CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 25 septembre 2025, n° 24/11074
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Bnp Paribas Personal Finance (SA)
Défendeur :
Bnp Paribas Personal Finance (SA), Nouvelle Regie Des Jonctions Des Energies De France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Zaza, Me Boulaire, Me Vincensini
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 13 décembre 2012 à son domicile, M. [J] [M] a signé avec la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France (ci-après NRJEF) un bon de commande portant sur une centrale photovoltaïque de 2'960 Wc pour un total de 19 990 euros.
Le montant de l'installation a été porté à 22 490 euros et M. [M] a souscrit auprès de la société Banque Solfea un crédit de ce montant remboursable, après un moratoire de 11 mois, en 121 mensualités de 254 euros hors assurance (soit 278,74 euros avec assurance) incluant des intérêts au taux nominal de 5,37 % soit un TAEG de 5,50 %.
Par avenant du 6 septembre 2015, M. [M] et la banque ont convenu d'un réaménagement du montant dû à cette date de 20 364,71 euros en réduisant le taux nominal à 3,65 % (soit un TAEG de 3,71 %), de sorte que le montant des mensualités a été fixé à compter du 5 octobre 2015 à la somme de 237 euros hors assurance soit 261,74 euros assurance comprise.
Le 28 février 2017, la société Banque Solfea a cédé sa créance à la société BNP Paribas Personal Finance.
Par jugement du 12 novembre 2014, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France et désigné la SCP Moyrand - [K] devenue Selarlu [K] MJ en la personne de Maître [C] [K] en qualité de mandataire liquidateur.
Par actes des 6 et 16 novembre 2022, M. [M] a fait assigner le mandataire liquidateur de la société NRJEF et la société BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de la protection de [Localité 9] en nullité des contrats, condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser les sommes versées par lui, la totalité du prix de vente, une somme à parfaire au titre des intérêts conventionnels et frais payés dans le cadre de l'exécution du contrat, outre des dommages et intérêts et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 22 avril 2024, le juge des contentieux de la protection de [Localité 9] a :
- constaté que l'assignation avait été régulièrement délivrée,
- déclaré irrecevable l'action de M. [M] contre la société BNP Paribas Personal Finance,
- rejeté les demandes de M. [M] contre la Selarl [K] MJ,
- condamné M. [M] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté le surplus des demandes,
- condamné M. [M] aux dépens.
Le premier juge a écarté la demande de nullité de l'assignation délivrée à la Selarlu [K] MJ en qualité de mandataire liquidateur du vendeur.
Sur la prescription de l'action visant la banque, après avoir rappelé les dispositions de l'article 2224 du code civil prévoyant une prescription de cinq ans, le juge a relevé que M. [M] était en mesure de connaître la rentabilité à réception de la première facture d'énergie au plus tard six mois après la livraison laquelle datait du 28 décembre 2012, les factures étant au moins semestrielles. Il a également considéré que la simple lecture du bon de commande permettait de voir qu'il existait des irrégularités manifestes notamment parce que l'acte ne contenait aucune description. Il en a déduit que l'action pour faute contre la banque était prescrite depuis au plus tard le 28 juin 2018.
Sur les demandes visant le mandataire liquidateur, il a ensuite relevé que le juge ne pouvait soulever d'office la prescription de l'action en annulation du bon de commande et que le mandataire liquidateur, absent, ne l'avait pas soulevée.
Il a rejeté la demande d'annulation du contrat de vente fondée sur le dol en retenant que qu'il ne ressortait pas des pièces versées aux débats une promesse d'autofinancement ni que le risque de rentabilité insuffisante lui ait été caché ni que la poursuite d'une économie ait été un élément déterminant pour M. [M].
Il a également rejeté la demande d'annulation du contrat de vente fondée sur la violation des dispositions impératives du code de la consommation en relevant que M. [M] pouvait avoir connaissance par lui-même des irrégularités de nature à entacher le bon de commande et qu'il avait par son comportement démontré sa volonté de confirmer le contrat.
Par déclaration électronique du 12 juin 2024, M. [M] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 28 mars 2025, il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable son action contre la société BNP Paribas Personal Finance, rejeté ses demandes contre la Selarl [K] MJ, l'a condamné à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a rejeté le surplus des demandes et l'a condamné aux dépens,
- de confirmer le jugement pour le surplus,
- statuant à nouveau et y ajoutant,
- de déclarer ses demandes recevables et bien fondées,
- de prononcer la nullité du contrat de vente,
- de mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société NRJEF l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble et dire qu'à défaut de reprise dans un délai déterminé, celle-ci lui demeurera acquise et qu'il pourra alors en disposer librement,
- de prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à lui restituer l'intégralité des mensualités du prêt versées par lui entre les mains de la banque,
- de déclarer que la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea a commis une faute dans le déblocage des fonds à son préjudice devant entraîner la privation de sa créance de restitution,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à lui verser les sommes suivantes au titre des fautes commises :
- 22 490 euros correspondant au montant du capital emprunté, en raison de la privation de sa créance de restitution,
- 11 237,54 euros correspondant au montant des intérêts conventionnels et frais payés par lui à la banque en exécution du prêt souscrit,
- à titre subsidiaire, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea, et - de la condamner à lui rembourser l'ensemble des intérêts versés par lui au titre de l'exécution normale du contrat de prêt affecté en conséquence de la déchéance du droit aux intérêts prononcée et de lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgé desdits intérêts,
- en tout état de cause de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à lui payer les sommes de :
- 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea et la société NRJEF de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à supporter les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de ses uniques conclusions notifiées par voie électronique le 18 novembre 2024, la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea demande à la cour :
- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- y ajoutant, de déclarer irrecevable la demande visant à la déchoir de son droit à intérêts au titre du contrat de crédit,
- à titre subsidiaire pour le cas où la cour déclarerait recevables les demandes de M. [M], de le débouter de l'intégralité de ses demandes,
- subsidiairement, pour le cas où la cour jugerait que sa responsabilité est engagée, de surseoir à statuer sur l'évaluation du préjudice de M. [M] et d'ordonner, au besoin sous astreinte, la production par celui-ci des justificatifs du crédit d'impôt perçu en application des dispositions de l'article 200 quater du code général des impôts dans sa version en vigueur à l'époque de la conclusion du contrat principal, du contrat d'achat par EDF au titre de son obligation d'achat de l'électricité produite et des factures de vente à EDF de l'électricité produite,
- en tout état de cause, de condamner M. [M] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, - de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de Me Edgard Vincensini.
La déclaration d'appel et les conclusions de M. [M] en leur premier état ont été signifiées au mandataire liquidateur de la société venderesse par actes des 5 août et 12 septembre 2024 délivrés à personne morale. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance ont été signifiées au mandataire liquidateur de la société venderesse par acte du 22 novembre 2024 délivré selon les mêmes modalités. Le mandataire liquidateur de la société venderesse n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 mai 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 24 juin 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente conclu le 13 décembre 2012 entre la société NRJEF et M. [M] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat, issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre M. [M] et la société Banque Solfea est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats,
- que l'appel ne porte pas sur le constat de ce que l'assignation avait été régulièrement délivrée et que le jugement doit donc être confirmé sur ce point.
Sur la demande de nullité du contrat de vente
Contrairement à ce qui est développé dans les conclusions de M. [M], le premier juge n'a pas déclaré prescrite l'action contre le vendeur. Le premier juge a même relevé que nul ne soulevait la prescription de cette demande et que lui-même ne pouvait le faire. Il a donc statué au fond et a rejeté les demandes de nullité.
S'agissant d'un contrat lié, la banque aurait pu le faire mais elle demande à titre principal la confirmation du jugement et donc le rejet des demandes de M. [M] et à titre subsidiaire le débouté de M. [M] de ses demandes. La cour doit donc statuer sur les demandes de nullité du contrat de vente sans qu'il y ait lieu de répondre aux moyens développés par M. [M] destinés à contrer une prescription de l'action en nullité du contrat de vente qui n'est pas demandée dans le dispositif des écritures de la banque qui ne mentionne aucune irrecevabilité de la demande de nullité même si celle-ci développe des moyens dans le corps de ses conclusions.
Au titre du dol
M. [M] fait valoir que le contrat de vente est nul car il a été conclu sur la base de pratiques commerciales trompeuses qui, appréhendées sur le terrain du droit commun des contrats, sont constitutives d'un dol. Il affirme avoir signé le contrat suite à la présentation de toute une série de documents commerciaux et de promesses faisant miroiter un important rendement énergétique, permettant de réaliser des économies d'énergie, ainsi que divers avantages permettant de réduire considérablement le coût de l'installation et souligne que ces documents ne lui ont pas été laissés à dessein. Il considère que l'engagement de rentabilité procède de la nature même du contrat, qu'elle est un élément objectif du contrat de vente conclu entre le consommateur et le vendeur d'installations productrices d'énergies renouvelables. Il conteste toute motivation d'ordre écologique et souligne son caractère inesthétique. Il relève que les gains réalisés sont inférieurs aux sommes déboursées, que le vendeur ne pouvait ignorer que l'installation ne produirait jamais les valeurs annoncées notamment grâce à une étude officielle sur l'ensoleillement en France et la production photovoltaïque moyenne par région réalisée à l'initiative de l'Union Européenne, que le vendeur se devait d'analyser et de présenter la rentabilité de son produit, et d'en informer exactement et sincèrement son client alors qu'il a volontairement caché ces données. Il ajoute qu'il ne pouvait ignorer que l'autofinancement promis ne serait jamais atteint.
Il souligne que les parties ont aménagé un report total de la première échéance du prêt d'une durée de 11 mois et que cette clause n'a de sens que parce que l'opération a été présentée et vendue comme prétendument autofinancée dans la mesure où le client devait ainsi commencer à payer les premières échéances de son crédit après avoir pu constater un premier retour sur investissement.
Il se prévaut d'un rapport d'expertise sur investissement établi le 22 juin 2022 et soutient qu'il en résulte que l'installation posée est loin d'être rentable, lui coûtant chaque mois de l'argent, alors même qu'elle devait lui en faire gagner, que les performances promises ne sont pas atteintes.
La banque rétorque que M. [M] se contente de procéder par simples affirmations et n'apporte aucune preuve au soutien de ses allégations et notamment que la société venderesse se serait engagée sur une quelconque rentabilité de l'installation, ni sur l'autofinancement de l'opération souscrite.
Réponse de la cour
L'article 1109 du code civil dans sa version applicable au litige dispose qu'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. Il résulte de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans elle, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
La cour observe toutefois qu'aucun engagement de rentabilité n'est entré dans le champ contractuel, le bon de commande n'évoquant nullement ce point, non plus que celui d'un autofinancement.
Le bien n'est nullement présenté comme un produit financier. Il s'agit d'un simple bon de commande d'une installation devant permettre de produire de l'électricité et de la revendre ce qui est effectivement le cas. Il ne comporte aucun engagement d'autofinancement ou de revenus.
Il n'est pas établi autrement que par les affirmations de M. [M] que ses motivations étaient uniquement financières et n'avaient aucune composante écologique.
M. [M] produit également une "expertise mathématique et financière" réalisée par "Pôle Expert Nord Est". Outre que ce rapport n'a aucun caractère contradictoire, qu'il est établi par une personne dont les qualifications ne sont ni mentionnées ni justifiées, n'est pas signé et procède à des calculs de rentabilité financière à partir de données de production solaire dont l'exactitude ne peut avoir été débattue et la source est inconnue, il prend pour acquis qu'il y aurait une promesse d'autofinancement, ce qui est faux. M. [M] ne verse aux débats aucune facture alors qu'il n'a jamais soutenu que l'installation ne fonctionnait pas. Il ne démontre donc pas le caractère totalement ruineux de l'installation laquelle ne saurait en outre inclure le coût du crédit dont il n'a jamais été prétendu qu'il serait gratuit, le taux de l'emprunt apparaissant clairement sur le contrat. Aucune plaquette ou extrait n'est produit.
Enfin le seul fait de prévoir un report de paiement de la première échéance ne saurait être considéré comme une man'uvre constitutive d'un dol.
Les prétentions de M. [M] relatives à un dol comme l'erreur déterminante qu'il aurait provoqué doivent donc être rejetées. Il convient de confirmer le jugement ayant rejeté la demande à ce titre.
Au titre du non-respect des mentions obligatoires
1- l'existence de causes de nullité formelle
L'article L. 121-23 du code de la consommation en sa version applicable au contrat prévoit que :
"Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes:
1° Noms du fournisseur et du démarcheur,
2° Adresse du fournisseur,
3° Adresse du lieu de conclusion du contrat,
4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,
5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services,
6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L.313-1,
7° Faculté de renonciation prévue à l'article [7]-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26".
M. [M] soutient que les points 4, 5 et 6 n'ont pas été respectés et que le bon de commande ne peut être détaché sans altérer l'intégrité du bon de commande.
La banque s'en rapporte à l'appréciation de la cour sur la nullité formelle du bon de commande mais soutient que seule la production du bon de commande en original peut permettre à la cour de vérifier cette validité et que les conditions générales de vente font partie intégrante du contrat.
Réponse de la cour
S'agissant du point 4, le bon de commande ne comprend strictement aucune description de l'installation et se borne à mentionner « centrale photovoltaïque fourniture, livraison et pose, garantie pièce, main d''uvre et déplacement - 2 960 Wc ». Aucune précision n'est apportée dans les conditions générales. Ceci ne répond pas aux exigences du texte et le bon de commande encourt la nullité de ce chef.
S'agissant du point 5, aucune date ou délai de livraison n'apparaît, que ce soit dans les conditions particulières ou dans les conditions générales. Ceci ne répond pas aux exigences du texte et le bon de commande encourt la nullité de ce chef.
S'agissant du point 6, le prix figure de même que les modalités de financement à crédit, le nombre des mensualités, leur montant, le taux nominal et le TAEG. Le fait que M. [M] ait choisi d'emprunter davantage pour financer des « abris » dont on ne sait par qui ils ont été posés et dont il ne dit rien ne saurait entraîner l'annulation de ce bon de commande.
Enfin s'agissant du formulaire de rétractation, M. [M] ne produit pas l'original du bon de commande mais une copie en noir et blanc et affirme que le bon de rétractation se trouve au dos de la première page. Or il résulte de ses propres écritures qui reproduisent en partie ledit bon de commande en couleur qu'il dispose manifestement de l'original qu'il a volontairement souhaité ne pas produire à la cour alors que ce point était soulevé par la banque de sorte qu'il ne pouvait ignorer l'importance d'avoir à produire cet original et a été en mesure de le faire pour contrer la défense de la banque.
D'autre part la présentation même des quatre feuilles qu'il a photocopiées de manière séparée démontre à l'évidence que le bon de commande était en réalité constitué de 2 feuilles chacune imprimée recto verso, que la première feuille comprenait la mention de la centrale photovoltaïque au recto et au verso les signatures et le mode de paiement tandis que la seconde feuille comprenait au recto les conditions générales de vente et au verso le bon de rétractation et la reproduction des articles du code de la consommation. Ceci résulte notamment du fait que sur cette feuille, les conditions générales de vente ont été décalées vers le bas laissant ainsi en haut une partie vierge qui correspond exactement à la taille du bon de rétractation qui se trouve en haut de l'autre côté.
Ainsi ledit bon ne se trouve pas au verso de la page 1 et son utilisation n'aurait amputé le bon de commande que d'une partie vierge de la feuille reproduisant les conditions générales.
M. [M] doit donc être débouté sur ce point.
2- La confirmation
Par application des dispositions de l'article 1182 du code civil dans sa version applicable au litige, il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.
M. [M] conteste avoir confirmé l'acte entaché d'irrégularités faute de connaissance des vices affectant le contrat et se prévaut de la jurisprudence de la Cour de cassation et notamment de son arrêt du 24 juillet 2024.
La banque affirme que M. [M], qui a eu connaissance des vices, a eu la volonté de réparer le vice affectant le contrat principal dès lors qu'il n'a pas usé de sa faculté de rétractation, a accepté la livraison des matériels commandés et laissé le vendeur réaliser les travaux à son domicile, a ensuite expressément demandé à la banque de libérer le montant du crédit entre les mains de l'entreprise venderesse en signant l'attestation de fin de travaux, puis à défaut d'allégation contraire, donné son accord afin qu'ERDF intervienne pour poser le compteur de production en vue du raccordement de l'installation au réseau public de transport et de distribution d'électricité et de sa mise en service, demandé et obtenu le réaménagement de son prêt et a enfin, sauf preuve contraire, perçu un crédit d'impôt conformément aux dispositions de l'article 200 quater du code général des impôts dans sa version applicable à l'époque des faits.
Réponse de la cour
Le bon de commande litigieux reproduit le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation tel qu'exigé par le texte susvisé de sorte que l'acquéreur était parfaitement informé dès la signature du contrat de la réglementation applicable et se trouvait par conséquent en mesure d'apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.
Pour autant, depuis un arrêt rendu le 24 janvier 2024 (pourvoi n° 22-15.199), la première chambre civile de la Cour de cassation estime désormais que la reproduction même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement, ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l'article 9 de cette ordonnance aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.
Aucun acte ultérieur ne révèle en l'espèce la volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause nonobstant le fait que l'acquéreur ait laissé le vendeur procéder à l'installation des panneaux photovoltaïques, qu'il ait réceptionné l'installation sans émettre de réserve et sollicité de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur.
Partant, la nullité relative encourue ne se trouve pas couverte. Le contrat doit donc être annulé et le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité formelle.
Sur les conséquences de la nullité du contrat de vente
Sur la vente
Les contrats étant anéantis, il convient de replacer les parties dans leur état antérieur à la conclusion du contrat de vente.
Il convient donc de dire que M. [M] devra laisser à la disposition de la Selarlu [K] MJ en la personne de Maître [C] [K] agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société NRJEF après avoir convenu d'un rendez-vous avec lui de venir, à ses frais, effectuer le démontage et l'enlèvement de l'ensemble de l'installation photovoltaïque et ce dans un délai de 60 jours calendaires à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et de dire que faute pour elle de s'être exécutée à compter du 61e jour suivant la date de signification de l'arrêt à intervenir, elle sera réputée avoir abandonné l'entière propriété de la centrale photovoltaïque à M. [M] qui sera alors libre de la conserver.
S'agissant du contrat de crédit et de la responsabilité de la société BNP Paribas Personal Finance
La banque qui entend voir confirmer le jugement n'oppose la prescription qu'à l'action en responsabilité formée contre elle.
En application de l'article L. 311-32 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Dès lors l'annulation du contrat de crédit doit être prononcée comme conséquence de celle du contrat de vente et elle entraîne la restitution par le prêteur des sommes qui lui ont été versées par l'emprunteur ce qu'il convient d'ordonner étant au demeurant observé qu'il s'agit d'une simple conséquence de l'annulation du contrat de vente et qu'aucune prescription ne peut être opposée de manière autonome à cette conséquence qui revêt un caractère d'automaticité. Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a de manière globale déclaré irrecevable l'action de M. [M] contre la société BNP Paribas Personal Finance.
M. [M] réclame à ce titre la somme de 11 237,54 euros mais n'apporte aucune justification à ce montant, son dossier étant dépourvu de toute pièce à cet égard. Il y a donc uniquement lieu de condamner la banque à lui rembourser toutes les sommes versées en exécution du contrat de crédit.
Elle entraîne également la restitution par l'emprunteur du capital emprunté. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute. Cette demande est donc fondée sur la responsabilité de la banque. M. [M] fait valoir en substance que la banque aurait dû relever les causes de nullité et ne pas débloquer les fonds et que la banque a en outre commis une faute supplémentaire en débloquant les fonds sur la foi d'un document insuffisamment précis pour établir la réalité et la complétude des travaux et qu'elle s'est rendue enfin complice du dol du vendeur.
Or la banque qui demande la confirmation du jugement qui a déclaré cette demande irrecevable comme prescrite oppose la prescription sur ce point à M. [M], considérant que le point de départ de la prescription s'agissant de la nullité formelle est la date de signature du bon de commande et que celle concernant le déblocage des fonds est celle de la date dudit déblocage. Elle ajoute que le dol éventuel est prescrit et non démontré.
M. [M] fait valoir que si le contrat a été conclu le 13 décembre 2012, il est un consommateur profane et :
- qu'il n'est pas en mesure de déceler par lui-même les irrégularités dénoncées,
- qu'il résulte clairement de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quinquennale extinctive de droit commun n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice mais que par principe ce point de départ doit être reporté à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître, la loi présumant que le justiciable a nécessairement et légitimement ignoré les faits qui lui permettent d'agir, et se prévaut à cet égard d'une consultation des Professeurs [E] [D] et [F] [U] ainsi que d'une formule du Professeur [O] selon laquelle le délai de prescription doit être un délai utile,
- que dès lors le point de départ ne peut être que le moment où le titulaire du droit d'agir a eu effectivement connaissance non seulement du préjudice subi et ce dans toute son ampleur, ou de son aggravation, mais encore de surcroît du fait générateur de responsabilité, et que c'est à la banque de le démontrer,
- que doit s'appliquer la jurisprudence relative à la confirmation, soulignant que dès lors que la Cour de cassation reconnaît que la reproduction des articles relatifs à la nullité ne suffit pas à permettre au consommateur de connaître les causes de nullité affectant l'acte et de le confirmer, le même raisonnement doit être retenu en ce qui concerne le point de départ de la prescription, que c'est ce qui a d'ailleurs été fait par un arrêt du 25 mars 2025,
- que dès lors le point de départ de la prescription ne peut donc être, en matière de nullité formelle, la date de la signature du contrat d'autant que la banque ne lui a pas signalé les causes de nullité, ce qu'il lui appartenait pourtant de faire,
- qu'aucune prescription ne saurait lui être opposée.
Réponse de la cour
Selon l'article 2224 code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Les moyens développés par M. [M] concerne la prescription de l'action en nullité et non celle de l'action en responsabilité contre la banque. Or seule l'action en responsabilité est ici concernée.
M. [M] a engagé l'instance contre la banque au mois de novembre 2022 et lui reproche donc de n'avoir pas signalé les causes de nullité et d'avoir accepté de financer un contrat nul comme d'avoir débloqué les fonds sur la foi d'un document signé par lui qui n'était pas assez précis. Le point de départ de son action en responsabilité est donc au plus tard la date à laquelle elle a débloqué les fonds.
Le déblocage des fonds est intervenu à une date qui n'est pas connue mais qui est antérieure de plus de cinq ans à l'introduction de l'action contre la banque, étant observé que M. [M] l'admet et qu'il a signé la demande de déblocage des fonds le 21 décembre 2012. Il a ensuite remboursé le crédit la banque ne faisant pas état d'un impayé. Dès lors, il ne peut se prévaloir d'aucune cause de report du point de départ de la prescription.
S'agissant de la prétendue complicité de la banque avec le dol du vendeur, celui-ci n'ayant pas été établi, cette demande n'a pas lieu d'être examinée.
L'action en responsabilité contre la banque est donc prescrite et M. [M] doit donc être débouté des demandes tendant à voir priver la banque de sa créance de restitution. Il doit donc être condamné à rembourser le capital à la banque. Il convient de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les autres demandes
M. [M] demande des dommages et intérêts pour le préjudice moral qu'il soutient avoir incontestablement subi, notamment du fait de la prise de conscience d'avoir été dupé par le vendeur et de s'être engagé dans un système qui le contraint sur de nombreuses années, compte tenu de la non-réalisation des performances et du rendement annoncés par le vendeur. Toutefois dès lors qu'il ne démontre pas le dol ni le fait qu'il ait été dupé, il doit être débouté de cette demande.
Du fait de l'annulation des contrats, la demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts contractuels n'a pas lieu d'être examinée.
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles et la banque qui succombe en ce qui concerne la validité des contrats doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Il apparaît en outre équitable de lui faire supporter les frais irrépétibles de M. [M] à hauteur de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il rejeté les demandes de M. [M] contre la Selarl [K] MJ ;
Y ajoutant et statuant à nouveau,
Prononce la nullité du contrat de vente conclu entre M. [J] [M] et la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France ;
Dit que M. [J] [M] devra laisser à la disposition de la Selarlu [K] MJ en la personne de Maître [C] [K] agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France après avoir convenu d'un rendez-vous avec lui de venir, à ses frais, effectuer le démontage et l'enlèvement de l'ensemble de l'installation photovoltaïque, et ce dans un délai de 60 jours calendaires à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et de dire que faute pour elle de s'être exécutée à compter du 61e jour suivant la date de signification de l'arrêt à intervenir, elle sera réputée avoir abandonné l'entière propriété de la centrale photovoltaïque à M. [J] [M] qui sera alors libre de la conserver ;
Constate la nullité subséquente du contrat de crédit affecté d'un montant de 22 490 euros conclu le 13 décembre 2012 entre M. [J] [M] et la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance et renégocié par avenant du 6 septembre 2015 ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à rembourser à M. [J] [M] la totalité des sommes versées par lui en exécution de ce contrat de crédit ;
Déclare irrecevable comme prescrite toute demande en privation de la créance de restitution de la banque ;
Condamne M. [J] [M] à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea la totalité du capital emprunté soit la somme de 22 490 euros ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à payer à M. [J] [M] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea aux dépens de première instance et d'appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.