condamne la société Le Lamparo à payer des indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de :

- 3 500 euros à la société Financière Topver au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- 5 000 euros à la société Soliso Europe au titre de ses frais irrépétibles en première instance et en appel ;

- Condamne la société Le Lamparo aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Drujon D'Astros et associés (Maître Caroline Payen) qui affirme son droit de recouvrement.

Le Greffier, La Présidente,

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