CA Colmar, ch. 2 a, 26 septembre 2025, n° 23/00333
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N°439/2025
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2025
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 23/00333 -
N° Portalis DBVW-V-B7H-H7YJ
Décision déférée à la cour : 06 Décembre 2022 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG
APPELANT et INTIME sur appel incident :
Monsieur [EO] [S] à titre personnel et venant aux droits de sa mère décédée Madame [D] [S]
demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.
INTIMÉS et APPELANTS sur appel incident :
Monsieur [U] [J]
demeurant [Adresse 15]
[Localité 8]
Monsieur [K] [H]
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [P] [KI]
demeurant [Adresse 10]
Monsieur [E] [N]
demeurant [Adresse 9]
Monsieur [BS] [L]
demeurant [Adresse 7]
Monsieur [O] [X]
demeurant [Adresse 16]
Monsieur [R] [C]
demeurant [Adresse 4]
Monsieur [Z] [G]
demeurant [Adresse 17]
Monsieur [F] [T]
demeurant [Adresse 5]
Monsieur [DP] [I]
demeurant [Adresse 1]
représentés par Me Noémie BRUNNER, avocat à la cour
plaidant : Me BONNABRY, avocat au barreau de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre, et Madame Nathalie HERY, conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Nathalie HERY, Conseiller
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS ET PROCEDURE
De septembre 2001 au 15 novembre 2015, M. [EO] [S], technicien supérieur forestier à l'Office National des Forêts (ONF), a fait partie de l'Unité Territoriale (UT) de [Localité 18] (67) composée de M. [E] [N], responsable de cette unité depuis le 2 avril 2013 et de techniciens forestiers territoriaux dont MM. [BS] [L], [R] [M], [F] [T], [P] [KI], [O] [X] et [Z] [G].
Le 13 avril 2015 M. [K] [H] a signé, au nom des représentants SNTF-FO au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'ONF pour l'Alsace, un courrier valant droit d'alerte auprès du délégué territorial de l'ONF faisant état de ce qu'il y avait un danger grave et imminent pour la santé des personnels dont les souffrances avaient été constatées consécutives au harcèlement quotidien et permanent subi par M. [BS] [L] et engendré par les divers agissements et écrits de M. [EO] [S] depuis le mois d'octobre 2014.
Le CHSCT a constitué une délégation d'enquête confiée à MM. [K] [H] et [U] [J] laquelle a déposé son compte-rendu le 1er juin 2015.
Le 31 août 2015, M. [S] a déposé une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction de [Localité 11] à l'encontre de M. [H] et contre X... du chef de dénonciation calomnieuse. Cette plainte a été déclarée irrecevable par ordonnance en date du 23 octobre 2015 laquelle a été infirmée le 17 mars 2016 sur appel de M. [S]. Une information judiciaire a ensuite été ouverte par réquisitoire introductif du 10 janvier 2017. Une ordonnance de non-lieu a été rendue par le juge d'instruction le 12 décembre 2019.
Par arrêté en date du 23 octobre 2015, M. [S] a été muté d'office et dans l'intérêt du service à [Localité 19] (68) avec effet au 16 novembre 2015.
Il a déposé un recours en annulation à l'encontre de cette décision que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le 5 décembre 2018, ce rejet ayant été confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy le 28 janvier 2021.
Ayant refusé de rejoindre son nouveau lieu d'affectation et donc de libérer la maison forestière de [Localité 12], M. [S] en a été expulsé, tout comme sa mère, Mme [W] qui résidait avec lui.
Par acte introductif d'instance déposé le 13 août 2020, M. [EO] [S] et Mme [D] [W] ont saisi le tribunal judiciaire de Strasbourg d'une action à l'encontre de MM. [F] [T], [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [DP] [I] et [Z] [G] sur le fondement de la responsabilité personnelle et délictuelle aux fins d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices professionnels et personnels résultant :
des déclarations mensongères faites à la délégation d'enquête du CHSCT suite au droit d'alerte du 13 avril 2015 par MM. [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T], [P] [KI] et [DP] [I],
des déclarations mensongères et des écrits de MM. [U] [J] et [K] [H] postérieurement au droit d'alerte du 13 avril 2015.
Après retrait du rôle, l'affaire y a été remise à la demande de M. [S] tant à titre personnel que venant aux droits de sa mère, Mme [D] [S], née [W], décédée le [Date décès 3] 2020.
Par jugement du 6 décembre 2022, le tribunal a notamment :
statuant sur la demande principale
déclaré irrecevables les exceptions de procédure tirées d'une prétendue nullité des assignations ;
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action ;
déclaré toutes les demandes formées par M. [EO] [S] recevables mais infondées et en conséquence ;
débouté M. [EO] [S] de toutes ses prétentions ;
statuant sur demandes reconventionnelles
condamné M. [EO] [S] à payer, à titre de dommages-intérêts, pour préjudice moral à :
M. [E] [N], une somme de 3 000 euros,
M. [BS] [L], une somme de 3 000 euros,
M. [K] [H], une somme de 3 000 euros,
MM. [O] [X], [R] [C], [DP] [I], [U] [J], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] la somme de 1 000 euros chacun ;
débouté M. [E] [N] de sa demande portant sur « l'indemnisation du temps passé pour gérer la procédure » ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à MM. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X]. [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une somme de 1 000 euros pour procédure abusive ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à M. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une indemnité de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
condamné M. [EO] [S] aux entiers dépens.
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt et de qualité à agir de M. [S] au nom de sa mère décédée
Le tribunal a fait état de ce qu'était irrecevable ce moyen de défense soumis au juge du fond alors qu'il préexistait à son intervention et relevait donc de la compétence du juge de la mise en état soulignant que cette fin de non-recevoir ne pouvait prospérer dans la mesure où l'acte introductif d'instance avait été déposé du vivant de Mme [D] [S] et les assignations avaient ensuite été délivrées par M. [S], en son nom et en qualité de seul héritier et ayant-droit de la défunte laquelle avait établi en sa faveur, le 15 juillet 2020, un document intitulé « pouvoir et procuration post-mortem » dans lequel elle déclarait lui donner tout pouvoir pour engager une procédure tendant à la réparation des divers préjudices ayant résulté pour elle des agissements des défendeurs à la présente instance, ce dont il découlait que M. [S] était recevable à agir en réparation des préjudices qui auraient été causés tant à lui-même qu'à sa mère, celle-ci ayant manifesté, de son vivant, son intention de bénéficier d'une telle action.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. [S]
Le tribunal a fait état de ce qu'était irrecevable ce moyen de défense soumis au juge du fond alors qu'il préexistait à son intervention et relevait donc de la compétence du juge de la mise en état, soulignant que cette fin de non-recevoir ne pouvait prospérer, M. [S] reprochant à MM. [H] et [J], les écrits contenus dans leur rapport daté du 1er juin 2015, et aux autres défendeurs les propos tenus par eux et retranscrits dans ledit rapport dont il n'avait pu prendre connaissance qu'au mois de juillet 2016, soit moins de cinq ans avant l'introduction de l'instance.
Sur le fond
- Sur la demande de M. [S] :
Le tribunal a indiqué qu'il appartenait à M. [S] de démontrer la ou les fautes commises par chacun des défendeurs, chacun des préjudices subis par lui-même et par sa mère ainsi que le lien de causalité existant entre lesdites fautes et lesdits préjudices.
Il a relevé que M. [S] versait aux débats des pièces qui le conduisaient à conclure à l'existence d'un complot ourdi contre sa personne et ayant entraîné sa « déchéance professionnelle et personnelle » et par ricochet celle de sa mère, à savoir que :
M. [H] avait déposé un droit d'alerte sur un ressenti non vérifié de M. [L],
les déclarations faites par MM. [L], [N], [X], [C], [G], [T], [KI] et [I] lors de l'enquête réalisée au sein de l'ONF étaient toutes empreintes de malveillance, d'insincérité et de mauvaise foi, notamment lorsqu'elles faisaient état du harcèlement dont M. [L] aurait été victime de sa part, de ses relations avec son supérieur hiérarchique, ses ex-collègues et supérieur hiérarchique, de sa non-participation à des opérations de martelage, de l'arbitrage effectué par M. [N] concernant l'emploi de la main d'oeuvre, de la non réalisation de relevés de placettes de la forêt communale d'[Localité 13], ou de sa non-participation au comptage des daims ou à des sorties et autres festivités,
ces déclarations, et d'autres attribuées à tort à des tiers par MM. [J] et [H] avaient conduit à sa mutation avec toutes les conséquences induites par une telle décision tant pour lui-même que pour sa mère,
il en allait de même des écrits mensongers de MM. [J] et [H] dans le compte-rendu du 1er juin 2015 rédigé par ces mêmes personnes et des déclarations faites par M. [H] en CHSCT.
Il a, cependant, considéré que les pièces produites au soutien de ses prétentions par M. [S] et les observations qu'il présentait n'étaient pas de nature à démontrer le bien-fondé de sa demande, soulignant que :
dans son jugement du 5 décembre 2018, confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy, le tribunal administratif de Strasbourg avait estimé que les mauvaises relations de travail entretenues par M. [S] avec plusieurs de ses collègues avaient perturbé le bon fonctionnement du service et en conséquence justifié une décision de mutation, dans l'intérêt du service fondée sur une dégradation des relations de travail, sans que le demandeur ne puisse valablement soutenir qu'elle reposait sur des faits matériellement inexacts,
l'information judiciaire ouverte à la demande de M. [S] s'était soldée par des réquisitions puis une ordonnance de non-lieu,
il n'était justifié d'aucun élément nouveau et significatif permettant de remettre en cause les constatations des juridictions administratives ou le résultat des investigations très complètes menées sous l'autorité du juge d'instruction.
S'agissant des préjudices invoqués par M. [S], il a fait état de ce que, d'une part, ses demandes n'étaient pas régulières dès lors qu'il ne chiffrait pas spécifiquement chacun des postes de préjudice, la juridiction étant dans l'impossibilité de statuer valablement sur ses demandes, et, d'autre part, il était défaillant dans l'administration de la preuve puisqu'il ne versait aux débats aucune pièce probante de nature à justifier de la réalité du préjudices dont il se contentait d'affirmer l'existence.
- Sur les demandes reconventionnelles :
Le tribunal a relevé que :
dans son ordonnance de non-lieu, le magistrat instructeur du tribunal de grande instance de Colmar avait indiqué que :
M. [S] lui avait dénoncé des faits qui n'étaient nullement constitutifs d'une infraction pénale,
les investigations avaient permis de confirmer, ainsi qu'il était allégué par les personnes nommément visées par M. [S], que celui-ci usait de manière systématique de divers recours pour porter des accusations infondées,
ces constatations avaient conduit ledit magistrat à condamner M. [S] à une amende civile de 2 500 euros,
bien que sérieusement averti, M. [S] avait persisté dans l'erreur en poursuivant les défendeurs à la présente instance de sa vindicte et en instrumentalisant la juridiction à qui il avait soumis des demandes dont il ne pouvait ignorer qu'elles étaient manifestement vouées à l'échec.
Il en a déduit que M. [S] avait non seulement commis une faute et inévitablement causé à chacun des défendeurs un préjudice moral qu'il lui appartenait de réparer mais avait également abusé de son droit d'ester en justice, ce qui méritait également d'être sanctionné.
Au vu des pièces justificatives produites par les différents défendeurs, il a indemnisé le préjudice moral subi par chacun des défendeurs.
Il a alloué à chacun des dix défendeurs des dommages-intérêts à hauteur de 1 000 euros pour procédure abusive.
M. [S] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 18 janvier 2023.
Par ordonnance du 10 mai 2023, la présidente de la chambre des urgences, sur délégation de Mme la première présidente de la cour d'appel a déclaré irrecevable la demande de M. [S] tendant à la suspension de l'exécution provisoire.
L'instruction a été clôturée le 1er avril 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 3 février 2025, M. [S] demande à la cour de :
déclarer l'appel bien fondé ;
infirmer le jugement du 6 décembre 2022 ;
Vu l'article 1240 du code civil,
condamner les intimés solidairement à lui payer une indemnité de 500 000 euros en réparation de ses préjudices dont : 60 000 euros au titre de son préjudice moral, 10 000 euros au titre de son préjudice d'affection, 25 000 euros au titre son préjudice d'anxiété, 270 000 euros au titre de ses préjudices professionnels et de ses gains manqués, 60 000 euros au titre de ses pertes subies et 75 000 euros au titre de son atteinte à l'honneur, à la réputation et à la considération ;
condamner les intimés solidairement à lui payer ès-qualités d'ayant droit de Mme [S] une indemnité de 500 000 euros en réparation des préjudices de cette dernière dont : 150 000 euros au titre de son préjudice moral, 73 000 euros au titre de son préjudice d'affection, 150 000 euros au titre de son préjudice d'anxiété, 52 000 euros au titre de ses pertes subies et 75 000 euros au titre de son atteinte à 1'honneur, à la réputation et à la considération ;
les condamner solidairement à payer une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
les condamner aux dépens ;
en tout état de cause,
débouter les intimés de leurs demandes reconventionnelles de première instance et d'appel ;
les débouter de leur appel incident ;
très subsidiairement,
réduire à de plus justes proportions les indemnités allouées et notamment fixer une seule indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble des défendeurs.
Sur les fins de non-recevoir soulevées par les intimés, M. [S] expose que :
le juge de la mise en état n'a pas été saisi de sorte que les fins de non-recevoir soulevées doivent être déclarées irrecevables,
Mme [S] est décédée le [Date décès 3] 2020 et l'assignation a été délivrée le 6 octobre 2020, soit de son vivant ; l'instance a ensuite repris son cours en l'état où elle se trouvait au moment où elle fut interrompue ; il disposait d'un « Pouvoir et procuration post-mortem » qu'il a reçu le 15 juillet 2020, soit du vivant de sa mère ; il est 1'unique héritier de sa mère est en droit de poursuivre les demandes formées au nom de sa mère,
les faits reprochés aux intimés sont postérieurs au 13 avril 2015 et ce n'est qu'en juillet 2016 les documents faisant l'objet du présent recours datent du 1er juin 2015 et il n'en a pris connaissance pour la première fois que le 16 juillet 2016.
Sur le fond, M. [S] considère que le rejet de ses demandes est erroné puisque ni l'ordonnance de non-lieu ni son recours contre l'arrêté de mutation du 23 octobre 2015 n'ont de lien avec la présente procédure qui consiste à obtenir une indemnisation des divers préjudices causés par un rapport dont il n'a eu connaissance d'une manière anonymisée qu'au mois de juillet 2016 soit postérieurement à sa plainte, ce rapport ayant été rédigé en date du 1er juin 2015, par MM. [K] [H] et [U] [J] et ses annexes, notamment l'annexe 1 reprenant des déclarations de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI].
Il conteste avoir eu le comportement dénoncé par l'auteur du droit d'alerte, M. [H], lequel n'a rien constaté, n'a pas rencontré M. [BS] [L] et ne connaissait rien de lui ni de ses relations avec ses collègues, de sorte que le droit d'alerte a été utilisé sur un « ressenti (de M. [L]) » non vérifié ; les menaces de fin octobre 2014 dont il serait l'auteur n'ont jamais existé car il n'a pas participé à la réunion du 27 octobre 2014, ni au martelage du lendemain le 28 octobre 2014, pour cause de congés depuis le 18 octobre 2014 jusqu'au 2 novembre 2014 ; le 29 novembre 2018, M. [GM], ex-directeur de l'agence ONF de [Localité 11], a déclaré : « La situation de M [S] n'a pas du tout été telle qu'elle nécessitait une telle mesure, rien de disciplinaire alors que M [L] relève du disciplinaire. ».
Il soutient que dans l'annexe 1, une partie des déclarations reprises par MM. [J] et [H] n'existe pas.
M. [S] souligne qu'il n'avait aucun problème avec ses collègues jusqu'au courant de l'année 2015 lorsqu'il a constaté que des travaux importants avaient été réalisés sur une partie de forêt dont il avait la surveillance, sans son autorisation mais avec celle de M. [L], à la suite de quoi ce dernier en est venu aux mains avec lui, l'ensemble des collègues ayant pris parti pour M. [L] avant que ne soit mise en 'uvre une procédure d'alerte à son encontre avec établissement d'un rapport par M. [H] en date du 13 avril 2015, sans entretien ou audition des personnes concernées.
Il indique que, du fait des déclarations mensongères dans le rapport du 1er juin 2015 de MM. [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T], [P] [KI] et [DP] [I] et des déclarations mensongères et des écrits de MM. [U] [J] et [K] [H], sa mère et lui ont subi des préjudices d'ordres divers qu'il décrit, dont il justifie et qu'il chiffre.
Il argue de ce que les fautes à l'origine du préjudice sont avérées et, sur ce point, fait état :
de « griefs » à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] :
évocation de l'existence d'un harcèlement qu'il conteste faisant subsidiairement valoir que c'est lui qui a été victime d'une tentative d'agression ; chaque déclaration de ses adversaires au §1 « M. [L] se sent harcelé et en souffre » a fait l'objet d'une réponse démontrant leur mauvaise foi et/ou mensonge,
autres reproches mentionnés à son encontre dans l'annexe n° 1 qu'il conteste à savoir :
son isolement lequel, au demeurant, témoigne de ce qu'il n'a pas pu faire du harcèlement et impacter ses ex-collègues,
fuite de son travail alors que sa non-participation aux martelages de son ex-triage forestier a été décidée lors d'une réunion collective le 30 novembre 2012, avec ses ex-collègues de l'Unité territoriale, sous la présidence de M. [B], directeur d'agence et du responsable de l'UT de [Localité 18] et qu'en compensation, il a fait des « relevés de placettes » en lieu et place, pour raison de santé,
chantage sur la main-d''uvre,
ses méthodes de communication,
sa personnalité,
sa relation avec la hiérarchie : il se dit victime d'un acharnement de la part de l'ONF qui l'a licencié à trois reprises et l'a muté à deux reprises, ces licenciements et mutations ayant été annulés,
sur son utilisation de la loi qui serait reprochable,
de « griefs » contre les enquêteurs, MM. [K] [H] et [U] [J] constituant la délégation d'enquête ayant rédigé le compte-rendu d'enquête du 1er juin 2015 :
dans lequel les propos malveillants de MM. [Y], [V], [CR] et [TZ], soit-disant repris par MM. [J] et [H], ont été totalement inventés puisqu'ils n'ont pas été entendus par MM. [J] et [H] qui n'ont pas plus rencontré M. [L],
sans porter à la connaissance de tous ses ex-collègues qui ont été entendus le contenu du droit d'alerte,
dans lequel les entretiens ont été indiqués comme étant individuels dans l'« Annexe I : les entretiens classés par thématique » alors qu'ils ne l'ont pas été ; les déclarations de M. [I] qui y figurent sont contradictoires avec celles faites en commission rogatoire, celui-ci relatant des faits dont il ne pouvait avoir connaissance puisqu'antérieurs au début de son apprentissage,
faisant état de faits à son encontre qu'il conteste à propos d'une menace de verbalisation, de pressions pour la réalisation d'un arbitrage, de son inaptitude médicale, signalement de deux chevreuils dans une clôture,
comprenant une « Annexe 2 - essai arbre de causes- UT [Localité 18] » dont il conteste les composantes,
d'une suspicion de coup monté quant à son agression par M. [L].
M. [S] demande l'infirmation du jugement s'agissant des demandes reconventionnelles soulignant, d'une part, que le tribunal a alloué à chacun des défendeurs des indemnités pour préjudice moral et pour procédure abusive, ce qui correspond à indemniser deux fois le même préjudice, et, d'autre part, que les indemnités de 3 000 euros allouées à MM. [H], [N] et [L] ne sont pas justifiées.
Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2025, les intimés demandent à la cour de :
A titre principal, sur appel incident :
le déclarer recevable,
le déclarer bien fondé,
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action,
déclaré toutes les demandes formées par M. [EO] [S] recevables,
et statuant à nouveau sur ces points,
juger irrecevables car prescrites les demandes de M. [S] ainsi que son action,
juger que Mme [S], du fait de son décès, n'a ni intérêt, ni qualité pour agir, en conséquence,
déclarer M. [S] irrecevable à agir sur la totalité de ses demandes ou à tout le moins, à titre subsidiaire, sur les demandes formulées pour le compte de Mme [S],
rejeter l'intégralité de ses demandes,
confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
A titre subsidiaire, sur appel principal
le déclarer mal fondé,
le rejeter,
juger que M. [S] ne rapporte pas la preuve de la faute, du préjudice et du lien de causalité,
juger que les conditions susceptibles d'engager la responsabilité de MM. [N], [L], [H], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G], [T] ne sont pas réunies,
En conséquence,
confirmer le jugement entrepris,
en tout état de cause
débouter M. [EO] [S] de l'intégralité de ses demandes,
condamner M. [EO] [S] à verser à MM. [N], [L], [H], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G], [T] la somme de 2.000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
condamner M. [EO] [S] aux entiers dépens d'appel.
In limine litis, les intimés, se prévalant des dispositions des articles 31 et 117 du code de procédure civile, soulèvent l'irrecevabilité des demandes formulées par M. [S] au nom de sa mère laquelle, étant décédée, n'avait plus la capacité d'être partie à l'action engagée, une assignation délivrée au nom d'une personne décédée étant frappée d'une irrégularité de fond que ne peut couvrir la reprise de l'instance par les héritiers et doit être annulée ainsi que la procédure subséquente.
Ils ajoutent que :
il est de principe que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge,
à l'inverse du conseiller de la mise en état, la cour d'appel dispose du pouvoir d'infirmer ou d'annuler « la décision d'appel » ; les exceptions de procédure non évoquées devant le juge de la mise en état en première instance sont évoquées au fond en cause d'appel et non devant le conseiller de la mise en état.
Ils font encore valoir que :
Mme [D] [S] étant décédée au moment de la délivrance de l'assignation, son préjudice n'existe pas, de sorte que M. [S] n'a ni intérêt, ni qualité à agir pour sa mère défunte,
comme l'assignation a été délivrée aux noms de M. [EO] [S] et de sa mère Mme [D] [S], décédée au moment de la délivrance, celle-ci étant dépourvue de toute qualité à agir, l'assignation ainsi délivrée est frappée d'une irrégularité de fond qui entache sa validité dans son intégralité.
Ils en déduisent que l'assignation doit être considérée comme nulle.
A titre subsidiaire, si « le Tribunal » devait considérer que l'assignation délivrée par M. [EO] [S] n'est pas entachée d'une irrégularité de fond, ils indiquent que l'acte ne vaudrait pas à l'égard de Mme [D] [S].
Sur la prescription, les intimés, se prévalant des dispositions des articles 2224 et 2241 et 2242 du code civil, font valoir que :
il est de principe que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge ; à l'inverse du conseiller de la mise en état, la cour d'appel dispose en effet du pouvoir d'infirmer ou d'annuler la décision d'appel ; les exceptions de procédure non évoquées devant le juge de la mise en état en première instance sont donc évoquées au fond en cause d'appel et non devant le conseiller de la mise en état,
ils ont été assignés par M. [S] par exploit introductif d'instance en date du 30 décembre 2020 ; à la lecture de l'assignation et des conclusions d'appelant, le fait générateur de l'action à l'encontre de M. [N] serait le déclenchement du droit d'alerte initié par M. [H], lequel date du 13 avril 2015 dont M. [S] a eu connaissance depuis la date de son déclenchement, de sorte que toute action découlant des conséquences du droit d'alerte susceptible d'être mise en 'uvre par M. [S] trouve son point de départ à la date du déclenchement du droit d'alerte, soit le 15 avril 2020, ce qui est confirmé notamment par le fait que M. [S] réclame un préjudice à compter du mois d'avril 2015,
si la plainte avec constitution de partie civile déposée le 31 août 2015 auprès du doyen des juges d'instruction de [Localité 11] à l'encontre de M. [H] et contre X laquelle a été déclarée irrecevable le 23 octobre 2015 est susceptible d'interrompre la prescription, il apparaît que MM. [N], [L], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G] et [T] n'ont pas été visés par celle-ci et n'ont pas été mis en cause dans le cadre de la procédure qui s'est soldée par un non-lieu, de sorte qu'à l'encontre de MM. [N], [L], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G] et [T], M. [S] n'a pu bénéficier d'aucune interruption de prescription,
le délai de prescription a expiré le 15 avril 2020 voire le 22 mai 2015 ; M. [S] ne saurait prétendre que le point de départ du délai de prescription se situerait au mois de juillet 2016 alors que la lecture de la plainte pour dénonciation calomnieuse qu'il a déposée le 22 mai 2015 permet de constater qu'il avait connaissance des faits prétendument calomnieux, l'ensemble des défendeurs de la présente instance y étant cités.
Sur le fond, les intimés soutiennent que M. [S] ne rapporte pas la preuve que les trois conditions visées par l'article 1240 du code civil sont réunies.
Sur la faute, ils indiquent que :
les procès-verbaux d'audition des agents de l'ONF confirment la légitimité du droit d'alerte et rapportent un malaise au travail lié à son propre comportement, M. [N] ayant fait son travail en qualité de supérieur hiérarchique,
les témoignages font d'ailleurs particulièrement état du pouvoir de nuisance de M. [S],
M. [S] se contente de viser la cotation des pièces de la procédure pénale sans, pour autant, les communiquer.
Ils considèrent que les propos tenus par M. [S] à leur égard sont calomnieux voire diffamatoires.
Sur le préjudice de M. [S] qu'ils contestent, les intimés exposent que M. [S] sollicite deux fois 500 000 euros, une fois pour lui, une fois pour sa mère sans prendre la peine de qualifier son préjudice ni d'apporter une quelconque pièce justificative supplémentaire.
Les intimés demandent une indemnisation de leur préjudice moral, pour procédure abusive.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il est constaté que les intimés, dans la partie « discussion » de leurs conclusions soutiennent que l'assignation délivrée au nom de [D] [S] (née [W]) décédée doit être annulée ainsi que la procédure subséquente ; cependant, force est de constater que les intimés, dans le dispositif de ces mêmes conclusions, ne demandent pas l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les exceptions de procédure tirées d'une prétendue nullité de cette assignation et ne soulèvent pas d'exception de nullité de l'assignation en cause, de sorte que la cour, à défaut d'en être saisie, n'a pas à statuer sur cette prétention.
1. Sur les fins de non-recevoir
Aux termes des dispositions de l'article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement.
Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [S] formulées pour le compte de sa mère, Mme [D] [W]
Les intimés soutiennent que [D] [W] étant décédée à la date de la délivrance de l'assignation aux intimés, elle était irrecevable pour formuler une quelconque demande devant le tribunal, de sorte que M. [S] n'a ni intérêt, ni qualité pour agir pour le compte de sa mère défunte.
Ils se prévalent également du défaut de capacité de [D] [W] au moment de la délivrance de l'assignation dès lors qu'elle était décédée, de sorte que M. [S] ne pouvait valablement assigner au nom de sa mère décédée.
L'acte introductif d'instance a été déposé au tribunal judiciaire de Strasbourg le 13 août 2020 par M. [S] et par Mme [D] [W], sa mère, à fin d'indemnisation.
[D] [W] est décédée le [Date décès 3] 2020 tel que cela résulte de l'extrait du registre des décès produit.
Les intimés qui contestent la recevabilité des demandes de M. [S] au regard des assignations qui leur ont été délivrées ne les produisent pas.
Néanmoins, ils admettent en page 15 de leurs conclusions que M. [S] a assigné au nom de sa mère décédée, ce qui vient confirmer l'exposé de la procédure fait par le premier juge qui indique que les assignations délivrées en décembre 2020 et janvier 2021 l'ont été à la requête de M. [EO] [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité d'ayant-droit de [D] [W], sa mère.
Considérant que l'acte introductif d'instance a été déposé au tribunal par [D] [W] avant son décès, la capacité de celle-ci s'appréciant à cette date ainsi que son intérêt à agir lequel est avéré puisqu'elle se prévalait d'un préjudice personnel, que les assignations ont été délivrées par M. [EO] [S] notamment en sa qualité d'ayant-droit de [D] [W], sa mère, ce dont il justifie par la production d'une attestation d'héritier du 10 janvier 2022, il apparaît que M. [EO] [S] qui a repris l'instance engagée par sa mère décédée a qualité et intérêt pour agir et est donc tout à fait recevable à agir à l'encontre des intimés.
* Au regard des éléments qui précèdent, il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir comme irrecevable.
Ladite fin de non-recevoir est déclarée recevable mais rejetée.
Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [S] du fait de la prescription
Aux termes des dispositions de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
M. [S] invoque comme faits générateurs de responsabilité des intimés, pour les uns, les déclarations mensongères faites à la délégation d'enquête CHSCT dans le rapport du 1er juin 2015 et, pour les autres, les fautes commises lors de la rédaction du compte-rendu de la délégation d'enquête du CHSCT.
Dès lors, le droit d'alerte du 13 avril 2015, contrairement à ce que soutiennent les intimés, ne saurait constituer le point de départ du délai de prescription puisqu'il ne caractérise pas le fait générateur de responsabilité invoqué par M. [S].
Le point de départ du délai de prescription doit donc être fixé à la date à laquelle ce dernier a eu connaissance de la version non anonymisée du compte-rendu de l'enquête de la délégation CHSCT laquelle lui a permis de déterminer l'identité des personnes à l'encontre desquelles il entendait agir.
M. [S] justifie de ce que ses demandes de communication du compte-rendu faites aux administrations compétentes ont été rejetées et que, tant le compte-rendu de la délégation d'enquête au CHSCT que les entretiens ayant eu lieu dans ce cadre, ont été portés à sa connaissance au cours de la procédure le concernant ayant eu lieu devant le tribunal administratif de Strasbourg qui en a reçu communication le 4 juillet 2016. L'analyse de ces documents permettant de constater qu'à cette date, ils étaient encore anonymisés, il s'en déduit que, à défaut de preuve contraire, M. [S] n'a nécessairement eu communication d'un exemplaire non anonymisé de ces documents qu'après le 4 juillet 2016, de sorte qu'à la date de l'acte introductif de l'instance devant le tribunal judiciaire de Strasbourg, soit le 13 août 2020, l'action de M. [S] n'était pas prescrite et ses demandes s'avèrent donc recevables.
* Au regard des éléments qui précèdent, il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir comme irrecevable.
Ladite fin de non-recevoir est déclarée recevable mais rejetée.
2. Sur les demandes en indemnisation de M. [S]
Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il appartient à M. [S] de prouver la faute des personnes dont il invoque la responsabilité, l'existence d'un préjudice et le lien existant entre cette faute et le préjudice subi.
2.1 Sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI]
M. [S] leur reproche d'avoir fait des déclarations mensongères à la délégation d'enquête CHSCT dans le rapport du 1er juin 2015 et son annexe 1, déclarations qu'il liste dans ses conclusions.
La cour, après avoir procédé à l'analyse de cette liste relève que :
s'agissant du harcèlement professionnel qui lui est reproché à l'égard de M. [BS] [L], M. [S] ne cite pas précisément quelles déclarations sont mensongères et indique contester le harcèlement sans pour autant démontrer le caractère mensonger des déclarations,
le fait que les personnes dont la responsabilité est recherchée par M. [S] n'aient pas parlé de la tentative d'agression dont il a été victime par M. [L] ne caractérise pas une déclaration mensongère mais une omission,
le fait qu'il soit reproché à M. [S] de s'isoler ne démontre pas que les déclarations faites au sujet du harcèlement sont mensongères, ces deux comportements n'étant pas nécessairement exclusifs l'un de l'autre,
sur les autres reproches mentionnés à son encontre dans l'annexe n° 1 à savoir isolement, fuite de son travail, chantage sur la main-d'oeuvre, méthodes de communication, personnalité, relation avec la hiérarchie et utilisation de la loi, force est de relever que le fait que M. [S] ne soit pas en accord avec plusieurs déclarations qui ont été faites par leurs auteurs ne suffit pas à établir leur caractère mensonger ; en outre, ce caractère ne se déduit pas des propos tenus par les mêmes auteurs qui ont été amenés à faire des déclarations dans le cadre de l'instruction dont la teneur qui a été analysée par la cour, ne permet, cependant, pas d'aboutir à une telle conclusion ; M. [S] invoque être victime d'un acharnement de la part de l'ONF, ce qui n'implique pas que les déclarations faites à la délégation sur le point de la hiérarchie soient mensongères.
Dès lors, considérant que les fautes invoquées par M. [S] à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] ne sont pas établies, les demandes formulées de ce chef sont rejetées.
2.2 Sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre de MM. [K] [H] et [U] [J]
M. [S] leur reproche plusieurs fautes commises lors de la procédure d'enquête et dans la rédaction du compte-rendu d'enquête et de son annexe 1.
Il reproche, tout d'abord, aux enquêteurs d'avoir indiqué dans l'annexe 1 que MM. [Y], [TZ], [V] et [CR] ont été entendus en entretien alors que, selon lui, ce n'est pas le cas.
L'annexe 1 qui porte sur les entretiens classés par thématique indique que ces quatre personnes ont été entendues en entretien à savoir le 13 mai 2015 pour M. [Y], le 18 mai 2015 pour M. [TZ], le 19 mai 2015 pour M. [V] et le 27 mai 2015 pour M. [CR].
Ce grief est insuffisamment étayé puisqu'il résulte de l'analyse des procès-verbaux d'audition desdites personnes réalisées par la gendarmerie nationale sur commission rogatoire qu'à la question « A la suite du droit d'alerte, avez-vous été entendu par le comité territorial d'hygiène et sécurité ' » :
- M. [TZ] a répondu « Pas dans mon souvenir. Je me souviens que [K] [H] est venu nous voir en réunion pour nous expliquer la procédure mais je ne me souviens pas d'un entretien ou d'une audition individuellement. », ce qui n'induit pas qu'il n'ait pas eu d'entretien avec la délégation du CHSCT constituée à fin d'enquête, les deux entités étant, au demeurant, distinctes, d'autant que dans sa réponse, M. [TZ] mentionne, néanmoins, l'existence d'une réunion organisée par M. [H] relative à la procédure d'enquête ;
- M. [Y] a répondu « Non. Je ne sais même pas qui faisait partie de ce comité », M. [V] a répondu « Non. » et M. [CR] a répondu : « Non jamais », ce qui n'induit pas qu'ils n'ont pas eu d'entretien avec la délégation du CHSCT constituée à fin d'enquête, les deux entités étant distinctes.
M. [S] reproche ensuite aux enquêteurs :
- de ne pas avoir donné d'information aux personnes entendues en entretien sur le contenu du droit d'alerte. Ce grief n'est pas étayé dès lors que M. [S] ne démontre pas que les enquêteurs avaient l'obligation de fournir cette information ;
- d'avoir procédé à des entretiens qui n'étaient pas individuels : or, ce grief n'apparaît pas étayé puisque tant dans le compte-rendu d'enquête que dans l'annexe 1, il n'est pas indiqué que les entretiens étaient individuels et M. [S] ne démontre pas que les enquêteurs avaient l'obligation de procéder à des entretiens individuels ;
- d'avoir écrit dans la partie « Les faits évoqués » du compte-rendu d'enquête que « Depuis octobre 2014, plusieurs échanges de courriels portés à notre connaissance illustrent les relations entre [VY] [S] et [AP] : « Je te demanderai à compter de ce jour, de ne plus faire débarder des bois de la Ville de [Localité 18], en forêt communale de [Localité 14]. A défaut, je me verrai contraint de verbaliser. Je pense par exemple à la P.2 dont l'exploitation a repris aujourd'hui. (courriel [VY] [S] à [AP] du 27/11/2014.) » ; force est de constater que M. [S] ne conteste pas cette narration des faits mais entend exposer les raisons qui l'ont conduit à adresser ce courriel dont le contenu n'est pas contesté, de sorte qu'il n'existe pas de grief de ce chef ;
- l'arbre des causes qu'ils ont élaboré, faisant état de ce qu'il est en désaccord avec ; cependant, il ne saurait être reproché à la délégation d'enquête d'avoir établi un arbre des causes dans le cadre de la mission qui lui était impartie, étant souligné que M. [S] a eu des occasions d'en contester le contenu, de sorte qu'il n'existe pas de grief de ce chef.
Enfin, M. [S] se demande si la tentative d'agression dont il aurait été victime par M. [BS] [L], ex-collègue, le 30 mars 2015, lors d'une réunion de l'unité territoriale laquelle est passée sous silence par l'ONF ne serait pas un « coup monté ». Cependant, M. [S] ne démontre pas en quoi les deux enquêteurs, lors de la procédure d'enquête, auraient participé à un « coup monté », la tentative d'agression qu'il invoque n'étant, au demeurant, pas établie.
Dès lors, considérant que les fautes invoquées par M. [S] à l'encontre de MM. [K] [H] et [U] [J] ne sont pas établies, ses demandes formulées de ce chef sont rejetées.
Au regard des éléments précédents, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [S] de toutes ses prétentions.
3. Sur les demandes de dommages et intérêts des intimés
3.1 Pour préjudice moral
Le jugement entrepris est confirmé de ce chef puisque c'est avec pertinence qu'il a retenu qu'il résultait des documents produits par les intimés que ceux-ci avaient subi un préjudice moral généré par le comportement fautif de M. [S] qui a agi à leur encontre pour des fautes non démontrées en faisant des demandes indemnitaires exorbitantes, les sommes allouées par le premier juge étant en corrélation avec le préjudice moral subi.
3.2 Pour procédure abusive
Aux termes des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, de légèreté blâmable ou d'erreur grossière équipollente au dol.
La plainte avec constitution de partie civile de M. [S] pour dénonciation calomnieuse n'ayant pas abouti, celui-ci avait le droit légitime de saisir une juridiction civile pour obtenir une éventuelle indemnisation, au demeurant, sur un autre fondement.
Dès lors, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes des intimés sur ce point.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
4. Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.
A hauteur d'appel, M. [S] est condamné aux dépens ainsi qu'à payer à chacun des intimés la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens.
La demande d'indemnité formulée par M. [S] sur ce même fondement est rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 6 décembre 2022 en ce qu'il a :
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à MM. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X]. [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une somme de 1 000 euros pour procédure abusive ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
DECLARE recevables les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action mais LES REJETTE ;
REJETTE les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNE M. [EO] [S] aux dépens de la procédure d'appel ;
CONDAMNE M. [EO] [S] à payer à chacun des intimés la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;
REJETTE la demande de M. [EO] [S] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
La greffière, La présidente,
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2025
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 23/00333 -
N° Portalis DBVW-V-B7H-H7YJ
Décision déférée à la cour : 06 Décembre 2022 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG
APPELANT et INTIME sur appel incident :
Monsieur [EO] [S] à titre personnel et venant aux droits de sa mère décédée Madame [D] [S]
demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.
INTIMÉS et APPELANTS sur appel incident :
Monsieur [U] [J]
demeurant [Adresse 15]
[Localité 8]
Monsieur [K] [H]
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [P] [KI]
demeurant [Adresse 10]
Monsieur [E] [N]
demeurant [Adresse 9]
Monsieur [BS] [L]
demeurant [Adresse 7]
Monsieur [O] [X]
demeurant [Adresse 16]
Monsieur [R] [C]
demeurant [Adresse 4]
Monsieur [Z] [G]
demeurant [Adresse 17]
Monsieur [F] [T]
demeurant [Adresse 5]
Monsieur [DP] [I]
demeurant [Adresse 1]
représentés par Me Noémie BRUNNER, avocat à la cour
plaidant : Me BONNABRY, avocat au barreau de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre, et Madame Nathalie HERY, conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Nathalie HERY, Conseiller
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS ET PROCEDURE
De septembre 2001 au 15 novembre 2015, M. [EO] [S], technicien supérieur forestier à l'Office National des Forêts (ONF), a fait partie de l'Unité Territoriale (UT) de [Localité 18] (67) composée de M. [E] [N], responsable de cette unité depuis le 2 avril 2013 et de techniciens forestiers territoriaux dont MM. [BS] [L], [R] [M], [F] [T], [P] [KI], [O] [X] et [Z] [G].
Le 13 avril 2015 M. [K] [H] a signé, au nom des représentants SNTF-FO au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'ONF pour l'Alsace, un courrier valant droit d'alerte auprès du délégué territorial de l'ONF faisant état de ce qu'il y avait un danger grave et imminent pour la santé des personnels dont les souffrances avaient été constatées consécutives au harcèlement quotidien et permanent subi par M. [BS] [L] et engendré par les divers agissements et écrits de M. [EO] [S] depuis le mois d'octobre 2014.
Le CHSCT a constitué une délégation d'enquête confiée à MM. [K] [H] et [U] [J] laquelle a déposé son compte-rendu le 1er juin 2015.
Le 31 août 2015, M. [S] a déposé une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction de [Localité 11] à l'encontre de M. [H] et contre X... du chef de dénonciation calomnieuse. Cette plainte a été déclarée irrecevable par ordonnance en date du 23 octobre 2015 laquelle a été infirmée le 17 mars 2016 sur appel de M. [S]. Une information judiciaire a ensuite été ouverte par réquisitoire introductif du 10 janvier 2017. Une ordonnance de non-lieu a été rendue par le juge d'instruction le 12 décembre 2019.
Par arrêté en date du 23 octobre 2015, M. [S] a été muté d'office et dans l'intérêt du service à [Localité 19] (68) avec effet au 16 novembre 2015.
Il a déposé un recours en annulation à l'encontre de cette décision que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le 5 décembre 2018, ce rejet ayant été confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy le 28 janvier 2021.
Ayant refusé de rejoindre son nouveau lieu d'affectation et donc de libérer la maison forestière de [Localité 12], M. [S] en a été expulsé, tout comme sa mère, Mme [W] qui résidait avec lui.
Par acte introductif d'instance déposé le 13 août 2020, M. [EO] [S] et Mme [D] [W] ont saisi le tribunal judiciaire de Strasbourg d'une action à l'encontre de MM. [F] [T], [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [DP] [I] et [Z] [G] sur le fondement de la responsabilité personnelle et délictuelle aux fins d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices professionnels et personnels résultant :
des déclarations mensongères faites à la délégation d'enquête du CHSCT suite au droit d'alerte du 13 avril 2015 par MM. [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T], [P] [KI] et [DP] [I],
des déclarations mensongères et des écrits de MM. [U] [J] et [K] [H] postérieurement au droit d'alerte du 13 avril 2015.
Après retrait du rôle, l'affaire y a été remise à la demande de M. [S] tant à titre personnel que venant aux droits de sa mère, Mme [D] [S], née [W], décédée le [Date décès 3] 2020.
Par jugement du 6 décembre 2022, le tribunal a notamment :
statuant sur la demande principale
déclaré irrecevables les exceptions de procédure tirées d'une prétendue nullité des assignations ;
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action ;
déclaré toutes les demandes formées par M. [EO] [S] recevables mais infondées et en conséquence ;
débouté M. [EO] [S] de toutes ses prétentions ;
statuant sur demandes reconventionnelles
condamné M. [EO] [S] à payer, à titre de dommages-intérêts, pour préjudice moral à :
M. [E] [N], une somme de 3 000 euros,
M. [BS] [L], une somme de 3 000 euros,
M. [K] [H], une somme de 3 000 euros,
MM. [O] [X], [R] [C], [DP] [I], [U] [J], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] la somme de 1 000 euros chacun ;
débouté M. [E] [N] de sa demande portant sur « l'indemnisation du temps passé pour gérer la procédure » ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à MM. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X]. [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une somme de 1 000 euros pour procédure abusive ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à M. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une indemnité de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
condamné M. [EO] [S] aux entiers dépens.
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt et de qualité à agir de M. [S] au nom de sa mère décédée
Le tribunal a fait état de ce qu'était irrecevable ce moyen de défense soumis au juge du fond alors qu'il préexistait à son intervention et relevait donc de la compétence du juge de la mise en état soulignant que cette fin de non-recevoir ne pouvait prospérer dans la mesure où l'acte introductif d'instance avait été déposé du vivant de Mme [D] [S] et les assignations avaient ensuite été délivrées par M. [S], en son nom et en qualité de seul héritier et ayant-droit de la défunte laquelle avait établi en sa faveur, le 15 juillet 2020, un document intitulé « pouvoir et procuration post-mortem » dans lequel elle déclarait lui donner tout pouvoir pour engager une procédure tendant à la réparation des divers préjudices ayant résulté pour elle des agissements des défendeurs à la présente instance, ce dont il découlait que M. [S] était recevable à agir en réparation des préjudices qui auraient été causés tant à lui-même qu'à sa mère, celle-ci ayant manifesté, de son vivant, son intention de bénéficier d'une telle action.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. [S]
Le tribunal a fait état de ce qu'était irrecevable ce moyen de défense soumis au juge du fond alors qu'il préexistait à son intervention et relevait donc de la compétence du juge de la mise en état, soulignant que cette fin de non-recevoir ne pouvait prospérer, M. [S] reprochant à MM. [H] et [J], les écrits contenus dans leur rapport daté du 1er juin 2015, et aux autres défendeurs les propos tenus par eux et retranscrits dans ledit rapport dont il n'avait pu prendre connaissance qu'au mois de juillet 2016, soit moins de cinq ans avant l'introduction de l'instance.
Sur le fond
- Sur la demande de M. [S] :
Le tribunal a indiqué qu'il appartenait à M. [S] de démontrer la ou les fautes commises par chacun des défendeurs, chacun des préjudices subis par lui-même et par sa mère ainsi que le lien de causalité existant entre lesdites fautes et lesdits préjudices.
Il a relevé que M. [S] versait aux débats des pièces qui le conduisaient à conclure à l'existence d'un complot ourdi contre sa personne et ayant entraîné sa « déchéance professionnelle et personnelle » et par ricochet celle de sa mère, à savoir que :
M. [H] avait déposé un droit d'alerte sur un ressenti non vérifié de M. [L],
les déclarations faites par MM. [L], [N], [X], [C], [G], [T], [KI] et [I] lors de l'enquête réalisée au sein de l'ONF étaient toutes empreintes de malveillance, d'insincérité et de mauvaise foi, notamment lorsqu'elles faisaient état du harcèlement dont M. [L] aurait été victime de sa part, de ses relations avec son supérieur hiérarchique, ses ex-collègues et supérieur hiérarchique, de sa non-participation à des opérations de martelage, de l'arbitrage effectué par M. [N] concernant l'emploi de la main d'oeuvre, de la non réalisation de relevés de placettes de la forêt communale d'[Localité 13], ou de sa non-participation au comptage des daims ou à des sorties et autres festivités,
ces déclarations, et d'autres attribuées à tort à des tiers par MM. [J] et [H] avaient conduit à sa mutation avec toutes les conséquences induites par une telle décision tant pour lui-même que pour sa mère,
il en allait de même des écrits mensongers de MM. [J] et [H] dans le compte-rendu du 1er juin 2015 rédigé par ces mêmes personnes et des déclarations faites par M. [H] en CHSCT.
Il a, cependant, considéré que les pièces produites au soutien de ses prétentions par M. [S] et les observations qu'il présentait n'étaient pas de nature à démontrer le bien-fondé de sa demande, soulignant que :
dans son jugement du 5 décembre 2018, confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy, le tribunal administratif de Strasbourg avait estimé que les mauvaises relations de travail entretenues par M. [S] avec plusieurs de ses collègues avaient perturbé le bon fonctionnement du service et en conséquence justifié une décision de mutation, dans l'intérêt du service fondée sur une dégradation des relations de travail, sans que le demandeur ne puisse valablement soutenir qu'elle reposait sur des faits matériellement inexacts,
l'information judiciaire ouverte à la demande de M. [S] s'était soldée par des réquisitions puis une ordonnance de non-lieu,
il n'était justifié d'aucun élément nouveau et significatif permettant de remettre en cause les constatations des juridictions administratives ou le résultat des investigations très complètes menées sous l'autorité du juge d'instruction.
S'agissant des préjudices invoqués par M. [S], il a fait état de ce que, d'une part, ses demandes n'étaient pas régulières dès lors qu'il ne chiffrait pas spécifiquement chacun des postes de préjudice, la juridiction étant dans l'impossibilité de statuer valablement sur ses demandes, et, d'autre part, il était défaillant dans l'administration de la preuve puisqu'il ne versait aux débats aucune pièce probante de nature à justifier de la réalité du préjudices dont il se contentait d'affirmer l'existence.
- Sur les demandes reconventionnelles :
Le tribunal a relevé que :
dans son ordonnance de non-lieu, le magistrat instructeur du tribunal de grande instance de Colmar avait indiqué que :
M. [S] lui avait dénoncé des faits qui n'étaient nullement constitutifs d'une infraction pénale,
les investigations avaient permis de confirmer, ainsi qu'il était allégué par les personnes nommément visées par M. [S], que celui-ci usait de manière systématique de divers recours pour porter des accusations infondées,
ces constatations avaient conduit ledit magistrat à condamner M. [S] à une amende civile de 2 500 euros,
bien que sérieusement averti, M. [S] avait persisté dans l'erreur en poursuivant les défendeurs à la présente instance de sa vindicte et en instrumentalisant la juridiction à qui il avait soumis des demandes dont il ne pouvait ignorer qu'elles étaient manifestement vouées à l'échec.
Il en a déduit que M. [S] avait non seulement commis une faute et inévitablement causé à chacun des défendeurs un préjudice moral qu'il lui appartenait de réparer mais avait également abusé de son droit d'ester en justice, ce qui méritait également d'être sanctionné.
Au vu des pièces justificatives produites par les différents défendeurs, il a indemnisé le préjudice moral subi par chacun des défendeurs.
Il a alloué à chacun des dix défendeurs des dommages-intérêts à hauteur de 1 000 euros pour procédure abusive.
M. [S] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 18 janvier 2023.
Par ordonnance du 10 mai 2023, la présidente de la chambre des urgences, sur délégation de Mme la première présidente de la cour d'appel a déclaré irrecevable la demande de M. [S] tendant à la suspension de l'exécution provisoire.
L'instruction a été clôturée le 1er avril 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 3 février 2025, M. [S] demande à la cour de :
déclarer l'appel bien fondé ;
infirmer le jugement du 6 décembre 2022 ;
Vu l'article 1240 du code civil,
condamner les intimés solidairement à lui payer une indemnité de 500 000 euros en réparation de ses préjudices dont : 60 000 euros au titre de son préjudice moral, 10 000 euros au titre de son préjudice d'affection, 25 000 euros au titre son préjudice d'anxiété, 270 000 euros au titre de ses préjudices professionnels et de ses gains manqués, 60 000 euros au titre de ses pertes subies et 75 000 euros au titre de son atteinte à l'honneur, à la réputation et à la considération ;
condamner les intimés solidairement à lui payer ès-qualités d'ayant droit de Mme [S] une indemnité de 500 000 euros en réparation des préjudices de cette dernière dont : 150 000 euros au titre de son préjudice moral, 73 000 euros au titre de son préjudice d'affection, 150 000 euros au titre de son préjudice d'anxiété, 52 000 euros au titre de ses pertes subies et 75 000 euros au titre de son atteinte à 1'honneur, à la réputation et à la considération ;
les condamner solidairement à payer une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
les condamner aux dépens ;
en tout état de cause,
débouter les intimés de leurs demandes reconventionnelles de première instance et d'appel ;
les débouter de leur appel incident ;
très subsidiairement,
réduire à de plus justes proportions les indemnités allouées et notamment fixer une seule indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble des défendeurs.
Sur les fins de non-recevoir soulevées par les intimés, M. [S] expose que :
le juge de la mise en état n'a pas été saisi de sorte que les fins de non-recevoir soulevées doivent être déclarées irrecevables,
Mme [S] est décédée le [Date décès 3] 2020 et l'assignation a été délivrée le 6 octobre 2020, soit de son vivant ; l'instance a ensuite repris son cours en l'état où elle se trouvait au moment où elle fut interrompue ; il disposait d'un « Pouvoir et procuration post-mortem » qu'il a reçu le 15 juillet 2020, soit du vivant de sa mère ; il est 1'unique héritier de sa mère est en droit de poursuivre les demandes formées au nom de sa mère,
les faits reprochés aux intimés sont postérieurs au 13 avril 2015 et ce n'est qu'en juillet 2016 les documents faisant l'objet du présent recours datent du 1er juin 2015 et il n'en a pris connaissance pour la première fois que le 16 juillet 2016.
Sur le fond, M. [S] considère que le rejet de ses demandes est erroné puisque ni l'ordonnance de non-lieu ni son recours contre l'arrêté de mutation du 23 octobre 2015 n'ont de lien avec la présente procédure qui consiste à obtenir une indemnisation des divers préjudices causés par un rapport dont il n'a eu connaissance d'une manière anonymisée qu'au mois de juillet 2016 soit postérieurement à sa plainte, ce rapport ayant été rédigé en date du 1er juin 2015, par MM. [K] [H] et [U] [J] et ses annexes, notamment l'annexe 1 reprenant des déclarations de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI].
Il conteste avoir eu le comportement dénoncé par l'auteur du droit d'alerte, M. [H], lequel n'a rien constaté, n'a pas rencontré M. [BS] [L] et ne connaissait rien de lui ni de ses relations avec ses collègues, de sorte que le droit d'alerte a été utilisé sur un « ressenti (de M. [L]) » non vérifié ; les menaces de fin octobre 2014 dont il serait l'auteur n'ont jamais existé car il n'a pas participé à la réunion du 27 octobre 2014, ni au martelage du lendemain le 28 octobre 2014, pour cause de congés depuis le 18 octobre 2014 jusqu'au 2 novembre 2014 ; le 29 novembre 2018, M. [GM], ex-directeur de l'agence ONF de [Localité 11], a déclaré : « La situation de M [S] n'a pas du tout été telle qu'elle nécessitait une telle mesure, rien de disciplinaire alors que M [L] relève du disciplinaire. ».
Il soutient que dans l'annexe 1, une partie des déclarations reprises par MM. [J] et [H] n'existe pas.
M. [S] souligne qu'il n'avait aucun problème avec ses collègues jusqu'au courant de l'année 2015 lorsqu'il a constaté que des travaux importants avaient été réalisés sur une partie de forêt dont il avait la surveillance, sans son autorisation mais avec celle de M. [L], à la suite de quoi ce dernier en est venu aux mains avec lui, l'ensemble des collègues ayant pris parti pour M. [L] avant que ne soit mise en 'uvre une procédure d'alerte à son encontre avec établissement d'un rapport par M. [H] en date du 13 avril 2015, sans entretien ou audition des personnes concernées.
Il indique que, du fait des déclarations mensongères dans le rapport du 1er juin 2015 de MM. [E] [N], [BS] [L], [O] [X], [R] [C], [Z] [G], [F] [T], [P] [KI] et [DP] [I] et des déclarations mensongères et des écrits de MM. [U] [J] et [K] [H], sa mère et lui ont subi des préjudices d'ordres divers qu'il décrit, dont il justifie et qu'il chiffre.
Il argue de ce que les fautes à l'origine du préjudice sont avérées et, sur ce point, fait état :
de « griefs » à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] :
évocation de l'existence d'un harcèlement qu'il conteste faisant subsidiairement valoir que c'est lui qui a été victime d'une tentative d'agression ; chaque déclaration de ses adversaires au §1 « M. [L] se sent harcelé et en souffre » a fait l'objet d'une réponse démontrant leur mauvaise foi et/ou mensonge,
autres reproches mentionnés à son encontre dans l'annexe n° 1 qu'il conteste à savoir :
son isolement lequel, au demeurant, témoigne de ce qu'il n'a pas pu faire du harcèlement et impacter ses ex-collègues,
fuite de son travail alors que sa non-participation aux martelages de son ex-triage forestier a été décidée lors d'une réunion collective le 30 novembre 2012, avec ses ex-collègues de l'Unité territoriale, sous la présidence de M. [B], directeur d'agence et du responsable de l'UT de [Localité 18] et qu'en compensation, il a fait des « relevés de placettes » en lieu et place, pour raison de santé,
chantage sur la main-d''uvre,
ses méthodes de communication,
sa personnalité,
sa relation avec la hiérarchie : il se dit victime d'un acharnement de la part de l'ONF qui l'a licencié à trois reprises et l'a muté à deux reprises, ces licenciements et mutations ayant été annulés,
sur son utilisation de la loi qui serait reprochable,
de « griefs » contre les enquêteurs, MM. [K] [H] et [U] [J] constituant la délégation d'enquête ayant rédigé le compte-rendu d'enquête du 1er juin 2015 :
dans lequel les propos malveillants de MM. [Y], [V], [CR] et [TZ], soit-disant repris par MM. [J] et [H], ont été totalement inventés puisqu'ils n'ont pas été entendus par MM. [J] et [H] qui n'ont pas plus rencontré M. [L],
sans porter à la connaissance de tous ses ex-collègues qui ont été entendus le contenu du droit d'alerte,
dans lequel les entretiens ont été indiqués comme étant individuels dans l'« Annexe I : les entretiens classés par thématique » alors qu'ils ne l'ont pas été ; les déclarations de M. [I] qui y figurent sont contradictoires avec celles faites en commission rogatoire, celui-ci relatant des faits dont il ne pouvait avoir connaissance puisqu'antérieurs au début de son apprentissage,
faisant état de faits à son encontre qu'il conteste à propos d'une menace de verbalisation, de pressions pour la réalisation d'un arbitrage, de son inaptitude médicale, signalement de deux chevreuils dans une clôture,
comprenant une « Annexe 2 - essai arbre de causes- UT [Localité 18] » dont il conteste les composantes,
d'une suspicion de coup monté quant à son agression par M. [L].
M. [S] demande l'infirmation du jugement s'agissant des demandes reconventionnelles soulignant, d'une part, que le tribunal a alloué à chacun des défendeurs des indemnités pour préjudice moral et pour procédure abusive, ce qui correspond à indemniser deux fois le même préjudice, et, d'autre part, que les indemnités de 3 000 euros allouées à MM. [H], [N] et [L] ne sont pas justifiées.
Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2025, les intimés demandent à la cour de :
A titre principal, sur appel incident :
le déclarer recevable,
le déclarer bien fondé,
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action,
déclaré toutes les demandes formées par M. [EO] [S] recevables,
et statuant à nouveau sur ces points,
juger irrecevables car prescrites les demandes de M. [S] ainsi que son action,
juger que Mme [S], du fait de son décès, n'a ni intérêt, ni qualité pour agir, en conséquence,
déclarer M. [S] irrecevable à agir sur la totalité de ses demandes ou à tout le moins, à titre subsidiaire, sur les demandes formulées pour le compte de Mme [S],
rejeter l'intégralité de ses demandes,
confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
A titre subsidiaire, sur appel principal
le déclarer mal fondé,
le rejeter,
juger que M. [S] ne rapporte pas la preuve de la faute, du préjudice et du lien de causalité,
juger que les conditions susceptibles d'engager la responsabilité de MM. [N], [L], [H], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G], [T] ne sont pas réunies,
En conséquence,
confirmer le jugement entrepris,
en tout état de cause
débouter M. [EO] [S] de l'intégralité de ses demandes,
condamner M. [EO] [S] à verser à MM. [N], [L], [H], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G], [T] la somme de 2.000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
condamner M. [EO] [S] aux entiers dépens d'appel.
In limine litis, les intimés, se prévalant des dispositions des articles 31 et 117 du code de procédure civile, soulèvent l'irrecevabilité des demandes formulées par M. [S] au nom de sa mère laquelle, étant décédée, n'avait plus la capacité d'être partie à l'action engagée, une assignation délivrée au nom d'une personne décédée étant frappée d'une irrégularité de fond que ne peut couvrir la reprise de l'instance par les héritiers et doit être annulée ainsi que la procédure subséquente.
Ils ajoutent que :
il est de principe que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge,
à l'inverse du conseiller de la mise en état, la cour d'appel dispose du pouvoir d'infirmer ou d'annuler « la décision d'appel » ; les exceptions de procédure non évoquées devant le juge de la mise en état en première instance sont évoquées au fond en cause d'appel et non devant le conseiller de la mise en état.
Ils font encore valoir que :
Mme [D] [S] étant décédée au moment de la délivrance de l'assignation, son préjudice n'existe pas, de sorte que M. [S] n'a ni intérêt, ni qualité à agir pour sa mère défunte,
comme l'assignation a été délivrée aux noms de M. [EO] [S] et de sa mère Mme [D] [S], décédée au moment de la délivrance, celle-ci étant dépourvue de toute qualité à agir, l'assignation ainsi délivrée est frappée d'une irrégularité de fond qui entache sa validité dans son intégralité.
Ils en déduisent que l'assignation doit être considérée comme nulle.
A titre subsidiaire, si « le Tribunal » devait considérer que l'assignation délivrée par M. [EO] [S] n'est pas entachée d'une irrégularité de fond, ils indiquent que l'acte ne vaudrait pas à l'égard de Mme [D] [S].
Sur la prescription, les intimés, se prévalant des dispositions des articles 2224 et 2241 et 2242 du code civil, font valoir que :
il est de principe que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge ; à l'inverse du conseiller de la mise en état, la cour d'appel dispose en effet du pouvoir d'infirmer ou d'annuler la décision d'appel ; les exceptions de procédure non évoquées devant le juge de la mise en état en première instance sont donc évoquées au fond en cause d'appel et non devant le conseiller de la mise en état,
ils ont été assignés par M. [S] par exploit introductif d'instance en date du 30 décembre 2020 ; à la lecture de l'assignation et des conclusions d'appelant, le fait générateur de l'action à l'encontre de M. [N] serait le déclenchement du droit d'alerte initié par M. [H], lequel date du 13 avril 2015 dont M. [S] a eu connaissance depuis la date de son déclenchement, de sorte que toute action découlant des conséquences du droit d'alerte susceptible d'être mise en 'uvre par M. [S] trouve son point de départ à la date du déclenchement du droit d'alerte, soit le 15 avril 2020, ce qui est confirmé notamment par le fait que M. [S] réclame un préjudice à compter du mois d'avril 2015,
si la plainte avec constitution de partie civile déposée le 31 août 2015 auprès du doyen des juges d'instruction de [Localité 11] à l'encontre de M. [H] et contre X laquelle a été déclarée irrecevable le 23 octobre 2015 est susceptible d'interrompre la prescription, il apparaît que MM. [N], [L], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G] et [T] n'ont pas été visés par celle-ci et n'ont pas été mis en cause dans le cadre de la procédure qui s'est soldée par un non-lieu, de sorte qu'à l'encontre de MM. [N], [L], « [A] », [J], « [HL] », [X], [C], [G] et [T], M. [S] n'a pu bénéficier d'aucune interruption de prescription,
le délai de prescription a expiré le 15 avril 2020 voire le 22 mai 2015 ; M. [S] ne saurait prétendre que le point de départ du délai de prescription se situerait au mois de juillet 2016 alors que la lecture de la plainte pour dénonciation calomnieuse qu'il a déposée le 22 mai 2015 permet de constater qu'il avait connaissance des faits prétendument calomnieux, l'ensemble des défendeurs de la présente instance y étant cités.
Sur le fond, les intimés soutiennent que M. [S] ne rapporte pas la preuve que les trois conditions visées par l'article 1240 du code civil sont réunies.
Sur la faute, ils indiquent que :
les procès-verbaux d'audition des agents de l'ONF confirment la légitimité du droit d'alerte et rapportent un malaise au travail lié à son propre comportement, M. [N] ayant fait son travail en qualité de supérieur hiérarchique,
les témoignages font d'ailleurs particulièrement état du pouvoir de nuisance de M. [S],
M. [S] se contente de viser la cotation des pièces de la procédure pénale sans, pour autant, les communiquer.
Ils considèrent que les propos tenus par M. [S] à leur égard sont calomnieux voire diffamatoires.
Sur le préjudice de M. [S] qu'ils contestent, les intimés exposent que M. [S] sollicite deux fois 500 000 euros, une fois pour lui, une fois pour sa mère sans prendre la peine de qualifier son préjudice ni d'apporter une quelconque pièce justificative supplémentaire.
Les intimés demandent une indemnisation de leur préjudice moral, pour procédure abusive.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il est constaté que les intimés, dans la partie « discussion » de leurs conclusions soutiennent que l'assignation délivrée au nom de [D] [S] (née [W]) décédée doit être annulée ainsi que la procédure subséquente ; cependant, force est de constater que les intimés, dans le dispositif de ces mêmes conclusions, ne demandent pas l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les exceptions de procédure tirées d'une prétendue nullité de cette assignation et ne soulèvent pas d'exception de nullité de l'assignation en cause, de sorte que la cour, à défaut d'en être saisie, n'a pas à statuer sur cette prétention.
1. Sur les fins de non-recevoir
Aux termes des dispositions de l'article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement.
Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [S] formulées pour le compte de sa mère, Mme [D] [W]
Les intimés soutiennent que [D] [W] étant décédée à la date de la délivrance de l'assignation aux intimés, elle était irrecevable pour formuler une quelconque demande devant le tribunal, de sorte que M. [S] n'a ni intérêt, ni qualité pour agir pour le compte de sa mère défunte.
Ils se prévalent également du défaut de capacité de [D] [W] au moment de la délivrance de l'assignation dès lors qu'elle était décédée, de sorte que M. [S] ne pouvait valablement assigner au nom de sa mère décédée.
L'acte introductif d'instance a été déposé au tribunal judiciaire de Strasbourg le 13 août 2020 par M. [S] et par Mme [D] [W], sa mère, à fin d'indemnisation.
[D] [W] est décédée le [Date décès 3] 2020 tel que cela résulte de l'extrait du registre des décès produit.
Les intimés qui contestent la recevabilité des demandes de M. [S] au regard des assignations qui leur ont été délivrées ne les produisent pas.
Néanmoins, ils admettent en page 15 de leurs conclusions que M. [S] a assigné au nom de sa mère décédée, ce qui vient confirmer l'exposé de la procédure fait par le premier juge qui indique que les assignations délivrées en décembre 2020 et janvier 2021 l'ont été à la requête de M. [EO] [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité d'ayant-droit de [D] [W], sa mère.
Considérant que l'acte introductif d'instance a été déposé au tribunal par [D] [W] avant son décès, la capacité de celle-ci s'appréciant à cette date ainsi que son intérêt à agir lequel est avéré puisqu'elle se prévalait d'un préjudice personnel, que les assignations ont été délivrées par M. [EO] [S] notamment en sa qualité d'ayant-droit de [D] [W], sa mère, ce dont il justifie par la production d'une attestation d'héritier du 10 janvier 2022, il apparaît que M. [EO] [S] qui a repris l'instance engagée par sa mère décédée a qualité et intérêt pour agir et est donc tout à fait recevable à agir à l'encontre des intimés.
* Au regard des éléments qui précèdent, il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir comme irrecevable.
Ladite fin de non-recevoir est déclarée recevable mais rejetée.
Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [S] du fait de la prescription
Aux termes des dispositions de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
M. [S] invoque comme faits générateurs de responsabilité des intimés, pour les uns, les déclarations mensongères faites à la délégation d'enquête CHSCT dans le rapport du 1er juin 2015 et, pour les autres, les fautes commises lors de la rédaction du compte-rendu de la délégation d'enquête du CHSCT.
Dès lors, le droit d'alerte du 13 avril 2015, contrairement à ce que soutiennent les intimés, ne saurait constituer le point de départ du délai de prescription puisqu'il ne caractérise pas le fait générateur de responsabilité invoqué par M. [S].
Le point de départ du délai de prescription doit donc être fixé à la date à laquelle ce dernier a eu connaissance de la version non anonymisée du compte-rendu de l'enquête de la délégation CHSCT laquelle lui a permis de déterminer l'identité des personnes à l'encontre desquelles il entendait agir.
M. [S] justifie de ce que ses demandes de communication du compte-rendu faites aux administrations compétentes ont été rejetées et que, tant le compte-rendu de la délégation d'enquête au CHSCT que les entretiens ayant eu lieu dans ce cadre, ont été portés à sa connaissance au cours de la procédure le concernant ayant eu lieu devant le tribunal administratif de Strasbourg qui en a reçu communication le 4 juillet 2016. L'analyse de ces documents permettant de constater qu'à cette date, ils étaient encore anonymisés, il s'en déduit que, à défaut de preuve contraire, M. [S] n'a nécessairement eu communication d'un exemplaire non anonymisé de ces documents qu'après le 4 juillet 2016, de sorte qu'à la date de l'acte introductif de l'instance devant le tribunal judiciaire de Strasbourg, soit le 13 août 2020, l'action de M. [S] n'était pas prescrite et ses demandes s'avèrent donc recevables.
* Au regard des éléments qui précèdent, il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir comme irrecevable.
Ladite fin de non-recevoir est déclarée recevable mais rejetée.
2. Sur les demandes en indemnisation de M. [S]
Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il appartient à M. [S] de prouver la faute des personnes dont il invoque la responsabilité, l'existence d'un préjudice et le lien existant entre cette faute et le préjudice subi.
2.1 Sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI]
M. [S] leur reproche d'avoir fait des déclarations mensongères à la délégation d'enquête CHSCT dans le rapport du 1er juin 2015 et son annexe 1, déclarations qu'il liste dans ses conclusions.
La cour, après avoir procédé à l'analyse de cette liste relève que :
s'agissant du harcèlement professionnel qui lui est reproché à l'égard de M. [BS] [L], M. [S] ne cite pas précisément quelles déclarations sont mensongères et indique contester le harcèlement sans pour autant démontrer le caractère mensonger des déclarations,
le fait que les personnes dont la responsabilité est recherchée par M. [S] n'aient pas parlé de la tentative d'agression dont il a été victime par M. [L] ne caractérise pas une déclaration mensongère mais une omission,
le fait qu'il soit reproché à M. [S] de s'isoler ne démontre pas que les déclarations faites au sujet du harcèlement sont mensongères, ces deux comportements n'étant pas nécessairement exclusifs l'un de l'autre,
sur les autres reproches mentionnés à son encontre dans l'annexe n° 1 à savoir isolement, fuite de son travail, chantage sur la main-d'oeuvre, méthodes de communication, personnalité, relation avec la hiérarchie et utilisation de la loi, force est de relever que le fait que M. [S] ne soit pas en accord avec plusieurs déclarations qui ont été faites par leurs auteurs ne suffit pas à établir leur caractère mensonger ; en outre, ce caractère ne se déduit pas des propos tenus par les mêmes auteurs qui ont été amenés à faire des déclarations dans le cadre de l'instruction dont la teneur qui a été analysée par la cour, ne permet, cependant, pas d'aboutir à une telle conclusion ; M. [S] invoque être victime d'un acharnement de la part de l'ONF, ce qui n'implique pas que les déclarations faites à la délégation sur le point de la hiérarchie soient mensongères.
Dès lors, considérant que les fautes invoquées par M. [S] à l'encontre de MM. [O] [X], [R] [C], [E] [N], [DP] [I], [BS] [L], [Z] [G], [F] [T] et [P] [KI] ne sont pas établies, les demandes formulées de ce chef sont rejetées.
2.2 Sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre de MM. [K] [H] et [U] [J]
M. [S] leur reproche plusieurs fautes commises lors de la procédure d'enquête et dans la rédaction du compte-rendu d'enquête et de son annexe 1.
Il reproche, tout d'abord, aux enquêteurs d'avoir indiqué dans l'annexe 1 que MM. [Y], [TZ], [V] et [CR] ont été entendus en entretien alors que, selon lui, ce n'est pas le cas.
L'annexe 1 qui porte sur les entretiens classés par thématique indique que ces quatre personnes ont été entendues en entretien à savoir le 13 mai 2015 pour M. [Y], le 18 mai 2015 pour M. [TZ], le 19 mai 2015 pour M. [V] et le 27 mai 2015 pour M. [CR].
Ce grief est insuffisamment étayé puisqu'il résulte de l'analyse des procès-verbaux d'audition desdites personnes réalisées par la gendarmerie nationale sur commission rogatoire qu'à la question « A la suite du droit d'alerte, avez-vous été entendu par le comité territorial d'hygiène et sécurité ' » :
- M. [TZ] a répondu « Pas dans mon souvenir. Je me souviens que [K] [H] est venu nous voir en réunion pour nous expliquer la procédure mais je ne me souviens pas d'un entretien ou d'une audition individuellement. », ce qui n'induit pas qu'il n'ait pas eu d'entretien avec la délégation du CHSCT constituée à fin d'enquête, les deux entités étant, au demeurant, distinctes, d'autant que dans sa réponse, M. [TZ] mentionne, néanmoins, l'existence d'une réunion organisée par M. [H] relative à la procédure d'enquête ;
- M. [Y] a répondu « Non. Je ne sais même pas qui faisait partie de ce comité », M. [V] a répondu « Non. » et M. [CR] a répondu : « Non jamais », ce qui n'induit pas qu'ils n'ont pas eu d'entretien avec la délégation du CHSCT constituée à fin d'enquête, les deux entités étant distinctes.
M. [S] reproche ensuite aux enquêteurs :
- de ne pas avoir donné d'information aux personnes entendues en entretien sur le contenu du droit d'alerte. Ce grief n'est pas étayé dès lors que M. [S] ne démontre pas que les enquêteurs avaient l'obligation de fournir cette information ;
- d'avoir procédé à des entretiens qui n'étaient pas individuels : or, ce grief n'apparaît pas étayé puisque tant dans le compte-rendu d'enquête que dans l'annexe 1, il n'est pas indiqué que les entretiens étaient individuels et M. [S] ne démontre pas que les enquêteurs avaient l'obligation de procéder à des entretiens individuels ;
- d'avoir écrit dans la partie « Les faits évoqués » du compte-rendu d'enquête que « Depuis octobre 2014, plusieurs échanges de courriels portés à notre connaissance illustrent les relations entre [VY] [S] et [AP] : « Je te demanderai à compter de ce jour, de ne plus faire débarder des bois de la Ville de [Localité 18], en forêt communale de [Localité 14]. A défaut, je me verrai contraint de verbaliser. Je pense par exemple à la P.2 dont l'exploitation a repris aujourd'hui. (courriel [VY] [S] à [AP] du 27/11/2014.) » ; force est de constater que M. [S] ne conteste pas cette narration des faits mais entend exposer les raisons qui l'ont conduit à adresser ce courriel dont le contenu n'est pas contesté, de sorte qu'il n'existe pas de grief de ce chef ;
- l'arbre des causes qu'ils ont élaboré, faisant état de ce qu'il est en désaccord avec ; cependant, il ne saurait être reproché à la délégation d'enquête d'avoir établi un arbre des causes dans le cadre de la mission qui lui était impartie, étant souligné que M. [S] a eu des occasions d'en contester le contenu, de sorte qu'il n'existe pas de grief de ce chef.
Enfin, M. [S] se demande si la tentative d'agression dont il aurait été victime par M. [BS] [L], ex-collègue, le 30 mars 2015, lors d'une réunion de l'unité territoriale laquelle est passée sous silence par l'ONF ne serait pas un « coup monté ». Cependant, M. [S] ne démontre pas en quoi les deux enquêteurs, lors de la procédure d'enquête, auraient participé à un « coup monté », la tentative d'agression qu'il invoque n'étant, au demeurant, pas établie.
Dès lors, considérant que les fautes invoquées par M. [S] à l'encontre de MM. [K] [H] et [U] [J] ne sont pas établies, ses demandes formulées de ce chef sont rejetées.
Au regard des éléments précédents, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [S] de toutes ses prétentions.
3. Sur les demandes de dommages et intérêts des intimés
3.1 Pour préjudice moral
Le jugement entrepris est confirmé de ce chef puisque c'est avec pertinence qu'il a retenu qu'il résultait des documents produits par les intimés que ceux-ci avaient subi un préjudice moral généré par le comportement fautif de M. [S] qui a agi à leur encontre pour des fautes non démontrées en faisant des demandes indemnitaires exorbitantes, les sommes allouées par le premier juge étant en corrélation avec le préjudice moral subi.
3.2 Pour procédure abusive
Aux termes des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, de légèreté blâmable ou d'erreur grossière équipollente au dol.
La plainte avec constitution de partie civile de M. [S] pour dénonciation calomnieuse n'ayant pas abouti, celui-ci avait le droit légitime de saisir une juridiction civile pour obtenir une éventuelle indemnisation, au demeurant, sur un autre fondement.
Dès lors, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes des intimés sur ce point.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
4. Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.
A hauteur d'appel, M. [S] est condamné aux dépens ainsi qu'à payer à chacun des intimés la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens.
La demande d'indemnité formulée par M. [S] sur ce même fondement est rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 6 décembre 2022 en ce qu'il a :
rejeté comme irrecevables et en tout état de cause infondées les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action ;
condamné M. [EO] [S] à payer à chacun des défendeurs, à savoir à MM. [U] [J], [K] [H], [P] [KI], [E] [N], [BS] [L], [O] [X]. [R] [C], [Z] [G], [F] [T] et [DP] [I], une somme de 1 000 euros pour procédure abusive ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
DECLARE recevables les fins de non-recevoir tirées d'un prétendu défaut de droit à agir de M. [EO] [S] au nom et pour le compte de sa mère décédée et de la prescription de son action mais LES REJETTE ;
REJETTE les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNE M. [EO] [S] aux dépens de la procédure d'appel ;
CONDAMNE M. [EO] [S] à payer à chacun des intimés la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;
REJETTE la demande de M. [EO] [S] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
La greffière, La présidente,